G ERGONNE
Réflexion sur le précédent article
Annales de Mathématiques pures et appliquées, tome 17 (1826-1827), p. 272-276
<http://www.numdam.org/item?id=AMPA_1826-1827__17__272_1>
© Annales de Mathématiques pures et appliquées, 1826-1827, tous droits réservés.
L’accès aux archives de la revue « Annales de Mathématiques pures et appliquées » implique l’accord avec les conditions générales d’utilisation (http://www.numdam.org/conditions). Toute utilisation commerciale ou impression systématique est constitutive d’une infraction pénale.
Toute copie ou impression de ce fichier doit contenir la présente mention de copyright.
Article numérisé dans le cadre du programme Numérisation de documents anciens mathématiques
http://www.numdam.org/
272 PROPRIETES GENERALES
respectivement
issues deA, B ; C ;
on aura , entre les divers seg-mens
formés
sur latransversale,
la nouselle relation :analogue à la première,
bien quetrès-diffèrente
dans lefond.
Les
principes posés
dans le mémoirepermettent également
detraduire la relation
primitive
en une autre relation entre leslignes trigonométriques
desangles
formés par les droites de ladériver ;
enfin ils donnent des moyens pour traduire immédiatement cette même relation en d’autres
qui appartimment à
desfigures
situéesdans
l’espace
et danslesquelles
lesangles
dièdresremplacent
lesangles plans.
Le mémoire est terminé parquelques applications
dela théorie des
polaires réciproques
auxpropriétés métriques
des cour-bes à double courbure et des surfaces
géométriques quelconques ,
ainsi que par
l’exposé
de la notationtrès-simple
à l’aide delaquelle
on
peut
transformer toutepropriété qui
serapporte
à celles quej’ai
nommées ailleursprojectives ,
enplusieurs
autres très-différen-tes de ld
première
et non moinsgénérales.
La conclusion de ce tra-vail est donc que les
principes qu’il
contient mettent en état dedoubler
et detripler
même le nombre despropriétés
dont il s’a-git,
ainsi que celui despropriétés qui
concernent lesangles
des fi-gures , ce
qui comprend
toutes celles de la théorie des travsversa-les,
de lagéométrie
de larègel , et
une infinité d’autresplus gé-
nérales encore.
Réflexion
surle précédent article;
Par M. GERGONNE.
Les
esprits superficiels,
ceuxqui
n’étudient les sciences que commeon
apprend
unmétier ,
etqui
n’encomptent
pour rien laphilosophie 1
D E L ’ E T E N D U E.
273pourront
nevoir
dans le beau travail de M.Poncelet,
quequel-
ques théorèmes nouveaux
ajoutés
à ceux dont nous sommesdéjà
en
possession ,
et une manière nouvelle de démontrer des théorè-mes
déjà
connus. Peut-être même des gensincapables
de rien in-venter
eux-mêmes ,
viendront-ils nous prouver , avec une sorte detriomphe,
quequelques-uns
des théorèmesdonnés
pour nouveauxpar Fauteur sont
implicitement compris
dans d’antres théorèmesdéjà démontrés,
il y a tant ou tant desiècles,
parquelque géomètre
grec ou latin bien
ignoré.
Mais il
s’agit ici ,
suivant nous, de bien autrechose ;
il ne s’a-git
pas moins que de commencer, pour lagéométrie ,
mal connuedepuis près
de deux mille ansqu’on
s’en occupe , une ère tout-à-fait
nouvelle ;
ils’agit
d’en mettre tous les anciens traités a peuprès
aurebut, de
leur substituer des traités d’une forme tout-à-fait diffé- rente, des traités vraimentphilosophiques qui
nous montrent enfincette
étendue , réceptacle
universel de tout cequi existe
, sous savéritable
physionomie,
que la mauvaise méthoded’enseignement adop-
tée
jusqu’à
cejour
ne nous avait paspermis
de remarquer ; il s’a-git
eu un motd’opérer
dans la science une révolution aussi iiii-périeusement
nécessairequ’elle
a étéjusqu’ici
peuprévue.
