Mini-projet : M´ecanique multi-´echelle pour les fluides `a microstructures propos´e par Claude Le Bris (lebris@cermics.enpc.fr)
Le but de ce mini-projet est la simulation num´erique de l’´ecoulement monodimensionnel d’un fluide `a microstructure (ici un fluide polym´erique). Un tel fluide fait partie de la grande famille des fluides non newtoniens.
Le cadre de travail est le suivant. On consid`ere l’´equation suivante
∂u
∂t −ν∂2u
∂y2 = ∂τ
∂y. (1)
Dans ces ´equations,uest la vitesse du fluide selon l’axe 0x(voir la Figure) et est suppos´ee ˆetre une fonction du temps t et de la variabley ∈ [0, L] seulement (pas de x) : u=u(t, y). La fonction τ, homog`ene `a une contrainte, est, elle aussi suppos´ee ne d´ependre que detet dey. La constanteν >0 est la viscosit´e du fluide. On compl´emente l’´equation (1) des conditions aux limites
u(t, y= 0) =V, u(t, y=L) = 0, pour tout tempst >0, (2) o`u V > 0 est une constante, et les deux ´equations de conditions initiales u(t = 0) = u0, fonction appartenant `a H1(0, L) etτ(t= 0) =τ0, fonction appartenant `aL2(0, L).
Pour simuler le fluide, l’´equation (1) ne suffit pas. Il faut aussi une relation, jouant le rˆole de relation diteconstitutive qui relieτ `a l’´etat physique du fluide. Dans la premi`ere partie, on va utiliser un mod`ele microscopique pour obtenir cette relation, donnant ainsi naissance `a un mod`ele dit multi-´echelle. Dans la seconde partie, on proc´edera seulement
`a l’´echelle macroscopique.
Premi`ere partie : mod`ele muti-´echelle du fluide
A l’´echelle microscopique, on va supposer que le fluide ´etudi´e est le m´elange d’un solvant (l’eau) et de microstruc- tures qui flottent dans ce solvant (par exemple des brins d’ADN, ou des chaˆınes de polym`eres, ou des petits cristaux, etc, etc). Pour simplifier, nous consid´erons que la microstructure est un petit bˆaton de taille microscopique, qui peut
`a la fois s’allonger/r´etr´ecir et s’orienter dans n’importe quelle direction dans le fluide. En d’autres termes, il s’agit en chaque pointy d’un vecteur R~ = (P, Q), chacune de ses coordonn´ees d´ependant du temps.
Fixons un tel pointy∈[0, L], et supposons connaˆıtre la fonction ∂u
∂y en ce pointy au cours du temps.
Pour d´ecrire la dynamique de R, on consid`ere la fonction~ ψ solution de l’´equation aux d´eriv´ees partielles (de convection-diffusion) suivante sur l’espaceR2 des couples (P, Q).
∂ψ
∂t(t, P, Q) = − ∂
∂P
(∂u
∂y(y, t)Q−P) ψ(t, P, Q)
+ ∂
∂Q(Q ψ(t, P, Q)) + ∂2
∂P2 + ∂2
∂Q2
ψ(t, P, Q) (3)
Cette fonctionψ(t, P, Q) d´efinit la probabilit´e pour que, `a l’instantt, le vecteurR~ ait les coordonn´ees (P, Q). On part
`a l’instantt= 0 d’une fonctionψ0≥0, telle que Z
R2
ψ0= 1.
1.1) Montrer par un calcul formel (mais que l’on peut justifier math´ematiquement) que l’´equation (3) entraˆıne Z
R2
ψ= 1 pour tout temps.
1.2) Montrer que si l’on pose
τ = Z
R2
P Qψ dP dQ, (4)
et si l’on part d’une fonctionψ0 qui v´erifie Z
R2
Q2ψ0= 1 et Z
R2
P Qψ0=τ0. alorsτ est exactement la solution d’une
´equation ne faisant que figurer queτ etu, de la forme
∂τ
∂t +f(τ) =∂u
∂y, (5)
1
y=0
x y=L
y
V
Fig.1 –Ecoulement de type “plan de Couette”.
o`u on calculera explicitement la fonctionf(τ).
