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Ernest Chantre (1843-1924)
PITTARD, Eugène
PITTARD, Eugène. Ernest Chantre (1843-1924). Mémoires de la Société de Physique et d'Histoire naturelle de Genève , 1926, vol. 40, no. 2, p. 154-156
Available at:
http://archive-ouverte.unige.ch/unige:109251
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MEMO,IRES
NE LÀ
SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE !]T D'HISTOIRE NATURELLE D!] GENÈYE
voLUME 40, r'rscrcur,n
2
.dvsrr, 1926ERNEST
CHANTRE (1843-1e24)Ernest Chantre, le plus ancien membre honoraire de la Société cte Physique et
d'Ilistoire
natu- relle, était né à Lyon en 1843.Il
s'était de très bonne heure orienté vers les sciences naturelles. Sespremières recherches eurent pour but tles études palethnologiques dans le norcl tlu Dauphiné et les environs de Lyon et des études géologiques sur ies anciens glaciers
et les terrains
erratiques du bassin rlu Rhône. C'est en 1866 qu'il publia son premier mérnoire. Celui-cifut
suivi par près tle'250travaux
originaux, rapports, comptes rendus, etc., parus principalement dans les Revues scienti- fiques françaises.Ainsi,
penclant soixante années, Chantre porta auloin
avec une autorité incon- testée le renoin scientifique de son pays. Son inmense labeur clésintéressé et son arclente initiative ont apporté à la Géologie et àla
Paléontologie, rnais surtout à I'Anthropologie, une quantité consi- tléra|le de faits nouveaux : le nom tle Chantre est à tout jamais lié à I'histoire cie ces disciplines.En 1873,
il
publia, en collaboration avec Falsan, deux gros volumes:
Monographi'e géol,ogique d,es ancinns glaci,ers et d,w teirai,n errati,gue d,e.la partàe nzlryenne du bassr,n d,w Rhône. Puisvint
une série rl'études paléontologiques sur ies terrains dela
même région. entre autres ane Monograph,i,e d,es Mastod,ontes dot, bussi,n d,u Rhône. Après quoi Ernest Chantrerevint
aux étudesqui
avaienX enthousiasmé sa jeunesse:à
*la
question cles questions > commetlit
Huxley, aux recherches rela-tives à l'Ilomme
préhistorique,aux
études. d.'Anthropologie physique.A partir de
1879, notrePOUR
L'ANNÉE
T924 t55regretté collègue, qui a été I'élève de Broca, commence la série de ses missions tlans I'Asie occiclen- tale et en Afrique. trl iie devait les arrêter que I'année même de la grande guerre.
En
1885,il
publia un ouvrage eonsidérable en cinq volumes qui a'pourtitre:
Recherches anthropologi,ques aw Caucase, rni,ssi,on cl,e 7879 ù 1"887. Puis, en 1896, les Recherches anthropol,ogi,gwes dansI'Asie
occi,cl,entale, Transcaucasi,e, Asi,e mineure et Syri,e. Avec ces æuyres câpifales,il
apporte une contribution pré- cieuse à la connaissance anthropologique de tous les peuples de I'Asie antérieure.En
1898; parait, sous les anspices du'Ministère de I'Instruction publique, les Reclterches archéologi,ques d,ans l,'Asi,eo c ci d, ent al, e, rni,s s io n en C ap p ad o c e, 1
I
I 3 - 1 B 9 4.L'amour iles voyages sollicitait sans cesse le sayant lyonnais et
le
clésir d'apporter un peu de couleur à des cartes anthropologiques presque complètement blanches, avait pourlui
untel
attrait, que Chantre neprit,
pour ainsi dire, jamais unjour
de repos. Après avoir éclairé nos connaissancessur
les origines des populations cle I'Asie occidentale et surleurs
qualités ethniques, Chantre setourna
vers I'Afrique.A la
suite de plusieurs séjours enEgypte, il publia un
volume important intitulé:
Recherches anthropologiques d,ans t'Afri,q.ue orimtale, Egytrtte et Nubi,e : Egyptiens anci,enset rnod,ernes, Bed,jah, Soud,anai,s orientaur, etc., mi,ssi.on d,e 7897-7904. F,t, plus près de nous, en 1913, après de longues recherches dans l'Afrique française et italienne, l'énorme ouvriùge en colla-
bolation
avecBertholon:
Rec'lterches anthroytologàqwes d,an,sla
Berbéri,e orientctle, Trirytolitaine, Tunisi,e et Algéri,e, deux grands volumes in-4o, richement illustrés.Toutefois, ces séjours en pays loirrtains ne détournèrent pas Chantre de notre continent et des
régions plus rapprochées cle sa petite patrie lyonnaise.
