Académie d’Orléans –Tours Université François-‐Rabelais
FACULTE DE MEDECINE DE TOURS
Année 2015 N°
Thèse
pour le
DOCTORAT EN MEDECINE
Diplôme d’Etat
D.E.S. de Neurochirurgie
Par
Louis-‐Marie Terrier Né le 22 Octobre 1984 à Blois
Présentée et soutenue publiquement le 19 mars 2015
HISTOIRE NATURELLE ET PRONOSTIC DES GANGLIOGLIOMES ANAPLASIQUES : UNE ETUDE RETROSPECTIVE DE 57 CAS.
Jury
Président de Jury : Monsieur le Professeur Stéphane VELUT Membres du jury : Monsieur le Professeur Patrick FRANCOIS Monsieur le Professeur Christophe DESTRIEUX
Monsieur le Docteur Luc BAUCHET
Monsieur le Docteur Ilyess ZEMMOURA
RÉSUMÉ
Histoire naturelle et pronostic des gangliogliomes anaplasiques : une étude rétrospective de 57 cas.
Introduction. Les gangliogliomes (GGGs) anaplasiques sont des tumeurs rares dont l'histoire naturelle est mal connue. Leur traitement ne fait l'objet d'aucun consensus. L'objectif de ce travail était de définir les caractéristiques cliniques et radiologiques des GGGs anaplasiques à travers une série rétrospective et d'identifier d'éventuels facteurs pronostiques.
Méthode. Entre mars 2002 et avril 2014, 57 cas de GGGs anaplasiques de l'adulte ont été recensés en France à partir du Registre national des Tumeurs Primitives du Système Nerveux Central. Les données cliniques, radiologiques et thérapeutiques ont été collectées à partir des dossiers médicaux issus de 20 centres hospitaliers différents. Les courbes de survie sans progression (SSP) et de survie globale (SG) ont été estimées. La valeur pronostique de l'âge, de la qualité de l'exérèse et du traitement complémentaire a été étudiée.
Résultats. L’âge médian au diagnostic était de 50 ans. Le premier symptôme était un déficit neurologique dans 42,1%, une crise d’épilepsie dans 35,1% et une hypertension intracrânienne dans 22,8%. L'examen radiologique montrait le plus souvent une tumeur intra-axiale unifocale avec prise de contraste intense accompagnée d’une nécrose centrale, d’un effet de masse et d’un œdème vasogénique. Cinquante et un cas étaient dits de novo, et 6 résultaient de la transformation d’un GGG de grade I. La résection de la prise de contraste était totale dans 47,1% (24/51) des cas. Un traitement adjuvant par radiochimiothérapie concomitante par temozolomide a été réalisé chez 52,6% (30/57) des patients. Une reprise évolutive a été observée chez 50/57 patients. La médiane de SSP était de 8 mois, et la médiane de SG était de 24,7 mois. L’analyse univariée a identifié l’âge et la chirurgie comme facteurs pronostiques de SG, ainsi que la transformation d'un GGG grade I en GGG anaplasique comme facteur de mauvais pronostic de SSP. Dans notre étude, aucun traitement complémentaire n’a pu être associé à une amélioration significative de la SG ou de la SSP.
Conclusion. Cette étude est la plus grande série de patients adultes traités pour un GGG anaplasique intra-cérébral. Elle apporte des données originales sur les aspects cliniques, radiologiques, thérapeutiques et pronostiques de cette pathologie rare. Etant donné l'absence de critère clinique ou radiologique permettant de distinguer un GGG anaplasique d'un gliome de haut grade, les GGG anaplasiques peuvent être pris en charge chirurgicalement comme les gliomes de haut grade, ce d'autant que la chirurgie d'exérèse complète est un facteur de bon pronostic. Néanmoins, notre étude n'a pas pu établir l'impact des traitements complémentaires sur la survie, bien que le taux de récidive soit élevé et la médiane de survie de seulement 24,7 mois.
ABSTRACT
Natural history and prognosis of anaplastic gangliogliomas: a retrospective study of 57 cases.
Introduction. Anaplastic gangliogliomas (GGGs) are rare tumors whose natural history is poorly documented. The objective of this work was to define clinical and radiological features of anaplastic GGGs through a retrospective study, and to identify potential prognostic factors.
Method. Between March 2002 and April 2014, 57 adult cases of anaplastic GGGs were reported in the French Brain Tumor database. Clinical, radiological and therapeutic data were collected from the medical records of 20 hospitals. Progression free survival (PFS) and overall survival (OS) were estimated. Different prognostic factors – age, quality of surgical excision and adjuvant treatment - were studied.
Results. The median age at diagnosis was 50 years. The first symptom was a neurological deficit in 42.1%, an epileptic seizure in 35.1% and intracranial hypertension in 22.8%. Radiological examination showed mostly an unifocal intracerebral tumor with an intense postcontrast enhancement and central necrosis, mass effect and vasogenic edema. Resection of contrast enhancement was complete in 47.1% (24/51) of cases. Adjuvant treatment with radiochemotherapy by temozolomide was performed in 52.6% (30/57) of patients. Tumor recurrence was observed in 50/57 patients. The median PFS was 8 months, and median OS was 24.7 months. Univariate analysis identified age and extent of surgery as prognostic factors of OS. A secondary anaplastic transformation of a low grade GGG was associated with a low PFS, as compared with de novo anaplastic GGG. No adjuvant treatment showed a significant improvement of OS or PFS.
