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L'intégrité des infirmières de salle d'opération face à l'intervention chirurgicale de prélèvement multi-organes selon le modèle de Roy

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Academic year: 2021

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Université de Montréal

L’intégrité des infirmières de salle d’opération face à l’intervention chirurgicale de prélèvement multi-organes selon le modèle de Roy

Par

Martine Bouchard

faculté des sciences infirmières

Mémoire présenté à la faculté des études supérieures en vue de l’obtention du grade de Maîtrise en sciences infirmières

Avril 2004

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o

(3)

-Université

de Montréal

Direction des bibliothèques

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Ce mémoire intitulé

L’intégrité des inlirrnières de salle d’opération face à l’intervention chirurgicale de prélèvement multi-organes selon le modèle de Roy

présenté par:

Martine Bouchard

a été évalué par un jury composé des personnes suivantes:

Jocelyne St-Arnaud présidente-rapporteur Cécile Michaud directrice de recherche Diane Simard membre du jury

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111 Le résumé

L ‘intégrité des infirmières de salle d’opération face à t’interventioit chirurgicale de prélèvement niulti-organes selon le modèle de Roy

Mots clés prélèvement multi-organes, salle d ‘opération, étude de cas, infirmières, croyances, valeurs

Les infirmières sont souvent interpellées pour promouvoir te don d’organes. Québec Transplant (1999) a même développé plusieurs outils qui s’adressent particulièrement à elles, dont un aide-mémoire qui s’intitule Infirmières en action. Ensemble pour le don. Cependant, selon l’expérience de l’étudiante-chercheuse, plusieurs infirmières de salle d’opération ont plutôt tendance à encourager leurs collègues à ne pas signer leur carte de don d’organes. En effet, elles se disent inconfortables, dégoûtées, parfois même horrifiées par ce qu’elles voient à la salle d’opération lors d’une intervention chirurgicale de

prélèvement multi-organes. Notre recherche est appuyée par divers auteurs qui soutiennent que les soins chirurgicaux pour don d’organes sont exigeants pour les infirmières de salle d’opération puisqu’elles ressentent des conflits affectifs et philosophiques (Crandall, 1987 Kawamoto, 1992 ; Lily & Langley, J 999). Notre étude a évalué en profondeur la situation vécue par une équipe d’infirmières québécoises de salle d’opération lors de l’intervention pour prélèvement d’organes multiples. Le devis de l’étude utilisé a été l’étude de cas, car ce type d’approche met l’accent sur l’analyse contextuelle détaillée d’un nombre limité de personnes, d’événements et la relation entre eux (Stake 1999). Nos questions ont été structurées en fonction du modèle de Roy qui fournit une organisation claire et explicite pour l’exploration de l’intégrité des infirmières québécoises de salle d’opération lors de l’intervention chirurgicale pour prélèvement de plusieurs organes. Nous nous sommes intéressé particulièrement aux stimuli, réponses et niveaux d’adaptation dans les trois modes ainsi qu’aux mécanismes d’adaptation, principalement le sous-système cognitif. Les infirmières ont décrit le stimulus focal comme un don de vie et un dépouillement. Elles décrivent la chirurgie pour prélèvement multi-organes comme étant une chirurgie exigeante et stimulante. Les stimuli contextuels gravitent autour de la déclaration de la mort

cérébrale, de l’organisation du bloc opératoire et de l’atmosphère en phase pré, per et postopératoire. Les stimuli résiduels se résument par l’expression des valeurs entourant le don d’organes, les croyances associées à la mort cérébrale et à l’âme du donneur. Dans notre étude, les trois mécanismes d’adaptation utilisés par les infirmières interviewées se résument par la quête d’information, l’identification face à la personne donneuse d’organes ainsi que l’empathie. Les résultats de cette étude ne se veulent pas exhaustifs mais bien préliminaires et démontrent les besoins de soutien et d’éducation que les infirmières de salle d’opération doivent avoir afin de faire face à l’intervention chirurgicale pour prélèvement multi-organes.

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multiple organ procurement based on tite Roy model.

Key words $ organ procurement, operating rooms, case study, nurses, beliefs, values Nurses are often solicited to promote organ donation. Quebec Transplant (1999) lias developed numerous tools and guidelines for nurses, such as a mernory reminder entitled Nursesin action, Together for donation. However, according to the student researcher’s experience, many operating room nurses have the tendency to discourage colleagues in signing up for donation. In fact, they are uncomfortable, disgusted, even horrified by the scenes in the operating room, particularly when the surgical intervention is a multi organ procurement. These feelings were confirmed through published research and personal accounts (Crandall, 1987; Kawamoto, 1992 ; LiIy & Langley, 1999). These autliors believe that the surgical care for organ donation is demanding and they have experïenced

emotional and philosophical conflicts (Crandall, 1987 ; Kawamoto, 1992 ; Lily & Langley,

1999). Research confirms these testimonies (Kiberd & Kiberd, 1992 ; Sadala & Mendes, 2000 ; Wolf 1999 ; Youngner, Allen, Bartlett, Cascorbi, Hau, Jackson, Mahowald, Martin,

1985). Our study lias evaluated in depth the situation experienced by a team ofQuebec operating room nurses performing a multi organ procurement intervention. The research method used was the case study, since this method focuses on the detailed contextual analysis ofa limited number ofpeople, events and the relationship between each other (Stake 1999). Our questions were structured in relation to the Roy model which provides a clear and explicit organization for the exploration ofthe integrity of Quebec operating room nurses during a multi organ procurement. We were particularly interested with the stimuli, the responses and the level of adaptation in ail three modes as well as the adaptation mechanisms, especially the cognitive subsystems. The nurses described the focal stimulus as the gifi of life but also as a carving. They described the multi organ procurement surgeiy has exciting and stimulating. The contextual stimuli were resumed as the brain death declaration, the organization in the operating room and the atmosphere in the pre, per and postoperative phase. The residual stimuli were expressed by the nurses interviewed tlirough their values in relation to organ donation and their beliefs associated with the declaration of cerebral death. In our study, the adaptation mechanisms manifested by the nurses interviewed in caring for these patients were: the quest for information, the personal identification as well as feelings of empathy in relation to the person donating organs. These results are preliminary and demonstrate the educational and supporting needs of operating room nurses in order to face with integrity the multi-organ procurement surgery in Quebec.

(7)

V

TABLE DES MATIÈRES

LE RÉSUMÉ EN FRANÇAIS iii

LE RESUMÉ EN ANGLAIS iv

TABLE DES MATIÈRES y

LISTE DES TABLEAUX vi

LISTE DES FIGURES vii

LISTE DES ABBRÉVIATIONS viii

DÉDICACE ix REMERCIEMENTS x AVANT-PROPOS xi CHAPITRE 1 Le problème 1 But de la recherche $ Questions 9

CHAPITRE 2 La recension des écrits 10

1. Prélèvement d’organes et ses implications 11

1.1 Ledond’organes 12

1.2 La mort cérébrale 12

1.3 La chirurgie pour don d’organes 14

1.4 L’utilisation des organes prélevés 15

1.5 Les réactions des infirmières à la chirurgie pour don

multiple d’organes 16

1.6 Les étades qualitatives 17

1.7 Les études quantitatives 24

1.8 Les témoignages 29 2. Le modèle de Roy 35 2.1 Les stimuli 36 2.1.1 Le stimulus focal 37 2.1.2 Le stimulus contextuel 37 2.1.3 Le stimulus résiduel 37 2.2 Le niveau d’adaptation 3$ 2.3 Les réponses 40

2.4 Les modes d’adaptation 40

2.4.1 Le concept de soi 40

2.4.2 La fonction de rôle 41

2.4.3 Le mode d’interdépendance 42

2.5 Les mécanismes d’adaptation 42

CHAPITRE 3 La méthode de recherche 44

1. Choix du devis 45

2. Définition des termes 46

2.1 L’intégrité 47

2.2 Les stimuli 47

(8)

