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Le Monde comme territoire ; pour une approche renouvelée du Monde en géographie

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Academic year: 2021

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Submitted on 10 Oct 2013

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Le Monde comme territoire ; pour une approche

renouvelée du Monde en géographie

Clarisse Didelon

To cite this version:

Clarisse Didelon. Le Monde comme territoire ; pour une approche renouvelée du Monde en géographie. Géographie. Université de Rouen, 2013. �tel-00871654�

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Université de Rouen

UFR des Lettres et Sciences humaines UMR 6266 - IDEES

Mémoire d’habilitation à diriger des recherches Arrêté ministériel du 23 novembre 1988

Volume 1 :

Le Monde comme territoire,

Contribution à une approche renouvelée du Monde en

géographie

Présenté et soutenu publiquement par :

Clarisse DIDELON-LOISEAU

Maître de Conférences en géographie à l’Université du Havre Membre de l’UMR 6266 – IDEES / CIRTAI

Le 19 septembre 2013 à Mont1Saint1Aignan

Jury :

Michel BUSSI, Professeur, Université de Rouen

Cynthia GHORRA-GOBIN, Directrice de recherche, CNRS

Frédéric GIRAUT, Professeur, Université de Genève

Christian GRATALOUP, Professeur, Université Paris Diderot

Sophie de RUFFRAY, Professeur, Université de Rouen

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Le Monde comme territoire ; pour une approche renouvelée du Monde en géographie

Résumé : L’existence du Monde en tant qu’objet géographique est argumentée dans de nombreux

textes qui sont autant d’invitations à en entreprendre l’analyse. Dans les faits c’est la mondialisation qui est analysée et, le plus souvent, de manière thématique ou en focalisant les recherches sur un espace restreint. Si certains auteurs estiment que le Monde pose de nouvelles questions auxquelles on ne peut répondre avec de « vieilles approches », certains des concepts et méthodes élaborés par les géographes pour l’analyse d’espaces d’échelles plus classiques restent opérationnels, notamment le concept de « territoire ». Considérer le Monde comme territoire c’est admettre, d’une part, qu’il constitue une échelle géographique banale façonnée par des phénomènes matériels et idéels et, d’autre part, que le Monde et l’individu sont des niveaux scalaires pertinents de l’analyse. Ce volume met à l’épreuve le concept de « territoire-Monde ». Il en propose une analyse basée sur le recourt aux méthodes de la régionalisation appliquées aux représentations et pratiques de l’espace mondial. Celles-ci sont très variées et s’articulent dans une vision du Monde riche et complexe qui lui donne une dimension territoriale. Si les méthodes de régionalisation sont indéniablement utiles dans la connaissance du Monde et la mise au jour de certaines de ses structures spatiales, elles ne peuvent permettre d’en saisir certaines représentations et pratiques réellement mondiales qui échappent aux catégorisations aréales de l’espace. Par ailleurs les régionalisations classiques produisent des objets figés et rigides tandis que représentations et pratiques du Monde dessinent des espaces flous aux configurations mouvantes dans l’espace et le temps.

Mots clefs : Monde, territoire, régionalisation, représentations mentales, appartenance spatiale,

pratiques spatiales.

The World as a territory; for a renewed approach of the World in Geography

Abstract: The existence of the World as a geographical object is argued in many texts that are

invitations to analyze it. In practice what is analyzed is globalization, most often in a thematic way or in focusing the researches on a small piece of space. Some authors assess that the World poses new questions that cannot be answered with former approaches. However some of the concepts and methods developed by geographers in order to analyze more conventional scales remain operational, including the concept of "territory". Consider the World as a territory imply to admit that it is ordinary geographical scale shaped by material and ideal phenomena but also that the World and the individual are relevant scales for the analysis. This volume tests the concept of “World-territory”. It proposes an analysis based on the methods of regionalization applied to the mental representations and practices of world space. Both are varied and they combined to produce a rich and complex vision of the World that gives it its territorial dimension. Undeniably, regionalization methods are useful to know the World and to reveal some of its spatial structures. However they did not allow catching some representations and practices that really take place at the World level and cannot be understand with areal categorizations of space. Furthermore conventional regionalization methods produce frozen and rigid objects while representations and practices of the World draw fuzzy spaces with patterns moving in space and time.

Key words: World, territory, regionalization, mental representations, spatial feeling of belonging,

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Remerciements

Je remercie en premier lieu Sophie de Ruffray, que j’ai sollicitée au lendemain de sa propre soutenance d’habilitation pour m’accompagner dans cette aventure. Nos discussions, souvent enthousiastes, ont permis de faire émerger mes démonstrations de leurs retranchements et de les mettre à l’épreuve de la logique… floue.

Ma gratitude va également aux évaluateurs de mon dossier de demande de délégation auprès du CNRS qui m’ont accordé ces deux années sans lesquelles il m’eut été difficile de mener à bien ce travail.

Les analyses présentées ici sont issues de réflexions menées depuis les premières semaines de mon post-doctorat dans le projet ESPON 3.4.1. « Europe in the World ». Elles se sont enrichies au cours du projet EuroBroadMap « Visions of Europe in the

World » : je remercie chaleureusement Claude Grasland de la confiance dont il a fait

preuve en me permettant de coordonner avec lui ces deux projets et à tous les partenaires français et étrangers qui m’ont tant apporté.

Toute la partie sur l’analyse des représentations mentales du Monde n’aurait pu être sans la complicité de Nicolas Lambert avec qui nous avons passé des heures pénibles à collecter, scanner, digitaliser, nettoyer les régions tracées par les étudiants et à mettre en œuvre un procédé pour « griller les patates ».

Je suis reconnaissante envers Yann Richard qui m’a fait prendre conscience que j’étais prête à me lancer dans l’aventure et qui m’a encouragée du début à la fin : j’ai testé sur lui mes premières idées et malgré les charges qui lui incombe il a relu et commenté chacune des pages de ce volume.

Merci enfin, à l’ensemble des membres de l’UMR IDEES pour leurs encouragements, et particulièrement à Michel Bussi pour nous avoir permis de mettre sur pieds le chantier « question de mondialisation » dans le projet quinquennal de l’UMR IDEES. C’est pour nous un espace d’exploration et de réflexions et je remercie mes acolytes Fanny Jedlicki et Arnaud Brennetot pour les échanges au sein de ce chantier, dont ils retrouveront sans aucun doute des traces dans ces pages.

Merci enfin aux rapporteurs et membres du jury qui ont accepté avec gentillesse d’évaluer ce travail et de participer à la soutenance.

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À Laurent et Chloé “If the world was mine I'd paint it gold and green I'd make the oceans orange For a brilliant color scheme I would color all the mountains Make the sky forever blue So the world would be a painting And I'd live inside with you If the world was mine I'd tell you what I'd do I'd wrap the world in ribbons And then give it all to you” M. Gardot, 2009

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9 Table des matières

Table des figures ... 13

Table des tableaux... 15

Introduction, de la mondialisation au Monde, pour une approche renouvelée de l’espace mondial ... 19

