NOTE
HÉTÉROGÉNÉITÉ DES PROPORTIONS MENDÉLIENNES
POUR 2 GÈNES DE GROUPES SANGUINS CHEZ LA POULE.
DONNÉES COMPLÉMENTAIRES
A. PERRAMON
P. MÉRAT
J.-L. MONVOISIN
Laboratoire de Génétique formelle,
Station centrale de
Génétique
animale,Centre aaational de Recherches zootechniques, 78-Jouy-en-Josas
Institut national de la Recherche agronomique
RESUME
Une hétérogénéité non aléatoire des proportions mendéliennes pour deux loci de groupes sanguins n’est observée que lorsque la mère est hétérozygote. Ceci renforce l’hypothèse précé-
demment émise d’une anomalie de ségrégation antérieure à la méiose.
Nous avons
déjà signalé (P>;xxelKON
etMÉ R aT, 19 68),
dans une souche depoules
de raceWyandotte
élevée au Domaine duMagneraud,
laprésence
d’unehétérogénéité
hautementsignificative
desproportions
mendéliennes entre mèresau locus W6
/1!",
pour le croisement d WOIW O
x ! W6IW O ,
et au locus W7IW 8
lié au
premier
pour les croisements r1W 7 IW I
XW7 IWI
et r1W 8 /W 8 X <j! W7/WS (au premier locus,
W°indique
l’absence del’antigène
identifiéW 6 ;
le second locus necomporte
que les deux allèles W7 et W8 dans lapopulation étudiée).
Nous avions
indiqué qu’un
manque occasionnel de réactivité des sérumsanti-W
6
,
anti-W’ ou anti-W8 n’était pasvraisemblable,
laproportion globale
pour chacun des
produits
des deux loci dans l’ensemble des familles étant sensi- blement normale. Une différence de mortalitéembryonnaire
associée à ces anti-gènes
devraitêtre,
pourexpliquer
nosrésultats,
de sens variable suivant lesfamilles;
de toutesfaçons,
les taux d’éclosion sont aussi bons pour les mères àproportion
anormale que pour les autres. Cecisuggère
des influences non aléatoiressur les
proportions mendéliennes,
se situant avant la méiose de la femelle.Les résultats
précédents portaient
sur les années19 6 4 , 19 65
et19 66.
En
19 67
et19 68,
nous avons pu réunir des donnéescomplémentaires
relati-vement au locus
PF!/1!.
Ces donnéesparaissent
confirmer l’absence de relation entre lerapport
deségrégation
d’une mèrehétérozygote
à ce locus et son tauxde fertilité et
d’éclosion;
mais surtout,l’analyse plus complète
del’hétérogénéité
des
proportions qu’elles permettent apporte
desprécisions renforçant
indirec-tement nos
précédentes
conclusions.Pour l’ensemble des
années,
ycompris
lesdernières,
le tableau i donne pourchaque type
de croisement étudié au locusW l / W 8
laproportion
totale des des- cendants des deuxtypes attendus,
sexesgroupés, puis
successivement lesX 2 d’hétérogénéité
de cetteproportion
entreannées,
entrepères
intra-années et entre mèresintra-pères (cf. M ATH E R , ig6o).
La
comparaison
des croisementsréciproques suggère
àpremière
vue unehétérogénéité plus grande
entre mèresintra-pères lorsque
la mère esthétérozygote.
C’est ce que l’on vérifie de
façon plus précise
entotalisant,
d’unepart
les deux croisements où c’est lepère,
de l’autre ceux où c’est la mèrequi
est degénotype
W
7
IW 8 .
Dans lepremier
cas, leX 2 d’hétérogénéité
« mèresintra-pères
» vaut190
, 7 6
4
pour 15odegrés
deliberté;
dans lesecond,
427,291 pour23 6 degrés
deliberté.
Si l’on fait dans
chaque
cas lerapport du X 2
à son nombre dedegrés
deliberté,
on obtient :
S 2 1
= 1,271lorsque
lepère
esthétérozygote,
et :S 2 2
=1 ,8 11 lorsque
c’est la mère. Dans
l’hypothèse
del’égalité
des « valeurs vraies » de ces deuxvariables,
lerapport s 2 z /s2!
doit suivre une loi de F(Fisher-Snedecor)
à23 6
et 150degrés
de liberté. La valeur de cerapport
étant 1,425, on vérifiequ’elle
estsigni-
ficativement
supérieure
à l’unité au seuilapproximatif
de i p. 100.Par contre, en ce
qui
concernel’hétérogénéité
entrepères,
elle neparaît
pas différer nettement suivant le caractère
homozygote
ouhétérozygote
dugénotype paternel.
