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Impact de la prématurité sur le développement des capacités d'inhibition et de régulation émotionnelle

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Academic year: 2022

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Thesis

Reference

Impact de la prématurité sur le développement des capacités d'inhibition et de régulation émotionnelle

PIZZO, Roxane

Abstract

Dans ce travail de thèse, notre objectif a été d'examiner dans quelle mesure certaines compétences cognitives spécifiques, telle que l'inhibition, l'attention sélective, le raisonnement social et la régulation émotionnelle étaient reliées aux difficultés socio-émotionnelles des enfants prématurés. Dans un premier temps, nous avons identifié la présence de déficits exécutifs (d'inhibition) et attentionnels, de raisonnement social et des difficultés socio-émotionnelles chez des enfants prématurés en début de scolarité. Ensuite, nous avons exploré les relations entre les déficits d'inhibition, d'attention, de raisonnement social et les difficultés socio-émotionnelles. Enfin, nous nous sommes focalisés sur les compétences d'inhibition et de régulation émotionnelle des enfants nés prématurément à l'âge préscolaire, afin non seulement d'identifier la présence de déficits dans ces domaines mais également d'établir des liens entre ces compétences et les comportements socio-émotionnels problématiques. Nous avons également examiné l'influence de variables biologiques (âge [...]

PIZZO, Roxane. Impact de la prématurité sur le développement des capacités d'inhibition et de régulation émotionnelle. Thèse de doctorat : Univ. Genève, 2010, no.

FPSE 468

URN : urn:nbn:ch:unige-255620

DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:25562

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:25562

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Section de Psychologie

Sous la direction du Professeur Martial Van der Linden

IMPACT DE LA PREMATURITE SUR LE DEVELOPPEMENT

DES CAPACITES D’INHIBITION ET DE REGULATION EMOTIONNELLE

THESE

Présentée à la

Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de l’Université de Genève

pour obtenir le grade de Docteur en Psychologie

par Roxane PIZZO

de Montreux (VD) Thèse No 468

GENEVE Décembre 2010

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Impact de la prématurité

sur le développement des capacités d’inhibition et de régulation émotionnelle

Roxane PIZZO

Candidate au titre de Docteure en Psychologie

Jury composé des Professeurs :

Martial Van der Linden, directeur, Université de Genève Petra Hüppi, Université de Genève

Claude-Alain Hauert, Université de Genève Didier LeGall, Université d’Angers

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Remerciements

Je tiens tout d’abord à remercier le Professeur Martial Van der Linden, mon directeur de thèse, qui m’a accompagnée et soutenue sans relâche et avec beaucoup de patience tout au long de ces cinq dernières années.

Ses précieux conseils et ses encouragements m’ont permis de trouver la force d’accomplir ce travail.

Je remercie la Professeure Petra Hüppi de m’avoir donné la possibilité de réaliser ce projet en collaboration avec l’équipe de l’Unité de Développement des HUG et d’avoir fait partie de ma commission de thèse.

Je remercie chaleureusement le Professeur Claude-Alain Hauert pour son soutien et ses conseils lors des moments de doute. Merci également d’avoir fait partie de ma commission de thèse.

Un grand merci au Professeur Didier Le Gall d’avoir accepté de participer à mon jury de thèse.

Je remercie la Professeure Koviljka Barisnikov, directrice de l’Unité de Psychologie Clinique et Neuropsychologie de l’enfant à l’Université de Genève, de m’avoir donné la possibilité de réaliser ce travail au sein de son équipe durant cinq ans.

Ce travail n’aurait pu aboutir sans les enfants qui ont pris part aux différentes recherches. Un grand merci à eux ainsi qu’à leurs parents de nous avoir fait confiance. Je remercie également les membres des équipes des Unités de Développement des HUG et du CHUV sans qui rien n’aurait été possible. Merci à Mmes Cristina Borradori-Tolsa, Monica Freschi, Margarita Forcada-Guex, Maryline Monnier et Lyne Jaunin.

Je remercie sincèrement l’ensemble des stagiaires et étudiants ayant participé à la réalisation des recherches entre 2005 et 2008 : Mmes Cécile Schmid, Katia Schenkel, Laurence Caratsch, Anne-Cristine Crettaz, Louise Reichler, Sandrine Andenmatten, Sarah Menghetti et M. Cédric Devaud qui, depuis, ont tous trouvé leur voie que cela soit en clinique ou en recherche.

Je remercie mes collègues et amis de la Faculté de Psychologie de Genève qui m’ont donné la possibilité de réaliser ce travail dans une ambiance chaleureuse. Merci pour leur aide, conseils et soutien. Merci également pour les moments de partage au sein de l’Université et en dehors de celle-ci, notamment lors des différentes collocations m’ayant permis de conserver un pied en terre genevoise. Merci à Loyse Hippolyte et Sébastien Urben avec qui une complicité et des liens d’amitiés se sont développés au long de ces années de travail dans les locaux de l’Unité de Psychologie Clinique et Neuropsychologie de l’enfant. Je me réjouis de les retrouver pour de nouvelles aventures prochainement.

Merci à Loyse, Samanta, Séverine et Xavier pour leurs encouragements et pour le temps passé à lire, relire, re-relire le manuscrit durant le sprint final.

Un énorme merci à Charles, Denis ainsi qu’au Dr. Aurelio Mastropaolo qui m’ont aidé à relever le défi de terminer cette thèse.

Je remercie mes « 2000 kilos » d’amis pour avoir partagé mes craintes, mes soucis, mes hauts et mes bas durant les trajets Genève-Lausanne. Grâce à eux la vie de thésarde est devenue beaucoup plus paisible. OEE.

Merci à mon ami Paul N’Dri Konan qui m’accompagnée depuis le début de ce projet et qui n’a cessé de m’encourager et de croire en moi. Le contrat est dorénavant rempli.

(5)

Merci également à ma famille « du quartier »: Alfred, Ange, Flore, Carmelo, Kevin, Colette et Loic. Vous m’avez appris à relativiser un grand nombre d’événements de vie et à grandir durant ces quatre dernières années.

Sans vous cela n’aurait pas été pareil…

Enfin, un remerciement tout particulier va à mes parents ainsi qu’à ma sœur Lysiane qui ont toujours cru en moi et qui m’ont aidée à traverser les moments difficiles rencontrés sur le chemin de la thèse.

(6)

Tables des Matières

PREAMBULE ... 1

INTRODUCTION GENERALE ... 3

Chapitre 1 La prématurité : Aspects généraux ... 3

1.1. Présentation de la prématurité ... 3

1.2. Aspects médicaux et développement cérébral des enfants nés prématurément ... 5

1.3. Profil cognitif des enfants nés prématurément ... 8

1.3.1. Fonctionnement cognitif général ... 8

1.3.2. Compétences cognitives spécifiques ... 10

1.4. Difficultés socio-émotionnelles des enfants nés prématurément ... 11

Chapitre 2 Développement des capacités exécutives et socio-émotionnelles chez les enfants nés à terme... 15

2.1. Développement des fonctions exécutives ... 15

2.2. Développement des capacités d’inhibition ... 17

2.3. Développement des capacités socio-émotionnelles ... 20

2.4. Liens entre les capacités d’inhibition et les compétences socio-émotionnelles ... 23

Chapitre 3 Fonctionnement exécutif dans la prématurité ... 27

3.1. Capacités attentionnelles des enfants nés prématurément ... 27

3.2. Capacités exécutives des enfants nés prématurément ... 31

3.3. Capacités d’inhibition des enfants nés prématurément ... 35

Chapitre 4 Fonctionnement socio-émotionnel dans la prématurité ... 39

4.1. A l’âge scolaire... 39

4.2. A l’âge préscolaire ... 42

PARTIE EXPERIMENTALE ... 45

Problématique ... 45

Etude 1 Capacités exécutives et compétences socio-émotionnelles des enfants nés prématurément et nés à terme à l’âge de 5 ½ ans ... 47

1. Introduction ... 47

2. Méthode ... 47

2.1. Participants ... 47

2.2. Matériels et procédure ... 49

2.3. Analyses ... 52

3. Résultats... 53

3.1. Comparaisons intergroupes ... 53

3.2. Analyses de cas individuel au sein du groupe des enfants nés prématurément ... 55

3.3. Relations entre comportements oppositionnels et difficultés exécutives ainsi qu’entre comportements oppositionnels et difficultés de raisonnement social chez les enfants prématurés ... 57

