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BULLETIN DU FESTIVAL SOMMAIRE N 3/DAKAR COURT Cinemarekk : une maison du court-métrage sera à leur portée

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Academic year: 2022

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Cinemarekk : une maison du court-métrage sera à leur portée Créé en décembre 2018 par le cinéaste Moly Kane, Cinemarekk vise à promouvoir le cinéma avec lʼorganisation dʼun festival annuel, Dakar Court, mais aussi dʼaccompagner tous et notamment les jeunes, dans la professionnalisation des métiers du cinéma. Cinemarekk est présent au Sénégal, en Gambie et en Guinée Conakry. Pour soutenir cette démarche, une maison du court métrage va être construite avec lʼappui de la mairie à Pikine Ouest dont le maire, Pape Gorgui Ndong était présent à la présentation du projet à l'Institut français le 8 décembre 2021.

Au tout début, en 2007, Moly Kane avait créé une association dénommée ‘‘Les lions de lʼartʼʼ, qui regroupait ciné-clubs et travail théâtral. Dix ans plus tard, étant beaucoup plus présent dans le domaine des images, il a proposé de se focaliser seulement sur le cinéma. Cinemarekk (qui signifie Cinéma Seulement) a ainsi vu le jour, avec pour objectif dʼaller à la rencontre des ciné-clubs créés par Moly Kane et ceux de son défunt professeur Abdoul Aziz Boye.

Moly Kane explique que lʼassociation est composée de jeunes et souffre parfois de manque dʼexpérience. Mais ce dont lʼassociation souffre le plus, ce sont les moyens financiers. "Nous continuons cependant de travailler, dit-il, ce qui nous permet d'inviter les partenaires locaux à soutenir ce genre dʼinitiatives. »

Pour promouvoir le cinéma, Cinemarekk assure la pérennité du festival Dakar Court, qui en est à sa quatrième édition. Cette année, lʼinnovation est le talent Dakar Court Critique. Moly Kane explique que ce projet a été mis en place car « les journalistes culturels en général sont intéressés par le cinéma, mais peinent à avoir les outils de travail pour pouvoir travailler les films ». 30 journalistes se sont ainsi regroupés durant une semaine avant le festival pour s'initier à la critique cinématographique, et l'ont fait sur la base des films de la compétition du festival dont les critiques paraissent dans ce bulletin.

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BULLETIN DU FESTIVAL

N°3/DAKAR COURT 2021

SOMMAIRE

P.2- Passage du court au long

P.3- Massterclass de William Mbaye

P.4- Panel UEMOA

P.5-Festival de Clermont

P.6-La femme dans les films

P.7- Promotion

P.8- Petit historique des cinémas

P.9-Du corps et de la créativité

P.10-Films en compétition

Le maire de Pikine Ouest Pape Gorgui Ndong serre la main de Moly Kane

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La construction à Pikine Ouest, à 15 km du centre de Dakar, d'une maison du court métrage sera une avancée supplémentaire dans l'activité de lʼassociation Cinemarekk.

Lʼappui de la mairie de Pikine Ouest, dont le dynamique maire insiste sur l'importance de la culture, est décisif : elle met gratuitement à disposition un terrain de 500 m2 bien situé à l'entrée de la commune, à proximité de beaucoup de commerces. Ce centre national du court métrage, qui couvrira 300 m2 sur deux niveaux, comportera une salle de projection pouvant également accueillir des scolaires, un espace de travail en open space et des bureaux particuliers, ainsi qu'un espace de restauration qui avec des possibilités d'héber- gement permettront de générer des revenus de location aux équipes techniques lors des tournages en banlieue. Même la terrasse pourra être utilisée à fin de projections ou autres.

Les travaux commenceront dès l'aboutissement des dossiers administratifs déposés pour les autorisations, avec les moyens de Cinemarekk en attendant le relais des financeurs sollicités.

