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Synthèse de pyrroles polysubstitués par cyclisation à l'or : évaluation de l'activité de 3-arylpyrroles sur les microtubules

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Academic year: 2021

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(1)

HAL Id: tel-01718135

https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01718135

Submitted on 27 Feb 2018

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l’or : évaluation de l’activité de 3-arylpyrroles sur les

microtubules

Benjamin Guieu

To cite this version:

Benjamin Guieu. Synthèse de pyrroles polysubstitués par cyclisation à l’or : évaluation de l’activité de 3-arylpyrroles sur les microtubules. Catalyse. Université Rennes 1, 2017. Français. �NNT : 2017REN1S084�. �tel-01718135�

(2)

THÈSE / UNIVERSITÉ DE RENNES 1

sous le sceau de l’Université Bretagne Loire

pour le grade de

DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ DE RENNES 1

Mention : Chimie

Ecole doctorale 3M

présentée par

Benjamin GUIEU

Préparée à l’unité de recherche UMR 6226

Institut des Sciences Chimiques de Rennes

Faculté de Pharmacie

Synthèse de pyrroles

polysubstitués par

cyclisation à l’or.

Evaluation de l’activité

de 3-arylpyrroles sur

les microtubules.

Thèse soutenue à Rennes

le 20 décembre 2017

devant le jury composé de :

Cécile ENGUEHARD-GUEIFFIER

Professeur, Université de Tours / rapporteur

Stéphane GERARD

Maître de conférences, Université de Reims / rapporteur

Pierre VERHAEGHE

Professeur, Université de Toulouse / examinateur

Yannick ARLOT-BONNEMAINS

Directeur de Recherches

Université de Rennes 1 / examinateur

Gilles ALCARAZ

Directeur de Recherches

Université de Rennes 1 / examinateur

Michèle DAVID

Maitre de conférences,

Université de Rennes 1/ directrice de thèse

Nicolas GOUAULT

Maitre de conférences,

(3)
(4)

Remerciements

Je remercie Madame Cécile Enguehard-Gueiffier, Professeur à l’université de Tours, et Monsieur Stéphane Gérard, Maître de conférences à l’université de Reims, pour avoir accepté d’être les rapporteurs de ce travail. Je remercie également Monsieur Pierre Verhaeghe, Professeur à l’université de Toulouse, et Monsieur Gilles Alcaraz, directeur de recherches, pour avoir accepté d’en être examinateurs.

Je remercie Madame Yannick Arlot, directeur de recherches, pour m’avoir guidé dans la réalisation, l’analyse et la rédaction de l’évaluation biologique, et pour avoir accepté de participer au jury.

Je tiens à exprimer ma profonde gratitude à mes directeurs de thèse, Michèle David et Nicolas Gouault, qui m’ont accueilli chaleureusement au laboratoire dès mon premier stage en 2011, et m’ont ensuite permis de réaliser cette thèse. Je leur suis très reconnaissant pour la formation scientifique qu’ils m’ont permis d’acquérir et pour la qualité de leur encadrement. Leur dynamisme, leur optimisme, leur disponibilité, et par-dessus tout leur grande gentillesse ainsi que leurs nombreuses marques de confiance m’ont permis de mener ce travail dans les meilleures conditions possibles, et ce malgré les imprévus.

Je remercie chaleureusement Myriam Le Roch, qui m’a tout appris à la paillasse depuis mon premier stage. Je la remercie pour son efficacité, sa rigueur et sa gentillesse, et évidemment pour sa contribution majeure aux résultats de ce travail.

Un grand merci à Isabelle Rouaud pour la réalisation des tests biologiques. Sa disponibilité et la qualité de son travail ont été d’une aide précieuse.

Je remercie bien sûr Claudia, Gilles, Jacques, Jean-Charles, Jean-François, Jean-Pierre, Maryse, Mickaël, Patrice, Philippe, et toute l’équipe de Pharmacognosie, pour leur aide, leur soutien et leur humour. Ils ont tous contribué à leur façon à la réalisation de ce travail dans des conditions agréables. Je n’oublie pas les autres doctorants de l’équipe au cours de ces trois ans : Alba, Alice, Bruna, Christelle, Denise, Lê, Pierre, Thanh et Vianney, pour tous les échanges et les bons moments passés. Je pense aussi aux différents stagiaires qui sont passés par le laboratoire, notamment Flavia, Chloé, Marie, Klervi, Mathieu et Gabrielle qui ont pris part à ce travail.

Je remercie Elsa Caytan pour les analyses en RMN du fluor, le CRMPO pour la spectrométrie de masse, et Alain Fautrel pour la spectroscopie Raman.

Je remercie le Ministère de l’Education Nationale, de la Recherche et de la Technologie pour l’allocation de recherche de ces trois années, ainsi que l’UFR de Pharmacie de l’Université de Rennes 1 pour le financement des trois mois supplémentaires. Je remercie également la Ligue contre le Cancer pour leur soutien financier à ce projet.

(5)

Je remercie particulièrement mes parents pour m’avoir donné le privilège de faire ce que je souhaitais et de poursuivre mes études jusqu’à aujourd’hui. Je les remercie pour tout ce qu’ils ont fait pour moi, et en particulier toute l’aide et le soutien qu’ils nous ont apportés depuis un certain 1er avril.

Je remercie également mes sœurs et mes beaux-frères pour leurs encouragements pendant ces trois ans.

J’associe bien évidemment à ces remerciements mes beaux-parents Annick et Jean-Christophe ainsi que mon beau-frère Vincent pour leur générosité et leur disponibilité, qui m’ont permis de me consacrer sereinement à mon travail, en particulier au cours de cette dernière année et demie.

Je remercie ma femme Emmanuelle, sans qui rien n’aurait été possible, pour son soutien. Ses encouragements et sa force de caractère m’ont permis de mener à bien ce projet dans les conditions idéales au cours de ces trois années mouvementées.

Je remercie enfin mes filles Clémentine et Noémie pour toute la joie qu’elles m’apportent, et pour m’avoir permis de prendre du recul souvent nécessaire pendant la fin de ma thèse.

(6)

Table des matières

INTRODUCTION GENERALE... 1

PARTIE 1 : SYNTHESE DE 3-ARYLPYRROLES ET EVALUATION BIOLOGIQUE DU

PYAKOL I ... 4

Chapitre 1 : Généralités ... 6

I. Le cytosquelette ... 6

A. Les microtubules ... 7

La structure des microtubules ... 7

La dynamique des microtubules ... 8

B. Les microfilaments d’actine ... 10

C. Les filaments intermédiaires ... 11

II. Le cycle cellulaire ... 12

A. Les phases du cycle cellulaire ... 12

B. Les microtubules au cours du cycle cellulaire ... 13

Les microtubules de la cellule en interphase ... 13

Les microtubules lors de la mitose ... 14

a. Prophase ... 14 b. Prométaphase ... 15 c. Métaphase ... 16 d. Anaphase ... 17 e. Télophase ... 17

III. Le cancer ... 18

A. Généralités ... 18

B. Caractéristiques des cellules cancéreuses ... 20

C. Les métastases ... 23

D. Le traitement des cancers... 24

IV. Cibler le cytosquelette en thérapeutique ... 26

(7)

Les poisons du fuseau se liant au site de reconnaissance des vinca-alcaloïdes .... 27 a. Les vinca-alcaloïdes ... 27 b. L’halichondrine B et l’éribuline ... 29 c. Hémiasterlines et dérivés ... 30 d. Tubulysine A ... 31 e. Autres ... 31

