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L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

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Master

Reference

L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

SCHNYDER, Manon

Abstract

Cette recherche questionne l'intérêt des filles et des garçons face aux différentes disciplines scientifiques. Au niveau des études secondaires et supérieures, nous remarquons que la répartition des sexes dans les filières scientifiques varie fortement d'une discipline à l'autre.

Par exemple, la présence des filles est largement majoritaire en Biologie, minoritaire en Physique et très rare en Informatique. Ces disparités sont-elles le fruit d'une différence d'intérêt naturelle entre les sexes ou le résultat d'une influence sociale marquée par des stéréotypes sexués ? Ce travail apporte un éclairage à ces questions en interrogeant les intérêts scientifiques d'élèves âgés entre huit et dix ans.

SCHNYDER, Manon. L'intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons. Master : Univ. Genève, 2014

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:35423

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L’intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

Mémoire réalisé en vue de l’obtention de la Maîtrise en Enseignement Primaire (MAEP)

PAR

Manon SCHNYDER

DIRECTRICE DU MÉMOIRE JURY

Isabelle Collet Christine Del Notaro

Anne Perréard Vité

Genève, février 2014 UNIVERSITÉ DE GENÈVE

INSTITUT UNIVERSITAIRE DE FORMATION DES ENSEIGNANTS

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RÉSUMÉ

Cette recherche questionne l’intérêt des filles et des garçons face aux différentes disciplines scientifiques. Au niveau des études secondaires et supérieures, nous remarquons que la répartition des sexes dans les filières scientifiques varie fortement d’une discipline à l’autre. Par exemple, la présence des filles est largement majoritaire en Biologie, minoritaire en Physique et très rare en Informatique. Ces disparités sont-elles le fruit d’une différence d’intérêt naturelle entre les sexes ou le résultat d’une influence sociale marquée par des stéréotypes sexués ? Ce travail apporte un éclairage à ces questions en interrogeant les intérêts scientifiques d’élèves âgés entre huit et dix ans.

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Remerciements

Avant tout, je tiens à remercier ma directrice de mémoire, Isabelle Collet, pour son encadrement, sa flexibilité et ses conseils riches et pertinents.

J’adresse aussi un très grand merci à Christine Del Notaro et Anne Perréard Vité d’avoir accepté de faire partie de mon jury et de consacrer du temps à la lecture de cet écrit.

Merci aussi aux enseignantes des différentes écoles genevoises qui ont fait passer les questionnaires dans leur classe et ont ainsi contribué à la réalisation de ce travail.

Pour finir, je remercie du fond du cœur ma famille, mes collègues et ma directrice d’école qui par leur compréhension, leurs encouragements et leurs petits mots de soutien m’ont permis de surmonter mes doutes et de croire en ce projet jusqu’au bout.

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Table des matières

I. INTRODUCTION p.6

1.1 Introduction thématique p.6

1.2 Motivations personnelles p.8

II. CADRE THÉORIQUE p.10

2.1 Introduction p.10

2.2 Définition des concepts sexe, genre et identité sexuée p.10 2.3 Construction de l’identité sexuée et socialement différenciée p.12

2.4 Rôle de l’école dans la reproduction sexuée p.15

2.5 Orientation scolaire sous l’emprise du genre p.18

2.5.1 Politiques publiques p.18

2.5.2 Cycle d’Orientation p.19

2.5.3 Études secondaires p.19

2.5.4 Études supérieures p.22

2.5.5 Professions sexuées p.23

2.5.6 Éléments conclusifs p.26

2.6 Les filles et les sciences p.26

2.6.1 Historique p.26

2.6.2 Stéréotypes scientifiques p.28

2.6.3 Constats internationaux p.29

2.6.4 Les filles et l’informatique p.29

2.6.5 Les filles, les sciences et l’école p.30

2.6.6 Les femmes et les professions scientifiques et techniques p.31

2.6.7 Les sciences à l’école p.32

III. PROBLÉMATIQUE ET QUESTIONS DE RECHERCHE p.35

3.1 Problématique p.35

3.2 Questions et hypothèses de recherche p.36

3.2.1 Principale question de recherche p.36

3.2.2 Autres questions traitées à partir du questionnaire p.36

3.2.3 Hypothèses de recherche p.36

3.2.4 Pertinence de la recherche p.37

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IV. CADRE MÉTHODOLOGIQUE p.38

4.1 Échantillon p.38

4.2 Choix de l’instrument p.39

4.2.1 Méthode p.39

4.2.2 Questionnaire quantitatif p.39

4.2.3 Informations supplémentaires sur le questionnaire et limites p.40

4.2.4 Mise en œuvre p.43

4.3 Procédure de traitement et analyse des données p.43

4.3.1 Procédure de traitement des données p.43

4.3.2 Axes d’analyse du questionnaire p.44

V. PRÉSENTATION DES RÉSULTATS ET ANALYSE p.45

5.1 Présentation des résultats du questionnaire p.45

5.1.1 Introduction p.45

5.1.2 Tendances générales p.45

5.1.3 Description des résultats par question p.50

5.1.4 Choix des élèves selon les disciplines p.61

5.2 Analyse p.64

5.2.1 Discussion et synthèse des résultats p.64

5.2.2 Réponses à la question de recherche p.73

5.2.3 Réponses aux autres questions p.75

5.2.4 Réponses aux hypothèses p.77

5.2.5 Difficultés rencontrées p.78

VI. CONCLUSION p.80

VII. BIBLIOGRAPHIE p.82

ANNEXES :

 Questionnaire quantitatif

 Regroupement des propositions du questionnaire par discipline scientifique

 Graphiques et résultats statistiques du questionnaire

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L’intérêt pour les disciplines scientifiques chez les filles et les garçons

I. INTRODUCTION 1.1 Introduction thématique

« Félicitations, c’est une fille ! »

Maternité de Genève, 3 novembre 1986. Il est une heure cinq du matin et je viens de naître. Mes parents qui ont souhaité maintenir le suspens jusqu’au bout découvrent le sexe de leur premier enfant. Cette annonce fatidique, attendue depuis de longs mois, bouleversa sans doute leur existence. Le doute disparaît enfin, la pression s’envole : ils sont désormais en mesure de définir leurs rôles et de penser leur éducation. Le mot « parents » prend un nouveau sens, se précise, il devient « parents d’une fille ». Une porte vient de s’ouvrir, celle de la projection.

Mes parents pouvaient aussitôt laisser libre cours à leur imagination en m’inventant une vie conforme à leurs représentations. Peut-être s’imaginaient-ils déjà émerveillés et fières à applaudir devant mes spectacles de ballet classique ? Ou projetaient-ils d’agrandir la bibliothèque pour aiguiser mon goût pour la lecture ? Parallèlement, ils ont sans doute, à cet instant, chassé de leur esprit bon nombre d’autres images qui auraient pris sens si j’avais été un garçon.

Vingt-sept ans plus tard, devenue jeune adulte, je tente de prendre un peu de recul sur le parcours accompli : élève studieuse, quinze ans de danse en guise d’activité extrascolaire, filière « littéraire » au collège, goût prononcé pour les langues et finalement enseignante à l’école primaire parmi 85% de filles exerçant cette profession (BPE, 2012).

Je m’aperçois donc que ma vie a jusqu’à présent suivi le sentier balisé qui aurait pu naître des espoirs de mes parents dès mon premier jour d’existence.

En d’autres termes, je suis « en adéquation parfaite » avec les représentations liées à mon sexe.

