Les kystes simples du rein sont habituels chez les adultes avec une incidence de 33% à l’âge de 60 ans [11]. La majorité des kystes est asymptomatique, toutefois, ils peuvent parfois être responsables d’obstruction des voies urinaires [10].
Dans la dernière décennie, les techniques diagnostiques et théra- peutiques mini-invasives avaient largement supplanté la chirurgie ouverte [14]. Récemment, la chirurgie laparoscopique a été préco- nisée pour le traitement des kystes rénaux symptomatiques par plu- sieurs auteurs [3, 4, 5, 7, 13].
MATERIEL ET METHODES
De janvier 2003 à janvier 2005, 5 patients présentant un kyste rénal para pyélique ont subi un traitement laparoscopique par voie rétro péri- tonéale exclusive. Il s'agissait de 1 homme et de 4 femmes d'un âge moyen de 46,6 ans (extrêmes : 35 - 60 ans). Tous les patients présen- taient des lombalgies du côté du kyste compliquées de coliques néphrétiques. Aucune hématurie n'a été observée. A l'échographie réalisée dans tous les cas et à l’ Uroscanner réalisé dans 3 cas (Figures 1 et 2), il s'agissait de kystes para pyéliques compressifs et unilatéraux dans tous les cas, 2 étaient situés à droite et trois à gauche. Il n’existait pas de kystes bilatéraux. La technique chirurgicale était comme suit : après anesthésie générale, installation des patients en position de lom- botomie avec mise en place d'un billot sous costal. Une incision de 1,5
cm a été réalisée au-dessous de la pointe de la 12ème côte. L'accès au rétro péritoine se faisait grâce à la digito-dissection. L'index introduit dans le rétro péritoine permettait de refouler le péritoine. Nous avons procédé ensuite à la mise en place des trocarts, introduction de deux trocards de 5 mm au niveau de la ligne axillaire antérieure, puis un tro- card de 10 mm au niveau de la ligne axillaire moyenne à 2 centimètres au-dessus de la crête iliaque (optique) et un trocard de 10 mm au niveau de la ligne axillaire postérieure au niveau de l’incision initiale.
Ouverture de la loge rénale avec dissection des adhérences et repérage du kyste puis dissection de celui-ci (Figure 3), aspiration de son conte- nu avec analyse chimique et cytologique, résection du dôme saillant (Figure 4) et mise en place d'un drain aspiratif de Redon qui sera reti- ré le lendemain.
RESULTATS
Dans notre expérience, la résection du dôme saillant a pu être réali- sée sans incidents. Le temps médian de l’intervention était de 55
◆ ARTICLE ORIGINAL Progrès en Urologie (200), 15, 1070-1073
Traitement laparoscopique par voie rétropéritonéale des kystes para-pyéliques symptomatiques (à propos de 5 cas)
Redouane RABII, Mohamed Hicham MEZZOUR, Hicham ESSAKI, Rachid ABOUTAIEB, Ali EL MOUSSAOUI, Abdenbi JOUAL, Fathi MEZIANE
Service d’Urologie, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc
RESUME
Buts: Les kystes rénaux intra-sinusaux ou para pyéliques représentent une forme rare des kystes rénaux, ils s’as- socient le plus souvent aux douleurs lombaires. Les formes symptomatiques peuvent être traitées par une ponc- tion percutanée, mais vu la proximité du hile rénal, le traitement de ces kystes a connu un grand changement.
Ainsi le traitement percutané est devenu contre indiqué vu le nombre de complications qu’il peut engendrer, la chirurgie à ciel ouvert est une technique invasive. Le traitement laparoscopique paraît la technique la plus adap- tée et efficace.
Patients et Méthodes: Nous rapportons cinq cas de kystes para pyéliques tous révélés par des coliques néphré- tiques avec diagnostic échographique et dans trois cas avec complément scanographique. Le traitement a com- porté une approche laparoscopique rétro péritonéale utilisant quatre trocards ayant permis la résection des kys- tes sans complications per opératoires ni conversion.
Résultats: La durée opératoire moyenne était de 55 min avec des extrêmes variant de 40 à 70 minutes. L’évolu- tion post opératoire était favorable avec sortie des patients à J1 voire J2 du post opératoire et absence de récidi- ve après un recul moyen de 6 mois avec des extrêmes de 3 à 15 mois.