Les poisons de fuseau se liant au site de reconnaissance de la colchicine ... 31

a. La colchicine ... 31

b. Les combretastatines... 32

Les taxanes ... 33

Les épothilones ... 34

Laulimalide et péloruside A ... 35

B. Inconvénients des poisons du fuseau ... 36

C. Cibler le microfilament d’actine ... 36

Conclusion ... 37

Chapitre 2 : Synthèse du pyakol I, composé chef de file ... 38

I. Contexte et objectifs ... 38

II. Synthèse du pyakol I ... 39

A. Rappels bibliographiques sur la chimie des pyrroles ... 39

Généralités ... 39

La synthèse des pyrroles ... 40

a. L’approche [3+2] ... 41

b. L’approche [4+1] ... 43

c. L’approche multicomposant [2+2+1] ... 45

d. L’approche par cyclisation [5+0] ... 46

B. Stratégie de synthèse ... 48

Généralités sur la catalyse à l’or ... 48

Travaux précédents au laboratoire ... 49

C. Résultats et discussions... 51

Accès à l’aminoacétophénone protégée ... 51

a. Bromation ... 51

b. Accès à l’azoture ... 52

c. Réduction de l’azoture et protection de l’amine formée ... 52

(8)

Formation de l’intermédiaire amino-ynol ... 55

Cyclisation catalysée par un complexe d’or ... 56

a. Conditions ... 56

b. Mécanisme de la cyclisation ... 57

Accès au pyrrole final ... 57

a. Hydroboration-oxydation ... 57

b. Déprotection du pyrrole ... 58

D. Bilan ... 59

Chapitre 3 : Evaluation biologique du pyakol I ... 60

I. Etude de l’effet cytotoxique ... 60

II. Analyse de l’effet sur le déroulement du cycle cellulaire ... 62

III. Analyse de l’effet sur l’architecture cellulaire ... 63

A. Observation de l’action sur la tubuline ... 63

B. Observation de l’action sur l’actine ... 66

IV. Discussion ... 68

Chapitre 4 : Modulations autour du motif 3-arylpyrrole ... 71

I. Synthèse de divers pyakols ... 71

A. Modulations réalisées avant cyclisation ... 72

Diversité apportée par l’acétophénone de départ ... 72

Diversité apportée par le choix de l’alcyne ... 74

Accès aux pyrroles ... 75

B. Modulation en R4 ... 77

Cyclisation iodation « one-pot » ... 77

Iodation du pyrrole ... 79

C. N-Alkylation du pyrrole ... 80

Protection de l’alcool ... 80

Alkylation ... 80

Alkylation avant hydroboration ... 82

D. Bilan ... 83

II. Synthèse de pyakols marqués ... 84

A. Marquage fluorescent... 84

(9)

Première approche : marquage par couplage catalysé au palladium ... 85

a. Couplage de Heck ... 86

b. Couplage de Sonogashira ... 88

Réaction de « click-chemistry » ... 90

B. Vers l’utilisation de la microscopie Raman confocale... 93

Contexte ... 93 a. Principe ... 93 b. Caractéristiques de la technique ... 94 c. Intérêt de la technique ... 95 Stratégie envisagée ... 96

Conclusion ... 97

Conclusion de la partie 1 ... 98

Partie expérimentale ... 99

Matériel et méthodes ... 140

(10)

PARTIE 2 : SYNTHESE DE 3-TRIFLUOROMETHYLPYRROLES ... 142

I. Contexte et objectifs ... 143

A. L’atome de fluor ... 143

Généralités ... 143

Propriétés de l’atome de fluor ... 144

Les molécules fluorées en thérapeutique ... 145

B. Objectif ... 146

II. Résultats ... 148

A. Première approche : utilisation d’agents de trifluorométhylation ... 148

Essais réalisés avec le TMS-CF3 ... 148

Essais de cyclisation-trifluorométhylation « one-pot » ... 149

B. Deuxième approche : utilisation de « building-blocks » trifluorométhylés ... 150

Accès à divers α-amino-ynols trifluorométhylés ... 151

a. Réaction de Henry ... 151

b. Accès à l’amine protégée ... 152

c. Oxydation de l’alcool ... 152

d. Introduction de la triple liaison ... 153

Optimisation des conditions de cyclisation ... 154

Extension à d’autres substrats ... 157

Extension à la synthèse de 3-trifluorométhylpyrroles tétrasubstitués ... 158

Conclusion ... 159

CONCLUSION GENERALE ... 162

Bibliographie ... 164

(11)

Liste des abréviations

9-BBN 9-borabicyclo[3.3.1]nonane

ABP Actin-binding Proteins

Ac Acétyle

AcOEt Acétate d’éthyle

ADN Acide désoxyribonucléique

Alk Alkyle

APTS Acide paratoluènesulfonique

Ar Aryle

Bn Benzyle

Boc Tert-butoxycarbonyle

Cbz Carboxybenzyle

CCM Chromatographie sur couche mince

CI50 Concentration inhibitrice 50 conc. Concentré DAPI 4',6-diamidino-2-phénylindole DCE 1,2-Dichloroéthane DCM Dichlorométhane DIEA N,N-Diisopropyléthylamine DMF N,N-Diméthylformamide DMSO Diméthylsulfoxyde dr Ratio diastéréoisomèrique éq. Equivalent Et3N Triéthylamine

GFP Green Fluorescent Protein

GP Groupe protecteur

GTP Guanosine triphosphate

h Heure

i-Pr Isopropyle

IR Infrarouge

LDA Diisopropylamidure de lithium

MAPs Microtubules Associated Proteins

Me Méthyle

MEC Matrice extracellulaire

Ms Mésyle

MSA Acide méthanesulfonique

MTOC Microtubule-organising center

NBD 4-nitrobenzo-2-oxa-1,3-diazole

NIS N-iodosuccinimide

n-Pr n-propyle

Pent Pentyle

(12)

quant. Quantitatif

RMN Résonance Magnétique nucléaire

SNAr Substitution nucléophile aromatique

ta Température ambiante

TBAI Iodure de tétrabutylammonium

TEM Transition Epithélio-Mésenchymateuse

Tf Trifluorométhylsulfonyle

TFA Acide trifluoroacétique

THF Tétrahydrofurane

TME Transition Mésenchymo-Epithéliale

TMS Triméthylsilyle

Ts Tosyle

(13)

1

Introduction générale

Des travaux réalisés par les équipes des Dr G. Alcaraz et Y. Arlot-Bonnemains ont mis en évidence l’activité antiproliférative de composés de type 3-arylpyrroles sur des cellules épithéliales de peau ainsi que des cellules sanguines. Ces composés, nommés pyakols, perturbent le déroulement du cycle cellulaire, et ont donc fait l’objet d’un brevet en 20051. Suite à ce travail, les expérimentations

réalisées ont montré qu’un des dérivés en particulier possède une activité sur le réseau de microtubules, perturbant l’architecture cellulaire. Cette molécule, que nous appellerons pyakol I, représente le chef de file de cette série de composés (Figure 1).

Figure 1 : Structure du composé chef de file

Au cours des dernières années, notre équipe a développé des méthodes de synthèse de divers hétérocycles azotés par des réactions de cyclisation catalysée par des complexes d’or, et leur application à la synthèse de molécules d’intérêt thérapeutique. En nous basant sur cette expertise, nous avons donc décidé de mettre au point, dans le cadre de ce travail de thèse, une stratégie de synthèse du pyakol I afin d’étudier de manière plus approfondie son mode d’action et les cibles de son activité. Par extension, cette méthodologie s’appliquera à la synthèse de pyrroles polysubstitués.

La majeure partie de ce travail, présentée dans la première partie de ce manuscrit, se focalisera sur l’optimisation d’une stratégie de synthèse du pyakol I par cyclisation à l’or, et sur l’évaluation de son activité biologique. Le chapitre 1 présentera les composants du cytosquelette et leur rôle au cours du cycle cellulaire, ainsi que leur intérêt en tant que cible de traitements anticancéreux. Le second chapitre relatera la mise au point d’une séquence réactionnelle efficace pour la synthèse du composé chef de file. Le troisième chapitre développera l’évaluation de l’activité biologique du pyakol I sur

1 Arlot, Y.; MARTIN, B.; Delcros, J. G.; Alcaraz, G.; Paulus, O.Dérivés arylpyrroliques, arylfulraniques et

arylthiophéniques à action antitubuline, procédé de préparation et utilisation en tant qu’antimitotique; Brevet

(14)

2

diverses lignées tumorales. Enfin, le quatrième chapitre présentera l’application de la stratégie développée à la synthèse de dérivés du chef de file, ainsi que la synthèse de pyakols marqués réalisés. Par ailleurs, le développement de méthodes de synthèse de molécules portant des groupements fluorés présente un intérêt grandissant ces dernières années, notamment du fait de l’influence du fluor sur les propriétés biologiques. La seconde partie de cette thèse se focalisera donc sur le travail de méthodologie réalisé pour la synthèse de 3-trifluorométhylpyrroles polysubstitués par cyclisation à l’or.