Ce n’est
précisément
pas parce que la nouvelle doctrinepromet
une moisson
plus
abondante de théorèmesqu’elle
mérite toute no-tre attention.
Qu importent ,
eneffet, quelques
théorèmes deplus qui
demeurerontpeut-être
éternellement sansapplications ? Qu’importe,
par
exemple ,
quequelques-unes
des solutions données récemment par M. le docteurPluker (
pag.3y )
soientdéjà
connues et soientmême moins
générales
et moinscomplètes
que celles qne d’antresgéomètres
ont pu donner des mêmesproblèmes ,
comme la remar-que nous en a
déjà
été faiteplusieurs
fois. ’ La théorie despulal--
res
réciproques
aurait même fort bien puépargner
à l’auteur lamoitié de ses démoustrations, comme elle nous les a
épagnées
ànous-mêmes dans notre mémoire sur les lois
générales qui rgis-
sent les
surfaces courbes ( pag. 2I4) ;
mais ici le fond est cle peuTom. XVII. 37
274
P R O P R I E T E S GENERALESd’importance ,
et la forme est à peuprès
tout ; et cequi
recom-mande
principalement
lepetit
mémoire de M.Pluker ,
c’estqu’il
nous montre les deux
gémétries
marchant constamment defront ,
sans
qu’aucune
d’elles ait rien àemprunter à
l’autre. C’est là aussice que nous avons eu
principalement
en vue, soit dans notre essaisur les lois
générales qui régissent
lespolyèdres (
tom.XV , pag.
I57) ,
suit dans un autre mémoireplus étendu (
tom.XVI ,
pag. 209).
Mais ,
comme toutes lesrévolutions ,
cellequi
seprépare dans
la
science
del’étendue,
et que M. Ponceletregarde peut-être
à tortcomme étant presque
achevée,
doitcompter
pouradversaires ,
ou.tout au moins pour spectateurs
indifférens ,
tous ceuxqui n’y
au-ront pas
coopéré;
etdéjà
n’entendons-nous pas bourdonner autour de nous que les recherches du genre de celles donts’occupe
M.Poncelet
n’excitent ,
àl’époque
où nous nous trouvons ,qu’un
mé.diocre
iutérêt ,
que cela est à peuprès passé
de mode ?Qui
saitmême si l’on n’aura pas fait des tentatives pour entraîner leur esti- niable auteur sur un autre terrain et le détourner d’un genre de méditations dans
lequel
on est contraint d’avouer toute sasupé-
riorité ?
Au
surplus ,
si les doctrines que M. Ponceletcherche
à fairepré-
valoir ne sont pas encore aussi
répandues qu’elles
méritent de l’ê-tre
peut-être
y a-t-il aussi un peu de safaute,
etpeut-être
pour- rions-nous nousgloriiler
d’avoir mieux servi la causequ’il
défendqu’il
ne l’a servie lui-même. Cequ’il
y a deplus Important
et deplus
éminemment
philosophique
dans cesreclcerches , c’est ,
ce nous sein-hle ,
d’unepart
cette double face de lagéométrie
que son dernier mémoire a pourobjet
de mettre enévidence ,
et de l’autre la pos- sibilité dedémontrer,
sans aucune sorte de calculs ni de construc-tions ,
la totalitépeut-être
des théorèmesqui
nedépendent
ni desrelations
d’angles
ni des relations delongueur. Or,
le dernier mé-moire de 1B1. Poncelet n’est encore
connu jusqu’ici
que de peu de personnes ; et , bien que lespoints principaux
en soientindiqués
dans le Traité des
propriétés projectives ,
c’est d’une manière siDE L ’ E T E N D U E. 275
fugitive qu’il
n’en est fait aucune mention ni dansle
rapport des com- missaires del’académie ,
ni dans lapréface
del’auteur ,
ni mêmedans son introduction de trente pages. N’est-on pas
fondé , d’après cela, à
penser que M. Poncelet avait d’abordregarde
cettepartie
deson ouvrage comme
très-accessoire ,
surtoutlorsqu’on
lui voit re-cominander les démens
d’Euclide ,
etqu’on
le voit débuter par desproportions
et des calculs ?L’ouvrage
de M. Poncelet est sans douterempli
d’une multitude dechoses
très-remarquables ;
maispent-être
Fauteur aurait-il bien fait d’en faire lesujet
d’autantd’ouvrages séparés ;
d’autant que,parmi
les doctines
qu’il
cherche à faireprévaloir,
il en estqui
sont toutau moins
sujettes
à controverse et dont lemélange
avec les au ticspeut
faire tort àcelles-ci , qui
sont au contraire au-dessus de touteattaque.
