160 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 25 janvier 2012 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 25 janvier 2012 0 Evaluer la dangerosité est un exercice
aux confins de la médecine et de la criminologie. Il n’est cependant pas rare que le médecin soit amené à réa
liser ce type d’évaluation dans sa pratique quotidienne : patient agressif, situation de violence conjugale, nécessité d’une hospi
talisation non volontaire, signalement de dan
ger pour un mineur, appréciation de l’apti
tude à conduire un véhicule. Tout un chacun possède une certaine compétence dans l’évaluation de la dangerosité d’autrui, car il s’agit d’une fonction mentale innée, héritée de l’évolution,1 et enrichie de l’expérience personnelle. Les connaissances médicales concernant la dangerosité montrent que la maladie psychique, en général, n’augmente pas le risque de comportement violent. Ce
pendant, de nombreuses études longitudi
nales ont mis en évidence que certaines pathologies ou associations pathologiques favorisent les passages à l’acte hétéro
agressifs : multiplication time-life du risque par trois en cas de schizophrénie,2 par quatre en cas de toxicomanie ou d’alcoolisme,3 par sept en cas de personnalité dyssociale,4 par vingt en cas d’association de schizo
phrénie et de toxicodépendance.5 Le médecin ne peut pas toujours se fier exclusivement aux connaissances de son domaine de pratique. En effet, différentes études menées dans la deuxième moitié du XXe siècle ont montré que l’évaluation pure
ment clinique fournit des résultats médio
cres.6 Des instruments visant à permettre
une amélioration du pronostic de compor
tement criminel ont été élaborés. L’un des premiers de ceuxci est l’échelle de Hare (PCLR), mesurant le degré de psychopathie d’un individu.7 Bien qu’elle ne soit pas à l’ori
gine un instrument d’évaluation de la dan
gerosité, l’échelle de Hare est reconnue comme un bon outil prédictif et est large
ment utilisée, y compris à l’appui d’instru
ments plus complexes.
A la même époque, une première géné
ration d’instruments dits actuariels (VRAG, SORAG, STATIC 99) s’est développée.8 Ces outils proposaient des pronostics très pré
cis à long terme. Ils relèvent cependant d’une logique purement statistique et ont été vive
ment critiqués pour leur manque d’adapta
bilité aux cas individuels.9
La deuxième génération, représentée par les instruments cliniques structurés (HCR
20, SVR20, SAVRY), a permis de réintro
duire l’appréciation clinique dans le pro
ces sus d’évaluation mais a abandonné la dimension de précision statistique.10 De nombreux outils, spécifiques de différents types de comportement délictueux, ont été créés. Certains d’entre eux peuvent être très utiles au praticien, comme la SARA11 qui apprécie les risques de répétition des vio
lences conjugales, ou le PCL : YV12 qui per
met d’apprécier la présence de traits psy
chopathiques chez l’adolescent.
Actuellement, des programmes informa
tisés d’évaluation du risque de récidive des comportements délictueux sont proposés,13 mais l’algorithme à la base de leur fonction
nement échappe le plus souvent au non
initié.
Le praticien, au même titre que l’expert, doit conserver une compréhension et une appréciation clinique particulière de cha que cas à évaluer, tout en sachant inclure dans sa réflexion l’aide d’un ou plusieurs instru
ments standardisés.14
Evaluation de la dangerosité
Quadrimed 2012
G. Niveau
Dr Gérard Niveau CURML
Rue Michel-Servet 1 1211 Genève 4 gerard.niveau@hcuge.ch
Rev Med Suisse 2012 ; 8 : 160
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14 Niveau G. Evaluation de la dangerosité et du risque de récidive. Paris : L’Harmattan, 2011.
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