Conclusion. This study is the largest series of adult patients treated for an intracerebral anaplastic GGG. It provides original data about clinical, radiological, therapeutic and prognostic features of this rare neoplasm. No clinical nor radiological feature can help differenciating anaplastic GGGs from glioblastomas. Hence, surgical management should favour complete resection when possible, as our results show a better prognostic when complete resection is performed. Our study could not establish the impact of adjuvant therapies on survival, although recurrence rate is high and median survival remains poor.
Mots clés
Gangliogliome anaplasique Tumeur glioneuronale maligne Tumeur cérébrale
Neuro-oncologie
Keywords
Anaplastic ganglioglioma Malignant glioneuronal tumor Cerebral tumor
Neuro-oncology
19 janvier 2015
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SERMENT D’HIPPOCRATE
En présence des Maîtres de cette Faculté, de mes chers condisciples
et selon la tradition d’Hippocrate,
je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité dans l’exercice de la Médecine.
Je donnerai mes soins gratuits à l’indigent,
et n’exigerai jamais un salaire au-‐‑dessus de mon travail.
Admis dans l’intérieur des maisons, mes yeux ne verront pas ce qui s’y passe, ma langue taira
les secrets qui me seront confiés et mon état ne servira pas à corrompre les mœurs ni à favoriser le crime.
Respectueux et reconnaissant envers mes Maîtres, je rendrai à leurs enfants
l’instruction que j’ai reçue de leurs pères.
Que les hommes m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses.
Que je sois couvert d’opprobre et méprisé de mes confrères
si j’y manque.
REMERCIEMENTS
Je remercie les membres du jury qui ont accepté de juger mon travail.
Au Professeur Stéphane VELUT,
Stéphane, je vous remercie pour toute la confiance que vous m’accordez depuis mes débuts en Neurochirurgie. Vous m’avez ouvert les portes du laboratoire d’Anatomie, consacré du temps pour m’enseigner l’Anatomie et me transmettre vos connaissances chirurgicales. Tout cela avec Art !!
J’espère être aujourd’hui et dans l’avenir à la hauteur de votre soutien pour lequel je suis profondément reconnaissant.
Au Professeur Patrick FRANCOIS,
Patrick, je te remercie pour toute la confiance que tu m’as accordé très tôt en Neurochirurgie, et pour tout ton soutien au quotidien. Je vis la Neurochirurgie comme une passion, et c’est un très grand plaisir d’apprendre à tes côtés. Tu me dis souvent que la chirurgie est une compétition de haut niveau, où le titre est remis en jeu à chaque intervention chirurgicale. Je me prépare mentalement et physiquement à être ce sportif !! Merci encore pour tous ces excellents moments au bloc opératoire où tu me laisses une grande liberté, avec harnais de sécurité…
Au Professeur Christophe DESTRIEUX,
Christophe, je te remercie de m’avoir encadré en Master 2 sur un sujet passionnant qu’est la tractographie cérébrale, et de m’avoir permis de rencontrer une équipe de chercheurs formidables au sein de l’équipe 5 Neuroanatomie – Neuroimagerie. J’espère poursuivre encore longtemps mes formations à l’étranger, de part l’EANS ou part d’autres opportunités !
Au Docteur Luc BAUCHET
Monsieur Bauchet, je vous remercie d’avoir accepté de juger mon travail et d’avoir fait le déplacement en Touraine. Notre étude était impossible sans votre participation, et j’en suis très honoré. J’espère que nous aurons encore de nombreuses occasions de travailler ensemble, pour que je puisse apprendre et bénéficier de votre expertise dans le domaine de la neuro-oncologie.
Au Docteur Ilyess ZEMMOURA
Ilyess, sache que c’est un véritable plaisir de travailler à tes côtés, que ce soit au niveau chirurgical ou scientifique. Je te remercie évidemment de m’avoir proposé cette grande étude et de m’avoir fait confiance pour la mener à bien jusqu’au bout. Je ne doute pas que l’on va poursuive ensemble de nombreux travaux de recherche et de nombreuses chirurgies dans les mois et années à venir et j’en suis ravi !
- 漢朝 -
Au service de Neurochirurgie adulte et pédiatrique ! Au Docteur Bruno Aesch,
Au Docteur Eric Lioret, Au Docteur Nadine Travers, Au Docteur Antoine Listrat,
Grâce à vous, ce service est une grande richesse !
A Jean-Edouard, Artiste - Chirurgien - Marchant d’Art, pour nos nombreuses passions communes…
A mes anciens et actuels co-internes, pour les milliers d’heures passées ensemble chaque année…
A Fred S.
Au Docteur Isabelle Filipiak,
Physicienne, biostatisticienne, informaticienne
Pour son aide précieuse, son enthousiasme quotidien et à sa très grande disponibilité !!
A Gerald et Jean-Paul, du laboratoire d’Anatomie, qui me facilitent grandement les choses….
A Patricia Tancray et Emmanuelle Rolland, pour leur soutien important durant mon internat.
Au personnel des blocs opératoires et du service de Neurochirurgie du CHRU de Tours.
Je remercie Agnès Caille pour ses conseils en statistiques.
- 唐 -
Je remercie toute ma famille, mes grands-parents, ma mère, mon père, mes frères MA et PH, Charlotte, Titi, pour tout leur soutien.
- 明朝 - Je remercie mes amis du Venetia,
Thomas Moulin, Christian Couasnon, Frédéric Weil, et bien sûr Pierre Papillaud ! Je remercie mes amis d’Alençon,
Stéphanie et Charles, Avalaune, Amelysse et Alexian Elodie et Julien
Céline et Max
…
Et tous mes amis de Tours, Etienne et Aurélie S, Nico, Steven et Carole, Aurélie D, Momo ;), Audrey Moutarde, Camille et Julien
…
Et bien sûr les anciens, Hugues-Marie, Jeremy, Nabil, Gugu, Farid …
- 大清 -
A mon père.