(15)
(16)

PARTIE 1 :

SYNTHESE DE 3-ARYLPYRROLES ET

EVALUATION BIOLOGIQUE DU PYAKOL I

(17)
(18)

6

Chapitre 1 : Généralités

I.

Le cytosquelette

Le cytosquelette est un réseau complexe de protéines qui confère à la cellule l'essentiel de ses propriétés architecturales et mécaniques.

Les rôles du cytosquelette sont nombreux et essentiels2: tout d’abord, il confère à la cellule sa

morphologie et lui permet de s’adapter à la déformation. Il participe au transport intracellulaire et extracellulaire (endocytose, exocytose) et à la répartition des organites de la cellule. Il soutient la membrane plasmique et participe à l’organisation des cellules au sein des tissus, via l’ancrage aux membranes des cellules voisines et à la matrice extracellulaire (MEC). Enfin, il participe à la séparation des chromosomes et à la cytodiérèse (séparation des cellules filles) lors de la mitose.

Chez les eucaryotes, on distingue trois types de filaments :

Les microtubules

Les microfilaments d’actine

Les filaments intermédiaires

L’ensemble de ces structures forme un réseau interactif élaboré. Ces filaments sont des polymères de sous-unités protéiques maintenues par des liaisons non covalentes faibles. Ce type de construction permet ainsi un assemblage et un désassemblage rapides dépendant d’une régulation cellulaire complexe. De fait, ces filaments nécessitent un grand nombre de protéines accessoires pour remplir leurs nombreux rôles au sein des cellules. Ainsi, des centaines de protéines différentes sont associées au cytosquelette et régulent la distribution spatiale et le comportement des filaments. Elles s’associent sur les filaments ou sur leurs sous-unités pour déterminer des sites d’assemblage de nouveaux filaments, réguler et modifier les cinétiques d’assemblage-désassemblage.

(19)

7

A.

Les microtubules

La structure des microtubules

Les microtubules sont des polymères de tubuline organisés en tubes dynamiques. La tubuline est une protéine sphérique existant sous deux formes majeures, α et β. Ces deux isoformes protéiques s’assemblent par des liaisons non-covalentes pour former un hétérodimère α-β auquel s’ajoutent deux molécules de GTP (guanosine triphosphate). L’une de ces molécules de GTP est intimement liée à la tubuline α, et ne peut en être dissociée. L’autre, localisée sur la tubuline β, est labile. Plusieurs hétérodimères α-β peuvent s’assembler selon un arrangement tête-queue pour former une longue fibre protéique constituée alternativement de tubuline α et β, appelée protofilament. L’organisation de 13 protofilaments entre eux va former le microtubule, une cavité cylindrique d’environ 25 nm de diamètre, caractérisée par une extrémité plus (+) et une extrémité moins (-) (Figure 2)3.

Figure 2 : Structure d’un microtubule

(A) Les hétérodimères sont composés de sous-unités α et β

(B) Les hétérodimères de tubuline s’assemblent entre eux selon un arrangement tête-queue pour former un protofilament

(C) et (D) Liés entre eux par des contacts latéraux, treize protofilaments se replient en cercle pour donner la structure cylindrique du microtubule, caractérisé par une extrémité + et une extrémité –

(20)

8

L’extrémité (-) est en général localisée au niveau d’un centre organisateur des microtubules (Microtubule-organising center ou MTOC), parmi lesquels les centrosomes. Le centrosome est une structure renfermant deux centrioles de forme cylindrique d’environ 0,2 μm de diamètre, généralement disposés perpendiculairement l’un à l’autre. Les centrosomes sont composés de centaines de structures en anneau de γ-tubuline, chacune représentant un site de nucléation, point d’ancrage de la croissance des microtubules.

Les microtubules jouent un rôle majeur dans le développement et le maintien de la forme cellulaire ainsi que dans le transport de vésicules. Ils déterminent la position des organites et dirigent le transport intracellulaire. Ils sont aussi impliqués dans la signalisation intracellulaire.

La dynamique des microtubules

La dynamique de polymérisation est contrôlée de manière très précise à la fois dans l’espace et dans le temps, régulant ainsi les diverses fonctions biologiques des microtubules. La tubuline libre et les microtubules sont en perpétuel équilibre : à l’extrémité (+), les hétérodimères de tubuline tendent à s’additionner : la cinétique d’hydrolyse de GTP est plus lente que l’addition de nouvelles sous-unités, permettant ainsi de conserver une coiffe de GTP. A l’inverse, à l’extrémité moins (-), la tubuline sous forme GDP va se désassembler. Cette différence de dynamique entre les deux extrémités forme ainsi le phénomène de « treadmilling » (tapis roulant).

D’autre part, les microtubules présentent également une « instabilité dynamique », c’est-à-dire qu’ils peuvent alterner de façon autonome entre des phases de croissance et de décroissance. Au cours d’une phase d’élongation, le microtubule va subir une dépolymérisation très rapide appelée « renversement » (« catastrophe » en anglais), provoquée par la perte de la coiffe de GTP pouvant résulter de divers facteurs. Suite à cette cassure brutale du microtubule, une phase appelée « récupération » (« rescue »), au cours de laquelle l’extrémité (+) regagne une coiffe de GTP, permet la reprise de la polymérisation. Parfois, la taille des microtubules reste constante car ni l’allongement ni le rétrécissement ne sont détectables, on parle alors de « pause ».

Le treadmilling et l’instabilité dynamique confèrent un comportement spécifique aux microtubules, illustré dans la Figure 3.

(21)

9

Figure 3 : Illustration du comportement dynamique des microtubules

Cette dynamique particulière confère aux microtubules leurs propriétés architecturales et permet de réguler de nombreux phénomènes cellulaires.

La diversité des fonctions des microtubules dépend de plusieurs facteurs :

La liaison de protéines régulatrices,

notamment les MAPs (Microtubule Associated Proteins), à la surface ou aux extrémités des microtubules ou encore les kinésines, impliquées dans le transport cellulaire.

L’expression de différents isotypes de la tubuline :

en effet, si les isotypes α et β sont très majoritaires, d’autres membres de la superfamille des tubulines ont été identifiés4. La tubuline

gamma (γ), localisée au niveau des centrosomes et d’autres MTOCs où elle joue un rôle majeur dans l’initiation de l’assemblage des microtubules, les tubulines delta (Δ), epsilon (ε), zeta (ζ) et eta (η) qui sont liées aux centrioles des eucaryotes.

Les

modifications

post-translationnelles

de

la

tubuline

:

acétylation, tyrosination/détyrosination…5 Ces modifications permettent l’association spécifique avec les

protéines moteurs du microtubule que sont la dynéine (à l’extrémité (+)) et la kinésine (à l’extrémité (-)). Ces protéines motrices sont nécessaires pour le transport de protéines le long des microtubules et jouent donc un rôle majeur dans le métabolisme et la transduction du signal intracellulaire.

4 McKean, P. G.; Vaughan, S.; Gull, K. J. Cell Sci. 2001, 114 (15), 2723–2733 5 Westermann, S.; Weber, K. Nat. Rev. Mol. Cell Biol. 2003, 4 (12), 938–948

(22)

10

B.

Les microfilaments d’actine

Les microfilaments d’actine sont plus fins, plus flexibles et plus courts que les microtubules, et également plus nombreux.