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Toutefois, je m’interroge sur les autres chemins que j’aurais pu empruntés et sur la détermination de certaines personnes, filles ou garçons, qui osent s’éloigner des sentiers battus pour embrasser une carrière dans un domaine injustement attribué à l’autre sexe. De la volonté, il en faut, car même si les écarts entre les sexes tendent à s’atténuer au niveau de la participation professionnelle et des choix d’études, certaines filières de formation restent largement plus prisées par l’un ou l’autre sexe.

En 2013, l’Office fédéral de la statistique indique que 76% de la population masculine âgée de 15 ans ou plus exerce une activité professionnelle ou est en quête d’emploi, contre 61% de la population féminine ; soit une répartition d’environ 45% de femmes contre 55% d’hommes sur le marché du travail. La différence de taux de participation professionnelle entre les sexes est donc relativement modérée. Celle-ci s’explique en partie par l’abandon professionnel provisoire de certaines femmes entre 30 et 45 ans pour fonder une famille et éduquer les enfants en bas âge, ainsi que par leur départ à la retraite plus précoce. Ainsi, au cours des vingt dernières années, l’égalité des sexes en matière d’emploi a beaucoup progressé, (même si des efforts sont encore à fournir, notamment au niveau de l’équité salariale).

En revanche, le choix de la profession et de la branche d’études reste fortement lié au sexe. Alors que les Sciences humaines et sociales dans les hautes écoles universitaires sont largement plus choisies par les femmes qui représentent 71,9% des étudiants, les Sciences exactes, économiques et techniques sont nettement plus prisées par les hommes (OFS, 2013).

Quelle est l’origine de telles différences ? Choix délibérés face à des intérêts sexués bien distincts ou ancrage des stéréotypes de sexe qui conditionnent nos parcours professionnels ?

L’objectif de ce travail de mémoire est d’apporter un éclairage à ces questions en interrogeant les intérêts scientifiques d’enfants qui se trouvent encore relativement loin de toute prise de décision quant à leur avenir professionnel.

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1.2 Motivations personnelles

Je porte depuis longtemps un intérêt particulier pour les questions relatives aux différences interpersonnelles. Je me questionne sur les sources qui influencent nos goûts et nos choix dans un monde où le paraître et le regard d’autrui semblent avoir tant d’importance. Quelles valeurs façonnent les êtres que nous sommes et guident nos parcours respectifs ? Quelle influence ont l’éducation familiale et l’instruction scolaire dans la construction de ces valeurs ? Quel poids ont la société et la culture dans la composition de nos représentations et de nos attentes ? Finalement, quelle marge reste-t-il pour la réalisation de nos volontés propres lorsque nous évoluons sous le joug d’une société exigeante ?

Ces questions aux multiples tenants et aboutissants sont intéressantes à aborder sous la perspective du genre (entendu au sens d’un système de normes de sexe différenciatrices hiérarchisant le féminin et le masculin). Filles et garçons subissent dès l’enfance une pression de conformisme liée à des attentes différenciées selon leur sexe et grandissent dans un carcan de représentations dont il est difficile de sortir.

Initialement, je souhaitais réaliser un travail sur les représentations des garçons et des filles à l’école primaire face aux différents métiers et questionner l’impact du genre sur les choix d’orientation scolaire et professionnelle. Cette thématique étant très large et ouvrant bon nombre de pistes de recherche, j’ai décidé, en discussion avec ma directrice de mémoire, de focaliser mon projet sur les intérêts variés des élèves face aux Sciences. Le domaine des Sciences est particulièrement intéressant pour questionner l’influence du genre, car nous observons au sein des études et métiers scientifiques une forte disparité des représentations féminines et masculines selon les disciplines.

Par exemple, au niveau des études supérieures à Genève, les filles sont largement majoritaires en Biologie, un petit peu moins nombreuses que les garçons en Chimie et en Sciences de la Terre et de l’Environnement, clairement minoritaires en Physique et Mathématiques et finalement très peu présentes en Informatique (Université de Genève, 2013).

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Mon projet de recherche a pour premier objectif de vérifier s’il existe dès l’enfance (8-10 ans) des intérêts différenciés entre filles et garçons face aux différentes disciplines des Sciences. Dans un second temps, j’expliciterai les résultats obtenus en émettant des hypothèses sur les origines des différences ou similitudes observées.

Ce projet de recherche m’intéresse vivement, car il met en relief les intérêts personnels des élèves dans un domaine donné. Par ailleurs, cette étude s’effectue dans un cadre familier, celui de l’enseignement primaire genevois où j’enseigne depuis un an et demi. En effet, elle cherche à définir les intérêts des élèves sur la base d’activités scientifiques en lien avec le plan d’études romand. Ainsi, ce travail impliquera également le rôle des sciences à l’école primaire dans l’élaboration de leurs représentations auprès des élèves.

Au semestre de printemps 2012, j’ai suivi le cours Genre et Éducation de Mme Isabelle Collet pendant lequel j’ai appris bon nombre de concepts liés à cette thématique. Ce cours m’a également permis de me confronter à plusieurs problématiques dérivées des stéréotypes de sexe. C’est à la suite d’une expérience marquante que j’ai vécue dans le cadre du cours : me travestir pendant une journée dans la peau d’un garçon, que mon intérêt pour les questions liées aux différences selon le sexe s’est vu confirmé.

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II. CADRE THÉORIQUE 2.1 Introduction

Pour comprendre l’enjeu de ma recherche, il est nécessaire, dans un premier temps, d’approfondir certains points théoriques en liens étroits avec ma thématique.

Tout d’abord, quelques concepts centraux seront définis dans le cadre du mémoire. Puis, j’expliciterai de quelle manière se construit l’identité sexuée et socialement différenciée et quelles sont ses diverses implications. Ensuite, je me plongerai dans l’univers scolaire pour pointer le rôle de l’école dans la reproduction sexuée. Depuis l’école primaire, je gravirai les échelons de la scolarité pour porter un regard sur l’école secondaire et les différents choix qu’elle implique au niveau de l’orientation scolaire surtout lorsque celle-ci est placée sous l’emprise du genre. Finalement, je ferai le point sur l’évolution du couple, dont la compatibilité est souvent remise en cause, formé par les filles et les sciences. Plusieurs ponts seront établis entre ces différents sujets qui sont tous étroitement liés.

2.2 Définition des concepts sexe, genre et identité sexuée

Plusieurs concepts-clefs sont à définir dans le cadre de ma recherche. Tout d’abord, il est essentiel d’établir la différence entre les termes de sexe et de genre.

Le terme sexe se rapporte au sexe biologique, attribué à chaque être humain en fonction de ses organes sexuels visibles dès la naissance (ou même avant).

En revanche, lorsque nous parlons de genre, nous faisons référence au sexe social. Carnino précise : « Le genre est une question de culture : il se réfère à la classification sociale en « masculin » et « féminin ». » (2005, p.13). Par ailleurs, les caractéristiques attribuées aux deux sexes varient selon les cultures et évoluent avec le temps. Ainsi, le genre n’est pas un concept figé, mais « les hommes et les femmes voient leurs comportements construits et appris tout au long de leur vie » (pp. 6-7). En outre, Collet et Mosconi attribuent au concept de genre l’idée d’un « rapport social de pouvoir du groupe des hommes sur le groupe des femmes, qui institue des normes de sexe

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différenciatrices et hiérarchisantes » (2010, p.101). Ces normes, précisent-elles, ne concernent pas un rapport de domination directe des individus masculins sur les femmes, mais relèvent d’un ensemble de normes organisées et imposées par notre société. Celle-ci contribue donc à perpétuer un rapport inégal entre les hommes et les femmes en attribuant aux hommes des qualités et des compétences supérieures à celles des femmes et en les plaçant comme modèles de l’humanité.