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION 13
MATERIELS ET METHODES 15
COLLECTION DES DONNEES 15
DONNEES HISTOLOGIQUES 15
ANALYSE STATISTIQUE 16
RESULTATS 17
DONNEES EPIDEMIOLOGIQUES ET CLINIQUES (FIGURE 1, TABLEAU 1) 17 DONNEES RADIOLOGIQUES (TABLEAUX 2 ET 3, FIGURES 2, 3 ET 4) 19
RESULTATS HISTOLOGIQUES 21
STRATEGIE THERAPEUTIQUE (TABLEAUX 4 ET 5) 21
EVOLUTION DE LA MALADIE (TABLEAU 6, FIGURES 5 ET 6) 23
DISCUSSION 29
DONNEES EPIDEMIOLOGIQUES ET CLINIQUES 29
CARACTERISTIQUES RADIOLOGIQUES 30
STRATEGIE THERAPEUTIQUE ET SURVIE 31
LIMITATIONS DE NOTRE ETUDE 31
CONCLUSION 33
REMERCIEMENTS 34
REFERENCES 35
INTRODUCTION
Les gangliogliomes (GGGs) sont des tumeurs cérébrales neuro-épithéliales rares, habituellement bénignes, et dont la caractéristique histologique est d'être constitués d'une double composante cellulaire, gliale et neuronale.1 Parmi les tumeurs intracrâniennes existantes, les GGGs en représentent seulement 0,4 à 1,7%.2–4 Ils sont préférentiellement diagnostiqués chez l’enfant et l’adulte jeune, avec une légère prédominance pour le sexe masculin.3,5–7 Les GGGs sont majoriatirement localisés au sein du lobe temporal,5,8–12 une région particulièrement épileptogène, ce qui explique en partie que leur présentation clinique classique soit une crise d’épilepsie inaugurale.1,8,13
Le traitement standard de ces tumeurs est la résection chirurgicale. Quand l’exérèse totale de la lésion a pu être réalisée, aucun traitement adjuvant n’est recommandé.14 En revanche, lorsque l’exérèse est sub totale, la radiothérapie peut être discutée en traitement complémentaire, puisque pour certains auteurs ce traitement adjuvant permet le contrôle local à la fois des GGGs de bas grade et de haut grade.14,15 Dans une série publiée en 2007 sur les GGGs avec exérèse incomplète ou en récidive,14 les facteurs pronostiques de mortalité retrouvés étaient l’âge élevé au diagnostic, le sexe masculin et la présence de caractéristiques gliales malignes à l’examen histologique. Cependant, le traitement adjuvant par radiothérapie et l’étendue de la résection chirurgicale n’étaient pas liés de manière significative à la survie, ni les symptômes cliniques ou la localisation tumorale.
Les GGGs anaplasiques ou de grade III selon la classification de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), qui par définition présentent des caractéristiques histologiques d'anaplasie, soit un index de prolifération cellulaire élevé, une néoangiogénèse voire des phénomènes de nécrose, sont beaucoup plus rares que les GGGs de bas grade. Leur incidence est estimée à seulement 0,02 cas/million/an.16 Leur rareté fait que la plupart des publications s’intéressant aux GGGs anaplasiques se limitent à la description de petites séries rétrospectives, voire d'un cas clinique.1,17–23 De fait, l’épidémiologie, l’histoire naturelle, les spécificités radiologiques, les facteurs pronostiques et les différentes options thérapeutiques de ces tumeurs cérébrales sont encore trop peu documentés, alors qu’il s’agit de lésions cérébrales a priori agressives, au pronostic incertain. Selon la littérature, les GGGs anaplasiques représentent entre 1% et 31% des GGGs.1,13,24,25 Les données les plus intéressantes proviennent d’une étude rétrospective récente d'une cohorte de 58 patients, composée de cas pédiatriques et adultes tous confondus. Selvanathan et al.16 identifient ainsi la chirurgie et le caractère unifocal de la lésion comme d’importants facteurs prédictifs de survie globale alors que le traitement adjuvant ne semble pas influencer le pronostic. Cependant, comme l’indiquent les auteurs, cette étude présente deux limitations majeures que sont l’absence de relecture histologique par un anatomopathologiste indépendant, et l’absence d’information sur un certain nombre de points comme la taille de la tumeur, l’étendue de la résection, les doses et le type de radiothérapie, le type de chimiothérapie utilisée. Nous
ne disposons pas non plus dans cette étude de données concernant la survie sans progression ou les traitements entrepris à la récidive.
Le travail que nous présentons est une étude rétrospective sur 12 ans, ayant nécessité la collaboration de 20 centres de Neurochirurgie français. Il s'agit de la plus grande cohorte multicentrique de patients adultes porteurs d'un GGG anaplasique. Afin d'aider à la définition d'une stratégie thérapeutique adaptée à chaque cas, nous décrivons les aspects cliniques et radiologiques des GGGs anaplasiques, les traitements adjuvants dont les patients ont bénéficié et étudions les facteurs pronostiques de cet entité rare de tumeurs cérébrales.
