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Les techniques de construction de l'habitat en terre du site néolithique de Dikili Tash (Macédoine orientale, Grèce).

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Bâti e t habitat

Les techniques de c o n s tru c tio n de l ' h a b i t a t en t e r r e du s it e n é o lith iq u e

(M a c é d o in e orie n

Sylvia Martinez et Sandra Prévost-Dermarkar (UMR ArScAn - Protohistoire égéenne)

Sur le site d e Dikili Tash1, la terre à bâtir est le matériau d e construction essentiel servant à recouvrir d e torchis les armatures de bois des murs e t à construire les am énagem ents intérieurs des maisons.

Les vestiges présentés ici appartien nent à plusieurs niveaux du Néolithique Récent (5400-4700 BC) a ya n t livré des parties de pièces d'habitations. L'incendie de certains niveaux a permis d e conserver, en les brûlant, les formes des éléments architecturaux. Mais il a été en m êm e temps l'un des premiers facteurs de fragm entation e t d'éparpillem ent des vestiges (Fig.1).

Au cours d e la fouille, nous avons d o n c é té confrontés à une énorm e quantité d e fragm ents épars ou en amas qui sont les seuls tém oignages des constructions et de leurs techniques. On exposera ici la m éth o d e d é ve lo p p é e pour étudier ces m orceaux d e terre à bâtir brûlés.

I. La m éthode d ’étude des vestiges

Pour l'é tu d e des vestiges, nous avons créé un fichier descriptif e t d é ve lo p p é spécialem ent des outils. Des analyses physico-chim iques, m icro m o rp h o lo g iq u e s a c c o m p a g n é e s d 'é tu d e s géom orphologiques, c o n ce rn a n t la nature e t les provenances des terres utilisées, ont été effectuées. En perm anen ce nous nous sommes reportées aux faits technologiques observés dans les villages traditionnels et sur les vestiges architecturaux mieux conservés sur d'autres sites. Dans certains cas, nous avons cherché à vérifier nos hypothèses par des reconstitutions expérimentales.

Le m atériau : la terre à bâtir

Lest e r r e s : n a t u r e, p r o v e n a n c e

Le plus souvent, la terre du site a servi à la construction. Ce fa it très com m un se reconnaît facilem ent aux nombreuses inclusions anthropogènes dans la p â te des fragments. Mais l'exam en à l'oeil nu, confirm é par les analyses physico-chimiques e t les études géom orphologiques, a montré que des terres d 'u n e autre provenance é taient recherchées e t utilisées dans tous les niveaux d 'h abitation. Des expérimentations sur la construction et son fonctionn em ent ont pu donner des indications sur les critères de choix qui prévalaient lors de l'em ploi de terres aux propriétés particulières. C eci implique que les qualités des différentes terres étaient connues et exploitées, m êm e si les m odalités du discernem ent d e l'ép o q u e nous é ch a p p e n t. Ces

1 Le tell néolithique d e Dikili Tash se situe au Nord d e la G rèce, en M acédoine orientale, en bordure d e la plaine d e Drama. Un program m e d e recherche franco-hellénique sous la direction conjointe du Dr H. Koukouli-Chryssanthaki (Société a rchéologique d'Athènes) et du Prof. R. Treuil (Université d e Paris I et École française d'Athènes) s'y déroule depuis 1986. L'équipe française a fouillé dans le secteur V sur une surface d'environ 150 m 2. Le matériel d e c e secteur V a p p a rtie n t essentiellement à la phase Dikili Tash I, qui d a te du d é b u t du Néolithique récent, c'est-à-dire d e 5400 à 4700 BC, calibré.

Fig. 1. Dikili Tash : vue g é n é ra le d u se c te u r V o u e st e n cours d e fouille (p h o to P. D a rc q u e )

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Sylvia Martinez e t Sandra Prévost-Dermarkar

raisonnements ouvrent l'accès à une meilleure a ppréciatio n des com pétence s des bâtisseurs préhistoriques.

Lesd é g r a i s s a n t s

Le dégraissant minéral est contenu naturellem ent dans toutes les terres utilisées pour construire, mais dans le cas où il est présent en très grande quantité, seules les observations m icrom orphologiques p ourront dire s'il é ta it contenu naturellem ent dans la terre choisie ou bien s'il é ta it rajouté au m om ent du g â ch a g e .

Le dégraissant végétal a été identifié à partir de l'observation des empreintes qu'il a laissées dans la pâte. Il s'agit des restes de d é co rtica g e des céréales vêtues, com m uném ent appelés la balle. Sa q uantité d é p e n d du typ e d e construction do n t provient le fragm ent. Pour estimer e t enregistrer les différentes proportions d e terre e t d e dégraissant végétal d e ch a q u e fragm ent, un référentiel a é té créé à partir d e la fréquence des vacuoles observées sur une surface d e pâte. Pour que le référentiel corresponde à des mélanges d e terre e t d e dégraissant végétal réels, il a été fabriqué à partir d'échantillons expérimentaux.

Les empreintes d e bois d ’œ uvre e t de liens

L'étude de ces empreintes est indispensable pour toutes les parties des maisons qui sont construites a v e c une arm ature d e végétaux. Les empreintes d e bois d'oeuvre e t d e liens sont les seuls témoins p e rm e tta n t de connaître les dimensions e t les quantités d e bois désagrégés, ainsi que leur fo rm a t et le typ e d'assem blage.

Les formes

La form e des constructions résulte des techniques em ployées pour m ettre en p la c e les soubassements, les armatures e t la terre à bâtir. Les finitions d e surface, l'épaisseur des couches font ég a le m e n t partie des critères technologiques décrivant la forme e t participent à l'identification des constructions d o n t proviennent les fragments.

