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Les réadmissions en médecine interne; un indicateur de la qualité des soins ?

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Academic year: 2022

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Thesis

Reference

Les réadmissions en médecine interne; un indicateur de la qualité des soins ?

KOSSOVSKY, Michel

Abstract

Les réadmissions précoces non programmées (survenant dans les 30 jours après une hospitalisation initiale) sont souvent vues comme un indicateur de la qualité des soins. Ce travail expose les limites actuelles des réadmissions en tant qu'indicateur de la qualité des soins. Tout d'abord en constatant que seules les réadmissions potentiellement évitables sont porteuse d'une information permettant éventuellement de juger de la qualité des soins.

Ensuite en constatant que l'évaluation de la qualité technique seule des soins intra hospitaliers ne permet pas de prédire une réadmission. Nous concluons en exposant que des facteurs liés aux patients ou à son environnement sont vraisemblablement liés au phénomène des réadmissions. Dès lors des interventions visant à réduire la fréquence des réadmission doivent les prendre en compte.

KOSSOVSKY, Michel. Les réadmissions en médecine interne; un indicateur de la qualité des soins ?. Thèse de privat-docent : Univ. Genève, 2017

DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:94128

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:94128

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Section de médecine clinique

Département de Médecine Interne Générale, Réhabilitation et Gériatrie

LES READMISSIONS EN MEDECINE INTERNE; UN INDICATEUR DE LA QUALITE DES SOINS ?

Thèse

présentée à la Faculté de Médecine de l'Université de Genève

pour accéder à la fonction de privat-docent par

Pierre Michel KOSSOVSKY

Genève 2016

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ii Remerciements

Je tiens à remercier tout particulièrement les Professeurs Anne-Françoise ALLAZ, Jean- Michel GASPOZ, Martine LOUIS-SIMONET, Thomas PERNEGER et Arnaud PERRIER qui m’ont toujours encouragé, soutenu et stimulé depuis mon arrivée aux HUG. Sans leurs encouragements, réflexions et échanges, ce travail n’aurait pas été possible.

Je remercie également, les professeurs et docteurs Christophe LUTHY, Christine CEDRASCHI, Olivier RUTSCHMANN, François SARASIN, Claude PICHARD, François HERRMANN, Pierre CHOPARD, Virginie DAUPHINOT. Les échanges d’idées, les projets menés ensemble, les bons moments passés et les discussions tant professionnelles qu’amicales sont précieux et je souhaite qu’ils se poursuivent le plus longtemps possible.

Enfin, j’exprime à mes amis et ma famille toute mon affection et toute ma reconnaissance pour leur inconditionnel soutien, leur chaleur et leur présence.

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1

SOMMAIRE

LES READMISSIONS EN MEDECINE INTERNE; UN INDICATEUR DE LA QUALITE DES

SOINS ? ... i 

Thèse ... i 

RESUME ... 2 

INTRODUCTION ... 4 

But du travail ... 6 

I CARACTERSTIQUES DES READMISSIONS ... 7 

Délai des réadmissions ... 7 

Réadmissions planifiées et non planifiées ... 9 

Réadmissions évitables ou non évitables ... 18 

II ASSOCIATION ENTRE READMISSIONS ET QUALITE DES SOINS, L’EXEMPLE DE L’INSUFFISANCE CARDIAQUE ... 23 

Pourquoi l’insuffisance cardiaque ? ... 23 

Comment mesurer la qualité des soins dans la prise en charge hospitalière de l’insuffisance cardiaque ? ... 23 

Association entre qualité de la prise en charge et réadmission parmi les patients hospitalisés pour insuffisance cardiaque ... 26 

III INTERVENTIONS VISANT A REDUIRE LE TAUX DE READMISSION ... 34 

Cadre théorique ... 34 

Efficacité des interventions ... 36 

Réadmission et réadaptation ... 42 

Influence de la médication ... 43 

Influence des aspects psychosociaux ... 45 

IV PERSPECTIVES ET CONCLUSION ... 49 

Protocole d’observation et d’intervention en réadapation ... 49 

Conclusion générale ... 50 

RÉFÉRENCES ... 54 

ANNEXE ... 59 

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2

RESUME

Les réadmissions précoces non programmées (survenant dans les 30 jours après une hospitalisation initiale) sont souvent vues comme un indicateur de la qualité des soins. Ce lien n’est pas formellement établi et les programmes visant à réduire la fréquence des évènements ont eu des résultats décevants.

Or, le taux de réadmission brut ne peut être utilisé comme indicateur de qualité. En effet, il faut pouvoir distinguer entre réadmissions programmées et non programmées, les premières étant seules susceptibles d’indiquer un éventuel défaut dans la qualité de la prise en charge. La distinction entre réadmissions programmées et non programmées nécessite une information qui n’est généralement pas disponible dans les bases de données administratives des hôpitaux, rendant ainsi impossible cette identification sans examen des dossiers médicaux. En outre, certaines réadmissions non programmées sont inévitables, en particulier s’il s’agit d’une pathologie différente de celle ayant entraîné la première hospitalisation ou d’une maladie connue, mais évolutive qui entraîne une complication malgré des soins optimaux intra hospitaliers. Afin de pouvoir malgré tout identifier les sujets à risque de réadmissions évitables, un algorithme basé sur les codes de la Classification internationale des maladies a été élaboré par une équipe lausannoise et validé sur des groupes de patients tant en Suisse qu’à l’étranger. Les performances de cet instrument ont été jugées comme bonnes avec une performance globale et un pouvoir de discrimination élevés ainsi qu’une similarité entre probabilité de réadmission prédite et observées similaires (calibration). Cependant, cet instrument ne permet ni de juger si la qualité des soins a été bonne au cours de l’hospitalisation initiale, ni si une intervention visant les sujets les plus à risque de réadmission permettrait d’éviter de tels évènements.

Le lien entre qualité des soins et réadmission nécessite de disposer d’éléments explicites de la qualité pour une prise en charge données. Prenant pour exemple la prise en charge hospitalière de l’insuffisance cardiaque, notre groupe de recherche a cherché à déterminer si le respect de critères explicites de qualité de prise en charge de l’insuffisance cardiaque, développés par un panel d’experts nord-américains, était lié à une réduction des réadmissions précoces. Trois scores ont été établis évaluant chacun un moment précis de l’hospitalisation : bilan à l’admission, suivi et traitement durant l’hospitalisation et stabilité à la sortie. Seul ce dernier avait un lien avec une réadmission précoce non planifiées (une diminution de 10% du score entraînait une augmentation du risque de 14%, 95% IC pour l’odds ratio 1.01 – 1.28). Ce lien faible entre qualité des soins, mesurée par des critères explicites de qualité établis par l’American Heart Association- American College of Cardiology et diminution du risque de réadmission a également été constaté dans une métaanalyse qui examinait si les interventions visant à améliorer le respect de ces critères avaient un influence sur les réadmissions.

Puisque le niveau de qualité des soins spécifiques à une pathologie n’a que très peu d’influence sur les réadmissions, quelles seraient les interventions qui permettraient de réduire ces évènements ?

Un modèle théorique appelé CuCoM pour « Cumulative Complexity Model » postule qu’il existe un équilibre entre contrainte (workload) et capacité (capacity) à entreprendre les démarches de

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3 recherche de soins et respecter les recommandations proposées. Le modèle CuCoM prédit qu’à moins de disposer d’un soutien suffisant pour aider le patient et son entourage, la contrainte générée par des activités ou des soins post hospitalisation trop intenses a toutes les chances de déboucher sur des résultats opposés à ceux souhaités et conduire à une réadmission.

Une metaanalyse a été réalisée sur une série d’intervention visant à réduire les réadmissions.