3.4. Relations entre les difficultés de raisonnement social et les difficultés exécutives chez les enfants prématurés ... 58

3.5. Impact de l’AG sur les comportements oppositionnels, les déficits exécutifs et le raisonnement social ... 58

4. Conclusion ... 59

Etude 2 Attentional networks efficiency in preterm children ... 63

Abstract. ... 63

1. Introduction ... 64

1. 1. Attentional and executive abilities in preterm children ... 64

1.2. The Attentional Network Task ... 66

1.3. The Attentional networks in preterm children ... 66

2. Methods ... 67

2.1. Participants ... 67

(7)

2.2. Materials and procedure ... 68

2.3. Analysis ... 69

3. Results ... 71

3.1. Performance across Task Conditions of the ANT for the Preterm and Full-Term Groups ... 71

3.2. Group Comparisons Using the Subtraction and Interference Ratio Methods ... 72

3.3. Correlation between Attentional Networks scores computed by the Subtraction and Interference Ratio Methods... 73

3.4.Correlations among the Attentional Networks...73

4. Discussion ... 74

Etude 3 Socio-emotional abilities of preterm children at school age ... 77

Abstract. ... 77

1. Introduction ... 78

2. Methods ... 82

2.1. Participants ... 82

2.2. Measures ... 83

2.3. Procedure ... 85

2.4. Analysis ... 86

Results... ... 86

3.1. Comparison of performances between groups ... 86

3.2. Regression analyses ... 88

3.3. Correlations between the socio-emotional, the inhibition and the selective attention abilities of the preterm children... 92

4. Discussion ... 92

Etude 4 Capacités d’inhibition et compétences socio-émotionnelles des enfants nés prématurément et âgés de 2 ans ... 97

1. Introduction ... 97

2. Méthode ... 98

2.1. Participants ... 98

2.2. Matériels et procédure ... 99

2.2.1. Effortful Control Battery ... 99

2.2.2. Lab-TAB ... 103

2.2.3. Questionnaires ... 106

2.2.4. Procédure ... 107

2.3. Analyses ... 108

3. Résultats... 109

3.1. Relations entre les résultats aux différentes tâches censées évaluer les capacités d’inhibition chez les enfants nés prématurément et nés à terme ... 109

3.2. Relation entre les résultats aux différentes tâches censées évaluer les capacités de régulation émotionnelles chez les enfants nés prématurément et chez les enfants nés à terme ... 110

3.3. Comparaisons intergroupes des performances d’inhibition ... 112

3.4. Comparaisons intergroupes des capacités de régulation émotionnelle ... 114

3.5. Comparaisons intergroupes des comportements socio-émotionnels... 115

3.6. Liens entre les déficits d’inhibition, les difficultés de régulation émotionnelle et les problèmes socio- émotionnels chez les enfants prématurés ... 116

3.7. Analyses de cas individuels au sein du groupe des enfants nés prématurément ... 117

3.8. Relations entre l’AG, le poids de naissance et les performances des enfants aux épreuves d’inhibition et de régulation émotionnelle ainsi qu’aux questionnaires comportementaux... 120

3.9. Comparaison des évaluations de l’anxiété, de la dépression et de l’impulsivité des mères d’enfants prématurés et nés à terme et exploration de l’impact de ces évaluations sur les performances des enfants ... 121

4. Conclusion ... 122

DISCUSSION GENERALE ...125

1. Synthèse des résultats ... 125

Etude 1… ... 125

Etude 2… ... 126

Etude 3…. ... 127

Etude 4….. ... 128

(8)

2. Discussion des résultats ... 130

2.1. Apports des recherches réalisées ... 130

2.1.1. Les fonctions exécutives (FE) et les capacités attentionnelles des enfants prématurés... 134

2.1.2. Le raisonnement social des enfants prématurés ... 139

2.1.3. La régulation émotionnelle des enfants prématurés ... 141

2.1.4. L’impact des variables biologiques et environnementales sur les compétences des enfants prématurés………...143

2.1.5. Synthèse des relations entre FE, raisonnement social, régulation émotionnelle et comportement socio-émotionnel chez les enfants nés prématurément ... 145

2.2. Limites et perspectives de recherches ... 147

2.2.1. L’évaluation des comportements socio-émotionnels ... 147

2.2.2. L’évaluation des capacités cognitives spécifiques ... 148

2.2.3. L’appariement des enfants prématurés sur leur âge corrigé ... 150

2.2.4. Les relations entre les différentes capacités cognitives et comportements socio-émotionnels ... 151

2.3. Implication cliniques………... 151

BIBLIOGRAPHIE ...153

ANNEXE 1: LISTE DES ABREVIATIONS ...169

(9)

PREAMBULE

Grâce au progrès de la médecine ainsi qu’au développement des soins périnataux, le taux de survie des enfants nés prématurément s’est grandement accru ces vingt dernières années. En Suisse, 9% des naissances sont considérées comme étant prématurées, ce qui constitue le deuxième taux le plus élevé d’enfants nés avant le terme en Europe après l’Autriche. Une naissance prématurée peut engendrer des conséquences sur le long terme aussi bien au niveau moteur, cognitif que socio-émotionnel.

En particulier, plusieurs études ont clairement mis en évidence des difficultés socio-émotionnelles chez les enfants prématurés. Cependant, très peu de recherches ont étudié les mécanismes cognitifs sous-jacents à ces difficultés et rares sont celles qui se sont intéressées au développement précoce de ces problèmes.

Dans ce travail de thèse, notre objectif a été d’examiner dans quelle mesure certaines compétences cognitives spécifiques, telle que l’inhibition, l’attention sélective, le raisonnement social et la régulation émotionnelle étaient reliées aux difficultés socio-émotionnelles des enfants prématurés. Dans un premier temps, nous avons identifié la présence de déficits exécutifs (d’inhibition) et attentionnels, de raisonnement social et des difficultés socio-émotionnelles chez des enfants prématurés en début de scolarité. Ensuite, nous avons exploré les relations entre les déficits d’inhibition, d’attention, de raisonnement social et les difficultés socio-émotionnelles. Enfin, nous nous sommes focalisés sur les compétences d’inhibition et de régulation émotionnelle des enfants nés prématurément à l’âge préscolaire, afin non seulement d’identifier la présence de déficits dans ces domaines mais également d’établir des liens entre ces compétences et les comportements socio-émotionnels problématiques. Nous avons également examiné l’influence de variables biologiques (âge gestationnel, poids de naissance) et de variables environnementales (comportements des mères) sur les compétences cognitives et socio-émotionnelles des enfants prématurés.

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(11)

INTRODUCTION GENERALE

Chapitre 1 La prématurité : Aspects généraux

Ce premier chapitre a pour objectif de présenter les principales caractéristiques de la prématurité, les critères la définissant et les particularités histologiques et neuroanatomiques qui lui sont associées. Nous aborderons ensuite le fonctionnement cognitif et socio-émotionnel général des enfants nés prématurément, pour terminer par l’impact qu’une telle naissance peut avoir sur l’environnement de ces enfants.

1.1. Présentation de la prématurité

Ces dernières années, l’étude du développement des enfants nés prématurément a pris une ampleur considérable.

