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Texte intégral

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MISE AU POINT

Le syndrome

d’hyperventilation

Hyperventilation syndrome

D. Nunes*, C. Chenivesse*

* Service de pneumologie et immuno- allergologie, CHRU de Lille ; université de Lille.

L e syndrome d’hyperventilation est une patho- logie fréquente de l’adulte jeune. Il est res- ponsable de symptômes intenses, au premier rang desquels une dyspnée invalidante, susceptible d’altérer la qualité de vie et de mener à une situa- tion de handicap respiratoire. Connu depuis plus d’un siècle, le syndrome d’hyperventilation reste toujours sans explications organique ou fonction- nelle. Le diagnostic repose sur des tests peu validés et les traitements ne sont fondés sur aucune étude de qualité. Cette situation a favorisé le développement de convictions à l’encontre de toute démarche scien- tifique, conduisant à l’isolement des patients. Cet article propose de synthétiser les données objectives publiées sur le syndrome d’hyperventilation.

Définition

La définition la plus consensuelle du syndrome d’hyperventilation est celle énoncée par R.A. Lewis en 1986, élaborée à partir de propositions d’experts.

Le syndrome d’hyperventilation y est défini par une variété de symptômes somatiques, induits par une hyperventilation physiologiquement inappropriée et habituellement reproductibles, totalement ou partiel- lement, par une hyperventilation volontaire (1). Cette définition établit un lien de causalité entre l’hyper- ventilation et les symptômes, lien qui distingue le syndrome d’hyperventilation des autres troubles fonctionnels respiratoires (2).

Le syndrome d’hyperventilation est régulièrement classé dans le groupe des maladies somatoformes dans le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM). Les maladies somato- formes font référence à des manifestations soma- tiques sans substrat organique, ayant une origine psychique. Cette classification présuppose la participation d’un facteur psychologique dans l’étio pathogénie du trouble. En ce qui concerne le syndrome d’hyperventilation, cette classification reflète davantage une incapacité à détecter sa cause

que la mise en lumière d’un lien psychosomatique.

La formule “syndrome d’hyperventilation” ne figure pas dans la dernière version du DSM (DSM-V).

Épidémiologie

Il n’existe pas d’étude ouverte évaluant la prévalence du syndrome d’hyperventilation en population générale en France ou dans le monde. Les études rapportent différents taux de prévalence en fonction de la popula- tion sélectionnée et des critères diagnostiques utilisés.

En soins primaires, 6 à 10 % des adultes et 21 % des enfants et adolescents présenteraient des symptômes compatibles avec un syndrome d’hyperventilation (3).

Ces chiffres surestiment probablement la prévalence réelle du syndrome d’hyperventilation puisqu’ils sont fondés sur une positivité du score symptomatique (score du questionnaire de Nijmegen), critère diagnos- tique sensible mais peu spécifique.

Les études montrent que cette affection prédomine

chez les femmes, avec un ratio homme/femme allant

de 1/2 à 1/4. Pourtant, la description originelle portait

exclusivement sur des hommes, soldats de la guerre

de Sécession, suggérant une association indirecte avec

le sexe. L’âge de survenue se situe préférentiellement

entre la troisième et la quatrième décennie, mais les âges

extrêmes sont concernés, particulièrement les enfants et

adolescents (3). La mortalité liée au syndrome d’hyper-

ventilation est probablement nulle en l’absence d’une

pathologie organique sous-jacente bien que quelques

cas cliniques lui aient attribué des morts, impliquant des

mécanismes ischémiques ou hypoxiques. En revanche,

la morbidité liée au syndrome d’hyperventilation est

élevée, avec un impact majeur sur la qualité de vie (4)

et le travail (données personnelles). Le questionnaire de

qualité de vie générique SF-36 a montré que la qualité

de vie des patients souffrant d’un syndrome d’hyper-

ventilation était profondément altérée dans tous les

domaines, notamment ceux faisant référence à la condi-

tion physique (4) [figure 1]. L’impact sur les coûts de

santé, probablement important, n’a jamais été évalué.

