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Etude de la relation culture nationale-pratiques de management : cas du Maroc

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Etude de la relation culture nationale -pratiques de management : cas du Maroc

Auteur : EDDAKIR Abdellatif

Enseignant chercheur

Ecole supérieure de technologie –Fès- Route immouzer BP :2427

MAROC Tél : 070191117

Titre :

Etude de la relation culture nationale-pratiques de management : cas du Maroc

Résumé :

En s’inspirant des approches anthropologiques et sociologiques, plusieurs recherches empiriques ont démontré l’influence de l’environnement culturel national sur les pratiques de management des entreprises. Ainsi ces recherches ont remis en cause le courant universaliste du management qui prônait « l’exportation » des modèles de gestion d’un contexte culturel à un autre. Dans cette article, nous allons expliquer l’influence de la culture nationale sur les pratiques managériales en analysant le contexte marocain. L’objectif est de démontrer que pour comprendre la logique qui sous-tend le fonctionnement de l’entreprise marocaine, on doit comprendre celle qui marque l’environnement culturel national qui l’entoure.

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Introduction :

La suprématie du modèle américain de management durant la première moitié du siècle passé a laissé penser pendant longtemps que les sciences de gestion développent des méthodes standards qu’on peut exporter d’un contexte culturel à un autre. Cette vision qui s’inscrit dans le cadre du courant universaliste et préconisant la standardisation des méthodes de management a été remise par les adeptes du courant relativiste. Ce dernier met l’accent sur le fait que si les problèmes que rencontrent les entreprises sont les mêmes de part le monde, les solutions qu’on leur apporte diffèrent d’un contexte culturel à un autre. C’est dans cette perspective que nous allons expliquer la relation qui existe entre culture nationale et pratique de management à travers l’analyse du cas marocain. Pour ce faire:

- dans un premier point, nous allons soulever la problématique du management face aux spécificités culturelles nationales ;

- dans un deuxième point, nous examinerons l’influence de l’environnement culturel national sur les pratiques de management au sein de l’entreprise marocaine.

1- Le management face aux spécificités des cultures nationales.

Partant de la « culture nationale » en tant que variable, plusieurs recherches portant sur les pratiques des entreprises dans plusieurs pays ont débouché sur deux résultats importants :

- L’influences incontournable de l’environnement culturel national sur les pratiques managériales.

- L’existence d’une certain nombre de dimensions culturelles nationales qui influencent les comportements des individus au sein des entreprises.

1-1- L’influence de l’environnement culturel national :

A ce niveau nous essayerons d’étudier l’influence de la culture nationale sur les méthodes et les pratiques qui caractérisent les entreprises selon qu’elles appartiennent à telle ou telle société.

En effet, les variables économiques, technologiques et institutionnelles qui structurent chaque culture nationale influencent les cultures d’entreprises. En ce sens, la façon dont chaque peuple perçoit son environnement, ses motivations, son système de valeur national, etc. ; modèle profondément les comportements des acteurs au sein des entreprises. Citons, à ce niveau, quelques exemples :

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- La vie sociale des japonais influence largement la pratique des entreprises japonaises : l’entreprise c’est « la famille », ce qui s’y traduit par la prédominance d’un esprit collectiviste.

- En France, le système législatif qui régit la société marque largement l’entreprise française (formalisme dans les procédures, grand respect de la hiérarchie, etc.).

Dans cette perspective, soulignons que les individus changent d’entreprise plus facilement qu’ils ne changent de culture nationale. « La culture d’entreprise les interpelle moins au niveau de leurs valeurs profondes, mais seulement au niveau de leurs comportements et à travers ses manifestations matérielles que sont ses technologies, son environnement et ses systèmes et procédures »1. En comparant les deux types de cultures (culture nationale et culture d’entreprise), on peut dire que :

- Le poids relatif des normes de valeurs, de comportements varie selon le type de culture : ce poids est plus important dans une culture nationale que dans une culture d’entreprise.

- Chaque type de culture a son origine: les éléments de la culture nationale s’apprennent avant tout en famille, à l’école, etc. Quant aux éléments de la culture d’entreprise, ils s’apprennent sur le tas.

On peut dire, alors, que les deux types des cultures sont de nature différente.