2.5 Mécanismes d’adaptation 50

3. Cas et participants 50

4. Déroulement de l’étude 52

4.1 Accès et permission 52

4.2 Observation et description du contexte 55

4.3 Entrevues 56

4.4 Member checking 57

5. Analyse des données 5$

5.1 La transcription des données 5$

5.2 Unité de signification 5$

5.3 La correspondance et le caractère récursif 59

6. Critères de qualité 59

7. Considération éthiques 62

8. Limites 63

CHAPITRE 4 Les résultats 65

1. la description de la chirurgie pour prélèvement multi-organes 66

2. Les stimuli décrits par les infirmières 69

2.1 Le stimulus focal 69

2.1.1 Don de vie et dépouillement 70 2.1.2 Expérience stimulante et exigeante 71

2.2 Les stimuli contextuels 73

2.2.1 La déclaration de la mort cérébrale 73 2.2.2 L’organisation au bloc opératoire 73 2.2.3 L’atmosphère de la salle d’opération 75

2.3 Les stimuli résiduels 7$

2.3.1 Valeurs entourant le don d’organes 79 2.3.2 Croyances associées à la mort cérébrale et à

l’âme du donneur $0

3. Les réponses et les niveaux d’adaptation décrits par les infirmières $1 3.1 Réponses d’adaptation dans le mode de concept

de soi $2

3.2 Réponses d’adaptation dans le mode de fonction de rôle 84 3.3 Réponses d’adaptation dans le mode d’interdépendance $7 4. Les mécanismes d’adaptation décrits par les infirmières 91

4.1 La quête d’information sur la personne donneuse

d’organes 91

4.2 L’identification face à la personne

donneuse d’organes 92

4.2 L’empathie 93

(9)

vii 4.3.2 La préoccupation empathique 94

4.3.3 L’empathie transposée 94

5. Intégrité des infirmières 95

CHAPITRE 5 La discussion 101

1. Les stimuli décrits par les infirmières 102

2. Les réponses et les niveaux d’adaptation décrits par les infirmières 111 3. Les mécanismes d’ adaptation décrits par les infirmières 116

4. Recommandations 121

5. Recherches futures 123

LISTE DES RÉFÉRENCES 126

ANNEXE: Annexe 1 Résumé de l’observation 132 Annexe 2 Certificat d’éthique 13$ Annexe3 Grille d’observation 141 Annexe 4 Grille d’entretien 14$ Annexe 5 formulaire de consentement 150 Annexe 6

Résumé des entrevues 155

Annexe 7 Rapport préliminaire 1 $2 Annexe 8 Rapport final 192 Annexe 9 Curriculum vitae 202

(10)

Tableau I

Résumé des études qualitatives portant sur les réactions des infirmières (1985 à

2000) 19

Tableau II

Résumé des études quantitatives portant sur les réactions des infirmières (1991 à

1994) 25

Tableau III

Résumé des témoignages portant sur les réactions des infirmières (1987 à 1999) 31 Tableau IV

Stratégies utilisées pour assurer la qualité des résultats 60 Tableau V

(11)

ix LISTE DES FIGURES

Figure 1

Représentation adaptée du modèle de Roy 39

figure 2

(12)

C celcius

D.C.C.N.B. donneur cadavérique à coeurnonbattant

R.C.R réanimation cardiaque

(13)

xi Dédicace

le tiens à rendre hommage à quelques personnes qui m’ont entourée

tout au long de ce parcourt.

À

benis, mon fidèle compagnon, coéquipier, partenaire de vie, qui a su

me soutenir tout au long de ce cheminement parfois nébuleux, quelques

fois pénible mais toujours passionnant. Enfin, benis, j’ai écrit une

brique!

A

toi, cher amour, merci.

À

Alexandre, Iaphaèl, et Laurence trois petits amours qui m’entourent

tous les jours. Cette maîtrise a débuté avec un garçon de trois mois et

s’est terminé avec trois adorables enfants ! Pour vous, mes amours qui

m’avez vu soir après soir travailler sur mon ordinateur, merci de votre

patience. l’espère que j’aurai été une source d’inspiration pour vos

futurs travaux. Imaginez ce que nous pourrons faire maintenant.

(14)

Je désire exprimer ma reconnaissance envers plusieurs personnes sans qui ce mémoire n’aurait sûrement pas vu le jour.

À

Cécile, chère Cécile, pour ta façon de m’apporter des nuances particulières, ta patience et surtout pour ton désir et plaisir de partager ton grand savoir. Merci Cécile, je ne crois pas avoir été capable d’effectuer cette somme de travail sans tes conseils, tes critiques, ta sagesse et ton énergie positive.

À

Fabienne, pour qui mon admiration envers ses connaissances de français

dépassent l’entendement, pour sa rapidité d’effectuer les tâches et pour son habileté d’exprimer ses commentaires. Merci Fabienne, je vous en serai àjamas, infiniment reconnaissante.

À

toutes les infirmières oeuvrant dans un bloc opératoire mais plus particulièrement aux infirmières participantes à l’étude, je vous remercie pour votre générosité, votre grand sens du dévouement envers votre profession et envers vos patients mais surtout pour votre désir d’amélioration constante. Merci à l’assistante infirmière chef et à l’infirmière chef du bloc opératoire, où s’est déroulée l’étude, pour leur volonté, leur désir et pour leur permission de libérer les infirmières participantes. Finalement, ce mémoire de maîtrise a bénéficié de quatre bourses. Merci à tous: AORN : Association of Operating Room Nurses des États Unis

CNA: Association des infirmières et infinniers du Canada

ORIIM : Ordre régional des infirmières et infirmiers de la Montérégie Université de Montréal : bourse de rédaction

(15)

xlii Avant-propos

Au tout début de mes études de maîtrise, une professeur nous informait, que le secret dans l’atteinte de l’obtention des lettres MSc s’avérait dans le choix judicieux d’une problématique. Cette problématique devait posséder certains

critères particuliers : elle devait nous tenir à coeur, soulever des questionnements et être suffisamment sérieuse pour soutenir « la route».

Ayant oeuvré plusieurs années dans un bloc opératoire,

j’

ai été pendant plusieurs année en tant qu’ infirmière soignante, puis par la suite, en tant

qu’infirmièreclinicienne et gestionnaire de salle d’opération confrontée au malaise

vécu par les infirmières lors d’un prélèvement multi-organes. Après discussion avec une multitude de collègue, ce malaise n’était pas seulement perçu par moi-même mais aussi par la majorité des infirmières de salle d’opération que je côtoyais.

C’est avec cette idée que j’ai décidé d’entreprendre mon mémoire de maîtrise. Puisque, d’une part, je croyais et continue de croire que les infirmières de salle d’opération sont des actrices importantes pour promouvoir le don d’organes. D’autre part, je considère que les infirmières de salle d’opération ne sont pas appréciées à leur juste valeur et qu’elles ont un grand besoin de soutien dans cette expérience «par laquelle la mort donne la vie ».

J’ai choisi l’étude de cas comme devis de recherche, puisque la plupart des études existantes relatives aux prélèvements multi-organes, n’ont jamais exploré l’expérience des infirmières en temps réel par observation et par entrevues. De plus, la plupart des études effectuées étaient quantitatives, c’est-à-dire en effectuant des

(16)

jamais jusqu’à ce jour été effectuées.

f inalement, lors de mes recherches, j’ai eu la chance de trouver un poème qui m’a infiniment touché et que je désire partager:

En souvenir de moi

Un jour viendra où mon corps reposera sur un drap blanc soigneusement replié sous les quatre coins d’un matelas, dans un hôpital où tout le monde

s ‘affaire à soigner les vivants et les mourants. A un certain moment, un médecin

déterminera que mon cerveau a cessé de fonctionner et, qu ‘enfait ma vie s ‘est arrêtée.

Lorsque ce moment viendra n ‘essayez pas d’insuffler à mon corps une vie artificielle à 1 ‘aide d’une machine. Faites plutôt en sorte que mon corps puisse aider à enrichir la vie de d ‘autres personnes.

Donnez mes yeux à l’homme qui n ‘ajamais vu le soleil se lever, te visage d’un enfant ou l’amour dans tes yeux d’une femme.

Donnez mon coeur à quelqu ‘un dont le propre coeur n ‘a été la source que d’interminables jours de souffrances.

Donnez mes reins au malade qui, de semaine en semaine, dépend d’une machine pour survivre.

Prenez mes os, tous mes muscles, chaque neifet chaque fibre de mon être et trouvez te moyen de faire marcher un enfant handicapé.

