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Les enjeux et défis de la démocratisation au Burundi. Essai d’analyse et d’interprétation à partir des partis politiques

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Academic year: 2021

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Submitted on 13 Nov 2019

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Essai d’analyse et d’interprétation à partir des partis politiques

Denis Banshimiyubusa

To cite this version:

Denis Banshimiyubusa. Les enjeux et défis de la démocratisation au Burundi. Essai d’analyse et d’interprétation à partir des partis politiques. Science politique. Université Pau et des Pays de l’Adour, 2018. Français. �NNT : 2018PAUU2049�. �tel-02361964�

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ECOLE DOCTORALE 481 SCIENCES SOCIALES ET HUMANITES LABORATOIRE « LES AFRIQUES DANS LE MONDE » (LAM)

LES ENJEUX ET DEFIS DE LA DEMOCRATISATION AU BURUNDI.

ESSAI D’ANALYSE ET D’INTERPRETATION A PARTIR DES PARTIS POLITIQUES.

Thèse de Doctorat en Science Politique

présentée et soutenue par Denis BANSHIMIYUBUSA le 6 décembre 2018

Jury :

Dominique DARBON : Professeur de Science Politique { l’Institut d’Etudes Politiques de Bordeaux (IEP), Rapporteur

Daniel BOURMAUD : Professeur de Science Politique { l’Université de Bordeaux Jean-Pierre Chretien : Directeur de recherche émérite au CNRS

Christian Thibon : Professeur d’Histoire contemporaine { l’Université de Pau et des Pays de l’Adour (UPPA), Directeur de la recherche

Julien NIMUBONA : Professeur de Science politique { l’Université du Burundi (UB), Co-directeur de la recherche

Hervé MAUPEU : Maître de conférences de Science politique, Université de Pau et des Pays de l’Adour (UPPA)

Nicodème BUGWABARI : Professeur Associé d’Histoire, Université du Burundi (UB), Rapporteur

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A toi, très cher regretté père Emile Banshimiyubusa, pour ta rigueur parentale, ta droiture et ton esprit de sagesse à travers ton « Ubushingantahe » ;

A toi, très chère mère Yohana Mwene Ndiracuza, pour toute ta tendresse et ton attachement maternels.

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REMERCIEMENTS

« Chaque thèse a sa propre histoire ! », aime-t-on dire. Le présent travail n’échappe pas { cette règle. Cela est d’autant plus vrai que, comme l’écrivait une ancienne doctorante en 2006, Stéphanie Dechezelles, « la recherche est un océan, la thèse une barque… ». Nous aimerions donc saisir cette opportunité pour exprimer notre profonde gratitude aux personnes et institutions dont la contribution et le soutien nous ont été très précieux dans notre navigation dans cet immense « océan » ; dit autrement, dans la préparation et l’aboutissement de cette thèse.

A tout seigneur tout honneur. Nous tenons à exprimer notre profonde gratitude à notre directeur de thèse M. Christian Thibon, Professeur d’Histoire contemporaine { l’UPPA et directeur de LAM Pau. Sa longue expérience en la matière et ses commentaires lors de nos fréquentes discussions ainsi que ses précieux conseils nous ont permis de tenir le cap et de mener { bon port la présente recherche. Qui plus est, plus qu’un directeur de recherche, C. Thibon s’est remarquablement manifesté également par son côté humain ; c’est lui qui nous a aidé { bénéficier d’une bourse d’étude du gouvernement français via le ministère des affaires étrangères et l’Ambassade de France { Bujumbura. Nous lui réitérons nos sincères remerciements en même temps que nous profitons de cette occasion pour exprimer notre profonde reconnaissance au gouvernement français qui nous a beaucoup soutenu.

Nous sommes très heureux également d’adresser notre expression de gratitude { M.

Julien Nimubona, Professeur de Science politique dans les différentes universités du Burundi, pour avoir accepté de codiriger cette thèse. Et pour cause, il n’en était pas { son coup d’essai – il avait déj{ dirigé notre mémoire de Licence et notre travail de fin d’études pour le DESS. Sa disponibilité, son savoir-faire et son sens humain nous ont été d’une grande valeur pour « contextualiser » le sujet afin de mieux l’aborder.

Bien plus, nous faisons nôtre la pertinente observation de Bernard de Chartres qui comparait souvent les chercheurs à des nains perchés sur les épaules des géants et qui disait que « nous voyons mieux et plus loin que nos prédécesseurs non pas parce que nous avons une vue plus perçante ou supérieure { la leur mais parce qu’ils nous hissent et nous juchent au sommet de leur stature de géants ». C’est pourquoi nous aussi, nous devons de rester reconnaissant envers nos aînés chercheurs ou universitaires qui ont accepté de nous rencontrer pour discuter de notre sujet ; ce qui nous a permis de l’enrichir et l’élargir vers de nouveaux horizons. Parmi ceux-là, je pense particulièrement { l’historienne Christine Deslaurier, la première avec qui nous avons parlé vaguement de notre sujet et qui nous a mis en contact avec notre promoteur de thèse. Jean-Pierre Chrétien nous a, lui aussi, rendu un grand service. Au moins à deux reprises, il nous a accueilli chez lui à la maison et nous a ouvert son immense et riche bibliothèque privée.

Nous avons pleinement profité de ces visites pour discuter avec lui de plusieurs aspects de notre sujet – historique et linguistique, notamment – et avons eu droit à quelques

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conseils et encouragements qui nous ont permis de bien avancer. Nous ne saurions non plus ne pas penser à notre grand ami feu Professeur Jean-Salathiel Muntunutwiwe qui brûlait d’envie de nous voir si vite { ses côtés { l’Université du Burundi. Il nous a beaucoup encouragé et soutenu mais, malheureusement, « l’homme propose et Dieu dispose », il nous a quitté si tôt avant que son souhait ne se réalise – que son âme repose en paix. Nous promettons de lui rester son éternel obligé.

A côté de ces scientifiques, il y a aussi des hommes et des femmes politiques qui nous ont accordé leur précieux temps pour des entretiens au cours desquels ils nous ont livré leurs points de vue ou témoignages. Nous leur remercions infiniment pour leurs contributions combien importantes (voir leur liste non exhaustive en annexe).