Rappelons, à cet égard, qu’avec le développement du concept de culture d’entreprise, on avait négligé l’impact de la culture nationale sur la socialisation des individus au travail. On justifiait cela par le fait que les différences entre cultures ont tendance à disparaître (on donne des exemples au niveau de la pratique tel que le mode d’habillement). Toutefois, on ignore le niveau des valeurs qui donne du sens aux pratiques des individus au sein de chaque société humaine. G. Hofstede fait remarquer que « les études menées au niveau de ces valeurs montrent les différences énormes qui perdurent entre les pays »2.

Il devient, alors, tout à fait légitime de se poser la question suivante: la culture d’entreprise peut-elle atténuer les traits de la culture nationale chez les individus ? La réponse est sans doute négative. En effet, la grande majorité des études empiriques menées en la matière (G. Hofstède [1989], Ph. D’Iribarne [1989], F.Trompenaars [1994] a mis en exergue le constat suivant : les différences constatées dans les attitudes et les comportements des individus au travail sont expliquées par leurs origines culturelles nationales.

1 - I. Rodgers (collectif) : « Leaders sans frontières », éd. Mc Graw- hill 1988 p : 52- 53.

2 - G. Hofstede : « Vivre dans un monde multiculturel », éd. D’organisation 1994, p : 300.

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Les résultats de ces études ont montré que les différences culturelles sont « plus prononcées entre des employés étrangers pour une même multinationale qu’entre des employés travaillant dans leur propre pays pour des entreprises distinctes »3.

Ainsi, nous pouvons dire que la culture d’entreprise n’élimine pas les différences émanant des cultures nationales. Au contraire, elle contribue à les maintenir comme le souligne N. Adler, et ce pour plusieurs raisons4 :

- L’influence qu’une entreprise étrangère exerce, par exemple, pour inculquer sa culture à son personnel se traduit par un effet négatif. Elle engendre une réaction de résistance chez les individus qui les attache à leur culture d’origine (nationale) ;

- La culture d’origine (nationale, régionale, locale) est fortement enracinée, que les forces extérieures ne peuvent atténuer.

1-2- Les dimension culturelles :

Une étude empirique menée par G. Hofstede sur l’impact des différences culturelles nationales sur le management a mis en évidence (à travers les pays étudiés) le constat suivant : les problèmes sont communs, mais les solutions différent selon les pays. Les grands thèmes traités par cette étude portait sur5 :

1- Les inégalités sociales y compris les relations avec l’autorité ; 2- Les relations entre l’individu et le groupe ;

3- Les conséquences sociales de l’appartenance au sexe masculin ou féminin ; 4- Les différentes manières dont on gère l’incertitude.

Les résultats de cette étude ont permis de distinguer quatre grandes dimensions culturelles nationales:

- Individualisme contre collectivisme ; - Grande ou faible distance hiérarchique ; - Fort ou faible contrôle de l’incertitude ; - Masculinité contre féminité.

a- L’individualisme :

Cette dimension met en évidence la relation entre l’individu et la société. En effet, les sociétés humaines différent quant à cette relation. G. Hofstede fait remarquer qu’ « en

3 - N. Adler : « le comportement organisationnel : une approche multiculturelle », p : 63.

4 - Idem, p : 63.

5 - G. Hofstede : « Vivre dans un monde multiculturel », éd. D’organisation 1994, p 31.

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examinant attentivement le classement des pays, on remarque une relation entre le niveau de développement technique et la culture individualiste »6.

Les sociétés à tendance individualiste valorisent le temps consacré à la vie privée et où l’intérêt individuel passe avant l’intérêt général. Dans ce type de société, les individus cherchent plus d’autonomie qui leur donne le sentiment de se réaliser (dans un tel contexte on cherche à mettre en relief l’identité individuelle).

Quant aux sociétés communautaires, les individus sont marqués par les valeurs de groupe, le besoin de formation accrue et l’amélioration des conditions de travail.

Dans cette perspective, on estime que les relations entre supérieurs et subordonnés

« vont se faire sur une base morale dans les cultures communautaires, alors qu’elles se nouent sur la base d’un calcul personnel dans les cultures individualistes »7.

Dans les sociétés à tendance communautaire, la relation supérieur/ subordonné est fondée sur des liens personnels (en effet, le supérieur peut même connaître les problèmes concernant la vie privée de son subordonné).

