Les crânes de la Pierre-aux-Dames (Troinex, Genève) : problèmes liés à l'attribution chronologique et culturelle

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Les crânes de la Pierre-aux-Dames (Troinex, Genève) : problèmes liés à l'attribution chronologique et culturelle

KRAMAR, Christiane, MENK, Roland

Abstract

Cette étude a pour but d'apporter davantage de précision quant à l'attribution chronologique et culturelle des restes osseux du lieu-dit La Pierre-aux-Dames, Troinex (Genève). Ce matériel est à la fois très fragmentaire et très mal documenté sur le plan archéologique. En combinant une approche biométrique multivariée (analyse discriminante, calcul des probabilités d'appartenance par rapport à huit groupes régionaux de référence) et l'interprétation des quelques indicateurs d'ordre culturel (inhumation), on arrive à la conclusion que les individus pourraient être rattachés à une période allant de la fin du Bronze jusqu'à la fin du premier âge du Fer.

KRAMAR, Christiane, MENK, Roland. Les crânes de la Pierre-aux-Dames (Troinex, Genève) : problèmes liés à l'attribution chronologique et culturelle. Archives suisses d'anthropologie générale , 1979, vol. 43, no. 1, p. 11-20

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Archives suisses d'anthropologie générale, Genève, 43, l, 1979, 11-20.

Les crânes de la Pierre-aux-Dames (Troinex, Genève).

Problèmes liés à l'attribution chronologique et culturelle

par

Christiane KRAMAR et Roland MENK

Introduction

Le but de ce travail est de tenter une attribution chronologique de restes osseux ¹ provenant du tumulus dit de la Pierre-aux-Dames, situé à Troinex, dans le canton de Genève.

Outre le type de sépulture, aucun renseignement archéologique n'est à notre disposition;

nous avons donc dû utiliser, en partie, l'analyse statistique des caractères crâniens métriques.

Il est évident que ce n'est qu'en dernier recours que ce genre de recherche doit être entrepris.

Plusieurs incertitudes ou lacunes rendent cette tentative difficile (nombre restreint de mesures anthropologiques possibles, doutes quant à la provenance exacte des restes osseux que nous avons étudiés).

Rappelons brièvement ce qu'était ce tumulus ², d'où il tire son nom et ce qu'il renfer- mait. Il s'agit d'un tertre de forme ovale, dont les dimensions, selon Burdallet, étaient de 36 mètres sur 29 et dont la hauteur variait entre 3.6 et 5 mètres. Sur son sommet se trouvait un bloc erratique de gneiss (dimensions: 3 m x 1.5 m x 1 m), grossièrement sculpté de quatre figures énigmatiques: la Pierre-aux-Dames. Les questions au sujet de l'époque des sculptures et de leur signification restent fort nombreuses ³ (s'agit-il des Suleviae? Ont-elles été sculptées à l'époque romaine ou plus récemment?)

Ce bloc était accompagnée d'un menhir couché et faisait partie, selon Blondel (1943), avec d'autres menhirs plus ou moins éloignés, d'un des plus importants ensembles mégali- thiques de Suisse.

Signalé en 1819 par Salverte (voir Blondel 1943), ce tumulus fut fouillé à plusieurs reprises (en 1847, 1867 et 1872 ⁴) : ces fouilles restèrent négatives. En décembre 1877, le propriétaire du terrain fait raser le monticule, ce qui permit de découvrir à son sommet quatre sépultures et, à sa base, plusieurs crânes disséminés et des ossements apparentés.

Ces sépultures, selon un plan de Perusset (fig. 1) étaient orientées nord-ouest sud-est et contenaient les restes de sept personnes. Trois étaient doubles, avec des squelettes tête- bêche. La disposition était semblable pour chaque individu: allongé sur le dos, une pierre sous la tête et deux pierres latérales en schiste vert, touchant chaque épaule.

1 Ces os appartiennent au Muséum de Genève et sont déposés au Département d' Anthropologie de Genève.

2 Par commodité nous continuerons à parler de tumulus, bien que sa nature ne soit pas encore définie. En effet, certains auteurs le croient naturel, d'autres artificiel.

3 Si l'on en croit la légende locale, ces figures seraient l'effigie de quatre femmes malheureuses, éprises d'un même amant et couchées sous cette pierre, dans un même tombeau! (Dictionnaire géographique de la Suisse, 1910.

Neuchâtel, Attinger).

