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Tribunal de la sécurité sociale du Canada Division d appel. Décision. Lucien Godbout. Pierre Lafontaine. Vidéoconférence

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Texte intégral

(1)

Tribunal de la sécurité sociale du Canada

Division d’appel

Décision

Partie appelante :

D. B.

Représentant :

Lucien Godbout

Partie intimée :

Commission de l’assurance-emploi du Canada

Représentante:

Josée Lachance

Décision portée en appel :

Décision de la division générale datée du 7 octobre 2020 (GE-20-1918)

Membre du Tribunal :

Pierre Lafontaine

Mode d’audience :

Vidéoconférence

Date de l’audience :

Le 21 octobre 2021

Personnes présentes à l’audience :

Appelante

Représentant de l’appelante Représentante de l’intimée

Date de la décision :

Le 23 novembre 2021

Numéro de dossier :

AD-21-234

(2)

Décision

[1] L’appel est rejeté. Il n’y a pas lieu d’appliquer la règle de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée.

Aperçu

[2] L’appelante (prestataire) a demandé des prestations d’assurance-emploi à partir du 8 décembre 2019. L’intimée, la Commission de l’assurance-emploi du Canada (Commission), a déterminé que la prestataire n’était pas admissible aux prestations puisqu’elle n’avait pas été sans travail et sans rémunération pendant sept jours consécutifs, ayant bénéficié d’un avantage, soit un téléphone cellulaire payé par l’employeur.

[3] La prestataire a demandé la révision de cette décision mais la

Commission a maintenu sa décision initiale. La prestataire a interjeté appel de la décision découlant de la révision auprès de la division générale.

[4] La division générale a conclu qu’il n’y avait pas eu d’arrêt de rémunération d’au moins 7 jours consécutifs puisque la prestataire bénéficiait d’un téléphone cellulaire payé par l’employeur.

[5] La prestataire a obtenu la permission d’en appeler de la décision de la division générale. Elle soutient que la division générale a erré en droit ou a refusé d’exercer sa compétence en n’appliquant pas la règle de la préclusion compte tenu d’une décision antérieure rendue par la Commission favorable à la prestataire.

[6] Je rejette l’appel de la prestataire.

Question en litige

[7] Est-ce que la division générale a erré en droit ou a refusé d’exercer sa compétence en n’appliquant pas la règle de la préclusion compte tenu d’une décision antérieure rendue par la Commission favorable à la prestataire?

(3)

Analyse

Mandat de la division d’appel

[8] La Cour d’appel fédérale a déterminé que la division d’appel n’avait d’autre mandat que celui qui lui est conféré par les articles 55 à 69 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social (Loi sur le MEDS).1

[9] La division d’appel agit à titre de tribunal administratif d’appel eu égard aux décisions rendues par la division générale et n’exerce pas un pouvoir de surveillance de la nature de celui qu’exerce une cour supérieure.

[10] En conséquence, à moins que la division générale n'ait pas observé un principe de justice naturelle, qu'elle ait erré en droit ou qu'elle ait fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance, je dois rejeter l'appel.

Est-ce que la division générale a erré en droit ou a refusé d’exercer sa compétence en n’appliquant pas la règle de la préclusion compte tenu d’une décision antérieure rendue par la Commission favorable à la prestataire?

[11] Depuis 1999, la prestataire occupe le même emploi saisonnier dans un hôtel de la Ville de Québec. Dans le cadre de son emploi, elle a l’usage d’un téléphone cellulaire fourni par son employeur. Elle conserve ce droit d’utilisation même après la terminaison de son emploi.

[12] Le 8 février 2016, la Commission a demandé le remboursement des prestations d’assurance-emploi versées à la prestataire en rapport avec l’emploi occupé en 2015. La Commission a invoqué que la conservation de l’utilisation du

1 Canada (Procureur général) c Jean, 2015 CAF 242, Maunder c Canada (Procureur général), 2015 CAF 274.

(4)

téléphone cellulaire fourni par l’employeur après la terminaison de son emploi avait pour conséquence qu’elle n’avait pas droit à de telles prestations.

[13] Après une demande de révision, et de nombreuses discussions avec la prestataire, la Commission a révisé sa décision le 21 avril 2016 (Décision 2016) et tranché en faveur de la prestataire qui a ainsi pu conserver ainsi les

prestations d’assurance-emploi encaissées.

[14] Le 12 juin 2020, la Commission a réclamé à la prestataire les prestations d’assurance-emploi versées en rapport avec son emploi de 2019, pour le même motif que celui invoqué en 2016. Le 7 octobre 2020, la division générale a confirmé la décision de la Commission.

[15] La division générale a conclu que la prestataire n’avait pas eu d’arrêt de rémunération d’au moins 7 jours consécutifs puisqu’elle bénéficiait d’un

téléphone cellulaire payé par l’employeur. Par conséquent, la prestataire ne remplissait pas les conditions requises pour permettre l’établissement d’une période de prestations débutant le 8 décembre 2019.