Au cours de notre travail de recherche, nous avons été accueilli par plusieurs institutions et laboratoires de recherche. Au personnel de l’Université de Pau et des Pays de l’Adour (UPPA), à celui de Les Afriques dans le Monde (LAM) de Pau et Bordeaux, à celui de l’Institut Français de Recherche en Afrique (IFRA) basé { Nairobi où nous avons effectué notre stage doctoral en mai 2017, à celui de l’Agence Universitaire de la Francophonie (AUF) de Bujumbura, ainsi qu’{ celui de la Bibliothèque centrale de l’UB (campus Mutanga), nous disons grand merci de l’accueil et de la disponibilité qu’ils nous ont réservé.

Avant de terminer ce point des remerciements, nous ne saurions ne pas saluer de manière particuluère l’esprit de fraternité dont nous ont témoigné nos compatriotes burundais lorsque nous traversions des moments durs en France. Ainsi, nous exprimons notre profonde gratitude aux Abbés Honoré Bigirimana et Louis Nyabenda, au Père Venant Ntahonkiriye ainsi qu’{ Monsieur Dacius Kayijuka (Italie) qui, malgré de nombreuses difficultés, ne se sont jamais lassés de nous accompagner et soutenir dans notre cheminement académique en France.

Et last but not least, nous adressons nos sincères remerciements à S. E. Mgr. Gervais Banshimiyubusa, archevêque de Bujumbura, qui n’a rien ménagé pour nous témoigner de ses soutien et accompagnement fraternels tout au long de nos études et travaux de recherche. Toujours au niveau familial, nous nourrissons l’espoir que nos très chers enfants qui ont péniblement mais vaillamment supporté nos nombreuses et répétitives absences en famille suite { nos séjours d’études et de recherches en Europe et en Afrique trouveront satisfaction et réconfort dans l’aboutissement de cette thèse. Mieux qu’un simple travail de recherche, que celui-ci leur apprenne que « la patience est amère mais que ses fruits sont très délicieux » !

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Tableau des principaux sigles et acronymes

Sigles / Acronymes

En toutes lettres ABASA Alliance Burundo-Africaine pour le Salut

ACAT – Burundi Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture au Burundi

ADR-Urunani rw’imvugakuri

Alliance Démocratique pour le Renouveau – Urunani rw’imvugakuri

ALIDE Alliance Libérale Démocrate

ANADDE Alliance Nationale pour le Droit et le Développement APRODEBA Association des Progressistes Démocrates Barundi

APRODH Association Burundaise pour la Protection des Droits Humains et des personnes détenues

APROSOMA Association pour la Promotion Sociale de la Masse (Ruanda)

ASS Afrique Subsaharienne

AV – Intwari Alliance des Vaillants – Intwari

CDP Conseil Des Patriotes

CEA / EAC Communauté Est Africaine / East African Community CENAP Centre d’Alerte et de Prévention des conflits

CENI Commission Electorale Nationale Indépendante CMSN Comité Militaire pour le Salut National

CNC Conseil National de la Communication

CNCCFP Commission Nationale des Comptes de Campagne et des Financements Politiques (France)

CNDD Conseil National pour la Défense de la Démocratie

CNDD-FDD Conseil National pour la Défense de la Démocratie – Front pour la Défense de la Démocratie

COSOME Coalition de la Société Civile pour le Monitoring des Elections

CRISP Centre de Recherche et d’Information Socio-Politique

DNB Démocratie Nationale du Burundi

EALA East African Legislative Assemblee

ESO Ecole des Sous-Officiers

FAB Forces Armées Burundaises

FDC Forces pour le Changement Démocratique

FEDES-Sangira Forum pour l’Equité, le Développement, la Démocratie et la Souveraineté

FNL Forces Nationales pour la Libération

FNL-Icanzo Front National de Libération – Icanzo

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FOCODE Forum pour la Conscience et le Développement FORSC Forum pour le Renforcement de la Société Civile FRODEBU Front pour la Démocratie au Burundi

FROLINA-banyamuryango Front pour la Libération Nationale – Abanyamuryango FUPD Fondation pour l’Unité, la Paix et la Démocratie

GEDEBU Génération Démocratique du Burundi

GEMDEV Groupement Economique Mondial, Tiers-Monde, Développement

GREDMIS Groupe de Réflexion sur les Droits des Minorités Islamiques et Swahilophones

G10 Groupe de dix partis (Tutsi)

G7 Groupe de sept partis (Hutu)

ISCAM Institut Supérieur des Cadres Militaires JEDEBU Jeunesse Démocratique du Burundi

Kaze-FDD Kaze – Front pour la Défense de la Démocratie

LDGL Ligue des Droits de la personne dans la région des Grands Lacs

MIPROBU Mission Internationale de Protection et de Rétablissement de la Confiance au Burundi

MNC Mouvement National Congolais

MRC-Rurenzangemero Mouvement pour la Réhabilitation du Citoyen – Rurenzangemero

MSD Mouvement pour la Solidarité et la Démocratie

MSP-Inkinzo Mouvement Socialiste Panafricaniste – Inkinzo

NADDEBU Nouvelle Alliance pour la Démocratie et le Développement au Burundi

OAG Observatoire de l’Action Gouvernementale

OLUCOME Observatoire de Lutte contre la Corruption et les Malversations Economiques

ONELOPE – Burundi Observatoire National des Elections et des Organisations pour le Progrès

OLRU Ordonnance Législative du Ruanda-Urundi

OSC Organisation de la Société Civile

PACONA Parti pour la Concorde Nationale

PAFE Police de l’Air, des Frontières et des Etrangers PAJUDE Parti pour la Justice et le Développement

PALIPE-Agakiza Parti Libérateur du Peuple Burundais – Agakiza PARENA Parti pour le Redressement National

PARIBU-Intahemana Parti pour le Renouveau Intégral du Burundi – Intahemana

PCC Parti Communiste Chinois

PDC Parti Démocrate Chrétien

(8)

PFNSP Presse de la Fondation Nationale de Sciences Politiques PIEBU-Abanyeshaka Parti pour l’Indépendance Economique du Burundi –

Abanyeshaka

PISC – Burundi Plateforme Intégrale de la Société Civile

PIT Parti Indépendant des Travailleurs

PL Parti Libéral

PML-Abanyamwete Parti pour la Promotion des Masses Laborieuses PMPA Partis et Mouvements Politiques Armés

