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Évaluation de la rentabilité de la populiculture au Québec : analyse financière et perception des professionnels forestiers

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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VINCENT MIVILLE

EVALUATION DE LA RENTABILITE DE LA

POPULICULTURE AU QUÉBEC

Analyse financière et perception des professionnels forestiers

Mémoire présenté

à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l'Université Laval dans le cadre du programme de maîtrise en Sciences forestières

pour l'obtention du grade de maître es sciences (M. Se.)

DEPARTEMENT DES SCIENCES DU BOIS ET DE LA FORET FACULTÉ DE FORESTERIE, DE GÉOGRAPHIE ET DE GÉOMATIQUE

UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC

2013

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Résumé

Dans un premier temps, nous avons réalisé une analyse financière de la populiculture spécifique au contexte québécois. Par la suite, nous avons évalué la perception des professionnels du milieu forestier par rapport à cette sylviculture avant et après les avoir renseignés sur les aspects financiers de la populiculture. L'évaluation financière de 18 scénarios sylvicoles en populiculture fût réalisée en se basant sur une échelle de coûts réels fournie par des populiculteurs québécois. Une analyse de sensibilité des différents intrants nous a permis d'établir une fenêtre optimale de rentabilité pour la populiculture. Il s'avère que le prix du bois et les subventions accordées aux traitements sylvicoles sont les deux facteurs prépondérants dans la rentabilité de cette culture. La discordance des opinions quant à la populiculture nous a amené à étudier la perception qu'entretiennent les professionnels forestiers face à ce type de sylviculture. Contrairement à l'hypothèse de départ, la présentation de données financières n'a pas permis d'obtenir un consensus sur la question de la populiculture, mais a plutôt contribué à polariser davantage les opinions. Les partisans invoquant son rendement sylvicole et les détracteurs alléguant la faible valeur de la fibre créée en contraste avec l'intensité de la sylviculture que la populiculture requiert.

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Abstract

First, we realized a financial analysis of poplar farming specific to the province of Quebec. Subsequently, we evaluated the perception of forest professionals in regards to this type of silviculture before and after being informed of the financial aspect of these plantations. The financial evaluation of 18 silvicultural scenarios in poplar culture was performed based on a scale of actual costs provided by poplar growers from Quebec. A sensitivity analysis of the various inputs allowed us to establish an optimal window of profitability for this type of silviculture. It turns out that the price of wood and subsidies for silvicultural treatments are the two most important factors in the profitability of this culture. The discrepancy of opinions toward poplar culture has led us to investigate the perception of forest professionals. Contrary to the hypothesis, the presentation of financial data has not yielded a consensus on the issue of poplar, but rather contributed to further polarize opinions. Supporters citing its yield and detractors claiming the low value of the fiber created in contrast to the intensity of silviculture required by poplar culture.

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Avant-Propos

Contrairement à mes espérances, mes études en aménagement et environnements forestiers offert par la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique de l'Université Laval ont évoqué en moi plus de questionnements que de réponses. C'est pourquoi j'ai décidé de poursuivre mes études au 2ème cycle en sciences forestières pour étancher cette soif de connaissance. La réalisation de trois stages estivaux en lien avec la culture du peuplier hybride m'a amené bon nombre de questionnements. Les nombreuses discussions concernant la rentabilité financière de cette culture avec mes camarades de classe et professionnels de la forêt de différents horizons se concluaient constamment sur la même note. D'une part, les opinions étaient tranchées et divergentes et d'autre part les arguments ne s'appuyaient jamais sur des preuves tangibles. C'est donc pourquoi je me suis lancé tête première dans ce projet, armé de la démarche scientifique, afin de résoudre la problématique de la rentabilité financière de la populiculture dans le Québec, un sujet souvent débattu mais peu étudié.

L'analyse financière de la populiculture fût un travail de longue haleine, toutefois je n'avais toujours pas répondu à une partie de mon questionnement. Pourquoi la populiculture est-elle un sujet si controversé parmi les professionnels forestiers du Québec. C'est pourquoi nous avons décidé d'évaluer la perception du milieu forestier quant à la populiculture. Une hypothèse étant que la présentation de résultats financiers pourrait sûrement réduire la polarisation des opinions provoquées par ce sujet.

La démarche m'a amené à produire deux projets d'articles scientifiques dont je suis l'auteur principal. Le premier s'intitule Évaluation de la rentabilité de la populiculture dans le contexte québécois. Cet article m'a permis de réaliser l'évaluation financière de 18 scénarios différents (3 scénarios sylvicoles X 2 intensités X 3 échelles de coût) sur une base de coûts réels fournis par des populiculteurs québécois. Une analyse de sensibilité nous a permis d'établir une fenêtre optimale de rentabilité pour la populiculture. Le deuxième article, Évaluation de la perception de la populiculture au Québec, m'a permis de caractériser l'opinion des professionnels forestiers par rapport à la populiculture, sa rentabilité et son potentiel de développement.

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IV

La production de ces articles n'aurait pas pu être possible sans la collaboration de mes

deux codirecteurs à la maîtrise. Nancy Gélinas est professeure agrégée à la Faculté de

foresterie et de géographie et de géomatique de l'Université Laval où elle enseigne

l'économie, la finance et le marketing associé à la foresterie et aux produits du bois.

Marc-André Côté est ingénieur forestier et titulaire d'un doctorat en sciences forestières. Il est le

directeur-général de la Fédération des producteurs forestiers du Québec et il possède une

expertise en forêt privée ainsi qu'en politique forestière. Mes deux codirecteurs m'ont

accompagné lors de mes différentes recherches et ont largement contribué à l'amélioration

des articles présentés.

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Remerciements

Je tiens particulièrement à remercier mes codirecteurs de maîtrise, Nancy Gélinas et Marc-André Côté, qui m'ont accompagné lors de mes études graduées. Leur présence, généreux conseils et encouragements m'ont permis de compléter mon parcours aux études graduées.