Brûlez ce qui reste de moi et répandez mes cendresaux quatre vents afin d’aider les fleurs à croître.

$i vous devez enterrer quelque chose, que ce soit mes fautes, mesfaiblesses et tous les prejugés contre mes semblables.

$i vous faites cela, ma vie ne s ‘arrêterajamais. Robert N. Test

(17)

Chapitre p(fluier

Le problème

(18)

donneurs d’organes, victimes d’accidents de la route, a décru régulièrement au cours des dernières années. Cette diminution s’expliquerait par le renforcement des règles de sécurité routière, l’obligation du port de la ceinture de sécurité instituée en 1976 ainsi que le raffinement des outils technologiques sécuritaires mis en place par les manufacturiers d’automobiles. La majorité des personnes donneuses d’organes sont aujourd’hui des individus décédés à cause d’accidents vasculaires cérébraux, principalement de nature hémorragique (Québec Transplant, 2004).

Parallèlement, le nombre de personnes en attente d’une transplantation augmente d’année en année. Depuis 1997, Québec Transplant (2004) observe une stabilisation du nombre de candidats en attente pour la greffe cardiaque et la greffe coeur-poumons. Cependant, une augmentation des demandes est notée pour les organes tels que les poumons, le foie, le pancréas, le rein et la combinaison rein-pancréas. Le rein est l’organe le plus en demande. Étant donné que les personnes en attente de reins sont traitées grâce à la dialyse rénale, les décès recensés parmi les candidats potentiels se situent surtout chez les clients en attente d’un organe vital tel que le coeur, les poumons ou le foie.

(19)

7

Le problème

Plus de 480 organes ont été transplantés, en 2003, au Québec (Québec Transplant, 2004). Même si le don d’organes est considéré comme un don de vie (Québec Transplant, 2004), la chirurgie de prélèvement d’organes est très éprouvante pour les infirmières de salle d’opération. Celle chirurgie est définie comme étant multi-organes lorsque la personne qui est donneuse offre au moins

deux types d’organes, soit une combinaison du coeur et d’un rein ou d’un coeur et d’un poumon (ou les deux poumons) (Québec Transplant, 2004). Par contre, l’intervention chirurgicale pour prélèvement multi-organes peut également impliquer le prélèvement de plus de deux organes. Si tel est le cas, les organes qui ont été suffisamment perfusés et refroidis suivent cet ordre de prélèvement, déterminé par le temps d’ischémie optimal pour chaque organe (Lilly et Langley, 1999) et considéré comme une règle de l’art: le coeur est le premier, suivi des poumons, du foie, du pancréas et des reins. Le prélèvement de la peau et des os est effectué en dernier, une fois que l’abdomen est fermé, que les champs opératoires initiaux sont enlevés et que le corps de la personne donneuse d’organes est nettoyé.

Certains auteurs (Youngner, Allen, Bartlett, Cascorbi, Hau, Jackson,

Mahowald, Martin, Barbara, 1985) estiment que peu d’attention a été consacrée aux effets dérangeants du prélèvement d’organes sur le moral des infirmières de salle d’opération, qui sont pourtant d’éventuelles promotrices du don d’organes.

(20)

D’autres (Crandali, 1987, Youngner et ai, 1985) considèrent que les infirmières de salle d’opération ressentent des sentiments d’ambivalence et de confusion. Ces sentiments s’expliqueraient par des différences importantes dans les procédures et les rituels habituels en chirurgie majeure. La différence la plus importante survient quand l’anesthésiste ferme le respirateur et quille la salle puisque les organes qui requéraient une bonne oxygénation ont été prélevés. Les chirurgiens qui n’ont pas quitté la salle avec les organes viables, ferment alors la cavité du corps, généralement avec un fil de rétention et de larges aiguilles. Habituellement, pour des chirurgies majeures, la fermeture de la cavité abdominale s’effectue sur divers plans anatomiques, c’est à dire le péritoine, les muscles, la graisse et, finalement, la peau en utilisant plusieurs couches de fils et des aiguilles fines. Après le prélèvement des organes, une ou deux infinnières nettoient le corps et le préparent pour le transport à la morgue. Ordinairement en phase postopératoire, les clients sont acheminés vers la salle de réveil ou vers les soins intensifs.

Youngner et al. (1985) mentionnent la présence de trois conflits moraux. Premièrement, une intervention chirurgicale habituelle est toujours justifiable pour le bien-être du client, même si elle peut être douloureuse, invasive et même mutilante, comme par exemple une amputation. L’intervention chirurgicale pour don d’organes ne procurera aucun bien-être au donneur. Deuxièmement, la personne a le droit au respect : elle doit être considérée

(21)

4

comme une fin en soi et non pas comme un moyen pour obtenir des organes. Troisièmement, le but d’une chirurgie habituelle est de préserver le tissu sain et non pas de l’extraire.

Un sondage (Kiberd et Kiberd, 1992) a été effectué auprès des infirmières des soins intensifs, de l’urgence et des salles d’opération, afin d’explorer les attitudes des infirmières par rapport au don d’organes, la transplantation et le prélèvement d’organes. Malgré des commentaires négatifs, l’appui pour le don d’organes a été presque unanime. Toutefois, les infirmières de salle d’opération sont moins enclines à donner leurs propres organes, comparativement aux infirmières d’urgence et des soins intensifs. Ainsi, la plupart des infirmières des unités précitées reconnaissent les bénéfices de la transplantation, soit la chance d’offrir à un individu de vivre une deuxième vie. Par ailleurs, les infirmières de salle d’opération rapportent que les coûts reliés à la transplantation sont excessivement élevés particulièrement dans un contexte de restriction budgétaire (Kiberd et Kiberd, 1992).

Wolf (1994) souligne que les infinnières de salle d’opération croient que les prélèvements d’organes aggravent une situation déjà difficile pour les familles. Les infirmières interviewées par Wolf (1994) relatent des situations horrifiantes. Plus spécifiquement, leurs commentaires mentionnent le dégoût, le manque de respect ainsi que le manque de dignité face à la reconstruction du corps de la personne donneuse d’organes, à la suite du prélèvement. De plus, les

(22)

infirmières de salle d’opération perçoivent les différents chirurgiens comme étant peu affables, protégeant un organe spécifique et nécessaire à leurs fins.

Les infirmières réagissent en souhaitant déchirer leur carte de don d’organes.

Plusieurs auteurs infirmières (Crandall, 1987, Kawamoto, 1992, Lily et Langley, 1999) ont décrit leur expérience personnelle et elles s’accordent pour dire que les soins chirurgicaux reliés au don d’organes sont exigeants pour les infirmières de salles d’opération. Cette exigence se manifeste surtout sur le plan psychologique. Le silence qui suit à la fin du prélèvement d’organes peut laisser un sentiment d’inquiétude et d’insécurité pour le personnel peu familier avec les soins post-mortem de la salle d’opération. Souvent, les infirmières sont attristées par cette perte de vie jamais banale et pleurent avec les familles des personnes donneuses d’organes (Lily et Langley, 1999). D’après Kawamoto (1992), les infirmières de salle d’opération accomplissent leurs tâches le plus rapidement possible et ce, afin d’oublier le scénario jusqu’à la prochaine fois. Crandail (1987) croit que l’exécution d’une intervention chirurgicale sur une

personne morte cliniquement, à savoir un prélèvement d’organes, viole les normes d’une salle d’opération. D’abord parce qu’un décès est plutôt rare dans une salle d’opération. Ensuite, parce que cette situation est la seule qui requiert l’acheminement d’un patient décédé au bloc opératoire. De plus, la fermeture du respirateur lorsque les organes sont prélevés témoigne d’un cumul de scénarios déconcertants qui justifient, selon l’auteur, le questionnement des infirmières de

(23)

6

salle d’opération par rapport au moment précis du décès des patients donneurs d’organes.