La mondialisation et le Monde comme thèmes de recherche ... 19

« Le territoire », un concept pour l’analyse du Monde ? ... 22

Postulats pour l’analyse du Monde comme territoire ... 25

Les composantes territoriales du Monde ... 29

Organisation du volume ... 32

1 Le Monde comme territoire ... 37

1.1 Introduction ... 37

1.2 De l’émergence du Monde … ... 38

1.2.1 Du bouclage du Monde au système-Monde... 39

1.2.2 Un Monde « fini », un Monde connu ... 44

1.2.3 Un espace de représentation... 47

1.3 … à la pensée d’un territoire-Monde ... 53

1.3.1 Mondialisation et territoire : déterritorialisation et reterritorialisation ... 54

1.3.2 Une société Monde ? ... 58

1.4 Conclusion : comment faire la géographie du territoire-Monde ? ... 66

2. La régionalisation comme géographie du territoire-Monde ... 71

2.1. Introduction ... 71

2.2. Régionaliser le Monde pour en faire la géographie ... 72

2.2.1. La régionalisation, un choix paradoxal pour le territoire-Monde ? ... 72

2.2.2. Pourquoi régionalise-t-on quand on est géographe ? ... 74

2.2.3. La régionalisation, une approche pertinente pour le territoire-Monde ... 81

2.3. Les régionalisations du Monde, reflets de l’évolution de la géographie ... 83

2.3.1. Régions naturelles et « classifications » du Monde ... 85

2.3.2. Les régions « homogènes » et « fonctionnelles » ... 89

2.3.3. Régions culturelles et régions « espace vécu » ... 96

2.4. Conclusion : choix méthodologiques pour la régionalisation du territoire-Monde. 99 3. Appartenances spatiales dans le territoire-Monde. ... 107

3.1. Introduction ... 107

3.2. Les appartenances et le Monde ... 108

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3.2.2. Les appartenances spatiales évoluent... 114

3.2.3. Les appartenances spatiales sont multiples ... 118

3.3. Appartenance spatiale ... 121

3.3.1. Les échelles des sentiments d’appartenance ... 121

3.3.2. Sentiments d’appartenance et représentations mentales ... 127

3.3.3. Le poids du centrage dans les représentations ... 129

3.4. Conclusion ... 134

4. Un Monde de représentation(s) ... 139

Introduction ... 139

4.1. Cartes « à main levée » des régions du Monde ... 140

4.1.1. Le reflet des structures perçues du Monde ... 140

4.1.2. Méthodes pour l’analyse des régionalisations mentales ... 142

4.2. Les structures dominantes des représentations du Monde ... 148

4.2.1. Le Monde des terres émergées ... 148

4.2.2. La domination des continents dans les représentations du Monde ... 152

4.2.3. Des mondes d’oppositions et de hiérarchies ... 156

4.2.4. « Un Monde » et « Mondes égocentrés » ... 158

4.3. Synthèse des représentations du Monde... 160

4.3.1. Choix méthodologiques pour la régionalisation des représentations ... 160

4.3.2. Le Monde en 4 régions ... 161

4.3.3. Le Monde en 7 régions ... 164

4.4. Conclusion ... 167

5. Un Monde flou, flou, flou : analyses et représentations. ... 171

5.1. Introduction ... 171

5.2. Un Monde flou, flou, flou… ... 171

5.2.1. Le flou des cartes mentales interprétatives ... 171

5.2.2. Les limites des régionalisations classiques ... 174

5.2.3. Le recours à la logique floue pour l’analyse des cartes mentales interprétatives ... 175

5.3. Des cœurs et des marges : application de la logique floue aux cartes mentales interprétatives ... 176

5.3.1. Les cœurs, des espaces de consensus dans les représentations ... 177

5.3.2. Les franges, des espaces d’indétermination : entre hésitation et désaccord 178 5.3.3. Les zones d’exclusions, des espaces non perçus dans les représentations 186 5.4. Mise en œuvre d’une régionalisation floue ... 187

5.4.1. Principes et intérêt de la régionalisation floue ... 187

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5.5. Conclusion ... 201

6. Pratiques du territoire-Monde ... 205

6.1. Introduction ... 205

6.2. « Pratiquer » le Monde : les mobilités des étudiants internationaux ... 206

6.2.1. La mobilité comme pratique du territoire-Monde ... 206

6.2.2. Intensité et répartition des flux d’étudiants ... 209

6.2.3. Mobilités et représentations ... 213

6.3. Les ressorts des mobilités étudiantes ... 217

6.3.1. Les facteurs des mobilités étudiantes ... 218

6.3.2. Le modèle gravitaire ... 223

6.4. Limites et perspectives d’une modélisation gravitaire des flux d’étudiants à l’échelle mondiale ... 231

6.4.1. Une absence de symétrie des flux ... 231

6.4.2. Questionnement sur la pertinence de la distance ... 232

6.4.3. Échelle mondiale pertinente aux dépens de l’échelle régionale ?... 236

6.5. Conclusion ... 237

Conclusion : Enseignements et pistes pour l’analyse du territoire-Monde... 243

Pertinence du concept de territoire-Monde ... 245

La régionalisation, une piste pour l’analyse du territoire-Monde ... 252

Perspectives de recherches ... 256

Bibliographie générale ... 265

Annexe 1 : régions homogènes et mesures de la ressemblance ... 285

Pourquoi l’homogénéité ? ... 285

Les caractères de la ressemblance... 286

Les mesures de la ressemblance ... 287

Échelle des mailles d’observation et ressemblance ... 287

Annexe 2: Le projet EuroBroadMap, « Visions of Europe in the World » ... 291

Présentation générale du projet « EuroBroadMap » ... 291

Le Work Package 2, « mental maps of students » ... 294

Constitution de l’échantillon ... 294

Contraintes méthodologiques dans la construction du questionnaire ... 295

Le questionnaire ... 300

Echantillon ... 300

Documents et références du projet EuroBroadMap ... 304

Annexe 3 : Les cartes mentales, concept et méthode ... 307

De la ville au Monde ... 307

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Recueillir les représentations, la carte mentale comme méthode ... 311

Annexe 4 : Point méthodologique sur la construction de la base de données sur les flux d’étudiants ... 315

Choix de la matrice ... 315

Population étudiante... 316

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Figure 1 : Production et consommation des « existants exotiques » ... 42

Figure 2 : Une des premières photographies de la Terre ... 45

Figure 3 : les coquilles de l’homme selon Moles et Rohmer ... 49

Figure 4 : Le Taj Mahal à partir de milliers de photos de touristes récupérées sur Internet par l’artiste Corinne Vionnet ... 51

Figure 5 : Diffusion d’Internet en 1999 et 2009 ... 53

Figure 6 : le risque de déconnection d’Internet ... 53

Figure 7 : Divisions du Monde en régions et sous régions de la FAO. ... 78

Figure 8 : les principales zones d’intégration économique en 2012 ... 80

Figure 9 : parties du Monde et continents ... 88

Figure 10 : groupes d’homogénéité socio-culturelle. ... 91

Figure 11 : Le modèle centre-périphérie d’après A. Renaud... 94

Figure 12 : régionalisation de l’espace Monde selon O. Dollfus, 1994 ... 95

Figure 13 : les civilisations, selon la « grammaire » de F. Braudel ... 97

Figure 14 : Les régions du « choc des civilisations », d’après Huntington, 1997 (2000) ... 98

Figure 15 : les « world regions » de M. Lewis et K. Wigen (1997) ... 100

Figure 16 : « Le Monde en ses confins » de P. Poncet (2008) ... 101

Figure 17 : niveaux de coappartenance du Monde avec la ville d’enquête ... 128

Figure 18 : Centrage et déformation dans les représentations mentales de l’espace autour de Van Hornesville ... 130

Figure 19 : régions numérotées « 1 » par les étudiants de 6 pays d’enquête ... 132

Figure 20 : Régionalisation du Monde selon les volumes de la géographie universelle de R. Brunet ... 133

Figure 21 : Synthèse des limites tracées par les étudiants ... 144

Figure 22 : Zone de co-inclusion avec « l’Iran » et avec « Téhéran » selon le mode de sélection et de représentation ... 146

Figure 23 : Tracé des régions comportant le nom « Iran » ... 147

Figure 24 : espaces inclus dans les régionalisations du Monde (maille carrée) ... 149