On veut maintenant programmer la r´esolution de (3). Pour cela, on introduit la fonction ψ∞=c∞exp −(P2+Q2)/2
, (6)
o`uc∞est une constante qu’on calculera telle que Z
R2
ψ∞= 1. On introduit alors la fonction ϕ= ψ
ψ∞
. (7)
1.3) Ecrire l’´equation v´erifi´ee parϕ.
On choisit comme approximation semi-discr´etis´ee en temps de cette ´equation l’´equation ψ∞
ϕn+1−ϕn
∆t = − ∂
∂P ∂u
∂y Q ψ∞ ϕn
+ ∂
∂P
ψ∞
∂
∂Pϕn+1
+ ∂
∂Q
ψ∞
∂
∂Qϕn+1
(8) Pour discr´etiserϕn, on ne choisit pas une base d’´el´ements finis.
1.4) Expliquer pourquoi en effet il n’est pas facile d’utiliser la m´ethode des ´el´ements finis pour des r´esolutions d’´equations sur l’espaceR2tout entier.
On proc`ede donc exactement comme dans la m´ethode des ´el´ements finis, `a cette nuance pr`es que les fonctions de base que l’on va choisir ne sont pas des fonctions polynomiales par morceaux mais sont de la forme suivante
χi,j(P, Q) =Hi(P)Hj(Q), (9)
o`u les fonctionsHi sont des polynˆomes de Hermite (d´efinis sur tout l’espace et pas seulement sur des “mailles”). On ne prendra que les 3 premiers d’entre eux, c’est-`a-dire
H0(P) = 1, H1(P) =P, H2(P) = 1
√2(P2−1). (10) ce qui revient `a ne prendre donc que 9 fonctions de baseχi,j. Les polynˆomes de Hermite v´erifiant
√1 2π
Z
R
Hi(P)Hj(P) exp (−P2/2)dP =δij, (11) ils sont particuli`erement bien adapt´es au probl`eme.
1.5) R´ealiser la formulation variationnelle de (8) dans la base desχij.
1.6) Programmer la r´esolution en Scilab. On prendra comme donn´ee initiale la fonction ϕ0 ≡ 1, correspondant `a ψ0=ψ∞, et on choisira diverses fonctions ∂u
∂y, `a commencer par z´ero.
Remarque :On calculera les int´egrales Z
R
dmHi
dPm(P)dnHj
dPn (P)Pαexp (−P2/2)dP, pouri, jdans{0,1,2},α∈ {0,1}, et les ordres de d´erivationm, ndans{0,1}.
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Deuxi`eme partie : un mod`ele purement macroscopique
Comme annonc´e, on va dans cette partie proc´eder diff´eremment. On couple `a l’´equation (1) l’´equation suivante :
∂τ
∂t +λτ =∂u
∂y. (12)
o`u la constanteλest un param`etre r´eel strictement positif fix´e.
2.1) Un fluide comme celui d´ecrit par les ´equations (1)-(12) est souvent dit un fluide`a m´emoire, parce que le tenseur des contraintes d´epend de toute l’histoire de la d´eformation du fluide. Justifier (sans calcul) cette appellation au vu de l’´equation (12).
2.2) Montrer que, sous une bonne hypoth`ese sur la condition initiale, ces ´equations s’obtiennent `a partir des ´equations suivantes (dites´equations de Oldroyd-B), pos´ees sur la vitesse~vet le tenseur des contraintesσ
∂~v
∂t +~v.∇~v−ν∆~v+∇p = λ1divσ,
div ~v = 0 (13)
∂σ
∂t +~v.∇σ−σt∇~v− ∇~v σ+λσ=λ(∇~v+t∇~v) (14) lorsque l’on suppose que~v=u(t, y)~ex(o`u~ex est le vecteur unitaire selon l’axe desx), que la pressionpet la matrice tenseur des contraintesσne d´ependent pas dexnon plus, et que l’on note τ(t, y) = 1
λσ12. 2.3) Montrer le lien avec l’approche d´ecrite par la premi`ere partie.
Pour r´esoudre les ´equations (1)-(12), on utilise les ´equations dites semi-discr´etis´ees en temps suivantes un+1−un
∆t −ν(un+1)′′= (τn)′, (15)
τn+1−τn
∆t +λτn+1= (un+1)′, (16)
o`u la notationv′ etv′′d´esigne la d´erivation par rapport `a la variabley, et o`uunetτnsont bien sˆur les approximations au tempstn =n∆tdes fonctionsu(tn, y),τ(tn, y). On adopte une discr´etisation par ´el´ements finis monodimensionnels P1 pourun etP0 pourτn, sur le mˆeme maillage homog`ene de pas ∆y sur [0, L].