4 C'est à cette date que la Pierre-aux-Dames fut transportée à la Promenade des Bastions. Elle se trouve actuelle- ment au Musée d'Art et d'Histoire de Genève.

Mentionnons encore les nombreux doutes qui planent au sujet de ces sépultures et de leur contenu. Outre le fait, que nous laissons de côté, de savoir s'il s'agit de tombes ou de simples fosses, une question importante se rapporte au nombre de sujets découverts et à leur localisation dans le tumulus. Perusset, dans une lettre, parle de cinq squelettes, alors qu'il en dessine sept sur le plan! Kollmann étudie, en 1890, cinq crânes qui proviendraient des sépultures allongées; nous n'en avons plus que trois! Enfin, Blondel parle de sept sque- lettes intacts!

Aujourd'hui, rien ne nous assure que les restes à notre disposition proviennent effective- ment des sépultures orientées; y a-t-il eu mélange avec les crânes découverts au pied du tumulus?

Plan du monticule de la Pierre aux Dames lfl 8 51

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1

Fra. 1. - Plan des sépultures situées sous la Pierre-aux-Dames (Troinex, GE), par Perusset (d'après Blondel 1943). Cliché prêté par le Musée d'Art et d'Histoire.

Présentation anthropologique

1. Inventaire du matériel ostéologique de la Pierre-aux-Dames.

Des sept squelettes intacts dont parle Blondel, nous n'avons plus que quelques fragments crâniens appartenant à trois sujets:

a. un calvarium (n° 621-1);

b. une calotte, sans les temporaux (n° 621-2);

c. une calotte (présentant quelques petites lacunes) (n° 621-3), à laquelle est joint, sous le même numéro, un fragment droit de mandibule (niveau du trigone mentonnier, trois dents en place: la canine et les première et deuxième molaires) dont l'association au sujet 621-3 nous semble douteuse. En effet, cette mandibule porte trois dents très usées, son trigone semble masculin, ce qui ne concorde pas avec l'âge et le sexe de la calotte.

LES CRÂNES DE LA PIERRE-AUX-DAMES (TROINEX, GENÈVE) 13 2. Age et sexe des trois sujets de la Pierre-aux-Dames.

L'état fragmentaire des ossements n'a malheureusement permis qu'un nombre restreint de constatations et de mesures ¹• Du fait que la détermination du sexe ² repose seulement sur des caractères crâniens (en plus sur un nombre réduit, 6 sur 12), nous attribuons au sujet 621-1 un sexe probablement masculin et aux crânes 621-2 et 621-3 le sexe féminin.

La détermination de l'âge ³ nous laisse également insatisfaits, vu l'état incomplet des ossements. Aussi nous préférons classer nos sujets selon Martin (1959) plutôt que leur don- ner un âge déterminé. Les sujets 621-1 et 621-2 appartiennent à la classe senilis (plus de 50 ans) et le crâne 621-3 pourrait se situer dans les classes juvenis (17-22 ans) ou adultus (23-30 ans); l'attribution à l'une ou l'autre classe dépendant de l'état de la dentition et de la suture sphéno-basilaire, il nous est évidemment impossible de la préciser.

3. Données métriques.

Nos mesures confirment ce que Kollmann avait indiqué: la variabilité des différents sujets est grande. En effet, trois classes d'indice crânien sont représentées! L'homme (621-1) est mésocrâne, les femmes sont, l'une dolichocrâne (621-2) et l'autre (621-3) brachycrâne.

Le mauvais état de ces crânes n'a permis que les mesures indiquées au tableau 1.

TABLEAU 1. - Mesures et indices des crânes de la Pierre-aux-Dames

Crâne Crâne Crâne

N° Martin Mesures et indices 621-1 il 621-2 ~ 621-3 ~

> 50 ans > 50 ans 17-30 ans

1 Diam. antéro-postérieur 190 183 183

8 Diam. transverse 145 133 148

9 Diam. frontal minimum 101 90 (98)

10 Diam. frontal maximum 122 (116) (122)

5 Diam. naso-basilaire (101) - -

11 Diam. biauriculaire 131 - (125)

12 Diam. biastérique 114 -

-

17 Haut. basio-bregmatique 140 - -

20 Haut. auriculo-bregmatique 121

-

7 DAP trou occipital (39) -

-

16 DT trou occipital 31 - -

23 Courbe horizontale totale 533 (520) (520)

27 Courbe pariétale 126 (140) 138

28 Courbe occipitale totale - - 111

8/1 Indice crânien 76.3 72.7 80.9

17/1 Indice vertical de longueur 73.7 -

-

17/8 Indice vertical de largeur 96.6

-

20/1 Indice hauteur auric. long. 63.7 - 65.6

9/8 Indice fronto-pariétal transv. 69.7 67.7 66.2

1 Un nombre plus élevé de données individuelles aurait permis d'asseoir l'analyse statistique sur des bases plus sûres.

2 D'après Acsadi et Nemeskéri (1970).

s D'après Acsadi et Nemeskéri (1970).