(2)

100 PF 80 60 40 20 0

RP MH

SF GH

VT

BP RE

PF : fonctionnement physique ; RP : limitation liée aux problèmes physiques ; BP : douleur ; GH : perception de la santé globale ; VT : vitalité ; SF : fonctionnement social ; RE : limitation liée aux problèmes émotionnels ; MH : santé mentale.

Figure 1. Impact du syndrome d’hyperventilation sur la qualité de vie.

Le tracé radar montre les scores au SF-36 de patients souffrant de syndrome d’hyperventilation (ligne pleine) et de la population générale française de même âge et de même sexe (ligne pointillée).

Chaque rayon représente une dimension du score au SF-36. Le score de qualité de vie (de 0 à 100) s’élève au fur et à mesure qu’il s’éloigne du centre.

» Confirmer le diagnostic de syndrome d’hyperventilation nécessite d’exclure une pathologie organique et de mettre en évidence des symptômes d’hyperventilation et une hyperventilation chronique mais aussi un lien entre les deux. Cette démarche comporte un examen clinique et paraclinique minimal, le questionnaire de Nijmegen, la gazométrie artérielle et le test de provocation d’hyperventilation.

» La prise en charge repose sur des exercices respiratoires.

Dyspnée Hyperventilation

Highlights

» The hyperventilation syn- drome is defined by a variety of somatic symptoms induced by inappropriate hyperventilation.

» The reason for consultation in respiratory care is unexplained dyspnea. Dyspnea is poorly cor- related with exertion, occurs as attacks at rest and is associ- ated with symptoms of hyper- ventilation.

» Confirming the diagnosis of hyperventilation syndrome requires to exclude an organic disorder and to find evidence of hyperventilation symptoms, chronic hyperventilation and the relationship between symptoms and hyperventila- tion. This approach is based on clinical examination, first line investigation, Nijmegen questionnaire scoring, arterial blood gases and the hyperven- tilation provocation test.

» Treatment is based on breathing exercises.

Keywords

Hyperventilation syndrome Dysfunctional breathing Dyspnea

Hyperventilation bronchique. La commande volontaire est inactive

pendant le sommeil.

Dans le syndrome d’hyperventilation, la commande automatique de la ventilation fonctionne normale- ment en réponse aux stimuli métaboliques (hyper- capnie et hypoxie) [5]. La cause de l’hyperventilation observée dans le syndrome d’hyperventilation n’est donc pas une hypersensibilité de la commande auto- matique de la ventilation. Il n’existe pas de données concernant le fonctionnement de la commande volontaire dans le syndrome d’hyperventilation.

Cependant, son implication dans le maintien de la ventilation en hypocapnie chez le sujet sain (6), ainsi que la normalisation du taux de CO

2

pendant le sommeil des patients souffrant d’hyperventilation (7), période pendant laquelle la commande volontaire est inactive, suggèrent qu’une activité anormale de la commande volontaire de la ventilation pourrait être impliquée dans la genèse de l’hyperventilation observée au cours du syndrome d’hyperventilation.

Quelle que soit l’origine de l’hyperventilation, elle induit une alcalose ventilatoire qui a pour effet de diminuer le potentiel transmembranaire et donc le seuil de dépolarisation des cellules dépolarisables (neurones et cellules musculaires). Cela produit une hyperexcitabilité neuronale et musculaire ainsi qu’une vasoconstriction artérielle systémique qui sont à l’origine des symptômes somatiques observés dans le syndrome d’hyperventilation. Cependant, ce lien de causalité entre l’alcalose ventilatoire et les symptômes a été remis en question, d’une part par des tests de provocation d’hyperventilation réa- lisés en isocapnie et ayant permis de reproduire les symptômes d’hyperventilation malgré l’absence d’hypocapnie et, d’autre part par des enregistrements ambulatoires continus de la PCO

2

ne montrant pas d’hypocapnie concomitante des symptômes (8). Il est donc possible que d’autres mécanismes interviennent comme, par exemple, une perception anormale des sensations respiratoires (9).