Un projet ambitieux appelé à faire des petits au Sénégal et ailleurs pour la constitution d'un réseau.

Cheikh Bamba Kane et Mame Sack Mariama Diallo

Le passage dʼun court-métrage à un long nʼest pas aussi évident que ça pourrait y sembler. Des complexités techniques et financières dessinent des écueils. Dans le cadre des tables-rondes de Dakar Court 2021, des acteurs importants se sont entretenus le 8 décembre sur leurs expériences en la matière.

Les problèmes financiers sont revenus dans presque toutes les interventions. Ils poussent les réalisateurs à débuter par les courts avant dʼoser le rêve du long. Le producteur français Lucas Tothe estime que faire un court est certes difficile, mais produire un long concentre plus dʼenjeux : « On peut faire un court-métrage avec 50 000 euros, et se retrouver avec un budget de 5 millions pour le long. (…) Cʼest pourquoi beaucoup de réalisateurs, après le succès de leurs courts dans les festivals, vont voir des sociétés de production de plus grande envergure.»

Les festivals sont cruciaux pour le parcours des courts et leur passage en long. En effet, cela demande toute une machine qui sera facilitée par la reconnaissance et la crédibilité de la production. « Le succès de "Le Bleu blanc rouge de mes cheveux" mʼa rendue très heureuse mais mʼa aussi fait peur. Le travail de mon producteur a été de mʼaccompagner en tant que ce que je suis, mes spécificités, ce que je souhaite raconter, mon point de vue.

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Aïssa Maïga intervient dans le panel "passage du court au long"

LE PASSAGE DU COURT AU LONG METRAGE Un passage excitant et vertigineux

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Le parcours de cette collaboration nʼétait plus de seulement faire ce film, mais travailler ensemble sur un projet esthétique, politique,… », confie Josza Anjembé, sachant que son producteur lui demandait quand même d'écrire des courts inférieurs à 20 minutes pour pouvoir être sélectionnés dans les grands festivals.,. Lucas Tothe indique en outre que l'argent récolté lorsqu'un court est bien primé dans les festivals lui permet d'accompagner les auteurs dans lʼécriture de leur long-métrage.

La scénarisation est une colonne majeure dans ce passage. Josza Anjembé considère que cʼest tout aussi « excitant que vertigineux » de se projeter dʼun coup sur une histoire de 90 minutes quand on sort de la réalisation de courts métrages. Pour la réalisatrice et journaliste d'origine camerounaise, le pont est aisé si on investit dans la scénarisation. « Je suis moi-même allée faire des formations pour me mettre à niveau dans la dramaturgie et comprendre comment se raconte une histoire. Jʼavais éprouvé ce besoin. Etre en dialogue quand on écrit est fondamental et cʼest pourquoi je travaille toujours et encore avec un scénariste », témoigne Josza Anjembé.

Toujours sur lʼécriture, le réalisateur belge Michiel Blanchart affirme quʼil a finalement détecté une grande part de similitude dans lʼécriture des deux formats. Seulement, assure le réalisateur de "Tʼes morte Hélène", les difficultés ne viennent pas du même endroit.

Michiel Blanchart estime toutefois que le court-métrage est plus excitant « dans la mesure où quelques scènes suffisent à dire lʼévolution et concentrer lʼessentiel de son propos ». En ce sens, le Belge croit que le court-mé- trage est la meilleure école pour lʼévolution dʼun réalisateur, mais aussi le meilleur tremplin. Josza Anjembé appelle, en marge, à considérer les complexités du passage du « court au court ». Elle fait observer que les enjeux ne sont pas les mêmes, les nécessités et les motivations ne peuvent pas être mises dans le même curseur. « Dʼun court à un autre, il faut affirmer sa mise en scène car le premier est souvent intuitif », conçoit la réalisatrice qui poursuit en prenant lʼimage de la nage : avec le court, on nage dans une piscine, et avec le long on est plongé dans un grand océan avec la houle, le sel, les poissons et tout ce que le réalisateur ne voit pas venir.