Quant
à nous , convaincus comme nous le sommes que, loin de rien gagner enbrusquant
lesrévolutions ,
on ne fait leplus
sou-vent ainsi
qu’en
reculerl’accomplissenlent,
et convaincuségalement qu’il
est des chosesqu’il
faut redire bien de fois avant de les fairerecevoir
, nous avons embrassé un horizon moins vaste.Certains ,
même avant que M. Poncelet ait rien
publié
sur cesujet ,
que toute lapartie
de lagéométrie qui
nedépend
pas des relations métri- ques étaitdouble ,
nous avons saisi toutes les occasions de rendrecette vérité
sensible;
etpourtant malgré
tous nosefforts ,
nous n’ose-rions nous flatter
d’y
avoircomplètement
réussi.Toujours
est-ilvrai
,du
moins, qu’aujourd’hui
encore nous recevons de diversesparu
des énoncés dethéorèmes , susceptibles
del’espèce
de traductionqui
fait le
sujet
des méditations de M.Poncelet
, sans que leurs auteurs aient l’air de se douter que cette traduction soitpossible.
Il est au
surplus
un obstacle réel à lapropagation
facile des dcc- trines que M. Poncelet et nous cherchons àpopulariser,
etcet
comme nous l’avons
dtiià
insinuéplusieurs fois ,
réside dansl’obliga-
tion ou nous nous trouvons de
paner
lalangue
créée pour unegéo-
métrie bien
plus
restreinte que cellequi
nous occupe. Condillac276 PROPRIETES
GENERALES DE L’ETENDUE.a sans doute fort
exagéré
enprétendant
réduire toute science à unelangue
bienfaite ;
mais cequ’on
ne saurait raisonnablement contes-ter , et cc que prouve victorieusement le
progrès
immensequ’a
dul’algèbre
auperfectionnement progressif
de sesnotations,
c’est que ,quand
latangue
d’une science est bienfaite,
les déductionslogi-
tlues y deviennent d’une telle
facilité ,
quel’esprit
va pour ainsidire
(je lui- même au-devant des vérités nouvelles.Or ,
M. Poncelet apu souvent
éprouver
ce que nous avonséprouvé nous-mêmes ;
sa-voir, qu’il
est certainespropositions ,
évidemmentsusceptibles
de l’es-pèce
de traductionqui
fait lesujet
de sonmémoire,
et que pour-tant on ne
parvient
pas à traduire sansquelque
contentiond’esprit ;
et cela
uniquement
parce que les mots se refusent à lesexprimer
nettement. La double existence des
propriétés
de l’étendue pourra donc bien rester encore unmystère
pour le gros desgéomètres,
aussilong-temps
que , parexemple ,
on devraremplacer ,
dans les traduc-tions ,
le motunique diagonale
par cette suite de motspoints
deconcours des directions de deux côtés non
consécutifs.
L’embarrasest bien
plus grand
encore dans lagéométrie
del’espace ,
où nousn avons pas même de
périphrase
pour caractériser nettement la surfacepolyèdre
dont une surfacedéveloppable
est lalimite ;
car M. Pon-celet
conviendra,
sans doute sanspeine ,
quel’expression
depolyè-
dre
indéfini qu’il emploie
n’estguère préférable à
celled’angle
po-lyèdre gauche,
que nous avions hasardée dans unprécédent
mé-moire.
Il sera donc
nécessaire,
pourprésenter
la nouvelle théorie sousle
jour
leplus avantageux,
de créer d’abord unelangue à
sataille
s’il est
permis
des’exprimer ainsi ;
mais cettelangue ,
nous en con-venons, sera difficile à bien
faire ,
et il serapeut-être plus
dif-ficile encore ,