Sexe et genre sont donc étroitement liés mais se différencient sensiblement : Le genre précède le sexe, il permet de faire la distinction entre les rapports sociaux de sexe qu’il traduit et les données biologiques ou naturelles qui se rapportent au sexe.

Néanmoins, comme le soutient Collet (2011), la bi-catégorisation du sexe relève elle aussi d’une construction sociale plutôt que d’un fait purement biologique. En effet, nous ne pouvons pas réduire systématiquement les êtres humains en deux catégories selon la présence dans leur code génétique de chromosomes XX pour les femmes et XY pour les hommes : « Il existe des personnes XY qui ont des caractères sexuels féminins, des personnes XX avec des organes reproducteurs féminins potentiellement féconds et des organes génitaux externes masculins » (p.18). Même si ces personnes intersexes ne représentent qu’une minorité de la population, leur existence (plus fréquente qu’on l’imagine) questionne la pertinence de l’attribution de compétences aux individus selon leur sexe, car « avant de savoir si les hommes et les femmes ont des compétences différentes de part leur nature, il faudrait pouvoir les différencier biologiquement et sans ambigüité » (Collet, 2011, p.20).

L’attribution à un sexe n’est de ce fait pas toujours évidente et le sentiment d’appartenance au genre associé à son sexe biologique ne l’est encore moins. En effet, le genre se construit à travers un processus d’identification sexuée.

L’identité sexuée est « le sentiment intime que chacun a d’appartenir à l’un des sexes que la biologie et la culture distinguent » (Baudelot & Establet, 2007,

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p. 41). Cette identité sexuée se construit à travers la socialisation et le rapport à autrui.

Par ailleurs, l’identité sexuée ne se réduit pas au sexe anatomique et physiologique. Il faut également la considérer d’un point de vue psychologique :

Ce qui est premier pour l’individu, c’est la constitution dans son Inconscient d’une bisexualité psychique liée aux identifications à ses deux parents. Puis, […] l’enfant va prendre conscience de son sexe anatomique et découvrir la discordance entre sa bisexualité psychique et son appartenance à un seul sexe anatomique. Il va alors constituer son identité sexuelle psychique à travers la double grille des identifications aux parents et des rôles sociaux de genres. (Mosconi, 1994)

Cette identité sexuée s’achèvera normalement à la puberté, lorsque la fonction sexuelle génitale apparait. La construction de l’identité sexuée et socialement différenciée sera plus amplement détaillée dans la suite de ce mémoire.

2.3 Construction de l’identité sexuée et socialement différenciée

Dès l’âge de deux ans, les enfants sont en mesure de distinguer le féminin et le masculin. À cet âge-là, la différence entre les sexes relève davantage d’un constat et elle n’est pas entachée d’un sentiment de supériorité d’un sexe sur l’autre. En revanche, ces jeunes enfants ont tendance à valoriser leur sexe d’appartenance en préférant nettement jouer avec des camarades de leur groupe sexuel (Lorenzi-Cioldi, 1998).

Pourtant, la construction de l’identité sexuée commence bien plus tôt : dès la naissance de leur progéniture, les parents ont des perceptions variées et montrent des attentes différenciées à l’égard de leurs bambins. Par exemple, un bébé garçon qui pleure sera en colère, alors qu’un bébé fille en larmes aura peur. Ainsi, dès leur plus jeune âge, les enfants se voient attribués des émotions différentes par leurs parents en fonction de leur sexe. Ces derniers vont d’ailleurs adopter des réactions divergentes selon s’ils jugent le comportement de leurs chères têtes blondes en phase ou non avec leur

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groupe sexuel : « [ils] renforcent ou découragent les activités de jeu de leurs enfants, en fonction de ce qu’il a été convenu d’appeler une adéquation entre le sexe biologique et le genre culturel » (Lorenzi-Cioldi, 1998, p.99). À force de recevoir des signaux d’encouragement ou de dissuasion face à ses comportements et à ses choix d’activités, l’enfant se forgera progressivement une idée de ce qui est attendu de lui et sera petit à petit en mesure de catégoriser ce qui appartient ou non à son groupe sexuel.

Lorenzi-Cioldi explique d’ailleurs que vers 2-3 ans, les enfants sont capables d’associer des prénoms masculins ou féminins à des métiers stéréotypés. Ainsi, les stéréotypes de genre sont mis en place bien avant l’entrée à l’école, mais ils seront encore davantage renforcés pendant le cursus scolaire, comme j’aurai l’occasion de le développer ultérieurement.

Un article publié dans la presse locale fin 2012 a retenu toute mon attention, il s’intitulait « Sexistes, les enfants ? ». Celui-ci relevait l’engouement quasi systématique des enfants pour se tourner vers des activités et des jeux appartenant traditionnellement à leur sexe, malgré la volonté grandissante et de plus en plus déterminée de certains parents à exercer une éducation

« neutre » dépourvue de connotation sexuée. Sabrina Sinigaglia-Amadio, donne son point de vue de sociologue : « on constate chez les enfants des représentations stéréotypées de ce que sont et font les hommes et les femmes » (Migros-Magazine, 2012). L’une des explications pourrait être « le caractère cumulatif » des messages dans l’environnement des enfants. En effet, ceux-ci sont entourés de livres, publicités, chansons, vêtements, etc. qui véhiculent des stéréotypes de sexe et qui font « qu’au fil des mois et des années les enfants associent des espaces, des couleurs, des places, des métiers, des sentiments, etc. à un sexe et arrivent difficilement à penser que l’autre sexe puisse également faire, dire, penser, agir dans les mêmes espaces. ». L’enfant, baignant dans un milieu rempli de stéréotypes sexués, va inconsciemment retenir et catégoriser les activités selon le sexe. C’est principalement en s’appuyant sur ces catégories que l’enfant se forgera son identité sexuée.

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Une autre sociologue, Christine Détrez, s’est intéressée au rôle de la représentation du corps dans la propagation des stéréotypes : « Le corps est un construit social : les mises en jeu répétées du corps le forment, le déforment, le conforment, incorporant en quelques sortes les marquages sociaux. » (2006, p.2). En outre, elle s’interroge sur le terme de construction sociale : « La notion de construction sociale semble établir une distinction entre un donné « naturel » et inaliénable et ce qui relèverait ensuite de la socialisation » (Détrez, 2006, p.2).

Sur cette base, elle s’est intéressée au corps humain en analysant comment il est présenté aux enfants. Elle a mené une étude cherchant à établir comment est représenté le corps dans les encyclopédies pour enfants, avec l’idée que les encyclopédies sont des ouvrages scientifiques qui doivent transmettre des informations de manière objective- notamment sur le fonctionnement du corps humain. Le résultat est pourtant interpellant : alors que le corps de la science est un corps dit neutre, le modèle utilisé pour expliquer et comprendre tous les corps est presque toujours un corps d’homme blanc. La représentation quasi systématique d’un corps d’homme pose problème dans la mesure où celui-ci s’inscrit peu à peu comme étant la norme, le modèle sur lequel tout le monde doit s’aligner.