A l’encontre, dans les cultures individualistes, cette relation est basée sur « le postulat d’un avantage mutuel et calculé selon des critères économiques »8. Dans un tel contexte, « le salarié est considéré comme un homo-économicus, ou une personne en qui se combinent des besoins psychologiques et économiques, mais de toute façon comme une personne individuelles avec ses propres besoins »9.

Tandis que dans la culture communautaire, «le salarié réagira selon les intérêts de son groupe, qui ne coïncident pas toujours avec son intérêt personnel »10. Il en découle que l’intérêt collectif y passe avant l’intérêt personnel.

b- La distance hiérarchique :

On peut considérer la mise en évidence de cette dimension comme la réponse à une question posée dans plusieurs champs disciplinaires (l’ethnologie, l’anthropologie, la sociologie, le management) : peut-on éviter les inégalités entre les individus ?

Cette dimension nous renseigne sur le degré de dépendance qui caractérise les relations entre individus. En d’autres termes, elle exprime la perception qu’a le subordonné du pouvoir de son chef. Cette dimension trouve son origine dans les différences physiques,

6 - D. Bollinger, G. Hofstede: “les différences culturelles dans le management”, éd. D’organisation 1987, p : 125.

7 - D. Bollinger, G. Hofstede: op.cit, p: 132.

8 - Voir Idem , p : 134.

9 - G. Hofstede : op. cit, p: 91.

10 - G. Hofstede : op. cit, p: 91.

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intellectuelles et sociales qui marquent les individus. Il en découle que ces différences se traduisent par des inégalités de pouvoir et de richesse.

Dans les pays où il y a une grande distance hiérarchique, le pouvoir est inégalement réparti, les subordonnées y sont soumis à un mode de gestion centralisé et autoritaire. Quant aux pays où on trouve une faible distance hiérarchique, l’accès au pouvoir est plus facile, il est strictement justifié par les besoins de compétences manifestés par l’entreprise. Il en découle que les performances individuelles y comptent davantage que le statut social (origine sociale, types de relations sociales, etc.).

Pour G. Hofstede, la distance hiérarchique se traduit chez le subordonné par une représentation mentale qui va déterminer son comportement. Cette représentation « étant très variable selon les pays, ce concept de distance hiérarchique apparaît extrêmement riche pour les distinguer les uns des autres »11.

c- Le contrôle de l’incertitude :

Cette dimension trouve son origine dans le niveau de modernisation d’un pays, la nature de la population (densité), l’évolution historique, les pratiques religieuses, etc. Le degré de contrôle de l’incertitude exprime la façon dont les membres d’une société se sentent face aux situations imprévisibles (et / ou ambiguës).

Cette dimension de « contrôle de l’incertitude » mesure « le degré de tolérance qu’une culture peut accepter face à l’inquiétude provoquée par des événements futurs, si la tolérance est faible, le contrôle est fort et vice versa »12.

On fait distinguer deux types de sociétés :

- D’une part, les sociétés à faible contrôle de l’incertitude, qui conditionnent leurs membres à subir l’incertitude. Il en découle que ceux-ci prennent rarement des risques et acceptent le futur en tant que tel.

- D’autre part, on trouve les sociétés à fort contrôle de l’incertitude, dont les membres cherchent à vaincre l’avenir. Dans ce contexte, on cherche à créer la sécurité par trois moyens : la technologie, les lois et la religion13.

d- La masculinité :

Une telle dimension (masculinité/féminité) trouve son origine dans les différents rôles qu’on assigne à l’un ou à l’autre sexe (bien que ces rôles ont évolué dans le temps). En fait, il

11 - D. Bollinger, G. Hofstede: op.cit, p: 82

12 - D. Bollingerm G. Hofstede: op.cit, p: 103.

13 - Idem, p : 104.

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existe des sociétés qui établissent une nette séparation entre les rôles des hommes et ceux des femmes. « Plus les rôles sont différenciés, plus la société montrera des traits qu’on peut nommer masculins. Plus les rôles sont interchangeables, plus la société montrera des traits féminins »14.