Mamadou Oumar KAMARA

Réalisateur sénégalais, documentariste et président du Jury de la compétition officielle de Dakar court, Ousmane William Mbaye a répondu aux questions d'Aboubacar Demba Cissokho et du public mardi 07 décembre 2021 au théâtre de verdure de lʼInstitut français de Dakar.

William Ousmane Mbaye, qui avait préparé son intervention, a insisté sur la place du court métrage, à la fois affirmation d'un cinéaste et développement d'un point de vue.

A partir de quelques extraits de ses premiers films (LʼEnfant de Ngatch, Pain sec et Dial Diali), il a montré combien son parcours était au départ une volonté d'enracinement dans sa culture et un positionnement social. Il a également rendu hommage à Abdel Aziz Boye, fondateur de Ciné banlieue, quʼil considère comme celui qui a décomplexé les jeunes Sénégalais : il a formé les jeunes et donné espoir au cinéma sénégalais.

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Master class de William Ousmane Mbaye

« Cʼest le documentaire qui mʼa choisi »

Aboubacar Demba Cissokho et William Ousmane Mbaye

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"On utilisait le format court par défaut de moyens", note celui qui se dirigera ensuite vers le documentaire pour pouvoir tourner car la fiction était terriblement difficile à produire.

"Pain sec" était un film particulier car "muet mais tout aussi bavard", une provocation en phase avec le collectif « lʼœil vert », créé au Fespaco de 1981 par un groupe de jeunes cinéastes. Il se donnait pour but de reposer les questions esthétiques pour faire un cinéma moins parlé tout en restant attentif au social. "Pain sec" cherchait ainsi à transmettre des informations et des sentiments sans dialogue.

Ensuite, note Ousmane William Mbaye, « cʼest le documentaire qui mʼa choisi ». Il réalise des portraits : "Xalima la plume", sur le musicien Seydina Insa Wade ; "Fer et verre", sur le travail de la plasticienne Anta Germaine Gaye;

"Mère bi (la mère)", sur Annette Mbaye d'Erneville, la première journaliste sénégalaise, sa propre mère ;

"Kemtiyu", sur Cheikh Anta Diop… A chaque fois "sur la base de lʼaffection que je porte pour quelquʼun et son travail". Car « je peux travailler avec beaucoup de gens mais je ne peux pas boire un verre avec nʼimporte qui » ! Après un long échange avec le public, William répète à deux reprises quʼil nʼa pas de leçons à donner aux jeunes cinéastes mais plutôt des conseils pour les pousser à plus sʼimpliquer dans leurs productions : "Travailler ! C'est comme ça qu'on trouve !".

Amy Andréa Sene Fatima Traoré

Les directeurs de cinématographie du Mali, de la Côte Dʼivoire, du Burkina Faso et du Sénégal souhaitent un traité communautaire sur la coproduction pour booster le cinéma ouest africain. Un fonds communautaire serait également bienvenu.

Avec la mondialisation, des grands ensembles se forment.

Le cinéma, surtout ouest-africain, nʼéchappe pas à cette logique. Pour lʼheure, mêmes si des états ouest-africains signent entre eux des accords de coproduction, la dynamique reste poussive. Comment faire pour promouvoir le cinéma dans lʼespace Uemoa ? Cʼest à cette question que les directeurs généraux du Burkina Faso, de la Cote Dʼivoire et du Mali devaient tenter de répondre le 10 décembre 2021 lors dʼune table ronde organisée dans le cadre du Dakar court.

Le constat est unanime : une dynamique communautaire pour booster le cinéma de lʼespace Uemoa sʼimpose.

Elle permettrait de « mutualiser les ressources financières, humaines et matérielles. Car produire un film coûte cher ». Abdoul Aziz Cissé du FOPICA en est convaincu. Pour lui, il faut « travailler sur un traité de lʼUemoa et sur la mise en place dʼun fonds communautaire ». Une position partagée et appuyée par le directeur général de lʼOffice national du cinéma ivoirien.