Ces microfilaments sont composés d’actine globulaire (actine G) qui se polymérise sous forme d’actine fibrillaire (actine F) et de nombreuses protéines liant l’actine. Ils ont une épaisseur de 7 nm et sont constitués de 2 chaînes de molécules enroulées en hélice. Contrairement aux microtubules, les filaments s’assemblent spontanément : ils n’ont pas besoin de site de nucléation.

Le filament ainsi formé est polarisé car il possède une extrémité à croissance rapide (extrémité (+)) et une extrémité à croissance lente (extrémité (-)) qui est le siège préférentiel de la perte de monomères. L’actine-G, incorporée dans le polymère, est associée avec une molécule d’ATP qui n’est pas nécessaire à la polymérisation. Toutefois, après l’étape de polymérisation, l’ATP est hydrolysé en ADP au cours du temps. Tout au long du polymère d’actine, il se forme ainsi un gradient décroissant d’ATP-actine à l’origine du phénomène de tapis roulant (treadmilling), qui est considéré comme un marqueur de l’âge du filament. Cette hydrolyse de l’ATP est irréversible et joue un rôle dans le désassemblage des filaments d’actine, même si les monomères actine-ADP et actine-ATP possèdent les mêmes propriétés.

Ces polymères sont associées à de nombreuses protéines appelées Actin-Binding Proteins (ABP), qui permettent de contrôler l’activité des microfilaments en fonction de leur positionnement dans la cellule. Ce sont ces protéines qui vont permettre au cytosquelette d’actine de jouer un rôle dans des évènements aussi variés que la motilité cellulaire, la différenciation, la contraction ou encore l’organisation de la membrane et les mouvements intracellulaires.

Sous la membrane plasmique, les filaments d’actine sont reliés en un filet qui soutient la surface de la cellule et lui donne une résistance mécanique. D’autre part, les microfilaments des cellules épithéliales permettent l’attachement à la matrice extracellulaire et sont nécessaires au maintien des jonctions intercellulaires telles que les jonctions serrées et les jonctions d’adhérence.

Dans les cellules musculaires, l’actine est associée à la myosine dans les sarcomères, qui vont former des myofibrilles, responsables de la contraction des cellules cardiaques et musculaires.

L’actine est également impliquée dans tous les processus de migration cellulaire6 qui permettent

notamment à la cellule de former les lamellipodes et filopodes, structures exploratrices mobiles.

(23)

11

C.

Les filaments intermédiaires

Les filaments intermédiaires sont des polymères constitués de protéines globulaires. Ce sont des filaments ubiquitaires, non polarisés, très stables mais non statiques, impliqués dans le maintien de la morphologie cellulaire. Contrairement aux filaments d’actine et aux microtubules, composés de protéines globulaires très conservées, les filaments intermédiaires peuvent être formés par de nombreuses protéines différentes7. Celles-ci peuvent être classées en 5 familles selon l’homologie de

structure (Tableau 1). L’expression des protéines constituant les filaments intermédiaires est spécifique d’un tissu.

Tableau 1 : Les types de filaments intermédiaires

Type

Protéine monomérique

Cellules impliquées

I

Kératines acides

Epithélium

II

Kératines basiques

Epithélium

III

Vimentine

Desmine

GFAP (protéine fibrillaire acide gliale)

Périphérine

Fibroblastes

Muscles

Cellules gliales

Neurones périphériques

IV

Neurofilaments

Neurones

V

Lamines

Noyaux de toutes les cellules

Les filaments sont liés à la matrice extracellulaire et s’étendent jusqu’autour du noyau. Ce réseau permet de coordonner les activités du cytosquelette en relayant les informations provenant de la surface cellulaire vers les organites intracellulaires. Ils vont de plus tapisser la face interne de l’enveloppe nucléaire, formant ainsi une cage protectrice pour l’ADN cellulaire.

La composition et l’expression des filaments intermédiaires peuvent être utilisées pour caractériser la progression de certains cancers, car elles représentent un marqueur des capacités d’invasion cellulaire. La vimentine est ainsi identifiée comme un marqueur de la transition épithélio-mésenchymateuse ou TEM : son expression au sein d’un épithélium est corrélée avec l’acquisition d’un phénotype invasif. D’autre part, l’expression spécifique de certaines protéines peut servir à identifier le tissu d’origine d’une tumeur secondaire.

(24)

12

Les fonctions et la dynamique des filaments intermédiaires ont été moins explorées que celles des microtubules et des microfilaments, mais leur étude récente a mis en évidence leur implication dans certaines maladies : on note ainsi un défaut de cytokératine dans certaines affections de l’épiderme. Par ailleurs, il a été montré que la vimentine et la cytokératine jouent un rôle dans la communication intra- et intercellulaire8.

II.

Le cycle cellulaire

Le cycle cellulaire est l'ensemble des étapes qui constituent et délimitent la vie d'une cellule. Ce cycle est composé de plusieurs phases de croissance dans lesquelles la cellule grossit et duplique son matériel génétique et d'une phase où celle-ci se divise pour donner naissance à deux cellules filles identiques, appelée mitose.

A.

Les phases du cycle cellulaire

Quatre phases se succèdent au cours du cycle cellulaire (Figure 4) :

La phase G1

qui correspond à une phase de croissance cellulaire et de préparation à la réplication de l’ADN.

La phase S durant laquelle a lieu la réplication de l’ADN.

La phase G2 qui correspond à une phase de croissance et de préparation à la

mitose.

La phase M, phase de mitose au cours de laquelle a lieu la ségrégation des

chromosomes et la division de la cellule en deux cellules filles.

Les phases G1, S et G2 constituent l’interphase, c’est-à-dire l’intervalle entre deux mitoses.

(25)

13

Figure 4 : Le cycle cellulaire

Pour assurer, d’une part, la succession des quatre phases du cycle, et d’autre part l’obtention de deux cellules filles rigoureusement identiques, la cellule dispose de systèmes de régulation hautement perfectionnés. Il existe ainsi des points de contrôle ou « checkpoints » tout au long du cycle, qui permettent permettent la surveillance d’aspects fondamentaux comme par exemple l’état des molécules d’ADN avant, pendant et après leur réplication (« DNA Damage Checkpoint »), l’achèvement total de la réplication avant l’entrée en mitose (« Replication Checkpoint ») ou encore le bon déroulement de la mitose (« Mitotic Checkpoint »). En cas d’anomalie, le cycle cellulaire sera bloqué tant que celle-ci ne sera pas réparée. Si ce n’est pas le cas, la cellule rentre en apoptose (mort cellulaire programmée).

B.

Les microtubules au cours du cycle cellulaire

Les microtubules de la cellule en interphase

En interphase, les microtubules s’assemblent à partir des centres organisateurs pour former un réseau responsable du transport vésiculaire. Durant cette phase, ils échangent leurs sous-unités avec le pool de tubuline libre relativement lentement : la demi-vie des microtubules est alors comprise

(26)

14

entre quelques minutes et quelques heures9. Grâce aux protéines motrices (kinésines et dynéines), les

organites et les vésicules vont pouvoir se déplacer le long des microtubules10. Ces protéines motrices

possèdent une tête qui leur permet de se lier au microtubule, ainsi qu’une queue qui peut se lier à une vésicule ou un organite. Les kinésines sont ainsi responsables du transport vers l’extrémité (+), tandis que les dynéines se déplacent vers l’extrémité (-).

Cette capacité à contrôler le transport intracellulaire confère aux microtubules un rôle organisationnel majeur. En effet, le positionnement d’éléments cellulaires tels que les organites est à l’origine de la polarité cellulaire au sein d’un épithélium : les cellules épithéliales possèdent un pôle basal en contact avec la membrane basale, et un pôle apical qui possède la plupart des protéines nécessaires à l’activité de l’organe, et confère de ce fait les fonctions spécifiques au tissu. La distribution asymétrique des composants cellulaires et membranaires contribue ainsi à la formation d’un épithélium hautement polarisé, condition nécessaire pour qu’il soit fonctionnel11.

