Groupe SNES EcoSoc - Note de conjoncture du 11 septembre 2012 - 1/4
Note de conjoncture - Septembre 2012
Malmené par les médias, l’opposition et les sondages, F. Hollande, le 31 août à Châlons-en-Champagne, a fait le constat de l’évidence :
« nous sommes devant une crise d'une gravité exceptionnelle, une crise longue qui dure depuis maintenant plus de quatre ans ».
Au niveau mondial, les prévisions de croissance ne cessent d’être revues à la baisse et l’économie, y compris dans les pays émergents et en voie de développement, semble comme anesthésiée par la menace des problèmes financiers de la zone euro. La croissance baisse même en Chine, au point de remettre en cause sa place de champion du commerce mondial.
En Zone euro, la récession ne cesse de gagner du terrain et concerne maintenant plus de la moitié des pays membres. Si la situation est difficile partout, elle l’est encore plus dans les Etats de la « périphérie » ( Grèce, Espagne et Italie). L ’Allemagne, elle même, est touchée à son tour. La France, n’évite que de justesse la récession puisque sa croissance au 2
èmetrimestre 2012 stagne pour la 3
èmefois consécutive.
Partout la première urgence reste la question de l’emploi qui prend un tour particulièrement dramatique pour les jeunes de « l’Europe du Sud . En France, où le chômage franchit pour la première fois la barre des 3 millions personnes et atteint les 10%, le gouvernement a décidé de «mener la bataille de l’emploi » sur 3 fronts : contrats d’avenir, contrats de génération et réforme du marché du travail, objet d’une négociation entre des partenaires sociaux dont les objectifs s’annoncent à priori très contradictoires.
C’est dans ce contexte que l’exécutif prépare le budget 2013 avec l’objectif de réduire coûte que coûte le déficit public à 3% du PIB.
F.°Hollande a reconnu sur TF1 (9 septembre) que l’effort demandé (30 Md€) serait sans précédent depuis plus de 30 ans et reposerait pour un tiers sur la hausse des prélèvements sur les ménages. La décision de maintenir le gel du barème des impôts, le renoncement, partiel ou non, à certains des engagements de campagne, la réforme à venir du financement de la protection sociale soulèvent bien des inquiétudes, d’autant plus qu’un tel « tour de vis » a toutes les chances de faire entrer le pays, après bien d’autres, dans une spirale de récession et d’austérité.
De plus en plus de voix, au plan politique, syndical, associatif, mais aussi d’économistes, contestent de tels choix qui seront aussi au cœur du débat public dont il est souhaitable qu’il accompagne la présentation au Parlement, en octobre, du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) dans l’Union économique et monétaire.
Au niveau mondial, une économie plombée par la récession européenne
La reprise mondiale s’étant révélée encore plus faible que prévue au cours du 1
ersemestre 2012, le FMI a revu (16 juillet) à la baisse ses prévisions de croissance et annonce pour la croissance mondiale, après les +5,3% de 2010 et +3,9% de 2011, des taux de +3,5% en 2012 et de +3,9% en 2013.
Selon le FMI, 2 lourdes menaces pèsent à court terme sur cette croissance déjà très fragile.
1 – l’aggravation de la situation de la zone euro (on était en juillet dans une phase de forte tension des taux d’emprunts des pays en difficulté de la zone). Le FMI préconise d’accélérer la mise en œuvre des décisions du sommet européen de la fin juin.
2 – le risque d’un « mur bugétaire » (« fiscal cliff ») qui pèse sur les Etats-Unis. Faute d'un accord trouvé après les élections et d'ici la fin de l'année au Congrès, certaines mesures de relance et de réductions d'impôt expireront en même temps qu'entreront en vigueur des baisses automatiques des dépenses publiques, faisant craindre une compression budgétaire qui pourrait être de plus de 4 points de PIB en 2013. Un tel recul du PIB américain aurait des répercussions considérables sur le reste du monde.
Dans les pays avancés, la croissance a été revue à la baisse (+1,4 % en 2012 et +1,9% en 2013) sous l’effet notamment du fléchissement de l’activité en zone euro. La croissance resterait très faible en France et dans une moindre mesure en Allemagne, tandis que l’Italie, l’Espagne et la Grèce continueraient d’être frappés de récession.