Dans une société masculine, on observe que :

- L’homme doit dominer en toutes situations. Dans un tel contexte, on met l’accent sur la réalisation de soi,

- L’homme cherche à se faire valoir ; la femme, quant à elle, doit s’occuper de l’éducation des enfants ;

- La répartitions des rôles entre les deux sexes est plus rigide (par rapport à la société féminine où on suppose l’égalité des rôles) ;

- Au sein de la famille, le père sert de modèle aux garçons, la mère aux filles.

A l’opposé, une société caractérisée par une culture féminine traduit les spécificités suivantes :

- Les rôles assumés par les hommes et les femmes sont interchangeables.

- Au sein de la famille, aussi bien le père que la mère constituent des modèles pour les enfants (en effet, l’homme peut s’occuper de l’éducation des enfants) ;

- La différenciation des rôles sexuels n’entraîne pas des inégalités dans l’exercice de pouvoir (entre hommes et femmes).

- Les membres de la société féminine sont plus solidaire que dans le contexte de la culture masculine.

2- Influence de la culture nationale sur les pratiques des entreprises dans le contexte marocain :

Avant d’examiner les pratiques de management au sein de l’entreprise marocaine, nous allons énumérer les principaux traits qui marquent la culture nationale marocaine.

2-1- Caractéristiques culturelles de la société marocaine :

La société marocaine, est le produit d’une longue histoire qui a connu une interaction permanente de plusieurs facteurs: humains, sociaux, économiques, etc. On peut, même, dire que «pendant des siècles, s’est perpétuée la société marocaine se reproduisant toujours à l’image d’elle même »15.

L’Etat et la monarchie ont marqué toujours l’histoire du Maroc. La société marocaine a connu des changements qui amorçaient une tendance à mettre en place les bases d’une

14 - D. Bollinger, G. Hofstede: “Les différences culturelles dans le management”, p: 137.

15 - Yahia Benslimane : « Nous marocains permanences et espérances d’un pays en développement », p : 241.

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société civile où la liberté d’entreprendre va jouer un rôle sans précédent. En effet, on y observe « une certaine continuité et une reconversion des dynasties bourgeoises qui ont su transformer leur savoir faire marchand en stratégie d’entreprise »16.

L’étude de l’évolution de notre société durant ces deux dernières décennies montre que l’accès au pouvoirs n’est pas le monopole de l’aristocratie traditionnelle, et que de nouvelles élites appartenant à des milieux sociaux divers sont apures. Cet état de chose va instaurer une nouvelle dynamique sociale au sein de notre pays.

Dans cette étude des caractéristiques culturelles de la société marocaine, nous allons nous limiter à deux éléments clés :

- Les principes constitutionnels qui régissent la société marocaine (à travers un aperçu de la constitution).

- Les différentes appartenance géographiques du pays.

La constitution marocaine retrace de façon plus ou moins sommaire les traits caractéristiques qui ont toujours marqué l’identité marocaine dont on cite : l’Islam, la monarchie et la langue arabe.

N’oublions pas que le Maroc sur le plan constitutionnel et institutionnel s’inspire également de certaines notions empruntées à d’autres civilisations dont nous pouvons citer les notions suivantes : démocratie, nation, souveraineté, etc.

A ce titre, il est à préciser que le Maroc connaît une configuration linguistique/culturelle tripolaire. On y remarque une certaine cohabitation entre trois langues principales :

- La langue arabe instituée par la constitution en tant que langue officielle de l’Etat.

- La langues berbères qui sont des langues maternelles et se caractérisent par leur diversité.

- La langue française qui est la langue d’enseignement et qui illustre l’influence de la culture française sur la société marocaine.

Quant aux appartenances géographiques17 du Maroc, nous pouvons les situer principalement à deux niveaux :

- L’appartenance horizontale : qui traduit l’intégration du Maroc au monde arabo- musulmane, ce qui se concrétise par un degré important d’inspiration des cultures orientales.

- L’appartenance verticale : qui s’étend vers le Nord (l’Europe) et le sud (l’Afrique).

16 - S. Tangeaoui : « les entrepreneurs marocains », éd. Karthala 1993, p : 8.

17 - Voir M.O. Benjelloun : « La constitution comme pièce d’identité : les marques identitaires, politiques et culturelles dans la constitution marocaine », in revue des études juridiques, économiques et sociales, N° 10/1998.