Par ailleurs, dans les ouvrages présentant des modèles mixtes, les personnes sont généralement représentées dans des situations fortement stéréotypées (les hommes faisant des activités mobilisant la force, les femmes dansent, préparent à manger, etc.). En outre, plusieurs encyclopédies placent des figures féminines uniquement dans les pages consacrées à la reproduction et à l’appareil génital féminin, celui-ci est d’ailleurs souvent représenté comme étant un appareil génital masculin renversé. Détrez en conclut donc que

« non seulement la femme ne peut être pensée que par rapport à une norme masculine, mais elle représente un état inachevé, inaccompli de celle-ci. » (p.16). Cette étude apporte une nouvelle illustration de la manière dont se construisent les représentations sexuées inégales. Ses conclusions sont choquantes, car elles pointent la diffusion des stéréotypes de sexe au cœur même de la science.

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Si l’identité sexuée et socialement différenciée se construit au fil des années, sa revendication est très forte à l’adolescence, en particulier au moment où les jeunes doivent prendre des décisions quant à leur orientation scolaire et professionnelle. Nous aurons l’occasion de développer ce point dans une prochaine rubrique.

Pour terminer ce chapitre sur l’identité sexuée et socialement différenciée, notons qu’il n’existe pas de définition formelle et universelle du féminin et du masculin, mais comme le relève Collet « chaque société institue sa propre définition de ce qu’est être un homme ou une femme » (2009).

2.4 Rôle de l’école dans la reproduction sexuée

Depuis que l’école a été décrétée mixte à partir des années soixante, les élèves - en dépit de leur sexe ou de leur origine sociale - sont supposés recevoir un enseignement équivalent. Néanmoins, il fallut peu de temps pour réaliser que mixité ne rimait pas avec égalité. En effet, comme le soutient Mosconi « La mixité est sûrement une condition nécessaire de l’égalité, mais pas une condition suffisante. » (2004, p.29). Comme nous allons le développer dans ce chapitre, l’école est un milieu qui, sans le vouloir, véhicule et renforce les stéréotypes de sexe.

L’existence de stéréotypes de sexe très ancrés dans le milieu scolaire a une double fonction : d’une part, les stéréotypes sexués vont différencier les groupes de sexe masculin et féminin ; d’autre part, ils vont les hiérarchiser.

Mosconi précise « Ils sont valorisants pour le groupe masculin et dévalorisants pour le groupe féminin » (2004, p.29). Ces stéréotypes intériorisés par tous auraient un impact décisif sur les perceptions, les attentes et les comportements des acteurs de l’école, au niveau des relations entre élèves et des interactions entre enseignant et élèves. Ainsi, les garçons prennent deux fois plus la parole que les filles en classe et n’hésitent parfois pas à leur couper la parole pour s’exprimer, sous l’œil, souvent inconscient, mais bienveillant de leur enseignant. Les comportements des garçons et des filles se construiraient donc en respectant une forme d’accords tacites entre les différents acteurs de l’école. Par exemple, les filles s’approprient plus

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facilement les règles scolaires en étant plus calmes et « dociles » alors que les garçons rejettent plus souvent les normes scolaires et cherchent les limites en adoptant un comportement plus perturbateur. Cet effet de prédilection autoréalisatrice appelé « effet pygmalion » naît des croyances des enseignants.

Dès le début de mon cursus académique en Sciences de l’Éducation, j’ai été sensibilisée à la question du genre dans le domaine scolaire.

Inconsciemment, l’enseignant contribue à la construction de la catégorisation des sexes, en marquant des différences entre filles et garçons et en véhiculant des stéréotypes. Sur la base de certaines croyances socialement partagées, il va attribuer aux filles et aux garçons des caractéristiques propres à leur sexe ; par exemple, les filles sont plus bavardes, les garçons sont plus compétitifs, les filles s’intéressent plus à la littérature, les garçons sont meilleurs en mathématiques et en sciences… Ainsi, nous sommes, dès le début de nos études, mis en garde des dérives que peut provoquer notre comportement implicite lorsque nos attentes varient de manière discriminante à l’égard des élèves.

Pourtant, comme je l’ai souligné, les instituteurs n’ont généralement pas conscience des différenciations sexuées qu’ils réalisent. Tout se joue sur un plan plus subtil, sous-jacent à la vie scolaire. Vouillot élargit d’ailleurs ce sentiment à un champ plus large : « Les différents acteurs de l’école (enseignant-e-s, élèves, parents) sont souvent peu conscients des inégalités de sexe à l’école et de la division sexuée de l’orientation » (2007, p.99) En effet, plusieurs études établissent que les enseignants sont persuadés que « la question de l’égalité entre les sexes est résolue dans leur propre univers » (SRED, 2012).

Collet (2009) identifie, entre les murs de l’école, l’existence d’un curriculum caché –en dehors des apprentissages pédagogiques- qui naît à partir des interactions produites en classe, des manuels scolaires et des modèles culturels implicites véhiculant les modèles traditionnels du féminin et du masculin. Celui-ci impose aux élèves à leur insu « des conduites et des choix de vie conformes à l’image que la société a de leur sexe ». Trois vecteurs sont

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ainsi pointés comme renforcement et diffuseur des inégalités : les interactions en classe, les manuels scolaires et les modèles culturels.

L’analyse des manuels scolaires montre que nombre d’entre eux sont encore fortement stéréotypés du point de vue du genre. Nous avions cité précédemment l’étude de Détrez réalisée sur les encyclopédies scientifiques plaçant les hommes comme modèles sur le plan physique et intellectuel.

Dans une autre enquête basée sur les activités rattachées aux deux sexes dans les manuels scolaires, Collard (2007) relève que les hommes sont non seulement deux à trois fois plus représentés que les femmes dans le monde du travail, mais qu’ils se répartissent dans cinquante-trois occupations différentes, alors que les femmes se concentrent essentiellement parmi dix. Les femmes apparaissent d’une part dans des occupations moins variées, mais aussi et surtout moins valorisées. Les filles ont donc plus de mal à se projeter dans des carrières ambitieuses par manque de modèles féminins.

Les interactions scolaires ont fait l’objet de plusieurs études de genre- notamment sur la répartition de la parole entre filles et garçons lors des moments collectifs (Jarlégan, 2011). Les conclusions révèlent que les enseignants ont tendance à interroger plus les garçons que les filles pendant les leçons de mathématiques.

Duru-Bellat (2010) défend également l’idée que les écarts de comportements et d’attentes des enseignants auprès des élèves de sexe féminin ou masculin jouent un rôle déterminant sur le manque de confiance des filles en leurs capacités (SRED, 2012). En effet, plusieurs études démontrent un effet négatif des stéréotypes de genre sur les performances des filles, en particulier dans les domaines scientifiques, tels que les mathématiques.

L’une de ces études (Huguet, Brunot & Monteil, 2001) révèle qu’une tâche de géométrie sera réussie différemment par les élèves si elle est présentée comme un exercice de dessin ou comme un exercice de mathématiques ; dans le premier cas, les filles se montrent plus performantes que les garçons et cette tendance est inversée dans le second cas. Cette célèbre étude est une

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bonne illustration de l’influence des stéréotypes dévolus aux deux sexes par la société sur les comportements scolaires adoptés par les élèves.

Isabelle Cabat-Houssais (2004), institutrice, met en garde les professionnels de l’éducation sur certaines de leurs pratiques discriminatoires : « les enseignants font plus souvent appel à la mémoire des filles – en leur demandant, par exemple, de rappeler le cours précédent- et sollicitent les garçons autour des notions nouvelles pour construire le savoir. » (p.57) Pour promouvoir l’égalité à l’école, il faut d’abord que les enseignant-e-s s’attachent à répartir équitablement les interventions orales entre les sexes dans toutes les disciplines.