Je tiens aussi à remercier le Réseau Ligniculture Québec et Domtar qui m'ont soutenu financièrement, à travers les projets MITACS, et techniquement tout au long de ce projet de maîtrise. Je tiens particulièrement à remercier Raymond Vanier, Brigitte Bigué et Pierre Gagné pour leur support. Je me dois aussi de remercier tous ceux qui ont contribué de près ou de loin à la réalisation de ce mémoire de maîtrise, qu'il s'agisse de personnes m'ayant fourni de précieux conseils ou tous les répondants à mes sondages.

Je me dois aussi de souligner le support que m'a offert ma famille tout au long du processus hasardeux que peut constituer une maîtrise. Je leur en suis très reconnaissant.

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Table des matières

Résumé i Abstract ii Avant-Propos iii Remerciements v Table des matières vi Liste des tableaux vii Liste des figures viii Introduction générale 1 Évaluation de la rentabilité de la populiculture dans le contexte québécois 3

Résumé 3 Abstract 3

1. Introduction 4 2. Méthodologie 7

2.1 Évaluation des coûts réels d'une plantation 7

2.2 Définition des scénarios sylvicoles 9 2.3 Autres données et hypothèses de calcul 12

2.4 Modèle d'analyse financière 15

3. Résultats 17 3.1 Coûts sylvicoles réels 17

3.2 Analyse de rentabilité des différents scénarios 17

3.3 Analyse de sensibilité 19

4. Discussion 23 4.1 Limites méthodologiques 25

5. Conclusion 25 Évaluation de la perception de la populiculture au Québec 28

Résumé 28 Abstract 28 1. Introduction 28 2. Objectif 30 3. Hypothèse 30 4. Méthodologie 31 4.1 Réalisation du sondage 31 4.2 Analyse statistique des résultats 32

5. Résultats 34 5.1 Statistiques descriptives 34

5.2 Facteurs d'influence 37 5.3 Influence de la présentation des rendements financiers sur la perception de la

populiculture 38 5.4 Influence de l'expérience sur la perception de la populiculture 39

6. Discussion 41 6.1 Limites méthodologiques 43

7. Conclusion 43 Conclusion générale 46 Bibliographie 48

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Liste des tableaux

Tableau 1: Coûts réels des traitements sylvicoles en populiculture au Québec ($/ha de

2010) 9 Tableau 2 : Liste des différents scénarios sylvicoles 12

Tableau 3 : Évolution du prix du peuplier naturel en forêt privée ($/m3 ) (FPBQ 2007-2011)

13

Tableau 4 : Analyse de rentabilité des différents scénarios pour une plantation d'un hectare

18

Tableau 5 : Variation de la VAN ($/ha) en fonction du prix du bois et du taux de

subvention des travaux sylvicoles pour le scénario 12 20 Tableau 6 : Analyse financière du scénario 12 en fonction de différentes hypothèses de

rendement 21 Tableau 7 : Variation de la VAN ($/ha) du scénario 12 en fonction des coûts de récolte et

de transport 21 Tableau 8 : Répartition du milieu de travail des différents répondants sondés 34

Tableau 9 : Perception de la populiculture avant et après la présentation de l'analyse

financière en fonction de l'expérience en populiculture des professionnels forestiers 36 Tableau 10 : Pointage moyen accordé à chaque facteur favorisant la rentabilité de la

populiculture (exprimée en points) 37 Tableau 11 : Pointage moyen accordé à chaque facteur nuisant au développement de la

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Liste des figures

Figure 1 : Évolution de la VAN ($/ha) du scénario 12 en fonction de la variation du taux de

rendement et du coût des traitements sylvicoles 22

Figure 2 : Analyse financière présentée aux répondants 31

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Introduction générale

Au Québec, le ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF) a commencé à s'intéresser à la populiculture à partir de 1969 avec la mise sur pied d'un programme d'amélioration génétique du peuplier dans les laboratoires gouvernementaux (Fortier et al 2011). L'intérêt pour cette essence s'expliquait par sa capacité reproductive permettant une amélioration génétique rapide, ainsi que son potentiel de croissance élevé.

Le peuplier hybride est un arbre amélioré puisque l'hybridation de peupliers permet de produire des individus possédant les caractéristiques désirées par les sylviculteurs (Gagné 2010). Cela fait de cette espèce un arbre à croissance rapide, atteignant des rendements moyens de 11,6 m3/ha/an (Ménétrier 2008) et pouvant même dépasser 20 m3/ha/an dans le contexte québécois (Rainville et al. 2003). La recherche en génétique du peuplier n'est pas unique au Québec puisqu'en 2006 une équipe internationale a réussi à compléter le séquençage du génome du peuplier (Tuskan et al. 2006).

Pourtant, malgré l'intérêt du monde scientifique pour la génétique du peuplier et le potentiel de rendement de cette essence, l'enthousiasme pour la populiculture demeure modéré chez les professionnels forestiers au Québec. Un enjeu couramment soulevé par ceux-ci concerne la rentabilité de la populiculture. Alors que certains sont convaincus que la culture du peuplier est profitable, d'autres estiment qu'il s'agit d'une sylviculture trop complexe pour être rentable dans le contexte québécois.

Malgré la polarisation du débat, il existe peu de littérature économique sur la culture du peuplier hybride et celle-ci relève souvent d'hypothèses au niveau des coûts sylvicoles. Compte tenu que la littérature économique sur le sujet du peuplier nous apparaissait limitée, nous avons décidé d'évaluer la rentabilité de la populiculture dans le contexte québécois. La première partie de ce mémoire cherchera ainsi à établir la rentabilité de la populiculture en fonction de différents scénarios sylvicoles et à établir une fenêtre optimale de rentabilité pour cette culture.

Pour ce faire, nous avons réalisé un sondage auprès de sylviculteurs et populiculteurs qui nous a permis de déterminer le coût réel de l'ensemble des traitements sylvicoles

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propres à la populiculture. Ensuite, nous avons réalisé l'analyse financière de 18 scénarios sylvicoles différents en nous fiant à des indicateurs financiers reconnus tels que la valeur actuelle nette (VAN), le taux de rentabilité interne (TRI) et le ratio bénéfice/coût (B/C). Une analyse de sensibilité conduite par la suite nous a finalement permis d'établir une fenêtre de rentabilité pour la populiculture dans le contexte québécois. L'analyse financière de la populiculture permet de combler une lacune dans la littérature scientifique de la populiculture et permettre aux personnes intéressées par la populiculture d'investir dans des projets rentables en considérant les paramètres financiers établis lors de cette analyse.

