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Présentation du dossier documentaire et des activités

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Faculté SECG

Département des Sciences Économiques L2 Économie (2020-2021) Section A, B et C

TRAVAUX DIRIGÉS (TD)

" Économie Algérienne"

Dossier : La Stratégie Algérienne de Développement (SAD) : Des choix théoriques de la planification… aux conditions effectives de réalisation.

Source : Simon Pierre THIERY (2012) : « 1962-1980 : Fort développement du secteur public productif et crise des formes de régulation. ». Communication présentée lors du Colloque International organisé par le CREAD sur le thème « Algérie, cinquante ans d'expérience de développement : État - Économie - Société. »,

Sidi Fredj, les 8 et 9 décembre 2012. Disponible in :

http://www.cread.dz/images/Cinquante%20ans/Communication_2012/THIERY.pdf

Présentation du dossier documentaire et des activités

Ce dossier est le texte d’une communication de Simon Pierre THIERY, présentée lors du colloque organisé par le Centre de Recherche et d’Étude en Économie Appliquée pour le Développement (CREAD) en 2012 à l'occasion du 50ème anniversaire de l'indépendance, sous le thème « Algérie, cinquante ans d'expérience de développement : État - Économie - Société. »

ACTIVITÉ 1 (semaine 2, du 21/02 au 25/02/2021) :

Il est demandé à chaque étudiant de rédiger un compte-rendu objectif (sous forme de fiche de lecture) en répondant aux questions suivantes (voir la Note méthodologique n° 1).

1) Quelles sont, selon l’auteur, les principales caractéristiques du système productif algérien à la veille de l’indépendance ?

2) L’auteur déclare ne pas partager les conclusions de la plupart des analyses académiques traitant de la période 1962-80. Après avoir rappelé l’"erreur commune" reprochée à tous ces travaux, vous direz quelles sont les principales « idées-fausses » caractérisant la pensée dominante sur cette période de l’Histoire économique de l’Algérie. Vous préciserez aussi les objections qu’oppose l’auteur à chacune de ces idées-fausses.

3) L’auteur parle de « crise des formes de régulation » pour expliquer l’échec apparent de la SAD à la fin des années 1970. Que recouvre exactement ce concept ?

ACTIVITÉ 2 (semaine 3, du 28/02 au 04/03/2021) :

Il est demandé à chaque étudiant de rédiger une introduction à sa dissertation.

Il s’agira en fait d’une dissertation s’appuyant essentiellement de ce dossier documentaire. Vous êtes toutefois également invités à exploiter vos notes de cours, ainsi que le polycopié du cours.

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Université Abderrahmane MIRA de Béjaïa Faculté SECG

Département des Sciences Économiques

ÉCONOMIE ALGÉRIENNE L2 Économie (2020-2021)

Section A, B et C

Le sujet à traiter dans cette dissertation (objet des activités 2 et 3) étant :

Quelles sont les grandes orientations de la Stratégie Algérienne de Développement (SAD) entamée à partir de 1967. Quel bilan (réussites et échecs) peut-on en tirer à la fin des années 1970 ?

ACTIVITÉ 3 (semaine 3, le jeudi 04/03/2021) : REMISE DE LA DISSERTATION

• En vous appuyant sur le présent dossier documentaire, exprimez de façon claire et cohérente une argumentation ordonnée en réponse au sujet de dissertation ci-dessus.

• Vous avez bien sûr la possibilité d’élargir ce corpus documentaire à d’autres ressources jugées pertinentes pour le traitement du sujet (notamment les notes de cours et le polycopié).

• Votre réponse doit être rédigée sous forme de dissertation, qui comportera une introduction, un développement équilibré et une conclusion (voir la Note méthodologique n° 2 et le Barème d’évaluation de la dissertation).

• Ce travail comptera pour 12 points dans la note finale du contrôle continu (TD).

• Il s'agit d'un travail strictement personnel. Aussi, deux (2) copies présentant une concordance à plus de 50% seront systématiquement éliminées.