Figure 25 : espaces inclus dans les régionalisations du Monde (maille étatique) ... 150

Figure 26 : Espaces inclus dans les régionalisations du Monde (maille étatique, résumée à la capitale) ... 151

Figure 27 : Tracés des continents dans les régionalisations en six régions ... 154

Figure 28 : Exemple de localisation de « sous-régions » dans les zones d’indéterminations (« Orient » et « Amérique centrale »). ... 155

Figure 29 : divisions Nord / Sud et Est / Ouest ... 157

Figure 30 : régionalisation selon le niveau de développement. ... 157

Figure 31 : Arbre hiérarchique issu de la classification de la coappartenance des pays aux régions mentales ... 162

Figure 32 : Synthèse des régions tracées par les étudiants en 4 groupes ... 163

Figure 33 : Synthèse des régions tracées par les étudiants en 7 groupes ... 165

Figure 34 : Cœurs et franges des « continents » (mailles carrées) ... 179

Figure 35 : Cœurs et franges des « continents » (maille étatique)... 180

Figure 36 : variation de l’appartenance et zones d’indétermination... 182

Figure 37 : Extension des régions « riche » et « pauvre » et intersection entre les deux ... 184

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Figure 39 : Zone de confusion entre les continents (maille étatique) ... 185

Figure 40 : les zones d’exclusion des régions continentales (maille carrée) ... 186

Figure 41 : Huit groupes d’appartenance issus de la classification floue ... 190

Figure 42 : profils des groupes d’appartenance (8 groupes) ... 190

Figure 43 : structure spatiale des groupes d’appartenance (8 groupes) ... 192

Figure 44 : possibilités d’appartenance aux groupes dans la classification en 8 groupes. ... 194

Figure 45 : valeurs d’appartenance de 6 pays aux groupes produits par la classification floue .. 194

Figure 46 : quatorze groupes d’appartenance issus de la classification floue ... 196

Figure 47 : profils des groupes d’appartenance (14 groupes) ... 197

Figure 48 : structure spatiale des groupes d’appartenance (14 groupes) ... 199

Figure 49 : valeurs d’appartenance du Canada, du Belize et de la Bolivie aux groupes (14) ... 200

Figure 50 : valeurs d’appartenance du Japon, du Bhoutan, de Singapour et du Koweït aux groupes (14) ... 200

Figure 51 : La population étudiante ... 210

Figure 52 : attractivité et émissivité des pays pour les flux d’étudiants ... 212

Figure 53 : attractivité globale et flux d’étudiants ... 213

Figure 54 : attractivité en termes de représentations mentales des pays du Monde ... 214

Figure 55 : le classement de Shanghai en 2009 ... 221

Figure 56 : résidus calculés sur les flux de destination des étudiants chinois ... 229

Figure 57 : résidus calculés sur les flux de destination des étudiants russes ... 230

Figure 58 : résidus du modèle gravitaire sur les étudiants ayant les États-Unis pour destination 234 Figure 59 : résidus calculés sur les flux de destination des étudiants indiens ... 235

Figure 60 : Variation de l’échelle et de l’intensité de l’attractivité observée de 9 pays de destination pour les mobilités étudiantes ... 238

Figure 61 : carte postale australienne représentant le Monde ... 244

Figure 62 : les échelles spatio-temporelles des représentations spatiales ... 258

Figure 63 : les densités de population dans le Monde et en Chine en 2008... 288

Figure 64 : variation de la cohésion des régions selon l’échelle d’observation selon P. Dumolard, 1975 ... 289

Figure 65 : organisation du projet et lien entre les sections de recherché ... 293

Figure 66 : meeting de lancement d’EBM, janvier 2009, séance de réflexion sur le questionnaire ... 296

Figure 67 : la carte en projection polaire utilisée dans l’enquête ... 297

Figure 68 : lieu d’enquête sur les représentations du Monde dans le projet EuroBroadMap ... 299

Figure 69 : Pays de naissance des personnes enquêtées et de leurs parents dont les cartes du Monde sont valides (hors pays d’enquête). ... 306

Figure 70 : carte à main levée utilisée dans l’article de J. Pinheiro (1998) ... 309

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Tableau 1 : Association des rangs 1 et 2 des sentiments d’appartenance ... 125

Tableau 2 : Association des rangs 1 « ex aequo » des sentiments d’appartenance ... 125

Tableau 3 : Relation statistique entre le sentiment d’appartenance déclaré en rang 1 et les caractéristiques des individus ... 126

Tableau 4 : fréquence d’utilisation des noms des continents par pays d’enquête ... 155

Tableau 5 : noms complexes donnés dans un questionnaire ... 158

Tableau 6 : mesure des écarts à l’indépendance du modèle du Chi² sur la relation entre l’attractivité mentale et migratoire ... 216

Tableau 7 : valeur des Chi² sur la relation entre l’attractivité mentale et migratoire ... 216

Tableau 8 : variation des coefficients de détermination (R²) dans les modèles sans interaction spatiale. ... 224

Tableau 9 : variation du R² lors des différentes étapes de l’introduction des variables ... 226

Tableau 10 : coefficients du modèle gravitaire sur les flux étudiants ... 226

Tableau 11 : flux et contre flux (10 flux les plus importants en 2009) ... 232

Tableau 12 : variation des paramètres du modèle selon l’interaction spatiale (distance) et la coappartenance spatiale (ZIE). ... 237

Tableau 13 : consortium engagé dans le projet EuroBroadMap... 291

Tableau 14 : réalisation de l’objectif par ville d’enquête pour les cartes du Monde ... 305

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« Les mots sont des instruments que chacun de nous est libre d’appliquer à l’usage qu’il souhaite à condition qu’il s’explique sur ses intentions » C. Lévi-Strauss, cité par F. Braudel, 1963,

Grammaire des civilisations

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La mondialisation fait partie des thèmes de recherche que les géographes se sont largement appropriés à la suite d’autres représentants des sciences sociales, en particulier les économistes. Cela rend toute approche sur ce thème difficile du fait de l’immensité du champ couvert par la question d’une part et de la masse bibliographique relevant de nombreuses disciplines d’autre part. Nous ne reviendrons pas dans cette introduction sur l’histoire de la mondialisation ni sur son émergence en tant que sujet d’étude (nous y reviendrons brièvement au chapitre 1), même si le travail présenté ici s’inscrit dans une longue tradition de recherches portant sur sa nature et sur son impact sur les sociétés humaines. À aucun moment, dans cet ouvrage, nous ne chercherons à déterminer si la mondialisation est « la manifestation achevée de l’horreur économique » ou « la réalisation d’une promesse de bonheur pour l’humanité qui clôturerait définitivement la marche de l’histoire » comme le feraient les représentants des deux camps opposés décrits par C.A Michalet (2002). Dans le prolongement des réflexions menées par d’autres géographes, nous entendrons avant tout la mondialisation comme un processus. En premier lieu, un processus de mise en relations effective des parties du Monde entre elles (Arrault, 2007) ; ensuite, un processus de production d’un espace géographique mondial (Lévy et Lussault, 2003, Arrault, 2007, Lévy, 2008, Grataloup, 2008,) ; un processus, enfin, qui a « remis en question l’ensemble des outillages des présupposés épistémologiques et méthodologiques en faisant advenir un « nouvel » objet géographique » : le Monde. (Lefort & Moriniaux, 2006).