MATERIELS ET METHODES
Collection des données
La cohorte que nous étudions a été identifiée à partir du registre national des Tumeurs Primitives du Système Nerveux Central,26 en utilisant le code de la classification internationale des pathologies oncologiques caractérisant les GGGs anaplasiques : 9505/3. Cette base de donnée offre une collection des tumeurs cérébrales diagnostiquées dans 54 départements de Neurochirurgie et d’Anatomopathologie en France. Nous avons également en parallèle consulté, lorsque cela était possible, les données histologiques de chaque service de Neurochirurgie à la recherche de cas de GGGs anaplasiques non répertoriés dans le registre national. Nous avons restreint notre recherche aux adultes âgés d’au moins 18 ans lors du diagnostic de GGG anaplasique intracrânien (grade III de l'OMS), sur une période s’étendant de mars 2002 à avril 2014.
Seules quelques données étaient disponibles à partir du registre national, comme l’âge, le sexe, le symptôme initial ou la date du diagnostic. De nombreuses données ont ensuite été collectées dans chaque service de Neurochirurgie, où chaque dossier médical a été analysé le plus exhaustivement possible. Ainsi, nous avons pu récupérer de nombreuses données épidémiologiques, radiologiques (taille, localisation tumorale, caractéristiques iconographiques précises), anatomopathologiques (histologie, immunohistochimie, biologie moléculaire), thérapeutiques (étendue de la résection chirurgicale, traitement complémentaire adjuvant éventuel), et de suivi.
Les patients perdus de vue par les services de Neurochirurgie ou leurs proches ont été contactés par téléphone afin d’obtenir des informations sur leur état de santé : décédé, stable, sous traitement ou en rechute. En cas de décès, la cause en a été identifiée. Dans le cas où les patients ou leurs proches n'ont pas pu être contactés, les services d’état civil des mairies où étaient domiciliés les patients perdus de vue ont été contactés afin d'obtenir la date de décès.
Ainsi, nous avons pu analyser précisément les dossiers de 77 patients, dans 24 services de Neurochirurgie en France.
Données histologiques
Les dossiers anatomopathologiques ont ensuite été attentivement analysés. Nous n'avons inclus dans notre étude que les dossiers dont le diagnostic de GGG anaplasique (grade III de l'OMS) était certain. Les dossiers pour lesquels le diagnostic était incertain, ou lorsqu'il s'agissait d'une Tumeur Glio Neuronale Maligne (TGNM) dont le code de classification internationale des pathologies oncologiques est le même que celui des GGG anaplasiques, ont tous été exclus de notre cohorte, tout comme les cas de GGG de bas grade (grade I ou II de l'OMS). Nous avons alors recensé au final pour
notre étude 57 cas de GGGs anaplasiques, à partir de 20 services de Neurochirurgie en France. C’est cette population qui a été étudiée.
Analyse statistique
Les analyses statistiques ont été réalisées en utilisant le logiciel R.27 Les courbes de survie sans progression (SSP) et de survie globale (SG) ont été obtenues à partir des estimateurs de Kaplan et Meier.28 Les patients étaient censurés lorsqu'ils étaient perdus de vue, ou si l’évènement « décès » ne se produisait pas avant la fin de la période de l’étude (avril 2014). Seule la mort était considérée comme un événement pour la courbe de SG. Concernant la SSP, seule la progression à l’IRM était prise en compte. Le test de Mantel-Cox log-rank29 a été utilisé pour déterminer des différences dans les courbes de survie. L’analyse univariée a été utilisée pour déterminer les hazard ratios (HR) et leurs intervalles de confiances à 95% (IC).
Les valeurs pronostiques de l'âge, de la qualité de l'exérèse et du traitement complémentaire ont pu être étudiées. Toutes nos données et analyses ont été relues et validées par un biostatisticien en santé publique.
RESULTATS
Du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2012, 93 patients ont été enregistrés dans le Registre national des Tumeurs Primitives du Système Nerveux Central avec le code 9505/3. Nous avons également retrouvé, lors de notre collecte de données au sein des services de Neurochirurgie, 12 patients présentant un GGG anaplasique diagnostiqué entre mars 2002 et avril 2014, et qui n'avaient pas été recensés dans le registre national.
Au total, nous avons recensé 105 cas potentiels dans 26 centres de Neurochirurgie français différents (Angers, Besançon, Bordeaux, Brest, Caen, Clermont-Ferrand, Dijon, Lyon, Marseille- Nord, Marseille-Timone, Nantes, Nice, Orléans, Paris-Beaujon, Paris-Lariboisière, Paris-Necker, Paris-Fondation Rothschild, Paris-Sainte-Anne, Paris-Pitié Salpêtrière, Poitiers, Rennes, Réunion, Strasbourg, Toulouse, Toulouse-Clinique des Cèdres, Tours).
Dix dossiers n’ont pu être consultés. Nous avons exclus de la cohorte 18 patients dont l’âge au diagnostic était inférieur à 18 ans. Tous les autres dossiers, soit 77 cas au total, ont été consultés attentivement sur place. Nous avons ensuite exclus les dossiers dont le diagnostic de GGG anaplasique était incertain (14 TGNM), ainsi que les dossiers dont le diagnostic anatomopathologique recensé dans le registre national ne correspondait en fait pas à un GGG anaplasique (Oligodendrogliome de bas grade (1 cas), Tumeurs Neuro Ectodermiques Primitives ou PNET (2 cas), Neurocytome (1 cas), Pinéalocytome (1 cas)). Nous avons également exclu 1 cas de GGG anaplasique médullaire.
Au total nous avons recensé 57 cas de GGGs anaplasiques, à partir de 20 centres de Neurochirurgie en France.