Finalement, il existe dans le syndrome d’hyper- ventilation des hypothèses neurophysiologiques fondées sur des anomalies physiologiques objec- tivables. Pourtant, le syndrome d’hyperventilation continue à être régulièrement qualifié de “psycho- gène” sans qu’un profil psychiatrique caractérisé ait jamais été mis en évidence.

Physiopathologie

Chez le sujet sain, la ventilation est régulée

par 2 commandes : une commande automatique et

une commande volontaire. La commande automa-

tique engendre un rythme spontané qui maintient

une ventilation dans toutes les situations incluant

le sommeil. Elle est régulée par les conditions méta-

boliques de l’organisme (pH, PaCO

2

, CaO

2

). Par

exemple, en cas d’acidose métabolique, d’anémie

ou d’hypoxémie, on observe une hyperventilation

appropriée. La ventilation automatique peut être

modulée par la commande volontaire de la ven-

tilation qui permet d’adapter cette dernière aux

contraintes comportementales. C’est le cas, par

exemple, lors de la parole ou d’une obstruction

(3)

MISE AU POINT

Le syndrome d’hyperventilation

Manifestations cliniques

On distingue 2 formes cliniques : une forme aiguë carac- térisée par des épisodes paroxystiques d’hyperventi- lation, communément appelés “crises de tétanie” ou

“spasmophilie”, et une forme chronique caractérisée par des symptômes chroniques persistants. Dans la forme chronique, les symptômes sont multiples, tou- chant tous les organes, de type ischémique, et liés à une hyperexcitabilité neuromusculaire. Les symptômes les plus fréquents sont la dyspnée, les précordialgies, les palpitations, la fatigue et l’anxiété. L’ensemble des symptômes sont répertoriés dans le questionnaire de Nijmegen (tableau I). La dyspnée est caractérisée par une gêne prédominante à l’inspiration, un faible lien avec l’effort, la survenue d’épisodes paroxystiques et l’association à d’autres symptômes d’hyperventilation.

L’ensemble de ces caractéristiques la distinguent de la dyspnée observée au cours des maladies respiratoires ou cardiaques chroniques.

Diagnostic positif

Il n’existe pas de “gold standard” pour le diagnostic de syndrome d’hyperventilation. La démarche dia- gnostique repose sur l’élimination d’une pathologie organique, l’existence de symptômes d’hyperventi- lation, la mise en évidence d’une hyperventilation et

d’un lien entre les symptômes et l’hyperventilation (figure 2). La démarche consistant à exclure une cause organique devant une dyspnée repose sur un examen clinique complet et un bilan paraclinique compor- tant le dosage de l’hémoglobine, un bilan thyroïdien, une radiographie du thorax, une pléthysmographie, la mesure de la DLCO, une gazométrie artérielle, un électrocardiogramme et une échographie cardiaque, dont l’objectif est de dépister une hypertension pul- monaire dans ce contexte de dyspnée inexpliquée.

La gazométrie artérielle peut montrer une hypocapnie liée à l’hyperventilation qui ne justifie pas la recherche systématique d’une embolie pulmonaire par imagerie dans la mesure où il n’y a pas, dans ce contexte, d’effet shunt (gradient alvéolo-artériel en oxygène normal).