PMP-Abagenderabanga Parti Monarchiste Parlementaire – Abagenderabanga

PNB Police Nationale du Burundi

PP Parti du Peuple

PPDRR-Abavandimwe Parti pour la Paix, la Démocratie, la Réconciliation et la Reconstruction – Abavandimwe

PRMD-Abahuza Parti pour la Restauration de la Monarchie et le Dialogue- Abahuza

PRP Parti pour la Réconciliation du Peuple

PSD Parti Social Démocrate

PTB Parti des Travailleurs du Burundi

PTD-Twunge urunani Parti des Travailleurs et de la Démocratie – Twunge urunani

RADDES Ralliement pour la Démocratie et le Développement Economique et Social

RADEBU Rassemblement des Démocrates pour le Burundi RFSP Revue Française de Science Politique

RG Résident Général

RIPC Revue Internationale de Politique Comparée

ROI Règlement d’Ordre Intérieur

RPB Rassemblement Populaire du Burundi

RPB-Nturenganywe Rassemblement du Peuple Burundais – Nturenganywe Sangwe-PADER Sangwe – Parti pour la Démocratie et la Réconciliation

SONOVI Société Non Violente

TANU Tanganyika African National Union

UFB Union des Femmes Burundaises

UPD-Zigamibanga Union pour la Paix et la Démocratie – Zigamibanga Parti UPRONA Parti de l’Unité pour le Progrès National

USAID United States Agency for International Development

UTB Union des Travailleurs du Burundi

VPM Voix du Peuple Murundi

(9)

Tableau des tableaux

N° Titres Page

Tableau des principaux sigles et acronymes iv

Tableau des tableaux vii

Tableau des chémas, figures et photos viii

01 Les anciens PMPA légalisés comme partis politiques 54

02 Les différences entre groupe d’intérêts, groupe de pression et lobby 60 03 La catégorisation des ressources humaines des partis 87 04 La matrice à neuf types de ressources politiques selon Lacam 117 05 Les niveaux organisationnels fonctionnels : l’exemple du niveau national

du Parti Communiste Chinois (PCC)

126

06 Typologie des partis selon William Wright 135

07 Les clivages sociaux et systèmes de partis selon Lipset et Rokkan 151 08 Le paradigme de M.S. Lipset et S. Rokkan déroulé dans le temps et tel que

complété par D.-L. Seiler pour les démocraties de l’Union européenne

152 09 Liste des partis politiques au moment de la lutte pour l’indépendance au

Burundi

213 10 Les compositions des comités successifs du Parti UPRONA 222

11 Les réussites au concours national de 1975 à 1978 282

12 Les mouvements clandestins avant l’ouverture démocratique des années 1990

292 13 Les partis politiques du « Renouveau démocratique » des années 1990 343 14 La fréquence des éléments des devises dans les partis des années 1990 349 15 La sociologie des leaders partisans des années 1990 352 16 Extrait des résultats électoraux du 1er juin 1993 suivant les concentrations

ethniques

384 17 Les caractéristiques des deux principaux candidats { l’élection présidentielle

de 1993

396

18 Les partis politiques post-Arusha 478

19 La nature des sigles des partis politiques burundais au 31 décembres 2013 481 20 Le nombre de partis politiques créés année par année 494 21 Les députés proposés par les partis politiques non représentés en 1993 au

cours de la transition post-Arusha

500 22 Les références présidentielles selon l’ethnie ({ l’échelle nationale) 508 23 L’emprise du CNDD-FDD sur les différents assemblées et conseils depuis 2005 536 24 Les résultats électoraux de la coalition RANAC en 2015 545 25 Liste des 22 députés chassés et leurs « partis politiques de refuge » 588 26 Les gouverneurs nommés par le gouvernement FRODEBU en juillet 1993 619

27 La délégation militaire chez Mandela en juin 2001 646

28 Eléments favorables et défavorables de la continuité ou de la discontinuité des gouvernants sur la pérénité des nouvelles démocraties

686

(10)

Tableau des figures, encadrés et photos

A. LES FIGURES

Ordre Titres Page

Figure n°01 Champ lexical du terme « militantisme » 82

Figure n°02 Cercles concentriques selon les degrés de participation ou de militance

84

Figure n°03 Triangle de l’engagement militant 89

Figure n°04 Processus macro-historique de la formation des partis politiques selon la théorie de Lipset et Rokkan

155 Figure n°05 L’en-tête du parti CNDD-FDD avec ses contradictions 437

B. LES ENCADRES

Ordre Titre Page

N°01 Le PCC et le CNDD-FDD : « Que nos relations soient éternelles ! » 699 C. LES PHOTOS

Ordre Titre page

Photo n°01 Conducteurs de tuk-tuk, taxi-motos et taxi-vélos pendant une manifestation du parti au pouvoir, le CNDD-FDD 521 Photo n°02 Les Imbonerakure du CNDD-FDD en tenue semi-militaire au défilé

paramilitaire 523

Photo n°03 Un Imbonerakure ancien combattant en tenue semi-militaire 524 Photo n°04 Un « monument » du CNDD-FDD portant les dates des crises

meurtrières de l’histoire du Burundi avec des écriteaux y relatifs 531 Photo n°05 La réunification des branches UPD Feruzi-Mugwengezo 592 Photo n°06 Le trio Nkurunziza – Nshimirimana – Simbananiye en prière 688 Photo n°07 La délégation du PCC à la Permanance nationale du CNDD-FDD 698

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SOMMAIRE

Remerciements………. iii

Tableau des principaux sigles et acronymes……….v

Tableau des tableaux………viii

Tableau des chémas, figures et photos………...ix

Sommaire……….x

Carte du Burundi………...xii

INTRODUCTION GENERALE………1

IERE PARTIE : LE CADRE GENERAL ET CONCEPTUEL : PARTIS POLITIQUES, IDEOLOGIES POLITIQUES, MILITANTISME PARTISAN ET PROCESSUS DE DEMOCRATISATION EN ASS………...………..25

TITRE 1. LES PARTIS POLITIQUES, IDEOLOGIES POLITIQUES ET MILITANTISME PARTISAN DANS LES REGIMES POLITIQUES……….27

Chapitre 1. Les notions de partis et d’idéologies politiques………..29

Chapitre 2. La militance partisane ou le pourquoi de l’engagement au sein des partis…...79