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Création dʼune dynamique communautaire pour booster le cinéma

Un traité de lʼUemoa pour la coproduction souhaité

De droite à gauche, Abdoul Aziz Cissé, directeur du FOPICA, et les directeurs de la cinématographie de Côte d'Ivoire, M. Dohou, du Mali, M. Souaré, et du Burkina Faso, M. Ouedraogo

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FOCUS SUR LE FESTIVAL DE CLERMONT-FERRAND, UN PARTENAIRE PRIVILÉGIÉ DE DAKAR COURT

Pierre Douhou estime que les acteurs sont plus en avance que les décideurs publics. « La production de film est un fardeau. Plus, on est nombreux à le soutenir, moins lourd ce sera

» a-t-il affirmé tout en citant quelques classiques du cinéma issus de la coproduction avec la Côte d'Ivoire. « On est déjà en coproduction, il faut juste le formaliser » a-t-il conclu.

Dans ce cas comment y parvenir ? Bonaventure Ouédraogo, le directeur du Cinéma au Burkina Faso a livré son idée en ces termes : « En réduisant la lenteur administrative des vprocédures ».

Revenant sur le rôle des directions de la cinématographie, Pierre Douhou de la Côte Dʼivoire a dénoncé le manque de considération des décideurs publics vis-à-vis du cinéma.

« Les acteurs, je les considère comme mes clients. Je dois leur donner de la valeur.

Cʼest pourquoi, nous venons dʼaccueillir pour un milliard Cfa du matériel audiovisuel. Cela va permettre de réduire lʼargent injecté dans la location et qui pourra être utilisé ailleurs » a-t-il informé.

Si la Côte dʼivoire a préféré se concentrer sur le matériel, le Sénégal sʼest lui inscrit dans la formation. A ce propos, Abdoul Aziz Cissé a informé que lʼaide réservée au centre de formation va devenir plus structurelle en donnant lʼexemple du soutien de lʼEtat au centre Cinébanlieue. « La formation participe à lʼémergence du développement de coproduction dans la mesure où des programmes de formation, des résidences, et des projets pratiques de coproduction comme Sentoo sont développés dans les différents pays » a-t-il ajouté tout en invitant les pays de lʼUemoa à sʼinspirer de Sentoo. De plus, les coproductions font circuler les acteurs et professionnels du cinéma dans les pays membres, ce qui ouvre des perspectives nouvelles.

Malick Gaye Matar Dramé

Programmatrice et sélectionneuse au comité international du Festival international du court-métrage de Clermont-Ferrand, Camille Varenne nous a renseignés sur ce rendez-vous du 7ème art vieux de plus de 40 ans et considéré comme l'un des principaux sinon le principal festival du court métrage au monde.

Six films coups de coeur de la dernière édition du festival ont été projetés au théâtre de verdure de lʼInstitut français de Dakar, dont le très marquant "Sestre" de la Slovène Katarenia Retsek, grand prix international, ainsi que le passionnant "Gramercy" de Jamil Mcginnis et Pat Heywood (Etats-Unis), grand prix de la compétition Labo.

Chaque année en janvier à Clermont-Ferrand, le festival célèbre le court-métrage sans exception de genre : fiction, animation, documentaire, expérimental.

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LA FEMME DANS LES FILMS EN COMPÉTITION

Son comité de pré-sélection, composé dʼune cinquantaine de personnes bénévoles pour la plupart, ne reçoit pas moins de 8000 films par an !! Cela requiert méthodologie et organisation pour aboutir à une sélection finale de 77 films pour la compétition internationale avec 55 pays représentés, 51 films en compétition nationale et 28 films en compétition Labo pour l'édition 2022.