Données épidémiologiques et cliniques (Figure 1, Tableau 1)
Cinquante-sept patients avec le diagnostic de GGG anaplasique ont été recensés entre mars 2002 et avril 2014. Il s'agissait de 33 hommes (57,9%) et 24 femmes (42,1%) dont l’âge moyen au diagnostic était de 49,5 ans (min 22 ans – max 76 ans), et l’âge médian de 50 ans. L’âge moyen au diagnostic, dans la cohorte pédiatrique, à partir du registre national des tumeurs, était de 10,7 ans (min 1 an – max 17 ans). L’âge moyen au diagnostic, tous patients confondus, était de 40,2 ans.
Nous avons retrouvé, pour 3 patients, un antécédent de radiothérapie cérébrale dans l’enfance.
Deux patients avaient été traités pour un gliome des voies optiques, et un patient pour angiome cérébral.
Figure 1 -‐ Histogramme des âges (N=57). L’âge médian est de 50 ans. On distingue deux pics de fréquence, l’un à 35 ans, l’autre à 60 ans.
Tableau 1 – Caractéristiques épidémiologiques
Age (années) Nombre de
cas
18-29 5 (8,8%)
30-39 14 (24,6%)
40-49 9 (15,8%)
50-59 10 (17,5%)
60-69 14 (24,5%)
>69 5 (8,8%)
Sexe
Homme 33 (57,9%)
Femme 24 (42,1%)
Premier symptôme
Epilepsie 20 (35,1%)
HTIC 13 (22,8%)
Déficit 24 (42,1%)
Présence épilepsie 25 (43,9%)
Présence HTIC 17 (29,8%)
Délai diagnostic Mois
Moyenne 4,7
Minimum 0,1
Maximum 81
La majorité des cas (51/57 patients) étaient des GGGs anaplasiques « de novo ». Six cas étaient issus de la transformation d’un GGG de grade I en grade III, avec un délai moyen de transformation très variable allant de 5 mois à 13 ans (moyenne de 4,8 ans). Le délai moyen entre premier symptôme et diagnostic était de 4,7 mois (min 1 semaine – max 81 mois). Le symptôme initial était un déficit neurologique dans 42,1% des cas, une crise d’épilepsie dans 35,1% des cas, et une
Données radiologiques (Tableaux 2 et 3, Figures 2, 3 et 4)
La localisation des GGGs anaplasiques était intra-parenchymateuse temporale dans 35,1% des cas, frontale dans 29,8%, et pariétale dans 15,8%. Les localisations au sein de la fosse cérébrale postérieure étaient rares (7%). Les GGGs anaplasiques des noyaux gris centraux (5,2%), de la glande pinéale (3,5%), du lobe occipital (1,8%), ou du corps calleux (1,8%) étaient exceptionnels.
Typiquement, les GGGs anaplasiques étaient des tumeurs unifocales (94,3%), de grande taille avec une intense prise de contraste annulaire avec nécrose centrale (47,9%) ou nodulaire (39,6%).
L’effet de masse était fréquent (58%), tout comme l’œdème vasogénique peri-tumoral. Un saignement spontané tumoral était rare (16,3%). Une portion kystique était retrouvée dans 36,8% des cas. Le diamètre moyen de la prise de contraste était de 45,9 mm (min 12mm – max 100mm) ; celui de l’hypersignal FLAIR était de 67,4 mm (min 20mm – max 105mm).
Figure 2. IRM cérébrale d'un Gangliogliome anaplasique temporo-insulaire droit.
A et C. Coupes axiales pondérées en FLAIR montrant une volumineuse lésion en isosignal accompagnée d'un œdème vasogénique. B et D. Coupes axiales pondérées en T1 avec injection de gadolinium montrant une prise de contraste hétérogène et une composante kystique.
Figure 3. IRM cérébrale d'un gangliogliome anaplasique temporal droit accompagné d'un œdème vasogénique réactionnel important. A. Coupe axiale pondérée en T1 avec injection de produit de contraste. B. Coupe axiale pondérée en T2.
Figure 4. IRM cérébrale d'un gangliogliome anaplasique fronto-insulaire droit avec kyste tumoral et effet de masse sur la ligne médiane. A. B. C. D. Coupes axiales pondérées en T1 avec injection de gadolinium.
Résultats histologiques
Les prélèvements anatomopathologiques étaient obtenus par exérèse pour 54 patients (94,7%), et par biopsie pour 3 patients (5,3%). Les GGGs anaplasiques étaient caractérisés par une prolifération microvasculaire, et par la présence de nécrose. L’indice de prolifération MiB1, caractéristique de l’activité mitotique, était augmenté dans tous les cas.