Conséquemment, nous avons voulu caractériser la perception des professionnels forestiers potentiellement engagés dans la sylviculture de plantations de peupliers hybride. Nous avons ainsi procédé à un sondage auprès de ces professionnels afin d'évaluer la perception de la rentabilité et du potentiel de développement de la populiculture au Québec. Nous avons cherché à évaluer le changement de perception des professionnels forestiers avant et après la présentation de données issues de l'analyse de rentabilité réalisée précédemment.

Pour ce faire, nous avons sondé des professionnels forestiers spécialisés en sylviculture et avons caractérisé leur perception initiale de la populiculture. Puis, nous leur avons présenté les résultats financiers de différents scénarios populicoles et nous avons recueilli les changements dans leur perception face à la populiculture. L'analyse de perception permet de déterminer le potentiel de développement de la populiculture et de déterminer si la rentabilité potentielle de cette culture peut s'avérer un facteur favorisant l'opinion qu'ont les gens de ce type de sylviculture intensive.

Le travail suivant est divisé en deux chapitres rédigés sous forme d'articles qui nous permettront de répondre aux deux objectifs fixés précédemment. Le premier chapitre traite de l'analyse financière de la populiculture et se nomme Évaluation de la rentabilité de la populiculture dans le contexte québécois. Le deuxième chapitre a pour objectif de caractériser la perception de la populiculture auprès des professionnels forestiers au Québec et se nomme Évaluation de la perception de la populiculture au Québec.

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Evaluation de la rentabilité de la populiculture dans le

contexte québécois

Par Vincent Miville, Nancy Gélinas et Marc-André Côté Revue ciblée : Forestry Chronicle (accepté)

Résumé

L'intensification de l'aménagement forestier grâce au reboisement d'espèces à haut rendement comme le peuplier hybride est une solution envisagée pour remettre sur pied l'industrie forestière québécoise. Toutefois, le manque de données à caractère financier semble limiter le développement de la populiculture. Cet article se veut une analyse financière de la populiculture pour des propriétaires privés dans le contexte québécois en se basant sur une échelle de coût réelle et six scénarios sylvicoles différents. Il s'avère que la populiculture est rentable lorsque les traitements sylvicoles sont subventionnés à hauteur de 80 %. Sans subvention, la populiculture n'est pas rentable compte tenu du contexte actuel. Une analyse de sensibilité nous a permis d'identifier les deux facteurs principaux permettant de définir une fenêtre de rentabilité pour ce type de sylviculture intensive, soit le prix du bois et les subventions gouvernementales. Trois autres facteurs secondaires se sont avérés sensibles, soit le coût de transport, le coût de récolte et le rendement en matière ligneuse de la plantation. La prise en compte de ces facteurs est déterminante dans l'établissement de plantations de peupliers hybrides rentables pour l'investisseur.

Abstract

The intensification of forest management through reforestation of high-yielding species such as hybrid poplar is considered as a solution to revitalize Quebec's forest model. However, the lack of data on financial characteristics appears to limit the development of poplar. This paper is a financial analysis of poplar for private landowners in the Quebec context, based on a scale of actual cost and six different silviculture scenarios. It turns out that hybrid poplar is profitable when silvicultural treatments are subsidized at 80 %. Without subsidy, the poplar is not profitable considering the actual context. A sensitivity

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analysis allowed us to identify the main factors to define a window of profitability for this type of intensive silviculture. The two main factors are the price of wood and government grants. Three other secondary factors were considered sensitive, being the cost of transportation, the cost of harvesting and timber yields. Consideration of these factors is crucial in establishing profitable hybrid poplar plantations for the investor.

1. Introduction

La baisse de la possibilité de récolte forestière, la hausse du coût d'approvisionnement de matière ligneuse et la compétition internationale émergente ont contribué à mettre les usines de transformation du bois au Québec sous une forte pression (Beauregard et al. 2004, Roy et al. 2010 et Beauregard 2011). Au total, 240 usines de transformation de bois localisées au Québec ont dû mettre les clés sous la porte entre 2005 et 2010 (Parent et Fortin 2007 et CIFQ 2012).

Une solution envisagée pour améliorer la compétitivité de l'industrie forestière consisterait à réorienter le mode d'exploitation extensif des forêts vers un mode d'aménagement intensif de plantations forestières sur une partie du territoire (Anderson et Luckert 2007). Les plantations forestières aménagées intensivement peuvent augmenter la possibilité forestière en plus d'assurer un approvisionnement en matière ligneuse de qualité à proximité des usines. Cette option n'échappe pas au contexte forestier québécois où le reboisement constitue un outil d'aménagement forestier très commun puisqu'on a reboisé ou regarni l'équivalent de 37 % des superficies récoltées au cours de l'année financière 2008, soit 74 100 ha. (MRNF 2010). Alors que le reboisement de résineux a été étudié depuis plusieurs années, plusieurs lacunes demeurent dans le cas du reboisement des essences feuillues au Québec, notamment pour ce qui est du peuplier hybride (MRNF 2003). Plus particulièrement, le manque de données à caractère économique semble ralentir le développement de la populiculture au Québec.

La populiculture consiste en la sylviculture de peupliers hybrides en se basant sur des techniques propres à l'agriculture afin de maximiser les rendements (Ménétrier 2008). L'hybridation consiste à croiser deux espèces ou genres différents pour permettre la formation de nouveaux individus possédant des caractéristiques à divers degrés des géniteurs (Barsky et al. 2010). Le reboisement de peupliers est une technique sylvicole

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mise au point en Europe au 18eme siècle où L'Art de cultiver les peupliers d'Italie fut publié (St-Maurice 1767). Aujourd'hui, on estime à environ 250 000 ha la superficie qu'occupent les plantations de peupliers hybrides en France seulement (Bigué et al. 2006). La réalité canadienne et québécoise est cependant fort différente de ce qui prévaut sur le Vieux continent.