Les microtubules lors de la mitose

Lors de cette phase du cycle cellulaire, une cellule mère va se diviser et donner deux cellules filles identiques. Les chromosomes, supports de l’information génétique, sont alors répartis en deux lots égaux de 23 dans chacune des cellules filles. Avec eux, l’ensemble des constituants cellulaires dupliqués antérieurement se partage équitablement entre les deux pôles opposés de la cellule avant que celle-ci ne se divise.

Les microtubules sont des acteurs importants de la mitose : en effet, la réorganisation du cytosquelette de tubuline conduit à la formation du fuseau mitotique. Ces microtubules sont beaucoup plus dynamiques que les microtubules d’interphase, avec une demi-vie de l’ordre de 10 à 30 secondes. La mitose est divisée en 5 étapes distinctes 12: prophase, prométaphase, métaphase, anaphase

et télophase.

a.

Prophase

Pendant la prophase, l’ADN se condense en chromosomes composés de deux chromatides sœurs portant la même information génétique. Le point de repère le plus visible est une échancrure bien

9 Saxton, W. M. J. Cell Biol. 1984, 99 (6), 2175–2186 10 Hirokawa, N. Science 1998, 279 (5350), 519–526

11 Davis, F. M.; Stewart, T. A.; Thompson, E. W.; Monteith, G. R. Trends Pharmacol. Sci. 2014, 35 (9), 479–488 12 Karp, G.; Masson, P. L.Biologie cellulaire et moléculaire; De Boeck: Bruxelles, 2010

(27)

15

marquée qui signale la position du centromère, au niveau duquel est présente la plaque kinétochorienne.

Un autre élément important de la prophase est le centrosome. Comme pour les chromosomes, le centrosome s'est répliqué durant l’interphase, avant le début de la prophase. Durant la prophase, la réorganisation du réseau de microtubules entraine la migration de chacun des centrosomes vers un pôle de la cellule. Les microtubules astraux, disposés en rayon autour des centrosomes, permettent leur positionnement et leur ancrage à la membrane, déterminant ainsi les deux pôles du fuseau mitotique.

En fin de prophase, la disparition de l’enveloppe nucléaire a lieu, rendant possible l’interaction entre le fuseau et les chromosomes.

b.

Prométaphase

Lors de cette phase, le fuseau mitotique définitif se forme et les chromosomes se déplacent vers le centre de la cellule (Figure 5).

Figure 5 : Prométaphase

Lorsque les microtubules atteignent la région centrale de la cellule, leurs extrémités libres vont croitre et se raccourcir de façon très dynamique jusqu’à « capturer » un kinétochore. Au final, les deux chromatides sœurs sont connectées par leur kinétochores aux microtubules provenant des pôles opposés. La modification de la longueur des microtubules permet alors de positionner tous les chromosomes dans un plan au centre du fuseau.

(28)

16

c.

Métaphase

La métaphase correspond à l’alignement des chromosomes à l’équateur du fuseau (Figure 6). Le fuseau mitotique d’une cellule métaphasique possède un ensemble bien organisé de microtubules adapté à la séparation des chromosomes (Figure 6).

Figure 6 : Métaphase

On distingue trois types de microtubules d’un point de vue fonctionnel (Figure 7):

- Les microtubules astraux : ils rayonnent du centrosome vers la membrane. Ils participent au positionnement de l’appareil dans la cellule, et déterminent le plan de la cytocinèse.

- Les microtubules kinétochoriens : à partir du centrosome, ils vont capturer les kinétochores des chromosomes.

- Les microtubules polaires, qui partent de chacun des deux centrosomes et s’intercalent afin de former une architecture qui maintient l’intégrité du fuseau.

(29)

17

Un point de contrôle du cycle cellulaire se situe entre la métaphase et l’anaphase, et intervient quand un chromosome ne s’aligne pas correctement à l’équateur de la cellule (« mitotic checkpoint »). La cellule va alors différer le passage en anaphase tant que le chromosome est mal positionné. Cela permet d’éviter que les cellules filles reçoivent un nombre anormal de chromosomes (aneuploïdie).

d.

Anaphase

L’anaphase débute quand les chromatides sœurs de tous les chromosomes se séparent de façon synchronisée et se dirigent vers les pôles (Figure 8).

Figure 8 : Anaphase

Ce mouvement est très lent afin d’éviter l’enchevêtrement des chromosomes. Contrairement à la métaphase où les microtubules gardaient une longueur stable, en anaphase, les microtubules kinétochoriens vont se raccourcir en perdant des sous unités. A l’inverse, il a été observé un écartement des pôles du fuseau, accompagné d’un allongement des microtubules polaires.

e.

Télophase

La télophase est le stade finale de la mitose : le fuseau mitotique se désorganise, l’enveloppe nucléaire se reforme et les chromosomes, groupés aux pôles, se décondensent (Figure 9).

(30)

18

Figure 9 : Télophase

Suite à la télophase, la cellule se divise au cours de la cytocinèse : il se forme un anneau contractile constitué d’actine et de myosine entre les deux cellules. La contraction de cet anneau forme un sillon de clivage qui aboutit à la séparation du cytoplasme en deux parts pour former 2 cellules filles identiques à la cellule d’origine, qui rentrent alors en phase G1. Les microtubules retrouvent alors leur organisation interphasique.

III.

Le cancer

A.

Généralités

Le cancer est une pathologie dont une des caractéristiques est la prolifération cellulaire incontrôlée dans un tissu sain, liée à un échappement des cellules aux mécanismes de régulation qui permettent le développement harmonieux d’un tissu. La multiplication anarchique des cellules entraine la formation de tumeurs cancéreuses qui peuvent envahir puis détruire les tissus environnants, et dans certains cas atteindre des organes distants pour former des métastases.

Le développement du cancer est multifactoriel, mais certains facteurs de risques sont bien identifiés : le tabagisme (actif ou passif) représente ainsi le premier facteur de risque évitable de cancers, loin devant les autres facteurs identifiés. On retrouve ensuite successivement : l’alcool et les

(31)

19

facteurs nutritionnels (Sédentarité, surcharge pondérale…) certains agents infectieux (virus de l’hépatite B et de l’hépatite C, Papillomavirus…), certains traitements (chimiothérapie, hormones…), les radiations ionisantes (rayons UV, rayons X) et les produits chimiques (professionnels et environnementaux)13.

On distingue quatre grands types de cancers, selon leur origine cellulaire :

Les carcinomes, issus de cellules épithéliales, qui représentant 80 % des cas

Les sarcomes, issus de cellules mésenchymateuses, musculaires ou osseuses

Les cancers hématopoïétiques, issus de cellules du sang ou d’organes lymphoïdes

Les cancers neuroectodermiques, issus de cellules nerveuses

En 2015 en France, le nombre de nouveaux cas de cancer diagnostiqué était estimé à 385 000 (211 000 chez les hommes, 174 000 chez les femmes)14. On assiste à une baisse de l’incidence des

cancers chez les hommes (-1,3 % par an entre 2005 et 2012), liée à une diminution du nombre de cancers de la prostate, et à un ralentissement de la progression de ce taux chez les femmes (+ 0,2 % par an), lié à la baisse du nombre de cancers du sein. Les cancers les plus fréquents chez les hommes sont ceux de la prostate, du poumon et le cancer colorectal. Chez les femmes, ce sont le cancer du sein, le cancer colorectal et le cancer du col de l’utérus qui sont les plus souvent diagnostiqués.

Le nombre de décès dus au cancer était estimé à 149 500 en 2015 en France dont 84 100 chez les hommes (en légère baisse par rapport à 2012) et 65 400 chez les femmes (en hausse par rapport à 2012). La mortalité a globalement baissé lors des dernières décennies du fait de diagnostic plus précoce et de l’amélioration des traitements. Cependant il s’agit toujours de la première cause de mortalité chez les hommes, et la seconde chez les femmes, derrière les maladies cardio-vasculaires.