Le but était de tester la validité du CuCoM en évaluant comment certaines caractéristiques de ces interventions, en influant sur la contrainte et la capacité, pouvaient réduire le taux de réadmission. Seules les interventions visant spécifiquement à augmenter la capacité à assumer ses soins, ont amélioré le risque relatif d’expérimenter une réadmission (RR 0.68 - IC95% 0.53 – 0.86). Les études spécifiquement prévues pour accroître ou réduire la contrainte due aux soins ne modifiaient pas le risque de réadmission.

Dans une société vieillissante et parmi laquelle la prévalence des maladies chroniques intriquées est grande, le modèle d’une qualité des soins ne s’appliquant qu’à l’aspect purement technique d’une seule maladie ne suffit plus. Afin de tenter d’accroitre la capacité des patients à faire face aux recommandations visant à gérer la maladie chronique une fois de retour à domicile, les interventions devraient tenir compte d’au moins 4 facteurs actuellement rarement pris en compte. Ce sont : le niveau de compréhension de la maladie ou des problèmes de santé (ce que les anglo-saxons appellent « health litteracy »), l’état neuropsychologique, le niveau de moyens financiers et le niveau de dépendance fonctionnelle.

Un processus souhaitable devrait comprendre l’évaluation précoce des indicateurs de complexité biopsychosociale des patients, puis l’évaluation précise des déficits dont ils souffrent et une proposition de soutien visant à augmenter leur capacité à faire face aux difficultés rencontrées. Cette séquence est vraisemblablement ce qui permettrait de diminuer les réadmissions non planifiées.

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4

INTRODUCTION

Les réadmissions précoces non programmées (survenant dans les 30 jours après une hospitalisation initiale) sont des évènements fréquents, coûteux [1] et qui exposent les patients à des évènements indésirables [2]. Les programmes visant à réduire les réadmissions ont eu peu de succès [3], et associent réadmissions et qualité de la prise en charge durant l’hospitalisation index. Pour objectiver ce lien éventuel, il faut pouvoir mesurer la qualité des soins, et pour cela disposer d’indicateurs de qualité des soins fiables (qui mesurent précisément) et valides (qui mesurent effectivement).

La relation entre qualité des soins et réadmissions fait depuis longtemps l’objet d’investigations. La raison de cet intérêt est qu’il est supposé que des soins de haute qualité permettent de diminuer la fréquence et la gravité d’éventuelles complications après la sortie, et d’éviter un nouveau recours à des soins hospitaliers. Les réadmissions représentent une charge élevée pour les systèmes de santé. Aux Etats-Unis, pour Medicare, l’assurance de santé prenant en charge les coûts médicaux des personnes de 65 ans et plus, on observe que presque 20% des patients sont réadmis dans un délai de 30 jours pour un cout estimé à 17 milliards de dollars chaque année [1]. Certaines affections sont plus susceptibles d’être suivies de réadmissions que d’autres. En premier lieu l’insuffisance cardiaque avec un taux de réadmission à 30 jours de 24% en 2013, puis la bronchopneumopathie obstructive chronique (20%) suivie de la pneumonie (16%) et de l’infarctus du myocarde (15%) [4].

Les chiffres sont moins complets pour notre pays. Toutefois, une étude menée au Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV) en 2011 a montré un taux de réadmission pour l’insuffisance cardiaque pour les patients quittant le service de médecine interne de 20% [5].

La relation supposée entre réadmission et qualité des soins a poussé Medicare à mettre sur pied un programme (Medicare Hospital Readmission Reduction Program) qui pénalise les hôpitaux ayant un taux de réadmissions précoces (30 jours) élevé en réduisant jusqu’à 3% leur remboursement [6]. Pour permettre aux acteurs d’identifier des stratégies visant à réduire ce taux, l’Agency for Healthcare Research and Quality (AHRQ) fournit des données nationales tenant compte du volume de patients et des coûts générés [4]. C’est pourquoi certaines pathologies ne figurent pas dans ces statistiques malgré un taux de réadmission élevé [7]. De plus, la considération que la majorité des réadmissions sont accueillies après un séjour et dans un service de médecine interne et que cela ne génère pas de profit substantiel pour les

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5 hôpitaux montre que la préoccupation outre Atlantique envers ce problème est essentiellement économique [8].

En Suisse également, le système de remboursement SWISS-DRG considère qu’une réadmission dans les 18 jours pour la même catégorie de diagnostic doit être facturée sur le même séjour que l’hospitalisation initiale. Toutefois l’objectif n’est pas de réduire le taux de réadmission, mais plutôt de promouvoir la continuité des soins [5]. Par continuité des soins, il faut comprendre « la fluidité et la cohérence des soins rendus selon une séquence temporelle au cours de laquelle plusieurs ressources ou services sont impliqués. Ces services sont continus s'ils s'enchaînent l'un à l'autre de façon harmonieuse en l'absence d’interruption. La continuité englobe trois dimensions : l'aspect informationnel (le transfert et l'accumulation de l'information relative au traitement de la personne), l'aspect clinique (la cohérence des soins prodigués selon la séquence temporelle) et l'aspect relationnel (la stabilité de la relation entre le patient et les professionnels de santé) » [9].

Or, outre la qualité des soins, de nombreux phénomènes, liés aux patients, à leur environnement ou au système de soins ont été identifiés comme étant associés aux réadmissions. Si le taux de réadmission précoce devait être utilisé comme indicateur de qualité des soins, il serait nécessaire de tenir compte de ces phénomènes, afin de pouvoir pratiquer un ajustement qui tiendrait compte de leur effet avant d’imposer une comparaison entre prestataires de soins, et plus encore de prendre d’éventuelles mesures d’incitation financières.

Une autre faiblesse liée au taux de réadmissions, lorsqu’il est utilisé pour comparer des prestataires de soins, est la manière dont l’ajustement des modèles prédictifs ou explicatifs est effectué. En général, les données nécessaires à ces ajustements sont extraites des bases de données administratives hospitalières. Si un certain nombre de données sont aisément accessibles dans les bases de données administratives des services de santé, que ce soit pour déterminer l’âge des sujets ou la durée du séjour initial, certaines données ne sont pas disponibles par cette source. Les diagnostics de sortie sont par exemple précisément codés, mais non la sévérité de l’atteinte. Pire, certains éléments très certainement associés aux réadmissions tels que la capacité fonctionnelle, les troubles cognitifs ou le soutien disponible à domicile sont complètement absents des bases de données administratives.

Ces limites entraînent de sérieuses conséquences quant à l’utilité des réadmissions en tant qu’indicateur de la qualité des soins. Il n’est dès lors pas étonnant de constater que la puissance prédictive des modèles actuels soit modeste et que l’ajustement pour des éléments

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6 extérieurs à la qualité des soins élimine les différences constatées entre les hôpitaux en termes de risque de réadmission [10].

But du travail

Le but de ce présent travail est de présenter dans quelles conditions le taux de réadmissions pourrait être utilisé comme indicateur de la qualité des soins. En illustration nous utiliserons les travaux explorant quelle association entre qualité des soins et réadmissions a été établie pour une pathologie précise : l’insuffisance cardiaque. Enfin nous nous efforcerons de définir dans quelle mesure une collecte de données prospective plutôt que rétrospective permettrait d’améliorer la puissance prédictive des modèles.

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7 I CARACTERSTIQUES DES READMISSIONS

Délai des réadmissions

En termes de relation avec la qualité des soins, le délai entre le séjour initial et la réadmission n’est pas défini de manière constante dans la littérature. Si le délai entre le séjour index et la réadmission est trop court, le risque existe d’exclure des évènements qui seraient liés au séjour index et ne seraient pas comptabilisés. S’il est trop long, la survenue de réadmissions pour des raisons autres que celles liées à la qualité des soins lors du séjour index augmente.

Ce serait par exemple le cas de la progression d’une maladie chronique ou d’une maladie tumorale rendant nécessaire un nouveau séjour hospitalier.