En 2011, le Conseil du peuplier du Canada estimait que la superficie occupée par les plantations de peupliers hybrides était d'environ 27 600 ha au Canada (Derbowka et al. 2012). Au Québec, cette superficie se chiffre à environ 10 000 ha et la majorité des plantations sont situées en milieu forestier (90%) (Derbowka et al. 2012). On reboise annuellement 1 500 ha de peupliers hybrides en sol québécois (Périnet et al. 2007) avec 1,5 à 2,0 M de plants produits par les pépinières gouvernementales (Fortier et al. 2011). Le peuplier hybride peut servir dans l'industrie du placage, du déroulage, du sciage, des panneaux et des pâtes, papiers et cartons (Fortier 2007, Knudson et Wang 2002 et AMPCQ 2000). Il peut aussi servir à la production de biomasse, avenue plutôt marginale au Québec en ce moment, mais envisagée par les acteurs du milieu forestier.

La filière peuplier hybride en Amérique du Nord s'est développée autour de la biomasse pendant les chocs pétroliers de 1973 et 1979. Par la suite, les papetières se sont intéressées à cette essence afin de pallier aux soubresauts du marché des copeaux (Stanton et al. 2002). Le peuplier hybride peut remplacer avantageusement le peuplier naturel (Populus sp.) puisque ses propriétés mécaniques s'apparentent à celles du peuplier deltoïde (Populus deltoïdes Marshall.), mais sont légèrement inférieures à celles du peuplier à grandes-dents (Populus grandidentata Michaux.) et du peuplier faux-tremble {Populus tremuloides Michaux.) (Hernandez et al. 1998).

Entre 2006 et 2011, il s'est récolté en moyenne 2,5 M m3 de peuplier dans les forêts privées et publiques du Québec alors que la possibilité forestière de peupliers était évaluée à 5,21 M m3 en 2010 (Parent et Boulay 2012, FPBQ 2007-2011 et FPFQ 2012). Malgré un taux de récolte inférieur à la possibilité forestière, il se développe une filière de production de peuplier hybride puisque le volume de peuplier disponible est dispersé sur l'ensemble du territoire et non pas à proximité des usines de transformation s'approvisionnant en cette essence.

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Le reboisement du peuplier hybride peut s'effectuer autant sur des friches agricoles qu'en milieu forestier. Contrairement au reboisement d'essences résineuses, le peuplier hybride nécessite une bonne préparation de terrain et d'entretien afin de garantir son succès. Il s'agit en effet d'une essence très sensible à l'égard de certains facteurs biotiques et abiotiques. La végétation compétitrice, les aléas climatiques, les pathogènes et la faune constituent des risques non négligeables dans le développement normal et la survie des peupleraies artificielles (Volney et al. 2005). Le drainage, la structure du sol et les nutriments présents dans ce dernier constituent aussi des facteurs déterminants dans l'établissement d'une plantation de peupliers hybrides viable. Il est possible de reboiser du peuplier hybride dans la sapinière à bouleau blanc ainsi que dans tous les domaines bioclimatiques situés au sud de celle-ci. (Périnet et al. 2001).

Le peuplier hybride a un accroissement moyen d'environ 11,6 m3/ha/an comparativement à 3,3 m3/ha/an pour des peuplements naturels de peuplier faux-tremble (Populus tremuloides Michaux.) (Ménétrier 2008). Le rendement de cette essence améliorée peut même atteindre plus de 20 m3/ha/an dans les stations riches des forêts méridionales du Québec (Rainville et al. 2003).

Paradoxalement, il existe peu d'information dans la littérature scientifique sur les paramètres économiques des plantations de peupliers hybrides. Au Québec, des consultants (Gaumond 2010, Desjardins et Côté 2007, Agence forestière de la Montérégie 2006) ont effectué des analyses sommaires de la rentabilité du peuplier hybride. Ailleurs, Lothner et al. (1986), Rose et al. (1981) et Anderson et Luckert (2007) ont démontré que la populiculture peut s'avérer rentable. Bowersox et Ward (1976) ont plutôt estimé que la populiculture en taillis en très courte rotation n'était pas rentable.

Nous estimons néanmoins nécessaire d'approfondir le sujet afin d'évaluer les conditions optimales de rentabilité de la populiculture afin de tenir compte des contextes sylvicole et économique différents entre la populiculture québécoise et étrangère. Le manque de données économiques semble expliquer la perception ambivalente des forestiers à propos de ce sujet, où l'on retrouve deux positions distinctes, soit la populiculture n'est pas une option rentable compte tenu des investissements massifs nécessaires, alors que d'autres estiment que cette culture est rentable et qu'elle devrait être développée de manière à mieux servir l'industrie forestière québécoise en difficulté.

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La présente étude évalue financièrement divers scénarios de populiculture dans un contexte québécois, scénarios qui varient en fonction du milieu (agricole ou forestier), de la superficie des travaux (grande ou petite), de l'intensité du scénario sylvicole (intensif ou extensif) et de trois niveaux de rendement forestier. Pour ce faire, nous avons établi une structure de coûts et de bénéfices réels de différents scénarios populicoles et avons effectué des analyses de rentabilité de chacun de ces scénarios.

2. Méthodologie

Quatre grandes étapes furent suivies dans le cadre de cette étude : 1) l'évaluation des coûts associés à l'établissement, l'entretien et la récolte des plantations à l'aide d'un sondage, 2) la description de scénarios sylvicoles d'établissement de plantations de peupliers hybrides à l'aide d'une revue de littérature et d'entrevues avec des populiculteurs québécois, 3) l'analyse financière des divers scénarios grâce à des indicateurs financiers reconnus et 4) l'évaluation de la sensibilité des variables. L'année de référence pour cette étude étant 2010, toutes les valeurs obtenues ont été ramenées en dollars de 2010 à l'aide de l'indice des prix à la consommation (IPC) du Canada (BC 2011).

a*

2.1 Evaluation des coûts réels d'une plantation

L'évaluation des coûts de la populiculture est une étape déterminante de ce projet puisqu'une mauvaise évaluation de ces derniers influencera évidemment les résultats de l'analyse de rentabilité que nous effectuerons (Gélinas et al. 2009 et Lothner et al. 1986). C'est pourquoi nous avons utilisé des coûts réels fournis par des populiculteurs plutôt que des coûts estimés.