La prise de conscience du Monde, le fait qu’il devienne un objet de représentation fait apparaître la mondialisation comme un phénomène inédit (Laïdi, 2000). Chercher à définir le Monde est à la fois relativement simple et particulièrement difficile. Relativement simple car c’est un objet qui correspond à la planète Terre prise dans son ensemble (Brunet, Ferras et Théry, 1993, Levy et Lussault, 2003). Pour le distinguer du sens général du « monde » (c’est-à-dire la somme de tout ce qui est sur la terre (Levy, Lussault, 2003)), les auteurs préconisent l’utilisation de la majuscule lorsque l’on parle du Monde en tant qu’espace de l’humanité. Mais définir le Monde est aussi particulièrement

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difficile parce que, comme l’écrit D. Retaillé (1998), « une définition géographique du Monde ne peut se passer de lever les implicites philosophiques ou théologiques, de frôler au moins les premières questions, celles qui restent sans réponse, et qui, par défaut conduisent parfois à d’insensées spéculations ». Il faut toutefois prendre garde à ne pas verser dans le holisme qui conduit à « dériver vers l’irrationnel et le totalitaire, l’inconnaissable et la quête d’une essence, voire d’une âme de la totalité » (Brunet, 2001) et qui relève alors plus de la religion que de la science.

L’existence du Monde est affirmée, justifiée, argumentée par de nombreux géographes dont les textes constituent autant d’invitations à se lancer dans l’analyse de cet objet. O. Dollfus, par exemple, affirme, dès les années 1990, son existence en tant que système, mais surtout en tant qu’espace contenant tous les autres espaces et articulant pavages et réseaux (1990, 1994). Dans « Le Système Monde » (1990), il adopte une démarche « moins commune (…) qui prend le Monde comme un tout, objet propre d’analyses géographiques ». Il n’en reste pas moins que, parmi les productions géographiques académiques contemporaines, les analyses du Monde en tant que tel sont plutôt rares. Dans les faits, les analyses sur le Monde sont le plus souvent réduites à l’une des dimensions particulières de la mondialisation : celle des échanges. Par ailleurs, la poignée de thèses soutenues chaque année portant sur la mondialisation se concentrent généralement sur un aspect particulier qui a trait le plus souvent aux systèmes de relations (les migrations, les flux marchands ou financiers, les relations diplomatiques), aux impacts de la mondialisation dans des secteurs d’activité (la pêche, le tourisme) ou dans un espace particulier (une ville…) ou encore elles sont menées dans un esprit de comparaison des lieux qui composent le Monde. La thèse de J.B. Arrault (2007) qui fait figure d’exception, interroge dans une approche épistémologique l’émergence du Monde comme objet. Il montre par exemple que « [Vidal de la Blache] suit en particulier la mise en place d’un réseau mondial de circulation, et son emploi de l’expression « réseau mondial » suggère bien qu’il était sensible à l’émergence d’une réalité géographique nouvelle, d’échelle mondiale, qui bouleverse les façons de voir et de penser le Monde ».

En géographie, peu d’études analysent le Monde, en tant que tel, comme produit de la mondialisation. Dans le même temps, « l’objet Monde » est l’une des perspectives de recherche envisagées par les sociologues en tant que réalité sociale d’extension planétaire (Martin, Metzger, Pierre, 2003), tandis que la géohistoire a commencé, à partir des années 2000-2001, à analyser « l’histoire de l’humanité à très grande échelle géohistorique et temporelle » (Dagorn, 2008). Les raisons de cette désaffection de la part des géographes sont nombreuses. Pour N. Hiernaux (2001), les autres disciplines sont avantagées par le fait d’être plus spéculatives que la géographie « qui exige une connaissance précise de certaines dimensions (…) ». La discipline qui exerce pratiquement un monopole sur l’analyse de la mondialisation et du Monde est l’économie. Presque toute la recherche sur la mondialisation est incluse dans une perspective financière (Laïdi 2000, Michalet 2002, Arrault, 2007) et, comme le souligne O. Vilaça, (2008), il est parfois difficile de se défaire de cette approche : « À ceux qui objectaient que tout dans la mondialisation ne relevait pas de ce domaine [la finance] il était répondu que c’était des aspects intéressants

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et qu’il faudrait les développer, mais que, malheureusement, la finance dominant tout, ces autres aspects étaient très secondaires ». Enfin, les manuels de géographie sur la mondialisation les plus diffusés font la part belle à la dimension économique de la mondialisation (firmes internationales, investissements directs étrangers, etc.).

D’autres raisons, souvent plus pragmatiques, expliquent cette apparente désaffection pour

le Monde surtout en ce qui concerne la réalisation de thèses1. L’une des premières raisons

invoquée est celle des bases de données, qui sont parfois difficiles à obtenir à l’échelle mondiale, surtout hors des domaines de l’économie (nous reviendrons sur ce point dans ce volume). Quand elles existent, elles ne sont pas sans poser problème à l’échelle mondiale. Les indicateurs qu’elles contiennent, quand ils ne font pas partie des plus courants, sont rarement harmonisés (voir par exemple comment varie la définition des actifs par pays). De plus, la maille de collecte des données est celle des États ce qui, en plus de poser une contrainte souvent dommageable pour la finesse de l’analyse n’est pas

sans poser des problèmes de MAUP2. Or la durée des thèses étant courte, les doctorants

ne se lancent pas dans une thèse, ou alors très rarement, sans avoir la certitude préalable de la disponibilité de données de bonne qualité, ce qui les conduit le plus souvent à préférer des thèmes déjà bien explorés. De plus, sur les thèmes pour lesquels il existe déjà des données, il peut sembler parfois relativement vain de produire des analyses thématiquement sinon méthodologiquement redondantes avec celles menées dans le cadre des grands organismes qui ont une place éminente et légitime tels que l’UNPP, le FMI, la FAO, la Banque mondiale, etc. et qui sont eux-mêmes les principaux producteurs de ces données.

La question du terrain est parfois également soulevée : où faire du terrain puisque le Monde est l’ensemble de l’espace humain ? Évidemment, on pourrait arguer que le Monde est partout et, donc, ici comme ailleurs, mais cela ne saurait satisfaire les puristes du terrain, ceux pour qui « on fait d’abord de la géographie avec ses pieds ». C’est probablement l’une des raisons pour lesquelles beaucoup de thèses sur la mondialisation portent sur l’impact de la mondialisation dans un lieu du Monde.

Pourquoi dès lors ne pas se contenter d’une approche plus « spéculative » ? Cela nous ramène à la question de l’état de l’art, évoquée dans les premières lignes de cette introduction. La masse des choses écrites sur la mondialisation est considérable, et cela a, sans conteste, un aspect très intimidant. Non seulement il y a beaucoup de « produits », mais surtout, nous l’avons vu, dans une large variété de disciplines : économie, science politique, sociologie, anthropologie et géographie, ce qui laisse imaginer la somme des connaissances à acquérir avant de se sentir légitime pour écrire quelque chose sur le Monde. Cela est d’autant plus compliqué que, et c’est un point important, la mondialisation et le Monde sont des domaines où la frontière entre l’approche 1111111111111111111111111111111111111111 1111111111111111111

1 Certains des arguments présentés ici sont issus des débats qui ont eu lieu lors des « géopoints » et

« géoforum » 2012, où nous avons présenté des communications portant partiellement sur ce thème.

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MAUP : Modifiable Area Unit Problem (Openshaw, 1984). Cette expression, rarement traduite, soulève le problème des biais statistiques engendrés par l’utilisation de données agrégées.

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scientifique et l’idéologie est parfois ténue : les productions universitaires sont mêlées à beaucoup de pamphlets contre ou d’odes à la mondialisation, dont certains sont caractérisés par de forts accents prophétiques. Certains universitaires eux-mêmes entretiennent la confusion des genres. Souvent, ceux qui écrivent sur le Monde sont ceux qui sont déjà « installés » d’un point de vue académique, et parfois les ouvrages qu’ils produisent sur le sujet s’affranchissent de toute règle académique (comme ceux de Z. Bauman (2007) ou E. Morin (1993)). Ils semblent s’exprimer le plus souvent à titre personnel et certains ouvrages sont véritablement des plaidoyers vibrants comme « Terre-Patrie » de Morin (1993).