En effet, ce champ de recherches s’est largement étendu suite aux progrès de la médecine qui ont permis à un nombre croissant de ces enfants de survivre à une naissance précoce (Fanaroff, Hack, & Walsh, 2003; Richardson et al., 1998; Riley, Roth, Sellwood, & Wyatt, 2008; Wilson-Costello, Friedman, Minich, Fanaroff, & Hack, 2005). En Suisse, le taux de naissances prématurées est de 9% selon l’Office Fédéral de la Statistique (2007). Ce pourcentage élevé de naissances avant le terme peut être expliqué par deux facteurs principaux : d'une part l’âge moyen des mères, en augmentation ces deux dernières décennies, d’autre part les naissances multiples, devenues plus courantes notamment suite à des traitements contre l’infertilité (Ananth, Joseph, & Demissie, 2005). Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, la prématurité peut être définie sur la base de deux critères : l’âge gestationnel (AG) et le poids à la naissance (PN) (Dayan, Andro, & Dugnat, 2003). Différents degrés de prématurité sont distingués. Ainsi, une naissance est considérée comme prématurée lorsqu’elle a lieu avant ou durant la 37e semaine de gestation. L’extrême prématurité se situe entre 22 et 27 semaines de gestation, la grande prématurité entre 28 et 31 semaines de gestation et la prématurité modérée entre 32 et 36 semaines de gestation. De manière similaire, en terme de poids à la naissance, un nouveau-né pesant moins de 1000 g sera considéré comme ayant un «extrême petit poids de naissance », s’il a un poids entre 1000 et 1500 g il aura un « très petit poids de naissance» et enfin, pour un poids entre 1500 et 2500 g, il sera considéré comme ayant un « petit poids de naissance». Les enfants ayant un poids supérieur à 2500 g sont considérés comme des enfants ayant un « poids normal ». Cette

« catégorisation » des nouveau-nés prématurés en fonction de leur âge gestationnel et/ou de leur poids à la naissance est essentielle pour pouvoir mesurer l’impact de la prématurité sur leur développement cérébral, cognitif et socio-émotionnel.

De plus, ces deux critères permettent d’identifier les enfants présentant un retard de croissance intra-utérin (RCIU), celui-ci étant défini par le rapport « poids /âge de gestation ». Les causes les plus fréquentes d’un RCIU sont le tabagisme, la toxicomanie, l’alcoolisme ou la malnutrition de la mère, les grossesses multiples ainsi que l’insuffisance placentaire (Alkakay, Graham, & Pomerance, 1998). Les enfants nés avec un poids inférieur à 1000 g et/ou un âge gestationnel inférieur à 28 semaines sont plus à risque de développer des complications périnatales, notamment sur les plans neurologique et/ou respiratoire. Au niveau cérébral, une naissance prématurée peut

(12)

engendrer des hémorragies intra- et périventriculaires1 ainsi que la leucomalicie périventriculaire2 (Volpe, 2001), ce qui risque d’entraîner des lésions de la substance blanche pouvant engendrer, dans les cas les plus graves, une infirmité motrice cérébrale (Dalla Piazza, 1997).

Les chercheurs et cliniciens réalisant des évaluations cognitives des enfants prématurés ont pour habitude de prendre en compte les conséquences de la prématurité sur le développement cognitif et moteur en calculant l’âge corrigé des enfants (Lems, Hopkins, & Sampson, 1993). Ce dernier correspond à l’âge que l’enfant aurait réellement au moment de l’évaluation s’il était né à terme. Ainsi, l’obtention de l’âge corrigé se fait en soustrayant le nombre de semaine de prématurité3 d’un enfant à son âge réel. L’âge corrigé est ainsi utilisé afin que les différences identifiées entre les enfants prématurés et les enfants nés à terme ne puissent être confondues avec le retard dans le développement biologique, notamment sur le plan cérébral (Siegel, 1994). De plus, l’ajustement de l’âge est considéré comme permettant de différencier les effets transitoires consécutifs à une naissance prématurée des effets persistants. Toutefois, à l’heure actuelle, le maintien de l’utilisation de l’âge corrigé dans la pratique clinique et la recherche fait l’objet de discussions. En effet, selon certains auteurs (Aylward, 2002), la prise en compte de l’âge corrigé dans les évaluations pourrait conduire à sous-estimer les déficits réellement présentés par les enfants prématurés en masquant les déficits qui seraient considérés comme transitoires et consécutifs au retard biologique ainsi qu’atténuer ceux plus persistants. Or, ces difficultés sont belles et bien présentes et vont avoir des conséquences dans la vie quotidienne des enfants. Il existe néanmoins un relatif consensus pour que l’âge corrigé soit calculé pour tout enfant né prématurément avant l’âge de 36 semaines de gestation. Cependant, aucun accord n’a été trouvé concernant la limite supérieure d’âge chronologique nécessitant l’utilisation de l’âge corrigé. Certains chercheurs proposent qu’il devrait être appliqué jusqu’à l’âge de deux ans (Batshaw & Perrett, 1992) alors que d’autres corrigent l’âge jusqu’au début de la scolarité (Pritchard et al., 2009; Woodward et al., 2009). A l’opposé, certains auteurs ont choisi de ne pas utiliser la correction d’âge à 24 mois (De Groote, Roeyers, & Warreyn, 2006;

Espy et al., 2002). En Suisse, la Société Suisse de Néonatologie propose que les enfants nés prématurément inclus dans les différents programmes de suivi longitudinal soient soumis à une évaluation de leur fonctionnement intellectuel global et de leur motricité entre 18 et 24 mois, âge corrigé. Puis, lors des évaluations suivantes, l’âge corrigé ne devrait plus être pris en compte. Toutefois, aucune donnée quant à la pertinence de l’utilisation de l’âge corrigé pour l’évaluation de compétences spécifiques n’existe à ce jour. Ce constat peut être expliqué par le fait que la majorité des recherches se sont centrées sur les compétences d’intelligence globale et de motricité et que, de manière générale, très peu d’études sur des aspects cognitifs spécifiques ont été réalisées à l’âge préscolaire. Dans ce travail, nous aborderons la question des conséquences de l’utilisation d’une correction d’âge sur les compétences exécutives et de régulation émotionnelle d’enfants prématurés âgés de deux ans et montreront comment les conclusions d’évaluations peuvent être modifiées en fonction de la prise en compte ou non de cette correction.

1.2. Aspects médicaux et développement cérébral des enfants nés prématurément

1 Hémorragies au niveau des ventricules cérébraux (=cavités contenant le liquide céphalo-rachidien)

2 Nécrose des cellules autour des ventricules cérébraux

(13)

Les progrès récents de la médecine, et plus particulièrement des soins néonataux, ont permis d’abaisser la limite de viabilité des enfants nés prématurément à un âge gestationnel de 22 semaines (Salle & Sureau, 2006). Toutefois, l’utilisation de mesures médicales intensives est préconisée uniquement à partir de 24 semaines de gestation, ceci en raison du taux important de mortalité (près d’un tiers) durant la première année de vie des enfants ayant un âge gestationnel inférieur (Berger et al., 2002). Ce pourcentage de décès peut être expliqué par le fait que le développement physique de ces enfants n’est de loin pas achevé et que les difficultés d’adaptation au milieu extra- utérin sont multiples (Berger et al., 2002). En effet, plus les enfants naissent prématurément, plus ils risquent de développer des complications médicales pouvant avoir pour conséquences des déficits à long terme (Ward &

Beachy, 2003). Ainsi, des problèmes respiratoires (dysplasie broncho-pulmonaire, insuffisance respiratoire chronique, apnées) sont fréquents en raison du développement insuffisant des poumons et ils peuvent entraîner des hypoxies cérébrales4. Les enfants prématurés sont également très exposés aux risques d’infections (notamment nosocomiales) ainsi qu’à des carences nutritionnelles et/ou hormonales, lesquelles entraînent des problèmes neurodéveloppementaux et une plus grande fragilité de leur santé à long terme (Marret, 2007; Wolke, 1998).

En ce qui concerne le développement cérébral durant la grossesse, deux grandes étapes ont été identifiées.

La première, observée durant la première moitié de la grossesse, est celle de la prolifération (ou multiplication) et de la migration des neurones ; la seconde, pendant la deuxième moitié de la grossesse, est caractérisée par l’organisation du cerveau au niveau de l’orientation des neurones et de leurs interconnexions. Il s’agit là d’une période très importante, particulièrement pour le développement de la matière blanche (Huppi et al., 1998; Marret, 2007). C’est en effet à ce moment que les cellules gliales vont produire de la myéline, substance d’isolation des fibres nerveuses, permettant la propagation des influx nerveux. En parallèle, le cerveau grandit et les circonvolutions cérébrales se forment. La Figure 1 représente ces deux grandes étapes du développement cérébral.

Prolifération des neurones Migration des neurones

Semaines de gestation

10 15 20 25 30 35 40

Le développement cérébral

Gyri: Circonvolutions cérébrales

Myélinisation Différenciation de la glie

Organisation: orientation et connexions entre neurones

23 40

Prématurité

3 Calculé de la manière suivante : 42 semaines – l’AG de l’enfant

4 Manque transitoire d’oxygène suite à une diminution de l’apport sanguin.

(14)

Figure 1. Développement cérébral durant les 40 semaines de gestation (Huppi, Forcada-Guex, Barisnikov, & Borradori Tolsa, 2007).