Un sondage fut développé pour connaître les coûts réels des traitements sylvicoles assumés par les populiculteurs québécois entre 2005 et 2010. Une liste de répondants potentiels (n = 50) fut constituée de chercheurs, d'ingénieurs forestiers œuvrant dans des entreprises et des organismes de services sylvicoles, de fonctionnaires au Ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF) et de propriétaires forestiers œuvrant sur le territoire québécois. Nous avons aussi contacté les populiculteurs québécois à l'aide de la liste de la clientèle des pépinières produisant des plants de peupliers hybrides pour le Québec. Au cours de nos recherches, nous avons rapidement constaté que plusieurs

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populiculteurs ne connaissaient pas la structure de coûts, soit parce que la populiculture a été délaissée dans les dernières années, soit parce que celle-ci était réalisée sur de trop petites superficies ou réalisée dans un contexte de projet expérimental. De plus, un grand nombre de répondants étaient visiblement hésitants à nous soumettre des données financières privilégiées. Sur un potentiel de 50 répondants, 25 personnes réalisant des plantations ou des travaux sylvicoles sur le peuplier hybride ont complété le questionnaire que nous leur avions envoyé par courrier électronique.

Une moyenne pondérée de chaque traitement sylvicole a été calculée en fonction de la superficie des plantations réalisées par le répondant. Les données de coûts qui étaient deux fois supérieurs à cette moyenne ont été éliminées puisqu'il s'agissait de coûts anormalement élevés. Afin d'évaluer les économies d'échelle, nous avons divisé les données entre production sur de petites (n = 13) et grandes superficies (n = 12) en utilisant comme facteur discriminant la taille moyenne d'un lot forestier privé au Québec, soit 40 ha. La discrimination des coûts en fonction de la superficie de production nous a permis d'effectuer des analyses financières en fonction de trois échelles de coûts différentes, soit à petite échelle, à grande échelle et une moyenne globale pondérée en fonction de la superficie.

Les résultats de ce sondage sont présentés au tableau 1. Ces résultats incluent les coûts associés au professionnel planifiant et suivant la réalisation des travaux, les frais liés à l'exécution du traitement sylvicole, le risque et le profit de l'entreprise de services sylvicoles. Lorsqu'une catégorie présentait un nombre restreint de données, la moyenne était utilisée dans l'analyse financière. Pour ce qui est de l'éclaircie commerciale, aucun répondant ne détenait d'information quant au coût de ce traitement sylvicole. Nous avons donc effectué une moyenne pondérée par région des subventions pour l'éclaircie commerciale de peuplements de feuillus intolérants. Ce tarif de 1 017 $ représente une subvention estimée à 80 % des coûts totaux du traitement sylvicole, nous avons donc émis comme hypothèse que ce traitement commercial coûte environ 1 271 $ avant le revenu généré par la vente de bois.

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Tableau 1: Coûts réels des traitements sylvicoles en populiculture au Québec (S/ha de 2010)

Coût ($/ha) Traitement sylvicole Grande

superficie

Petite

superficie Moyenne Préparation de terrain

Monticules/Sillons $603 * $603 Labourage / Hersage agr. $617 $526 $606 Labourage forestier $995 $1420 $1058 Mise en terre (1000 pits.) $492 $659 $500 Entretien

Dégagement mécanique $857 * $866

Hersage $95 $199 $109

Taille de formation $428 $481 $434 Éclaircie commerciale (FI) - - $ 1 2 7 1 * *

•Données insuffisantes.

"Donnée inconnue, hypothèse selon les subventions.

2.2 Définition des scénarios sylvicoles

Il existe différents types de scénarios sylvicoles pour mener à terme une plantation de peupliers hybrides. Le choix d'un scénario variera notamment en fonction de l'objectif de production du sylviculteur, du milieu de reboisement et du type de machinerie utilisé (Fortier et al. 2011a). Les scénarios sylvicoles se distinguent en fonction de quatre éléments : la préparation de terrain, la maîtrise de la végétation concurrente, l'entretien de la plantation en fonction de l'objectif de production désiré et la durée de rotation.

Préparation de terrain

La préparation de terrain doit s'effectuer l'année précédant le reboisement afin de permettre la réduction des agrégats d'argile (Fortier et al. 201 la). En milieu agricole, un labourage est préconisé, suivi d'un hersage. Le labourage vise à mélanger les horizons organiques et minéraux du sol et permet la création de microsites sur l'ensemble du terrain (Lebel et al. 2009, AFOGÎM 2011) alors que le hersage permet de broyer et d'incorporer la matière organique aux horizons de surface (Lebel et al. 2009).

En milieu forestier, les populiculteurs québécois sondés préconisent deux types de préparation de terrain. Le plus populaire est le labourage forestier qui est quelques fois précédé d'un déblaiement afin de réduire l'impact des déchets de coupe sur la herse forestière. Une autre technique de plus en plus prisée est la préparation par monticules à

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10 l'aide d'une pelle mécanique. Cette technique a pour objectif d'élever le plant au-dessus de la compétition herbacée et arbustive, et de contribuer à réchauffer et à ameublir le sol (Sigouin 2008), ce qui accélère le développement racinaire des plants et par le fait même la croissance et le taux de survie de ces derniers (Bilodeau-Gauthier et al. 2011). Le délai d'établissement de la compétition à proximité du plant donnerait le temps aux peupliers hybrides de refermer le couvert et ainsi de limiter cette dernière. Il n'est alors pas nécessaire d'effectuer un contrôle de la compétition.

Contrôle de la compétition

La végétation concurrente entrave la croissance des arbres et peut causer leur mortalité. Le contrôle de la compétition augmente la croissance du plant protégé (Sigouin 2008, Bowersox et al. 1992) et doit s'effectuer dans les plantations jusqu'à ce qu'il y ait une fermeture de la canopée à la 3eme ou 4eme année dans les plantations denses (Buehler et al.

1997).