\

FrG. 2. - Troinex GE. La Pierre-aux-Dames. Crânes 621-1, 621-2 et 621-3. Norma verticalis.

Orientation: plan de Francfort. Ech. 1 :3.

4. Données scopiques.

En norma verticalis, selon la classification de Sergi, les crânes 621-1 et 621-3 sont de forme pentagonoïde (avec une plagiocéphalie frontale peu prononcée pour l'homme) et le 621-2 est ovoïde.

En norma lateralis, nous remarquons un léger chignon occipital sur les sujets 621-1 et 621-3, ainsi qu'un méplat obélique peu prononcé sur le 621-2. Notons une similitude de forme des crânes 621-1 et 621-3.

En norma occipitalis, tous trois présentent une forme générale pentagonale, dite « en forme de maison».

Une seule particularité est à souligner: de fortes empreintes bilatérales sur le frontal du sujet 621-3, marquant le trajet de l'artère sus-orbitaire. Nous ne trouvons ni métopisme ni os wormien.

Essai d'attribution chronologique 1. Approche biométrique.

Dans le but d'obtenir davantage de précision concernant l'attribution chronologique de nos trois individus - issus, rappelons-le, d'un contexte archéologique très mal établi - nous avons essayé de mettre à contribution leurs propriétés morphologiques.

LES CRÂNES DE LA PIERRE-AUX-DAMES (TROINEX, GENÈVE) 15

FIG. 3. - Troinex GE. La Pierre-aux-Dames. Crânes 621-1, 621-2 et 621-3. Norma /atcralis.

Orientation: plan de Francfort. Ech. 1 :3.

A ce propos nous les avons comparés à toute une série d'individus de référence, prove- nant de différentes époques de nos régions et appartenant à différents groupes culturels et ethniques.

Les groupes de référence, dont nous avons utilisé les données individuelles, sont les suivants:

1) Néolithique moyen (N=64): Sauter (1973).

2) Néolithique récent (N = 8): Sauter (inédit).

3) Bronze récent et final (N=34): Pittard (1899, 1935); Verneau (1894); Schenk (1909);

Simon (1979).

4) Age du Fer (N=8): Pittard (1915, 1938).

5) La Tène (N=46): Pittard (1923); Palvolgyi (1975); Virchow (1883); Pilliez (1974);

Trois groupes du haut Moyen Age: Sauter (1941); Hug (1938), dont:

6) des Burgondes romands (N = 102);

7) des Burgondes alémaniques (N = 64);

8) des Alamans (N = 50).

Le but étant d'exprimer, sous une forme quantitative et probabiliste, l'affinité phéno- typique de chacun des trois individus par rapport aux huit groupes de référence, nous avons eu recours à une méthode de classification numérique (calcul des probabilités d'appartenance) décrite par Cooley et Lohnes (1962). Cette méthode consiste à effectuer, dans une première phase, une analyse discriminante multiple sur les huit groupes ¹ (dont l'âge du Fer, auquel nous avons attribué, à titre provisoire, nos trois sujets).

Dans l'espace discriminant ainsi obtenu, on a recalculé les variances intragroupes respectives D qui entrent dans la formule du calcul des probabilités d'appartenance (voir ci-après), ainsi que dans l'algorithme des ellipses équiprobables (fig. 4), qui permettent de visualiser ces dernières.

La probabilité d'appartenance Pu d'un individu i au groupe j est donnée, selon le théo- rème de Bayes, par

où

NG

Xii 2

xi

=

Pi

NG k=l

I

nombre de groupes

, n-1

Xi j X;

- xij

- 2 -

2 - Xik

- 2 -

[1]

[2]

vecteur des différences des fonctions discriminantes de l'individu i au centroïde j.