Chez les enfants nés prématurément, c’est donc la deuxième étape du développement du cerveau qui va être affectée par leur naissance précipitée. Durant la période néonatale le développement sera alors très sensible aux événements médicaux (hypoxie, ischémie, infections, traitements médicamenteux, etc.) et environnementaux (par exemple la présence constante de lumière et sons aux soins intensifs) pouvant engendrer des perturbations dans le processus de maturation cérébrale normal (Mewes et al., 2006). Ainsi, les complications les plus fréquemment rencontrées sont des hémorragies intra-ventriculaires5, une leucomalacie périventriculaire, ainsi que des anomalies diffuses de la matière blanche (Volpe, 2001). Le risque d’hémorragies intraventriculaires diminue au fur et à mesure de l’avancée dans la gestation ; quant à la leucomalacie périventriculaire, elle est liée à la présence d’épisodes hypoxiques-ischémiques durant la période périnatale (Volpe, 2001).

Grâce aux techniques d’imageries cérébrales (Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) structurelle ou fonctionnelle ; Imagerie du Tenseur de Diffusion (Diffusion Tensor Imaging ; DTI) ; Morphométrie Voxel-Based (Voxel Based Morphometry ; VBM)), différentes recherches ont permis d’identifier à différents âges les anomalies neuroanatomiques d’enfants nés prématurément. Ces études ont mis en évidence une réduction significative du volume de la matière grise (Gimenez et al., 2006; Inder, Warfield, Wang, Huppi, & Volpe, 2005; Nosarti et al., 2002;

Nosarti et al., 2008), du cervelet (Allin et al., 2001; Parker et al., 2008), du corps calleux (Nagy et al., 2003; Nosarti et al., 2004) ou encore des régions hippocampiques (Beauchamp et al., 2008; Isaacs et al., 2000). Toutefois une prédominance de lésions de la matière blanche, dues principalement aux hémorragies intraventriculaires et/ou à une leucomalacie périventriculaire, est retrouvée dans la majorité des études neurostructurelles, et ceci à différents âges (Huppi et al., 2001; Nosarti et al., 2008; Yung et al., 2007).

Ces lésions de la matière blanche ont notamment pu être mises en lien avec des problèmes exécutifs. Ainsi, Woodward, Edgin, Thompson et Inder (2005) constatent que le nombre important d’erreurs de persévération dans une tâche de type A non B (suggérant un déficit d’inhibition) chez des enfants nés prématurément (AG <32 semaines) peut être mis en lien avec la sévérité des lésions de la matière blanche au moment du terme. De même, Naberhaus et al., (2007) ont observé chez des adolescents nés prématurément une relation entre la réduction du corps calleux et des performances plus faibles sur le plan exécutif (au niveau de l’initiation verbale et de la flexibilité mentale).

Il apparaît donc que les conséquences d’une naissance prématurée sont multiples tant sur le plan physique que neurologique. De plus, il apparaît que les lésions cérébrales néonatales, plus particulièrement celles affectant la matière blanche, ont des conséquences sur le plan cognitif (Anderson, Doyle, & Group, 2003; Inder et al., 2005;

5 Les hémorragies intra-ventriculaires ont leur origine dans la matrice germinale, structure localisée au niveau des ventricules latéraux, ayant un rôle essentiel dans la prolifération des neurones et des cellules gliales. La matrice germinale est très vascularisée et donc sensible aux variations d’apport sanguin. La gravité des hémorragies peut varier en sévérité. 4 grades de sévérité sont définis: grade I : hémorragie mineure au niveau de la matrice germinale, grade II : hémorragie atteignant les ventricules latéraux, grade III : hémorragie au niveau des ventricules latéraux entraînant leur dilatation, grade IV : atteinte de la matière blanche périventriculaire (=une leucomalacie périventriculaire).

(15)

Volpe, 2003) qui perdurent à l’adolescence (Constable et al., 2008; Stewart et al., 1999) et à l’âge adulte (Kontis et al., 2009).

1.3. Profil cognitif des enfants nés prématurément

Les effets de la prématurité sur le fonctionnement cognitif et socio-émotionnel des enfants ont fait, depuis une vingtaine d’années, l’objet de très nombreuses études. Selon Anderson et al. (2003), 40 à 50% des enfants nés prématurément présentent des déficits cognitifs, des troubles de l’apprentissage et/ou des problèmes socio- émotionnels ayant des conséquences sur leur vie quotidienne et sur les relations qu’ils entretiennent avec les autres.

Dans la section qui suit, nous nous intéresserons plus particulièrement aux difficultés cognitives identifiées chez les anciens prématurés, durant l’enfance et jusqu’à l’âge adulte.

1.3.1. Fonctionnement cognitif général

Une naissance prématurée peut être associée à un risque de retard mental chez les enfants nés prématurément et présentant des troubles neurologiques importants. Toutefois, une grande partie des enfants prématurés n’ont pas de problèmes moteurs majeurs, ni de retard mental important. Par contre, les scores de ces enfants aux échelles globales d’intelligence6 sont le plus souvent inférieurs à ceux des enfants nés à terme (Anderson & Doyle, 2004;

Bayless & Stevenson, 2007; Bhutta, Cleves, Cradock, & Anand, 2002; Hoff, Hansen, Greisen, & Mortensen, 2006;

Wolke, 1998) pour autant qu’ils soient considérés comme inférieurs aux normes. D’une manière générale, les scores aux échelles évaluant l’intelligence globale sont corrélés avec l’âge gestationnel et/ou le poids à la naissance (Horwood, Morgridge, & Darlow, 1998; Wolke, 1998), même s’il existe des variations d’une étude à l’autre (Aylward, 2002; Deforge et al., 2006; Stoelhorst et al., 2003). De plus, des données mettent en évidence le fait que les difficultés cognitives globales déjà identifiées à l’âge préscolaire (Doyle et al., 1997; Doyle & Group, 2004; Hoff, Hansen, Munck, & Mortensen, 2004; Stoelhorst et al., 2003; Woodward et al., 2009) semblent persister tout au long de l’enfance (Anderson et al., 2003; Deforge et al., 2006; Horwood et al., 1998) et jusqu’à l’âge adulte (Hack, 2006).

Selon certains auteurs, les compétences cognitives générales chez les anciens prématurés diminueraient même légèrement avec le temps (Rieck, Arad, & Netzer, 1996).

Dans une étude récente de Woodward et al. (2009), les enfants nés extrêmes prématurés (<28 semaines d’AG) ou grands prématurés (28-33 semaines d’AG) présentent à l’âge de 4 ans un retard de développement du langage, tant sur le plan productif (niveau de vocabulaire plus faible) que réceptif (difficultés de compréhension), avec toutefois une prédominance de ces derniers. Ce retard langagier est corrélé à l’âge gestationnel.

Par ailleurs, les enfants nés prématurément présentent assez fréquemment des troubles des apprentissages, d’intensité variable, durant leur scolarité (Schaap, 1999). De manière plus précise, 20 à 30% des prématurés manifestent des difficultés d’apprentissage scolaire, plus particulièrement en lecture et en

6 Par exemple : la Bayley Intelligence Scale (Bayley, 1970), le Kaufmann Assesment Battery for Children (K.ABC ; Kaufman & Kaufman, 1984), l’Echelle d’intelligence de Wechsler pour enfant (WISC-IV ; Wechsler, 1991)

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mathématiques (Aarnoudse-Moens, Weisglas-Kuperus, van Goudoever, & Oosterlaan, 2009; Anderson et al., 2003;

Pritchard et al., 2009; Saigal, 2000; Saigal, den Ouden et al., 2003; Taylor, Espy, & Anderson, 2009; Taylor, Klein, Drotar, Schluchter, & Hack, 2006; Taylor, Klein, & Hack, 2000; Taylor et al., 2002), ce qui est deux à trois plus élevé que chez les enfants nés à terme (Peterson et al., 2000). Une recherche récente de Johnson et al. (2009) conclut même que 44 % des enfants nés avant 25 semaines d’AG auraient des compétences significativement inférieures en lecture et en mathématiques, comparativement à des enfants de même âge chronologique (11 ans). Ces difficultés perdureraient tout au long de leur parcours académique et s’accentueraient même légèrement à l’âge adulte (Allin et al., 2008; Hack, 2006), avec notamment pour conséquences des difficultés d’intégration dans le monde professionnel (Hille et al., 2007). Les études longitudinales les plus récentes confirment que les difficultés cognitives et d’apprentissages sont fréquentes suite à une naissance prématurée et qu’elles concernent non seulement les grands prématurés, mais également les prématurés avec un degré de prématuré léger (32-36 semaines d’AG) (Chyi, Lee, Hintz, Gould, & Sutcliffe, 2008; Kirkegaard, Obel., M., & Henriksen, 2006; Marret, 2007; van Baar, Vermaas, Knots, de Kleine, & Soons, 2009). Il a aussi pu être établi que la probabilité d’apparition de troubles des apprentissages suite à une naissance prématurée serait d’autant plus grande que la prématurité est importante (Cooke, 2005; Dalla Piazza, 1997; Saigal, Hoult, Streiner, Stoskopf, & Rosenbaum, 2000; Schaap, 1999).