En milieu agricole, les plantations labourées peuvent bénéficier de deux à trois hersages annuellement lors des trois premières années afin de contrôler la végétation herbacée particulièrement agressive envers le peuplier (Périnet et al. 2009). En milieu forestier, un à deux traitements de dégagement mécanique sont requis pour éliminer la compétition herbacée et arbustive (Périnet et al. 2009). La préparation de terrain par monticules accélère le développement racinaire des plants en augmentant la température du sol et ralentit le développement de la végétation concurrente (Desrochers et al. 2004). Ceci limite le recours au contrôle de la végétation lors des premières années de développement, d'autant plus que le dégagement mécanique des plantations établies sur monticules s'avère dangereux pour les débroussailleurs compte tenu du relief accidenté donné au terrain (Biguéetal. 2011).

Il existe d'autres traitements alternatifs pour le contrôle de la compétition, comme les phytocides, le paillis ou l'utilisation de plantes accompagnatrices (Gauthier 2008). L'utilisation de phytocide est un moyen efficace et peu onéreux pour contrôler la végétation compétitrice (Gauthier 2008). Toutefois, ce type de traitement n'est plus subventionné en forêt privée depuis l'adoption de la Loi sur les pesticides en 1987. Compte tenu du manque

(20)

11 de données à caractère économique de ces traitements, ceux-ci ne furent pas évalués dans le cadre de cette étude.

Entretien d'une plantation

Nous avons retenu deux autres traitements sylvicoles dans l'élaboration de nos scénarios sylvicoles intensifs, soit l'élagage ou la taille de formation, ainsi que l'éclaircie commerciale. Les scénarios sylvicoles intensifs visent à produire une proportion plus importante de bois d'œuvre que les scénarios sylvicoles extensifs.

La taille de formation vise à redonner la rectitude et la solidité d'un arbre en éliminant les défauts de formation tandis que l'élagage consiste à éliminer les branches inférieures d'un arbre afin de produire une tige sans nœuds (Hubert et Courraud 1987). L'éclaircie commerciale vise la récolte des tiges d'essences et de diamètres commercialisables dans un peuplement équienne qui n'a pas encore atteint l'âge d'exploitabilité. Cette coupe accélère l'accroissement en diamètre des tiges résiduelles et améliore la qualité du peuplement (Julien 1994). Lors de l'élaboration de nos scénarios sylvicoles intensifs, nous préconiserons un taux de prélèvement équivalent à 30 % du volume marchand, et ce, entre la 10enie et la 15eme année dépendamment du moment où les profits seront maximisés pour le populiculteur. De plus, la récolte finale doit s'effectuer au moins trois ans après l'éclaircie commerciale, c'est-à-dire lorsque les profits seront maximisés pour le producteur forestier.

La combinaison des différents traitements sylvicoles nous a permis d'établir 18 scénarios différents (6 scénarios sylvicoles X 3 échelles de coûts) présentés au tableau 2. Chaque scénario sera l'objet d'une analyse financière avec et sans subventions.

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12 Tableau 2: Liste des différents scénarios sylvicoles

Traitement sylvicole

Scénarios

An Traitement sylvicole 1 Friche agricole Milieu forestier 1 X 2 X 3 X 4 X 5 X 6 X 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 0 Labourage / hersage agricole

1 X 2 X 3 X 4 X 5 X 6 X 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16

0 Labourage / hersage forestier X X X X X X

0 Monticules o u sillons X X X X X X 1 Reboisement X X X X X X X X X X X X X X X X X X 1 Hersage (2 passages) X X X X X X 2 Hersage (3 passages) X X X X X X 3 Hersage (3 passages) X X X X X X 3 Dégagement mécanique X X X X X X 6 Élagage X X X X X X X X X

Var. Éclaircie commerciale X X X X X X X X X Var. Coupe finale

Petite superficie X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X Coût Grande superficie

Moyenne X X X X X X X X X X X X

2.3 Autres données et hypothèses de calcul

Prix net de la matière ligneuse

Puisque le peuplier hybride agit principalement comme source de remplacement pour le peuplier naturel, nous avons considéré le prix du peuplier (Populus sp.) sur le marché québécois comme référence. Nous avons utilisé les données disponibles sur le marché de la forêt privée afin d'évaluer un prix moyen pour le peuplier pondéré en fonction du volume acheminé au type de transformateur. Nous avons analysé ces données entre les années 2006 et 2010 (Tableau 3) sur l'ensemble des transactions concernant la vente de matière ligneuse de peuplier pour obtenir un prix moyen pondéré de 43,22 $/m3 livré à l'usine. Ce prix est basé sur un large échantillon (85 %) des transactions effectuées sur le marché de la forêt privée et est composé à 25 % de bois destiné au sciage et déroulage tandis que l'autre portion du volume est destinée aux industries de pâtes et papiers, panneaux et autres. Ce prix moyen a été appliqué sur l'ensemble des volumes de peupliers hybrides pour chacun des scénarios extensifs. Le calcul d'un prix pondéré en fonction des différents produits tirés de l'arbre permet d'absorber une partie de la variabilité issue de la qualité du bois du peuplier en considérant la demande du marché plutôt que des hypothèses sylvicoles.

Dans le cas des scénarios intensifs, soit ceux comprenant une éclaircie commerciale et un élagage, nous avons considéré que la proportion du bois de peuplier hybride destiné au

(22)

13 marché du bois d'œuvre pourrait s'établir à 50 %. Nous pouvons donc établir que le prix moyen du bois dans les scénarios intensifs est de 44,03 $/m3.