2.5 Orientation scolaire sous l’emprise du genre

2.5.1 Politiques publiques

Selon Vouillot, l’émergence d’une volonté politique de lutte contre les inégalités entre les sexes s’est produite relativement tard en France. C’est seulement à partir des années quatre-vingt que de réelles actions sont mises sur pied pour promouvoir l’égalité des sexes dans le domaine de formation et qu’une prise de conscience se réalise sur le rôle de l’école pour y parvenir.

Dès lors, plusieurs conventions vont se succéder dans le but d’encourager les filles à s’inscrire dans des filières scientifiques et techniques considérées jusqu’alors comme « masculines ». Ces actions étaient sans doute également motivées par un motif économique lié à un manque de main d’œuvre dans les domaines techniques et d’ingénierie. Comme le souligne cette auteure, il est intéressant de noter que tous ces mouvements étaient quasiment exclusivement destinés à convaincre les filles de prendre le pas sur les garçons en osant s’affirmer dans « leurs » filières, mais qu’il n’y avait que très peu de volonté manifestée à encourager les garçons à suivre des filières dites

« féminines ».

À la lumière de ces éléments, les garçons apparaissent donc comme le modèle à suivre sur lequel les filles doivent s’aligner, comme si eux-seuls

« savent » s’orienter.

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À Genève, l’égalité de formation entre les filles et les garçons figure parmi les

« 13 priorités pour l’instruction publique genevoise » soutenues par Charles Beer et dans les recommandations de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique. Pourtant, comme nous allons le voir, cette mission est loin d’être achevée.

2.5.2 Cycle d’orientation

Au niveau du Cycle d’Orientation, des écarts de parcours scolaire se dessinent déjà entre filles et garçons selon des données datant de 2007 : en ancienne 9ème (actuellement 11P HarmoS) les garçons étaient surreprésentés en option « Sciences » en représentant 62% des élèves contre seulement 39%

des filles.

2.5.3 Études secondaires

À la fin de la scolarité obligatoire, les divergences de parcours se renforcent encore entre filles et garçons : 63% des filles choisissent de poursuivre leurs études dans la formation générale (Collège ou École de culture générale), tandis que la majorité des garçons se dirigent dans les filières de formation professionnelle (34% d’entre eux seulement vont au Collège) (SRED, 2005). En 2003, le domaine d’étude « Mathématiques et sciences expérimentales » était le plus prisé par les garçons (43,2%) alors qu’il arrivait en deuxième position (après les langues modernes) pour les filles (25%

y étaient inscrites). En revanche, la quasi-totalité d’entre elles choisissaient l’option « Biologie et Chimie » contre une répartition équitable des garçons entre ces disciplines et l’option « Physique et application des maths » (SRED, 2007).

Les divergences d’orientation scolaire entre filles et garçons nettement visibles à partir des études secondaires s’expliquent par la volonté des jeunes à confirmer leur identité sexuée via leur choix d’études. En effet, en tant qu’adolescent ou jeune adulte, « il faut se prouver à soi-même et aux autres qu’on est bien une fille féminine ou un garçon masculin [et ainsi] on se compare soi-même avec les personnes constituant le prototype du métier et

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on regarde si les deux images sont compatibles. » (Collet, 2009). L’orientation scolaire est donc avant tout un projet identitaire.

Ce projet identitaire s’inscrit toujours dans un contexte social. L’orientation scolaire englobe ainsi deux aspects : un enjeu social, économique et politique ; et un enjeu personnel et identitaire. Ainsi, « comme les filières de formation et les professions sont hiérarchisées et sexuées, le projet énoncé situe le niveau d’ambition du sujet, ce qu’il pense valoir, ses goûts, mais aussi son degré de conformité ou d’excentricité vis-à-vis des normes et attentes sociales qui lui sont adressées selon son statut social et son sexe. » (Vouillot, 2007, pp.93-94).

Vouillot soutient aussi que la considération de formations ou professions comme étant « féminines » ou « masculines » ne dépend pas uniquement de la façon dont elles sont investies par les garçons ou les filles, mais que cette image est également influencée par tous les éléments contextuels qui leur sont associés tels que les critères d’aptitudes, d’intérêts, de personnalité, de caractéristiques physiques requises, etc. (2007, p.94)

Elle précise aussi que ce sont essentiellement les compétences associées aux différents domaines d’études qui conditionnent les choix de formation : « La division sexuée de l’orientation n’est pas une question d’aptitudes, mais de sentiment de compétences ! Les compétences sont perçues comme sexuées. Les filles et les garçons ont donc tendance à s’attribuer les compétences reconnues à leur sexe et à se sentir pas ou peu de compétences pour les activités de l’autre sexe. » (Vouillot, 2004, p.52) Ces sentiments de compétences sont intimement rattachés à l’identité sexuée de chaque personne.

Une étude a été menée en 2007 par le SRED sur les intérêts des filles et des garçons du secondaire face aux différentes disciplines. Pour plusieurs disciplines, l’intérêt ne diffère pas de manière significative, par exemple on relève un intérêt général faible pour le latin et le grec, moyen pour le droit et la chimie et élevé pour l’anglais et la biologie. La biologie est d’ailleurs « la seule matière scientifique qui intéresse vraiment les filles » (en étant choisi par

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près d’un tiers d’entre elle). D’autres disciplines sont en revanche fortement marquées par les stéréotypes de sexe : les filles sont davantage tournées vers les langues, les arts et la pédagogie, tandis que les garçons se distinguent à travers la physique, l’informatique, l’économie, les mathématiques et le sport.

Il paraît aussi important de porter un regard sur le choix de niveau de mathématiques des élèves selon leur sexe : en 2002, 18% des collégiennes suivent le niveau avancé contre 40% des collégiens. Si on se penche sur les intérêts manifestés pour cette discipline, seules 36% des filles prétendant beaucoup s’y intéresser suivent le cursus avancé contre 64% des garçons dans la même situation. Comme nous l’avons développé précédemment, cette différence significative peut être le reflet d’un manque de confiance apparent des filles en leurs compétences à déployer dans cette discipline, conforté par les stéréotypes de sexe (Duru-Bellat, 2004).

Si nous considérons l’option spécifique : les filles sont beaucoup plus nombreuses dans le domaine des langues modernes et les garçons dans celui des mathématiques et des sciences expérimentales. Force est de constater que les filières scientifiques connaissent un engouement principalement masculin. (SRED, 2007)

Toutefois, la lecture de statistiques peut être trompeuse et nécessite la prise en compte de certaines précautions. Une erreur courante pointée par Vouillot concerne une lecture incomplète des chiffres qui peut conduire à un raisonnement erronée sur la répartition des filles et des garçons dans les filières d’études. Il s’agit du « processus d’attraction/désertion de certains champs de savoirs et de compétences » (2007, p.91). Par exemple, en France, au niveau du secondaire, « les filles n’ont pas […] un problème de diversification des choix d’orientation » (Vouillot, 2007, p.92), elles se répartissent de manière plus équilibrée que les garçons dans les différentes filières et si leur nombre est important dans certaines disciplines ; par exemple dans la série « littérature » où elles représentent 81% des étudiants, ce n’est pas parce que toutes les filles y sont inscrites (c’est au contraire la série qu’elles choisissent le moins), mais c’est l’absence de garçons qui augmente considérablement leur pourcentage.