Parmi les écrits recensés se rapportant aux infirmières de salle d’opération soignant des personnes donneuses d’organes, trois utilisent une approche quantitative. Plus précisément, Bidigare et Oermann (1991) utilisent une étude descriptive corrélationnelle alors que Kiberd et Kiberd (1992) et Van Da Walker (1994), une étude descriptive simple, par sondage. Les autres adoptent une approche qualitative, soit de type phénoménologique (Sadala & Mendes, 2000, Wolf, 1991), soit par groupe de discussion focalisé (Wolf, 1994). f inalement, des auteurs ont adopté des approches informelles plus proches de l’histoire vécue que de la recherche (Crandall, 1987, Kawamoto, 1992, Lily et Langley, 1999, Youngner et ai, 1985). Ces auteurs rapportent tous le sentiment d’ambivalence vis-à-vis la déclaration de mort cérébrale ainsi que le conflit d’éthique relié au maintien en vie d’une personne pour la survie d’une autre. De plus, ils suggèrent d’étudier davantage les sentiments des infirmières en salle d’opération lors du prélèvement d’organes afin d’améliorer leur bien-être ainsi que leur capacité à soigner dans cette situation extrêmement difficile.

Roy et Andrews (1991, 1999) voient la personne comme un système adaptatif, en constante interaction avec son environnement interne et externe. L’environnement est une source de stimuli variés qui favorisent ou menacent l’intégrité psychique, spirituelle, relationnelle, et sociale de la personne. La

(24)

personne ne répond pas passivement aux stimuli environnementaux. Au contraire, elle tente de maintenir son intégrité selon ses propres objectifs.

En utilisant le vocabulaire de Roy. l’intervention chirurgicale pour donneurs de plusieurs organes peut être considérée comme le stimulus focal. La mort de la personne donneuse d’organes et les différences avec les chirurgies majeures peuvent représenter des stimuli contextuels. Quant aux valeurs, les croyances et les conflits moraux, ils constituent des stimuli résiduels. Les trois stimuli agissent ensemble et déterminent les réponses, les mécanismes et les niveaux d’adaptation pour les infirmières de salle d’opération. Roy classe les mécanismes d’adaptation en deux sous-systèmes, soit le sous-système régulateur et le sous-système cognitif. Le sous-système cognitif, comprend les processus émotionnels et cognitifs qui interagissent avec l’environnement. Ces mécanismes d’adaptation se comparent aux stratégies d’adaptation de Lazarus et Folkman (1984). Puisque l’observation directe des processus cognitifs et régulateurs s’avère impossible, Roy (1988) propose l’observation des réponses comportementales à travers des réponses d’adaptation. Pour notre étude, les réponses de concept de soi, de fonction de rôle, et d’interdépendance seront abordées. C’est à travers ces catégories que les réponses et les interactions avec l’environnement sont transmises et que le niveau d’adaptation peut être observé. Notre étude propose l’exploration de l’intégrité d’infirmières lors de l’intervention chirurgicale pour prélèvement multi-organes selon le modèle de

(25)

$

Roy. Pour ce faire, il importe d’utiliser une méthode de recherche qui documente l’ensemble des stimuli ainsi que les réponses et les mécanismes d’adaptation des infirmières de salle d’opération, lors d’une chirurgie pour prélèvement multi-organes. L’étude de cas (Stake, 1995) décrit les participants dans leur contexte et leur milieu et permet de les comprendre en révélant le caractère unique et commun de leur expérience. Ainsi, pour promouvoir la santé des infirmières et pallier la pénurie actuelle d’organes et la demande future, il est nécessaire de procéder à l’étude d’un cas de chirurgie pour prélèvement multi-organes.

But de la recherche

Explorer 1’ nitégrité psychique, spirituelle, relationnelle, et sociale d’ infirmières québécoises de salle d’opération lors de l’intervention chirurgicale pour prélèvements multi-organes.

Ouestions de recherche

1. Quels sont les stimuli décrits par des infirmières de salle d’opération qui ont vécu récemment une intervention chirurgicale pour prélèvement d’organes? 2. Quels sont les réponses et les niveaux d’adaptation décrits par les

infirmières de salle d’opération qui ont vécu récemment une intervention chirurgicale pour prélèvement d’organes?

(26)

3. Quels sont les mécanismes d’adaptation décrits par les infirmières de salle d’opération qui ont vécu récemment une intervention chirurgicale pour prélèvement d’organes?

(27)

Chapitre 2 La recension des écrits

(28)

Ce chapitre présente une recension des écrits surle prélèvement d’organes et ses implications, ainsi que sur les réactions des infirmières de salle d’opération face à la chirurgie pour dons multiples d’organes. Le chapitre se termine avec la présentation du modèle d’adaptation de Roy, modèle qui, selon nous, saura mettre en lumière les stimuli auxquels les infirmières québécoises font face, ainsi que leurs réponses et leurs mécanismes d’adaptation face à l’intervention chirurgicale pour le prélèvement multi-organes.

Prélèvement d’organes et ses implications

Pour qu’un prélèvement d’un ou de plusieurs organe(s) soit possible, la personne donneuse d’organe doit avoir subi un traumatisme irréversible qui a provoqué la mort cérébrale et elle, ou un de ses proches, doit avoir consenti au don d’organes. Le prélèvement est alors réalisé lors d’une intervention chirurgicale qui rend disponible les organes pour la transplantation. Cette section sert à mettre en contexte les réactions des infirmières à la chirurgie pour don d’organes en résumant les connaissances concernant le don d’organes, la mort cérébrale, la chirurgie pour don d’organes et la transplantation.

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Le don d’organes

Depuis 1987, Québec Transplant a fait un effort particulier pour mieux rentabiliser le don d’organes en promouvant le don multi-organes aux dépens du don unique de reins. Le taux de donneurs multi-organes s’est ainsi accru régulièrement pour atteindre les 90% et plus au cours des dernières années (Québec Transplant, 2004). Cette proession reflète une meilleure utilisation des donneurs. Les donneurs uni-organe sont essentiellement des donneurs de foie et de reins, l’âge étant un critère beaucoup moins restrictif chez ces derniers (Québec Transplant, 2004). La mort cérébrale

Selon Québec Transplant (2002, p. 1), le diagnostic de mort cérébrale est effectué lorsque cinq critères sont présents. Dans un premier temps, «l’étiologie de la pathologie ayant causé la mort cérébrale doit être connue». Deuxièmement, «un coma profond de niveau (Glasgow 3) ou l’absence de réponses aux stimuli, de mouvements anormaux (décortication décérébration-dysldnétiques) ou l’absence de convulsions doivent être présents ». Troisièmement, la personne donneuse d’organe, « doit démontrer

une absence de réflexe du tronc cérébral ». Plus spécifiquement, le réflexe pupillaire (mésencéphale), le réflexe cornéen (protubérance), le réflexe oculo-pharyngé (bulbe supérieur) et le réflexe respiratoire (bulbe) doivent tous être absents. Quatrièmement, la personne donneuse d’organe, «doit être apnéique lors du test d’apnée ». f inalement, il doit y avoir absence de facteurs pouvant fausser le diagnostic de mort cérébrale, tels que

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l’hypotension, l’hypothermie

(

32.2 °

C), ou la présence de barbituriques lors des examens sanguins (Québec Transplant, 2002).

La Commission de Réforme de la Loi Canadienne (cité dans Québec Transplant, 1993, p. 44) souhaite que la définition d’une personne décédée soit énoncée telle quelle: « Une personne est morte lorsque survient une perte irréversible de toutes les fonctions cérébrales de cette personne. La perte des fonctions cérébrales peut être causée par l’absence prolongée des fonctions cardiaques et respiratoires spontanées ». Pour Youngner et Amold (1993), le concept de l’irréversibilité de la mort a été constant et sans controverse depuis 1960, dans les débats philosophiques et les débats publics. D’autres (Truog et Robinson, 2003) soulèvent des inquiétudes face à la compréhension dans la définition de la mort. Selon eux, cette incertitude s’explique par le fait que le moment de la mort ne peut être dicté par des processus scientifiques ou logiques mais qu’il doit être choisi par un consensus social (Truog et Robinson, 2003). Wolf (1991) soulève le questionnement qu’ ont les infirmières face à la définition clinique et légale de la mort cérébrale et comment cette définition se traduit pour les membres de la famille de la personne donneuse d’organe. Les infirmières de cette étude se questionnent également sur la distinction à faire entre la mort cérébrale et la mort/mort.

Le constat et la certification de la mort cérébrale s’effectuent avec la collaboration de deux médecins consultants qui ne sont pas nécessairement spécialistes en sciences neurologiques et qui n’ont aucun conflit d’intérêt

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14

(aucun lien avec les receveurs et ne font pas partie de l’équipe de transplantation ou de prélèvement) (Québec Transplant, 2001).