Votre copie doit être rédigée sous forme manuscrite sur une double-feuille registre A4.

• Le dernier délai pour remettre vos copies de dissertation est fixé pour le Jeudi 4 mars 2021.

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1962-1980 : FORT DEVELOPPEMENT DU SECTEUR PUBLIC PRODUCTIF ET CRISE DES FORMES DE REGULATION

Simon PierreTHIERY*

RESUME

Jusqu’en 1962, le système productif algérien a été structuré en fonction des intérêts de la puissance coloniale: extraction des matières premières exportées à l’état brut sans valorisation locale, production agricole en grande partie destinée à l’exportation. Mais aussi forte dépendance aux importations en provenance de la métropole pour la plupart des produis industriels. Enfin faible taux de scolarisation de la population algérienne, concentration des infrastructures sur la zone côtière au détriment de l’intérieur du pays, fort taux de chômage, et discrimination salariale et politique au détriment de la population algérienne. L’évolution du système productif algérien durant les vingt années qui ont suivi immédiatement l’indépendance du pays a-t-elle permis une rupture par rapport à ces tendances ?

Les travaux de recherche disponibles sur la période 1962-1980 sont généralement fondés sur une critique théorique des choix de planification supposés avoir privilégié une industrie lourde surdimensionnée, localisée sur la bande côtière et tournée vers l’exportation, au détriment de tous les autres secteurs : les effets sur l’emploi et les revenus auraient été négligeables.

L’auteur ne partage pas ces analyses qui lui semblent reposer sur une lecture trop sommaire ne rendant pas véritablement compte des réalités économiques et sociales de cette période. Ses analyses s’appuient tant sur son expérience professionnelle au sein de grandes entreprises industrielles algériennes que sur des travaux de recherche menés en collaboration avec le CREA d’Alger et l’IREP de Grenoble, ayant débouché sur un doctorat de Sciences Economiques.

Pour clarifier la question posée, l’auteur commence par une analyse systématique des choix politiques caractérisant les trois premiers plans de développement et des résultats économiques effectifs obtenus entre 1962 et 1980. Ceci ne le conduit pas a mettre principalement en cause les choix théoriques de la planification algérienne: à ses yeux, c’est plutôt la nature des luttes politiques et sociales qui a conditionné les réalisations effectives et qui explique les résultats contrastés des différents secteurs en fin de période.

Après avoir réfuté quelques idées fausses qui caractérisent la pensée dominante relative à cette période, il s’attache à décrire la progression considérable du système d’éducation ainsi que le développement important des différents secteurs productifs (agriculture, hydraulique, industrie lourde, industrie légère, habitat, infrastructures). Il lui semble que les choix politiques de planification ont accordé des moyens importants à tous ces secteurs, qu’ils ont permis de réorienter le développement géographique des activités au profit des régions de l’intérieur, avec des effets importants sur l’évolution de l’emploi et des revenus .Il note également que la plupart des secteurs (hydrocarbures exceptés) se sont développés principalement en direction du marché intérieur, mais que la priorité donnée à l’investissement productif public sans réflexion suffisante sur l’articulation secteur public/secteur privé s’est traduite par une sous-estimation grave du rôle des circuits de commercialisation et des services dans l’efficacité globale du système. Les progrès de l’appareil d’éducation ont été plus quantitatifs que qualitatifs. Par ailleurs, les options affichées étaient censées privilégier des formes d’organisation sociale susceptibles de donner du poids aux représentants des travailleurs (GSE dans l’industrie, autogestion puis système coopératif dans l’agriculture) : dans les faits, après un débat très ouvert autour du projet de charte nationale, les décisions ont finalement privilégié un frontisme accordant peu de place

*Docteur en sciences économiques - Simon-pierre.thiery530@orange.fr

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1962-1980 : fort développement du secteur public productif et crise des formes de régulation 2

aux forces qui auraient pu aider à une meilleure régulation de l’économie et peu de pouvoir aux institutions régionales et locales.