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En résumé, « l’écrasante présence d’un des deux sexes dans une filière est généralement due à l’évitement par l’autre sexe et non systématiquement à un choix massif. »(Vouillot, 2007, p.93). D’où l’importance de tenir compte de tous les chiffres, à la fois ceux représentatifs des filles et des garçons, pour comprendre avec justesse la problématique de l’orientation sexuée.

À la lumière de ces propos, ce n’est pas le manque de diversification des choix des filles qui crée une division sexuée de l’orientation, mais celle-ci apparaît « parce que filles et garçons ignorent en les évitant soigneusement les champs de savoirs et de compétences qui sont perçus comme convenant à l’autre sexe. » (Vouillot, 2007, p.104).

2.5.4 Études supérieures

Vouillot relève qu’au niveau international, aux Etats-Unis comme en Europe, malgré une augmentation importante au cours des trente dernières années du nombre de diplômées de l’enseignement supérieur (les femmes étant d’ailleurs plus nombreuses que les hommes), il existe toujours une répartition des sexes déséquilibrée avec des filières principalement empruntées par les filles (enseignement, lettres, arts, communication et santé) et d’autres par les garçons (mathématiques, sciences de l’ingénieur, architecture, etc.) (Vouillot, 2007, p.88).

L’Office fédéral de la statistique nous fournit des détails concernant les choix d’études supérieures en Suisse :

Les jeunes hommes choisissent très souvent et nettement plus fréquemment que les jeunes femmes des professions techniques et des domaines d’études comme l’ingénierie, l’architecture et le bâtiment, la technique et l’informatique. Les jeunes femmes optent en revanche très souvent et nettement plus fréquemment que les jeunes hommes pour des formations professionnelles et des études dans la santé, les sciences humaines et sociales, le travail social et l’enseignement (OFS, 2013).

Elisabetta Pagnossin (2008) a examiné l’évolution de la présence des filles dans les filières universitaires en Suisse depuis le début des années quatre- vingt. À titre général, elle note tout d’abord que les femmes s’engagent de

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plus en plus dans des études universitaires. Elles demeurent majoritaires dans les filières de langues et littératures en représentant les trois-quarts des étudiants (74,4%). Néanmoins, elles investissent aussi de plus en plus les filières scientifiques : leur nombre augmente passablement en Sciences de la terre et en Chimie. En Biologie, elles passent de 43,3% en 1980 à 59,9% en 2007 devançant ainsi le quota masculin. En revanche, l’Informatique semble toujours échapper à leur intérêt, car elles ne représentent qu’un faible 10%

des étudiants.

Au niveau de la répartition des choix d’études, nous notons une diminution féminine en Sciences humaines et sociales, car 55,6% des étudiantes universitaires s’inscrivaient dans ces filières en 1980, contre 43,5% en 2007 ; de leur côté les étudiants y passent de 25,3% en 1980 à 20,2% en 2007. En Sciences exactes et naturelles, les filles restent minoritaires en étant 9,1% en 1980 et 11,6% en 2007, tandis que les garçons présentent aussi une légère augmentation avec 20% d’inscrits en 2007 contre 17,3% en 1980.

En conclusion à ses analyses, Pagnossin relève une légère progression des choix d’orientation des filles « non conformes » à leur sexe :

Du fait de leur présence quantitativement plus importante que dans le passé, les filles investissent plus facilement quelques domaines autrefois considérés comme masculins, ou tout simplement plus étudiés par les garçons (…).

L’inverse ne se produit pas encore, car les garçons n’investissent pas massivement des domaines féminins, même si quelques tendances se dessinent par une diminution des écarts (2008, p.129).

Cette dernière remarque rejoint la position de Vouillot (2007) qui soutient que

« La division sexuée n’est pas le seul fait des choix des filles » (p.88) et que

« Les garçons sont tout aussi frileux –sinon plus- à s’engager dans les filières dites « féminines ». »( p.91).

2.5.5 Professions

Dès la fin du Cycle d’Orientation, les intérêts des élèves commencent à se stabiliser et des préférences professionnelles se dessinent.

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En 2012, le Service de la recherche en éducation (SRED) s’interroge : « Les parcours scolaires et les aspirations professionnelles des filles et des garçons : choix individuel ou respect des normes ? »

Plusieurs études confirment que « les jeunes choisissent leur orientation professionnelle en fonction des normes encore fortement soumises au genre et qu’un processus de socialisation conditionne progressivement les filles et les garçons à s’investir dans des formations et des professions sexuées. » (SRED, 2012).

Duru-Bellat affirme d’ailleurs que « ce sont ces inégalités d’orientation, bien plus que les inégalités de réussite, qui modèlent les inégalités de carrière entre les sexes. » (2004).

Une enquête menée par l’OCDE (2012) dévoile que les filles et les garçons choisissent encore leur orientation professionnelle selon l’idée qu’il existe des métiers de femmes et d’autres réservés à la gent masculine. En effet, les disparités d’orientation sont souvent perçues comme des différences

« naturelles » entre les sexes, liées à des compétences féminines et masculines bien distinctes. Ainsi, les femmes auraient des aptitudes innées dans le domaine des soins et de l’éducation, métiers dans lesquels elles sont largement représentées. Tandis que les hommes perçus comme plus intellectuels, inventifs et ambitieux viseront des carrières plus valorisées et socialement mieux reconnues.

Collet renforce cette idée : « Les travaux de femmes sont généralement vus comme une extension du travail domestique ou maternel », dans lesquels leurs qualités considérées comme « innées » peuvent se déployer (2011, p.91).

Nous constatons donc que les professions fortement féminisées se fondent sur les vertus prétendument attribuées aux femmes : « leurs compétences domestiques à travers les métiers du commerce et de travail domestique, leur savoir-faire éducatif (institutrices et auteures de livre pour enfants) ainsi que leurs aptitudes esthétiques en tant que danseuses ou bijoutières. » (Collard, 2007, p.82).

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En outre, il est intéressant de constater que même des activités considérées comme féminines, telles que la cuisine ou l’enseignement, se masculinisent lorsqu’elles sont exercées à un niveau élevé et reconnu. Ainsi, il existe une grande majorité de chefs cuisiniers et de professeurs hommes dans les études supérieures. Les hommes ont donc plus de chance d’évolution de carrière dans les domaines investis par les femmes que ces dernières.

Par ailleurs, les choix professionnels des femmes sont également motivés par d’autres raisons que les simples intérêts ou ambition de carrière. La volonté d’exercer un métier qui permet de concilier vie familiale et vie professionnelle est présente très tôt dans le discours des jeunes filles. Au cycle d’orientation, près des deux tiers des femmes projettent déjà de travailler plus tard à temps partiel pour s’occuper de leur future famille contre environ un tiers des garçons (OFS, 2011). Le projet de carrière est beaucoup plus central chez les garçons. Ainsi, adolescentes et adolescents intègrent rapidement les schémas familiaux traditionnels.

L’existence de modèles féminins au sein des corps de métiers envisagés constitue un autre facteur décisif qui influe les choix de professions. Nous constatons en effet que les femmes ont tendance à choisir des métiers dans lesquels il existe déjà une forte présence de leur sexe. Les filles demeurent de ce fait très nombreuses dans les métiers où elles l’étaient déjà il y a vingt ans.

Vouillot exprime les conséquences de ce processus : « La diversité des filières professionnelles et des métiers connotés « masculins » est plus étendue que celle des filières et professions connotées « féminines ». » (2007, p.91).