Ni

=

Il convient de remarquer ici que nous avons entrepris cette démarche non sans scru- pules et bien à contre-cœur car - d'une part - nous étions obligés de nous limiter à un petit nombre de variables carniométriques (9 mesures se rapportant exclusivement au neuro- crâne) et - d'autre part, et cela d'une manière très générale - étant donné le faible dimor- phisme entre les groupes régionaux, on est toujours exposé au risque d'erreurs dues à des convergences morphologiques. Si nous avons tout de même emprunté cette voie, c'est en tout dernier ressort, par manque d'alternatives.

Résultats. Nous avons obtenu pour nos trois sujets les probabilités d'appartenance, aux groupes de référence, qui sont indiquées au tableau 2.

1 Afin de simplifier la procédure (les trois sujets n'appartenant pas au même sexe), nous avons réuni en un seul groupe les deux sous-ensembles sexuels après avoir transformé, en deux passages indt!pendants, les données brutes en données centrées réduites.

LES CRÂNES DE LA PIERRE-AUX-DAMES (TROINEX, GENÈVE) 17

TABLEAU 2. - Probabilités d'appartenance des crânes de la Pierre-aux-Dames

1 2 3 4 5 6 7 8

Crânes N° Néo!. Néo!. Bronze Fer La Tène Burg. Burg. Alamans

moyen récent romands além.

621-1 0.26 0.01 0.03 0.17 0.08 0.07 0.30 0.08

621-2 0.01 0.00 0.12 0.37 0.06 0.33 0.00 0.11

621-3 0.09 0.01 0.07 0.11 0.10 0.28 0.32 0.01

Leurs affinités phénotypiques ne sont pas sans ambiguïtés: les probabilités d'apparte- nance aux huit groupes de référence étant quelque peu confuses. Mais toujours est-il que les plus fortes se trouvent, pour tous les trois sujets, aux groupes « âge du Fer» et « Bur- gondes», l'individu 621-1 étant à cheval, en plus, avec le « Néolithique moyen». Nous essayerons d'affiner ces premières conclusions en tirant parti des quelques indicateurs d'ordre culturel dont on dispose.

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FIG. 4. - Représentation, dans un plan discriminant (axes 1 et 2, exprimant le 36 % et le 33 % de la variance totale) des trois sujets provenant du tumulus de la Pierre-aux-Dames, ainsi que des huit groupes choisis comme réfürences. Ces der- niers sont représentés par des ellipses équiprobables (contour renfermant le 90 ~~ des individus), ainsi que par leur centroi'de.

Il faut noter la très grande ressemblance des groupes (superposition des ellipses), à l'exception toutefois des Alamans.

1. Néolithique moyen; 2. Neolithique récent; 3. Bronze; 4. Fer; 5. La Tène; 6. Burgondes romands; 7. Burgondes alé- maniques; 8. Alamans.

Arch. suisses d'anthrop. gén., 43, 1979 ²

Quelques remarques au sujet du manque de netteté des résultats de cet essai de classi- fication s'imposent. Tout d'abord il faut noter que les huit populations de référence sont morphologiquement très peu différenciées les unes des autres (voir fig. 4). Il y aura à déter- miner ultérieurement, par une analyse plus détaillée, si cette constellation « estompée » correspond pleinement à la réalité morphologique, ou bien s'il s'agit là d'un artefact dû au fait que nous étions contraints, ici, de nous limiter à quelques mensurations du seul neuro- crâne.

Ensuite, le groupe « âge du Fer» - envers lequel les trois individus montrent certaines affinités - se distingue de tous les autres par son intravariance très petite (voir fig. 4: surface très réduite de son ellipse équiprobable). Or, ce fait a pour conséquence, (en vertu de [1]), que les probabilités d'appartenance des sujets pour ce groupe sont considérablement sous- estimées. Du même coup, celles des groupes « La Tène» et « Alamans » sont un peu sur- évaluées à cause du phénomène opposé.

Compte tenu de ces éléments, les probabilités d'appartenance prennent une signification moins diffuse: les affinités se polarisent donc sur l'âge du Fer, les Burgondes et, pour le 621-1, sur le Néolithique moyen.

2. Analyse culturelle : les sépultures.

Lors de la description des sépultures de la Pierre-aux-Dames, nous avons mentionné la position allongée des sujets, la présence d'un coussin de pierre, celle de pierres latérales touchant les épaules et surtout la disposition tête-bêche de six squelettes.