De ce fait, les conditions effectives de réalisation par secteur ont été très contrastées, créant par là même des déséquilibres importants entre secteurs, à une époque où la croissance de la demande intérieure était fortement stimulée par une démographie dynamique et par le développement positif de l’emploi. L’emploi et les revenus ont en effet connu une croissance importante, mais le progrès des conditions de vie de la population, particulièrement en matière de logement et de transport, n’a pas été au niveau des attentes.

Ceci l’amène à analyser les relations qui se sont instaurées entre les différentes forces sociales à l’intérieur de chaque secteur, et entre ceux-ci : technocratie moderniste, masses paysannes, appareil syndical et élus de la G.S.E, bureaucratie centrale et locale, hauts fonctionnaires, tendances et partage du pouvoir au sein de l’armée et du Conseil de la Révolution. Selon lui, ces relations auraient provoqué une forte segmentation des modes de gestion économique, sans contre pouvoir véritable par rapport au comportement des fractions politiques se partageant le contrôle des différents segments de l’appareil productif.

Cela le conduit à parler, pour le bilan de cette période 1962-1980, d’une crise des formes de régulation, résultant principalement des limites d’un modèle politique frontiste autoritaire mais segmenté, efficace lors de la lutte de libération contre le régime colonial, mais progressivement dépassé car ne répondant plus aux exigences d’une économie en fort développement ni aux attentes d’une population jeune, le plus souvent compétente, aspirant à d’autres modes de gestion de l’économie et de la société.

Les autres contributions à ce colloque, portant sur la période 1980/ 2012, permettront peut être de savoir si cette crise a perduré durant les années suivantes et d’éclairer les formes possibles d’une sortie de crise dans l’avenir.

BIOGRAPHIE DE L’AUTEUR

Simon Pierre Thiery est né à Aïn-Kerma en 1942.

Il a fait ses études primaires et secondaires au lycée d’Aumale de Constantine.

Ingénieur INPG, diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris et Docteur es- sciences économiques, il a occupé des postes de responsabilité dans deux grandes entreprises industrielles algériennes entre 1966 et 1981. A la SONELGAZ d’abord (dirigée à l’époque par Abdennour Keramane), puis au sein de la SNS (présidée par Lakhdar Bentobal et dirigée par Mohamed Liassine).

Il a été également chargé de cours à la Faculté de Droit et de Sciences Economique d’Alger durant cette période.

Par la suite, il a été en France chef du service industriel au Commissariat Général du Plan, Directeur Général Adjoint de l’ANPE, puis Directeur des Implantations Industrielles et enfin Président de filiales Transport Electrique d’Electricité de France.

Jusqu’en 1962, le système productif algérien a été structuré en fonction des intérêts de la puissance coloniale : extractions des matières premières exportées à l’état brut sans valorisation locale, production agricole en grande partie destinée à l’exportation. Mais aussi forte dépendance aux importations en provenance de la métropole pour la plupart des produis industriels. Enfin faible taux de scolarisation de la population algérienne, concentration des infrastructures sur la zone côtière au détriment de l’intérieur du pays. L’évolution du système productif algérien durant les vingt années qui ont suivi immédiatement l’indépendance du pays a-t-elle permis une rupture par rapport à ces tendances ?

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Cette question a fait l’objet de quelques études universitaires, généralement fondées sur une critique théorique des choix de planification supposés avoir privilégié une industrie lourde surdimensionnée au détriment de tous les autres secteurs.

Ces analyses, souvent un peu technicistes et appuyées sur des données assez sommaires, ne rendent pas véritablement compte des réalités économiques : elles évitent par ailleurs souvent de parler des luttes politiques et sociales qui ont marqué la société algérienne durant cette période.

Après avoir réfuté quelques idées fausses qui caractérisent parfois ces analyses, je m’attacherai à décrire les relations entre les différentes forces politiques et sociales qui se sont partagé le contrôle des différents secteurs du pays. Ces relations ont provoqué une segmentation des modes de gestion économiques par secteur, sans contre pouvoir véritable : elles expliquent sans doute encore aujourd’hui en partie la crise du système productif algérien.