[16] Suite à la décision de la division générale, la Commission a procédé à une autre analyse du dossier de la prestataire, cette fois en rapport avec les

prestations versées pour les années 2016, 2017 et 2018. Dans trois décisions rendues le 20 avril 2021, la Commission réclame le remboursement des

prestations d’assurance-emploi pour le même motif que celui invoqué en 2016.

Les trois décisions de la Commission sont présentement en appel devant la division générale.

[17] La prestataire soutient que la division générale a commis une erreur de droit ou de compétence en ne respectant pas la règle de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée passée en force de chose jugée, en l’occurrence la décision finale de la Commission rendue en 2016.

(5)

[18] La prestataire fait valoir que la décision rendue en 2016 a tranché les questions litigieuses entre les parties de manière définitive. Elle souligne que la division générale a soulevé ce point dans sa décision sans toutefois trancher la question.2

[19] La Commission est d’avis que la division générale n’a pas commis d’erreur en ne considérant pas la règle de la préclusion. Elle fait valoir que la prestataire n’a pas soulevé ce point devant la division générale. La Commission soutient que la division générale a correctement exercé sa discrétion lorsqu’elle a décidé de ne pas considérer la règle de la préclusion.

[20] La Commission soutient également que la règle de la préclusion ne s’applique pas puisque la période de prestations sur laquelle repose le présent appel n’est pas la même période de prestations pour laquelle la décision de la Commission en 2016 fût rendue.

[21] Pour les motifs ci-après mentionnés, je suis d’avis que la division générale a erré en droit ou a refusé d’exercer sa compétence en ne considérant pas la règle de la préclusion relativement à la décision de 2016. Il est manifeste que le défaut de considérer son application risquait d’entraîner une injustice pour la prestataire.3 Je vais donc rendre la décision qui aurait dû être rendue par la division générale.4

[22] L’application de la théorie de la règle de préclusion découlant d’une question déjà tranchée signifie simplement que, dans le cas où le tribunal judiciaire ou administratif compétent a conclu, sur le fondement d’éléments de preuve ou d’admissions, à l’existence (ou à l’inexistence) d’un fait pertinent — par exemple une faute —, cette même question ne peut être débattue à nouveau dans le cadre d’une instance ultérieure opposant les mêmes parties.5

2 Décision de la division générale, par. 15.

3 Guindon c Canada, 2015 CSC 41.

4 Conformément aux pouvoirs qui me sont dévolus par l’article 59(1) de la Loi sur le MEDS.

5 Danyluk c Ainsworth Technologies, 2001 CSC 44 au para 54.

(6)

[23] Initialement, ces règles ont été établies dans le contexte de procédures judiciaires antérieures. Leur champ d’application a depuis été élargi, avec les adaptations nécessaires, aux décisions de nature judiciaire ou quasi judiciaire rendues par les juridictions administratives — fonctionnaires ou tribunaux.6 [24] Une des conditions préalables à l'octroi de la préclusion est l'exigence fondamentale que la décision rendue dans la procédure antérieure soit une décision judiciaire.

[25] En l’espèce, l’agent de la Commission a le pouvoir d’enquêter et de décider. Il fait enquête afin de recueillir les renseignements qui fonderont la décision qu’il doit rendre. Ses fonctions comportent tous les indices importants de l’exercice d’un pouvoir judiciaire, notamment la détermination des faits, l’application du droit à ces faits et la prise d’une décision liant les parties.

[26] L’agent doit décider de l’admissibilité du prestataire aux prestations. Bien qu’ils aient recours à des procédures plus souples que celles des cours de

justice, la décision doit s’appuyer sur des conclusions de fait et sur l’application à ces faits d’une norme juridique objective. Il s’agit là d’une caractéristique de fonctions judiciaires.

[27] Il est vrai qu’il s’agit d’un agent de la Commission. Cela n’a pas pour effet de supprimer son obligation d’agir judiciairement. D’ailleurs, la législation permet un appel de la décision de l’agent devant la division générale ce qui supprime cet élément d’inégalité apparente dans le processus d’appel.7

[28] Je suis d’avis que la décision d’un agent de la Commission qui statue sur l’admissibilité d’un prestataire à l’assurance-emploi après l’obtention de

l’information pertinente est une décision de nature judiciaire.

6 Rasanen c Rosemount Instruments Ltd. (1994), 1994 CanLII 608 (ON CA), 17 O.R. (3d) 267 (C.A.)

7 Voir article 113 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi sur l’AE).

(7)

[29] Il y a donc lieu de considérer les critères permettant l’application de cette théorie:

(1) que la même question ait été décidée;

(2) que la décision judiciaire invoquée soit finale; et

(3) que les parties dans la décision judiciaire invoquée, ou leurs ayants droit, soient les mêmes.8

[30] Je suis d’avis qu’il ne fait aucun doute, en l’espèce, que la décision de 2016 a acquis les caractéristiques d’une décision finale. En effet, elle n’a pas fait l’objet d’un appel et a même été appliquée par la Commission qui a annulé le trop-payé de la prestataire. Cela satisfait le deuxième critère.