Les filles envisagent donc avec peine d’exercer des métiers peu connus et dans lesquels elles ne sont pas représentées. Collet explique : « On ne peut s’orienter que vers un métier que l’on connaît (ou que l’on croit connaître), qui semble désirable, accessible et dans lequel on peut se projeter. [Or,]

parmi les métiers, la gamme des possibles est fortement contrainte par le sexe et la classe sociale. » (2011, p.89). À titre d’exemple, « seules 3% des filles – contre 15% des garçons- envisagent une carrière dans les métiers de l’ingénierie ou de l’informatique » (OCDE, 2012), car ces métiers ont une forte connotation masculine.

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Permettre aux jeunes filles et garçons de découvrir une gamme variée de métiers apparaît donc comme un levier essentiel pour promouvoir l’égalité des sexes face aux carrières professionnelles. Durant ces dix dernières années, plusieurs journées et programmes comme « Futur en tous genres », « Élargis tes horizons » ou « Cité-Métiers » ont vu le jour en Suisse pour encourager les jeunes à découvrir des métiers au-delà de leurs stéréotypes sexués.

2.5.6 Éléments conclusifs

Comme nous avons pu le détailler dans ce chapitre, les préférences et les intérêts scolaires significativement différents selon le sexe sont les fruits d’idées profondément ancrées sur des rôles distincts tenus par les deux sexes.

Pour agir sur ces préjugés et réduire les inégalités entre les sexes, il convient de faciliter une orientation plus égalitaire entre filles et garçons. Pour permettre à celle-ci de se réaliser, il est important que le corps enseignant soit sensibilisé à la question de l’égalité des sexes et de qu’il veille à utiliser un matériel scolaire non-sexiste (SRED, 2007).

Terminons sur une note de l’Office fédéral de la statistique qui rappelle le rôle central des études pour permettre à l’égalité de se déployer :

La formation est l’un des principaux moyens permettant de réaliser l’égalité entre les sexes. Les personnes disposant d’un bon niveau de formation ont généralement une marge de manœuvre plus large pour aménager leurs activités quotidiennes et professionnelles et sont mieux à même d’affronter de nouveaux défis sur les plans familial, professionnel et politique. En outre, les personnes plus qualifiées occupent généralement des postes mieux rémunérés (2013).

2.6 Les filles et les sciences

2.6.1 Historique

Les filles et les sciences sont un couple, incompatible pour certains, qui ose de plus en plus s’affirmer, même si plusieurs obstacles restent encore à franchir pour lui permettre d’obtenir une meilleure reconnaissance et une plus grande évolution…

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Collet (2007) explique comment historiquement l’idée d’incompatibilité entre femmes et sciences est conçue : « les femmes peuvent être réduites (et sont donc limitées) à leur sexe biologique et donc à la nature féminine, alors que les hommes ont la possibilité de s’en affranchir, de le transcender et de pouvoir alors maîtriser la nature (y compris la leur). » (p.15).

Nicole Hulin, maître de conférences honoraire à l’Université et chercheuse titulaire d’une agrégation scientifique « masculine » (obtenue par dérogation spéciale) revient sur les différences instituées au niveau des programmes scientifiques dans les écoles normales pour futures institutrices en 1881 en comparaison aux écoles normales pour futurs instituteurs. En mathématiques,

« le programme est un peu moins étendu, en ce qui concerne l’arithmétique » ; en physique, « le programme est moins complet […]

l’enseignement doit avoir un caractère simple et expérimental » ; en sciences naturelles, « le temps consacré aux sciences naturelles dans les deux catégories d’écoles normales n’est point tout à fait le même, et les programmes destinés aux élèves-maîtresses […] ne sont pas aussi étendus que ceux que doivent suivre les élèves-maîtres. »1 (2002, p.2). À la fin du 19ème siècle, le ton est donné : les études scientifiques ont une moindre importance pour les femmes, celles-ci « bénéficient » donc d’un programme scientifique allégé !

Bien des années plus tard, au milieu des années nonante, Nadine Plateau explicite pourquoi le modèle d’enseignement pratiqué à l’école primaire pouvait être considéré comme inadéquat et un obstacle à l’égalité. Elle souligne que malgré un changement majeur dans l’éducation avec la mise en place de la mixité scolaire (tant sur un plan social que sexué) « les contenus et les modes de transmission des savoirs n’ont pas été repensés en fonction d’un projet de société égalitaire ». En d’autres termes, l’enseignement « conçu pour une élite » s’adressait toujours à un élève de sexe masculin et de milieu social aisé (Plateau, 1995, p.61). Marie Duru-Bellat illustre cette idée en expliquant que les programmes de physique, par exemple, valorisaient des domaines traditionnellement considérés comme

1 Bulletin administratif, t.24, 1881, p.1640-1666.

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masculins (mécanique, électricité, magnétisme…) alors que « l’étude d’autres champs de la physique comme […] les phénomènes météorologiques, les applications de la physique aux domaines médical ou artistique susciterait un intérêt accru chez les filles » (2004, p.78). Cette vision peut paraître aujourd’hui comme étant marquée par les préjugés, car nous savons désormais qu’il est possible et répandu d’aborder le thème de l’électricité en classe en éveillant un intérêt équivalent chez les filles et les garçons.

2.6.2 Stéréotypes scientifiques

Duru-Bellat (1995) apporte un éclairage concernant l’influence sexuée sur les choix d’études dans les filières scientifiques : « Les différences entre sexes dans les filières apparaissent comme la résultante de processus d’auto- sélection (moindre confiance des filles dans leur niveau scientifique), d’image des disciplines scientifiques et de motivations professionnelles davantage tournée vers l’utilité sociale que le prestige et la rémunération » (p.97). De plus, « [les filles] se sentent à la fois moins compétentes dans les matières scientifiques, et perçoivent les professions scientifiques comme difficiles (pour elles) et masculines » (Duru-Bellat, 1995, p.97). Ces attitudes se forgent à travers des processus sociaux variés : les attentes stéréotypées des parents en matière de réussite, les attitudes plus ou moins implicites des enseignant-e-s qui s’expriment par des attentes différenciées qu’ils communiquent inconsciemment aux élèves (effet pygmalion) et les interactions entre élèves dans un contexte mixte à un âge où le conformisme sexuel domine (Duru- Bellat, 1995, p.98).

L’association femme-nature en opposition à homme-culture contribue également à rendre plus difficile la projection des femmes dans le domaine scientifique. Comme le défend Collet (2009), la description du scientifique type : « ambitieux, combatif, audacieux, froid, indépendant, à l’esprit logique, rationnel, obsédé de l’objet au détriment de la relation, excluant de la sensibilité » s’apparente pour de nombreux traits au stéréotype masculin. Le stéréotype féminin quant à lui se compose essentiellement « de caractéristiques affectives, peu valorisées socialement, rapportant les

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femmes à leur rôle d’épouse et de mère : docilité, sensibilité, émotivité, préoccupation des sentiments d’autrui. » (Collet, 2009). Ces traits de caractère décrétés féminins se conjuguent difficilement avec la hargne, la déduction et l’autonomie attendues d’un scientifique.

À la lumière de ce qui précède, Duru-Bellat (1995) soulève une question intéressante : promouvoir l’accès des filles à la culture scientifique, n’est-ce pas une manière de les contraindre à se couler dans un moule masculin, alors qu’on pourrait tout aussi bien défendre « l’égalité dans la différence » ? Selon elle, « si les orientations moins nombreuses des filles vers les études scientifiques sont perçues comme une discrimination, c’est parce qu’elles sont assorties à des professions moins gratifiantes » (1995, p.99.) Ainsi, le but est avant tout de favoriser aux filles l’accès à « tous les possibles » en les plaçant dans une situation d’égalité de choix par rapport aux diverses professions.

