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Artisans et artisanat dans le monde égéen protohistorique. Etat de la question.

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Academic year: 2021

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Hara Procopiou

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Hara Procopiou (Université de Paris I et UMR 7041 ArScAn - Protohistoire égéenne)

La première partie du IIe millénaire est m arquée par l'ap p a ritio n en Crète, du système palatial, qui se m aintiendra dans le m onde égéen jusqu'à la fin du XIIIe siècle. Ce phénom ène est a c c o m p a g n é d 'u n essor des productions artisanales e t de l'ém e rg ence d 'u n e classe d'artisans spécialisés d é p e n d a n t d'une autorité centrale. Le degré d e d é p e n d a n c e à c e tte autorité, le statut social des artisans, leur rapport a ve c les artisans exerçant en dehors du palais, sont encore à reconstituer.

Durant la p é rio d e p ro to p a la tia le en Crète (1900-1700 BC), a p p a ra ît un « artisanat groupé », c o m m e en tém oigne le Quartier Mu de Malia (Fig. 1) : q u a tre maisons-ateliers sont situées à proxim ité im m é d ia te du c e n tre adm inistratif d o n t elles d é p e n d a ie n t (Poursat 1996). Plusieurs activités sem blent avoir eu lieu dans les mêmes pièces, qui ne se distinguent pas au point d e vue architectural des simples pièces d 'h a b ita tio n . Dans l'atelier d e potier, par exemple, la production d e vases ou d e moulages en argile c ô to ie la fabrication de vases en pierre. (Fig. 2).

Les données sur l'organisation des ateliers se multiplient durant la période néopalatiale (1700-1450 BC). Diverses aires artisanales, sans am énagem ents particuliers, o n t été identifiées en contexte palatial. À Zakros, les ateliers se situent soit à l'intérieur du palais, soit dans les différents quartiers d e la ville environnante (Platon 1993). Com m e pour Malia à l'é p o q u e p ro to p a la tia le , une p o ly v a le n c e des ateliers se dessine a v e c la coexistence sur une m êm e aire d e différentes activités (Fig. 3). Le palais semble é g a le m e n t contrôler les stocks de matières premières

qui sont ensuite achem inés vers les ateliers : trois défenses d'é lé p h a n t, six talents d e cuivre, des blocs d e stéatite o n t été trouvés à l'é ta g e d e l'aile ouest.

C 'est égale m e n t p e n d a n t c e tte période, où la fréquence des ateliers dans des agglom érations, com m e Gournia, Pseira ou encore Palaikastro, a con d u it à les considérer co m m e des centres urbains, d o n t une partie n o table d e la population vivrait d'a ctivités artisanales. Mais seules les études sur les techniques mises en oeuvre e t sur les com pétences requises pour leur réalisation p e u ve n t éclairer le degré de spécialisation des artisans exerçant dans ce contexte.

Par ailleurs, le statut d 'u n e m êm e activité techniqu e pe u t varier. La m outure des céréales, par exemple, si elle reste durant to u te la période palatiale ancrée dans le c a d re domestique, elle pe u t revêtir une form e artisanale au sein des « minoteries », com m e au palais d e Galatas. La variabilité des techniques d e transform ation des céréales ainsi observée, suggère une diversification des pratiques alimentaires selon le contexte d e production e t de consom m ation (Procopiou 2003).

Pour le m onde m ycénien (période palatiale, 1400-1200 BC) les tablettes en Linéaire B attestent l'existence d'artisans travaillant pour le palais qui leur fournit d 'u n e part des matières premières d 'a u tre part des rations alimentaires. Leur degré d e d é p e n d a n c e s'avère varié : libres, serviles, semi-indépendants. On parle c e p e n d a n t d'artisans palatiaux dans le sens où, quel que soit leur statut social, ils exercent leur activité dans le c a d re d 'u n e production c o m m a n d ité e par le

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Spécialisation des tâches e t sociétés

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Fig. 1. Le quartier M u d e M alia e t les maisons ateliers (d'après Poursat 1996)

Fig. 2. L'atelier d e p otier du Quartier Mu d e M alia (d'après Poursat 1996) a) objets liés à la fabrication d e vases ou de moulages ; b ) objets liés au travail d e la pierre

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Hara Procopiou

palais. Ces artisans sont fortem ent spécialisés ; les textes nous inform ent sur un grand nom bre de métiers : armuriers, charrons, potiers, tisserands, forgerons subdivisés en 5 catégories, boulangers.,.