Chirurgie pour don d’organes

La personne qui est donneuse multi-organes offre au moins 2 types d’organes, soit une combinaison d’un coeur et d’un rein ou d’un coeur et d’un poumon (ou les deux poumons). La peau et les os peuvent également être prélevés lors d’une telle intervention (Québec Transplant 1999).

L’annonce du prélèvement d’organes survient presque toujours en situation semi-urgente car les personnes donneuses d’organes sont souvent instables sur le plan hémodynamique. Ainsi, le délai est très court pour la préparation psychologique et émotionnelle des infirmières de salle d’opération (Crandali, 1987).

La coutume, les techniques opératoires et les préférences subjectives des chirurgiens font en sorte que, dans la mesure du possible, lorsqu’un spécialiste doit transplanter un organe, il le prélève lui-même. Ainsi, si un patient du Nouveau-Brunswick a un besoin urgent d’un coeur (besoin déterminé par Québec Transplant, selon des critères précis), le chirurgien du Nouveau-Brunswick ira prélever le coeur à Montréal. Cette situation peu banale augmente et ce, de façon considérable, la tension et le stress éprouvés

par les infirmières de salle d’opération puisqu’elles ne connaissent pas les

chirurgiens qu’elles devront assister dans leurs techniques opératoires spécifiques et que ces derniers ont des nomenclatures, des techniques, des instruments, ou des méthodes qui leur sont propres.

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Utilisation des organes prélevés

Une transplantation est définie, selon Québec Transplant (1999, p. 7), comme étant une intervention chirurgicale au cours de laquelle un organe est greffé, comme un rein, par exemple. Un groupe d’organes peut être greffé en bloc, tel qu’un bloc coeur-poumons. Ainsi, lorsque deux ou plusieurs organes sont greffés à des sites différents lors de la même intervention, il y a deux ou plusieurs transplantations.

À

titre d’exemple, un rein-pancréas constituent deux transplantations.

Selon Québec Transplant (Transplant, 1999), le nombre de personnes en attente d’un organe augmente d’année en année. Les personnes en attente de reins sont les plus nombreuses. Québec Transplant (1999) observe cependant une stabilisation du nombre de candidats à la greffe cardiaque et de coeur-poumon en attente, tandis qu’une augmentation est notée au niveau des personnes en attente de poumons, de foie, de pancréas, de rein-pancréas et de reins. Ainsi, en 1999, comme antérieurement, les décès à déplorer se situaient surtout au niveau des personnes en attente d’un organe vital (coeur, poumons et foie) puisque les personnes en attente de reins continuent d’être traitées en dialyse (Québec Transplant 1999).

La première transplantation réalisée et enregistrée au Québec a été

une transplantation rénale qui fut effectuée en 195$ (Québec Transplant 1999). Toujours selon la même source, plus de 6,000 organes, toutes catégories confondues, ont été transplantés au Québec jusqu’à tout récemment.

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16

La technologie offre maintenant la possibilité de prélever les valves cardiaques des donneurs cadavériques et de les conserver par la cryopréservation. Or, les clients qui nécessitent présentement un remplacement de valves cardiaques se voient offrir le choix entre une valve porcine ou une valve mécanique.

À

défaut de «clonage» la cryopréservation pour les valves cardiaques offre une avenue intéressante pour ces clients. La recherche est aussi une destination possible pour certains organes ou tissus, à titre d’exemple : la colonne vertébrale est quelques fois prélevée pour les étudiants en médecine. Le département de pathologie demeure l’endroit pour expédier les organes qui ne seront pas utilisés. finalement, l’extraction d’îlots de Langherans est aussi faite afin de créer des médicaments pour les individus souffrant de diabète.

Nous avons abordé les particularités du don d’organes au Québec, c’est-à-dire la rentabilité du don multi-organes aux dépens des dons uniques. De plus, nous avons abordé les cinq critères déterminants ainsi que la définition et le processus utilisé afin de confirmer un diagnostic de mort cérébrale. finalement, la définition de la chirurgie pour don multi-organes ainsi que l’utilisation des organes prélevés ont été abordées.

La réalité des infirmières de salle d’opération à la suite de l’annonce de la chirurgie sera décrite dans la prochaine section.

Les réactions des infirmières à la chirurgie pour don multiple d’organes Cette section présente les études et les témoignages qui soutiennent le caractère éprouvant de la chirurgie pour don multiple d’organes. Nous présenterons d’abord les études qualitatives, puis les études quantitatives

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pour terminer avec les témoignages, en respectant la chronologie des publications.

Les études qualitatives

Le résumé de ces études se trouve au tableau I. On retrouve les auteurs Youngner et al. (1985), Wolf (1991), Wolf (1994) et Sadala & Mendes (2000).

Youngner et al. (1985) estiment que peu d’attention a été donnée aux effets dérangeants du prélèvement d’organes sur les infirmières de salle d’opération qui sont pourtant d’éventuelles promotrices du don d’organes. Ils ont effectué des entrevues informelles auprès d’infirmières de salle d’opération, d’anesthésistes et de coordinateurs de transplantation (11=12) afin de connaître leurs expériences vécues lors d’un prélèvement d’organes. Youngner et al. (1985), tout comme Goodrich (1932), croient que les croyances des infirmières résident principalement dans le fait que «la société ne demande jamais de faire des actes destructeurs ou blessants», ainsi que dans le manque de soutien. A l’instar de Youngner et al., (1985), plusieurs auteurs croient que l’éducation et la compréhension du concept de la mort cérébrale sont indispensables (Crandall 1987, Kawamoto 1992, $adala & Mendes 2000, Van Da Walker 1994, Wolf 1991).

Wolf (1991) a effectué uneétude descriptive en utilisantune

approche phénoménologique auprès de huit infirmières. Quatre infirmières oeuvraient à de la salle d’opération (n=4), trois infirmières provenaient

d’agences de prélèvements (n 3) etune infirmière travaillait aux soins intensifs (n 1). Le but de son étude était d’encourager les infirmières a

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‘s

verbalisées de leurs expériences lorsqu’elles effectuent les soins post mortem aux personnes donneuses d’organes à la suite d’un prélèvement d’organes. L’étude décrit le contexte des soins post-rnortem effectuer grâce

au cadeau généreux de la famille de donner les organes de la personne, de la tragédie d’une blessure traumatique, fatale et du diagnostic de mort

cérébrale prononcé pour des jeunes personnes, des personnes en santé et du prélèvement d’organes.

Les infirmières sont attristées par la mort de la personne donneuse

d’organes et voient les soins post-mortem comme étant une opportunité de clore l’association qu’elles ont avec la personne. Les infirmières respectent le corps de la personne donneuse d’organes et voient la tâche des soinspost mortem comme des soins qui offrent unconfortmême après la mort. Cette étude décrit le rituel effectué pour les soins post-mortem. Les infirmières comparent ces soins à un bain. La personne donneuse d’organes est lavée de débris, de sang, de liquide antiseptique, d’excréta et de sécrétions afin d’être «présentable ». Les infirmières résistent à l’utilisation des attaches fournies dans le paquet du linceul pour attacher les bras, les jambes et la mâchoire de la personne donneuse d’organes, car, elles craignent blessé la peau. Les

inlinnièrescroisent les poignets et les chevilles et utilisent des coussinets

abdominaux doux pour protéger la peau. La plupart des infirmières nient la répugnance face à la manipulation d’un corps mort. Par contre, elles

admettent leur aversion lorsque le corps de la personne donneuse d’organes est défigurée ou que le corps démontre des signes visibles de détresse.