Chapitre 3. La relation leaders partisans – militants ou le conflit des lignes directrices au sein du parti………..109

TITRE 2. HISTORICITE ET SPECIFICITES DU PHENOMENE PARTISAN EN AFRIQUE….139 Chapitre 4. L’institutionnalisation des partis politiques en Afrique : un phénomène exporté ou importé ?...140

Chapitre 5. Du militantisme politique en Afrique : du pluralisme éphémère à celui du « renouveau démocratique »….……….167

Conclusion partielle……….206

IIEME PARTIE. CONTEXTE HISTORIQUE ET GENERATIONS DES PARTIS POLITIQUES AU BURUNDI………207

TITRE 1. LES PARTIS POLITIQUES DES ANNEES 1960-1990 AU BURUNDI : DES DEBUTS ET DES EVOLUTIONS DU MILTANTISME POLITIQUE MITIGES………..209

Chapitre 6. Les origines et premiers épisodes du phénomène partisan burundais………210

Chapitre 7. Les étapes préparatoires aux « retours sur un objet rejeté » : des polémiques et des peurs………...291

(12)

Chapitre 8. La compétition électorale de juin 1993 et la densification des clivages

dominants existants……….342

TITRE 2. LA CRISE D’OCTOBRE 1993 : PARTIS POLITIQUES COMME AGENTS DE CONFLIT ET ACTEURS DE SA RESOLUTION………..401

Chapitre 9. Le coup d’Etat d’octobre 1993 et exacerbation du militantisme identitaire ethnopartisan.………..………...403

Chapitre 10. Le tournant du 25 juillet 1996 et ses incidences sur le processus démocratique………...455

Conclusion partielle……….484

3EME PARTIE. PARTIS POLITIQUES ET SYSTEMES POLITIQUES BURUNDAIS………485

TITRE 1 : PHENOMENE PARTISAN ET SYSTEME DEMOCRATIQUE AU BURUNDI……….488

Chapitre11. Les forces et faiblesses des partis politiques burundais ….………489

Chapitre 12. Les partis institutionnels théâtres des dissensions et scissions internes….547 TITRE 2. L’ECHEC DES PROCESSUS DE DEMOCRATISATION PAR VOIE DES PARTIS POLITIQUES : LA CULTURE POLITIQUE DES LEADERS EN JEU ?...610

Chapitre 13. La précipitation des processus et le choc des représentations ethnopolitiques : cas de 1993 ...611

Chapitre 14. Le CNDD-FDD face aux objectifs de la démocratisation de l’Accord d’Arusha…………...648

Conclusion partielle……….702

CONCLUSION GENERALE……….703

BIBLIOGRAPHIE……….711

TABLE DES MATIERES………...753

ANNEXES………768

(13)

Carte du Burundi

Source : http://www.carte-du-monde.net/pays-1117-carte-burundi.html, consulté le 11 mars 2018.

(14)

INTRODUCTION GENERALE

« Dans l’état de société, tout doit être dit librement parce que, non seulement l’Etat n’a rien { craindre { ce que tout soit dit, mais encore a un grand intérêt { ce que ce soit dit. Il n’a rien { craindre { ce que tout soit dit ; car, s’il est vrai qu’une pensée s’irrite par sa contradiction, il est bien plus vrai encore qu’elle s’irrite et s’aigrit par la solitude et l’impossibilité de se répandre. De plus, l’Etat a même des avantages { retirer de la liberté de la parole ; car il est bon que tous les avis soient ouverts pour choisir le meilleur ou le moins mauvais ».

Emile Faguet, Le libéralisme, Paris, 1903.

Les partis politiques au sens où nous les connaissons aujourd’hui existent depuis le XIXe siècle. De l’Occident où ils sont apparus d’abord, les partis politiques se sont répandus dans les sociétés non occidentales au cours du XXe siècle. Aujourd’hui, champ de recherche classique et « terrain de prédilection de la science politique », l’étude des partis constitue l’un des secteurs les plus avancés de la science politique car, en effet, lorsque cette dernière s’est dégagée de l’analyse juridique des institutions, « la première chose qui apparaissait aux regards était les partis »1. Cette étude qui a commencé avec l’apparition de la démocratie de masse reste marquée néanmoins par un double héritage qui associe l’analyse « réaliste » de type organisationnel et une réflexion sur la forme idéale que devraient prendre les partis. De fait, « l’analyse réaliste des partis politiques, qui part de l’observation concrète des pratiques partisanes plutôt que de ce que les partis devraient être ou des fonctions qu’ils sont censés remplir, n’a pas attendu l’émergence institutionnelle de la science politique »2. Elle s’est développée entre la seconde moitié du XIXe siècle et le premier quart du XXe siècle, période qui correspond au développement de la démocratie de masse et durant laquelle les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, puis l’Allemagne, la Belgique et enfin la France et l’Italie voient apparaître des organisations durables, de caractère fédéral ou confédéral ayant pour objectif primordial la conquête pacifique des postes du pouvoir politique par la voie des élections3.

Sur le continent africain, les premières formations politiques voient le jour autour des années 1950 à la veille des indépendances de la plupart des pays encore sous domination étrangère. Alors que cette première génération avait comme but principal la lutte pour l’indépendance, après l’avoir acquise, le multipartisme a cédé la place au monopartisme qui a régné sur la quasi-totalité de ces pays jusqu’{ la fin des années 1980, période du

1 Jean-Marie Denquin, Science politique, Paris, PUF, 1996, p. 291.

2 Frédéric Sawicki, « La science politique et l’étude des partis politiques », in Cahiers Français, Découverte de la Science Politique, n°276, mai-juin 1996, pp. 51-59, p. 51.

3 Idem.

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« renouveau démocratique » en Afrique qui a renoué avec le pluralisme politique. Le Burundi qui fait partie de cet ensemble de l’Afrique subsaharienne a connu un phénomène partisan qui a suivi presque la même trajectoire que ses confrères africains.