Enfin, le déficit de thèses sur le Monde trouve peut-être également une part d’explication dans un facteur pragmatique, celui de l’insertion souhaitée (et souhaitable) du jeune docteur sur le « marché du travail ». Pour cela, il faut coller au plus près des profils des postes universitaires. Ces profils de poste sont marqués par des effets de « mode », avec des thèmes très spécialisés3 correspondant à des maquettes pédagogiques conçues pour permettre aux étudiants de trouver un emploi : aménagement, politique publique, SIG, développement durable, etc. Dans ce contexte, le Monde n’est pas un créneau porteur d’autant plus que, prétendre analyser le Monde, c’est embrasser consciemment et volontairement la multiplicité et la pluri-dimensionnalité des phénomènes, c’est peut-être s’intéresser à tout et n’être spécialiste de rien, alors que les profils de postes, en

particulier ceux de maître de conférences, sont actuellement des profils de spécialistes4.

Si les analyses portant véritablement sur le Monde restent relativement rares en géographie, il nous semble que cette approche devrait, au contraire, être privilégiée. La société dans laquelle nous vivons est caractérisée par un fort niveau de connexion avec le reste du Monde et, si cette situation n’est pas totalement inédite, la prise de conscience du Monde qui en découle l’est. Le Monde existe désormais, nous y reviendrons au chapitre 1, comme espace et comme objet de représentation. Dès lors, les géographes ont les compétences nécessaires pour produire des analyses, mais peut-être et surtout, des connaissances et des enseignements sur le Monde.

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Pour I. Lefort & V. Moriniaux (2006), « la mondialisation a inventé le Monde. Les géographes s’en saisissent. Ce nouvel objet leur pose de nouvelles questions. Ils ne peuvent répondre avec leurs vieux outils ». Dès lors, comme J.B. Arrault (2007) se pose la question de savoir « ce que pourrait être la mondialisation d’un point de vue géographique », nous nous interrogeons sur l’approche à mettre en place pour analyser le Monde en tant que géographe. Si nous admettons que le Monde, considéré en tant 1111111111111111111111111111111111111111 1111111111111111111

3 Voire extrêmement « pointus » quand ils sont « fléchés ».

4 Par ailleurs, qui pourrait oser affirmer devant une assemblée de collègues universitaires qu’il/elle est

« spécialiste du Monde » ? S’il/elle osait, n’y aurait- il pas quelques sourires ironiques ? Mais dans le cas d’un jeune docteur candidatant sur un poste de MCF, est-ce que l’ironie ne se transformerait pas alors en franche rigolade devant un tel niveau de prétention ?1

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qu’objet, peut poser des questions particulières, il nous semble pourtant que certains des outils et des concepts élaborés par les géographes pour l’appréhension, la connaissance voire la gestion d’espaces d’échelles plus classiques restent opérationnels. Nous pensons notamment que le « territoire » peut s’avérer particulièrement opérationnel pour analyser le Monde (chapitre 1) et ce d’autant plus que sa polysémie en fait un concept facilement adaptable à différents contextes et différentes échelles. D’ailleurs, un certain nombre de nos prédécesseurs ont déjà fait se rejoindre, dans une même phrase, les mots « Monde » et « territoire ».

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Les définitions du « territoire » dans les dictionnaires, les manuels et les articles, se rejoignent sur un point : la polysémie du concept, tant en géographie que dans les autres sciences sociales voire dans la « vie civile ». Le symptôme, le plus flagrant peut-être, de cette polysémie est l’entrée « territoire » du Dictionnaire de la géographie de J. Lévy et M. Lussault (2008), qui propose successivement les articles de trois auteurs. En premier lieu, J. Lévy le considère comme un « espace à métrique topographique » et présente dans son entrée, 8 définitions classiques (synonyme d’espace, de lieu ; option épistémologique, espace contrôlé-borné, métaphore de l’animalité ; espace approprié ; périodisation historique), avant de les critiquer et d’en proposer une nouvelle. Ensuite, B. Derbarbieux définit le territoire « comme un agencement de ressources matérielles et symboliques capables de structurer les conditions pratiques de l’existence d’un individu ou d’un collectif social et d’informer en retour cet individu et ce collectif sur sa propre identité ». J.P. Ferrier, enfin, le définit en tant que « toute portion humanisée de l’espace terrestre ». De même, l’encyclopédie électronique Hypergéo propose une définition de territoire signée B. Elissalde (2005), un « historique du territoire » non signé, ainsi que trois fiches « le territoire selon… » qui proposent un résumé de la manière dont le territoire est défini par trois auteurs (C. Raffestin, G. Di Méo et M. Le Berre).

Le mot « territoire » vient du latin territorium, lui-même dérivé de terra, la terre. Dans son sens premier, territorium est un morceau de terre approprié (Le Berre, 1995). Peu utilisé, il a gardé ce sens politique et juridique pendant longtemps. Ainsi, à l’époque moderne, sa dimension juridique était première et trois idées pouvaient lui être associées selon M. Le Berre (1995) : la domination liée au pouvoir du prince, l’aire dominée par ce contrôle territorial, les limites matérialisées par des frontières. De cette acception juridique et politique dérive l’expression « aménagement du territoire ». Puis les naturalistes analysant les comportements des animaux ont commencé à utiliser la notion de territoire comme la « conduite d’un organisme pour prendre possession de son territoire et le défendre contre les membres de sa propre espèce » (Hall, 1978) et font émerger celle de territorialité. La territorialité doit être entendue comme une valeur ou un système de valeurs attaché à un espace, « voire comme le sentiment d’appartenance à celui-ci » (Monnet, 2010). Les deux acceptions de ce concept vont passer par l’anthropologie et la sociologie, avant de revenir à la géographie et de connaître une

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revitalisation (Elissalde, 2005), voire une explosion de son utilisation à la fin des années 1970 et dans les années 1980, conjointement à un élargissement de son champ sémantique. En tout état de cause, les acceptions politiques et éthologiques sont souvent affirmées, même si B. Debarbieux considère que l’une relève plutôt de la littérature française et l’autre de la littérature anglophone. F. Giraut (2008) souligne, quant à lui, qu’« en géographie, l’usage proliférant du terme en fait de toute façon un mot-valise (buzzword) qui peut être utilisé dans des acceptions qui vont du plus extensif au plus restrictif ». Le territoire est donc un concept dont le flou sémantique n’a de cesse d’être souligné par ceux qui l’approchent. Ce flou est savoureusement mis en lumière par le dialogue fictif de « Proter » et « Sceptiter » (Debarbieux, 2009) lorsque ce dernier déclare : « Revoici donc la confusion potentielle ! Dès lors tout peut être territoire. On ne saura jamais où commence ni où cesse la classe d’objet ».

À l’heure actuelle, les définitions sont particulièrement nombreuses et complexes et reflètent bien la polysémie du concept. Il serait vain de vouloir élaborer ici notre propre définition du territoire mais, avec un opportunisme assumé, nous choisissons de tirer parti des définitions proposées par d’autres auteurs avant nous pour poser la question de savoir si « la classe d’objet » territoire ne peut finir (ou commencer, selon la perspective dans laquelle on se positionne) à l’échelle mondiale et quelles en seraient les composantes d’un point de vue conceptuel.