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Tableau I Résumé des études qualitatives portant sur les réactions des infirmières (1985 à 2000) Auteur(s) Type d’études Population — Résultats Limites Nombre Youngner et al Étude informelle N= 12 inf. S.O. -difficultés vécues: peu d’avertissement dans -nombre de participants non (1985) entrevue anesthésiste, et l’annonce du prélèvement ou de la mentionnés coordinateur de transplantation -méthode non mentionnée transplantation -programme de soutien, -l’étudiante chercheuse a dû éducation sur le concept de mort cérébrale, communiquer avec l’auteur reconnaissance de l’inconfort émotionnel, principal pour connaître les protection du personnel, considérer les familles. détails. Wolf (1991) Étude N’8 inf., -difficulté avec la mort de la personne donneuse phénoménologique 4 inf. S.O., d’organes pour les infirmières 3 inf. agences, -rituel dans les soins post-mortem et I inf. S.I. signification que celles-ci y accordent Wolf(1994) Étude qualitative Nl 1 inf. deux -difficulté à soigner des donneurs cadavériques scénario comme base pour focus group institutions où sans coeur battants; clients pourraient ne pas comprendre la situation d’un sont effectuer être déclarés morts donneur cadavérique sans coeur prélèvements et -inf. S.O. croient que le prélèvement D.C.S.C.B. battant. L’auteur témoigne que transplantations aggravera une situation déjà difficile, ceci a causé des réticences sur le 3 inf. S.O., -inf. S.O. en service externe et interne ont été processus de discussion de 1 inf. perturbées groupe focalisé. anesthésiste, et 7 -témoin de l’attente pour les organes, de la Etude qui traite des DCCNB qui inf. S.I. reconstruction du corps du donneur, du départ est une réalité différente de l’anesthésiste et des autres chirurgiens Sadala & Mendes Étude N= 18, oeuvrant -habiletés techniques, scientifiques, habileté à (2000) phénoménologique aux soins gérer des situations souvent conflictuelles intensifs à -inf. en conflits avec les aspects affectifs et Sao Paolo philosophique du soins -résultat: enseignement spécifique sur le don d’organes et la transplantation apprentissage des tâches et compétence dans la communication interpersonnelle

o

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20

Wolf (1994) a effectué une étude qualitative en utilisant l’approche de discussion par groupe focalisé et a interviewé des infirmières oeuvrant aux soins intensifs (n 7), des infirmières de la salle d’opération (n = 3) et une

infirmière anesthésiste (n = 1). Le but de son étude était d’explorer leurs

réactions face aux soins prodigués à des personnes qui sont donneurs à coeur non battant (DCNB). De plus, celle-ci a voulu décrire la signification accordée à leurs réactions et à leurs intentions.

En fait, elle relate surtout l’expérience d’une infirmière de salle d’opération face à un prélèvement d’organes. Cette infirmière de salle d’opération a été très perturbée par le processus de prélèvement. Plus spécifiquement, ses commentaires soulignent la longue période d’attente, la reconstruction du corps du client donneur suite au prélèvement d’organes et

le départ de l’anesthésiste ainsi que celui des autres chirurgiens. Ces

réactions sont décrites:

“Some of these people are hanging over, waiting to get at this, “I’m here for the heart”; “1m here for the kidneys.” They’re stepping over one another. It’s so brutal.. .1 wanted to go home and rip up my donor card” (Wolf, 1994, p. 980).

Les infirmières interviewées ont insisté sur leur difficulté à soigner des donneurs à DCNB parce que ces clients pourraient ne pas être déclarés mort d’une mort cérébrale selon les critères légaux. Les infirmières de salle d’opération croient que le prélèvement sur les donneurs avec coeur non battant aggravera une situation déjà difficile. Certaines limites énoncées par l’auteur mettent en évidence un scénario conçu par les infirmières de cette

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étude pour comprendre la situation d’un donneur cadavérique sans coeur battant. L’auteur témoigne que ce scénario a causé des réticences de la part des infirmières sur le processus de discussion par groupe focalisé. Cette étude est intéressante et donne accès à des commentaires très pertinents provenant des infirmières de salle d’opération. Cependant, le contexte de cette étude diffère de la situation canadienne puisque seules les personnes en mort cérébrale sont acceptées comme donneuses d’organes.

$adala et Mendes (2000) ont effectué une étude qualitative phénoménologique dans le but de recueillir la signification accordée de soigner des personnes donneuses d’organes par des infirmières des soins intensifs, (n =18), à Sao Paulo au Brésil. Ces auteurs rapportent que les infirmières sont attristées par le décès de jeunes personnes et, par conséquent, elles participent d’une certaine façon au deuil de ces familles. Dans cette étude, les auteurs nous démontrent l’ambiguïté des sentiments vécus par les infinnières, face à des personnes diagnostiqués de mort cérébrale. D’ailleurs, certaines infirmières décrivent les donneurs comme étant “.. .humans and must be treated as humans, but at the same time, it is not possible to perceive them as such. There are no traces of humanity” (Sadala et Mendes, 2000, p. 79$). De toute évidence, les personnes donneuses d’organes sont perçues tout simplement comme étant des corps physiques avec des signes physiologiques et des données cliniques. L’impossibilité de communiquer avec ceux-ci ou de percevoir le moindre signe humain est mise en évidence.

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Toujours selon ces mêmes auteurs, certaines infirmières cherchent désespérément à trouver un signe quelconque d’humanité, si infime soit-il, dans ces corps inanimés. D’autres continueront de parler aux donneurs. Indéniablement, quelques infirmières diront qu’elles soignent un cadavre mais continuent de percevoir ce cadavre comme un être humain. Les infirmières de cette étude, tout comme les infirmières de salle d’opération (Crandall, 1987), critiquent amèrement les autres professionnels de la santé qui ont tendance à ne pas traiter le cadavre comme un être humain.

Sadala et Mendes (2000) relatent les expériences vécues par des infirmières confrontées au fait qu’il y a plusieurs équipes médicales impliquées lors d’un prélèvement et que chacune de ces équipes s’intéresse à un organe particulier, soit le coeur, le foie, les reins, etc. Ce processus crée une dynamique particulière qui peut donner aux infirmières des sentiments d’inconfort face au partage des organes. Ainsi, une équipe médicale se concentre uniquement sur le foie, une autre sur les reins, le coeur, ainsi de suite, faisant abstraction de la personne dans sa globalité.

La mort des clients donneurs d’organes est unique en soi puisque le coeur bat toujours ($adala et Mendes, 2000, Wolf, 1994). Cette personne décédée est un «cadavre maintenu en vie» qui a et qui continuera d’avoir une vie biologique tant et aussi longtemps que le prélèvement sera considéré comme nécessaire. Habituellement, la mort est un processus lent et graduel. Or, le donneur représente, pour la plupart, une personne en santé qui a disparu et ce, de façon traumatique (Sadala et Mendes, 2000). Ces auteurs estiment que faire face à un cadavre dont le coeur bat toujours est très difficile pour

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les familles. De plus, les familles des donneurs croient que cette personne est toujours une personne jusqu’au moment où elle pourra mourir socialement. Ce dernier point est fondamental puisque ces auteurs soutiennent qu’il existe à ce moment précis une rupture entre les infirmières et la famille du donneur. Les professionnels impliqués dans le processus de transplantation, particulièrement les infirmières des soins intensifs, se sentent redevables envers la famille jusqu’au retour du donneur, après le prélèvement. Quelquefois, à la suite d’un prélèvement d’organes, la famille désire voir le personne avant que celui-ci ne soit transporté à la maison funéraire.

Ainsi, selon Sadala et Mendes (2000), les soins requis pour les donneurs d’organes seraient plus spécifiques et standardisés. Ces soins requièrent plus de vitesse, d’attention et d’exactitude. Les infirmières soutiennent également que le soin peut être considéré comme un acte mécanique, ce qui pourrait justifier le manque de sentiments éprouvé par les professionnels.

Les résultats de cette étude démontrent que le fait de soigner des personnes déclarés cliniquement morts mais gardés en vie afin de servir comme donneurs d’organes, demande des habiletés techniques et scientifiques ainsi qu’une aptitude à gérer des situations qui sont souvent en conflit avec les concepts traditionnels de soins infirmiers. Les infirmières sont anxieuses et ressentent des conflits entre les aspects affectifs et philosophiques de soigner un personne qu’elles appellent un “patient différent”.

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Les études quantitatives

Les études quantitatives sont l’oeuvre de Bidigare et Oermann (1991), de Kiberd et Kiberd (1992) et de Van da Walker (1994) qui ont tous utilisé l’approche par enquête. Elles sont résumées au tableau II.