Stratégie thérapeutique (Tableaux 4 et 5)
Nous avons trouvé une information sur l'extension de l’exérèse pour 51 des 54 patients ayant bénéficié d'une chirurgie d'exérèse. Parmi ces 51 patients, une imagerie post-opératoire précoce par TDM (2/51) ou IRM (39/51) n'a été réalisée que pour 41 d'entre-eux. Une résection totale de la prise Tableau 2. Caractéristiques radiologiques
Diamètre moyen (mm)
(mm) Prise de contraste 45,9
FLAIR 67,4
Prise de contraste (pdc) N (%)
Oui 52 (98,1)
Non 1 (1,9)
NR 4
Focalité
Unifocale 50 (94,3)
Plurifocale 3 (5,7)
NR 4
Caractéristiques pdc
Peu intense 6 (12,5)
Nodulaire 19 (39,6)
Annulaire avec nécrose 23 (47,9)
NR 8
Kystique
Oui 14 (36,8)
Non 24 (63,2)
NR 19
Saignement spontané
Oui 8 (16,3)
Non 41 (83,7)
NR 8
Effet de masse
Oui 29 (58)
Non 21 (42)
NR 7
Tableau 3. Localisations radiologiques
Localisation anatomique N (%)
Frontale 17 (29,8)
Temporale 20 (35,1)
Pariétale 9 (15,8)
Occipitale 1 (1,8)
Noyaux gris centraux 3 (5,2)
Epiphyse 2 (3,5)
Fosse postérieure 4 (7)
ss Corps calleux (splenium) 1 (1,8)
Profondeur tumorale
Profond 27 (62,8)
Superficiel 16 (37,2)
NR 14
de contraste a été réalisée chez 24/51 patients (47,1%). L’exérèse totale de l’hypersignal FLAIR n’a été réalisée que pour 1/39 patient. Un patient a bénéficié lors de la chirurgie de la pose d’une chimiothérapie locale (Gliadel®). Huit complications post-opératoires ont été constatées, parmi lesquels 2 œdèmes cérébraux entrainant un retard de réveil, 2 infections pulmonaires, un écoulement cicatriciel, un hématome intracrânien, et une aggravation permanente d’un déficit neurologique.
Une radiochimiothérapie concomitante adjuvante par temozolomide selon le schéma de Stupp30 a été réalisée chez 30 patients. Une radiothérapie encéphalique seule (dont une irradiation par gamma knife) a été proposée pour 16 patients, et une chimiothérapie seule pour 6 patients. Une radiochimiothérapie concomitante sans temozolomide a été réalisée chez 2 patients. Le protocole de radiothérapie était dans tous les cas une irradiation encéphalique de 60 grays fractionnée en 30 séances (sauf pour le cas de gamma knife). Le délai moyen entre chirurgie et début de la radiothérapie était de 6 semaines. Enfin, trois patients n'ont pas eu de traitement complémentaire : un patient a bénéficié d’une surveillance ; et une abstention thérapeutique a été décidée pour les deux autres patients en raison de leur l’âge (76 ans).
Tableau 4 - Traitement initial
Chirurgie N (%)
Oui 54 (94,7)
Non (biopsie) 3 (5,3)
Résection de la prise de contraste
Totale 24 (47,1)
Partielle 27 (52,9)
NR 6
Résection FLAIR
Total 1 (2)
Partielle 50 (98)
NR 6
Traitement complémentaire
Soins palliatif 2
Surveillance 1
Radiochimiotherapie non temozolomide
2
Radiothérapie seule 15
Gamma knife 1
Chimiothérapie seule 6 Radiochimiothérapie (Stupp) 30
Tableau 5 - Traitement de la récidive (50 patients)
Non renseigné 9
Abstention thérapeutique 11 Poursuite du temozolomide 2 Radiochimiothérapie (Stupp) 2
Gamma knife 1
Chirurgie seule 1
Chirurgie + Gliadel® 2
Chirurgie + chimiothérapie 7 Chirurgie + radiothérapie 1 2de ligne de chimiothérapie 10 Radiothérapie (dont 3 poursuites) 4
Une récidive ou progression tumorale a été observée chez 50/57 patients. Le délai moyen entre diagnostic et progression était de 11,1 mois (min 1 mois – max 43 mois). Il s'agissait d'une progression locale pour 36 des 39 patients (92,3%) dont l’IRM à la progression était disponible. Une métastase intracrânienne a été observée chez 2 patients, et une métastase médullaire chez 1 patient. Nous avons trouvé des informations sur un éventuel traitement complémentaire pour 41/50 patients en récidive. La conduite adoptée a été soit une seconde chirurgie (11/50), soit une seconde ligne de chimiothérapie (10/50) (2 Procarbazine-CCNU-Vincristine, 4 Irinotécan-Bévacizumab, 3 Temozolomide, 1 Fotémustine), soit une radiothérapie (1/50), soit une abstention thérapeutique (11/50). Deux patients se sont vus proposer une poursuite de la chimiothérapie par temozolomide, 4 autres patients une poursuite de la radiothérapie et 2 autres patients une radiochimiothérapie selon le protocole Stupp.
(Tableau 5).
Evolution de la maladie (Tableau 6, Figures 5 et 6)
Nous avons recueilli pour 39 patients le performans status selon la classification de l'OMS lors du diagnostic, en post-opératoire immédiat (<15 jours), et en fin de traitement complémentaire.
Entre les premiers symptômes de la maladie et la période post-opératoire, le score OMS était stable dans la majorité des cas (64,1%). On notait une amélioration dans 15,4% des cas, et une aggravation dans 20,5% des cas (Tableau 5).
La médiane de survie était de 24,7 mois (min 1,4 mois – max 47 mois). En fin d’étude, 36 patients étaient décédés, tous de l’évolution de la maladie. Trois patients étaient perdus de vue, après un suivi moyen de 21,89 mois. Dix-huits patients étaient toujours en vie, après un suivi moyen de 42,35 mois (Figure 5). Parmi les survivants, 11 étaient en récidive et 7 sans signe de progression. Au total, 50/57 patients ont connu une progression de la maladie, avec une médiane de survie sans progression de 8 mois (Figure 6).
Dans notre étude, le taux de survie à 5 ans était de 23,7%.