Le délai généralement admis est d’un mois et une définition précise de l’indicateur a été proposée « c’est le nombre de patients réadmis de manière non planifiée en soins aigus dans un délai de 30 jours après la sortie du séjour initial divisé par le nombre total des sujets ayant quitté vivants la structure de soins durant la période considérée » [11].

Lorsqu’on examine la dynamique des réadmissions, on s’aperçoit que le risque décroit rapidement après la sortie du séjour index.

Ce que nous avons constaté en examinant la dynamique de toutes les réadmissions durant 1 an pour 5 828 patients ayant quitté vivants les services de médecine interne des HUG durant 1 an entre juillet 1995 et juin 1996 [12].

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8 Figure 1 : Risque global de réadmission estimé selon Kaplan Meier pour les patients

ayant quitté vivant les services de médecine interne des HUG entre le 1er juillet 1995 et le 30 juin 1996. L’intervalle entre les symboles correspond à 7 jours.

Kossovsky et al. 1999

Parmi ces sorties, 1796 (30.8%) patients ont été ré-hospitalisés dans une structure des Hôpitaux Universitaires de Genève dans un délai d’un an. On s’aperçoit que le risque de réadmission était maximal durant la première semaine après la sortie du séjour index, puis diminuait progressivement tout au long de la période d’observation.

Parmi les patients réadmis, 730 (12.5%) l’ont été dans un délai de 31 jours.

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9 Ces observations concordent avec celles d’autres groupes [13]. Cependant certains travaux ont examiné des délais plus long entre sortie et réadmissions, surtout au début des années 1990, époque où notre groupe a commencé à s’intéresser aux réadmissions [14, 15].

Réadmissions planifiées et non planifiées

Le nombre de réadmissions à considérer est déterminé par leur définition. Ce nombre constituera le numérateur lors des calculs.

Les procédures planifiées à la sortie de l’hospitalisation index ne sont pas à mettre en relation avec la qualité des soins, et ne doivent dès lors pas être incluses dans le numérateur [16]. Il devient donc primordial de distinguer le caractère planifié ou non planifié des réadmissions.

Toutefois, ce caractère n’est généralement pas indiqué dans les bases de données administratives hospitalières.

Lorsque notre groupe s’est intéressé aux réadmissions, nous avons tenté de déterminer comment distinguer les réadmissions planifiées et celles non planifiées.

Dans un premier temps, nous nous sommes intéressés à l’utilisation de 2 sources d’information disponibles dans les bases de données administratives des Hôpitaux Universitaires de Genève [17].

L’objet de cette recherche était de comparer 2 modes d’identification du caractère des réadmissions.

Le premier mode d’identification utilisait les codes diagnostics (ICD-9-CM) et les codes de procédures collectés durant le séjour index et le séjour subséquent. Si le séjour index contenait un code diagnostic suivi d’un séjour durant lequel une procédure en relation avec ce diagnostic était réalisée. (Par exemple séjour index avec le code 414.02 : athérosclérose de 3 vaisseaux coronaires, suivie d’une hospitalisation contenant le code de procédure B233.3 : bypass coronarien par greffe artérielle), la réadmission était considérée comme planifiée.

En revanche, si aucun code de procédure n’était décelé lors du séjour subséquent, la découverte du code diagnostic d’un évènement aigu permettait de considérer la réadmission comme non planifiée. (Par exemple, un premier séjour avec le code diagnostic 427.3 : fibrillation auriculaire, suivi d’un second séjour avec le code 429.9.01 : insuffisance cardiaque aigue). Si aucune de ces situations claires n’était retrouvée, le caractère de la réadmission était considéré comme indéterminé.

L’examen de ces codes diagnostics et de procédure a ainsi permis de classer les

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10 réadmissions en 4 catégories : « planifiée », « non planifiée », « indéterminée » ou

« manquante » si les codes n’étaient pas retrouvés pour le séjour index ou le séjour subséquent. La fiabilité de ce mode de classement a été vérifiée en calculant l’accord inter-juges sur un échantillon de dossiers choisis au hasard. Trois médecins du groupe de recherche ont classé les mêmes dossiers. La concordance des résultats était de 79%

et le coefficient kappa de 0.70 (p<0.001).

Le deuxième mode d’identification utilisait les rapports de sortie du séjour index et du séjour subséquent. Une réadmission était considérée comme planifiée si une procédure était clairement prévue à la sortie du séjour index. Si aucune procédure n’était prévue, ou si elle était réalisée en urgence, la réadmission était considérée comme non planifiée. Nous avons par la suite comparé les performances de ces 2 procédures de classification.

Sur 5828 patients ayant quitté les 2 services de médecine interne concernés, nous avons identifié 902 sujets réadmis dans un délai de 42 jours (soit 15.5%). Les codes diagnostics étaient manquants dans 43.3% (391 patients) des cas. Il faut rappeler qu’à cette époque, les codages diagnostics étaient à la charge des chefs de clinique. Ce n’est qu’ultérieurement qu’une équipe de codeurs professionnels a été engagée par le Hôpitaux Universitaires de Genève, lorsque le paiement sur la base des Diagnosis Related Groups a été instauré en Suisse. De même, le système informatique des HUG n’a pas été capable de localiser les rapports de sortie dans 41.6% des séjours (375 patients). A nouveau, nous rappelons que cette étude s’est déroulée avant l’implémentation du dossier électronique. Seule une partie des services utilisait une plateforme électronique pour la dictée et la dactylographie des documents de sortie.

Le tableau suivant permet de comparer le nombre de documents disponibles selon l’une ou l’autre des sources.

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11 Tableau 1 Exhaustivité des données en fonction de la source d’information

Encoded reports

Full-text reports

Present Missing Total

Present 398 (44%) 113 (13%) 511 (57%)

Missing 129 (14%) 262 (29%) 392 (43%)

Total 527 (58%) 375 (42%) 902 (100%)

Kossovsky et al. 1999

L’information plus détaillée contenue dans les rapports de sortie a permis une meilleure classification du caractère planifié ou non des réadmissions. Le tableau suivant montre bien que la proportion de réadmissions inclassables est beaucoup plus faible lorsque le rapport de sortie est utilisé par rapport aux seuls codes diagnostics. La différence entre les deux sources était d’ailleurs statistiquement significative (p<0.001).

Tableau 2 Performance des données en fonction de la source d’information. Le total horizontal correspond aux cas pour lesquels l’information était disponible pour le séjour index et le séjour subséquent.

Allows classification

Does not allow

classification

Total

Full-text reports

511 (97%) 16 (3 %) 527 (100%)

Encoded reports

325 (64%) 186 (36%) 511 (100%)

Kossovsky et al. 1999

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12 La possibilité de comparer la performance de l’une et l’autre des sources d’information n’a été possible que dans les cas où les données étaient totalement disponibles dans les deux cas. Cela a encore réduit le nombre d’observations possibles puisque les données n’ont pu être comparées que dans 398 séjours suivis de réadmission (sur 902 réadmissions).

Le tableau suivant montre comment le croisement des deux sources d’information a permis la classification des réadmissions pour les 398 observations où cela était possible.

On constate que la possibilité de classement du type de réadmission à l’aide des rapports de sortie est nettement supérieure à celle obtenue par l’analyse des codes diagnostics. En effet, dans seulement 3% des cas le caractère de la réadmission restait incertain lorsque les rapports de sortie étaient analysés, alors que cette proportion s’élevait à 36.4% si les codes diagnostics étaient utilisés seuls.

Tableau 3 Concordance de la classification du type de réadmission en fonction des sources d’information

Encoded reports Full-text reports

Planned Unplanned Doubtful

Planned 93 (23%) 4 (1%) 1 (0%)

Unplanned 13 (3%) 140 (35%) 2 (1%)

Doubtful 58 (15%) 81 (20%) 6 (2%)

Total 164 (41%) 225 (56%) 9 (3%)

Kossovsky et al. 1999

Plusieurs conclusions peuvent être tirées de ces observations. D’abord que la collecte informatisée des informations est nécessaire. L’importante proportion de données manquantes observée montre que ce support est indispensable. Heureusement, l’instauration du dossier patient informatisé et le codage systématique des lettres de sortie par une équipe de professionnels a permis d’atteindre l’exhaustivité dans ce domaine.