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En effet, le modèle « européen » (et principalement occidental) constitue une référence pour la société marocaine. Quant à son appartenance africaine, nous rappelons que le Maroc a été l’un des membres fondateurs de l’organisation de l’union africaine. Nos relations avec les pays africains datent dans l’histoire (elles portaient sur la circulation des hommes et des marchandises). A certaines époques de l’histoire, l’hégémonie politique marocaine a été étendue jusqu’au Mali et au Sénégal.

Au delà de ces controverses quant au conduite que doit prendre la société marocaine, il y a une réalité qui fait l’objet d’un consensus : il s’agit de l’option libérale. «Choix d’abord socio- culturel, la libéralisation des secteurs de l’économie nationale n’est que la réponse partielle à ce choix et aux attributs naturels de cette raison d’être et d’exister : la liberté. Le libéralisme dans notre pays par delà le choix idéologique est l’expression en projection d’un passé et le reflet immédiat d’une soif inassouvie par les nécessités d’un présent. Notre libéralisme n’est pas conservateur, il est libérateur »18.

En d’autres termes, il s’agit d’un choix unanime qui a marqué l’histoire marocaine et qui marquera les évolutions futures de notre société. Il est lieu de signaler, à ce sujet, que les engagements pris vis à vis de l’extérieur (par exemple : l’organisation mondiale du commerce, les organisations mondiales des droits de l’homme, etc) ont mis le pays sur un chemin de libéralisation totale en vue d’une ouverture complète du marché national. De ce fait, l’appareil législatif/exécutif a entrepris une série de réformes dans tous les domaines de la vie sociale (politique, économie, culture, justice, enseignement, etc.) sous le vocable de la mise à niveau économique et sociale.

Malheureusement, « des tendances conservatrices sont toujours à l’œuvre, et ne concernent pas uniquement les rouages de l’administration, mais aussi des secteurs essentiels de l’économie »19.

Au reste, nous pouvons dire que le Maroc, durant son histoire, a connu l’afflux des différents apports culturels émanant des horizons divers. Ce qui a crée une interaction dynamique entre les différentes civilisations sur le territoire marocain. En effet, notre société a donné l’exemple (le long de son histoire) par son ouverture aux autres cultures, sa tolérance, sa solidarité entre ses membres, etc.

L’ensemble de ces facteurs a fait émerger une culture marocaine homogène et spécifique. Le schéma suivant montre les différentes sources dont puise notre culture nationale :

18 - Voir B. Azzouzi, PME et stratégie de développement au Maroc, éd.Elmaarif Aljadida1997 , p : 63.

19 - A. Mezouar et J.P. Semariva : « Managers et changement au Maroc » éd. CRD 1998, p : 212.

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Schéma N°1 : Les sources de la culture nationale marocaine

A partir de cette vue panoramique des caractéristiques de la culture marocaine nous pouvons dresser le tableau suivant qui synthétise les dimensions culturelles nationales marocaines:

Dimensions culturelles/ types de cultures Culture Marocaine

Individualisme/ collectivisme Collectiviste

Féminité/ masculinité20 Masculine

Contrôle de l’incertitude Faible

Distance hiérarchique Grande

2-2- Caractéristiques des pratiques de management au sein de l’entreprise marocaine : L’esprit d’entreprise a été toujours présent au sein du contexte culturel marocain. Plus encore, il est perçu par notre religion comme étant «le fondement de l’activité vitale humaine….Ecoutons ces versets: "dis : agissez, dieu verra vos action, ainsi que le prophète et les croyants" (Sourate ATTAWBA, versets 105) »21.

Certes, notre religion encourage l’action et l’initiative dans tous les domaines.

Malheureusement, parfois, une mauvaise interprétation du Coran et de la tradition fait véhiculer au sein des entreprises de valeurs « négatives » dont les effets sont pervers : tel est le cas de l’attitude face aux événements futurs. On pense qu’on doit les subir en tant que tels du fait qu’ils sont la manifestation de la volonté divine. Cela se concrétise par l’absence de toute tentative, au préalable, de contrecarrer les situations imprévisibles. Cet état de choses corrobore, chez certains auteurs (étrangers au monde arabo- musulman) l’idée selon laquelle

20 - Certes, les deux cultures sont masculines, mais nous remarquons que la société marocaine se situe à un niveau de masculinité plus élevé que celui de la société française.

21 - B. Azzouzi, op. cit, p : 204.