Tableau 6 - Histoire de la maladie
Evolution du score OMS à partir du suivi de 39 patients / 57 Statut clinique post chirurgie
Stable 25
Amélioration 6
Aggravation 8
Statut clinique post traitement complémentaire
Stable 26
Amélioration 3
Aggravation 10
Figure 5. Courbe de survie globale
Figure 6. Courbe de survie sans progression
Analyse statistique (Tableaux 7 et 8, Figures 7, 8 et 9)
L’analyse univariée a identifié l’âge et la chirurgie comme facteurs pronostiques indépendants de survie globale (p<0,05). La classe d’âge supérieure ou égale à 50 ans avait une survie globale moindre. La résection chirurgicale complète de la prise de contraste était associée à un meilleur pronostic en terme de survie globale.
Un autre facteur pronostique semble également associé à la survie, sans qu'il ait toutefois atteint le seuil de significativité : un passage de la ligne médiane de l’hypersignal FLAIR à l’IRM (p=0,06) est en effet associé à un mauvais pronostic en terme de survie globale.
Tableau 7 – Survie globale - Analyse univariée (*significatif, p<0,05)
Variable Hazard ratio Intervalle de
confiance Valeur de p
Genre Homme 0,95 0,48 – 1,85 0,87
Femme 1# - -
Classe d’âge < 50 ans 1# - -
≥ 50 ans 1,96 1,01 – 3,81 0,046 *
Localisation Frontale 1,05 0,29 – 3,81 0,93
Temporale 0,68 0,19 – 2,46 0,56
Pariétale 0,51 0,1 – 2,3 0,39
Noyaux gris 0,39 0,04 – 3,73 0,41
Occipitale 0,76 0,07 – 7,45 0,81
Epiphyse 0,68 0,07 – 6,56 0,74
Corps calleux 2,55 0,26 – 25,3 0,42
Fosse postérieure 1# - -
Effet de masse Oui 1# - 0,33
Non 0,71 0,36 – 1,42 -
Passage ligne médiane FLAIR
Oui 2,38 0,46 – 1,87 0,06
Non 1# - -
Localisation en
profondeur Profond 1,21 0,5 – 2,84 0,66
Superficiel 1# - -
Exérèse chirurgicale Partielle 1# - -
Complète 0,49 0,24 - 1 0,05 *
Traitement par Stupp Oui 1,12 0,58 – 2,15 0,74
Non 1# - -
Radiothérapie - 1ère ligne Oui 0,61 0,26 – 1,43 0,25
Non 1# - -
Uni/plurifocal unifocal 0,91 0,22 – 3,83 0,9
plurifocal 1# - -
Antécédent GGG I Oui 0,94 0,28 – 3,1 0,91
Non 1# - -
# La référence du test de Log-Rank a un Hazard Ratio de 1.
* Statistiquement significatif
Tableau 8– Survie sans progression- Analyse univariée (*significatif, p<0,05)
Variable Hazard
ratio
Intervalle de
confiance Valeur de p
Genre Homme 0,85 0,45 – 1,58 0,59
Femme 1# - -
Classe d’âge < 50 ans 0,92 0,5-1,72 0,8
≥ 50 ans 1# - -
Localisation Frontale 0,48 0,13 – 1,77 0,27
Temporale 0,19 0,05 – 0,7 0,013*
Pariétale 0,92 0,24 – 3,63 0,91
Noyaux gris 0,20 0,03 – 1,29 0,09
Occipitale 0,51 0,05 – 4,92 0,56
Epiphyse 0,34 0,05 – 2,1 0,24
Corps calleux NA NA NA
Fosse
postérieure 1# - -
Effet de masse Oui 1,05 0,55 – 2,01 0,88
Non 1# - -
Passage ligne médiane FLAIR
Oui 1,75 0,66 – 4,62 0,25
Non 1# - -
Localisation en
profondeur Profond 1,30 0,64 – 2,65 0,47
Superficiel 1# - -
Exérèse chirurgicale Partielle 1# - -
Complète 0,96 0,5 – 1,88 0,92
Traitement par Stupp Oui 0,89 0,48 – 1,67 0,73
Non 1# - -
Uni/plurifocale Unifocale 0,43 0,1 – 1,82 0,23
Plurifocale 1# - -
Antécédent GGGI Oui 4,05 0,93 – 17,62 0,043*
Non 1# - -
# La référence du test de Log-Rank a un Hazard Ratio de 1.
* Statistiquement significatif
Si la chirurgie avec exérèse complète était associée à une meilleure survie, aucun traitement complémentaire n’a été identifié comme facteur pronostic sur la survie globale, ni sur la survie sans progression. Par ailleurs, une localisation temporale a été identifiée comme étant un facteur
Figure 7. Courbe de survie globale. Exérèse partielle/ Exérèse totale.
Figure 8. Courbe de survie globale. Population < 50 ans / ≥ 50 ans
Figure 9. Courbe de survie globale. Passage de la ligne médiane à l’IRM de l’hypersignal FLAIR.
Figure 10. Survie globale selon le score OMS initial
Figure 11. Survie sans progression selon qu'il s'agissait d'un GGG grade III de novo ou secondaire à un grade I
Le performans status OMS au diagnostic n’était pas associé significativement à la survie globale. Le diagnostic de GGG anaplasique de novo était lui associé à une survie sans progression meilleure que lorsque le diagnostic de GGG anaplasique était secondaire à l’évolution d’un GGG de bas grade.
DISCUSSION
Notre étude, constituée à partir d’une série de 57 cas, est la première à apporter une analyse précise concernant les données épidémiologiques, cliniques, radiologiques et thérapeutiques des GGGs anaplasiques.
Le registre national des Tumeurs Primitives du Système Nerveux Central,26 outil développé pour recenser les cas de tumeurs cérébrales sur l'ensemble du territoire national, permet entre autre ce type d'étude portant sur des types rares de néoplasies primitives du système nerveux central. C’est ainsi que nous avons pu obtenir la plus large série de patients adultes atteints d'un GGG anaplasique.