Conclusion: Le traitement laparoscopique par voie rétro péritonéale des kystes para pyéliques est une approche efficace, avec une faible morbidité et moins de douleurs post opératoires, courte période de convalescence et bons résultats esthétiques
Mots clés : Kyste rénal, para pyélique, laparoscopie, rétropéritonéoscopie.
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Manuscrit reçu : juin 2005, accepté : septembre 2005
Adresse pour correspondance : Dr. M.H. Mezzour, Service d’Urologie, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc.
e-mail : hmezzour@yahoo.fr
Ref : RABII R., MEZZOUR M.H., ESSAKI H., ABOUTAIEB R., EL MOUSSAOUI A., JOUAL A., MEZIANE F. Prog. Urol., 2005, 15, 1070-1073
mn (40-70 mn). Les pertes sanguines ont été minimes et évaluées à 100 cc (60 cc -140 cc) par aspiration séparée du contenu du kyste.
Aucune complication opératoire n'a été observée. Aucune conver- sion n'a été nécessaire. Tous les patients ont été mis sous antal- giques type Paracétamol pendant 24 heures et ils y avaient bien répondu avec disparition des douleurs lombaires à J1 du post opé- ratoire au plutard. La durée médiane d'hospitalisation a été de 1,4
jours (1 à 2 jours). La reprise de l’activité physique a été estimée en moyenne à 7 jours (5-10 jours). L'étude anatomopathologique a montré l'absence de malignité dans tous les cas. La surveillance était clinique (disparition des algies, …) et radiologique par écho- graphie (à trois mois, six mois puis un an) à la recherche de récidi- ve. Après un recul moyen de 6 mois (3 - 15 mois), tous nos patients étaient asymptomatiques et indemnes de toute récidive à l’échogra- phie de contrôle. Le tableau I résume l’ensemble de nos résultats.
DISCUSSION
Les kystes para pyéliques représentent une variété rare des kystes simples du rein. Leur localisation à proximité du hile rénal et des voies excrétrices supérieures les rend souvent symptomatiques avec des douleurs, des signes obstructifs, infection et lithiase [2, 4, 6, 8].
L’obstruction de la voie excrétrice supérieure constitue l’objectif principal du traitement des kystes rénaux symptomatiques [11]. La prise en charge thérapeutique des kystes symptomatiques peut être accomplie par les méthodes suivantes : La ponction percutanée avec ou sans injection de produit sclérosant, la marsupialisation percuta- née, la kystectomie par voie ouverte ou laparoscopique [2, 4, 8, 11].
Toutefois, la localisation médiane et à proximité des voies excrétri- ces contre indique formellement la ponction avec instillation de produits sclérosants car l’extravasation et la pénétration du produit
Progrès en Urologie (2005), 15, 751-755, 1070-1073
1071 Figure 1. Uroscanner : Aspect scanographique d’un kyste para pyé- lique gauche.
Figure 3. Aspect laparoscopique d’un kyste para pyélique après dis- section (Laparoscopie rétro péritonéale).
Figure 4. Aspect laparoscopique d’un kyste para pyélique après résec- tion du dôme saillant et aspiration du contenu du kyste (Laparosco- pie rétro péritonéale).
Figure 2. Uroscanner (injection de produit de contraste) : Syndrome de masse polaire inférieur gauche avec compression du bassinet et des groupes calicielles moyennes et inférieures.
dans les voies excrétrices peut entraîner des anomalies sévères, ajoutons à cela, les risques non négligeables de lésions vasculaires [1, 11, 12]. La résection percutanée du kyste et la marsupialisation intra rénale constitue un traitement mini invasif avec un risque de lésion du parenchyme ou des voies excrétrices pouvant entraîner un saignement important dans l’espace rétro péritonéal. Récemment, un certain nombre de publications ont avancé que le traitement lapa- roscopique des kystes rénaux symptomatiques était mené avec suc- cès [4, 5, 11]. Cependant, le traitement laparoscopique du kyste para pyélique est plus difficile car le kyste siège près du hile rénal, expliquant la rareté des publications concernant la kystectomie laparoscopique [4, 10, 11].