1. Problématique et construction des hypothèses de travail

Au Burundi, le phénomène partisan n’est pas aussi vieux que dans la plupart des pays occidentaux. Ayant vu le jour « brusquement » à la faveur du mouvement de l’indépendance, les partis politiques sont comme une « génération spontanée ». En effet, c’est effectivement au cours de la lutte pour son indépendance obtenue le 1er juillet 1962 que le Burundi, { l’instar de la plupart d’autres pays africains, s’est initié au militantisme partisan. Durant cette période, feignant d’ignorer la main de l’autorité coloniale dans la prolifération de ces premières organisations politiques, l’on peut affirmer que l’engouement des Burundais envers les partis politiques fut tellement important qu’en espace de dix-huit mois, au moins 25 partis politiques furent créés. Au regard de ses résultats, ce multipartisme « naissant » connut des succès considérables malgré son manque d’expérience ainsi que les bâtons que ne cessait de lui mettre dans les roues la puissance tutélaire belge. L’Unité et Progrès National du Burundi (UPRONA), parfois appelé également le Parti des « Inséparables » du Burundi, qui réclamait l’indépendance { brève échéance et qui se voulait rassembleur de tous les Burundais sans distinctions ethnique, sociale ou religieuse, gagne les élections de septembre 1961 devant conduire le Burundi à son indépendance. Cependant, à côté de ce multipartisme en apparence bien entamé et réussi et malgré cette volonté manifeste de rassembler tous les Burundais qui animait certains partis, les divisions identitaires, principalement ethniques, régionalistes, et pourquoi pas claniques, guettaient et minaient les débuts de ce militantisme politique (multi)partisan au point quelles n’ont pas tardé { produire leurs effets dans la vie sociale et politique du Burundi colonial et surtout post colonial. D’ailleurs, très rapidement et seulement quatre ans après son accession { l’indépendance, le Burundi « se débarrasse » de ce multipartisme encombrant – qui, par ailleurs et en réalité, n’existait encore que presque de nom – et noue avec le monopartisme, rejoignant ainsi la plupart de ses confrères africains qui l’avaient chouchouté et adopté quelques années avant lui. Il faudra attendre près de trois décennies pour voir la quatrième Constitution du Burundi réintroduire le système multipartisan en mars 1992, sous les pressions externes relayées par les réclamations internes. Cette période de la deuxième génération du multipartisme burundais coïncide avec le mouvement de la démocratisation qui a secoué les

« autoritarismes monopartites » de l’Afrique subsaharienne et qui visait { réformer l’Etat africain en crise4. Le monopartisme qui avait caractérisé la gestion de la plupart de ces

4 Sur ce sujet de la crise de l’Etat en Afrique, se référer entre autres à Richard Sandbrook, « Personnalisation du pouvoir et stagnation capitaliste. L’Etat africain en crise », in Politique Africaine, n°26, juin 1987, pp. 15- 40 ; Jean-François Médard, « L’Etat néo-patrimonial en Afrique noire », in Jean-François Médard, (éd.), Etats d’Afrique noire, formation, mécanismes et crises, Paris, Karthala, 1991 ; Martin Kuengienda, Crise de l’Etat en Afrique et Modernité politique en question, Paris, L’Harmattan, 2008 ; Achille Mbembe, De la postcolonie.

Essai sur l’imaginaire politique dans l’Afrique contemporaine, Paris, Karthala, 2000 ; George Klay Kieh Jr (ed.), Beyond state failure and collapse. Making the state relevant in Africa, Plymouth, Lexington Books, 2007 ; Guy Nicolas, « Crise de l’Etat et affirmation ethnique en Afrique noire contemporaine », in RFSP, Crise et développement en Afrique noire contemporaine, 22ème année, n°5, 1972, pp. 1017-1048 ; Nicolas van De

(16)

Etats devait endosser la responsabilité de cette crise de l’Etat et céder le terrain { un autre type de gestion étatique censé améliorer les conditions de vie des populations africaines.

Comme l’a tracé le sommet de la francophonie de La Baule, il s’agissait d’adopter la démocratie qui va de pair avec plusieurs partis politiques ; une (bonne) gouvernance qui reconnaît au citoyen sa place et sa participation dans la gestion de la res publica et qui est marquée par :

« - de nouvelles formules pour définir la démocratie ; - des décors nouveaux pour illustrer la démocratie ; - de nouvelles images pour symboliser la démocratie ; - enfin de nouvelles attitudes en vivant la démocratie »5.

Comme le fait remarquer Jean-François Bayart, « une légende plaisante veut que la conférence de La Baule, en juin 1990, ait propulsé l’Afrique dans l’ère du multipartisme, parfois à son corps défendant »6. Et pour cause, « on ne change pas la société par décret », selon le titre de l’ouvrage célèbre du sociologue français Michel Crozier7. La transitologie qui consistait { passer de l’Etat autoritaire { l’Etat démocratique a, dans la plupart de cas, engendré les « effets pervers »8 débouchant tantôt sur la perpétuation des anciennes élites en place, tantôt { l’adoption d’un multipartisme de façade, ou encore aux conflits armés suite au refus de l’ancienne classe politique de quitter le pouvoir après les élections démocratiques.

Walle, « Sortir du néopatrimonialisme : démocratie et clientélisme dans l’Afrique contemporaine », in Daniel C. Bach et Mamoudou Gazibo (dir.), L’Etat néopatrimonial. Genèse et trajectoires contemporaines, Ottawa, Presses de l’Université d’Otatwa, 2011, pp. 153-174 ; etc.

5 Nous trouvons que ce schéma et ces nouveaux outils s’inspirent largement de la conception classique de la démocratie basée sur la notion de polyarchie développée par Robert Dahl. En effet, selon ce dernier, il y a démocratie « quand il existe un système de partis qui garantit les responsabilités d’élection et d’alternance ; quand les gouvernements et les parlements sont élus directement ou indirectement par les citoyens ; quand il existe des élections au suffrage universel, libres, saines, et le droit à se présenter, quand il existe des garanties des libertés civiles, liberté d’expression, liberté d’association, droit { l’information alternative, etc., pour que le droit de choisir soit effectif [et] quand il existe des garanties institutionnelles pour organiser les élections périodiquement, honnêtement et où tous les participants acceptent les résultats » ; voir Robert Dahl, Qui gouverne ?, Paris, Armand-colin, 1974, cité par Daniel Ponce Vasquez, « La participation citoyenne : un lien de qualité entre la démocratie et la gouvernance. Une vision depuis la région de Mexico – Amérique Latine », in HCCI, Les non-dits de la bonne gouvernance. Pour un débat politique sur la pauvreté et la gouvernance, Paris, Karthala, 2001, pp. 155-171, p. 161.