Il
avait, concernant l'Eutope entière, publié deux ouvrages-
ils sont depuis longtempsclassiques
sur !'Age dw bronae et I'Age du fer, quilui
avaient ouvet't tous les musées d'Europe; et cle nonrbreux mémoires sur la France préhistorique. En1901, parut l'Hontnte quaterna'ire dans lebassi,n clu Rhône.
II
fautlrait cl'abondantes pages pour rappeler cette protligieuse activité. Ce formidable travail- leur, quela mori
seuleput
arrêter dans son æuvÏ'e (à80
ansil
préparait, avecPittard,
un grand ouvl'âge sur les Peuples de lc, Mécli,terranée) ne se confinait pas dansla
recherche pure.II
vciulaitparticiper activement à la protection, à l'avancement et à la diffusion de la science, par les moyens qui nous sont donnés par les Commissions nationales et internationales, par les Congrès, par l'Enseigne- ment. Le Gouvernement de la République française I'appela à faire
partie
de nombreuses Commis- sions.Il
Ie délégua, maintes fois, pour représenter la France dans rles Congrès internationaux. Dans ces tierniers milieux, Chanile était particulièrement estimé. Depuisla
réunion de Neuchâtel, en 1866, qui ouvritl'ère
des Congrès d'Anthropologie et d'Arc:héologie préhistoriques, fonclés l'année précédente à la Spezzia, Chantre n'a jamais manqué d'apporter à ces grandes assembléesla
dignité de sontravail libre,
I'appui de ses découvertes,i'autorité
de son expérienceet de sa foi. Car il
croyait à la vertu de l'exemple, à la valeur morale des recherc'hes désintéressées, à l'efficience sociale de I'æuvre scientifique
En 1881, E. Chantre avait fondé la Société d'Anthrcpologie de Lyon. Pendant qualante ans,
il
fut l'ârne de cette association etil
en resta, jusqu'à sa mort, le secrétaire général.De
188i à
1908,il
enseigna l'Anthropologie et I'Ethnologie à I'IJniversité de Lyon.Il
avait été, pendant de longues années, sous-directeur du Muséum de cette ville.Ernest Chantre était corlespondant de
I'Institut
de !.rance, membre du Conseil pernranent deI'Institut
international d'Anrhropologie, membre honoraire, associé ou correspondant de presque toutes les Sociétés rl'Anthropologie de I'Europe.Il
avait été nommé honoraire denotle
Société en 1870.La
France et plusieurs antres trltatslui
avaient décerné de nombreux ténioignages de grati- tude. Le Gouvernemeut français sefit,
ofticiellement, r'eprésenter à ses obsèques, parle
Préfet du Rhône.l'l
:'- .t r !T::j !.i,.?.: +.?.ieyr jf: '*:.:ri-
c.56 RAPPORT
DU
PRÉSIDENTEn Suisse, même, Chantre avait des aitaehes fæmiliales.
Il
compta, au cours de sa longue vie, parmi les sayants de notre pays, un grand nombre d'amis appartenant à des générations diverses:Desor, Troyon, Àlphonse Favre, François-Jules Pictet, Henri de Saussure, Carl \rogt,
F.-4.
Forel, pour ne citer que les tlisparus, furent, chez nous, ses principales relaiions scientifiques. La généra- tion actuelle des anthropologistes de notre payslui
était fidèlement attachée.A
l'occasion de son quatre-vingtième anniversaire, les savants suisses, tle disciplines semblables aux siennes,lui
avaient adressé un hommage collectif, soulignant une si belle carrière.Il
avait été profonclément touché de cettemarque cl'amitié confraternelle.La
mort de Chantre'privela
Science d'un savant éminent, comme elle prive ses amis d'un exernple admirable. Un tel vide sera difiicilement cbmblé.Chantre
avait
désiré quele
tlirecteurtlu
laboratoire tl'Anthropologie de Genève devint Ie continuateur de son æuvre anthropologique.Il
lui avait, dans ce but, destiné ses documents inédits,ses photographies, sa bibliothèque anthropologique. Nous espérons que ce væu
poura
se réaliser.Le lien entre Chantre et ses confrères de Genève ne sera donc pas rompu par la mott. Sa mémoire continuera d'être activement honorée parmi nous.
Eug. Ptrreno.