Q u a n t aux données archéologiques, elles révèlent, com m e en Crète, l'existence d'ateliers aussi bien au sein des centres palatiaux (Mycènes, Pylos, Thèbes) qu e dans les différents types d 'a g g lo m é ra tio n s (M idéa, Asinè). L'absence d 'a m é n a g e m e n ts particuliers, la coexistence de différentes activités dans une m êm e aire de travail, constitue, ici aussi, la règle. La standardisation accrue des productions, la production en série des parures en or, en verre ou en faïence, g râ c e à la généralisation d e l'em ploi des moules, ainsi que le nom bre élevé d'ouvriers (400 forgerons à Pylos, 600- 900 ouvrières textile à Cnossos) m entionné dans les textes, d é n o te ce p e n d a n t, pour la première fois dans le m onde égéen, une production quasi-industrielle.

Q u a n t aux techniques em ployées par ces artisans (Evely 1993, 2000), ju sq u 'à présent peu explorées, elles p e rm e tte n t d e soulever plusieurs questions d'o rd re historique.

C 'est durant l'a vè n e m e n t du système palatial en Crète que se m ettent en p la ce des techniques artisanales complexes, promises à un long avenir dans le bassin égéen. Ces techniques, com m e le tournage d e la céram ique, la réalisation des faïences ou le forage des roches dures, se répandent en Crète au d é b u t du IIe millénaire, à une d a te plus tardive q u 'e n Egypte et au Proche-Orient. La d a te précise de leur a p p a ritio n e t les m odalités d e leur introduction restent c e p e n d a n t à reconstituer. La qualité des objets d e l'artisanat crétois, ainsi que les c o m p é te n c e s requises pour leur réalisation, suggèrent que ces techniques n'auraient pas pu être sim plem ent imitées. Leur a d o p tio n nécessite un apprentissage, plus ou moins long, e t par-delà im plique des contacts directs entre les artisans d e ces différentes contrées. Ce sont d o n c les relations entre les artisans e t l'org anisation des ateliers en M éditerranée Orientale qui sont ainsi abordés.

Pour le tournage, sa mise en p la ce semble se faire progressivement, co m m e l'ind ique l'analyse technolo gique d e la céram ique protopalatiale de Cnossos (K nappet 1999). Au d é b u t d e la période, le tournage se limite à un répertoire restreint de vases

de petites dimensions e t c e n'est q u 'à la fin d e la période qu'il va s'étendre à un répertoire plus vaste e t à des vases plus grands. C ependant, la persistance dans d'autres centres, co m m e à Pyrgos e t à Malia, d e techniques intermédiaires c o m b in a n t m on ta g e au colom bin e t finition au tour suggère que seuls les artisans palatiaux étaient à m êm e d e maîtriser c e tte nouvelle te ch n iq u e , p ro b a b le m e n t g râ c e à un apprentissa ge auprès des artisans orientaux (Knappet, ibid).

La réalisation de la faïence, im plique des chaînes opératoires com plexes (Panagiotaki 2000) : réalisation du corps à base d e recettes, réalisation de la glaçure, mise en form e e t décoration des objets. Durant la p é rio d e p ro to p a la tia le , les différentes te ch n iq u e s em ployées, d é rive n t d e celles, d é jà élaborées, en m éditerranée orientale, e t ce ci m algré certaines particularités co n ce rn a n t la com position des recettes (Foster e t Kaczmarczyk 1982). Ce n'est q u 'à la période néopalatiale, où les productions minoennes vont faire preuve d'originalité. Des alcalis potassiques associés à une grande concentratio n de chaux sont utilisés pour les recettes d e base. La préférence pour la polychrom ie a c o n d u it à l'em ploi d e l'incrustation pour le d é c o r e t à l'a p p lica tio n directe d e la glaçure (Morero 2002).