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13 Cette étude montre également les limites du codage diagnostic, qui doit être à la fois précis et le plus exhaustif possible afin de capturer, autant que possible, la complexité des situations cliniques. Ces codes diagnostics ne permettent pas par exemple de déterminer la chronologie d’évènements ayant eu lieu au cours de l’hospitalisation index. Or la connaissance de l’enchaînement des évènements est cruciale afin de comprendre ce qu’il s’est passé au cours d’un séjour hospitalier [18].

Outre la différenciation entre réadmissions planifiées ou non, nous avons investigué en quoi les réadmissions planifiées étaient différentes des réadmissions non planifiées, et si les caractéristiques des patients expérimentant l’un ou l’autre de ces évènements étaient les mêmes [12]. Notre idée était d’explorer si le taux de réadmissions global captait ces différences et si la dynamique de ces deux types de réadmissions différait.

En reprenant le même collectif que dans l’étude précédemment décrite [17], nous avons analysé la dynamique du phénomène ainsi que les caractéristiques des patients selon que les réadmissions étaient programmées ou non. Contrairement à l’étude précédente, nous avons examiné tous les rapports de sorties des patients réadmis dans un délai de 31 jours (730 / 5828 ; 12.5%) sous forme électronique ou sous format papier. Cela nous a permis de distinguer clairement le caractère planifié (337/730 ; 46.2%) ou non de ces évènements.

Le risque journalier de réadmission variait significativement selon le type de réadmission (Figure 2).

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14 Figure 2 Courbes de Kaplan-Meier et fonctions de risque des réadmissions planifiées (o ----) et non planifiées ( ) au cours de 31 jours suivant la sortie du séjour index. (n=730)

Kossovsky et al. 1999

Alors que le risque de réadmission planifiée restait homogène durant les 3 semaines suivant la sortie du séjour index, le risque de réadmission non-planifiée, était maximal entre 5 et 10 jours après la sortie du séjour index. Il diminuait progressivement par la suite. La différence entre les deux fonctions de risque était statistiquement significative (p=0.04 ; test du logrank).

Le tableau suivant illustre quels étaient les risques significativement associés aux réadmissions de l’un ou l’autre type.

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15 Tableau 4 : Fréquence des évènements et facteurs de risque univariés des réadmissions

(planifiées ou non planifiées) dans les 31 jours parmi les patients ayant quitté vivants le service de médecine interne des Hôpitaux Universitaires de Genève entre le 01.07.1995 et le 30.06.1996

Kossovsky et al. 1999

Le risque de réadmission était associé à l’âge, mais en direction opposée selon le type de réadmission

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16 Les patients dans la classe d’âge la plus élevée avaient un risque diminué de réadmission planifiée, mais augmenté de réadmission non planifiée. Les hommes étaient plus susceptibles d’expérimenter une réadmission planifiée. La durée de séjour lors du séjour initial n’était pas associée au risque de réadmission planifiée, mais les patients restant plus de trois jours avaient un risque accru de réadmission non planifiée. Un niveau plus élevé de comorbidité (mesuré par le nombre de diagnostics codé) augmentait le risque de réadmission non planifiée. Une admission par les urgences durant le séjour initial réduisait le risque de réadmission planifiée, mais n’était pas associée à un risque accru de réadmission non planifiée.

L’analyse multivariée a permis de développer 2 modèles différents pour les réadmissions planifiées ou non planifiées qui sont présentés dans le tableau ci-dessous.

Tableau 5 Risques relatifs ajustés pour une réadmissions dans les 31 jours parmi les patients ayant quitté vivants le service de médecine interne des Hôpitaux Universitaires de Genève entre le 01.07.1995 et le 30.06.1996

Kossovsky et al. 1999

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17 Les personnes de sexe féminin et les patients les plus âgés présentaient moins de risque de réadmission planifiée tandis que les sujets atteints de maladie cardiaque ou de cancer présentaient un risque accru.

En résumé, les prédicteurs de réadmission non planifiée étaient une durée de séjour initiale plus longue, la présence d’une comorbidité plus importante et un diagnostic de néoplasie.

Ces observations montrent :

a) que 1 patient sur 8 est susceptible d’être réadmis dans les 31 jours suivants son hospitalisation index.

b) que les réadmissions planifiées sont d’une fréquence équivalentes aux réadmissions non planifiées

c) que les prédicteurs d’un type ou l’autre de réadmissions sont différents.

Ces constatations du lien entre caractéristiques des patients et réadmissions ont également été faites par d’autres auteurs [19]. Il est ainsi relevé que selon le type de population desservie, le taux de réadmission peut être très différent. Les patients issus d’hôpitaux ayant un taux de réadmission élevé présentent ainsi une prévalence de prédicteurs cliniques et sociaux de réadmission également élevés. Cela suggére que le lien entre réadmission et qualité des soins est pour le moins douteux. De plus, ces hôpitaux prenant en charge une population plus malade et socialement défavorisée doivent consacrer des ressources supplémentaires afin de ne pas être pénalisés pour leur taux de réadmission supérieur à la moyenne [20].

De ces travaux nous tirons deux conclusions. Premièrement, la confirmation que le taux de réadmission global n’est vraisemblablement pas un indicateur de qualité des soins en médecine interne. Le bruit de fond (la proportion importante de réadmissions planifiées) a toute les chances de diluer un éventuel signal qui serait porté par les réadmissions non planifiées. Même si il y avait une correspondance absolue (ce qui est irréaliste) entre réadmissions non planifiées et qualité des soins, le taux de réadmission global aurait une fiabilité et une sensibilité au changement trop basse. Deuxièmement, la dynamique des deux types de réadmission diffère. En observant attentivement l’évolution du risque de réadmission non planifiée, on constate que le maximum n’est atteint que quelques jours après la sortie du séjour index. Cela traduit sans doute le fait que certains de ces patients quittent l’hôpital alors

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18 qu’ils sont encore insuffisament stabilisés. Un certain laps de temps est vraisemblablement nécessaire avant qu’une aggravation telle survienne qu’elle nécessite un retour à l’hôpital.

Cette étude pose le problème de la reconnaissance entre réadmissions planifiées et non planifiées. L’examen des DRG (groupes de tarification homogènes) des séjours index et de réadmissions peut, selon les circonstances, correspondre à l’un ou l’autre type de réadmission.

Actuellement, seul l’examen attentif des dossiers médicaux permet de faire cette distinction.

Une solution serait d’identifier, dans les bases de données administratives des hôpitaux, le caractère planifié ou non de chaque admission (index ou subséquentes).

Réadmissions évitables ou non évitables

Seuls les patients expérimentant une réadmission susceptible d’être évitée pourraient être ciblés par une intervention. En effet, même si elles sont non planifiées, certaines réadmissions sont impossibles à éviter. De nombreuses réadmissions peuvent être causées par une nouvelle affection n’ayant rien à voir avec le motif de l’hospitalisation index. De même, des traitements supplémentaires peuvent être nécessaires pour des complications ou la nécessité de réintervenir sur un site opératoire. Ces situations ne sont pas nécessairement planifiées à la sortie de l’hospitalisation index, mais seulement après évaluation en ambulatoire [21].