Cela me conduira à parler d’une crise des formes de régulation, résultant principalement des limites d’un modèle politique frontiste autoritaire, efficace lors de la lutte de libération contre le régime colonial, mais progressivement dépassé car ne répondant plus aux attentes d’une population jeune, le plus souvent compétente, aspirant aujourd’hui à d’autres modes de gestion de l’économie et de la société.

1- QUELQUES IDEES FAUSSES CONCERNANT LE DEVELOPPEMENT DU SYSTEME PRODUCTIF ALGERIEN ENTRE 1962 ET 1980

1-1- Bien souvent,chez certains universitaires, français notamment, l’évolution économique de l’Algérie après l’indépendance est présentée comme résultant d’un choix stratégique fondé sur le développement excessif de l’industrie lourde au détriment de tous les autres secteurs.

L’éducation, l’agriculture, l’hydraulique, les transports, le BTP, les industries légères et les services auraient été délaissés et privés de crédits pour leur développement. L’agriculture aurait régressé par rapport à la période coloniale, et l’emploi comme le pouvoir d’achat des ménages n’aurait pas fondamentalement évolué durant cette période

Un examen attentif des réalités montre que ces analyses ne rendent pas compte des résultats économiques et sociaux réels et confondent généralement les choix stratégiques effectués et les conditions de réalisation de ces choix.

En fait, la planification algérienne a fixé des objectifs ambitieux et attribué des crédits importants à tous les secteurs de l’économie. Par contre, le taux d’utilisation des crédits disponibles a été très différent selon les secteurs :

Tableau 1 :Investissements programmés et investissements réalisés par secteur durant les trois premiers plans de développement

1967/69 1970/73 1974/77 TOTAL Crédits accordés (millions de DA)

Agriculture 1.900 9.500 31.600 41.600

Industrie de base et d’intégration 1.580 7.720 28.460 38.660

Industrie légère 370 1.320 5.070 22.660

BTP 9.000

Taux de consommation réel des crédits

Agriculture 100 % 46 % 28% 46 %

Industrie 12 % 112 % 133% 120 %

BTP et Habitat 60 %

Source : MPAT Rapports généraux sur les trois premiers plans de développement

On constate que durant le premier plan triennal, l’agriculture a été capable de consommer la totalité de ses crédits, l’industrie n’en ayant consommé que 12% principalement dans l’industrie lourde.

Puis la situation s’est inversée. Les deux plans quadriennaux qui ont suivi ont accordé des moyens très importants à l’agriculture: celle ci n’a consommé que la moitié des crédits alloués. Le Plan a également fortement accru la part des crédits accordés à l’industrie légère

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au BTP et à l’habitat: l’industrie légère a utilisé ses dotations et a ainsi connu un développement important. Les secteurs du BTP et de l’habitat, eux, n’ont pas réussi à mobiliser plus de 60% des moyens qui leur étaient attribués.

Ce ne sont donc pas des choix stratégiques hostiles à l’agriculture, au BTP, à l’hydraulique et à l’habitat qui expliquent le retard pris par ces secteurs durant la période, mais leurs conditions de fonctionnement qui ont empêché l’atteinte des objectifs ambitieux qui leur avaient été assignés.