6 Jean-François Bayart, « La politique africaine de la France. Ni le Zambèze ni la Corèze », in Le Monde, du 5 mars 1992.

7 Michel Crozier, On ne change pas la société par décret, Paris, Fayard, 1979.

8 Au sens Boudonien de l’expression. L’effet pervers se définit comme une action non voulue par un individu, une institution quelconque ou bien l’ensemble d’une société. Pour le sociologue français Raymon Boudon, « on peut dire qu’il y a effet pervers lorsque deux individus (ou plus), en recherchant un objectif donné, engendrent un état de choses non recherché et qui peut être indésirable du point de vue de chacun des deux, soit de l’un deux ». Au niveau individuel, on peut classer les embouteillages et les files d’attente comme des effets pervers ; l’agrégation des désirs personnels aboutit dans ces deux cas { des effets indésirables pour l’ensemble des usagers. Au niveau institutionnel, l’augmentation de la demande d’éducation provoque une hausse des coûts personnels et collectifs et une dévalorisation générale des diplômes. Au niveau de l’ensemble d’une société, l’inflation est un bel exemple d’effet pervers ; tous les membres de la société, d’une façon directe ou indirecte, alimentent, sans se consulter, l’ennemi socio-économique le plus important des sociétés industrielles ; voir Raymon Boudon, Effets pervers et ordre social, Paris, PUF, 1977 ; Jean-Marie Albertini et André Viau, L’inflation, Paris, Seuil, 1975.

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Au Burundi, c’est dans cette dernière logique que s’insèrent la crise politico- institutionnelle consécutive { l’assassinat du premier président démocratiquement élu Melchior Ndadaye et de certains de ses plus proches collaborateurs ainsi que la guerre civile aux allures ethniques qui s’en est suivie. Elles ont sapé sérieusement l’élan de ce renouveau militant qui venait de redémarrer dans un contexte de processus de démocratisation et les réflexes identitaires et autoritaires reprirent leurs droits. La signature de l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation nationale intervenue en août 2000 – malgré ses tares – vint redonner de l’espoir aux Burundais meurtris par de longues années de pouvoir autoritaire, aux mains des militaires qui se sont succédé par des coups d’Etat. Concrètement, aux yeux de la plupart des observateurs de la scène politique burundaise, après la Constitution de mars 1992 qui n’a pas fait long feu et une courte « vitrine de la démocratie »9, cet Accord est venu (re)mettre le pays sur les rails de la démocratisation et de la paix en relégitimant le multipartisme et les us et coutumes, l’exercice des droits et libertés politiques qui vont avec lui. En effet, ses signataires ont pris l’engagement de construire un ordre politique et un système de gouvernement inspirés des réalités de leur pays et fondés sur les valeurs de justice, de démocratie, de bonne gouvernance, de pluralisme, de respect des libertés et droits fondamentaux de l’individu, de l’unité, de solidarité, de compréhension mutuelle, de tolérance et de coopération entre différents groupes ethniques de leur société10. Autant dire qu’après

« l’échec » du multipartisme suivi de la mise en veille du processus démocratique au cours de la décennie 1990 – 2000, la période qui va de 2000 à 2015 devrait être particulièrement présentée comme une « troisième chance de la démocratie » au Burundi dans la mesure où elle a constitué un moment privilégié d’expérimentation, tant en théorie qu’en pratique, de l’esprit et de la lettre de l’Accord d’Arusha. Néanmoins, au regard des résultats de cette troisième période de l’expérience démocratique au Burundi post-Arusha – marquées par l’emprunte du pouvoir CNDD-FDD depuis 2005 – et, au-delà des considérations surtout des années 60 selon lesquelles les partis politiques sont des produits importés d’Occident qui se sont acclimatés très difficilement aux conditions socio-politiques africaines11, quelques interrogations méritent notre attention.

- Pourquoi l’organisation des partis politiques burundais reste-t-elle marquée par des réflexes néopatrimonialistes alimentés par le culte du chef et des instincts identitaires ?

- Quels sont les principaux facteurs qui ont été { la base de l’échec du processus de démocratisation institutionnelle initié à la fin des années 80 au Burundi et relancé au début des années 2000 avec l’Accord d’Arusha ?

9 Selon l’expression de l’historien burundais Augustin Nsanze. Par « vitrine de la démocratie », A. Nsanze veut désigner la période comprise entre les dates du 10 juillet, date d’investiture du président élu Melchior Ndadaye et du 21 octobre 1993, qui correspond à son assassinat ; Augustin Nsanze, Le Burundi contemporain. L’Etat-nation en question (1956-2002), Paris, L’Harmattan, 2003, pp. 315-345.

10 Préambule de l’Accord d’Arusha, p. 2. Ces éléments sont largement développés dans le Protocole II consacré exclusivement à la « Démocratie » et à la « Bonne gouvernance ».

11 Giovanni M. Carbone, « Comprendre les partis et les systèmes de partis africains. Entre modèles et recherches empiriques », in Politique Africaine, n°104, Karthala, 2006, pp. 18-37.

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- Pourquoi presque tous les partis politiques burundais, de la Ière à la IIIème génération, qui revendiquent l’impératif démocratique n’y sont jamais arrivés ? - Dans quelle mesure peut-on garantir une transformation politique démocratique

des partis politiques de culture autoritaire et/ou de la violence ?

- Qu’est-ce qui explique que les principaux partis politiques burundais tels que l’UPRONA, le FRODEBU et le CNDD-FDD soient toujours le théâtre des recompositions/décompositions ?

- Dans quelle mesure l’histoire et la nature du système politique influent-elles sur les processus de démocratisation des partis et par les partis ?

- Dans quelles conditions les partis politiques de l’opposition ainsi que la société civile peuvent-ils être des vecteurs d’une alternance politique pacifique ?

En fin de compte, ces quelques questions qui constituent le point de départ de ce travail visent à comprendre les raisons qui font que les partis politiques burundais ne soient pas capables – du moins jusqu’{ aujourd’hui – d’offrir une transition digne de ce nom au pays et surtout les motifs qui font qu’au cours de la période post-Arusha les partis politiques ne soient pas arrivés à produire et entretenir un véritable régime de démocratie consociative au Burundi. L’on pourrait même se demander si les partis politiques burundais, laminés par des querelles intestines et des dissensions internes, peuvent encore être considérés comme des acteurs et des vecteurs crédibles de la démocratisation de la société burundaise.