Le questionnaire de Nijmegen est un hétéroquestion- naire constitué de 16 symptômes d’hyperventilation chronique, dont la fréquence de survenue doit être cotée de 0 (jamais) à 4 (très souvent) [tableau I]. Un score total > 23 confirme l’existence de symptômes d’hyperventilation avec une spécificité de 95 % et une sensibilité de 91 % (10). Ce test n’est validé que pour établir le diagnostic de syndrome d’hyperventilation idiopathique. Il ne peut être utilisé pour faire le diag- nostic de syndrome d’hyperventilation associé à une pathologie organique. La gazométrie artérielle peut être normale, montrer une hypocapnie, une alcalose ventila- toire ou une baisse isolée des bicarbonates témoignant d’une adaptation à une hypocapnie chronique. La dif- férence alvéolo-artérielle en oxygène reste normale.

La gazométrie artérielle est normale dans 50 % des cas en raison du caractère fluctuant de l’hyperventilation, ce qui n’élimine pas le diagnostic de syndrome d’hyper- ventilation. Le test de provocation d’hyperventilation (figure 3) a pour objectif de reproduire les symptômes habituels du patient par une hyperventilation volon- taire. Le test se déroule en 3 phases : une respiration de repos de 3 mn, une hyperventilation volontaire de 3 mn et une période de récupération. Pendant le test, la pres- sion télé-expiratoire de la pression partielle en CO

2

(PetCO

2

) est enregistrée en continu. Les 2 critères de positivité du test sont la reproduction d’au moins 2 des symptômes habituels et un temps de récupération de la PetCO

2

de base après l’hyperventilation volontaire supérieur à 5 mn. La reproduction des symptômes habituels par l’hyperventilation volontaire démontre un lien de causalité entre les symptômes et l’hyper- ventilation. L’allongement du temps de récupération de la PetCO

2

, après une hyperventilation volontaire, témoigne d’une probable hyperventilation chronique. La sensibilité et la spécificité du test d’hyperventilation ne sont pas connus mais cet examen a l’avantage majeur de montrer le lien entre les symptômes et l’hyper- Tableau I. Questionnaire de Nijmegen.

Fréquence de survenue Jamais

0

Rarement 1

Parfois 2

Souvent 3

Très souvent 4 Tension nerveuse

Incapacité à respirer profondément Respiration accélérée ou ralentie Respiration courte

Palpitations

Froideur des extrémités Vertiges

Anxiété Poitrine serrée Douleurs thoraciques Flou visuel

Fourmillements dans les doigts

Ankylose des bras et des doigts

Sensation de confusion

Ballonnement abdominal

Fourmillements

(4)

Dyspnée évoquant un syndrome d’hyperventilation

Inconfort inspiratoire Oppression thoracique Dyspnée d’effort

Dyspnée paroxystique de repos Absence de dyspnée nocturne Hémoglobine

TSHus

Gazométrie artérielle*

Électrocardiogramme Pléthysmographie Mesure de la DLCO Échographie cardiaque Radio du thorax Examen clinique normal

Examens complémentaires normaux*

Score de Nijmegen > 23

PaCO

2

< 36 mmHg ou temps de récupération PetCO +

2

après hyperventilation > 5 mn Reproduction des symptômes par hyperventilation +

Syndrome d’hyperventilation

OUI NON

Trouble fonctionnel respiratoire non syndrome d’hyperventilation

NON

Dyspnée inexpliquée

* La gazométrie artérielle peut être normale ou montrer une hypocapnie, une alcalose ventilatoire ou une diminution des bicarbonates.

Figure 2. Diagnostic de syndrome d’hyperventilation.

Ventilation

de repos Hyperventilation Récupération

PetCO

2

Débit ventilatoire

Temps (mn) Normal

Syndrome d’hyperventilation

3 6 11

Figure 3. Test de provocation d’hyperventilation.