Si, dans l’ensemble, les grands pays émergents ont bien survécu à la crise, leurs performances sont en général en régression tandis que la croissance ralentit très sensiblement en Chine, au Brésil, et en Inde. La Russie, pourtant premier exportateur mondial d’hydrocarbures, stagne.
La conjoncture mondiale souffre de l'absence actuelle de pays susceptibles de prendre le relais des pays occidentaux et de la Chine en panne de croissance.
Certes, des pays ignorent la crise ou continuent d'enregistrer des croissances vertigineuses, comme l'Angola et l'Azerbaïdjan, nouveaux champions des exportations de pétrole. Mais ils n'ont pas une taille suffisante pour tirer la conjoncture mondiale en matière d'investissement ou de consommation .
De leur côté, les prévisions de l’OCDE (6 septembre) « font apparaître une nette dégradation des perspectives économiques depuis le printemps dernier ». « Le ralentissement continuera si les responsables ne parviennent pas à traiter la principale cause de cette détérioration, qui est la crise persistante de la Zone euro ». Les taux de
croissance annualisés pour les pays du G7 seraient seulement de +0,3% au 3
èmetrim 2012 et +1,1% au 4
èmetrim. Pour les 3 plus grands pays de la zone euro pris ensemble (Allemagne, France et Italie) ces mêmes taux seraient respectivement de – 1% et – 0,7%, pour le Japon de – 2,3% et 0%. La situation serait plus favorable pour les Etats-Unis avec des taux de +2% et +2,4%
L’OCDE, au delà de la situation de la Zone euro, pointe des risques qui pourraient conduire à une nouvelle révision à la baisse des
prévisions : « l’éventualité de nouvelles hausses des prix déjà élevés du pétrole, une contraction budgétaire excessive, notamment aux États-
Unis en 2013, et une érosion continue de la confiance des consommateurs, liée à un chômage persistant »
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En France comme en Zone euro, les indicateurs économiques sont au rouge
La France continue à éviter de justesse l’entrée en récession. Au 2ème trimestre 2012, comme aux 2 trimestres précédents, le PIB reste stable (0,0 %).
La croissance a perdu son traditionnel moteur : la consommation des ménages recule de -0,2 % au 2
èmetrimestre.
Phénomène exceptionnel, le repli ne concerne pas seulement les biens manufacturés, mais aussi les dépenses de services (hébergement, restauration...).
Dans un contexte de tensions sur le pouvoir d'achat, les Français procèdent à des arbitrages. Si l'Insee s'attend à ce qu'elle reste quasi atone au cours des deux prochains trimestres (+ 0,1 %), elle pourrait ensuite régresser, en raison de la progression des impôts et de la remontée du prix des matières premières.
L'investissement des entreprises (la formation brute de capital fixe FBCF) s'est redressé au 2ème trimestre (+ 0,7 %) après avoir chuté en début d’année (–1,4 %) . Mais cette bonne surprise s'explique surtout par un effet de rattrapage dans les travaux publics après un mauvais début d'année lié à la vague de froid. L’investissement des ménages stagne. Au total l’investissement progresse de +0,6% après avoir régressé de -0,8%
Au total, la demande intérieure finale (consommation et investissement hors stocks) contribue faiblement à l’évolution du PIB°: +0,1 point au 2ème trimestre, après une contribution neutre au trimestre précédent.
Après un déficit commercial record en 2011 (70 milliards d'euros), les déséquilibres restent importants en raison notamment des difficultés de certains des partenaires commerciaux de la France. Sur les six premiers mois de l'année, le déficit a atteint 34,9 milliards d'euros. Les exportations ralentissent globalement et s'orientent même à la baisse vers l'Union européenne (- 0,5 %), notamment vers les pays de l'Europe du Sud.
Au 2ème trimestre, les importations accélèrent nettement (+1,8 % après +0,6 %), tandis que les exportations restent peu dynamiques (+0,2 % après +0,1 %). En conséquence, le solde extérieur se dégrade et contribue de nouveau négativement à l’évolution du PIB (–0,5 point, après –0,1 point).
Les variations de stocks des entreprises contribuent positivement à l’évolution de l’activité : +0,3 point après +0,1 point au 1er trimestre 2012.