Bidigare et Oermann (1991) ont effectué une étude descriptive corrélationnelle. Le but de cette étude était d’identifier les attitudes et les connaissances des infirmières en relation avec le prélèvement d’organes. L’échantillon principal (n = 60) comprenait des infirmières oeuvrant aux soins intensifs (6 1%), des infirmières de salle d’urgence (10%) et (29%) qui travaillaient sur d’autres unités de soins non spécifiées. Les auteurs ont développé un questionnaire auto-administré. La première partie comportait des questions ayant trait aux attitudes subjectives des infirmières face aux dons d’organes. La deuxième partie évaluait la connaissance des infirmières du protocole pour les personnes donneuses d’organes dans un hôpital universitaire.

Ainsi, 94% des infirmières ont exprimé leur accord envers le prélèvement d’organes en général. Par contre, seulement 51% avaient pris des mesures concrètes pour faire le don personnel de leurs organes au moment de leur décès. Bidigare et Oermann (1991) interprètent ces résultats comme une divergence entre les valeurs des infirmières et leurs actions. Les infirmières approuvent le don d’organes en théorie mais ne le manifestent pas par une action concrète.

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Tableau II Résumé des études quantitatives portant sur les réactions des infirmières (1991 à 1994) Auteur(s) Type Population — Résultats Limites d’études Nombre Bidigare, & Enquête n= 60, 61% -réponses sur attitudes envers le don -Fiabilité de Oermann, (1991) S.I.,l0% urgence, d’organes et sur connaissances dun protocole l’instrument de 29% autres du don d’organes mesure n’a pas été département -relation signification entre l’âge & l’étendue établie. d’influencer sa famille -relation positive significative entre la participation antérieure au soins d’un donneur et le_degré_de_confort_d’approcher_les_familles Kiberd & Kiberd Enquête n = 102, -différentes unités re: don d’organe, -inquiétudes subjectives (1992) n 21 S.I., transplantation: différence claire dans les des inf. pas explorées n= 7 urgence, attitudes -aperçu superficiel du n= 20 salle d’op. -appui don d’organe presque unanime malaise vécu chez les n=54 autres unités -inf. S. O. moins enclines à donner inf. qui vivent avec le -inf. S.0. plus pessimiste re: survie des prélèvement. receveurs -40 % réponse des inf. S.O. Van Da Wallcer Enquête N= 272 inf. salle -besoin de programme d’enseignement -Résultats sont (1994) d’opération -cible le processus, les rôles, les divergents des autres responsabilités des inf., la déclaration de mort, études. la reconstruction, les soins post-mortem -Intérêt pour programme -information sur taux de succès des d’enseignement. transplantations et la qualité de vie des receveurs

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De plus, les résultats montrent une différence significative entre les infirmières oeuvrant sur les différentes unités. Les infirmières de soins intensifs ont démontré des réponses plus positive que leurs collègues de l’urgence quant à leur participation aux soins des personnes donneuses d’organes (f [6,53] 3.61, p 0.004). Une relation positive et significative a été démontrée entre l’âge des infirmières et leur degré d’influence sur les membres de leurs familles respectives à donner leurs organes (r =

0.345, p 0.004). De plus, les infirmières qui en avaient déjà l’expérience étaient davantage favorables à soigner éventuellement une personne donneuse (r= 0.369, p

0.002). Le score le plus élevé sur le plan des connaissances a été obtenu par les infirmières qui avaient une attitude plus positive envers le don de leurs propres organes (r = 0.327, p= 0.005), qui étaient plus favorables à soigner éventuellement

une personne donneuse d’organes (r = 0.441, p= 0.0001), et qui avaient le plus

d’influence sur la décision de leurs proches concernant le don d’organes (r= 0.527, p = 0.0001).

Les auteurs concluent que le fait d’offrir l’opportunité aux infirmières de soigner des personnes donneuses d’organes augmente leurs connaissances et peut promouvoir des attitudes positives envers le don d’organes. Gibson (1996) estiment que l’étude de Bidigare et Oermaun (1991) démontre que l’attitude des infirmières n’a pas changé depuis presque dix ans, en dépit des campagnes de sensibilisation. De plus, elle rapporte une convergence d’attitude entre les infirmières et le public.

Kiberd et Kiberd (1992) ont effectué un sondage auprès de 102 infirmières ontariennes. Plus spécifiquement, des infirmières de soins intensifs (n 21),

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d’urgence (n= 7), de salle d’opération (n= 20) et d’unité de soins clinique variés (n=

54) ont été questionnées. Le but de cette étude était de déterminer les attitudes des infirmières envers le don d’organes, le prélèvement d’organes et la transplantation. Ainsi, toutes les infirmières s’accordent pour dire qu’elles soutiennent le don d’organes. Il existe des différences majeures d’attitudes et d’opinions entre les infirmières de salle d’opération et les autres infirmières oeuvrant sur les unités variées. Plus de la moitié des infirmières de salle d’opération, soit 61% ne seraient pas donneuses d’organes. De plus, 71 % d’entres elles placeraient des restrictions sur leur don. Or, 70% des infirmières de salle d’opération n’avaient pas signé leur carte de don d’organes. Lorsque les infirmières de salle d’opération ont décrit le prélèvement d’organes, des réponses telles que mutilation et manque dc respect du défunt étaient fréquemment encerclées, comparativement aux infirmières de soins intensifs où l’événement était noté comme étant valorisant, déprimant mais rarement irrespectueux du défunt.

La plupart des infirmières de cette étude reconnaissent les bénéfices de la transplantation rénale. Cependant, les infirmières de salle d’opération rapportent que les coûts reliés à la transplantation sont excessivement élevés, particulièrement dans le contexte actuel de restriction budgétaire.

Par ailleurs, Kiberd et Kiberd (1992) notent que seulement 10 % des infirmières de salle d’opération se sentent soutenues lors de cette intervention chirurgicale. Les commentaires négatifs des infirmières de salle d’opération sont : le manque de personnel, l’absence de rétroaction sur les résultats de la transplantation, la procédure trop longue, le temps d’avis trop court, le manque de soutien psychologique, le

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2$

manque de formation, le manque de respect de la part des chirurgiens et médecins traitants en plus des sentiments d’inconfort à être laissées seules avec le défunt après le prélèvement. Les commentaires tels que: le manque de personnel et la nature imprévisible de l’intervention ont été corroborés par seulement 15% des infirmières d’urgence, de soins intensifs et d’autres oeuvrant sur différentes unités cliniques.

Les auteurs croient que les infirmières qui ont répondu supportent le don, la transplantation et le prélèvement d’organes. Ainsi, il est concevable, selon ces auteurs, que les réponses positives soient sur-représentées dû au fait que les infirmières qui soutiennent le don d’organes sont plus enclines à remplir le questionnaire.

Kiberd et Kiberd (1992) estiment que cette étude a servi à regarder les facteurs réversibles qui peuvent influencer les attitudes. Les bénéfices perçus, la rentabilité et les résultats ont démontré qu’à cet hôpital, il existe une corrélation entre l’engagement personnel et professionnel et le don d’organes. Kiberd et Kiberd (1992) ont trouvé que les infirmières de salle d’opération ont tendance à voir le côté noir du prélèvement et de la transplantation et manquent d’informations positives concernant les receveurs. Ces auteurs croient que ce scénario anéantit l’envie altruiste du don d’organes chez les infirmières de salle d’opération. Les infirmières de soins intensifs partagent la même exposition aux personnes donneuses d’organes, elles ont également la même information limitée quant aux taux de survie des transplantés. Par contre, 71% d’entres elles ont signé leur carte de don comparativement à 30% des infirmières de salle d’opération. Les auteurs croient que l’environnement de la salle d’opération peut être un facteur qui prédispose aux réticences face au prélèvement d’organes.