Certaines situations cliniques sont tellement précaires que les sujets qui en sont atteints sont appelés « hospital dependent patients » [22]. On peut les décrire comme étant le plus souvent âgés, atteints de plusieurs maladies et ayant une réserve physiologique amoindrie. En général, ce type de patients n’est pas identifiable lors d’un premier séjour. Ce n’est qu’après plusieurs épisodes d’aggravation de leur état de santé se manifestant de manière brutale et rapide (œdème aigu du poumon « flash », décompensation respiratoire d’une BPCO, épisodes de confusion aigue ou chutes) qu’il devient possible de se rendre compte que passer au travers de ces épisodes sans le recours à l’hôpital n’est pas faisable. Ces patients ne sont pas réadmis en raison d’une quelconque défaillance de la qualité des soins durant l’hospitalisation ou d’une transition hôpital-soins ambulatoire mal faite. Ces retours sont tout simplement nécessaires parce que leurs problèmes de santé ne peuvent pas être gérés hors d’une structure hospitalière.

L’enjeu est donc de ne considérer que les réadmissions évitables comme potentiels indicateurs d’une amélioration possible de la prise en charge des patients quittant un service hospitalier.

Afin de déterminer le caractère évitable ou non d’une réadmission, une règle de prédiction a été développée et validée [23]. Les auteurs ont comparé diverses

(22)

19 caractéristiques des sujets réadmis de manière non planifiée à celles de patients non réadmis. L’objectif était de déterminer dans quelle mesure ces caractéristiques pouvaient identifier les réadmissions potentiellement évitables. L’identification des réadmissions inévitables a été faite à l’aide d’un logiciel, SQLape [21, 24]. Cet outil a montré une haute sensibilité et spécificité dans l’identification du caractère potentiellement évitable des réadmissions lorsqu’il était comparé à l’avis de réviseurs utilisant les mêmes critères. Cet algorithme est basé sur les codes ICD-9-CM des admissions index et subséquente afin de déterminer le caractère potentiellement évitable ou non des réadmissions. Il est utilisé en Suisse pour comparer les hôpitaux et comme instrument de référence (benchmark)[25]. A noter que les auteurs de cette étude se sont heurtés également à la distinction entre réadmissions planifiées et non planifiées.

Les variables prédictives d’une réadmission potentiellement évitable ont été extraites de différentes sources. Les caractéristiques démographiques, l’histoire de consommation de soins, la présence d’un médecin de premier recours et les informations sur l’hospitalisation index l’ont été des bases de données administratives de l’hôpital concerné. Les procédures de soins et la présence de maladies chroniques ont été collectées dans les bases de données de facturation des assurances médicales. Et les dernières données de laboratoire avant la sortie de l’hospitalisation index ont été extraites du système informatique de l’hôpital. Ces données ont été choisies a priori sur la base des connaissances de la littérature [26, 27].

Le modèle de prédiction a été développé sur 2/3 de collectif et validé sur le 1/3 restant.

Le nombre de points correspondant à chaque variable significativement associée à une réadmission potentiellement évitable a été attribué en fonction des coefficients de régression.

Sur 10731 admissions éligibles enregistrées entre le 1er juillet 2009 et le 30 juin 2010 dans les services de médecine du Brigham and Womens’s Hospital à Boston, 879 (8.5%

des admissions index, 22.3% des réadmissions) ont été considérées comme potentiellement évitables et inclues dans l’analyse.

Le tableau suivant montre les 7 variables associées de manière indépendante à une réadmission potentiellement évitable ainsi que les points attribués a chacune d’entre elle en vue du calcul d’un score prédictif (score HOSPITAL).

(23)

20 Tableau 6 : Score HOSPITALa pour la prédiction des réadmissions à 30 jours

potentiellement évitables

Attribute Points if Positive

Low hemoglobin level at discharge (<12g/dLb) 1

Discharge from on Oncology service 2

Low sodium level at discharge (<135 mEq/Lc) 1

Procedure during hospital stay (any ICD-97 coded procedure) 1 Index admission type: urgent or emergent (nonelective) 1 No. of hospital admissions during the previous year

0-1 0

2-5 2

>5 5

Length of stay ≥5 d 2

Abbreviations: ICD, international classification of disease; NA, not applicable.

a Maximum of 13 points per patient b To convert to g/L, multiply by 10.

c To convert to mmol/L, multiply by 1.

Donzé et al. 2016

Les auteurs ont ensuite créé 3 catégories selon le score et le risque de réadmission potentiellement évitables : risque faible score de 0 à 4 points (49.3% des patients ; 5.2%

de risque de réadmission potentiellement évitable), risque intermédiaire score 5-6 point (26.3% des patients et 9.8% de risque de réadmission potentiellement évitable) et risque élevé score ≥ 7 (24.4% des patients et 18.3% de risque de réadmission potentiellement évitable).

Une validation interne sur le 1/3 restant du collectif a permis d’observer des chiffres similaires. La puissance discriminante du modèle, mesurée par la statistique C, indiquait une valeur correcte de 0.7.

Le score HOSPITAL développé sur une population nord-américaine a été validé sur une cohorte rétrospective de 117’065 sujets ayant quitté un service de médecine interne de 9

(24)

21 hôpitaux dans 4 pays [28]. Cette validation internationale renforce la valeur de cet outil et sa capacité à identifier les sujets présentant un risque élevé de réadmission potentiellement évitable dans les 30 jours suivant leur sortie d’un séjour index. Le tableau ci-dessous illustre le risque de réadmission potentiellement évitable (PAR) parmi les 14% des patients dans la catégorie de score la plus élevée.

Tableau 7 : Proportion de réadmissions potentiellement évitables observée et prédite par le score HOSPITAL

Points

Risk Category

Patients in Each Category, No.

(%)

% Observed Proportion

With PAR in the Validation Study

Estimated Risk of PAR in the Validation Study Using the Hospital

score

0-4 Low 73031 (62) 5.8 5.8

5-6 Intermediate 27612 (24) 11.9 11.9

≥ 7 High 16422 (14) 22.8 22.8

Donzé et al. 2016

Le score HOSPITAL est un parmi plusieurs scores visant à prédire une réadmission [10], et a montré des performances supérieures au score le plus largement utilisé [29].

L’avantage de ce score, développé sur un large échantillon et validé dans différents pays, et qu’il peut être calculé au cours de l’hospitalisation index et ainsi permettre une identification des patients à risque de réadmission élevé. Cette détection précoce est un préalable à l’instauration d’interventions visant à améliorer la transition entre soins hospitaliers et soins ambulatoires. Cependant, les variables utilisées dans le score HOSPITAL ne sont que des prédicteurs de réadmission. Rien n’indique que leur amélioration en cours de séjour peut réduire le risque. L’élaboration de ce score est néanmoins une étape importante dans l’identification des sujets les plus à même de bénéficier d’une intervention ciblée au cours du séjour index. L’efficacité de telles interventions, c'est-à-dire obtenir une réduction significative des réadmissions potentiellement évitables reste à démontrer.

Pour résumer ce chapitre, nous avons donc constaté qu’avant de considérer le taux de réadmission comme un indicateur de la qualité des soins, il convient de bien préciser de

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22 quelles réadmissions il s’agit. Ni le taux de réadmission brut (incluant réadmissions planifiées et non planifiées), ni les réadmissions se produisant après une durée trop longue ne peuvent être associées à la qualité des soins. De plus, les données disponibles dans les bases administratives des hôpitaux ne peuvent faire habituellement la distinction entre phénomène signifiant (réadmission non planifiée) et non signifiant (réadmission planifiée). Il est évident que l’identification a posteriori des réadmissions ayant un lien éventuel avec la qualité des soins reste inutile en vue d’une intervention au cours de l’hospitalisation index.

Des solutions telles celles proposées par Donzé et al. [28] peuvent améliorer l’identification des sujets à risque de réadmission potentiellement évitable. Nous allons maintenant examiner comment évaluer formellement le lien entre réadmission non programmée et qualité des soins hospitaliers. Pour ce faire, nous savons choisi comme exemple une pathologie chronique à prévalence élevée et connue pour être associée à de fréquentes réhospitalisations : l’insuffisance cardiaque.