Plusieurs raisons peuvent expliquer cette situation :

 si la formation des cadres agricoles a été intense (avec par exemple près de 34.000 techniciens et ingénieurs agricoles formés entre 1962 et 1977), les affectations, sur le terrain, des professionnels formés se sont faites à raison de 2 % seulement dans les exploitations de production, 18% dans les centres de formation et 80 % dans les services administratifs. Dans le même temps, l’industrie affectait, elle, plus de 80 % des techniciens et ingénieurs formés dans ses unités de production.

 la mise en place de la réforme agraire puis celle du système coopératif se sont faites de façon relativement bureaucratique, les administrations nationales et locales ne permettant pas véritablement aux producteurs de base de s’organiser comme ils le souhaitaient dans leur exploitation agricole.

 malgré la présence de techniciens de valeur en son sein et la disponibilité de crédits importants, le secteur de l’Hydraulique n’a pas atteint ses objectifs. Sur 40 grands projets hydrauliques programmés sur la période, seuls 4 ont été réalisés. Riche en eau, avec un potentiel de 800.000 nouveaux hectares irrigables, l’Algérie n’a pas réussi a mobiliser cette ressource essentielle pour le développement de l’agriculture : sur un objectif de mise en valeur de 170.000 hectares irrigables financés pour les trois plans de développement, seuls 55.000 ont été réalisé sur la période.

 dans le BTP et l’Habitat, l’Etat a surtout favorisé le développement des entreprises publiques, alors que dans ces secteurs ce sont généralement les entreprises privées qui constituent localement le fer de lance d’un pays pour la production de logements : on comptait 250.000 emplois dans le BTP public en 1980 contre 199.000 dans le BTP privé.

Malgré tout, le développement de l’Agriculture et du BTP a été notable par rapport à la période coloniale. La superficie agricole utile a augmenté de près de 10 % entre 1965 et 1978, la production agricole a cru de près de 20 % et le nombre de logements construits chaque année a triplé.

1-2 Autre idée fausse: les unités industrielles mises en place auraient été démesurées et se seraient traduites par une capacité très excédentaire par rapport aux besoins du pays dans une optique privilégiant l’exportation.

Un examen attentif des réalités montre que, si l’on écarte le cas des usines de liquéfactions d’Arzew et Skikda conçues pour l’exportation du gaz, et le laminage des produits plats en sidérurgie, les capacités de production industrielle ont visé les besoins intérieurs de l’Agriculture (usines d’engrais, usine de fabrication de tracteurs et machines agricoles, tubes pour l’irrigation, fer blanc et boîtes de conserve, tôle galvanisée etc.), ceux des secteurs de l’habitat et de la construction (cimenteries, fer a béton, treillis soudés, profilés à froid, tubes, verre plat, peinture, charpente métallique, etc.), des transports (usine de fabrication de poids lourds et de cars, raffineries,..) et des ménages (industrie agroalimentaire, textile et habillement, mobiliers, vaisselle, bouteilles à gaz, cuisinières, TV, frigidaires, papier et carton, édition, etc.).

Pour la plupart de ces produits, les capacités mises en place ont été insuffisantes pour faire face à une demande intérieure en pleine croissance, du fait de l’effet conjugué de la démographie et de la hausse du pouvoir d’achat des ménages. Il est donc erroné de dire que

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les choix ont visé principalement une industrie destinée à l’exportation. Le marché intérieur était là pour absorber l’essentiel de la production des unités industrielles mises en place.

Quelques critiques peuvent toutefois être émises concernant les choix de priorités dans le temps. Pour la métallurgie, par exemple, une priorité aurait pu être accordée aux produits longs (rond à béton, tréfilés, poutrelles), qui n’ont été programmés que durant le deuxième plan quadriennal, plutôt qu’aux produits plats, moins urgents dans le processus de développement, qui ont été privilégiés au premier quadriennal.

1-3 Autre critique peu fondée : les choix stratégiques retenus auraient conduit au seul développement des zones côtières du pays au détriment de l’intérieur. La période 1965-1980 aurait été caractérisée par l’accroissement du chômage et la baisse du pouvoir d’achat des ménages à l’intérieur du pays.

