RIMES DE JEUNESSE
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JEAN GOLAY
R I M E S
DE
JEUNESSE
PARIS
" GÉMEAUX "
66, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 66
1926
Tibi haec do
Le poète lui seul peut croire à sa folie.
Là-bas dans cette allée où le brouillard se traîne De son voile entourant les arbres aux troncs nus, Le crépuscule écoute un murmure inconnu ; Et le jardin ressemble à de désertes plaines Où des corps sans tombeaux s'amoncèlent dans l'ombre ; Le soir silencieux passe le long des murs, Et seul monte au lointain dans les jardins obscurs Le froufrou d'une robe entre les arbres sombres...
La nature parfois, de la mort et la vie, En contrastes divins nous montre la beauté ; Il est doux de pouvoir dans cette majesté Se draper comme un roi loin de la sombre envie !
C'est alors qu'il faut voir, comme un vase d'albâtre, La terre qui scintille aux blancs rayons des cieux ; Cette terre semblable au grand vase où le pâtre Chaque matin vient boire en adorant son Dieu ; C'est à l'heure où des champs les blonds épis mûrissent Offrant à Dieu les fruits du terrestre labeur, Qu'il monte des grands blés que les chauds mois jaunissent Le chant des faux glissant aux mains des moissonneurs.
Quand des chaumes, la voix des insectes s'élève, Ce bruissement lointain, — crépitant comme un feu, — Il semble que des champs la flamme de la sève A jailli dans le ciel avec un bruit joyeux.
Dans la plaine en été, dans les bois à l'automne, Ecoute de la glèbe, au loin, mélodieux, Le chant, comme celui du grillon monotone, Où doux comme celui d'un oiseau dans les cieux ! Le soir quand la forêt de pourpre s'auréole, Aux pages du missel immense du couchant Relis, silencieux, tous ces vivants symboles ; Laisse ton cœur s'ouvrir comme une fleur des champs !
TERRE ANTIQUE
Et jam summa procul villarum culmina fumant.
VIRGILE.
I
Lentement du ruisseau la douce mélopée S'élève vers le soir dans le fond du vallon ; La brume violette et mauve traîne au long Des coudriers jaunis; la nuit s'est estompée.
Semblables aux héros d'une antique épopée D'un pas traînant et lourd les esclaves s'en vont.
Et la plaine, là-bas, où finissent les monts Apparaît infinie au fond d'une échappée.
Les bœufs libres du joug devant l'étable ouverte Mûgissent longuement, les yeux rêveurs, inertes...
Et des fermes au loin on voit fumer les toits.
Epuisés par l'effort qui chasse les pensées, Laissant comme des poids tomber leurs mains lassées, Les hommes fatigués se demandent pourquoi...
NOTRE COLLECTION DE POÉSIES
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