Enfait,
étant donnée l’existence d’unehétérogénéité
trèssignificative
desproportions
entremères,
on doitprendre
enconsidération,
non leX 2 d’hétérogénéité
entrepères lui-même,
mais lerapport
de la « variance entrepères » ( X 2
« entrepères
» divisé par le nombre dedegrés
de libertécorrespondant)
à la « variance
» analogue
« entre mères ». Pour les croisements où lepère
esthomozygote,
cerapport,
que l’onpeut
considérer comme suivantapproximative-
ment une loi de
F,
estégal
à 0,97; sa valeur estr,r6 lorsque
lepère
esthétérozygote.
Dans les deux cas, il
n’apparaît
pasd’hétérogénéité significative
attribuable enpropre au
père.
Il en est de même de
l’hétérogénéité
entre années : en la divisant par le nombre dedegrés
de libertéqui
luicorrespond,
on obtient une « variance entreannées
» égale
à2 , 04 8
pour l’ensemble descroisements,
basée sur 15degrés
deliberté. Son
rapport
à la variance « entre mèresintra-pères »,
basée sur 502degrés
de liberté au
total,
est F = 1,291(non significatif).
Quant
au locusW s /W°,
seule l’année19 6 7
apermis d’apporter
en cequi
le concerne des résultats nouveaux.
L’ensemble
de nos données actuellesindique
pour lui la même tendance : le
X 2 d’hétérogénéité
« entre mèresintra-pères
» est,au
total, égal
à6 2 , 994
pour 27degrés
de liberté(P
<0 , 001 )
dans les croisements c1 WOIW O
XW 6 /W O
où la mère esthétérozygote,
sa valeur étant6 5 , 19°
pour 57 d.l.
(P > 0 , 2 )
dans les croisements c1W 6 jW°
° X Y WO° /W °.
Lerapport
F des deuxX 2
divisés chacun par le nombre dedegrés
de libertécorrespondant
est2,04I
(P
<0,025).
Au
total,
le fait saillant est donc l’existence d’unehétérogénéité
très pro- noncée desproportions mendéliennes,
essentiellementlorsque
la mère est hété-rozygote
aux loci de groupessanguins
considérés. Ceci renforce notrehypothèse quant
à la réalité d’une variation non aléatoire de cesproportions
au niveaudes
gamètes,
car oncomprendrait
difficilementqu’une pénétrance incomplète
d’un allèle ou une différence de mortalité
embryonnaire
se manifeste seulement par des différences entre descendances de mèreshétérozygotes.
Notreinterpré-
tation par une anomalie de
ségrégation ayant
sa source à la méiose ou avant celle-ci(P ERRAMON
et!’IÉRAT, 19 68)
se trouveainsi, indirectement, appuyée.
Quant
à la nature de cetteanomalie, l’expulsion préférentielle
d’un allèle dansun
globule polaire
doit être écartée parcequ’en
contradiction avec les données delinkage exposées précédemment (PE RRAMON
etMÉ RA T, 19 68).
Demême,
l’existence d’un mécanisme de conversion
génique
neparaît
pas convenir car,ayant
été décrite comme une éventualité essentiellementméiotique,
elle devraits’être
produite pendant plusieurs
méioses successives. Il reste donc lapossibilité
d’un
crossing-over
«mitotique » (STERN, 193 6; PONT!ECORVO, 195 8)
ou de toutmécanisme
analogue
tendant à un mosaïcisme desgonades.
Des conclusions similaires ont étésuggérées
chez d’autres vertébréssupérieurs (GRUN!B!RG, I g66;
BrçAx et al., I9 66).
Reçu pour publicntion en novembre ig6g.
REMERCIEMENTS
Nous remercions le professeur BRUN, Faculté des Sciences, Orsay, et M. GxoscL·.x;ns, Laboratoire de Génétique biochimique, C.N.R.Z., Jouy-en-Josas, de leurs remarques à la lecture de ce manuscrit.
SUMMARY
HETEROGENEITY OF MENDELIAN PROPORTIONS
FOR TWO BLOOD-GROUP GENES IN THE FOWL. FURTHER DATA
A non-random heterogeneity of mendelian proportions was observed between progenies
of different dams in the segregation to two blood-group loci in a White Wyandotte strain. One
of the loci has two alleles, W7 and W8; for the other, linked to the first one, an allele, W, has been identified, W° representing its absence. The present data, which complete a previous work, conffrm more precisely that this phenomenon is limited to the case when the dam is heterozygous.
The ° between dams * heterogeneity is highly significant (P < .001) in this case. This supports
further our hypothesis of a segregation abnormality taking place at or before meiosis and tending
to cause a mosaicism of gonadal tissue.
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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