Il existe deux voies d’abord pour la kystectomie laparoscopique : Transpéritonéale, retro péritonéale [7, 12, 13]. La laparoscopie trans péritonéale permet une bonne exposition de l’espace de travail et une dissection plus complète du hile rénal, elle est indiquée pour le traitement des kystes bilatéraux en un seul temps. Par ailleurs un certain nombre de complications estimées à 7% incluant l'iléus pro- longé (1%), l'hémorragie (3%), la fistule font préférer la voie rétro- péritonéale à la trans-péritonéale. Beaucoup d’auteurs la préconi- sent pour le traitement des kystes para-sinusaux car elle permet en plus un accès direct du hile rénal, et offre de ce fait les avantages de chirurgie laparoscopique et ceux de la voie rétro péritonéale per- mettant d’avoir des suites simples, une courte durée d’hospitalisa- tion et de convalescence, une reprise précoce de l’activité physique avec de bons résultats fonctionnels et esthétiques pour une patholo- gie bénigne [3, 4, 5, 13, 14].
CONCLUSION
Même si le kyste para pyélique présente des difficultés théra- peutiques, la kystectomie laparoscopique constitue une inter- vention hautement efficace avec une morbidité moindre. La voie retropéritonéale est recommandée pour le traitement des kystes parapyéliques car elle offre une bonne visualisation du hile rénal et permet d’éviter les complications de la voie trans- péritonéale.
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Commentaire de Georges Kouri, Urologie, Périgueux
Pathologie rare, le kyste parapyélique compressif, étant donné sa béni- gnité, doit pouvoir bénéficier d’un traitement le moins invasif possible.
La voie d’abord lomboscopique du rein, développée depuis 10 ans, est maintenant standardisée. Les auteurs l’ont utilisée dans le traitement des kystes parapyéliques compliqués. La simplicité du geste, sa faible morbidité, une reprise rapide de l’activité et les bons résultats confir- ment que l’abord lomboscopique s’impose comme la technique de réfé- rence du traitement des kystes compliqués. La simplicité du geste ne doit cependant pas occulter la rareté de l’indication.
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SUMMARY
Retroperitoneal laparoscopic treatment of parapelvic renal cysts:
report of 5 cases.
Objectives: Renal cysts of the sinuses or parapelvic cysts constitute a rare form of renal cyst, usually associated with low back pain. Sympto- matic forms may be treated by percutaneous aspiration, but the treat- ment of these cysts has changed considerably over recent years due to the proximity of the renal hilum. Percutaneous treatment is now contraindicated due to its high complication rate, and open surgery is an invasive technique. Laparoscopy appears to be the most appropria- te and most effective solution.
Progrès en Urologie (2005), 15, 751-755, 1070-1073
1072 Tableau n° 1 : Résultats globaux
Patient Durée Opératoire Pertes Sanguines Durée de prise Délai de disparition Durée Délai de reprise
(mn) (ml) d’antalgiques des douleurs post d’hospitalisation de l’activité
(paracétamol seul) opératoire (Heures) (jours) physique (jours) (jours)
N° 1 40 60 1 H8 1 5
N° 2 55 80 1 H12 1 5
N° 3 50 100 1 H12 1 6
N° 4 70 140 1 H24 2 10
N° 5 60 120 1 H18 2 9
Patients and Methods: The authors report five cases of parapelvic renal cysts all presenting with renal colic and diagnosed by ultrasound, and confirmed by CT in three cases. Treatment consisted of retroperi- toneal laparoscopy using four trocars allowing cyst resection with no intraoperative complications or conversion.
Results: The mean operating time was 55 minutes (range: 40 to 70 minutes). The postoperative course was uneventful and all patients were
discharged on postoperative D1 or D2. No recurrence was observed after a mean follow-up of 6 months (range: 3 to 15 months).
Conclusion: Retroperitoneal laparoscopic treatment of parapelvic renal cysts is an effective approach, with a low morbidity and less pos- toperative pain, a short convalescence period and good cosmetic results.
Key-Words: Renal cyst, parapelvic, retroperitoneal laparoscopy.
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