Face { cette série d’interrogations, nous formulons la thèse suivante : la faiblesse des partis politiques burundais vis-à-vis du processus de démocratisation est due à leur histoire, leur faible niveau d’institutionnalisation, leur gestion autoritaire par des leaders dépourvus de culture politique démocratique, ainsi qu’{ la nature du système politique dans lequel ils évoluent. Ceci constitue des obstacles majeurs pour que les partis burundais s’imposent comme des acteurs pertinents et incontournables de la transition et de l’instauration d’un véritable régime de démocratie consociative au Burundi, conformément { l’esprit de l’Accord d’Arusha. Concrètement, nous postulons que l’histoire des formations politiques burundaises, l’absence de culture politique démocratique de leaders partisans ainsi que la nature du système politique dans lequel elles naissent et fonctionnent sont les trois principaux éléments qui les empêchent de s’institutionnaliser et de convertir leurs revendications de projets démocratiques en véritable régime démocratique. Sous cet aspect, nous considérons les partis politiques burundais non pas comme des organisations sociétaires mais comme des structures structurantes, destinées à renforcer les clivages dominanats et politiquement rentables existants, ou des constructions – instruments au service des politiques dans un système politique dominé par la suprématie du politique sur l’économique, la faible prégnance de la société civile et le développement du communautarisme.

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2. Approches théoriques et méthodologiques

La connaissance d’un objet nécessite une recherche préalable sur les conditions de production de cette connaissance. Indépendamment de l’objet auquel ils s’intéressent, le politologue et « l’homme de la rue » se distinguent principalement par la démarche présidant { la production de leurs discours respectifs sur cet objet. S’il en est ainsi, c’est parce que, dans le rapport entre l’objet et son observateur, il existe au moins deux types d’« écrans » susceptibles de brouiller le discours. D’une part, tout objet se présente { son observateur déj{ chargé d’histoire, mais aussi de caractéristiques qui lui ont été préalablement attribuées par des observateurs. D’autre part, l’observateur est lui-même porteur d’une histoire, de connaissances premières et de positions personnelles sur cet objet. Produire un discours scientifique suppose, dans ces conditions, un travail préalable sur ces « écrans », sans lequel une analyse objective est impossible12. La démarche du politologue – comme celle de l’historien, du sociologue et de l’universitaire en général – se démarque en ce sens qu’elle est guidée par une recherche de l’objectivité, par le soin apporté à réunir des faits avérés et à produire des explications vérifiables. Cet objectif ne peut être atteint sans le respect d’un certain nombre de précautions méthodologiques13. Ces observations nous rappellent que notre proximité sociale et politique par rapport à notre sujet nous oblige à observer le maximum de neutralité axiologique en recourant à l’articulation méticuleuse des démarches interprétatives, compréhensives et explicatives.

En science politique, l’étude des partis politiques pose toujours la difficulté d’attaque suivant les époques et les régions. Alors que pendant longtemps les politistes s’intéressant aux partis ont cherché { élaborer une « théorie générale » selon laquelle l’organisation ou les fonctions remplies par les partis au sein des systèmes politiques étaient censées épuiser leur « réalité », F. Sawicki considère que, eu égard à la complexité des partis, à la fois organisation concrète et représentation mentale, et la diversité de leurs usages, l’angle et la méthode d’analyse { adopter pour traiter les partis devraient dépendre directement des questions posées. Car en effet, « loin d’être un domaine en soi, les partis gagneraient à être considérés une fois pour toutes comme les terrains de recherche privilégiés de trois grands objets de la science politique : la socialisation politique, la mobilisation et la sélection des dirigeants »14.

Bien plus, même si l’étude des partis politiques et les comportements électoraux apparaît toujours comme un domaine privilégié de la science politique, elle reste située au carrefour de plusieurs disciplines dont le droit, la science politique, la sociologie, l’histoire, l’économie, l’anthropologie, la linguistique, etc. ; d’où « les façons d’aborder scientifiquement les partis politiques sont aussi multiples que diverses et chacune n’explore

12 A ce sujet, se référer { l’ensemble des travaux de la « sociologie phénoménologique » d’Alfred Schutz ; voir par exemple l’article de Frédéric Tellier « La phénoménologie du monde social : l’exemple d’Alfred Schutz », in Frédéric Tellier, Alfred Schutz et le projet d’une sociologie phénoménologique, Paris, PUF, 2003, pp. 43-87.

13 Mamoudou Gazibo, Introduction à la politique africaine, Montréal, Presses Universitaires de Montréal, 2010, p. 19.

14 Frédéric Sawicki, art. déjà cité, p. 57.

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qu’une facette de la réalité partisane »15. Ce point de vue est aussi corroboré par J. Charlot qui précise que « les partis politiques sont un phénomène complexe, susceptible d’être étudié de bien des points de vue ». Et de conclure que « les diverses approches sur l’étude se définissent, précisément par l’aspect de la réalité qu’elle privilégie – ce qui marque à la fois, les mérites et les limites de chacune d’elles »16. Ces diverses approches le sont davantage lorsqu’il s’agit d’entrer dans leur organisation et fonctionnement internes faisant intervenir plusieurs approches dont celles organisationnelles, fonctionnelles, institutionnelle et conflictuelles sans bien sûr oublier le militantisme et ses rétributions.

C’est ce qui a fait dire { D. L. Seiler que le phénomène partisan condense une pluralité de champs sociaux, ce qui lui vaut la qualification de phénomène social « total » au sens de Mauss17. En effet, comme l’écrivait si bien F. Haegel, « il est impossible de comprendre le politique, et singulièrement les phénomènes partisans, sans adopter une approche sociologique, autrement dit sans poser que le politique n’est pas un champ clos, fermés sur lui-même et parfaitement autonome, dont les dynamiques ne s’expliqueraient que de manière endogène »18.