Les cancers sont donc un enjeu de santé public majeur du fait de leur incidence, de leur mortalité et des coûts engendrés. La compréhension des mécanismes cellulaires à l’origine du développement et de la progression des cancers est indispensable afin de mieux appréhender la maladie. Définir les mécanismes moléculaires permettra ainsi le développement de thérapies adaptées à chaque type de cancer.

13 Stewart, B. W.; Wild, C. P.World Cancer Report 2014; International Agency for Research on Cancer/World

Health Organization: Lyon, 2014

14 "Cancers : les chiffres clés - Qu’est-ce qu’un cancer ?" Institut National Du Cancer

(32)

20

B.

Caractéristiques des cellules cancéreuses

Malgré les nombreuses différences observées d’un cancer à l’autre, Hanahan et Weinberg ont identifié six altérations importantes de la physiologie cellulaire retrouvées dans une très large majorité des cellules malignes. Ces altérations peuvent avoir lieu à différentes étapes du développement de la tumeur, et confèrent à la cellule des capacités représentées sur la Figure 10.

Figure 10 : Caractéristiques des cellules cancéreuses d’après Hanahan et Weinberg, Cell, 2000 15

Indépendance vis-à-vis des signaux de prolifération :

Lors du cycle cellulaire, une cellule passe d’un état dit quiescent à un état de prolifération active sous l’action des signaux de prolifération (Growth signals). L’ensemble de ces signaux permet à la cellule de croître et de se diviser. Ils peuvent provenir de l’interaction des facteurs de croissance avec leurs récepteurs, mais aussi de l’environnement de la cellule, que ce soit des cellules voisines ou de la matrice extracellulaire par l’intermédiaire des molécules d’adhésion.

Les cellules cancéreuses, suite à l’activation d’oncogènes, vont être en mesure de mimer ces signaux selon différents mécanismes. Elles peuvent ainsi produire elles-mêmes ces facteurs de

(33)

21

croissance, entrainant une stimulation autocrine anormale, ou encore activer de façon permanente les voies de signalisation de ces signaux. Elles peuvent également stimuler les cellules environnantes, qui en réponse sécrètent des facteurs de croissance, ou encore augmenter le nombre ou l’affinité des récepteurs présents à leur surface, afin d’augmenter leur sensibilité aux signaux de prolifération.

Insensibilité aux signaux antiprolifératifs

L’homéostasie au sein d’un tissu normal est également due à des signaux antiprolifératifs. Les cellules possèdent des mécanismes de contrôle de leur croissance et de leur division : elles peuvent par exemple stopper le cycle cellulaire en cas de dommages à l’ADN. Ces signaux antiprolifératifs agissent de manière similaire aux signaux de prolifération, par l’intermédiaire de récepteurs transmembranaires entrainant une cascade de signalisation.

Les cellules tumorales vont être en mesure d’échapper à ces mécanismes de contrôle du fait de l’altération des gènes suppresseurs de tumeur tels que Rb et p53, impliqués dans la signalisation antiproliférative. Ainsi, même en cas d’anomalies sévères, la croissance et le cycle cellulaire vont se poursuivre.

Un autre mécanisme permet de réguler la division cellulaire : il s’agit de l’inhibition de contact. Les cellules saines vont former une couche simple jusqu’à arriver à confluence. Une fois au contact d’autres cellules, des signaux provenant des cellules voisines et de la MEC vont empêcher la prolifération. Les cellules cancéreuses possèdent la capacité d’ignorer l’inhibition de contact, et continuent donc de croître et de se diviser indépendamment de leur environnement.

Echappement à l’apoptose

La capacité des tumeurs à croître rapidement est non seulement déterminée par le taux de prolifération cellulaire mais également par la diminution de la mort cellulaire programmée appelée apoptose. En effet, une cellule normale est programmée pour rentrer en apoptose si son environnement est anormal, ou en cas de dommages irréparables.

Les cellules cancéreuses perdent cette capacité à entrer en apoptose. Différentes stratégies permettent aux cellules cancéreuses d’échapper à l’apoptose. D’une part, les mécanismes de détection des dommages ou anomalies peuvent être altérés, entrainant une absence de réponse à ces phénomènes. D’autre part, certaines protéines impliquées dans le programme apoptotique peuvent présenter des défauts. C’est par exemple le cas de la protéine p53, dont la mutation a été observée dans de nombreux types de cancers, et qui perd de ce fait sa fonction apoptotique.

(34)

22

Potentiel de prolifération illimité : perte de la sénescence

Les trois caractéristiques précédemment citées entrainent une indépendance de la cellule vis-à-vis de son environnement. Cependant, une cellule normale atteint, après un certain nombre de réplications, un état de non-prolifération irréversible appelé sénescence. Cela est dû à la présence des télomères, séquences génétiques répétées sans information essentielle situées aux extrémités des chromosomes. Le système de réplication de l’ADN n’étant pas capable de répliquer l’information génétique jusqu’aux extrémités des chromosomes, les télomères permettent de ne pas perdre une partie du génome d’intérêt. Au fur et à mesure des cycles cellulaires, ces télomères vont raccourcir. Lorsqu’il y a un risque de perdre l’information génétique importante, qui était protégée grâce aux télomères, la cellule ne prolifère plus : elle va rentrer en sénescence (ou en apoptose, en cas de stress cellulaire). Afin de contrer cette limitation normale de la prolifération, la grande majorité des cellules cancéreuses expriment la télomérase, une enzyme présente habituellement uniquement dans les cellules souches, qui permet d’allonger les télomères, et entraine donc une prolifération infinie.

Capacité à induire l’angiogenèse

Afin de répondre à leurs besoins en O2 et en éléments nutritifs, les cellules cancéreuses sont

capables d’induire l’angiogenèse. Dans l’environnement tumoral va apparaitre ce que l’on appelle le switch angiogénique : il s’agit d’un déséquilibre entre les facteurs pro- et anti-angiogéniques. L’angiogenèse survient rapidement lors du développement des tumeurs. Les vaisseaux produits autour des tumeurs sont généralement malformés (tordus, élargis, de faible résistance), avec une prolifération et une apoptose anormale des cellules endothéliales, mais assurent néanmoins leur fonction d’alimentation de la tumeur.

Acquisition d’un pouvoir invasif : formation de métastases

Les cellules cancéreuses possèdent la capacité de migrer et de disséminer dans des tissus distants de la tumeur primaire et ainsi former des métastases. Ce comportement n’est pas systématique, mais il est reconnu que les cellules tumorales possèdent les caractéristiques nécessaires au pouvoir invasif.

(35)

23

C.

Les métastases

La dissémination métastatique constitue la véritable cause de malignité des cancers. Elle représente la principale cause de décès chez les patients atteints d’un cancer, et entraîne des résistances aux traitements anticancéreux classiques.

Les cellules cancéreuses empruntent deux voies principales de dissémination : la voie lymphatique, conduisant à l’invasion des ganglions qui drainent la région ou évolue la tumeur, ou la voie sanguine, conduisant à l’invasion d’organes à distance tels que le foie, le cerveau, le poumon ou les os. Si l’extension lymphatique des cancers témoigne d’une maladie encore circonscrite au niveau local, l’extension sanguine conduit à des métastases à distance dont le pronostic est moins favorable. Afin de former des métastases, les cellules cancéreuses doivent suivre ce que l’on appelle la cascade métastatique, représentée dans la Figure 11.

Figure 11 : La cascade métastatique D’après Valastyan et Weinberg, Cell, 2011 16

Au niveau de la tumeur primaire, certaines cellules vont présenter une modification radicale de leurs caractéristiques : elles vont d’abord perdre les propriétés d’adhérence sur leur support, la matrice extracellulaire (MEC), et avec les cellules voisines. De plus, pour entamer l’étape d’invasion et

(36)

24

la migration, ces cellules doivent résister à l’anoikis, mort cellulaire induite par la perte de l’adhésion des cellules épithéliales. Suite à cet ensemble de changements appelé transition épithélio-mésenchymateuse ou TEM, les cellules vont pouvoir se mouvoir au sein du tissu en digérant les protéines qui le constituent à l’aide de protéases, et ensuite franchir les barrières vasculaires pour atteindre la circulation sanguine par intravasation.