2.6.3 Constats internationaux

Selon Vouillot (2007), la minorité des filles dans les filières scientifiques relève d’un constat international : En Amérique 48% des filles étudient les mathématiques et 41% les sciences physiques et technologiques. En Europe, le pourcentage de filles en Sciences, mathématiques et informatique est de 37%. Certaines exceptions sont à relever, par exemple le Portugal, l’Italie, la Bulgarie et la Roumanie où le taux de filles varie entre 50% et 58% dans ces filières.

De manière globale, les filles sont très peu représentées en informatique.

Curieusement, ce domaine apparaît comme premier choix auprès des garçons suisses lorsqu’ils doivent citer le métier de leur rêve quand ils auront environ 30 ans. 7% des garçons répondent : « Informaticien de niveau supérieur » (SRED, 2012).

2.6.4 Les filles et l’informatique

Collet débute son ouvrage « L’informatique a-t-elle un sexe ? Hackers, mythes et réalités » (2007) en exposant des chiffres pour le moins surprenants en rapport au taux d’utilisation d’internet selon le sexe. En 2006, les femmes

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ne constituaient que 25% des usagers d’Internet en Europe, 18% au Japon et 4% au Moyen-Orient. Même si ce « gender gap » est moins marqué dans les pays nordiques et les Etats-Unis où l’utilisation d’Internet est plus fréquente, ces chiffres suscitent un certain nombre d’interrogations.

En 2003, Lafortune et Solar réalisent une étude au Québec sur les mathématiques, les sciences, les technologies et leur utilisation par les garçons et les filles. À la question : « Pensez-vous que les garçons sont meilleurs que les filles en informatique ? » Plus du tiers des garçons et des filles répondent par l’affirmative. Les filles justifient ce choix par l’intérêt porté à cette technologie : « pour une fille, un ordinateur est plus une ressource qu’un passe-temps » ou bien en affirmant « les filles se contentent pour certaines choses de simplement savoir l’utiliser sans savoir comment il fonctionne » (p.64.) Les garçons soutiennent de leur côté qu’ils sont plus aptes à comprendre la technologie et ses outils et que l’informatique nécessite parfois d’être « rude et persévérant » alors que les filles ont un caractère « plus doux qu’eux » (p.65).

2.6.5 Les filles, les sciences et l’école

Lafortune et Solar relèvent que les diverses recherches menées jusqu’au milieu des années nonante soutenaient certaines idées préconçues et croyances stéréotypées, telles que « le domaine des mathématiques est considéré comme un domaine réservé aux hommes », « les filles ont moins tendance à croire que les mathématiques sont utiles », « les enseignant-e-s accordent plus d’attention aux garçons qu’aux filles pendant les classes de mathématiques », « il existe une différence entre les perceptions des filles et des garçons face aux mathématiques : si ceux-ci réussissent, c’est parce qu’ils sont brillants, s’ils échouent, c’est parce qu’ils n’ont pas assez travaillé. Si les filles réussissent, c’est parce qu’elles ont travaillé dur et si elles échouent, c’est parce qu’elles ne se sont pas intelligentes. », etc. Ces auteures se réjouissent pourtant de constater que ces tendances évoluent avec le temps et s’améliorent peu à peu (2003, p.83). Soulignons, par exemple, que dans l’étude présentée plus haut, les deux tiers des filles et des garçons considèrent

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que les compétences des filles et des garçons en informatique sont jugées équivalentes.

À l’instar de l’étude menée par Détrez (2006), citée dans un précédent chapitre, qui analysait les rôles du corps masculin et féminin dans les encyclopédies scientifiques, Collet a mené en 2007 une étude sur les livres documentaires de sciences, afin de relever quelle place avaient les filles dans les supports utilisés pour enseigner cette discipline. Celle-ci révèle que les femmes sont quasiment absentes des livres documentaires qui traitent des sciences, autant au niveau des noms des scientifiques de renom qui ont fait avancer la technologie que sur les images servant à illustrer des expériences.

Et très souvent lorsqu’elles sont présentes, « le ressort comique joue toujours sur les stéréotypes de sexes » ou alors elles observent les garçons à la tâche. Ainsi, trop d’ouvrages scientifiques demeurent encore sexistes en s’adressant plus volontiers aux garçons qu’aux filles et contribuent ainsi aux stéréotypes de sexes et à l’inégalité des représentations féminines dans ce domaine.

2.6.6 Les femmes et les professions scientifiques et techniques

Alaluf & Al. (2003) citent les travaux menés par Catherine Marry (2004) pour comprendre les facteurs qui jouent un rôle dans l’orientation professionnelle des femmes : dès leur enfance, celles-ci vont naturellement « intérioriser les normes et les comportements stéréotypés attendus des futures ménagères, des futures mères et des futures travailleuses » (p.21). Conscientes de l’investissement temporel et psychique que requièrent ces différents rôles à assumer, les femmes vont rapidement considérer maternité et carrière comme des projets entrant en contradiction. Alors que de leur côté, les hommes jugent les emplois « à responsabilité » comme « un prolongement de leur socialisation familiale et scolaire », conception facilitée de surcroît par l’idée que les tâches éducatives et domestiques sont assumées par les femmes. Il semble que le « coût de la transgression » soit « particulièrement élevé face aux professions scientifiques et techniques, dominées par les hommes et dans lesquelles les femmes ne seraient acceptées qu’à condition de s’aligner sur le modèle masculin. » (Marry, 2004, citée par Alaluf & Al., 2003, p.22).

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Une autre approche retenue par Marry pour justifier la marginalisation des femmes dans les métiers scientifiques et techniques se base sur la dynamique de la féminisation, qui établit bien souvent un lien de cause à effet entre féminisation et dévalorisation d’une profession.

2.6.7 Les sciences à l’école

Avant tout, je souhaite m’attarder sur la notion de Science qui occupe une place particulière dans ce travail. Le Larousse en ligne lui prête plusieurs significations. La Science peut être défini comme un « ensemble cohérent de connaissances relatives à certaines catégories de faits, d'objets ou de phénomènes obéissant à des lois et/ou vérifiés par les méthodes expérimentales. » ; ce terme se rapporte également à « chacune des branches de la connaissance, du savoir (souvent pluriel) : Les sciences mathématiques. » et plus largement, au niveau littéraire, il s’applique à une

« connaissance approfondie d'un domaine quelconque, acquise par la réflexion ou l'expérience : La science du cœur humain. ». Dans le cadre de ce travail, les Sciences sont abordées comme des disciplines distinctes recouvrant les domaines des Sciences exactes et expérimentales.

À l’école publique genevoise, les mathématiques et les sciences occupent une place importante dans l’horaire scolaire. À raison d’environ six périodes hebdomadaires de Mathématiques et deux périodes de Sciences de la nature, les élèves consacrent un peu plus du quart de leurs apprentissages au domaine scientifique. Si nous nous penchons du côté du Plan d’études romand, les intentions générales pour ce domaine sont les suivantes :

Dans une société fortement marquée par les progrès scientifiques et technologiques, il est important que chacun possède des outils de base lui permettant de comprendre les enjeux des choix effectués par la communauté,[…]. Face aux évolutions toujours plus rapides du monde, il est nécessaire de développer chez tous les élèves une pensée conceptuelle, cohérente, logique et structurée, d’acquérir souplesse d’esprit et capacité de concevoir permettant d’agir selon des choix réfléchis. (PER)

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