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23 II ASSOCIATION ENTRE READMISSIONS ET QUALITE DES SOINS, L’EXEMPLE DE L’INSUFFISANCE CARDIAQUE

Pourquoi l’insuffisance cardiaque ?

L’insuffisance cardiaque est la première cause d’hospitalisation pour les personnes de 65 ans et plus. Chaque année, aux Etats-Unis, 6.5 millions de journées d’hospitalisation sont dues à cette pathologie [30]. En 2010, le coût des traitements consacrés à l’insuffisance cardiaque a été estimé à 39.2 milliards de dollars [31]. Les réadmissions non programmées ont un coût estimé pour MEDICARE, l’assurance maladie couvrant les personnes de 65 ans et plus, de 17.4 milliards de dollars, l’insuffisance cardiaque étant le plus gros contributeur [1].

Il faut distinguer l’insuffisance cardiaque chronique traitée hors de l’hôpital, pour laquelle les progrès thérapeutiques (inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), antagonistes des récepteurs de l’angiotensine (ARB), beta-bloqueurs (BB), antagonistes des récepteurs des minéralocorticoïdes (MRA) et défibrillateurs implantables (ICD) ou appareils de resynchronisation (CRT)) ont permis une amélioration significative du pronostic, et la prise en charge hospitalière qui reste grevée d’une mortalité et d’un taux de réadmission importants [32].

Dans les HUG, en 2015, sur 11097 admissions dans le Département de Médecine interne, Réhabilitation et Gériatrie, 2644 (24%) se sont vu attribuer un diagnostic libellé I50 correspondant à une insuffisance cardiaque selon la CIM-10, 10% comme diagnostic principal et 14% comme diagnostic associé. Le taux de réadmission à 30 jours est cité dans la littérature aux environs de 15% pour cette pathologie [32]. D’où l’importance de déterminer si une prise en charge optimale de ces patients peut réduire cette proportion.

Comment mesurer la qualité des soins dans la prise en charge hospitalière de l’insuffisance cardiaque ?

Si l’on se base sur le modèle classique de Donabedian « structure-process-outcome » [33] et que l’on cherche à démontrer que les réadmissions non programmées sont un indicateur de la qualité des soins au cours de l’hospitalisation, on s’attend à observer une corrélation avec d’autres indicateurs de qualité. Il faut dès lors choisir une série d’indicateurs reconnus comme traduisant une prise en charge souhaitable des patients. Selon cette approche, la qualité peut être déterminée comme « le degré de conformité d’un processus de soins à une référence ou

(27)

24 une norme acceptée ». Pour pouvoir appliquer cette définition, il faut d’une manière ou d’une autre fixer cette norme. Trois approches ont été décrites pour évaluer la qualité de soins prodigués : la revue implicite, la revue explicite et la revue implicite structurée. [34]

Dans la revue implicite, un professionnel du domaine (réviseur) détermine la qualité (en général sur la base d’une revue de dossier) en comparant le processus de soins effectivement dispensé avec ce qui aurait dû être fait. Pour ce faire, il se base sur ses connaissances, opinions ou croyances. Ce type d’évaluation requiert de la part du réviseur des connaissances à jour, une expérience dans le processus de soins examiné, ainsi qu’une grande attention lors de la revue et une évaluation honnête et non biaisée. Tous les réviseurs, malheureusement, ne possèdent pas ces qualités toutes ensemble. C’est pourquoi ce type de revue est très fortement dépendant des qualités des réviseurs, et présente des performances inter-juge médiocres.

Dans la revue explicite, le réviseur compare le processus de soins effectivement dispensés avec une série de relevés ou de critères, parfois pondérés, qui décrivent quels sont les éléments qui doivent être présents dans un processus de qualité. Par conséquent, ce type de revue est quasiment non dépendant du réviseur. Attentifs et bien entraînés à déceler les éléments pertinents dans un dossier, différents réviseurs arrivent sensiblement aux mêmes résultats, tant sur le plan de l’identification des items que des scores qui peuvent être calculés.

La performance inter-juge est le plus souvent excellente. Néanmoins ce type de revue est complètement dépendant de la qualité de la documentation. S’il n’est pas documenté, un critère ne peut être décelé, quand bien même le résultat de son observance serait présent.

La revue implicite structurée est le troisième type de revue de dossiers. Dans cette procédure, de manière similaire à la première décrite, le réviseur utilise ses standards personnels pour juger de la qualité du processus de soins. Cependant, une instruction lui a été fournie d’être attentif à des informations ou problèmes spécifiques qui doivent être examinés dans le dossier. Cette approche cherche à conserver la richesse de la revue implicite (sensée tenir compte des variations existantes d’un cas à l’autre) et la fiabilité de la revue explicite. La performance inter-juge se situe en général entre celle des deux types de revue décrites précédemment.

Le développement de critères explicites de qualité d’un processus de soins a été décrit précisément [35]. Il s’agit d’une méthode en 6 étapes visant à développer des critères explicites fiables, dont la validité de contenu est élevée. L’étape 1 consiste, sur la base de la littérature à établir une liste de critères cliniquement importants. Dans l’étape 2, un panel d’experts est sollicité au cours d’un processus Delphi à 3 tours, au cours duquel les critères sont cotés de 1 à 7 selon l’importance du critère dans une prise en charge de qualité (7

(28)

25 traduisant le caractère essentiel du critère). Le résultat moyen et la déviation standard obtenus par chaque critère est communiquée au panel. Chaque expert peut ainsi déterminer comment il situe sa cotation par rapport à celle du groupe, et ainsi la modifier éventuellement au tour suivant. Au cours de l’étape 3, une pondération est attribuée à chaque critère en fonction des scores donnés par le panel d’experts. L’étape 4 cherche à réduire la liste de critères au plus petit nombre pertinent. La raison de cette démarche est que la revue de dossiers demande beaucoup de ressources (personnel, temps nécessaire à la localisation et au relevé des informations). Aussi, les critères véhiculant peu d’information sur la qualité des soins doivent être éliminés. Pour ce faire, les critères considérés par le panel d’experts comme peu importants, de même que ceux ne rencontrant pas un consensus élevé sont identifiés sur la base des scores attribués à l’étape précédente. Les auteurs de l’étude décrite ici ont écarté de la liste les critères avec un score moyen inférieur ou égal à 2 et les critères dont l’écart interquartile du score (valeur entre le 25ème et le 75ème percentile) était supérieur à 2. La 5ème étape attribue une évaluation globale à chaque revue de dossier, afin de pouvoir déterminer sa qualité et comparer les individus, ainsi que leur évolution au cours du temps. Une simple somme des critères respectés n’est pas suffisante, surtout du fait que certains critères ne sont pas applicables en toutes circonstances. Parfois, la documentation de l’information qui permettrait de déterminer si le critère a été respecté ou non est absente du dossier. Aussi un certain nombre de décisions doivent être prises avant de commencer la revue de dossier. La manière recommandée d’établir un score global est de déterminer le niveau d’adhérence au processus de soins examiné, c'est-à-dire la proportion de critères observés divisée par la proportion de critères applicables. L’étape 6 consiste en la familiarisation et l’entraînement des réviseurs avec la liste des critères et son utilisation lors d’une revue de dossiers. En effet, pour pouvoir comparer les performances de plusieurs hôpitaux ou l’évolution de la qualité au cours du temps, il faut s’assurer de l’homogénéité des données. Cette étape permet également de détecter et éventuellement corriger ou éliminer les critères qui ne recueilleraient un accord inter-juge jugé insuffisant, soit qu’ils aient été mal formulés, soit que la détermination de leur présence ou non dans un dossier prête à interprétation.

Les critères développés pour l’évaluation de la qualité de la prise en charge de l’insuffisance cardiaque sont présentés en Annexe. Les auteurs ont divisé le processus de soins en 3 éléments successifs : Evaluation à l’admission; traitement en cours de séjour ; stabilité à la sortie. Chacun de ces éléments peut être évalué par un score d’adhérence correspondant à la proportion de critères éligibles observés.