Cultures européennes (française et espagnole

)

Cultures berbères

CULTURES NATIONALE

MAROCAINE Cultures arabo-

musulmane Cultures africaines

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« le musulman se trouve assujetti à une loi religieuse particulièrement totalitaire qui réduit le champ de sa liberté d’action »22.

Nous soulignons que ce type d’analyse23 est influencé par une vision (occidentale) ethnocentrique qui tente d’interpréter la parole sacrée (le Coran) sans avoir ni les moyens ni le recul nécessaire pour le faire.

Qu’en est- il, alors, de l’impact des autres caractéristiques socio- culturelles sur l’émergence et le développement de l’esprit d’entreprise au sein de la société marocaine ?

Pour répondre à cette question, rappelons, tout d’abord, le cadre socio-économique dans lequel a émergé l’entreprise marocaine. Après l’indépendance, (les années 60 et 70), les pouvoirs publics, afin de stimuler l’initiative privée, ont mis en place une série de mesures incitatives visant à encourager l’entreprise marocaine à travers les marchés publics. Force est de constater que l’évolution de celle-ci s’est effectuée dans une situation de quasi-rente, sous la protection paternaliste qu’offrait l’administration : en ce sens, cette entreprise ne pourrait être entreprenante24. Elle (l’entreprise) est perçue (par ses dirigeants) en tant que moyen susceptible de générer (voir maximiser) le profit, les autres dimensions sont négligées. Il est rare qu’on puisse en parler d’une personne morale ayant une mission à accomplir au sein de la société. Autrement dit, dans notre contexte marocain, on ne peut parler d’entreprise citoyenne.

Ce que nous pouvons souligner, à ce niveau, c’est que l’entreprise marocaine souffre d’un ensemble de faiblesses dont une grande partie émane des valeurs conservatrices et des convictions archaïques (dûes au degré élevé d’analphabétisation) que véhicule notre société.

Nous citons, ici, quelques éléments25 :

- Absence de confiance, méfiance des personnes n’appartenant pas à la même famille.

- Suspicion à l’égard de l’administration26.

- Discrétion exagérée et détention exclusive de toute donnée concernant l’entreprise quelque soit son degr é d’importance.

Ceci nous permet d’établir un lien direct entre les caractéristiques de notre culture nationale et les pratiques managériales au sein de l’entreprise marocaine.

22 - G. Tribou : « L’entrepreneur musulmane : l’islam et la rationalité d’entreprise » éd l’Harmattan 1995, p : 232.

23 - pour ces analyses, on se base de façon très réductionniste sur l’étude des traductions du Coran, ce qui ne reflète pas le vrai sens de l’islam surtout en matière de liberté d’entreprendre.

24 - Voir : F. Oulalou : « entreprise marocaine et dynamique économique » in : « L’entreprise marocaine face aux nouveaux défis » publication de A.E.M, Juillet 1998, p : 24.

25 - B. Azzouzi : op.cit, p : 140.

26 - Pour désigner l’administration, on utilise le vocable « ALMAKHZEN » qui signifiait durant plusieurs siècles

« les pouvoirs publics » avec toutes les conséquences qui en résultent sur le comportement du citoyen marocain (crainte, discretion…etc).

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Commençons, tout d’abord, par cette culture d’obéissance qui marque la famille marocaine. Celle-ci est centrée sur le père qui détient un pouvoir absolu. L’enfant, quant à lui, grandit dans un univers de soumission (totale au père), de respect et de crainte. Ce scénario se reproduit à l’identique entre dirigeant et subordonnés. Plus encore, cette culture d’obéissance est également présente au sein des réunions formelles à des échelons supérieurs de la hiérarchie. A ce niveau, on échange des points de vue, on rend compte, on écoute la conclusion du directeur général puis on approuve à l’unanimité27.

Ainsi, on peut parler de deux types de dirigeant : l’un est tourné vers l’avenir, l’autre s’inscrit dans le prolongement des pratiques conservatrices et archaïques :

a- Le dirigeant « moderne » :

Celui-ci prend une distance intellectuelle par rapport aux mécanismes sociaux traditionnels. Il est influencé par les méthodes modernes de management qui constituent à ses yeux une sorte de référence par rapport à laquelle l’entreprise marocaine devrait se situer.