A ce niveau, la cellule échappe à la surveillance immunitaire et peut rester dormante pendant une période prolongée. Par extravasation, elle gagne ensuite l’organe où elle s’implantera, et, par un phénomène inverse à la TEM appelé transition mésenchymo-épithéliale (ou TME), retrouve des propriétés d’adhérence sur un support pour permettre l’ancrage d’une micrométastase dans le site secondaire, qui va croître pour former une nouvelle tumeur17.

Les cellules tumorales ne forment pas de métastases au hasard dans n’importe quel organe : certaines tumeurs ont tendance à essaimer des organes bien définis. Plusieurs hypothèses sont proposées pour expliquer ce phénomène18. L’une d’elles est essentiellement anatomique : à titre

d’exemple, les organes de l’appareil digestif (estomac, intestins, pancréas) sont drainés en premier lieu par le foie, et les métastases des tumeurs touchant ces organes sont dans la majorité des cas hépatiques. De même, le poumon est un lieu privilégié pour l’installation des métastases car il est le premier organe atteint après passage dans le cœur droit. Ces considérations topographiques ne suffisent cependant pas à expliquer pourquoi certains cancers comme le cancer de la prostate ont une affinité pour l’os, ou comme les cancers du poumon pour le cerveau. L’explication moléculaire de la localisation préférentielle de ces métastases reste incomprise, mais on sait toutefois que certains facteurs tiennent aux propriétés des cellules tumorales, et d’autres aux propriétés du tissu hôte.

D.

Le traitement des cancers

On distingue deux types de traitement conventionnel des cancers : les traitements loco-régionaux et les traitements généraux, qui sont couplés dans la majorité des cas.

Les traitements loco-régionaux

comprennent la chirurgie et la radiothérapie. L’intervention chirurgicale consiste en l’ablation de la tumeur cancéreuse. Cependant, il n’est parfois pas possible de retirer le tissu ou l’organe concerné : dans ce cas, on fait généralement appel à la radiothérapie. Elle consiste à émettre des radiations ionisantes qui vont réagir avec l’eau des cellules pour former des

17 Robert, J. Bull. Cancer (Paris) 2013, 100 (4), 333–342

(37)

25

espèces réactives de l’oxygène. Ces dernières entrainent alors des lésions cellulaires au niveau de l’organe visé, conduisant à la destruction des cellules cancéreuses.

Les traitements généraux

comprennent principalement l’hormonothérapie, l’immuno-thérapie et la chimiol’immuno-thérapie. L’hormonol’immuno-thérapie est utilisée pour des tumeurs particulières dites hormonodépendantes, dans le cancer du sein ou de la prostate. Elle consiste à inhiber les hormones ou leur production. Les traitements d’immunothérapie ont pour but de stimuler la réponse immunitaire du patient. La chimiothérapie se base sur le principe que les cellules cancéreuses sont des cellules à prolifération rapide, et que l’utilisation de molécules agissant sur leur division (réplication de l’ADN, mitose...) permet de les inhiber ou de les détruire préférentiellement aux autres cellules de l’organisme, qui prolifèrent peu ou pas.

Il existe différentes classes de médicaments cytotoxiques

Les antimétabolites : interfèrent avec les acides nucléiques

Les agents ayant une action directe sur l’ADN : agents alkylants, intercalants ou scindants

Les agents agissant sur les protéines : inhibiteurs de topoisomérases et poisons du fuseau.

Les médicaments de chimiothérapie sont le plus souvent utilisés en association, c’est la polychimiothérapie. Elle permet ainsi d’avoir une efficacité accrue, en diminuant le risque de résistance et en ayant des effets synergiques, sans augmenter le risque de toxicité, les doses restant les mêmes ou étant diminuées. A titre d’exemple, dans le cancer de l'ovaire, on a pu démontrer qu'on obtenait un taux de réponse plus important en associant le paclitaxel (Taxol) au cisplatine plutôt qu'en utilisant le cisplatine seul. La polychimiothérapie repose sur 4 principes :

- Il est nécessaire que tous les médicaments utilisés soient actifs contre la tumeur, - Ils ont des mécanismes d’action différents,

- Ils ont des profils de toxicité différents,

- Ils sont administrés à des posologies et à des moments permettant une efficacité optimale. Dans ce travail, nous nous intéressons plus particulièrement à des molécules ciblant le cytosquelette.

(38)

26

IV.

Cibler le cytosquelette en thérapeutique

Comme nous l’avons vu dans ce chapitre, le cytosquelette est un élément majeur de l’architecture et de l’organisation cellulaires. D’autre part, les cellules impliquées dans le processus de cancérisation possèdent des caractéristiques particulières, et notamment un potentiel de division bien supérieur à celui des cellules saines. En effet, l’échappement aux points de contrôle du cycle confère aux cellules tumorales une activité hyperproliférative. Du fait du rôle essentiel du cytosquelette et en particulier des microtubules dans le processus de mitose, le fuseau mitotique est très rapidement apparu comme une cible de choix pour les traitements anti-cancéreux.

A.

Les poisons du fuseau

Les poisons du fuseau agissent directement sur le fuseau mitotique et vont ainsi perturber la division cellulaire, entrainant des anomalies chromosomiques ou encore la mort cellulaire. Ils sont pour la majorité des composés d’origine naturelle ou dérivent de produits naturels, découverts par le criblage de plantes terrestres ou marines et d’espèces animales marines.

Les substances actives peuvent être divisées en deux groupes selon leur mécanisme d’action : Les agents inhibiteurs de la polymérisation, appelés aussi agents déstabilisateurs des microtubules, comprennent les vinca-alcaloïdes et associés ainsi que les molécules se liant au site de reconnaissance de la colchicine. Les inhibiteurs de la dépolymérisation ou stabilisateurs des microtubules, comprennent notamment les taxanes et les épothilones.

Plusieurs sites de reconnaissance de ces agents avec la tubuline ont été identifiés19, la plupart

localisés au niveau de la tubuline β (Figure 12).

(39)

27

Figure 12 : Les sites de fixation des poisons du fuseau

Les poisons du fuseau se liant au site de reconnaissance des

vinca-alcaloïdes

a.

Les vinca-alcaloïdes

Dans les années 1950, il a été mis en évidence l’activité antitumorale des extraits de la pervenche de Madagascar Catharanthus roseus20. L’étude de ces extraits a permis d’identifier deux alcaloïdes

indoliques dimères : la vinblastine et la vincristine, commercialisées sous les noms de Velbé® et Oncovin®. Ces molécules sont composées de deux parties dérivées respectivement de la catharanthine et de la vindoline, deux alcaloïdes identifiés aussi dans la pervenche (Figure 13)

N N OCOMe COOMe HO R MeO N H N OH MeOOC Partie catharanthine Partie vindoline R = CH3 Vinblastine R = CHO Vincristine

Figure 13 : Structure de la vinblastine et de la vincristine

(40)

28

Le développement d’une méthode de couplage des monomères en 1974 permet désormais l’hémisynthèse de ces composés, nécessaire car, si le rendement d’extraction des dimères était très faible, les deux monomères catharanthine et vindoline sont eux présents en quantité appréciable dans la plante. Cette méthode a également permis la synthèse d’autres analogues tels que la vindésine (Eldisine®) ou encore la vinorelbine (Navelbine®) et la vinflunine (Javlor®). Les structures de ces composés sont présentées dans la Figure 14 suivante.

Figure 14 : Structures de vinca-alcaloïdes

On notera que la vinflunine et la vinorelbine sont constituées d’un cycle à 8 chainons au niveau de la partie catharanthine, contre neuf pour les composés naturels et la vindésine.

Les vinca-alcaloïdes se lient à la tubuline β, proche du site de liaison du GTP, au niveau de ce que l’on appelle le site de reconnaissance des vinca-alcaloïdes (Figure 15). Ils viennent préférentiellement se fixer à l’extrémité (+) des microtubules, et vont ainsi prévenir la polymérisation de la tubuline en microtubules en empêchant l’addition d’un nouvel hétérodimère.