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26 Une étude empirique a montré que les critères explicites étaient plus performants dans l’analyse de la qualité de prise en charge de l’insuffisance cardiaque que la revue implicite structurée pour prédire une réadmission non planifiée, et que le score de stabilité à la sortie était le seul associé à une réadmission non planifiée [34].

Association entre qualité de la prise en charge et réadmission parmi les patients hospitalisés pour insuffisance cardiaque

Cependant, cette étude ne prenait en compte que la qualité du seul processus de prise en charge des sujets atteints d’insuffisance cardiaque. Lorsque notre groupe s’est intéressé à l’association entre qualité des soins et réadmissions, nous avons postulé qu’en plus de la qualité du processus de la prise en charge hospitalière de ces patients, un certain nombre de caractéristiques des patients, que nous pensions pouvoir être associées aussi à une réadmission non planifiée, devait être considérées. En outre, nous nous interrogions sur la possibilité d’utiliser ces critères développés aux Etats-Unis dans notre institution. C’est pourquoi nous avons utilisé ces critères, ainsi que des caractéristiques associées aux patients, dans une étude cas-témoins réalisée au sein du service de médecine interne des Hôpitaux Universitaires de Genève [36].

Les patients ayant quitté l’hôpital vivant avec un diagnostic principal d’insuffisance cardiaque (codes ICD-9-CM : 398.1, 402.01, 402.11, 402.91, 404.01, 404.03, 404.11, 404.13, 404.91, 404.93, et 428) ont été identifiés. Le caractère planifié ou non de la réadmission a été déterminé par l’examen des dossiers médicaux des cas réadmis dans un établissement des HUG dans un délai de 31 jours suivants la sortie du séjour index.

Les cas étaient représentés par les patients réadmis de manière non planifiée, les contrôles ont été choisis aléatoirement, à raison de 4 contrôles pour 1 cas parmi 1084 patients non réadmis ou réadmis de manière planifiée. L’examen des dossiers médicaux des cas et des contrôles a été réalisé par un infirmier formé. Le tableau suivant présente les caractéristiques associées aux cas et aux contrôles, ainsi que le risque relatif univarié associé.

(30)

27 Tableau 8 Caractéristiques associées aux cas et aux contrôles, et risque relatif univarié

associé.

* Durant l’hospitalisation index

† Pour un changement d'une unité

‡ Durant les 2 années précédentes Kossovsky et al. 2000

Le risque de réadmission n’était pas associé au score de qualité pour le processus de soins durant la phase d’admission, ni à celui évaluant l’évaluation et le traitement en

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28 cours de séjour. Par contre, le score de stabilité à la sortie était significativement supérieur parmi les contrôles que parmi les cas. Cette constatation était la même que l’on considère toutes les réadmissions non planifiées ou celles dues à une décompensation cardiaque. C’est ce qui est illustré dans le tableau suivant.

Tableau 9 Comparaison de la proportion de critères respectés parmi les cas (catégorisés en fonction du type de réadmission) et les contrôles

Kossovsky et al. 2000

Chaque diminution de 10% de la proportion de critères respectés concernant la stabilité à la sortie augmentait le risque de réadmission non planifiée. (Odds ratio pour les réadmissions toutes causes 1.14 IC95% 1.01 – 1.28 ; odds ratio pour les réadmissions dues à une décompensation cardiaque 1.19 IC95% 1.04 – 1.36)

Les résultats de l’analyse multivariée sont présentés dans le tableau ci-dessous

Tableau 10 Facteurs associés indépendamment au risque d’une réadmission non programmée

Kossovsky et al. 2000

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29 On constate qu’un diagnostic antérieur d’insuffisance cardiaque, un âge avancé, et une histoire revascularisation myocardique étaient associés à un risque accru de réadmission non planifiée. Le score de stabilité à la sortie l’était également, mais de manière réduite par rapport aux caractéristiques des patients non liées à la qualité de la prise en charge.

Les scores évaluant la qualité de la prise en charge au moment de l’admission ou en cours de séjour n’étaient eux, pas associés à un risque accru de réadmission non planifiée.

Le lien ténu entre ré-hospitalisations non planifiées et observance de critères de qualité dans le domaine de l’insuffisance cardiaque des soins a été récemment investigué par une méta- analyse [37]. Les auteurs ont identifié les études ayant évalué le lien entre 5 critères explicites de qualité basés sur les preuves, développés par L’American College of Cardiology /American Heart Association (ACC/AHA) [38, 39]. Ces critères sont présentés dans leur formulation originale dans le tableau ci-dessous.

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30 Tableau 11 Indicateurs de processus de soins basés sur les preuves développés par

l’ACC/AHA

Fischer et al. 2015

L’objectif de cette méta-analyse était de vérifier si l’observance des critères élaborés par l’ACC/AHA était associée au taux de réadmission. Les critères d’éligibilité pour qu’une étude soit incluse était: qu’elle étudie une population de patients hospitalisés pour insuffisance cardiaque, qu’elle évalue au moins 1 des critères de l’ACC/AHA, et qu’elle mette en relation l’observance de ce critère avec une réadmission (sans distinguer entre réadmissions planifiées ou non planifiées), toutes causes confondues ou spécifiquement liée à l’insuffisance cardiaque. A noter que les essais cliniques ou d’autres études d’intervention mesurant l’association entre critères de l’ACC/AHA et taux de réadmission ont été éliminés de la méta- analyse, parce que les auteurs souhaitaient évaluer des conditions de soins les plus proches possible des pratiques quotidiennes. De même, les études dont l’issue était un indicateur

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31 composite (« réadmission ou mortalité » par exemple) n’ont pas été retenues afin de pouvoir comparer les études sur une même issue précise. Après élimination des articles ne remplissant pas les conditions requises, 18 études ont été retenues. La présentation des résultats a tenu compte de la présentation de l’issue, soit dichotomique sous forme d’odds ratio (OR) soit analyse du temps jusqu’à réadmission sous forme d’hazard ratio (HR). C’est pourquoi 2 types de résultats sous forme de « forest plot » ont été présentés, un avec les OR regroupés, l’autre avec les HR regroupés. Ces deux graphiques sont présentés ci-dessous.

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32 Figure 3 Association entre observance des indicateurs de processus et taux de

réadmission

Fischer et al. 2015

Aucun des indicateurs examinés au cours de cette méta-analyse n’a montré qu’un meilleur respect des procédures hospitalières recommandées réduisait significativement le taux de

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33 réadmission. Toutefois, l’administration d’un médicament de la famille des inhibiteurs de l’enzyme de conversion ou de bloqueur des récepteurs à l’angiotensine (IEC/BRA) tendait à minimiser les risques (OR regroupés 0.7, IC95% 0.4 – 1.23 ; HR regroupés 0.8, IC 95% 0.71 – 1.06). Les auteurs avancent plusieurs arguments pour expliquer pourquoi aucun des indicateurs examinés n’était associé à une réduction du taux de réadmission.

- Premièrement, ils soulignent le flou dans la description des indicateurs. Relever que des instructions à la sortie ont été données, ou qu’une prise en charge du tabagisme est prévue ne donne aucune indication du contenu de ces indicateurs. De même la mention de la prescription de médicaments IEC/BRA n’indique pas si les doses sont adéquates, ni si l’adhérence thérapeutique des patients est correcte.

- Deuxièmement, l’insuffisance de la correction pour des facteurs confondants. Le degré de gravité de l’atteinte de la santé (case-mix), et le niveau socio-économique des populations étudiées n’ont, dans la plupart des études retenues, pas été pris en compte.