Par ailleurs à la fin août les enquêtes de l’Insee relèvent une dégradation du climat conjoncturel dans de nombreux secteurs (services, commerces, réparation automobile, affaires, industrie manufacturière, bâtiment, etc.)
La Zone Euro dans son ensemble entre en récession (-0,2% au T
22012 après 0,0% au T
12012), 10 pays sur 17 de la zone étant en croissance négative. L’Allemagne elle même serait en récession fin 2012 (prévisions OCDE : -0,5% au T
32012 et –0,8% au T
42012).
Chômage, le défi majeur
« Les 3 millions (demandeurs d’emploi sans activité ), c’est déjà fait ; les 10%
c’est déjà fait ». Cette formule choc de M. Sapin (2 septembre) avait certainement pour objectif tactique de faire pression sur les partenaires sociaux qui doivent entrer dans une négociation sur le marché du travail. Elle vise aussi à montrer à l’opinion publique que le gouvernement, qui est jugé par 72% des Français (sondage CSA) comme insuffisamment actif par rapport à la crise et au chômage, a pris toute la mesure du défi majeur auquel il est confronté
En juillet, selon Pôle emploi (28 août), le nombre de demandeurs d'emploi n'ayant pas du tout travaillé dans le mois (catégorie A) a bondi de 41.300 en métropole, soit à un rythme près de deux fois supérieur à celui enregistré le mois précédent, pour atteindre 2,987 millions de personnes. Il s'agit du quinzième mois d'affilée de progression, mais il faut remonter à avril 2009 pour retrouver une dégradation aussi rapide. Cela représente une hausse de +1,4 % sur un
mois et de +8,5 % sur un an. Les chiffres de l’Insee, publiés le 6 septembre, ne divergent que très légèrement : 2,8 millions de chômeurs au sens du BIT avec un taux de chômage de 9,7%.
Le graphique ci-contre montre qu’il faut remonter à 1999 pour retrouver le niveau de chômage actuel. On note sur cette courbe deux périodes de franche baisse, de 1998 à 2000-2001, puis de 2006 à 2008, correspondant à des périodes de reprise économique. On constate aussi la progression très rapide du chômage depuis la crise de 2008.
Un rapport explosif de l’Insee (Sept. 2012) Le niveau de vie en baisse depuis 2010
Le niveau de vie médian (la moitié de la population est au-dessus, l'autre moitié en dessous) des personnes d'un ménage atteint 19.270 €, ce qui représente 1.610 € par mois. Ce montant est en baisse de 0,5% par rapport à 2009 si l'on tient compte de l'inflation.Il faut remonter à 2004 pour enregistrer un tel recul.
Seul, le niveau de vie des 5% de personnes les plus aisées est reparti à la hausse (+1,3%) après avoir stagné en 2009.
La plupart des indicateurs d’inégalités sont à la hausse.
Entre 1996 et 2010, le niveau de vie moyen des 10% de personnes les plus aisées a augmenté de 2,1% par an en moyenne, contre 1,4% pour l'ensemble de la population.
En 2010, 8,6 millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté monétaire (60% du salaire médian, soit 964 euros par mois), la moitié d'entre elles vivant avec moins de 781 euros par mois. Soit + 440 000 pauvres en un an. Le taux de pauvreté atteint 14,1%, en hausse de 0,6 points par rapport à 2009, c’est à dire son plus haut niveau depuis 1997.
Cette hausse de la pauvreté touche plus particulièrement les jeunes de moins de 18 ans : après +0,4 point en 2009, leur taux de pauvreté progresse de 1,9 point atteignant 19,6%.
Les enfants contribuent pour près des deux tiers (63%) à l'augmentation du nombre de personnes pauvres.
Groupe SNES EcoSoc - Note de conjoncture du 11 septembre 2012 - 3/4 Les chiffres sont tout aussi préoccupants pour les chômeurs recherchant activement un emploi, qu'ils aient travaillé ou non dans le mois (catégories A, B, C). Leur nombre progresse de 58.300, soit un bond de 1,3 % par rapport à juin et de 7,9 % sur un an, pour atteindre 4,454 millions de personnes (4,733 millions avec les DOM). Si l’on tient compte des catégories D (chômeurs en stage, en formation ou en arrêt maladie), et E (chômeurs en emploi aidé) on compte désormais, pour la France entière, plus de 5 millions de chômeurs, soit le quart de la population active.
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