Pour le forage des roches dures. À la période p ortopala tiale à c ô té d e forets à tê te massive (pierre ou bois) se répand en Crète le foret tubulaire1. Ce foret pe u t servir à percer des trous d e suspension ou à réaliser le d é c o r sur des sceaux ou des perles ainsi q u 'à l'é v id e m e n t des vases en pierre. C e tte techniqu e est attestée par la présence d e carottes en pierre, ainsi qu e par les stigmates d e fabrication présents à l'intérieur d e vases (Fig. 2b). L'utilisation des forets tubulaires, ainsi que l'em ploi d'abrasifs, ont progressivement permis le travail des roches dures, co m m e le cristal de roche, l'a g a te , la cornaline, le

lapis lacedaem onius. Ainsi, sont attestées, à partir de

la p é rio d e p ro to p a la tia le , l'e x p lo ita tio n e t la circulation à grandes distances d 'u n abrasif puissant : l'ém eri. Les techniqu es em ployées pour la pulvérisation d e l'émeri, ainsi que les m odalités de son utilisation (à sec, a ve c des lubrifiants... ) n 'o n t pour l'instant, guère é té étudiées2. Un program m e de recherche est en cours, en collaboration a v e c le Laboratoire de Tribologie e t Dynam ique des Systèmes d e l'École C entrale à Lyon3. Il a pour objectif, à travers la m ise en p la c e d e critères de

1 Thèse en cours sur les techniques d e fabrication d e vases en pierre par Elise Morero, Université d e Pdris I ( Protohistoire Égéenne ; d irecteur d e thèse : M. René Treuil).

2 Thèse en cours, sur l'exploitation d e l'émeri par Athina Boleti. Université d e Paris I ( Protohistoire Égéenne ; directeur d e thèse : M. René Treuil).

3 UMR 5513. Responsables du projet : H. Zahouani, R. Vargiolu, H. Procopiou.

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Spécialisation des tâches e t sociétés

Fig. 3. Palais d e Zakros : répartition des ateliers e t des stocks des matières premières (d'après Platon 1993 e t Karetsou 2000)

reconnaissa nce des différentes techniques de forage, d'é cla ire r les modalités d e leur mise en p la ce

e t de leur d é ve lo p p e m e n t au sein d 'u n artisanat lapidaire déjà bien établi. Les artisans crétois ont, en effet, fa it preuve d 'u n e g ra n d e cré a tivité . Les techniques adoptées vont s'a d a p te r aux nouveaux m atériaux exploités et d e nouvelles formes d e vases, com plexes e t originales, vo n t être réalisées, Ce nouveau répertoire implique la mise en œ uvre de nouvelles procédures techniques pe rm e tta n t q u 'o n te n te a ctuellem en t d e m ettre en lumière.

Ainsi, durant le IIe millénaire, l'ém e rg e n ce e t le d é ve lo p p e m e n t de l'artisanat palatial ne pe u t se concevoir sans une vision plus large d e l'artisanat m éditerranéen e t des pouvoirs politiques en place. Les m odalités d 'in v e n tio n ou d e diffusion des techniques, d 'a d o p tio n et d 'a d a p ta tio n des savoir- faire artisanaux sont ainsi au cœ u r des réflexions actuelles.

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Figure

Fig.  1.  Le quartier M u d e  M alia e t les maisons ateliers (d'après Poursat  1996)
Fig.  3.  Palais d e  Zakros :  répartition des ateliers e t des stocks des matières premières (d'après Platon  1993 e t Karetsou 2000)

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