2.4) Justifier (sans calcul) cette diff´erence de degr´e d’approximation entreuet τ.
On choisit pour le momentV = 0 comme condition au bord eny= 0.
2.5) Montrer formellement sur le syst`eme (1)-(12) que Z L
0
|u|2+ Z L
0
|τ|2 (17)
est une fonction born´ee (et en fait d´ecroissante) du temps.
2.6) Montrer que, sous une condition sur le pas de temps ∆tque l’on explicitera, on a la condition dite de stabilit´e Z L
0
(un)2+ Z L
0
(τn)2≤C (18)
o`u C est une constante ind´ependante du temps, que l’on explicitera aussi. Montrer qu’on a mˆeme la d´ecroissance de la quantit´e au membre de gauche de (18).
2.7) R´ealisez la formulation variationnelle discr`ete des ´equations (15) et (16). On justifiera en particulier le fait qu’il n’y a pas besoin de condition au bord surτ.
2.8) Adaptez cette formulation variationnelle au casV = constante non nulle.
2.9) Programmer, toujours pourV = constante non nulle, cette r´esolution en Scilab. On pourra prendre comme donn´ee initialeu(y) = 1−y etτ(y) constant. Qu’arrive-t-il au bout d’un temps assez long ? Justifier ce comportement.
3
2.10) On consid`ere d´esormais le sch´ema semi-discr´etis´e qui couple (15) et τn+1−τn
∆t +λτn+1 = (un)′, (19)
En revenant au casV = 0, parvenez-vous `a ´etablir une condition sur le pas de temps pour laquelle (18) est vraie pour le syst`eme (15)-(19) ?
2.11) R´ealisez la formulation variationnelle discr`ete de (15)-(19) et programmer en Scilab sa r´esolution. Commenter la comparaison des deux m´ethodes (15)-(16) et (15)-(19) du point de vue de la stabilit´e, i.e. que se passe-t-il quand le pas de temps est pris “grand” dans l’une et l’autre des m´ethodes ?
Partie subsidiaire bonus
(beaucoup plus dure !, `a faire quand tout le reste du TP est effectu´e, et sans obligation) (Ne peut que rapporter des points et pas en enlever)
On revient au cadre de travail de la premi`ere partie. On remplace maintenant l’´equation (3) par
∂ψ
∂t(t, P, Q) = − ∂
∂P
(∂u
∂y(y, t)Q− P
1−(P2+Q2)) ψ(t, P, Q)
+ ∂
∂Q
Q
1−(P2+Q2) ψ(t, P, Q)
+ ∂2
∂P2+ ∂2
∂Q2
ψ(t, P, Q) (20)
1. Bonus (a) En examinant formellement le comportement de l’´equation lorsqueP2+Q2 −→ 1−, sauriez vous dire quelle propri´et´e physique n´eglig´ee dans le mod`ele (3) est cette fois prise en compte dans (20) ?
1. Bonus (b) D´ecrivez (sans impl´ementer) les difficult´es d’une r´esolution par les mˆemes techniques que celles de la premi`ere partie ?
1. Bonus (c) On va admettre qu’une alternative `a la r´esolution de (3) est d’employer une m´ethode de type Monte-Carlo.
Il s’agit de consid´erer des sch´emas du type
( Pn+1= ∆t∂u∂y(y, t)Qn+ (1−∆t)Pn+√
2 ∆t∆Vn, Qn+1= (1−∆t)Qn+√
2 ∆t∆Wn, (21)
o`u ∆Vn et ∆Wn deux variables al´eatoires gaussiennes centr´ees r´eduites. La valeur de τ (´equivalente `a (4)) est alors donn´ee par
τ =E(P Q), (22)
o`u E d´esigne l’esp´erance de la variable al´eatoire. Adapter cette m´ethode au cas de l’´equation (20) en sugg´erant un sch´ema num´erique du type (21) qu’on utilisera pour calculer l’analogue de (22) dont on admettra qu’il est ici
τ=E( P Q
1−P2−Q2). (23)
FIN//
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