Les recherches concernant les effets de la prématurité sur les compétences cognitives ont ainsi pu mettre en évidence l’existence de difficultés dès l’âge préscolaire qui peuvent perdurer jusqu’à l’âge adulte. Toutefois, l’évaluation globale du fonctionnement intellectuel ne permet pas d’identifier la présence de déficits cognitifs plus subtils (Aylward, 2002). Les études actuelles visent à déterminer de façon plus spécifique les processus cognitifs et socio-émotionnels qui sont touchés afin de pouvoir mettre en place des prises en charge individuelles adéquates, en plus des moyens d’éducation spécialisée souvent déjà proposés (logopédie, psychomotricité, etc.).

1.3.2. Compétences cognitives spécifiques

Les enfants nés prématurément présentent donc un léger retard dans le développement global de leur fonctionnement intellectuel global, sans pour autant que l’on puisse parler de déficience mentale avérée. Des déficits cognitifs spécifiques ont par ailleurs été mis en évidence ces dernières années dans différentes études qui avaient pour objectif soit de réaliser une exploration de différentes compétences cognitives chez d’anciens prématurés (Rushe et al., 2001; Taylor, Klein, Minich, & Hack, 2000; Taylor, Minich, Bangert, Filipek, & Hack, 2004), soit d’étudier de manière approfondie un processus cognitif particulier (Espy et al., 2002; Gozzo et al., 2009; Vicari, Caravale, Carlesimo, Casadei, & Allemand, 2004). Certaines études ont été menées auprès d’enfants d’âge préscolaire (Espy et al., 2002; Killbride, Thorstad, & Daily, 2004; Korkman et al., 2008; Rose, Feldman, Jankowski, &

Rossem, 2008) Rose, Feldman, Jankowski, & Van Rossem, 2008), d’autres auprès d’enfants d’âge scolaire (Taylor, Klein, Minich et al., 2000; Taylor, Minich, Klein, & Hack, 2004) ou encore auprès d’adolescents (Rushe et al., 2001;

Taylor, Minich, Bangert et al., 2004; Tideman, 2000). De plus, les populations de ces études étaient assez diversifiées au niveau de l’AG (d’un AG <25 semaines jusqu’à 36 semaines), du poids de naissance (d’un poids allant de <750 à 2500g) ainsi qu’au niveau des complications néonatales (par exemple des enfants ayant eu des hémorragies intraventriculaires allant d’un grade I à IV, des enfants ayant présenté des hypoxies cérébrales, etc.).

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De ces différentes études il ressort que les enfants nés prématurément peuvent présenter des déficits au niveau de la coordination motrice (Foulder-Hughes & Cooke, 2003; Holsti, Grunau, & Whitfields, 2002; Sue-Baron, Ahronovitch, Erickson, Gdley Larson, & Litman, 2009), des capacités visuo-motrices (Gohen, Lui, & Woods, 1998;

Hack, Taylor, & Klein, 1994; Marlow, Bracewell, & Wolke, 2007; Raman, Georgieff, & Rao, 2006) et/ou visuo- constructives (Caravale, Tozzi, Albino, & Vicari, 2005; Taylor, Klein, & Hack, 2000), de la vitesse de traitement (Rose

& Feldman, 1996), des capacités langagières (Caravale et al., 2005; Gozzo et al., 2009; Lewis et al., 2002; Luoma, Herrgard, Martikainene, & Ahonen, 1998; Ment, Vohr, Allan, & Katz, 2003; Pritchard et al., 2009), ainsi que de la mémoire de travail, notamment visuo-spatiale (Beauchamp et al., 2008; Espy et al., 2002; Luciana, Lindeke, Georgieff, Mills, & Nelson, 1999; Sue-Baron et al., 2009; Taylor, Hack, & Klein, 1995; Taylor, Klein, Minich et al., 2000; Vicari et al., 2004) et de la mémoire épisodique (Isaacs et al., 2000; Litt, Taylor, & Klein, 2005; Olsén et al., 1998; Taylor, Klein, & Hack, 2000; Taylor, Klein, Minich et al., 2000). Un grand nombre d’études ont également identifié des troubles de l’attention et des fonctions exécutives. Nous nous pencherons de manière plus détaillée sur ces déficits attentionnels et exécutifs, qui sont au coeur de notre travail, dans les sous-chapitres 3.1. et 3.2.

Les difficultés cognitives des anciens prématurés semblent donc toucher des domaines très variés mais il existe néanmoins une grande variabilité inter-individuelle (Horward, Anderson, & Taylor, 2008). Comme nous l’avons mentionné précédemment, cette variabilité peut être associée à des facteurs biologiques tels que le degré de prématurité (AG et/ou PN), les complications néonatales (hypoxies, hémorragies intraventriculaires, leucomalacie périventriculaire, anormalités de la matière blanche, etc.) (Raman et al., 2006), les actes médicaux périnataux (administration de corticoïdes), mais aussi à des facteurs environnementaux tels que le statut socioéconomique de la famille ou encore le fonctionnement familial (par exemple un milieu stressant ou anxiogène (Landry, Densen, &

Swank, 1997)). De plus, il importe de prendre en compte l’impact des difficultés socio-émotionnelles sur les performances cognitives et scolaires des anciens prématurés (Hille et al., 2001; Samara, Marlow, & Wolke, 2006).

Ces aspects socio-émotionnels et environnementaux seront abordés dans les prochaines sections.

1.4. Difficultés socio-émotionnelles des enfants nés prématurément

Outre les difficultés cognitives, un grand nombre d’études ont également mis en évidence des troubles du comportement socio-émotionnel chez les enfants prématurés (Anderson & Doyle, 2004; Bhutta et al., 2002; Hoff et al., 2004), et ceci tant durant la petite enfance (Clark , Woodward, Horwood, & Moor, 2008; Lowe, Woodward, &

Papile, 2005) que pendant la scolarité (Ross, Lipper, & Auld, 1990; Schothorst & Van Engeland, 1996; Senol, Sener, Ergenekon, & Gucuyener, 2001), et même jusqu’à la fin de l’adolescence (Horwood et al., 1998; Saigal, Pinelli, Hoult, Kim, & Boyle, 2003). Les difficultés socio-émotionnelles et comportementales les plus fréquemment observées sont des troubles hyperactifs avec déficit d’attention (THADA) (Hoff et al., 2004; Linhares, Chimello, & Bordin, 2005), des problèmes relationnels (Chapieski & Evankovich, 1997; Schothorst & Van Engeland, 1996; Stjernqvist &

Svenningsen, 1999), des difficultés de régulation émotionnelle (Clark et al., 2008; Stevenson, Blackburn, & Pharoah, 1999) et, à l’adolescence, des signes plus fréquents de dépression (Saigal, Pinelli et al., 2003) ainsi qu’une faible estime de soi (Elgen, Sommerfelt, & Markestad, 2002).

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Nous reviendrons plus en détails sur les problèmes socio-émotionnels des enfants nés prématurément dans le chapitre 4. Néanmoins, il faut dès à présent signaler que la majorité des données concernant les problèmes socio- émotionnels des enfants prématurés a été obtenue à l’aide de questionnaires remplis par les parents et/ou les enseignants et rares sont donc les études qui se sont penchées sur les processus psychologiques pouvant être spécifiquement impliqués dans l’apparition de ces difficultés.