La littérature actuelle concernant les GGGs anaplasiques, hormis une série16 dont le nombre de cas était proche du nôtre, et qui apportait des informations sur la survie globale et les facteurs pronostiques des GGGs anaplasiques, est limitée à quelques petites séries ou cas cliniques.1,13,17,20–23,25 Néanmoins, dans leur étude, Selvanathan et al.16 ont inclus sans distinction les cas pédiatriques et adultes, et n'ont pas apporté de précisions quant aux données cliniques, radiologiques ou thérapeutiques. Les dossiers n’avaient pas non plus été relus ni analysés en détail, puisque l’étude se basait uniquement sur les données qu’avaient fournies chaque centre au Surveillance, Epidemiology, and End Results (SEER), une base de données tenue par le US National Cancer Institute.
Notre travail a donc l'avantage de présenter une cohorte homogène de patients adultes atteints de GGGs anaplasiques, dont les données cliniques, radiologiques et thérapeutiques ont été collectées et relues indépendamment puis analysées.
Données épidémiologiques et cliniques
Dans notre étude, l’âge moyen au diagnostic de GGG anaplasique était de 49,5 ans (et 40,2 ans en incluant les cas pédiatriques), ce qui est plus élevé que l’âge précédemment rapporté dans la littérature de 25,5 ans (cas pédiatriques inclus).16 Ceci peut s’expliquer par la difficulté à établir le diagnostic histologique de GGG anaplasique, qui peut être à l'origine d'une sous-estimation du diagnostic, par exemple du fait de la présence majoritaire d'une composante gliale de haut grade qui peut faire classer la tumeur parmi les glioblastomes. Une autre explication possible est l'imperfection du système de classement qui ne permet pas de différencier les GGGs anaplasiques des autres TGNM (Tumeur Glio Neuronale Maligne). Enfin, une troisième cause possible est le risque d'erreur inhérent au système des registres, qui peut être à l'origine d'une erreur "humaine" de classement, le recensement dépendant en grande partie de l'absence d'erreur lors du remplissage du formulaire de recensement. En effet, après analyse des dossiers et lecture des comptes-rendus anatomopathologiques, nous avons exclu 20 des 77 cas de GGGs anaplasiques répertoriés, en raison soit d’un mauvais diagnostic histologique, soit d’une localisation autre qu’intracrânienne, soit d’une classification histologique trop
large (TGNM), ne permettant pas de conclure avec certitude à un GGG anaplasique. Toujours est-il que, en comparaison aux GGGs de bas grade qui apparaissent avant l’âge de 30 ans dans 80% des cas et dont l’âge moyen au diagnostic est de 25,6 ans,1,5,7,8,13,25,31 les GGGs anaplasiques surviennent à un âge plus avancé. Cependant, le pic de fréquence est tout de même plus précoce que celui des glioblastomes, dont l'âge médian est de 63,9 ans.32
Une discrète prédominance masculine (57,9%) a été retrouvée dans notre étude, ce qui est en accord avec les séries publiées sur les GGGs dans la littérature. Cette prédominance masculine peut en effet atteindre jusqu’à 80 % des cas,1,16,22 et se vérifie également pour la population pédiatrique des GGGs.33
Dans notre série, le symptôme révélateur le plus fréquent était un déficit neurologique focal – 42,1 % des cas – alors que les GGGs de bas grade sont majoritairement révélés par une épilepsie – 70 à 95% des cas.8,22,25,34 Cette différence de présentation clinique entre GGGs de bas grade et GGGs de haut grade peut être comparée à celle observée entre gliomes diffus de bas grade – crises d’épilepsie comme premier symptôme dans 70 à 90% des cas35,36 – et gliomes de haut grade – crises d’épilepsie comme premier symptôme dans 18 à 52 % des cas.37,38 En effet, comme pour les gliomes de haut grade, la plupart des GGGs anaplasiques induisent un oedème vasogénique et une croissance probablement trop rapide pour que les phénomènes entrainant la désorganisation corticale à l'origine d'une épilepsie aient le temps de se mettre en place. Ainsi, l'effet de masse prendrait donc le dessus sur l'irritation corticale, et expliquerait la prédominance du déficit neurologique comme premier symptôme des GGGs anaplasiques.
Caractéristiques radiologiques
Nos résultats concernant la localisation des GGGs anaplasiques (prédominance frontale et temporale) sont en accord avec les données précédemment publiées dans la littérature.1,8,16,33 La sémiologie radiologique en TDM ou en IRM n'avait pas de caractéristique spécifique en comparaison à celle des glioblastomes, qui représentent finalement le diagnostic différentiel le plus difficile. La prise de contraste était présente dans 98,1% des cas de GGGs anaplasiques de notre série. La prise de contraste, qui est donc un élément de sémiologie radiologique majeur dans la distinction entre gliome diffus de bas grade (prise de contraste présente dans seulement environ 16% des cas)39 et gliomes de haut grade, ne peut donc être considérée comme une aide au diagnostic de GGG anaplasique puisqu'une prise de contraste est décrite dans 88 à 100% des cas de GGG de bas grade.8,25 De même, la présence de kystes n'est pas aussi caractéristique des GGGs anaplasiques – puisqu'ils n'ont été retrouvé que dans 36,8 % des cas dans notre série – que des GGGs de bas grade dans lesquels ils peuvent être observés dans 60 à 81% des cas.8,25