Or, les patients les plus malades et les plus pauvres sont plus à même d’être réadmis [16, 23]. Ces données ne sont en général pas disponibles dans les bases de données administratives des hôpitaux, ce qui explique qu’elles ne sont que rarement prises en compte dans les études sur le taux de réadmission.

Les auteurs de la méta-analyse concluent que le taux de réadmission est peu relié aux indicateurs de qualité des soins durant l’hospitalisation index. Il reste donc difficile d’établir si les réadmissions sont associées à la qualité des processus intra hospitaliers, à des éléments spécifiques aux patients ou des évènements ayant lieu après la sortie. En tout état de cause, il est peu vraisemblable que la qualité des soins durant le séjour index soit un élément déterminant dans l’explication d’une réadmission. Prendre cette incertitude en compte est important car cela a des implications financières pour les hôpitaux, tout au moins aux Etats- Unis.

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34 III INTERVENTIONS VISANT A REDUIRE LE TAUX DE READMISSION

Cadre théorique

Si le lien entre qualité des soins durant l’hospitalisation index et le taux de réadmission est peu convaincant, il y a peu de chances qu’une intervention visant l’excellence seule au cours de l’hospitalisation index soit efficace. Il faut donc élargir la vision et prendre en compte d’autres dimensions. Et dès lors considérer qu’une prise en charge de qualité ne se limite pas aux seuls soins intra-hospitaliers ou à une seule pathologie.

La priorité d’améliorer l’utilisation des services de santé et, partant, de réduire le taux de réadmission à 30 jours a été exprimée par de nombreux acteurs de la santé aux Etats-Unis [40]. Depuis 2012, l’administration de Medicare a lancé un programme : « Hospital Readmission Reduction Program », basé sur une réduction des remboursements pour les hôpitaux ayant un taux de réadmission supérieur à celui attendu pour 3 pathologies (infarctus du myocarde, insuffisance cardiaque congestive et pneumonie). Or, nous l’avons vu, la simple amélioration de la prise en charge intra-hospitalière de ces pathologies a peu de chances d’aboutir à la réduction du taux de réadmission. Une amélioration de la compréhension du phénomène, et des causes menant à la réadmission est promue par un article de perspective [40]. Les auteurs relèvent plusieurs arguments fragilisant la position de l’administration de Medicare. Parmi eux: bon nombre d’évènements et de circonstances qui prédisent la réadmission se déroulent hors de l’hôpital. Il y a aussi de nombreuses observations montrant que tous les patients ne sont pas exposés au même niveau de risque. Deux groupes semblent particulièrement exposés, les plus sévèrement atteints (en raison de la gravité de la maladie et de ses conséquences), et ceux d’un niveau socio-économique défavorisé (probablement à cause du manque d’accès aux soins et à un support social déficient) [41]. Nous n’avons pas pour projet de discuter en détail du lien entre niveau socio-économique, état de santé, ou accès aux soins. Cependant, cette association a été décrite et explorée par de nombreux chercheurs [42, 43].

De plus, au moins deux aspects liés à la gravité de la maladie: le niveau de dépendance fonctionnelle et la complexité de l’environnement bio-psycho-social ne sont pas pris en compte. Le lien entre réadmission et niveau socio-économique est renforcé par le constat que les hôpitaux américains prenant en charge le plus de patients défavorisés sont précisément ceux qui sont le plus pénalisés, en raison de leur taux de réadmission plus élevé qu’attendu [44].

(38)

35 Afin de tenir compte de cette multiplicité de facteurs pouvant influencer l’occurrence d’une réadmission, plusieurs groupes de recherche ont développé des modèles théoriques. L’un d’entre eux, le « cumulative complexity model » ou CuCoM [45] est présenté dans la figure ci-dessous.

Figure 4 Le « Cumulative Complexity Model »

Shippee et al. 2012

Le modèle postule qu’il existe un équilibre entre contrainte (workload) et capacité (capacity) à entreprendre les démarches de recherche de soins.

La contrainte représente tout ce qu’un patient doit gérer: les efforts pour comprendre sa maladie et le plan de traitement, la demande de soins à des prestataires ainsi que la démarche d’accès et de consommation en services de santé. La capacité est déterminée par la qualité et la disponibilité en ressources que le patient peut mobiliser afin de l’aider à gérer la contrainte.

Cela inclut: son état de santé physique et mental, l’étendue de son réseau social, ses ressources pécuniaires et environnementales. L’intérêt de ce modèle est qu’il considère également la contrainte générée par le traitement sur le patient. Cela illustre combien des soins qui ne tiennent pas compte du contexte du patient peuvent être contre productifs, et mener à des résultats défavorables en termes de santé. Du fait que les patients ayant quitté l’hôpital sont vulnérables, tant physiquement que psychiquement, leur capacité à prendre des

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36 initiatives concernant leurs soins est fortement diminuée. Le modèle CuCoM prédit qu’à moins de disposer d’un soutien suffisant pour aider le patient et son entourage, la contrainte générée par des activités ou des soins post hospitalisation trop intenses a toutes les chances de déboucher sur des résultats opposés à ceux souhaités, et conduire à une réadmission.

Efficacité des interventions

Le modèle CuCoM a été utilisé afin de procéder à une méta-analyse sur les interventions visant à réduire le taux de réadmission à 30 jours [46]. Le but était de tester la validité du CuCoM en évaluant comment certaines caractéristiques de ces interventions, en influant sur la contrainte et la capacité, pouvaient réduire le taux de réadmission.

Les études éligibles comprenaient les essais cliniques concernant des patients sortis vivants de services de médecine ou de chirurgie, et qui rendaient compte d’interventions destinées à améliorer la transition des soins hôpital-domicile, au décours de la sortie du séjour index.

L’issue d’intérêt était une réadmission dans les 30 jours (toutes causes confondues, sans tenir compte des éventuels décès).

Les auteurs ont ensuite classé les différentes interventions en s’inspirant d’une taxonomie préalablement publiée [47].

Cette liste, qui comprend la description des types d’intervention de chaque catégorie, apparaît dans le tableau ci-dessous.

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37 Tableau 12 Taxonomie des interventions basée sur les activités

Hansen et al. 2011

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38 Chaque étude retenue a ensuite été cotée par 2 des auteurs, sur une échelle de 1 (décroît de manière substantielle) à 7 (accroît de manière substantielle) selon qu’elle pouvait avoir un effet sur la contrainte et la capacité à assumer les soins. Finalement, après regroupement les auteurs ont retenu une échelle dichotomique pour l’effet sur la capacité (sans effet ou accroît) et une échelle à 3 niveaux (décroît, sans effet, accroît) pour l’effet sur la contrainte. La figure suivante montre l’effet que les interventions, évaluées dans les 42 études inclues dans la méta- analyse, ont pu avoir sur le risque de réadmission à 30 jours.

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39 Figure 5 Résultats de la métaanalyse

Hansen et al. 2011

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40 Les résultats combinés montrent que le risque de réadmission à 30 jours était réduit parmi les sujets soumis à une intervention par rapport aux contrôles (risk ratio (RR) 0.82 IC95% 0.73 – 0.81).

Une analyse de sous-groupe a ensuite été effectuée et n’a pas montré d’association entre les caractéristiques des patients et une modification du risque de réadmission. Cependant, certaines caractéristiques associées au type d’intervention l’étaient. Quand les interventions visaient spécifiquement à augmenter la capacité à assumer ses soins, le risque relatif était de 0.68 (IC95% 0.53 – 0.86), et quand les études n’étaient pas spécifiquement prévues pour avoir cet effet, le risque relatif était de 0.88 (IC95% 0.80 – 0.97). Par contre, les études ayant été jugées comme spécifiquement prévues pour accroître ou réduire la contrainte due aux soins ne modifiaient pas le risque de réadmission, par rapport à celles n’ayant pas un tel but.

Ces résultats ainsi que d’autres caractéristiques des études inclues dans la méta-analyse sont présentées dans le tableau suivant.

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