Le test de provocation d’hyperventilation enregistre la pression télé-expiratoire de CO

2

(PetCO

2

) au cours d’une période de ventilation de repos de 3 mn puis d’une période d’hyperventilation volontaire au cours de laquelle la PetCO

2

doit atteindre la moitié de sa valeur de base, et d’une période de récupération. Pendant le test, le patient signale la survenue de symptômes en levant la main. À la fin du test, les symptômes sont répertoriés.

ventilation (11). Pour finir, on peut proposer de retenir le diagnostic de syndrome d’hyperventilation devant une dyspnée chronique si les 4 critères suivants sont présents : la cause organique a été exclue ; le score de Nijmegen est supérieur à 23 ; le test de provocation reproduit au moins 2 symptômes habituels du patient ; il existe une hypocapnie ou un temps de récupération de la PetCO

2

après une hyperventilation volontaire supérieur à 5 mn.

Une épreuve fonctionnelle d’exercice peut être réalisée si la dyspnée est liée à l’effort. Dans le syndrome d’hyperventilation, elle est le plus souvent normale et présente alors l’intérêt de contribuer à l’exclusion d’une pathologie organique. Elle peut montrer une élévation des équivalents respiratoires et un déconditionnement à l’effort (12). L’existence d’une hyperventilation induite par l’exercice pourrait déterminer un profil phéno- typique particulier de syndrome d’hyperventilation (2).

Diagnostics différentiels

Les diagnostics différentiels principaux du syndrome d’hyperventilation sont l’asthme, la dysfonction des cordes vocales et le trouble panique (tableau II, p. 112).

L’asthme a une présentation clinique très similaire à celle du syndrome d’hyperventilation, et faire la dif- férence entre les 2 pathologies est particulièrement difficile. Dans les 2 cas, les sujets sont jeunes, rap- portent une dyspnée chronique paroxystique, et le bilan paraclinique est normal. Les arguments pour un asthme sont l’existence d’une atopie, d’une rhinite, de symptômes associés (toux, sifflements), de symp- tômes nocturnes, d’exacerbations, et une efficacité des bronchodilatateurs. Un élément discriminant majeur est la possibilité de mettre en évidence une obstruc- tion réversible des voies aériennes dans l’asthme.

La distinction entre ces 2 pathologies est d’autant

plus difficile qu’elles coexistent chez 30 % des asth-

matiques (13). Dans ce cas, les symptômes d’hyperven-

tilation peuvent être confondus avec des symptômes

d’asthme, menant à une surestimation du non-contrôle

de l’asthme. Le syndrome d’hyperventilation peut aussi

véritablement altérer le contrôle de l’asthme en majo-

rant la perception de ses symptômes et en aggravant

l’obstruction bronchique. Le diagnostic de syndrome

d’hyperventilation doit donc être systématiquement

évoqué devant un asthme dont le contrôle ne s’amé-

liore pas ou insuffisamment malgré l’augmentation du

traitement de fond, et plus particulièrement devant

un asthme difficile, nécessitant un traitement de fond

de palier 4 du GINA, avant de considérer qu’il s’agit

d’un asthme sévère résistant au traitement. Les tests

(5)

MISE AU POINT

Le syndrome d’hyperventilation

diagnostiques du syndrome d’hyperventilation ne sont pas validés dans l’asthme. Une étude a rapporté qu’un seuil de 17 pour le questionnaire de Nijmegen aurait une meilleure efficacité (sensibilité à 93 %, spécificité à 92 %) qu’un seuil à 23 (14). En pratique, cela signifie que les asthmatiques non contrôlés avec un score de Nijmegen supérieur à 17 améliorent le contrôle de leur asthme et leur obstruction bronchique après un trai- tement du syndrome d’hyperventilation. La valeur du test de provocation d’hyperventilation n’est pas connue dans l’asthme. S’il existe une dyspnée d’effort, l’épreuve fonctionnelle d’exercice avec courbes débit-volume présente alors un intérêt majeur, car elle permettra de faire la différence entre une bronchoconstriction et une hyperventilation.