La combinaison des critères technologiques

L'établissement d e l'ap partenance de fragm ents épars à une construction particulière nécessite de com biner les critères technologiques. L'association de l'épaisseur des couches, d e la finition d e la surface, de l'armature, d e la préparation de la terre à bâtir constitue alors l'ensemble des critères qui perm et d e p ro cé d e r à c e typ e d e distinction.

II. Application de la m éthode aux vestiges

La m éthode d 'é tu d e a permis d'id entifier les techniques d e construction des éléments architecturaux suivants.

Les murs

L 'é tu d e des em preintes retrouvées sur les fragm ents en connexion a v e c un pan de mur (Fig. 2) to m b é à p la t sur un sol e t l'observation des vestiges d e murs mieux conservés sur un autre site ont permis d'id entifier une techniqu e de construction ap p e lé e torchis sur poteaux jointifs. Ces poteaux, faits de rondins ou d e bois refendus, ne sont pas reliés par un c la yo n n a g e mais par des traverses fixées par des cordes. C e tte a rm a tu re é ta it recouverte d'une c o u ch e d e torchis, puis d'une couche d'enduit en terre à bâtir, à son tour b a dige onnée a ve c une terre d e couleur blanche. La reconnaissance d e c e type d 'a rm a tu re a permis d'id entifier son utilisation pour la construction d'autres murs dans d'autres maisons de différents niveaux du site. La technique du torchis sur c la y o n n a g e coexiste a v e c elle dans les mêmes niveaux e t les deux types d e murs é ta ie n t certainem en t associés dans la construction d 'u n e m êm e maison. Les reconstitutions expérimentales nous ont permis d e tester l'association de ces deux techniques. Elles nous ont surtout appris à quel point le travail de construction é ta it intégré dans le cycle agricole e t à quel point les travaux de préparation des m atériaux d e construction devaien t être un travail perm anen t dans un village néolithique.

.S.S V

Fig. 2. Dikili Tash : Em preintes d e p o te a u x jointifs sur ies fra g m e n ts d e terre à b â tir ( p h o to P. C o lle t)

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Bâti et habitat

Le sol construit

Un sol construit très brûlé par l'ince ndie a été préservé e t se caractérise par une très fine co u ch e d'enduit d e terre à bâtir. C et enduit é ta it directem ent épa n d u sur le terrain aplani et nivelé. Les inégalités du sol sont d o n c en grande partie le produit d'un a m é n a g e m e n t intentionnel du terrain d e construction a va n t la mise en p la ce d e l'enduit. Des expérimentations ont é té menées pour tester la résistance au piétinem ent intensif de c e typ e d'e nduit.

La plate-form e

Sur c e sol, a été a m é n a g é e une plate-forme, aujourd'hui bien conservée. C 'est une structure pleine, construite entièrem ent en terre à bâtir, d e form e ovale, d'environ 10 cm d e haut, d o n t le bord est arrondi e t la surface aplanie pour perm ettre d e poser des objets dessus.

Les structures d e stockage

Des structures d e stockage sont attestées par un grand nom bre d e fragm ents de terre à bâtir brûlés, retrouvés dans deux amas, pris dans un sédiment rouge, qui c o n te n a it un grand nom bre de graines de céréales. L'étude des empreintes a permis de découvrir un typ e d e silo en form e d e corbeille enduite ferm ée par une c h a p e de terre, uniquem ent connu jusqu'à présent par des exemples ethnographiques.

Les structures d e combustion

Deux fours ont conservé une partie d e leur voûte en élévation, mais dans la plupart des cas il ne subsiste des structures de com bustion (fours e t foyers) que des fragm ents d e sole e t de voûte, retrouvés éparpillés et mélangés à des vestiges d'une autre nature. L'aspect e t la form e d e la terre à bâtir, très dégraissée en minéraux e t très lissée pour la sole, très dégraissée en végétau x e t en form e d e colombins pour la voûte, nous perm ettent de les distinguer. En effet, la voûte a été construite par em pilem ent successif d e colombins d e terre à bâtir do n t la form e et les limites sont p arfaitem en t visibles sur les parois conservées. Pour tester ces hypothèses sur les techniques d e construction des fours et des foyers, nous avons p ro cé d é à une série d'expérimentations, qui se sont aussi appuyées sur les tém oignages recueillis lors d'enquêtes ethnographiques en M acédoine occidentale.

Le décor mural

Sur le sol a été d é co u ve rt un « bucrane » (Fig. 3), retrouvé to m b é à l'envers la fa c e sur le sol. Sa fa c e postérieure plane correspond sans d o u te à la surface du mur sur lequel il é ta it appliqué, exposé co m m e un tro p h é e . Des museaux d e bovidés modelés en terre o n t été retrouvés à proximité dans un amas. Ces objets m ontrent l'usage très varié de la terre à bâtir. Ses propriétés sont telles q u e ce matériau perm et une grande souplesse d'utilisation. Il perm et des formes très simples telles qu'u n e plate­

forme, mais aussi des formes plus complexes, com m e le bucrane.

La m éthode d 'é tu d e des fragm ents de terre à bâtir qui a été mise au point a permis la reconstitution des techniques d e construction des différentes structures plus ou moins bien conservées in situ. Elle a aussi permis d e relier entre eux des élém ents a rch ite ctu ra u x éparpillés dans la fouille e t de reconstituer l'esp ace intérieur des pièces fouillées.

Elle montre to u t l'intérêt qui d o it être porté à c e type d e vestiges qui livrent b e a u c o u p d'inform ations

techniques sur l'arch itecture préhistorique. Fig. 3. Dikili Tash : B ucra ne (p h o to P. Collet).

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Sylvia Martinez e t Sandra Prévost-Dermarkar

Éléments bibliographiques

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