Ainsi, notre analyse du rôle des partis politiques au Burundi a fait appel à une réflexion sur les méthodes et les approches qui la conduisent à se débarrasser des idées reçues, des connaissances intuitives et d’autres considérations dépassées qui minent le terrain et qui forment autant d’obstacles { une meilleure compréhension du phénomène partisan burundais. De ce fait, pour arriver à ses objectifs, la présente étude a mobilisé quatre types d’approches : l’approche historique du politique, l’approche institutionnelle, l’approche fonctionnaliste et l’approche instrumentaliste.

2. 1. L’approche historique du politique

Aussi dite « analyse historique comparative », l’approche historique a une longue tradition en sciences sociales et en politique comparée comme cadre méthodologique.

Elle consiste { étudier l’histoire et les phénomènes contemporains en vue de montrer comment les sociétés fonctionnent et se transforment19. La sociologie historique du politique a ceci d’intéreessant qu’elle évite les tares du déterminisme historique et du sociologisme en inscrivant les faits politiques et leurs significations dans des contextes historiques précis et circonstrits. Concrètement, il s’agit d’aller chercher dans l’histoire, ce qui intéresse l’objet { étudier et qui peut donner des éléments d’interprétation, de compréhenion et, si possible, d’explication des problématiques d’aujourd’hui. Ceci favorise l’étude de l’histoire d’un phénomène et de ses semblants pour rendre compte de leurs changements et transformations. C’est d’ailleurs l’approche dans laquelle s’inscrit la

15 Daniel-Louis Seiler, « L’actualité de l’approche des partis en termes de clivages socio-politiques », in Dominique Andolfato, Fabienne Greffet et Laurent Olivier (dir.), Les partis politiques. Quelles perspectives ?, Paris, L’Harmattan, 2001, p. 49.

16 Jean Charlot, Les partis politiques, Paris, Armand Colin, 1972, p. 36.

17 Daniel-Louis Seiler, « L’actualité de l’approche des partis… », art. déjà cité, p. 49.

18 Florence Haegel, Les droites en fusion. Transformations de l’UMP, Paris, PFNSP, 2012, pp. 10-11.

19 Mamoudou Gazibo, Jane Jenson, La politique comparée. Fondéments, enjeux et approches théoriques, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, 2015, chap. 7, pp. 203-224.

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démarche de Maurice Duverger qui affirme que c’est { travers l’étude historique qu’on peut mieux saisir la nature et le fonctionnement des partis politiques car, « de même que les hommes portent toute leur vie l’empreinte de leur enfance, ainsi les partis subissent profondément l’influence de leurs origines »20. Duverger partage ce point de vue avec M.

Gazibo qui, parlant de la politique en Afrique, recommande d’avoir une connaissance d’éléments marquant les principales périodes historiques du continent si l’on veut donner rigueur et profondeur { l’analyse de son fait politique. Pour lui, l’origine des déterminants de la politique africaine est à chercher au point de rencontre de trois moments de l’histoire du continent ainsi que leurs acteurs respectifs. Il s’agit de « la colonisation, qui est le moment pivot sans lequel les trajectoires actuelles seraient impossibles à comprendre, l’héritage précolonial sur lequel nous insistons peu et, enfin, les dynamiques postcoloniales qui, selon les mots de Jean-François Bayart, sont elles aussi productrices d’histoire et de logiques à côté de celles héritées du passé colonial »21. En effet, les grands schémas qui guident dorénavant la gouvernance en Afrique en général et la nature en partie différenciée de chaque Etat africain tirent leur explication dans le résultat de l’enchevêtrement de ces trois moments et de leurs logiques respectives ainsi que son encastrement dans les Etats postcoloniaux dont les formes varient suivant les

« Afriques »22 étudiées : anciennement sous domination française, britannique, belge, etc.

Allant dans le sens de ces conseils, pour mieux cerner notre sujet, notre première démarche a été de prendre en considération le poids de l’histoire dans l’évolution socio- politique du Burundi car la nature, l’organisation et le fonctionnement des partis politiques ne peuvent pas être dissociés de l’histoire politique. Caractérisé par une gestion politico-militaire ethno-régionaliste sudiste depuis la chute de la monarchie en novembre 1966, le Burundi a connu un monopartisme sans partage, jalonné par des crises meurtrières répétitives, des exclusions ethniques et régionalistes d’une partie de la population dans la gestion de la chose publique ; ce qui a engendré des haines, des méfiances mutuelles entre les deux principales « communautés » ethniques, Hutu et Tutsi, et des frustrations de toute part23. Cette démarche présente l’intérêt de nous fournir quelques éléments de compréhension des phénomènes concernés car le militantisme au

20 Maurice Duverger, Les partis politiques, Paris, Armand Colin, 1958, p. 1. Pour illustrer son propos, M.

Duverger soutient que sans une étude historique des circonstances qui ont donné naissance aux partis travailliste britannique et socialiste français, on ne pourra pas comprendre les différences de structure qui séparent les deux partis, pourtant appartenant à la même famille de partis : la gauche. De même, c'est aussi la seule façon qui pourrait, selon lui, permettre de comprendre et d'analyser le multipartisme français ou néerlandais, ou le bipartisme américain.

21 Mamoudou Gazibo, Introduction…, op. cit., pp. 10-11.

22 Ici, Mamoudou Gazibo fait référence aux « Afriques politiques », titre de l’ouvrage codirigé par Christian Coulon et Denis-Constant Martin, Les Afriques politiques, Paris, La Découverte, 1991.

23 A ce sujet, consulter entre autres Jean-Pierre Chrétien et Melchior Mukuri (dir.), Burundi, la fracture identitaire. Logique de violences et certitudes « ethniques », Paris, Karthala, 2002 ; Marc Manirakiza, Burundi.

Quand le passé ne passe pas (Buyoya I – Ndadaye) 1987 – 1993, Bruxelles, La Longue Vue, 2002 ; Raphaël Ntibazonkiza, Burundi. Au royaume des seigneurs de la lance. De l’indépendance { nos jours (1962-1992), T.2, Bruxelles, Bruxelles-Droits de l’Homme, 1992; Raphaël Ntibazonkiza, Biographie de Melchior Ndadaye.

L’homme et son destin, Sofia, Bulgarian Helsinki Commettee, 1996 ; Stef Vandeginste, Théorie consociative et partage du pouvoir au Burundi, Anvers, 2006 ; Stef Vandeginste, Le processus de justice transitionnelle au Burundi { l’épreuve de son contexte politique, Anvers, 2008.

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