Tableau 3: Évolution du prix du peuplier naturel en forêt privée ($/m3)

(FPBQ 2007-2011)

Prix pondéré du peuplier ($/m3)

Année

IPC Sciage et Panneaux et Pâtes et Moyenne Moyenne pondérée IPC

déroulage autres papiers pondérée en$ de 2010 2006 94,33 44,91 $ 41,61$ 39,48 $ 41,90 $ 44,41 $ 2007 96,39 43,99 $ 43,00 $ 40,71 $ 42,73 $ 44,33 $ 2008 98,54 44,96 $ 40,68 $ 41,48 $ 42,12 $ 42,75 $ 2009 98,62 40,26 $ 40,40 $ 41,21 $ 40,55 $ 41,11 $ 2010 100,00 43,75 $ 40,87 $ 41,60$ 41,62 $ 41,62 $ Moyenne pondérée e2010 45,43 $ 42,98 $ 41,92$ - 41,78 $ 43,22 $ en $ d pondérée e2010 45,43 $ 42,62$ - 41,78 $ 43,22 $

Le coût de la récolte du peuplier fut estimé à 15,81 $/m3 alors que le coût de transport est de 12,63 $/m3 pour une distance moyenne de 100 km (Côté et Asselin 2010). Ces estimations proviennent d'enquêtes réalisées auprès d'entrepreneurs forestiers pour le compte du gouvernement. Le coût de transport est corroboré par la Fédération des producteurs de bois du Québec qui l'a estimé à 12,59 $/m3 en forêt privée (FPBQ 2011 b). À ces coûts, nous avons ajouté un prélèvement moyen de 1,50 $/m3 effectué par les syndicats de producteurs de bois pour la mise en marché du bois issu de la forêt privée. Le prix net obtenu pour la vente de bois issu de plantations de peupliers hybrides est donc estimé à 13,28 $/m3 récolté dans le cas des scénarios extensifs et à 14,09 $/m3 récolté pour les scénarios intensifs.

Subvention

L'Etat québécois subventionne les travaux d'établissement et d'entretien des plantations forestières par le biais de divers programmes. Sur les terres privées, ces subventions atteignent généralement 80 % de la valeur réelle des travaux incluant les profits et le risque pour l'entrepreneur. Nous avons retenu ce taux dans le cadre de l'analyse financière.

Coût de la terre

Le coût de la terre varie grandement en fonction de la localisation, de la morphologie, de la qualité des sols, de la disponibilité régionale et de l'usage de la terre. En 2011, les

(23)

14 terres agricoles et les boisés se sont transiges de 264 $/ha à plus de 17 500 $/ha sur le territoire québécois (AGECO 2012). Par conséquent, nous avons considéré une valeur de référence pour le fonds de terre de 1000 $/ha, en deçà de la moyenne provinciale puisque le reboisement du peuplier hybride s'effectue sur des terres agricoles marginales ou en forêt. Par conséquent ces terres sont moins chères que des terres agricoles productives.

Nous émettons l'hypothèse de l'existence d'un chemin sur la terre équivalent à 1 km pour 40 ha. Compte tenu du coût d'entretien d'un chemin estimé à 500 $/km/an (Michel Martin1, Comm. pers., 10 nov. 2011), nous pouvons conclure que le coût d'entretien annuel est de 12,50 $/ha. Nous avons également ajouté les taxes municipales et scolaires d'environ 1,35 % de la valeur de la terre (Marc-André Côté', Comm. pers., 8 nov. 2011). Ces taxes sont évolutives puisqu'elles s'appliquent autant sur la valeur du fond de terre que sur la valeur marchande du bois sur pied.

Rendement forestier

Il n'existe présentement aucune table de rendement pour le peuplier hybride au Québec (Fortier et al. 2011 a). Nous avons donc utilisé les courbes de rendement potentielles développées par le MRNF dans notre simulation financière. Notre scénario de base est de

15 m3/ha/an et vise ainsi une production de 300 m3 de bois à la 20eme année de croissance. Cette courbe de rendement procure un rendement brut auquel nous avons soustrait certaines pertes, soit 5 % pour les caries et volumes délaissés sur le parterre de coupe et nous avons estimé que 90 % de la superficie en plantation survit jusqu'à la récolte finale.

Taux de rendement

McKillop et Hutchinson (1990) suggère d'utiliser 4,77 % comme taux de rendement pour les projets à caractère forestier. Lothner et al. (1986) et Anderson et Luckert (2007) ont utilisé 4 % dans leur analyse financière de plantations de peupliers hybrides en Alberta. En général, les investissements en foresterie ne nécessitent pas des taux de rendement élevés compte tenu de la nature prudente de ces investissements (McKillop et Hutchinson 1990). Le National Timber Tax (2009), organisme partenaire du US Forest Service, estime qu'il faut plutôt utiliser 6,17 % dans l'évaluation des projets forestiers dans les états du

1 Technicien forestier, Consultant

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nord-est des États-Unis. Puisqu'il s'agit de la donnée la plus récente, nous avons retenu ce dernier taux, mais nous l'avons arrondi à 6 % afin de simplifier la présentation des résultats.

15

2.4 Modèle d'analyse financière

L'identification de la Révolution économique optimale (RÉO) est primordiale dans la réalisation d'une analyse financière d'une plantation puisque le temps y joue un rôle prépondérant. Ainsi, le moment le plus judicieux pour récolter les fruits de l'investissement ne correspond pas nécessairement au moment où la production de bois est maximisée. Alors que la coupe finale s'effectue au moment où le rendement est maximisé dans le cas d'une révolution optimale, la RÉO vise une récolte finale d'un peuplement lorsque les profits sont maximisés (Gélinas et al. 2009).

Pour déterminer la RÉO, il suffit d'identifier le moment où la valeur maximale du consentement à payer (WPL) pour une terre reboisée en peupliers hybrides est atteinte (Gélinas et al. 2009 et Klemperer 1996). Le WPL constitue la somme qu'est prête à débourser une personne pour l'acquisition d'une terre. La valeur de la terre change dans le temps puisqu'au fur et à mesure que la plantation croît, la valeur de cette dernière augmente et s'ajoute à la valeur du fond de terre. L'analyse financière a été effectuée du point de vue d'un propriétaire forestier dont l'intention est d'effectuer une seule révolution. Klemperer (1996) suggère la formule suivante pour calculer le WPL pour une révolution :

WPL WPL = VAN + t t Z-, (l + i)n £-L

(i + ty

c„

+

Lt ;i = 0 71 = 0

(i + o

n

(i + o*

Lt- Valeur de la terre à l'année t Rn - Revenus survenant à l'année n Cn = Coûts survenant à l'année n t = Nombre d'année de la révolution

(25)

Où les revenus et coûts se décortiquent ainsi:

16

Rn = VnX Pnet X S + 2^ An

n = 0

Vn - Volume de bois récolté à l'année n Pnet = P1™ n e t de la matière ligneuse s = Taux de survie de la plantation An = Aide financière à l'année n