En plus des compétitions, les productions africaines ont droit au programme "Regards d'Afrique" qui est une opportunité supplémentaire de visibilité et de rencontre avec les professionnels du cinéma.

Le festival de Clermont-Ferrand est inscrit en lettres dʼor dans lʼagenda de la ville. Dʼune initiative portée par des jeunes cinéphiles, il sʼest finalement institutionnalisé. Un événement festif dans toute la ville avec des projections dans les salles de cinémas mais aussi dans les amphithéâtres universitaires clermontois et la Comédie, scène nationale de théâtre.

Le marché du court métrage accueille pour l'occasion plus de 3700 professionnels du cinéma. Dakar Court y tient un stand à chaque édition.

Pour la petite histoire, il y a eu deux films africains sacrés Grand Prix au festival de Clermont-Ferrand : "Denko" en 1995 du Guinéen Mohamed Camara et "Da Yie" du Ghanéen Anthony Nti en 2019.

Pour lʼédition 2022 qui se tiendra du 28 janvier au 5 février, "Astel" de Ramata-Toulaye Sy représentera le Sénégal en compétition nationale, tant dis que "Tang jër" de Selly Raby Kane et "A La Recherche d'Aline" de Rokahya Baldé seront présentés dans le programme Regards d'Afrique. Avant elles, ce furent Khadidiatou Sow avec "Une place dans l'avion" en 2017 et Pape Lopy avec "Dem Dem" en 2018 qui représentèrent le Sénégal en compétition internationale et Moly Kane en 2020 en Regards d'Afrique avec son film "Les Tissus Blancs".

Reléguée au second plan depuis si longtemps, malgré la lutte acharnée pour lʼégalité des genres et sa valorisa- tion, la femme, devant ou derrière la caméra, souvent davantage considérée comme objet que sujet, reste toujours dans une case étroite.

Dans lʼHistoire du cinéma en Afrique, Safi Faye a réussi à se nicher au travers de la chasse gardée masculine et hermétique du cinéma. Avec "Lettre paysanne" (1975) et "Fadʼjal" (1979), elle a su sʼimposer et laisser son empreinte. Aujourdʼhui, cela reste un combat mais certaines se démarquent et déconstruisent cette image de la femme objet, comme Diana Gueye (Des étoiles, 2013), Katy Lena Ndiaye (On a le temps pour nous, 2019) ou Mati Diop (Atlantique, 2019).

Cette nouvelle génération de femmes, qui veut faire entendre sa voix et sa vision du monde, apporte une touche singulière au cinéma, et tente aussi de faire évoluer le sexisme qui marque si profondément notre société.

Au festival Dakar court, cinq réalisatrices sur les quatorze cinéastes en compétition proposent une certaine représentation des femmes à lʼécran.

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PROMOUVOIR LES COURTS AFRICAINS DANS LʼESPACE FRANCOPHONE

Dans "Astel", la Sénégalaise Ramata-Toulaye Sy se penche sur la place réservée aux femmes dans le Fouta et les codes sociaux immuables. Avec "Poussières d'étoiles", la Tunisienne Mirvet Medini Kammoun magnifie lʼamour et la beauté de la vie, présentant une image de la femme forte, gage de paix, dʼamour et dʼharmonie.

Cette valorisation de la femme profite aussi de la complicité des hommes qui lui accordent une place souvent prépondérante. "Mamy" de Toumani Sangaré prévoit même en 2024 lʼinvestiture dʼune femme à la tête du Mali, en remettant en cause la gestion masculine passée.

Qu'il s'agisse de "Le Retour" dʼIsabelle Christiane Kouraogo (Côte d'Ivoire), de "Projet H" de Maharaki (Marti- nique) ou de "Taajabone" de Fatoumata Bathily, les réalisatrices montrent des femmes qui refusent de subir et qui prennent leur vie en main, des images fortes de femmes inspirantes.