Quelques recherches se sont néanmoins intéressées aux facteurs environnementaux et sociaux susceptibles de moduler ces difficultés socio-émotionnelles. Au travers d’une revue de la littérature, Chapieski et Evankovich (1997) ont montré que les difficultés socio-émotionnelles des enfants nés prématurément augmentent en présence de conditions socio-parentales difficiles (faible statut socioéconomique et socioculturel) ainsi que lorsque les parents (et surtout la mère) manifestent une souffrance psychologique (stress, dépression, anxiété) à la suite de la naissance prématurée. Les difficultés psychologiques des parents sont souvent la conséquence d’une hospitalisation longue des enfants prématurés et des complications médicales pouvant y être associées. Ainsi, durant la période néonatale. Les mères d’enfants prématurés montrent fréquemment une souffrance psychologique plus importante que celles d’enfants nés à terme (Singer, Yamashita, Lilien, Collin, & Baley, 1996). Or, différentes études ont observé que la dépression maternelle avait un impact négatif sur le développement cognitif, émotionnel et comportemental des enfants non seulement prématurés, mais également nés à terme (Field, 1995; Singer et al., 1997). Singer et al. (1999) ont constaté que les mères d’enfants ayant un très petit poids de naissance présentaient effectivement une souffrance psychologique (signes de dépression et d’anxiété) plus importante que les mères d’enfants nés à terme lorsque leurs enfants atteignent l’âge de un mois. Lorsque les enfants nés prématurément arrivent à l’âge de deux ans, les mères des enfants n’ayant eu que peu de risques de complications médicales ne se distinguent plus des mères d’enfants nés à terme. Par contre, les mères d’enfants prématurés ayant eu des risques élevés de complications montrent encore des signes de souffrance et ce n’est que lorsque leur enfant atteint 3 ans que ces signes disparaissent. Par ailleurs, les auteurs observent aussi le fait que la sévérité des symptômes de dépression des mères d’enfants prématurés a des conséquences sur le développement général des enfants. A l’inverse, Tommiska, Östberg et Fellman (2002) montrent que lorsque les enfants atteignent l’âge de deux ans, les mères et les pères d’enfants prématurés ne présentent pas un niveau de stress plus élevé que les parents d’enfants nés à terme. Les auteurs font ainsi l’hypothèse qu’une fois que l’enfant est sorti de l’hôpital et que son état de santé est stabilisé, le niveau de stress parental diminue progressivement. Notons cependant que dans cette dernière étude la majorité des enfants ne souffraient pas de problèmes de santé importants depuis leur naissance.

Au plan relationnel, Wightman et al. (2007) ont mis en évidence que les parents d’enfants nés prématurément (AG moyen= 26,4 semaines) montrent une protection plus élevée envers leurs enfants que les parents d’enfants nés à terme. Ainsi, les parents d’enfants nés prématurément ont tendance à être plus intrusifs dans la vie de leurs enfants et à réagir de façon impulsive par rapport aux comportements de leurs enfants. Les différences interindividuelles dans l’évolution aussi bien cognitive que socio-émotionnelle des enfants nés prématurément peuvent donc être associées à la fois à des facteurs biologiques (AG, PN, complications néonatales, etc.) et à des facteurs environnementaux (statut socio-économique, ethnie des parents dans certains pays, fonctionnement parental, etc.). Il semble donc essentiel de prendre en considération le comportement et les réactions psychologiques des parents lors de l’évaluation des enfants nés prématurément.

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Chapitre 2 Développement des capacités exécutives et socio-émotionnelles

chez les enfants nés à terme

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Dans ce deuxième chapitre, nous aborderons le développement des fonctions exécutives (FE) chez l’enfant, et plus particulièrement, le développement des capacités d’inhibition dans ses liens avec le développement des autres compétences exécutives. Nous décrirons ensuite le développement des compétences socio-émotionnelles et terminerons par une présentation des liens entre les capacités exécutives, plus particulièrement d’inhibition, et les compétences socio-émotionnelles.

2.1. Développement des fonctions exécutives

Le développement des fonctions exécutives a longtemps été un domaine d’études peu exploré. Ces dernières années, un intérêt croissant s’est manifesté pour cette question et notamment pour le rôle joué par les FE dans le développement des capacités de régulation des conduites socio-émotionnelles (Blair, Zelazo, & Greenberg, 2005).

Les FE regroupent un ensemble de processus permettant de nous adapter à des situations non-routinières, c’est-à-dire lorsque les habiletés cognitives surapprises ne sont plus suffisantes (Collette, 2004). Les FE incluent ainsi les fonctions de haut niveau (de supervision et d’autorégulation) permettant d’organiser et de contrôler les pensées, les émotions et les comportements (Gioia, Isquith, Kenworthy, & Barton, 2002). Les recherches en psychologie et neuropsychologie cognitive suggèrent l’existence de fonctions exécutives à la fois distinctes et reliées. Ainsi, Miyake et al. (2000) ont identifié trois processus exécutifs séparables : la flexibilité, définie comme étant la capacité à déplacer volontairement le foyer attentionnel d’un stimulus à un autre/ d’un processus cognitif à un autre ; la mise à jour, ou la capacité à modifier le contenu de la mémoire de travail en fonction de nouvelles informations ; l’inhibition, consistant en la capacité d’empêcher des informations non pertinentes de perturber une tâche en cours et d’empêcher la survenue d’une réponse automatique inadéquate. Une quatrième fonction possible a été également suggérée, à savoir la capacité de coordonner plusieurs tâches simultanément. Les auteurs ont aussi montré que ces processus exécutifs n’apparaissent pas complètement indépendants les uns des autres, mais ce qui les relierait reste l’objet de débats. Il pourrait s’agir selon eux d’un processus général de maintien en mémoire de travail du but et du contexte de la tâche ou encore de la mise en œuvre de processus d’inhibitions d’informations distratrices ou de réponses automatisées (ce qui amènerait alors à considérer l’inhibition comme une unité de base du fonctionnement exécutif). Par ailleurs, différentes études développementales ont retrouvé chez les enfants une organisation des FE similaire à celle proposée par Miyake et al. (Garon, Bryson, & Smith, 2008; Lehto, Juujärvi, Kooistra, & Pulkkinen, 2003).

Sur le plan neuroanatomique, les FE ont traditionnellement été rattachées aux régions préfrontales (Shallice, 1982). En effet, les patients présentant des lésions préfrontales montrent souvent des performances altérées à diverses tâches évaluant la flexibilité, l’inhibition et/ou la planification (Burgess & Shallice, 1996).

Toutefois, des travaux ont démontré que certains patients avec lésions frontales pouvaient avoir des compétences exécutives relativement préservées (Andrès & van der Linden, 2002) et que d’autres patients, présentant des lésions cérébrales plus diffuses, incluant les régions cérébrales postérieures (majoritairement pariétales), pouvaient montrer des signes dysexécutifs (Mountain & Snow-Wiliam, 1993). De plus, des études en imagerie cérébrale chez l’adulte ont récemment révélé que chaque processus exécutif dépend en fait d’un vaste réseau de régions cérébrales,

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incluant aussi des régions postérieures (Colette, Hogge, Salmon, & van der Linden, 2006; Colette et al., 2007).

Aussi, au vu des lésions de la matière blanche cérébrale identifiées dans plusieurs études chez les enfants nés prématurément (Huppi et al., 2001; Nosarti et al., 2007; Woodward, Anderson, Austin, Howard, & Inder, 2006), il n’est ainsi pas étonnant de retrouver des déficits exécutifs chez ces enfants.

Au plan développemental, les premières conduites de détour7 et la réussite aux épreuves basées sur un paradigme A non-B8 sont considérées comme le reflet des premières compétences exécutives, apparaissant entre 6 et 12 mois (Piaget & Inhelder, 1966/1998). L’enfant va ainsi devenir progressivement capable de différer une réponse dans le temps (donc d’inhiber une réponse dominante) et de planifier une séquence d’actions afin d’atteindre un but. Les capacités exécutives vont se développer durant l’enfance et l’adolescence, pour atteindre le niveau de celles d’un adulte de manière différente en fonction du processus exécutif évalué (Huizinga, Dolan, & van der Molen, 2006;

Romine & Reynolds, 2005). Ainsi, les capacités de mémoire de travail vont se développer de manière graduelle à travers l’enfance et jusqu’à la fin de l’adolescence/début de l’âge adulte (Huizinga et al., 2006; Lehto et al., 2003). Au niveau des compétences de flexibilité, le coût de l’alternance entre deux ou plusieurs actions va progressivement diminuer durant l’enfance pour atteindre celui d’un adulte vers l’âge de 15 ans (Huizinga & van der Molen, 2007).