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A priori, l’idée que le Monde puisse constituer un territoire ne semble pas des plus faciles à justifier. Pourtant, les deux mots apparaissent souvent ensemble dans des paragraphes d’articles ou d’ouvrages portant sur la mondialisation. De même, la notion de « territoire-Monde » est parfois évoquée, ces dernières années, en conclusion d’ouvrages ou d’articles de géographes. Dès 1995, à la fin de sa définition du « territoire », M. Le Berre, (1995) énonce que les « géographes parlent aujourd’hui d’un système Monde dont la Terre est le territoire et l’humanité, le groupe social : on peut ainsi analyser en termes d’autopoïèse le territoire-Terre, géré et pratiqué par une humanité consciente d’appartenir à une même entité et d’avoir des objectifs communs ».

Mais l’idée d’un territoire à l’échelle mondiale est développée plus tard, à partir des

années 20005. En 2001, R. Brunet, décrit la géographie comme « la science qui étudie le

Monde en tant que territoire de l’humanité, constamment produit par elle », tandis qu’en 2006, Y. Guermond s’interroge sur l’émergence d’un sentiment d’identité planétaire, l’une des composantes de la notion de territoire :

« les permanents brassages contemporains de la population permettent de moins en moins d'appliquer une identité sociale à une portion d'espace, du moins au sein du Monde

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On retrouve régulièrement ce questionnement de manière chez les anthropologues qui s’intéressent à la mondialisation, notamment A. Appadurai (2001), M. Augé (2006) et Z. Bauman (2007).

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occidental, et nous savons tous bien que, par la force des choses, nous allons inévitablement vers un sentiment d'identité planétaire »,

En 2008, C. Grataloup énonce que : « (…) ce qui est peut être un tournant dans l’histoire du Monde, c’est que depuis quelques décennies, il semble bien qu’il devienne aussi un territoire ». À la même date, pour O. Vilaça (2008), « le Monde est à la fois un territoire, un réseau, une aire, un lieu ». Enfin, en 2011, C. Grataloup, à nouveau, s’interroge sur la pertinence d’un territoire à l’échelle du Monde :

« Si l’on ne se contente pas, pour le mot « territoire » du sens restreint dérivé de l’étendue d’un État-nation, d’une portion de la surface terrestre à l’étendue continue et aux limites nettes, mais qu’on le comprend comme le rapport d’une société à la surface terrestre, la dimension géographique de son identité, alors on peut affirmer qu’il n’y a d’histoire que territoriale (…). Mais plus généralement, on ne saurait réfléchir aux conditions géographiques de l’histoire mondiale en ignorant la dimension territoriale. En particulier, se pose la question de la pertinence de la notion de territoire à l’échelle mondiale ».

Mais, ces évocations sont le plus souvent des questions, des pistes offertes à l’analyse. Ainsi, J. Levy & M. Lussault posent la question suivante : « La conscience [du bouclage de la terre] produit (…) une société à la dimension du Monde ? Transforme-t-elle le Monde en une unité, un territoire ou mieux, un lieu ? Les questions courent mais les réponses peinent à s’affirmer6 ». Dans ce volume, nous cherchons à suivre cette piste ouverte et à répondre à la question de la pertinence du territoire-Monde.

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L’objectif principal de ce volume consiste donc mobiliser ce concept de « territoire » pour analyser le Monde, au-delà du système spatial qu’il constitue déjà (Dollfus, 1990, Brunet, 2001, Wallerstein, 2005). Il s’agit de tester sa validité dans ce contexte et de contribuer à la mise en place d’une méthodologie pour analyser le Monde. Pour suivre cette approche, il nous semble nécessaire de poser trois postulats que nous présentons ici.

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En 1979, dans un entretien au journal Le Monde, Claude Lévi-Strauss craignait que « le Monde d’aujourd’hui, par sa densité, sa complexité, le nombre incroyablement élevé de variables qu’il implique, n’ait cessé d’être pensable, au moins de façon globale » (cité par Dagorn, 2008). Cette posture relativement courante, cette crainte face à la complexité du monde (sans majuscule) fait probablement partie du faisceau de raisons qui explique le déficit d’analyses sur le Monde que nous avons évoqué précédemment et le fait que l’on se contente le plus souvent d’intégrer « la dimension mondiale dans l’étude d’un espace ou d’un thème » (Arrault, 2007). Toutefois, et c’est la voie ouverte par des auteurs tels qu’O. Dollfus, D. Retaillé, C. Grataloup et J. Lévy, il est possible de prendre le contrepied 1111111111111111111111111111111111111111 1111111111111111111

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de cette posture et d’estimer qu’à l’inverse, « c’est parce que le Monde est dense, parce

que le Monde est complexe, parce que le Monde contient désormais un nombre

incroyablement élevé de variables qu’il est désormais pensable » (Dagorn, 2011) et, comme l’écrit P. Poncet (2008-a), « Avant, il ne pouvait y avoir de Monde parce que l’espace mondial n’était pas suffisamment dense : les acteurs (…) ne créaient pas assez d’espace – à la fois en quantité et en qualité – pour permettre l’existence d’un objet-Monde ».

Notre premier postulat est donc de considérer que le Monde est une échelle géographique banale. On pourrait même, dans une certaine mesure, affirmer qu’il est plus simple que les autres échelles puisqu’il est plus facile à délimiter. Les activités humaines sont circonscrites à l’intérieur de l’espace terrestre qui n’a guère de confins, à part l’espace proche où vaquent une armée de satellites et, parfois, quelques astronautes, et le système

solaire où l’on envoie des sondes d’exploration dont l’une a fini par sortir78. Enfin, même

si l’on ne peut nier qu’il est doté d’un niveau certain de complexité, le Monde n’est pas plus complexe que les autres niveaux spatiaux. Il s’agit d’une posture derrière laquelle il est facile de se retrancher et qui favorise les approches thématiques ou locales de la mondialisation et du Monde. Dépasser l’impression de complexité est une démarche que l’on fait plus facilement pour des objets de niveau spatial inférieur. Par exemple, si on considère la France comme une entité dont on va analyser l’espace, la question de la complexité est rarement posée ; si on considère la France comme un regroupement de régions, de départements, de pays, de terroirs, d’aires urbaines, de lieux, qui s’emboitent et se recouvrent partiellement, d’acteurs de toutes natures qui interagissent en cohérence ou en contradiction, on considère alors que l’on est face à un fort niveau de complexité, mais que la tâche n’est pas insurmontable. Dans le même temps, les théoriciens de la complexité mettent en œuvre des méthodes issues de ce champ pour analyser des espaces beaucoup moins étendus comme un territoire urbain.

Dès lors, comme O. Vilaça (2008), nous choisissons de considérer que le Monde « n’est pas plus compliqué que ses parties, ce qu’on pourrait croire si on l’imaginait comme la réunion de tous les bric-à-brac qu’il inclut. Il est aussi complexe, mais pas plus que ses éléments, et sa complication éventuelle n’est que le signe de nos limites à le problématiser et à l’analyser ». Cela implique donc de dépasser la vision du Monde et de prendre le Monde comme un tout, ce qui, à en croire Dollfus (1990), n’est pas une démarche commune. Ce serait pourtant selon Ptolémée la véritable définition de la géographie (Brunett-Hall, 1935)9 et nous considérons que c’est l’un des enjeux face auquel se trouve notre discipline. Toutefois cette approche ne sera pas nécessairement aisée et C. Grataloup (2011) met en garde sur le fait que l’« on risque constamment de

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7 Cette présence « extra-terrestre » n’est rien à l’échelle de l’univers (ou même de la galaxie), même si cela

fait de nous une « espèce spatio-pérégrine » du point de vue d’Arthur C. Clarke (cycle « Rama »).

8 Lancée le 5 septembre 1977, Voyager 1 est désormais sortie du système solaire. Le 29 novembre 2012, la

sonde se trouve à environ 123,40 unités astronomiques de la Terre (source : Wikipédia)

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retomber dans la confusion entre la somme de tous les faits sociaux, d’une part, et ce niveau social bien particulier produit par l’interconnexion des sociétés d’autre part ».