Judith Ekwalla

Salamata Ousmane Diallo

Autour dʼun panel, tenu le 9 décembre 2021 dans le cadre du festival Dakar Court, acteurs, producteurs et distributeurs de films ont émis des idées qui permettront dʼaméliorer la visibilité du cinéma africain face aux multiples obstacles que rencontrent les réalisateurs.

Christine Gendre (Unifrance), Josza Anjembe (réalisatrice), Ismaïl Tabi (Pathé BC Afrique), Sylvain Agbré (Majestic Abijan) et Alex Moussa Sawadogo (Fespaco), ont échangé leur idées. Consciente que « la promotion du film commence avant même quʼil soit fait », Christine Gendre rappelle q'e « Unifrance cherche à découvrir des talents très tôt pour afficher leur travail », et cela notamment grâce à un site internet très précis et référent. Unifrance apporte en outre aux jeunes réalisateurs des conseils dans le choix des festivals pour vendre leurs films.

La réalisatrice Josza Anjembe note qu'en plus des scolaires, le circuit des espaces fermés comme les hôpitaux et les prisons n'est pas exploité et permet de belles rencontres. Mais, ajoute-t-elle, "il faudrait accompagner partout les projections par un représentant de lʼéquipe du film pour quʼil y ait un échange avec le public."

Ismaïl Tabi, de Pathé BC Afrique, souligne dans la foulée que sa structure « travaille avec tous les opérateurs dʼautant que le marché est en train de se dynamiser, tandis quʼau même moment de nouvelles salles sont en train de sortir de terre, comme à Dakar et au Maroc ». Par ailleurs, le choix de la date pour sortir un film est important.

La sortie de "Marcher sur lʼeau" d'Aïssa Maïga a été repoussée au 12 décembre au Sénégal en raison du festival Dakar Court pour bénéficier de cette visibilité.

FESPACO PRO, NOUVELLE DONNE POUR LA PROMOTION DU CINEMA AFRICAIN FRANCOPHONE Pour le délégué général du Fespaco, Alex Moussa Sawadogo les festivals ont pour but de promouvoir les films, sachant que la coproduction permet de promouvoir le film sur des marchés extérieurs. C'est ainsi que "La femme du fossoyeur" de Khadar Ayderus Ahmed, qui a remporté lʼétalon dʼor, a nettement gagné en visibilité sur le terrain africain et au-delà. Cependant, de façon accentuée dans ce contexte de pandémie, combinée à un manque criant de salles de cinéma, les producteurs de films se heurtent à la floraison des plateformes numériques Cʼest pourquoi Sylvain Agbré a plaidé pour lʼimportance de respecter la chronologie des médias et de laisser le film sortir en salles dans de bonnes conditions.

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LES EXPLOITANTS, PILIERS DE LA PROMOTION DES PRODUCTIONS AFRICAINES

Cependant, la numérisation des salles est loin d'être partout accomplie, un véritable talon d'Achille pour la diffusion.

Lʼarrivée pour bientôt du cinéma Pathé au Sénégal donne aussi une lueur dʼespoir quant à lʼaccès aux salles mais aussi quant à la distribution à grande échelle des productions locales. Pour lʼexploitant, la bande-annonce consti- tue un élément crucial dans la promotion en amont de la sortie, sans négliger le rôle important que doivent jouer les médias dans la promotion.

Amadou DIA Awa DIOP

« La littérature devient de plus en plus un luxe pour les Africains », avait affirmé Sembène Ousmane pour expliquer son passage au cinéma et son concept dʼécole du soir. En effet, au cours des décennies qui ont suivi les indépendances africaines jusquʼà aujourdʼhui, les cinémas africains ont complété les autres formes artistiques pour influencer les transformations sociales et éduquer les consciences.