Enfin, comme nous allons le voir plus en détail au chapitre 2.2., les capacités d’inhibition sont déjà présentes dès l’âge de 6 mois et vont se développer jusqu’au début de l’âge adulte (Huizinga et al., 2006; Tillman, Thorell, Brocki, &

Bohlin, 2008). Il faut toutefois noter dès à présent que les trajectoires développementales des capacités d’inhibition pourront fortement varier en fonction des épreuves utilisées.

Dans la partie qui suit, nous nous focaliserons sur le développement des capacités d’inhibition, qui constituent selon certains auteurs une composante de base du fonctionnement exécutif et qui contribuent aussi à différentes autres compétences cognitives (attention, mémoire épisodique, etc.) ainsi qu’aux capacités d’auto- régulation, notamment émotionnelle (Wright, Waterman, Prescott, & Murdoch-Eaton, 2003).

2.2. Développement des capacités d’inhibition

De nombreux travaux ont montré que le concept d’inhibition renvoyait en fait à des processus de nature différente.

Ainsi, Friedman et Miyake (2004) ont distingué deux mécanismes inhibiteurs : d’une part l’inhibition d’une réponse dominante ou automatique et la capacité de résister à l’interférence de distracteurs présents dans l’environnement externe, et d’autre part la résistance à l’interférence proactive ou capacité à résister à l’intrusion en mémoire d’informations qui ont été pertinentes, mais qui ne le sont plus pour la tâche en cours.

La capacité d’inhiber une réponse dominante et de résister à l’interférence de distracteurs est au cœur du modèle de l’attention proposé par Posner et Peterson (1990). Ce modèle propose l’existence de trois réseaux

7 Capacité à utiliser un chemin indirect pour aller rechercher un objet placé dans un endroit précis alors qu’il y a possibilité de passer par un chemin plus direct.

8 Epreuve dans laquelle un objet est caché, sous les yeux de l’enfant, dans un lieu A durant un certain nombre d’essais, puis dans un lieu B. L’erreur de type A-non B est caractérisée par le fait que l’enfant retourne chercher l’objet en A, alors qu’il n’y ait plus puisqu’il est en B, malgré le fait qu’il ait vu le déplacement de l’objet en

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attentionnels ; à savoir l’alerte, l’orientation et le contrôle exécutif. Le système d’alerte permet la réalisation et le maintien d’un état d’activation en préparation de l’arrivée d’un stimulus. Au niveau neuroanatomique, il implique les régions fronto-pariétales de l’hémisphère droit et le thalamus. Le système d’orientation (ou système attentionnel postérieur) prend en charge de manière relativement automatique les aspects de focalisation de l’attention sur des stimuli spécifiques, quand l’information-cible peut être filtrée sur la base d’attributs périphériques (comme la localisation). Ce système réalise sa fonction d’orientation de l’attention à travers trois opérations: le désengagement d’une localisation, le déplacement vers une nouvelle localisation et l’engagement sur cette nouvelle localisation. Il implique le lobe pariétal supérieur et inférieur gauche, le colliculus supérieur, le pulvinar et le noyau réticulé du thalamus. Enfin, le système de contrôle exécutif (ou attentionnel antérieur) est responsable d’opérations de contrôle attentionnel plus volontaire. Ce système implique le gyrus cingulaire antérieur, le cortex préfrontal latéral et les ganglions de la base. Selon Posner, une fonction primordiale de ce système attentionnel antérieur est la capacité de supprimer une réponse dominante et d’initier et maintenir une réponse moins dominante, ceci notamment dans des tâches de gestion de conflits. Ce type de tâche nécessitent aussi de résister à l’interférence de distracteurs afin focaliser son attention sur l’information pertinente. Posner et ses collaborateurs (Fan, Flombaum, McCandliss, Thomas, & Posner, 2003; Fan, McCandliss, Fossella, Flombaum, & Posner, 2005; Fan, McCandliss, Sommer, Raz,

& Posner, 2002) ont élaboré une tâche, l’ « Attentional Networks Task »9 (ANT), qui permet d’évaluer ces trois systèmes attentionnels. Au moyen de cette tâche, ils ont pu démontrer la validité de leur modèle tant au plan cognitif que cérébral, et ceci aussi bien chez les adultes (Fan, Fossella, Sommer, Yanghong, & Posner, 2003; Fan et al., 2005; Fan et al., 2002; Fernandez-Duque & Posner, 2001) que chez les enfants (Rueda et al., 2004). Comme nous l’avons précédemment mentionné, de nombreuses données indiquent que les capacités d’inhibition d’une réponse dominante émergent entre l’âge de 6 et 12 mois. Avant l’âge de 9 mois, les jeunes enfants ont des difficultés à inhiber une réponse apprise pour privilégier une réponse nouvelle (Diamond, 1985). Entre 12 et 18 mois, la plupart d’entre eux arrivent à inhiber certains comportements dominants (précédemment appris) et choisissent des réponses plus adaptées et non dominantes (Anderson, 2002; Diamond, 1991). A 2 ans, lors d’une épreuve de délai de gratification, les enfants sont capables de retarder volontairement une action (prendre un bonbon) et d’attendre le signal pour le faire (Kochanska, Murray, & Harlan, 2000; Kochanska, Murray, Jacques, Koenig, & Vandegeest, 1996). Ils arrivent donc, dans une certaine mesure, à contrôler leur impulsivité (Aksan & Kochanska, 2004). Vers l’âge de 3 ans, les capacités d’inhibition augmentent considérablement, mais des erreurs de persévération restent encore fréquemment observées (Backen Jones, Rothbart, & Posner, 2003).

position B. Ce type d’erreur est censé démontrer un déficit d’inhibition de par le fait que l’enfant persévère à chercher l’objet en position A.

9Dans cette épreuve, il est demandé d’appuyer sur l’un des deux boutons-réponses en fonction de la direction (droite versus gauche) dans laquelle pointe une flèche (ou nage un poisson dans la version de l’ANT pour les enfants). Les capacités d’alerte sont mesurées en calculant la différence entre le temps de réaction médian des items précédés d’un signal d’alerte visuel (indiquant l’apparition imminente de la cible) et le temps de réaction médian des items non précédés d’un signal d’alerte. Les capacités d’orientation sont obtenues en soustrayant le temps de réaction médian des items précédés d’un indice spatial (indiquant le lieu d’apparition de la cible légèrement au-dessus versus au-dessous du centre de l’écran) du temps de réaction médian des items non précédés d’un indice spatial. Enfin, le score de contrôle exécutif est obtenu en soustrayant le temps de réaction médian de la condition sans interférence visuelle (dans laquelle des flèches distractrices, entourant la flèche-cible montrent la même direction que cette dernière) du temps de réaction médian de la condition d’interférence (où les flèches entourant la flèche-cible montrent la direction opposée à celle-ci). Il s’agit d’un paradigme dit de « flankers ».

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Dans une étude importante, Diamond et Taylor (1996) ont montré que les capacités d’inhibition progressent entre 3 ½ et 7 ans, développement attesté par de meilleures performances dans une épreuve d’inhibition de réponses verbales automatiques (épreuve jour-nuit10 considérée comme une tâche de type Stroop (Gerstad, Hong, &

Diamond, 1994)) ainsi que dans une épreuve d’inhibition motrice (Tapping test11 ; Diamond & Taylor, 1996). Ces auteurs observent une diminution particulièrement importante du nombre de fausses alarmes entre les âges de 3 ½ et 4 ½ ans, avec des performances optimales atteintes vers 7 ans. Plus récemment, Rueda et al. (2004) ont observé, en soumettant des enfants âgés de 6 à 9 ans à l’ « Attentional Networks Task », que les compétences d’inhibition augmentent fortement entre 6 et 7 ans, puis deviennent équivalentes à celles des adultes. Par ailleurs, dans une étude longitudinale entreprise chez des sujets âgés de 6 à 80 ans, Bedard et al. (2002) ont constaté que les performances d’inhibition d’une réponse dominante dans une tâche de stop-signal12 évoluaient jusqu’à l’âge de 12 ans. De plus, Tillman, Thorell, Brocki et Bohlin (2008) ont mis en évidence des changements importants dans les performances à la tâche de stop-signal entre 4 et 5 ans ainsi qu’entre 7 et 9 ans.