Là aussi, la réalité est toute autre : le développement de l’emploi industriel (environ 400.000 emplois nouveaux créés entre 1970 et 1982) a profité très nettement aux wilayates de l’intérieur :

Tableau 2 : Poids des différentes wilayates dans le développement de l’emploi industriel entre 1970 et 1982

Wilayates 1970 / nombre 1970 / % 1982/ nombre 1982 / %

Alger 96.000 111.000

Oran 42.000 43.900

Annaba 17.000 46.900

Total zone côtière 155.000 56 % 201.800 29 %

Willayates de l’intérieur 123.000 44 % 471.800 71 %

Emploi industriel total 278.000 673.000

Source : MPAT Enquêtes sur l’emploi et les salaires entre 1970 et 1982

Dans le domaine de l’énergie, la SONELGAZ a fait un travail remarquable d’électrification rurale et mis en place un réseau très étendu de distribution du gaz naturel dans toutes les régions du pays. Ceci a été un facteur important de développement économique (pour les grandes entreprises mais aussi pour les PME qui se créaient) et social (par l’accès des plus démunis à des énergies bon marché) dans les wilayates de l’intérieur.

Tous secteurs confondus, le PIB a cru de 7,6% par an en moyenne, et l’économie a créé près de 1,2 millions d’emplois permanents entre 1967 et 1978: de ce fait, le taux de chômage a fortement décru par rapport a 1962. Quand au revenu moyen des ménages par habitant, il a cru de 1.667 à 2.243 dinars entre 1974 et 1977.Ces résultats plutôt positifs ont touché toutes les régions du pays.

Par ailleurs, le développement du système éducatif a été très important et général dans l’ensemble des régions du pays. Le taux de scolarisation du pays, qui était de 25 % environ à l’indépendance, dépassait 75% en 1980, avec parallèlement un fort développement de la formation professionnelle, des instituts régionaux et locaux de technologie, ainsi que des 7 Universités, dont 6 créées après1962. C’est donc moin l’effort quantitatif qu’il faut mettre en cause, que les choix qualitatifs et les conditions de fonctionnement interne de l’appareil d’éducation qui sont en cause.

1-4- D’autres critiques enfin portent sur l’idée que durant cette période, l’économie algérienne se serait alignée sur certaines zones dominantes : les uns parlent d’un dépendance croissante vis a vis de l’Europe, les autres d’un alignement sur les pays de l’Est.

En fait, durant cette période, et au grand dam de l’ancienne puissance coloniale, l’Algérie a mis fin aux processus qui avaient donné avant l’indépendance un quasi monopole aux entreprises françaises, et elle a pu éviter de tomber sous la domination d’une zone économique exclusive. Une concurrence à été organisée entre les différents pays partenaires, et les achats de bien d’équipement ont été partagés, suivant les performances de chacun, entre

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l’Allemagne, l’Italie, la France, le Japon, les USA, l’URSS, la Chine etc. La recherche d’un taux d’intégration élevé des unités de production a été visée.

1-5 En définitive,on peut considérer que, si les choix stratégiques du pays semblaient assez équilibrés dans la conception des orientations, le taux de réalisation des objectifs a été assez inégal selon les secteurs, à une époque où le taux de croissance démographique était très fort.

La production industrielle a fortement augmenté dans toutes les branches, y compris dans les industries légères : mais le retard des infrastructures (hydraulique, transports, habitat, ..) et les choix d’organisation ont parfois pénalisé la pleine utilisation des capacités industrielles mises en place.

Le développement de l’agriculture, du BTP et des infrastructures n’a pas été suffisant pour faire face aux besoins d’une population en forte augmentation : la population avait presque doublé entre 1962 et 1980.

On constatait donc en fin de période une forte distorsion dans les rythmes de surcroît des différents secteurs et un retard important des secteurs conditionnant la vie quotidienne des ménages.

2- UNE CRISE DES FORMES DE REGULATIONS

Comment expliquer la montée de ces déséquilibres, et l’absence de maîtrise globale des formes de régulation économique durant cette période, caractérisée pourtant par un régime politique qui semblait très solide?