La position allongée ne nous permet aucune décision pour les périodes postérieures au Néolithique moyen (qu'elle exclut), puisqu'elle se perpétue à différentes époques. Par contre, d'autres rites sont plus rares, donc plus caractéristiques, et permettent de situer chronolo- giquement des restes osseux. C'est le cas de la disposition tête-bêche que l'on peut retrouver à deux époques: au Bronze ancien et à la période de La Tène. Dans cette dernière, la tête du cadavre reposait parfois sur une pierre. Il a été trouvé de telles inhumations à St-Martin, Fribourg, à Einigen près Spiez, Berne (Sauter 1977), pour le Bronze ancien; pour la période de La Tène à Münsingen, Berne (Viollier 1911).

La présence de pierres latérales aux épaules n'ayant pas d'équivalent, à notre connais- sance, il n'est pas possible d'utiliser cette caractéristique pour nos comparaisons.

Conclusions

Les trois individus qui sont l'objet de la présente étude font partie du lot de 5 crânes confiés autrefois à Kollmann. Il s'agit, selon toute vraisemblance, d'occupants des sépultures allongées établies au sommet du tumulus de la Pierre-aux-Dames. Le mode d'inhumation autorise donc à dire qu'ils sont postérieurs au Néolithique. On peut par ailleurs affirmer leur contemporanéité.

L'approche biométrique que nous avons effectuée permettrait d'attribuer nos trois sujets, soit à l'âge du Fer, soit au haut moyen âge.

Dans le premier cas, les affinités avec le groupe de La Tène étant très faibles, nous serions tentés de l'exclure. Quant à l'époque romaine, nous l'éliminerions aussi, avec la réserve que la pratique de l'incinération nous a privés d'un grand nombre de sujets de comparaison, ce qui nous a fait renoncer à utiliser les trop rares données disponibles.

Dans le deuxième cas, on doit admettre que le degré de ressemblance est élevé.

Mais l'archéologie nous paraît pouvoir affiner nos conclusions. En effet, le type de sépulture ne semble pas correspondre à ce qu'on connaît au haut moyen âge dans la région.

LES CRÂNES DE LA PIERRE-AUX-DAMES (TROINEX, GENÈVE) 19 II en résulte que nous pouvons considérer nos trois sujets comme appartenant à la longue période qui s'étend de la fin de l'âge du Bronze à la fin du premier âge du Fer. Nous sommes conscients de la relativité de cette conclusion, mais il y a trop d'incertitudes pour que nous ne soyons incités à la prudence.

RÉSUMÉ

Cette étude a pour but d'apporter davantage de précision quant à l'attribution chrono- logique et culturelle des restes osseux du lieu-dit La Pierre-aux-Dames, Troinex (Genève).

Ce matériel est à la fois très fragmentaire et très mal documenté sur le plan archéologique.

En combinant une approche biométrique multivariée (analyse discriminante, calcul des probabilités d'appartenance par rapport à huit groupes régionaux de référence) et l'inter- prétation des quelques indicateurs d'ordre culturel (inhumation), on arrive à la conclusion que les individus pourraient être rattachés à une période allant de la fin du Bronze jusqu'à la fin du premier âge du Fer.

ZUSAMMENFASSUNG

In dieser Arbeit werden die Skelettreste von La Pierre-aux-Dames, Troinex (Genf) neu bearbeit. Es wird versucht, das osteologisch schlecht erhaltene und archaeologisch unzureichend dokumentierte Material chronologisch und kulturell genauer einzustufen.

Aufgrund eines kombinierten Vorgehens, bestehend aus einem biometrischen Ansatz (multiple Diskriminanzanalyse; Berechnung der Zugehêirigkeitswahrscheinlichkeiten der Individuen zu acht regionalen Vergleichsgruppen) und der Interpretation der wenigen kulturellen Indikatoren (Bestattungsart), kann geschlossen werden, dass die zur Diskussion stehenden Individuen in eine von Ende Bronzezeit bis Mitte Eisenzeit dauernden Periode einzuordnen sind.

SUMMARY

In this study the skeletal remains from La Pierre-aux-Dames, Troinex (Geneva, Switzer- land) are re-examined. The authors tried to obtain additional information as to the chrono- logical and cultural attribution of the osteologically badly conserved, and archaeologically insufficiently documented material. On the basis of a combined approach - biometrical analysis (multiple discriminant analysis; computation of membership probabilities with respect to eight regional reference populations), and interpretation of the few cultural indicators (burial modalities) - it is concluded, that the discussed material can be attributed to a period lasting from the end of Bronze Age until to the middle of Iron Age.

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