A l’inverse, quelques études rapportent une relative stabilité des capacités d’inhibition durant l’enfance (Band, van der Molen, Overtoom, & Verbaten, 2000; Jennings, van der Molen, Pelham, Devski, & Hoza, 1997). En effet, Johnstone et al. (2007), utilisant une tâche de stop-signal ainsi qu’une tâche de go-no go chez des enfants de 7 à 12 ans, ne montrent aucun changement développemental des capacités d’inhibition d’une réponse dominante.

Il ressort donc de ces différentes études développementales une certaine variabilité quant à l’évolution avec l’âge des capacités d’inhibition. Cette variabilité peut s’expliquer en premier lieu par le nombre d’enfants évalués, lequel était parfois restreint dans certaines études (Band et al., 2000; Johstone et al., 2007). Deuxièmement, l’utilisation de tâches différentes d’une étude à l’autre, mesurant plutôt l’inhibition d’une réponse dominante ou la résistance à l’interférence de distracteurs, peut également rendre compte de ces variations dans les trajectoires développementales. Dans cette perspective, Huizinga, Dolan et van der Molen (2006) ont étudié le développement des capacités d’inhibition à l’aide de trois épreuves (test de Stroop, paradigme stop-signal, paradigme de flankers), chez des enfants âgés de 7 à 15 ans et chez de jeunes adultes. Ces auteurs observent en premier lieu une différenciation des capacités d’inhibition en fonction des épreuves utilisées. En effet, lors d’une analyse factorielle prenant en compte les performances aux trois épreuves, trois facteurs d’inhibition distincts apparaissent, un pour chaque épreuve. Par ailleurs, les trois facteurs d’inhibition ne corrèlent que faiblement entre eux, voire pas du tout.

En second lieu, les auteurs mettent en évidence une évolution des performances aux tâches du stop-signal et de flankers jusqu’à l’âge de 12 ans, alors que les performances au test de Stroop évoluent jusqu’à la fin de l’adolescence. Ainsi les capacités d’inhibition semblent donc plus différenciées durant l’enfance qu’à l’âge adulte et évolueraient de manière différente en fonction de l’épreuve administrée.

10 Epreuve dans laquelle il est demandé à l’enfant lorsqu’il voit un soleil de répondre « nuit » et lorsqu’il voit une lune de répondre « jour », par conséquent d’inhiber l’envie de dire « nuit » quand il voit la lune et de dire « jour » quand il voit le soleil.

11 Epreuve durant laquelle lorsque le psychologue tape un coup sur la table l’enfant doit taper 2 coups et inversement.

12 Epreuve qui s’apparente à une épreuve go/no-go et dans laquelle l’enfant doit appuyer sur un bouton-réponse lorsque qu’une cible apparaît (= go) mais pas quand ce sont des distracteurs qui apparaissent (= no-go). Toutefois dans une tâche de stop-signal, tous les essais sont des cibles « go » qui sont suivies pour un petit pourcentage d’entre elles d’un signal « stop » demandant à l’enfant de ne pas appuyer sur le bouton-réponse.

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2.3. Développement des capacités socio-émotionnelles

Au cours de cette dernière décennie, un intérêt grandissant s’est manifesté pour l’exploration des processus psychologiques impliqués dans les compétences socio-émotionnelles. Il a ainsi pu être montré qu’un comportement social et émotionnel adéquat nécessitait de nombreuses capacités spécifiques en interaction, telles que la capacité d’évaluer les émotions d’autrui, d’estimer les conséquences positives ou négatives d’une action, de comprendre et d’anticiper le point de vue d’autrui ou encore de réguler ses émotions (Dodge, Laird, Lochman, & Zelli, 2002). Par ailleurs, il apparaît que les conduites sociales et émotionnelles dépendent également de capacités plus générales, en particulier des compétences exécutives de flexibilité ou d’inhibition.

En ce qui concerne plus spécifiquement les enfants, différents modèles (Dodge, Pettit, McClaskey, &

Brown, 1986; Yeates et al., 2007) ont été proposés, qui visent à intégrer et relier les processus psychologiques en jeu dans les compétences socio-émotionnelles.

Un premier modèle conceptualisant les échanges sociaux entre les enfants a été développé par Dodge et al. (1986). Dans ce modèle, 5 étapes sont proposées. Dans la première étape, l’enfant doit porter son attention (de manière plus ou moins volontaire) sur des indices sociaux (par exemple une expression émotionnelle) afin de les encoder. Ces indices doivent ensuite être assemblés par l’enfant afin de les interpréter et d’aboutir à une bonne compréhension de la situation (étape 2). L’enfant devra alors sélectionner un comportement en adéquation avec ces indices sociaux, après avoir évalué les réponses comportementales possibles et choisi la plus adaptée (étape 3).

Une fois la réponse choisie et émise, le comportement de l’enfant sera jugé et interprété par ses pairs (étape 4).

Suite à cela, le comportement spécifique des pairs influencera de manière rétroactive la conceptualisation des stimuli sociaux par l’enfant (étape 5), ce qui lui permettra d’augmenter son expérience par rapport aux situations sociales.

S’inspirant du modèle de Dodge et al. (1986), Yeates et al. (2007) ont développé un autre modèle des compétences socio-émotionnelles afin d’établir de façon plus détaillée les relations entre les différents mécanismes cognitifs et émotionnels impliqués dans le fonctionnement social, ceci notamment dans le but de mieux comprendre les difficultés socio-émotionnelles des enfants présentant un dysfonctionnement cérébral (voir Figure 2).

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Figure 2. Modèle Intégratif des Compétences Sociales de Yeates et al. (2007).

Dans ce modèle, les auteurs présentent les relations existant entre l’ajustement social, les interactions/relations entre pairs, la résolution de problèmes sociaux, la communication, les processus socio-affectifs et les processus exécutifs. Leur modèle identifie tout d’abord des processus de traitement de l’information sociale comprenant une série d’étapes nécessaires pour répondre à une situation sociale. Il s’agit tout d’abord d’interpréter les indices sociaux, de clarifier les buts, de générer des solutions alternatives, de sélectionner et réaliser une réponse spécifique ainsi que d’en évaluer l’issue (résolution de problèmes sociaux). Afin de résoudre ces problèmes sociaux, des fonctions exécutives (particulièrement d’inhibition et de flexibilité) ainsi que des fonctions socio-affectives (notamment de régulation émotionnelle) vont prendre une part active. En effet, la nécessité d’identifier les éléments pertinents d’une situation sociale (par exemple le traitement des indices émotionnels sur le visage d’une personne), de ne pas se focaliser sur un seul élément et de mettre de côté les éléments non pertinents va nécessiter le recours aux fonctions exécutives. Ces fonctions sont également mises en œuvre lors du choix d’une réponse comportementale parmi une série de réponses possibles et lors de la modification du comportement en fonction de l’évolution de la situation. De plus, la nécessité de pouvoir répondre à une situation sociale de manière adéquate fait appel à des mécanismes socio-affectifs ou socio-émotionnels. Ces mécanismes vont permettre de réagir sur le plan émotionnel de manière adéquate en sélectionnant dans un premier temps la réponse émotionnelle adaptée à la situation, puis dans un deuxième temps en régulant cette réaction afin qu’elle ne soit pas disproportionnée.

Ainsi, ces différents processus seront activés lors des interactions sociales, lesquelles vont varier passablement en fonction du type de situations rencontrées (par exemple des activités entre pairs, une réponse à une provocation, des relations entre proches ou personnes non familières). Les auteurs distinguent trois principaux types de comportement lors de ces interactions : 1) un comportement affiliatif, vers l’autre ; 2) un comportement agressif, contre l’autre ; 3) un comportement d’évitement, s’éloigner de l’autre. Toutefois, selon les auteurs, une interaction sociale adaptée implique également d’autres dimensions personnelles et environnementales définies en termes d’ajustement social. L’ajustement social reflète la manière dont un enfant va réussir à être socialement désiré

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