La dysfonction des cordes vocales survient également chez des sujets jeunes et se manifeste par une dyspnée chronique paroxystique. Les particularités cliniques sont le caractère inspiratoire de la dyspnée, une dysphonie et des syncopes. Néanmoins, ces 2 derniers éléments sont rares. Le diagnostic repose sur la visualisation d’un mouvement paradoxal des cordes vocales ou des struc- tures sus-glottiques (adduction lors de l’inspiration) au cours d’une endoscopie laryngée.

Le trouble panique est un trouble anxieux caractérisé par des épisodes paroxystiques de peur intense et de mort imminente. Les attaques de panique s’accompagnent de dyspnée et d’hyperventilation dans plus de 2/3 des cas. Le lien entre attaque de panique et hyperventila- tion ainsi que la haute prévalence de l’anxiété dans le syndrome d’hyperventilation produisent une confusion entre les 2 diagnostics. Le trouble panique se différencie

du syndrome d’hyperventilation par la brutalité et l’intensité des symptômes psychologiques, qui sont au premier plan, et leur sensibilité aux anxiolytiques.

Traitement

Aucun traitement médicamenteux n’a prouvé son effi- cacité dans le syndrome d’hyperventilation. Une étude a suggéré un effet bénéfique des bêtabloquants sur les symptômes. Les études sur les benzodiazépines et les antidépresseurs sont anecdotiques. Aucune de ces études n’est de qualité suffisante pour recommander la prescription de médicaments dans le syndrome d’hyperventilation (15).

Les exercices respiratoires sont la prise en charge communément admise du syndrome d’hyperventila- tion. Ils ont pour objectif de contrôler l’hyperventilation.

Il comportent une rééducation de la mécanique venti- latoire (respiration diaphragmatique) et un apprentis- sage du contrôle volontaire de la fréquence respiratoire.

Toutefois, les techniques utilisées sont hétérogènes et les études, de qualité insuffisante (traitement non standardisé, critères de jugement non validés, absence de contrôle, etc.). Par voie de conséquence, le niveau de preuve est insuffisant et l’offre de soins, rare.

L’information, l’éducation et la réassurance jouent pro- bablement un rôle positif. En revanche, la respiration d’un air enrichi en CO

2

par un masque, traditionnel- lement prescrit dans la forme aiguë, n’a pas d’impact clinique dans le syndrome d’hyperventilation chronique.

Conclusion

Le syndrome d’hyperventilation est une pathologie fréquente et invalidante du sujet jeune. Il est caracté- risé par une hyperventilation chronique responsable d’une dyspnée intense et de symptômes multiples.

Le diagnostic requiert une démarche rigoureuse visant à éliminer une pathologie organique et à mettre en évidence des symptômes d’hyperventilation, une hyper- ventilation et un lien entre symptômes et hyperventi- lation. Bien que les études soient de qualité insuffisante pour établir des recommandations thérapeutiques, elles sont concordantes et suggèrent un bénéfice des exer- cices respiratoires. Néanmoins, la pratique se heurte à une offre de soins insuffisante. ■ D. Nunes déclare ne pas avoir

de liens d’intérêts.

C. Chenivesse n’a pas précisé ses éventuels liens d’intérêts.

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Références bibliographiques

Tableau II. Diagnostics différentiels du syndrome d’hyperventilation.

Diagnostic différentiel Caractéristiques cliniques

Examens complémentaires

Asthme

Terrain atopique, rhinite Toux, sifflements, symptômes

nocturnes Exacerbations Symptômes soulagés par les bronchodilatateurs

Spirométrie : trouble ventilatoire obstructif

réversible

Dysfonction des cordes vocales

Dyspnée inspiratoire Stridor, dysphonie, syncopes

Endoscopie laryngée à l’exercice : obstruction laryngée inspiratoire Trouble panique

Épisodes brutaux Symptômes psychologiques

et sensations de mort imminente au 1

er

plan

Diagnostic posé par

un spécialiste (psychiatre)

(6)

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Références bibliographiques (suite p. 112)

Références

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