En fait, cette solidité apparente, résultant des traditions nationalistes et frontistes issues de la guerre de libération, ne pouvait cacher les luttes d’influence au sein et à la périphérie du système productif, pour le contrôle de celui-ci. Le Conseil de la Révolution et le gouvernement se sont accommodé progressivement d’un partage d’influence entre des fractions très différentes composant le front. Cinq d’entre elles peuvent être dégagées :

 La technocratie moderniste, le plus souvent francophone, se concentrant sur le développement industriel. Cette composante. était constituée au départ d’anciens dirigeants de l’UGEMA ayant rejoint le FLN à partir de 1956, notamment du fait de la grève des cours. Elle sera rejointe par la masse des jeunes algériens diplômés dans les écoles ou les universités, avides de s’impliquer dans les structures de l’appareil productif industriel en création. Au sein même de cette technocratie, des luttes auront également lieu du fait des divergences entre différentes composantes :

 L’équipe du patron, Belaïd Abdeslam, dont le dynamisme a joué un rôle important pour stimuler le développement du secteur. Tenant d’un étatisme étroit et utilisant des méthodes autoritaires parfois répressives, il s’est appuyé sur sa proximité des militaires membres du Conseil de la Révolution, pour imposer son pouvoir.

 Les cadres des entreprises industrielles plus proches des réalités économiques et sociales du pays, et souhaitant une évolution vers plus de démocratie économique afin de permettre plus de cohérence dans le développement des différents secteurs.

 Les représentants syndicaux, siégeant avec ces cadres dans les Conseils d’Administration des entreprises au titre des règles de la G.S.E (gestion socialiste des entreprises). Cette composante, elle aussi très proche des réalités locales, aspirait à une évolution progressive des formes de démocratie. Mais elle se méfiait des milieux gauchistes algérois très éloignés des réalités de l’Algérie profonde.

Une bureaucratie souvent dirigée par d’anciens militaires alliés à des fonctionnaires centraux et locaux. Cette tendance, très segmentée, se partagera les instances de direction des secteurs économiques autres qu’industriels: Agriculture, Hydraulique, Transport, BTP et Habitat (avec notamment la très puissante entreprise militaire DNC-ANP omniprésente dans toutes les régions) ainsi que les préfectures. Cette composante se satisfaisait elle aussi de formes de gestions autoritaires de l’activité, sans accorder grande attention aux messages des

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collectivités locales ou des organisations professionnelles qui auraient souhaité une plus grande concertation sur les modalités de mise enœuvre des plans de développement.

- Une haute administration, souvent de qualité, pour l’éducation, l’Université, les Affaires Etrangères et la Santé. Ces corps, le plus souvent compétents et ayant l’esprit de service public, n’auront que peu de poids politique, aspirant toutefois eux aussi à un fonctionnement plus pluraliste et démocratique du pays.

- Un appareil militaire composite. On y notait la présence de nombreux officiers et soldats attachés aux idéaux nationalistes de progrès et de liberté. Mais on y constatait également la montée en puissance des services secrets et de la sécurité militaire, dotés pouvoirs importants sans autre contrôle que celui du Conseil de la Révolution, donc des chefs militaires. Cet appareil sera progressivement très présent dans les entreprises et les administrations, se mêlant de façon parfois directe des rapports de forces entre les cadres économiques, le pouvoir central, les autorités locales et les représentants des salariés.

Les sujets importants de discorde entre ces différents composantes concerneront notamment l’éducation, le code de la famille, le statut du secteur privé, ainsi que le rôle du parti et celui de l’armée.

En matière d’éducation, les progrès ont été plus qualitatifs que quantitatifs. D’autres pays arabes, la Tunisie, le Maroc, et la Syrie par exemple, avaient connu un statut de protectorat ou de mandat n’ayant pas permis à la puissance coloniale d’écraser la langue et la culture locale. A l’indépendance, ces pays ont pu renforcer un système d’éducation conservant à la langue nationale une place prépondérante sans stigmatiser l’usage de l’anglais ou du français à l’école et à l’université, et sans provoquer de fracture dans l’appareil d’éducation de leur pays. En Algérie, 130 années de négation de la culture et de la langue algérienne ont généré des réflexes de rejets ne permettant pas de gérer aussi sereinement cette question à l’Université, dans les Entreprises et les Administrations. Il en a résulté des conflits fréquents entre différentes fractions du corps enseignants (on parlait des francisant et des arabisants) à l’école, dans le secondaire et dans les Universités, conflits que le régime n’a pas su gérer et qui n’ont pas toujours été favorables à la qualité de l’enseignement.