(41)

29

Figure 15 : Site de fixation de la vinblastine

Ces molécules sont utilisées actuellement en thérapeutique dans le traitement des tumeurs de l’enfant, leucémies et lymphomes, et de certaines tumeurs solides (cancer du sein métastatique, cancer du poumon « non à petites cellules », vessie, rein…). Ils peuvent être utilisés seuls ou en combinaison avec d’autres agents cytotoxiques.

b.

L’halichondrine B et l’éribuline

Isolée pour la première fois à partir de l'éponge marine Halichondria okadai, et plus tard d'Axinella sp., l'halichondrine B a montré une bonne activité sur la tubuline21. Des tests comparatifs

avec les autres poisons du fuseau ont révélé que ce composé vient se fixer sur le site de liaison des vinca-alcaloïdes. L’halichondrine B reste cependant rare à l’état naturel, et la complexité de sa structure ne facilite pas sa synthèse (Figure 16). De ce fait, la recherche s’oriente davantage vers des analogues synthétiques simplifiés.

L’un de ces analogues, l’éribuline, conserve la structure responsable de l’activité antimitotique, sur laquelle est ajoutée une fonction amine22. Ce dérivé a été développé et est disponible sous forme

de mésylate sur le marché depuis 2012 pour le traitement du cancer du sein métastatique résistant, sous la dénomination Halaven®.

21 Hirata, Y.; Uemura, D. Pure Appl. Chem. 1986, 58 (5)

(42)

30

Figure 16 : L’halichondrine B et son analogue synthétique éribuline

c.

Hémiasterlines et dérivés

Les hémiasterline A et B ont été isolées pour la première fois à partir de l'éponge marine Hemiasterella minor. Ce sont des tripeptides qui manifestent des activités antiprolifératives par action sur le site de reconnaissance des vinca-alcaloides23. Cependant, cette activité est associée à une grande

toxicité in vivo. N R HN N H O O N COOH N N H O O N COOH Hémiasterline A R = CH3 Hémiasterline B R = H E7974

Figure 17 : Hémiasterlines et dérivés

Le dérivé synthétique E7974, moins toxique, est étudié pour le traitement de tumeurs solides, et a complété plusieurs essais cliniques de phase 124.

23 Anderson, H. J.; Coleman, J. E.; Andersen, R. J.; Roberge, M. Cancer Chemother. Pharmacol. 1996, 39 (3), 223–

226

24 Kuznetsov, G.; TenDyke, K.; Towle, M. J.; Cheng, H.; Liu, J.; Marsh, J. P.; Schiller, S. E. R.; Spyvee, M. R.; Yang,

H.; Seletsky, B. M.; Shaffer, C. J.; Marceau, V.; Yao, Y.; Suh, E. M.; Campagna, S.; Fang, F. G.; Kowalczyk, J. J.; Littlefield, B. A. Mol. Cancer Ther. 2009, 8 (10), 2852–2860

(43)

31

d.

Tubulysine A

La tubulysine A a été isolée de la myxobactérie Archangium geophyra. Il s’agit d’un tétrapeptide linéaire contenant un thiazole central (Figure 18).

Figure 18 : Structure de la tubulysine A

Son activité antiproliférative est estimée à 16 fois supérieure à celle de la vinblastine. Le développement est encore en cours, peu de tests in vivo ont pour l’instant été réalisés25.

e.

Autres

D’autres agents tels que la rhizoxine ou la dolastatine 10 n’ont pas poursuivi les tests cliniques du fait de faibles activités in vivo ou de toxicité sévère.

Les poisons de fuseau se liant au site de reconnaissance de la colchicine

a.

La colchicine

La colchicine a été isolée de la plante Colchicum autumnale. Elle se fixe à l’interface de la tubuline α et de la tubuline β, proche du site de fixation du GTP de la tubuline α26 (Figure 19). Dans un premier

temps, la colchicine va former un complexe avec le dimère de tubuline. Celui-ci peut alors être incorporé au polymère, mais va ralentir la polymérisation et obstruer le contact latéral entre les protofilaments.

25 Murray, B. C.; Peterson, M. T.; Fecik, R. A. Nat Prod Rep 2015, 32 (5), 654–662

(44)

32

Figure 19 : Structure et site de fixation de la colchicine

Si l’activité de la colchicine est intéressante, son faible index thérapeutique limite son utilisation comme molécule anticancéreuse. Elle est utilisée pour le traitement de la goutte. Du fait de l’intérêt de l’activité de la colchicine, la recherche d’agents liant ce site de fixation s’est développée27.

b.

Les combretastatines

Les combretastatines ont été extraites de l’écorce de Combretum caffrum. La combretastatine A-4, isolée en 1987, possède l’activité anticancéreuse la plus intéressante dans ce groupe28. Elle se lie

au site de liaison de la colchicine et induit un désassemblage des microtubules. Cependant, les faibles solubilité et biodisponibilité ont limité son développement comme molécule à visée anticancéreuse. Plusieurs prodrogues solubles dans l’eau ont été synthétisé, notamment la combretastatine A-4 Phosphate ou CA-4P, qui a complété plusieurs tests cliniques de phase II pour le traitement de tumeurs solides. O O O O OR Combretastatine A-4 R=H

Combretastatine A-4P R=P(O)(ONa)2

Figure 20 : Structure des combretastatines

Ces composés ont également montré une bonne activité anti-angiogénique.

27 Lu, Y.; Chen, J.; Xiao, M.; Li, W.; Miller, D. D. Pharm. Res. 2012, 29 (11), 2943–2971 28 Lin, C. M.; Ho, H. H.; Pettit, G. R.; Hamel, E. Biochemistry (Mosc.) 1989, 28 (17), 6984–6991

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Les taxanes

Le paclitaxel (Taxol®) a été isolé de l’écorce de Taxus brevifolia, l’if de la côte ouest des Etats-Unis, en 1967. Du fait de la faible teneur en paclitaxel, de l’ordre de 100 g par tonne d‘écorces sèches, l’étude pharmacologique et clinique de la plante a été ralentie. Ce n’est qu’en 1979 qu’a été publié le mode d’action original de cette molécule : contrairement aux vinca-alcaloïdes et la colchicine, le taxol se fixe au filament de microtubule et empêche son désassemblage. Il se lie à une poche située sur la face interne des microtubules au niveau de la tubuline β (Figure 21) et stabilise le protofilament lié au GDP pour le convertir en une structure liée au GTP, plus stable29.

Figure 21 : Site de liaison du paclitaxel

En France, P. Potier, D. Guénad et F. Guéritte de l’Institut de Chimie des substances naturelles du CNRS à Gif-sur-Yvette s’intéressèrent à l’if européen Taxus baccata et mirent en évidence la présence du paclitaxel dans les écorces du tronc. Par ailleurs, ils identifièrent dans les feuilles de la plante une molécule proche du paclitaxel, la 10-désacétylbaccatine III, ne présentant pas d’activité cytotoxique mais 10 fois plus abondante que le taxol (1g/kg de feuilles). Cette molécule a donc servi de précurseur pour l’hémisynthèse du taxol.

D’autre part, un analogue semi synthétique, le docétaxel (Taxotère®) a montré une activité antiproliférative deux fois supérieure à celle du taxol30. D’un point de vue pharmacologique, ces

médicaments ont des indications similaires, seuls ou en association avec d’autres composés anti-cancéreux : ils sont utilisés dans le traitement du cancer du sein et des ovaires, le sarcome de Kaposi et le cancer du poumon à petites cellules. En plus de celles-ci le docétaxel possède aussi des

29 Nogales, E.; Grayer Wolf, S.; Khan, I. A.; Ludueña, R. F.; Downing, K. H. Nature 1995, 375 (6530), 424–427 30 Gueritte-Voegelein, F.; Guenard, D.; Lavelle, F.; Le Goff, M. T.; Mangatal, L.; Potier, P. J. Med. Chem. 1991, 34

Références

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