Les cinémas dʼAfrique ont une soixantaine d'années. Il y avait auparavant des documentaires ethnographiques et des films pédagogiques faits par des Européns, sans compter les films de fiction coloniaux. Les cinéastes pionniers de la décolonisation misèrent sur la réappropriation du regard et de la pensée par les Africains. Ils entendaient casser le miroir idéologiquement chargé du cinéma qui les précédait et mener la lutte contre la négation de soi. Ce faisant, ils cherchaient à engager une transformation sociale.

Dans les années 1970, les cinéastes se sont constitués en révolutionnaires « sans pancartes », pour reprendre l'expression de Sembène, en phase avec lʼAfrique qui sʼéveille. Cʼest lʼépoque où se sont effectivement affirmés le regard documentaire, lʼengagement social, le cinéma progressiste et la problématique de la déchirure entre le pays et lʼailleurs ("Touki Bouki", Djibril Diop Mambety). Cʼest autour de ces années que sont nés la plupart des festivals (Carthage 1966, Fespaco 1969), que certains pays ont nationalisé des salles de cinéma et que ls cinéastes ont créé leur Fédération panafricaine (FEPACI, 1970).

Dans les années 1980, à la faveur du désenchantement des indépendances, le roman de soi sʼimpose. Le romanesque ouvre à la fois les perspectives du changement social et la vision du monde. Un retour à lʼéconomie s'opère avec le lancement du Consortium interafricain de distribution cinématographique CIDC en 1979 (mais faillite en 1984) et le "manifeste de Niamey" au congrès des cinéastes en 1982 qui appelle le développement d'une industrie du cinéma. Cʼest aussi dans cette décennie que les cinémas d'Afrique est de plus en plus reconnu au festival de Cannes et se retrouvent ainsi face au monde.

Alors que lʼOccident réduit le cinéma africain à un genre, les cinéastes explorent la crise de lʼindividu pour se frayer un chemin entre individualisme et illusion identitaire, dans une Afrique confrontée au désenchantement après les conférences nationales Ils refusent la dénomination de « cinéastes africains » pour échapper aux projec- tions occidentales. A la fin du siècle, un nouveau cinéma voit le jour, qui prend des risques dans le fond comme dans la forme, qui pose des questions sans réponses et explore lʼhumain sans concession ("La Vie sur terre", Abderrahmane Sissako, 1998 - "Bye bye Africa", Mahamat Saleh Haroun, 1999).

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PETIT HISTORIQUE DES CINÉMAS D'AFRIQUE

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DU CORPS ET DE LA CRÉATIVITÉ AU CINÉMA

Au nouveau millénaire, les cinéastes africains opèrent ainsi un voyage dans lʼhumain. Le retour aux sources culturelles permet de mieux exprimer son temps par lʼancrage dans un dialogue lucide et égal avec le reste du monde. Les films rendent compte du nomadisme et de l'errance ("LʼAfrance",Alain Gomis, 2001), et pratiquent lʼintertextualité avec d'autres formes de cinéma ("Daratt", Mahamat S. Haroun, 2006 – "Bamako", Abderrahmane Sissako, 2006). Ils recherchent "l'espoir coûte que coûte" (Sissako) dans une relation complexe et violente avec lʼOccident.

Les années 2010 sonnent le temps de la désagrégation. Les cinémas d'Afrique représentent lʼinquiétude mais aussi la résistance face à la laideur du monde. Face au capitalisme sauvage et au règne sans pitié du profit, une Afrique en galère aspire à se définir un futur "là où elle a les pieds" ("L'Afrance") et clame la résistance ("Atlantique", Mati Diop, 2019 - "Eyimofe", Arie et Chuko Esiri, 2019).

Les cinémas dʼAfrique nous proposent aussi dʼaccepter lʼincertitude pour en faire un courage plutôt quʼune faiblesse ("Timbuktu ", Abderrahmane Sissako, 2014 - "Félicité", Alain Gomis, 2017 - "Baamun Nafi", Mamadou Dia, 2019, etc.). L'affirmation féministe explore la ruse pour déjouer la violence du patriarcat ("Sofia", Meryem BenmʼBarek, 2018 - "La Belle et la meute", Kaouther Ben Hania, "2017). La lutte contre les discriminations sexuelles progresse ("Rafiki", Wanuri Kahiu, 2018).