Concernant le statut du parti et de l’armée, la lutte de libération nationale avait obtenu la victoire après huit années de guerre, au prix d’un frontisme absolu ayant éliminé progressivement toute forme d’opposition au pouvoir central du Front, et assuré la suprématie des dirigeants militaires sur les dirigeants civils. Après l’indépendance, l’idéologie frontiste n’avait en principe plus de légitimité. Elle a en fait perduré, utilisée par certaines fractions sociales pour asseoir leur pouvoir et refuser la mise en place de contre pouvoirs indispensables à l’efficacité d’une économie démocratique.

D’une façon générale, l’idéologie dominante a méprisé le secteur commercial et les services et refusé le principe d’une régulation démocratique de l’économie de marché, ce qui a protégé les principaux dirigeants sectoriels de toute intervention sur leur territoire. Aucun mécanisme ne pouvait alors créer des forces de rappel en faveur d’une plus grande cohérence de l’appareil productif, cohérence devenue plus complexe à instaurer et pourtant encore plus indispensable suite à la forte croissance de l’appareil productif.

Certains dirigeants de l’Etat, et notamment Houari Boumediene, ont sans doute pris conscience de ces disfonctionnement graves ainsi que de la montée d’une forte aspiration à un jeu démocratique plus ouvert, tant dans les entreprises que dans la société algérienne.

Le lancement en 1975 du grand débat sur la Charte Nationale sera l’occasion de mettre en discussion des conceptions très différentes du mode de fonctionnement de la société et des entreprises : parti unique ou pluralisme, rôle de de l’armée, place de la religion dans la société, code de la famille, rôle respectifs du marché et de l’économie régulée, forme d’organisation de l’agriculture, place du syndicalisme, place des collectivités territoriales, place de la langue nationale et des autres langues utilisées en Algérie.

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Ce débat eut un écho puissant dans les entreprises, les collectivités et les mouvements associatifs : beaucoup ont pensé que de nouvelles formes de démocratie pourraient être mises en place, après dissolution du Conseil de la Révolution et renouvellement du rôle des partis et de l’armée.

Le texte final retenu par la direction du pays après ce débat, soumis au référendum en 1976, a refermé certaines des portes entrouvertes et la charte adoptée ne fera que faiblement évoluer les formes d’organisations économiques et politiques de la société algérienne. Par voie de conséquences, les formes de régulation de l’économie avaient peu de chance de changer.

En l’absence de contre-pouvoirs politiques ou économiques, le recours à la religion a pu parfois constituer un ultime recours pour contester un pouvoir laissant une place sans doute insuffisante au dialogue démocratique.

L’analyse de l’évolution politique et sociale de l’Algérie entre1962 et 1980 devra être confrontée à une étude sérieuse des mutations du pays entre 1980 et 2012 : ceci permettra d’éclairer les perspectives qui s’ouvrent à la société algérienne pour la prochaine décennie, à une époque marquée dans tout le bassin méditerranéen par un progrès important de nombreux pays arabes sur le terrain de la démocratie sociale et économique. L’Algérie pourra vraisemblablement jouer un rôle important dans ce processus et récupérer ainsi la place importante qui lui revient dans la communauté méditerranéenne et internationale : sur le plan politique d’abord, et par voie de conséquence sur le plan économique et social.

BIBLIOGRAPHIE

Annuaires statistiques de l’Algérie. 1966-1980. «Pour des données quantifiées sur l’économie algérienne entre 1962 et 1980».

Banque mondiale. 1980 "Evolution de l’économie algérienne". Rapport annuel.

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Références

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