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Van Da Walker (1994) a effectué un sondage auprès des infirmières de salle d’opération afin de découvrir leurs attitudes face au don d’organes. Sur 702 questionnaires, 272 (soit un taux de réponse de 39%) ont été remplis. La majorité des infirmières (80%) croient que les prélèvements d’organes devraient avoir priorité sur

les interventions chirurgicales électives. Près de 60% ont rapporté avoir signé leur carte de don d’organes. Or, 82% seraient enclines à donner leurs propres organes au moment de leur décès, comparé à 39% avec l’étude de Kiberd et Kiberd (1992). Par contre, l’étude de Van Da Walker (1994) soulève plusieurs questionnements troublants. Il estime que cette population d’infirmières a besoin de savoir qu’aucune pression n’a été exercée auprès des personnes donneuses d’organes ainsi qu’auprès des familles et que tous ont été soignées avec compassion. De plus, 10% des infirmières de cette étude croient que la qualité de vie, à la suite d’une transplantation, est peu élevée. Ces infirmières sont troublées par la notion de mutilation reliée au prélèvement d’organes. Selon l’auteur, l’enseignement auprès de cette population d’infirmières se concentre principalement sur l’aspect cognitif et psychomoteur de la technique opératoire du prélèvement d’organes. Les sentiments et les émotions étaient et sont toujours négligés. L’auteur soutient que les infirmières de salle d’opération éprouvent des réponses émotionnelles profondes lors des prélèvements d’organes, chirurgies auxquelles elles sont requises pour participer.

Les témoignages

Quelques infirmières ont raconté leur expérience de la chirurgie pour prélèvement de plusieurs organes. Crandali (1987) raconte son expérience personnelle, Kawamoto

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(1992), l’expérience observée et Lily & Langley (1999), leur expérience mutuelle. Ces témoignages sont résumés au tableau III.

Crandail (1987) est une infirmière clinicienne oeuvrant en transplantation qui partage son vécu. L’auteur identifie les dilemmes perçus dans le fait de soigner une personne diagnostiqué d’une mort cérébrale et qui sera éventuellement un donneur d’organes à la salle d’opération. Elle croit que les inquiétudes des infirmières de salle d’opération convergent principalement sur deux points majeurs, à savoir la déclaration de la mort cérébrale et le respect du défunt.

Crandall (1987) perçoit une critique amère de la part des infirmières de salle d’opération par rapport aux autres professionnels de la santé qui ont tendance à ne pas traiter le cadavre comme un être humain. De plus, elle

croit qu’une exacerbation des conflits peut être engendrée par des actions ou des propos tenus par les professionnels de la santé qui utilisent un humour inapproprié ou qui démontrent une attitude intransigeante, ceci dans le but de cacher leur propre inconfort (Crandall 1987).

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Kawamoto (1992) est une coordinatrice clinique sur un département de chirurgie qui raconte, à partir de son expérience, l’implication d’un prélèvement d’organes pour les infirmières oeuvrant à la salle d’opération. Cet auteur estime que lorsqu’un décès survient dans la salle d’opération, le personnel réagit avec un sentiment irrésistible de tristesse et d’échec. Les sentiments varient entre l’inconfort et la détresse extrême. De plus, pour les cas de prélèvement d’organes, Kawamoto croit que les infirmières de salle d’opération peuvent avoir certaines inquiétudes, à savoir si le donneur est vraiment décédé.

D’après Kawamoto (1992), les infirmières de salle d’opération accomplissent leurs tâches le plus rapidement possible afin d’oublier le scénario jusqu’à la prochaine fois. L’auteur croit qu’une compréhension du concept de la mort cérébrale, en plus d’avoir une connaissance approfondie des dilemmes éthiques entourant ce concept, est essentielle avant d’entreprendre le prélèvement d’organes.

Kawamoto (1992) juge que plusieurs infirmières de salle d’opération éprouvent de la difficulté à accepter le moment précis de la mort de la personne donneuse d’organes puisqu’elles ne font pas partie du processus décisionnel entrepris aux soins intensifs. Elle estime que l’aspect émotionnel entourant le prélèvement d’organes est crucial pour les infinnières de salle d’opération et qu’un soutien émotionnel devrait être disponible immédiatement après le prélèvement. L’auteur suggère l’implication des coordinateurs de transplantation dans l’exécution des soins post-mortem. De

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plus, cette personne pourrait répondre à toute question pertinente relative aux dons ou aux prélèvements d’organes.

Lily et Langley (1999) relatent des faits se basant sur leurs expériences respectives. Ces auteurs décrivent un aperçu du processus complet du don d’organes, à partir des heures précédant le prélèvement jusqu’aux étapes nécessaires au rétablissement. Pendant la phase périopératoire du prélèvement, Lily & Langley (1999) racontent que les équipes médicales quittent au fur et à mesure que les organes sont prélevés, de même que l’anesthésiste quitte après la fermeture du ventilateur. Le silence qui suit peut laisser un sentiment inquiétant et inhabituel pour le personnel de salle d’opération peu familier avec les soins post-mortem. Souvent, les infirmières sont attristées par cette perte de vie jamais banale et pleurent avec les familles du la personne donneuse d’organes. Selon ces auteurs, les infirmières de salle d’opération peuvent ressentir certaines frustrations face aux équipes étrangères, peu familières avec l’environnement du bloc opératoire. Lily et Langley (1999) croient que les infirmières de salle d’opération peuvent éprouver de la colère à participer à un processus qu’elles ne comprennent pas ou qu’elles ne supportent pas.

Ces mêmes auteurs estiment que les infirmières de salle d’opération jouent un rôle pivot dans le processus du don d’organes et comme personnes ressources dans la communauté, pendant et après un prélèvement d’organes. Comme il s’agit d’expériences personnelles, les informations ne sont pas corroborées de façon systématique par les infirmières de salle d’opération.

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Parmi les écrits recensés, les études qualitatives de Youngner et al (1985), de Wolf (1994) et de Sadala et Mendes (2000) rapportent des difficultés vécues par les infirmières lorsqu’elles soignent des personnes ayant un diagnostic de mort cérébrale. Des réactions d’inconfort, de conflits affectifs et philosophiques face à la personne donneuse d’organes sont ainsi

soulignées. Les études quantitatives de Bidigare et Oermann (1991), de Kiberd et Kiberd (1992) et Van Da Walker ont utilisé des méthodes d’enquêtes et ont répertorié les attitudes d’infirmières envers le don d’organes. Les valeurs et les croyances de certaines infirmières ont surgi avec les témoignages de Crandali (1987), Kawamoto (1992) et de Lily et Langley (1999). Outre l’étude de Sadala et Mendes (2000), aucune étude recensée n’a utilisé une approche holistique. Par ailleurs, plus d’une étude note l’environnement de la salle d’opération comme étant un facteur

pouvant influencer la perception des infirmières qui soignent des personnes donneuses d’organes.

Dans notre étude, le modèle d’adaptation de Roy voit l’infirmière comme un système adaptatif, en constante interaction avec son environnement interne et externe. Selon Roy, l’environnement est une source de stimuli variés qui favorisent ou menacent l’intégrité psychique, spirituelle, relationnelle, sociale et la globalité de l’infirmière.

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Le modèle de Roy

Cette section aborde le modèle de Roy qui sera décrit à partir des concepts principaux, soit les stimuli, les réponses adaptatives, les modes adaptatifs et les mécanismes de coping ainsi que les niveaux d’adaptation.

Selon plusieurs théoriciennes, dont Roy (1999), les modèles de soins infirmiers en tant que description conceptuelle de soins sont basés sur des principes philosophiques et scientifiques. Les présupposés scientifiques du modèle d’adaptation de Roy sont principalement basées sur la théorie générale des systèmes de Von Bertalanffy (1968, cité dans Roy et Andrews, 1999) et la théorie d’adaptation de Helson (1964, cité dans Roy et Andrews, 1999). Le modèle a évolué par une combinaison de pensées déductive et inductive (Fawcett, 1995). La pensée déductive aurait servi à développer la conceptualisation de l’adaptation et les facteurs qui influencent le niveau d’adaptation. La pensée inductive aurait été utilisée pour identifier les quatre modes d’adaptation (Fawcett, 1995).

Les principes philosophiques du modèle sont associés à l’humanisme. L’humanisme est défini selon Roy (1988, 1997, Roy et Andrews, 1999, Roy et Hanna, 2001) comme un large mouvement psychologique et philosophique qui reconnaît la personne et les dimensions subjectives de l’expérience humaine comme étantcentrales au savoir et à sa valorisation. De façon plus élaborée, les principales croyances humaniste de Roy sont que les humains, comme individu et dans un groupe de personnes: (a) partagent un pouvoir créateur, (b) se comportent avec un but déterminé, (e) possède une nature holistique inhérente et (d) s’efforcent de maintenir

Figure

Tableau IV

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