12CEB2375EC6923243E7AA3CE53F23CA7A23E456232436F23 Si c’est notre incapacité à problématiser et à analyser le Monde qui nous le rend complexe, alors se pose la question de savoir quelle posture adopter afin de pouvoir considérer que l’on est face à un objet simple et quels sont les moyens de le problématiser. L’un des problèmes, encore une fois, vient du découpage des recherches sur le Monde en approches thématiques ou méthodologiques, comme le souligne I. Wallerstein en 2004 :

« Le problème [de la compréhension du Monde] vient en partie du fait que nous avons étudiés ces phénomènes comme des champs séparés, que nous avons qualifié – la politique, l’économie, la structure sociale, la culture – sans nous préoccuper de savoir s’ils ne correspondaient pas à des constructions mentales davantage qu’à des constructions réelles. Etudiés séparément, ces phénomènes sont pourtant si étroitement liés que chacun se fonde sur l’existence des autres, influe sur les autres et reste incompréhensible si les autres ne sont pas pris en considération ».

L’enjeu est donc de réintégrer à la fois les morceaux d’espace mais aussi les différents phénomènes qui contribuent à l’organisation de l’espace géographique dans une approche globale. En ce qui nous concerne, compte tenu de notre formation et de notre parcours scientifique antérieur, les phénomènes « matériels », ceux que l’on peut plus ou moins aisément localiser, décrire, mesurer et introduire dans des modèles de statistique spatiale, nous sont pour le moins familiers. Ces phénomènes couvrent plusieurs thématiques couramment mobilisées dans l’analyse de la mondialisation, comme la répartition des richesses, des populations, des productions, des équipements en infrastructures de transport ou de communication, ou encore la structuration des flux de personnes, de capitaux ou de biens, etc. Pour autant, cette approche « matérielle » ne nous semble aujourd’hui plus suffisante, notamment dans l’objectif d’analyser le Monde. En effet, pour M. Castells, évoqué par Martin, Metzger & Pierre (2003), deux forces structurent le Monde qui est en train de naître de la mondialisation : l’information et l’identité. Ces deux « forces » nous semblent indissociables (nous y reviendrons au chapitre 1) et le concept « d’identité » invite à introduire dans l’analyse une dimension subjective, à porter attention aux faits de représentations (Buttimer, 1969, Claval, 2004). Dès lors, certaines approches mises en œuvre en géographie (notamment en géographie dite « sociale » ou en géographie « culturelle ») nous semblent offrir des pistes prometteuses pour l’analyse du Monde en tant qu’objet dans la mesure où l’un de ses buts énoncés est de « décrire et expliquer les aspects de la vie en société qui contribuent à la différentiation du Monde et à l’organisation de l’espace » (Claval, 2004). Selon Di Méo & Buléon (2005), il s’agit peut-être, simplement, des approches mise en œuvre dans « la géographique actuelle » qui :

« met l’accent sur le nécessaire enrichissement de ses méthodes, sur son besoin de dépasser le stade d’une discipline trop comptable des seuls faits concrets et visibles, trop descriptive,

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s’abandonnant trop facilement au mirage des seules lois (matérialistes) de la nature et de l’espace. N’aspire-t-elle pas depuis, quelques décennies, à intégrer dans ses modèles explicatifs, la sphère psychologique et sociale, l’univers des cultures et des représentations, celui des idéologies (territoriales en particulier) et des forces formées par tous ces pouvoirs qui s’emparent de l’espace et dispose des hommes ? ».

Ainsi, notre deuxième posture sera d’analyser conjointement, autant que faire se peut, les aspects « matériels » et « idéels » du Monde qui contribuent à son organisation en tant qu’espace. Ce choix ne sera pas le plus facile à tenir et certains auteurs comme Di Méo & Buléon (2005) mettent en garde ceux qui s’y risquent quand ils écrivent que : « cette exigence d’une approche globale qui nous invite à ne négliger ni l’angle matériel, ni l’angle idéel des réalités géographiques, risque fort de souffrir de la partition, même provisoire et méthodologique, de ces deux registres si complémentaires du sens ».

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De manière à intégrer les deux postulats précédents, d’une part considérer le Monde comme une échelle géographique banale et d’autre part prendre en compte les phénomènes matériels et idéels qui façonnent l’espace, nous avons choisi de privilégier

deux niveaux scalaires particuliers, l’individu et le Monde10, et de fonder notre approche

sur l’analyse des relations qu’ils entretiennent. C’est, en quelque sorte, se faciliter les choses puisque selon D. Retaillé (1997), « il n’existe que deux unités incontestables : l’individu et le Monde. Tous les objets intermédiaires sont contingents, soumis à la production sociale d’unité ou à l’hypothèse du géographe ». Par ailleurs, pour certains auteurs comme C. Wihtol de Wenden (2009), la mondialisation elle-même contribue « à mettre en avant l’individu revendiquant son droit à la mobilité, aux identités multiples et à la citoyenneté plurielle face à l’État-nation ». Toutefois, l’analyse des composantes matérielles et idéelles du territoire-Monde n’est pas sans poser un épineux problème théorique sur la pertinence du choix de l’individu. En effet, M. Le Berre (1995) dans son article sur le « territoire » dans l’encyclopédie de géographie écrit que :

« La géographie peut être considérée comme la science qui étudie toute portion de la surface terrestre, dotée d’une certaine identité, structurée, organisée par les sociétés humaines (Chamussy et al. 1977). Une telle définition fait de la géographie une des sciences sociales. Comme leur nom l’indique, ces dernières s’intéressent aux sociétés plus qu’aux individus. (…). Les rapports d’un individu à un lieu ou un ensemble de lieux ne sont donc pas considérés ici comme du domaine de la géographie ».

Toujours dans cette perspective, R. Brunet, R. Ferras & H. Théry (1992) affirment qu’en tant que « concept relevant de la socialisation de l’espace, le territoire n’est pas de nature individuelle ». Toutefois, si la société n’est pas la somme des individus, un individu appartient de fait à différents groupes sociaux dont il se réclame (Le Berre, 1995) et avec lesquels il partage des représentations. Ainsi, « chaque personne est enserrée dans un 1111111111111111111111111111111111111111 1111111111111111111

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C’est également ce que nous essayons de faire dans le cadre du chantier « mondialisation » lancé en 2012 avec un certain nombre de collègues de différentes disciplines de l’UMR IDEES.

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entrelacs de déterminations et n’est que partiellement un individu ; elle est « sous influence » et membre de groupes multiples, formels ou informels » (Brunet, 2001).

Puisque la production de l’espace est « une affaire fondamentalement sociale » (Brunet, 2001), nous recourrons dans ce volume à des approches agrégeant des individus qui nous semblent représentatifs de groupes sociaux. Ils seront analysés par le biais de leurs représentations et de leurs pratiques spatiales du Monde et nous jugeons que cette approche est pertinente pour tester l’existence du Monde comme objet, notamment comme objet de représentation. Ce faisant, il nous semble que nous rejoignons les

préconisations de Di Méo & Buléon11 sans toutefois nous attacher à l’analyse d’individus

particuliers et en ne perdant pas de vue que des comportements ou des représentations agrégées ne font nullement des comportements ou des représentations de groupe. Enfin, cette approche par l’agrégation d’individus soulève des problèmes méthodologiques que nous aborderons régulièrement dans ce volume.