En réponse au souci de représenter le présent et comprendre pourquoi on en est arrivé là, la nécessité du documentaire s'impose, y compris dans la fiction. Car comme le dit Felwine Sarr, il faut : « sʼancrer dʼabord pour se faire plus ancien ». Une nouvelle conception du patrimoine.

Khadija Sy, Ndeye Aida Dia, Moka Camara et Malick Gaye

(à partir d'un exposé d'Olivier Barlet ouvrant l'atelier des Talents critiques Dakar court)

Le corps est à la fois source d'inspiration et espace d'expression, ce qui génère des tendances esthétiques et revendicatives.

Créer c'est enfanter. Dans la douleur et/ou dans la douceur, le corps est sollicité. Au cinéma, il est symbole de liberté, d'émancipation et outil esthétique. Dans le célèbre "Titanic" (James Cameron, 1997), Rose demande à Jack de la dessiner nue. Elle ouvre une relation qui transgresse la différence sociale.

Dans les films en compétition de Dakar court 2021, Frank Moka évoque dans "Home sweet Home" un corps emprisonné qui revendique sa liberté. Il refuse son confinement en ouvrant à des scènes de danses urbaines et de sport.

《 Les passions que construit l'acteur avec son corps et sa voix évoquent l'extase de la transe ou de la posses- sion.》 (Jean Duvignaud).

La passion pour la danse de Penda dans "La danse des béquilles" de Yero L. Niang esquisse le paradoxe entre le potentiel du corps handicapé et la perception qu'en a la société. Penda danse jusqu'à la transe, la force d'un corps qui se libère. Lui-même en mobilité réduite, Yero L. Niang interroge le regard de la société sur ses semblables. Le corps est dès lors outil d'émancipation. Support de la créativité, il exprime aussi le désir et l'interdit. C'est le cas dans "Sukar" d'Ilias El Faris, où une adolescente exprime rébellion, sensualité et désir interdit dans une société conservatrice.

Le corps créatif est ainsi revendication, contestation et aspirations. Au fond, que serait le cinéma sans le corps ? Ibrahima Diallo

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FILMS EN COMPÉTITION

ASTEL POUSSIÈRES DʼÉTOILES ICEBERG

ABOULA NGANDO PROJET H HOME SWEET HOME

LES ANNEES D'ILLUSIONS REINE KAYANM LE RETOUR

MTHUNZI SUKAR LA DANSE DES BÉQUILLES

MAMY TAAJABONE

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DAKAR COURT 2021 - BULLETIN N°1 - ÉDITÉ PAR CINEMAREKK / DAKAR COURT

© 2021 - Dakar Court - Tous droits réservés. Toute reproduction partielle ou intégrale des textes et/ou des documents est interdite sans lʼautorisation expresse de lʼéditeur.

LES CONTRIBUTEURS :

Ansoumana DASYLVA - Astou Ndame DIAGNE - Bamba BA - Babacar Fadéra - Awa DIOP Mamadou BA - Diawé BA - Diawé KOUATÉ - Cheikh KANE - Amadou DIA - Mbaye Laye MBENGUE

Judith EKWALLA - Babacar NDIAYE - Fatoumata TRAORÉ - Isabelle N'DIAYE - Sadany SOW Mamadou Oumar KAMARA - Marie Cathérine AMDI - Amy Andrea SENE - Babacar Sy SEYE - Ramatoulaye SY

Malick GAYE - Oussama Monique SAGNA - Khadija SY - Adama Aidara KANDÉ - Salama DIALLO Ibrahima DIALLO - Amy PAYE - Ndeye Aïda DIA - Mame Sack MARIAMA - Alain BONANG

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