[31] Le critère de l’identité des parties est également satisfait. La décision finale de 2016 et le recours devant la division générale impliquent les mêmes parties.

[32] Cependant, après une longue réflexion, je suis d’avis que le premier critère relatif à l’existence d’une « même question » n’est pas rempli.

[33] Je suis d’avis qu’en ce qui concerne la décision de 2016, le droit, la question ou le fait, sur lequel il a été statué, doit être considéré entre les parties comme établi de façon concluante aussi longtemps que le jugement demeure.

[34] En conséquence, la question tranchée en 2016 à l’effet que la prestataire a subi une interruption de rémunération même si elle bénéficiait d’un cellulaire payé par l’employeur ne peut plus être débattue, en ce qui concerne la demande d’assurance-emploi de 2015.

8 Danyluk c Ainsworth Technologies, supra, au para 25.

(8)

[35] Il faut comprendre que la règle de la préclusion vise les questions de fait, les questions de droit ainsi que les questions mixtes de fait et de droit qui sont nécessairement liées à la résolution de la question tranchée, à savoir l’arrêt de rémunération relié à la demande de 2015.

[36] Je constate que la Commission ne cherche pas ici à remettre en cause la décision qu’elle a rendue en 2016, après étude des faits et application du droit.

Elle ne tente pas de récupérer les prestations payées à la prestataire en 2015 par un autre moyen d’action. La question de l’arrêt de rémunération en 2015 a été tranchée en faveur de la prestataire et elle ne peut être soumise à nouveau au Tribunal au détriment de la prestataire qui a eu gain de cause.

[37] La présente affaire concerne la demande d’assurance-emploi de 2019. La Loi sur l’AE prévoit spécifiquement que les prestations d’assurance-emploi sont payables à un assuré qui remplit les conditions requises pour les recevoir.9 La Commission conteste l’admissibilité de la prestataire au bénéfice de l’assurance- emploi eu égard à la demande de 2019, puisqu’elle n’a pas subi d’arrêt de rémunération. Il s’agit d’une des conditions essentielles afin de recevoir des prestations.10

[38] Puisque la Commission ne tente pas de contester indirectement la question tranchée dans la décision de 2016, je ne vois aucun risque de double emploi ou de résultats contradictoires.

[39] Malgré les représentations fort habiles du représentant de la prestataire, je suis d’avis que la question tranchée dans la décision de 2016, concerne la question de l’arrêt de rémunération pour la période de prestations y reliée, et non l’admissibilité de la prestataire pour toutes demandes d’assurance-emploi

subséquentes.

9 Voir article 7(1) de la Loi sur l’AE.

10 Voir article 7(2) de la Loi sur l’AE.

(9)

[40] Si la préclusion découlant d’une question déjà tranchée s’appliquait pour les demandes postérieures à la décision de 2016, cela aurait pour effet

d’empêcher la Commission de déterminer si la prestataire a rempli les conditions d’admissibilité à l’assurance-emploi en considérant les faits et le droit applicable au moment de la demande.

[41] Puisque la condition relative à l’existence d’une « même question » n’est pas remplie, je n’ai d’autres choix que de conclure que la règle de la préclusion pour une question déjà tranchée ne s’applique pas.

[42] Ceci étant dit, je tiens à souligner que je sympathise avec la prestataire qui se retrouve dans une situation déplorable compte tenu de l’intervention tardive de la Commission.

Déclaration fausse ou trompeuse

[43] La prestataire me demande de déclarer qu’elle n’a pas fait de déclaration fausse ou trompeuse dans sa demande de prestations d’assurance-emploi pour l’année 2019.

[44] La décision initiale de la Commission est à l’effet que la prestataire pas été sans travail et sans rémunération pendant au moins sept jours consécutifs avant le début de sa période de prestations commençant le 8 décembre 2019. La décision initiale de la Commission a été maintenue après révision.

[45] La Commission n’a pas imposé de pénalité à la prestataire pour avoir fait une déclaration fausse ou trompeuse dans le cadre de sa demande de

prestations d’assurance-emploi pour l’année 2019. En conséquence, la seule question en litige devant la division générale concernait l’arrêt de rémunération.

[46] Je n’ai donc pas l’autorité de déclarer que la prestataire n’a pas fait de déclaration fausse ou trompeuse dans sa demande de prestations d’assurance- emploi pour l’année 2019, puisque la décision de la division générale ne

concerne pas l’imposition d’une pénalité.

(10)

CONCLUSION

[47] Pour les motifs précédemment énoncés, il y a lieu de rejeter l’appel.

Pierre Lafontaine

Membre de la division d’appel

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