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Suivant les pistes ouvertes et en nous appuyant sur les postulats définis précédemment, nous allons approcher le Monde en fondant notre analyse sur le concept de territoire et sur l’hypothèse de l’existence d’un territoire-Monde. Pour cela nous allons revenir sur les définitions polysémiques du territoire. Parmi celles-ci, certaines composantes du « territoire » sont affirmées de manière récurrente chez de nombreux auteurs. Trois se dégagent et semblent particulièrement pertinentes pour une analyse du Monde comme territoire. En premier lieu, la double dimension « matérielle » et « idéelle » que nous souhaitons privilégier implique que « le territoire est l’aire appropriée et investie par une communauté, une société, qui y vit, en tire ses ressources et en assure la gestion et l’aménagement » (Meysenq, 2001). Cette double composante se traduit par l’appropriation d’une part, et le sentiment d’appartenance d’autre part (Ozouf Marignier, Robic, 2008). À ces dimensions les plus fréquemment citées, nous proposons d’en ajouter une troisième qui donne, en quelque sorte, sa consistance au territoire et contribue à son organisation spatiale : la pratique de ce territoire.

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L’une des premières composantes du territoire à prendre en compte est celle de l’appartenance, dans le sens où un territoire « c’est de l’espace marqué par le groupe » (Le Berre, 1995). Cela signifie que l’on accepte l’une des hypothèses de D. Retaillé (1997) à savoir que « le territoire est un support d’unité et d’identité ». On retrouve cette idée chez H. Théry, (2007) qui définit le territoire comme un « espace géographique

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11 « Une géographie digne de ce nom ne fait plus l’impasse des représentations sociales qui façonnent le

Monde et ses acteurs ou agents. Elle intègre dans ses modèles le vécu de l’homme habitant, producteur, consommateur, agent et acteur etc. » (2005)

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approprié et occupé par un groupe humain qui s’y identifie et fonde sur lui une partie de son identité parallèlement à l’instauration d’un pouvoir légitime ». Nous ne réduirons pas l’identité d’un individu ou d’un groupe à sa relation à un espace donné, et nous privilégierons dans ce volume l’utilisation de l’expression d’« appartenance spatiale » ou d’« appartenance territoriale » qui, comme le souligne F. Guérin-Pace (2006), « figure parmi la multitude des référents identitaires potentiels que sont l’appartenance sociale, religieuse, familiale, professionnelle, etc. ».

Cette appartenance territoriale est à manier avec précaution, puisque « [l’idée selon laquelle les identités sociales sont co-existantes aux identités géographiques] s’épanouit pleinement avec le déterminisme naturaliste qui veut qu'un milieu naturel imprime des « caractères » aux peuples qui l'habitent, ces caractères devenant pour l'analyse géographique autant d'identifiants » (Debarbieux, 2006). Dans le même temps, la fonction politique est souvent fortement impliquée dans la formation et le maintien de représentations symboliques qui fondent la territorialité (nous y reviendrons au chapitre 3) (Retaillé, 1997, Thiesse 2001, Debarbieux 2006). Ainsi, Y. Guermond (2006) met en garde les géographes contre l’utilisation de leur travail dans la construction de « territorialités par le haut ».

La prise en compte de sentiments d’appartenance dans l’analyse du Monde peut sembler relativement délicate dans la mesure où l’interrelation entre identité et territoire est plutôt associée à des grandes échelles spatiales comme la ville, la région (Frémont, 1976) et le plus souvent à des échelles nationales. Par ailleurs, elle est généralement liée à l’étude des représentations mentales de l’espace. Cela suppose que le Monde puisse constituer un espace subjectif (Didelon et al. 2011), ce qui doit être démontré (chapitre 4).

Dans notre approche du Monde par la notion de territoire, il faudra donc chercher à déterminer si un sentiment d’appartenance à l’échelle mondiale peut vraiment exister et si c’est le cas, comment il s’exprime, à quel point il est répandu et comment il se traduit en termes de représentations. Il existe plusieurs manières d’analyser les représentations du Monde : à l’aide de discours ou de textes (littéraires, politique, etc.), de représentations graphiques (humoristiques, artistiques, etc.), de manuels scolaires ou de guides de voyages, etc… Nous avons choisi ici d’analyser les représentations du Monde par le biais des cartes mentales qui nous permettront de mettre à jour les structures de l’espace mondial dans les représentations.

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Malgré l’importance de la composante du sentiment d’appartenance, le territoire « ne peut être assimilé à une série d’espaces vécus, sans existence politique ou administrative reconnue » (Brunet, Ferras, Théry, 1992). La deuxième composante est donc intiment liée à la fonction politique que nous avons déjà évoquée et surtout à son pouvoir dans le sens où l’entend F. Giraut (2008) : « Non pas seulement du pouvoir dans l’espace, mais aussi

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du pouvoir sur l’espace, autrement dit une capacité d’aménagement ou de contrôle, bref d’une capacité à intervenir dans le champ de la justice socio-spatiale ». C’est une conception particulière du territoire qui voit celui-ci comme « la propriété continue et exclusive d’une autorité déterminée juridiquement, une personne institutionnelle qui incarne et réifie un acteur collectif » (Monnet, 1999). Cet acteur collectif émerge de la nécessité du groupe de se maintenir sur son territoire et d’assurer la satisfaction de ses besoins (Le Berre, 1995). Ainsi, cet acteur mène des interventions « dont la nature est liée à ses options éthiques, politiques, à son niveau technologique. Il aménage et gère cette étendue qui possède alors une unité de fonctionnement ». Les institutions de gouvernement d’un territoire sont aussi productrices d’idées communes (Brunet, 2001) qui contribuent notamment à renforcer le sentiment d’appartenance. Cet acteur est le plus souvent confondu avec l’État. En effet, traditionnellement, « le territoire est étroitement associé à l’idée de souveraineté de l’État nation » (Théry, 2007) et l’approche mise en œuvre par B. Badie (1995) dans La Fin des Territoires est un des exemples les plus frappants de ce postulat. Pour lui, « le territoire tel qu’il se forge est bien une construction politique dont la fonction première est de servir de support à la souveraineté d’un État qui se crée ». Cela donne au territoire une dimension aréolaire en tant qu’aire de compétence exclusive d’un acteur juridico politique (Monnet, 2010).

Nous devons nous interroger dans ce volume sur l’appropriation, c’est-à-dire la gestion, la gouvernance du territoire-Monde, et veiller à introduire cette composante dans nos analyses (chapitre 1). Toutefois, s’il ne fait pas de doute que la mondialisation fait émerger des instances mondiales, ce n’est pas « du côté de l’ONU et de ses satellites qu’il faut chercher de grands acteurs de l’espace, [même si] certains programmes visent directement la géographie du Monde » (Brunet, 2001). Par ailleurs, dans le même temps, la mondialisation fait émerger des associations régionales, dont les plus affirmées, comme l’Union européenne, prétendent à un certain niveau d’appropriation spatiale tandis, qu’objectivement, l’État reste le premier niveau d’appropriation de l’espace mondial et que l’aménagement et la gestion des territoires se jouent également aux échelles infrarégionales. F. Gernaux et F. Giraut, (2000) soulignent que « sont ainsi discutées la légitimité politique et les initiatives concurrentes de différents niveaux décisionnels ».

Compte tenu de ces éléments, la composante d’appropriation sera difficile à prendre en compte dans notre analyse et ce d’autant plus que nous avons posé comme cadre la relation des individus au Monde : si un lien, ne serait-ce que symbolique, peut être établi entre l’individu et l’État, à l’échelle mondiale les instances de gouvernance ne sont liées aux individus que par l’intermédiaire des États. Toutefois, la composante d’appropriation reste à nos yeux un cadre obligé de la réflexion sur le territoire-Monde.

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Enfin, la troisième composante à prendre en compte est celle de la pratique spatiale du territoire. En effet, « le sens du lieu se manifeste par des sentiments d’appartenance à des

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