Pour ce type de dirigeant, notre pays a entamé une ère où on table de plus en plus sur le savoir, la technologie28. De ce fait, on doit surmonter l’ensemble des problèmes qui sont dans leur majorité dûs29 :

- aux habitudes d’improvisation (caractérisant les pratiques au sein des entreprise) au détriment du moyen et du long terme.

- A la place marginale des cadres et des techniciens au sein de l’entreprise marocaine.

C’est dans cette perspective qu’il (le dirigeant « moderne ») ne cesse de mettre l’accent sur les enjeux décisifs que constitue la modernisation des styles de management.

Toutefois, ce type de « dirigeant » ne rompt pas définitivement avec la tradition, son recours à des pratiques subjectives (traditionnelles) s’explique par la difficulté de faire autrement30. b- Le dirigeant « traditionnel » :

Il est généralement illettré. De ce fait, il gère son « entreprise-affaire », selon un système traditionnel et archaïque, soit tout seul, soit à l’aide de l’un de ses proches membres de la famille (généralement son fils)31.

Ce dirigeant intervient dans tous les détails qui concernent la gestion de son entreprise, rejetant par là tout conseil extérieur (émanant des cabinets de conseil par exemple). Tant que l’affaire (l’entreprise) marche bien, il se sont à l’aise.

27 - A. Mezouar, J. P. Semeriva, op.cit, p : 27.

28 - S. Tangeaoui, op. cit, p : 72.

29 - Idem, p : 96.

30 - Idem, p : 159.

31 - B. Azzouzi, op. cit, p : 133.

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Si on essaye de parler du profil du dirigeant marocain de façon globale (mis à part la distinction ci-dessus), on peut dire que le style de management qui le caractérise s’articule autour des valeurs suivantes par ordre décroissant32 : la qualité des relation (90%), le professionnalisme (49%), la performance (34%), la responsabilité (23%), l’esprit de challenge (16%).

Ainsi, on observe l’ampleur des liens personnels qui marquent le profil du dirigeant marocain : chose qui n’est pas étrange aux caractéristiques de la culture marocaine.

Le dirigeant, au sein de l’entreprise marocaine, apparaît comme le « maître à bord ».

ayant une personnalité aux multiples facettes, il s’occupe de l’ensemble des problèmes (qui sont d’ailleurs éclatés) dans tous les domaines (finance, production, approvisionnement, vente, etc.).

S’agissant des relations liant les subordonnés à leur dirigeant, on y observe une grande distance hiérarchique caractérisée par « un système fondé sur des rapports de subordination où le chef est reconnu comme tel contre protection et le cadre ou simple agent comme tel élément contre soumission »33.

Il s’agit, en fait, d’une caractéristique enracinée dans notre culture nationale que nous pouvons qualifier d’une sorte de « pacte tacite »entre dominants/dominés (responsables/

citoyens, pères/ fils, enseignants/ étudiants, etc.) afin de préserver leurs relations en tant que telles.

On parle, alors, d’un style de direction marqué par le centralisation de la prise de décision. Même le droit à la parole obéit au principe de la hiérarchie de l’autorité. Les individus situés en bas de « la pyramide » n’ont qu’à écouter et obéir. Le sens que « l’écoute » renferme, à ce niveau, est celui qui caractérise le contexte familial marocain : autrement dit,

« Ecoute » ça veut dire retiens ce que l’on te dit et tais-toi34 (tel est le constat entre père et fils, fils aîné et petits frères etc).

Ce que l’on peut déduire, c’est que le profil du dirigeant marocain (que ce soit traditionnel ou moderne) reflète cette « programmation collective » de l’esprit ma rocain fondé sur le collectivisme, les rapports de soumission et la qualité des relations. Plus encore, on est parfois, confronté à des pratiques managériales d’essence tribale (tel est le contexte du dirigeant soussi et fassi).

32 - Voir A. Mezzouar, J.P. Seneriva, op. cit, p : 28.

33 - Voir A. Mezouar, J. P. Seneriva, op.cit, p : 232.

34 - Voir idem, p : 232.

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Bibliographie :

- Adler. N. (1991): « le comportement organisationnel : une approche multiculturelle ».

- Azzouzi.B (1997) : PME et stratégie de développement au Maroc, éd.Elmaarif Aljadida , p : 63.

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Références

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