.v

C„= £{[Ok*P«et*S + It)xr] + £}+ Y, CSn

n=0

Vn - Volume de bois récolté à l'année n Pnet = P "x n e t de la matière ligneuse s = Taux de survie de la plantation T - Taux de taxation

E - Coût en entretien CSn = Coûts sylvicoles

Lt = Valeur de la terre à l'année t t = Nombre d'années de la révolution

n = 0

Les calculs financiers furent exécutés avec les logiciels Excel de la suite Office et Premium Solver Pro de Frontline Technologies. Nous avons ainsi pu optimiser les calculs afin de trouver le maximum atteint par le WPL en fonction du moment choisi pour effectuer les traitements commerciaux, soit l'éclaircie commerciale et la coupe finale. Ainsi, une fois la RÉO de chacun des scénarios établis, nous avons pu réaliser l'analyse financière de ceux-ci en calculant la Valeur actualisée nette (VAN), le Taux de rendement interne (TRI) et le ratio bénéfices-coûts (B/C) (Gélinas et al. 2009). Ces deux derniers critères utilisent les mêmes variables que ceux définies dans la formule de la VAN.

Par la suite, nous avons effectué une analyse de sensibilité de l'ensemble des scénarios étudiés et ce, avec et sans subvention. Les variables analysées sont les suivantes : le prix de la matière ligneuse, le coût de récolte, le coût de transport, le rendement en matière ligneuse, les coûts des différents traitements sylvicoles, le prix du fond de terre, le taux d'actualisation, l'intensité du prélèvement lors de l'éclaircie commerciale et les subventions. Nous avons fait varier chacune des variables de l'ordre de 10 %, à l'exception

(26)

17 du rendement (10-15-20 m3/ha/an) et de l'intensité de l'éclaircie commerciale (20-30-40 % du volume récolté) puisque ces deux variables sont discontinues.

3. Résultats

3.1 Coûts sylvicoles réels

Le sondage nous a permis d'évaluer quels sont les coûts des travaux sylvicoles réels d'une plantation de peupliers hybrides (Tableau 1). Les résultats supportent l'hypothèse à l'effet que les traitements sylvicoles réalisés sur de grandes superficies permettent une économie pour le populiculteur. Le seul traitement faisant exception à cette règle est le labourage et le hersage agricole. Certains populiculteurs possèdent la machinerie nécessaire à des fins agricoles, le coût de celle-ci peut donc être amorti par une utilisation polyvalente de la machinerie. Autre constat, la préparation de terrain par monticules est la moins onéreuse pour les travaux réalisés sur de grandes superficies. Celle-ci est particulièrement attrayante pour la populiculture puisqu'elle augmente la croissance à court-terme, le taux de survie et, par le fait même, diminue les travaux d'entretien requis (Sigouin 2008, Bilodeau-Gauthier et al. 2010). Toutefois, le terrain devient fortement accidenté ce qui peut devenir contraignant pour le propriétaire.

3.2 Analyse de rentabilité des différents scénarios

Les résultats de l'analyse financière des 18 différents scénarios nous permettent d'établir certains constats (Tableau 4). Tout d'abord, aucun scénario non subventionné n'est rentable compte tenu des hypothèses que nous avons émises. Les pertes apparaissent même substantielles, notamment pour les scénarios intensifs avec labourage forestier. Lorsque le scénario est réalisé sur de petites superficies, la perte se chiffre à -2 937 $/ha et le TRI à -4,68 % (scénario 16). Lorsque les traitements sylvicoles sont subventionnés à hauteur de 80 % (à l'exception de la récolte), tous les scénarios à l'exception du 16 deviennent rentables pour le propriétaire. La VAN culminant à 343 $/ha, le TRI à 10,80 % et le ratio B/C à 1,24 après 15 ans pour le scénario 8, un rendement plus qu'appréciable pour un projet forestier. La production de peupliers hybrides sur de grandes superficies

(27)

18 augmente en moyenne de 55 % la rentabilité par rapport à la production sur de petites superficies.

Tableau 4: Analyse de rentabilité des différents scénarios pour une plantation d'un hectare

< jcénario

WPL

N o n VAN

-subventionné

TRI B/C RÉO WPL VAN

Subventionné TRI B/C RÉO \n PS 1 - 1 586 $ -2 0 0 3 $ -3,5% 0,31 15 ans 4 6 2 $ 4 4 $ 6,5% 1,02 15 ans JJ C OJ GS 2 - 7 8 1 $ - 1 1 9 8 $ -0,9% 0,43 15 ans 6 2 3 $ 2 0 5 $ 8,5% 1,10 15 ans o mJ LU M 3 - 8 7 7 $ - 1 295 $ -1,3% 0,41 15 ans 6 0 3 $ 1 8 6 $ 8,2% 1,08 15 ans M < ■mjj PS 4 - 2 3 8 1 $ -2 7 3 1 $ -5,5% 0,29 18 ans 3 7 8 $ 7 $ 6 , 1 % 1,00 17 ans C tu GS S - 1 5 3 9 $ - 1 8 8 9 $ -3,7% 0,37 18 ans 5 4 6 $ 1 7 5 $ 7,8% 1,06 17 ans C M 6 - 1 6 4 0 $ - 1 9 9 0 $ -4,0% 0,36 18 ans 5 2 6 $ 1 5 5 $ 7,6% 1,05 17 ans w PS 7 - 2 5 2 $ - 6 6 9 $ 1,4% 0,57 15 ans 7 2 8 $ 3 1 1 $ 10,2% 1,20 15 ans c 6S 8 - 9 4 $ - 5 1 2 $ 2,3% 0,64 15 ans 7 6 0 $ 3 4 3 $ 10,8% 1,24 15 ans X UJ M 9 - 1 0 1 $ - 5 1 8 $ 2,2% 0,64 15 ans 7 5 8 $ 3 4 1 $ 10,8% 1,24 15 ans

is. PS 10 - 1 0 6 3 $ - 1 3 9 4 $ -1,7% 0,45 19 ans 6 4 0 $ 2 6 8 $ 9,0% 1,11 17 ans

m . c OJ GS 11 - 8 6 9 $ - 1 1 9 9 $ - 1 , 1 % 0,49 19 ans 6 8 4 $ 3 1 2 $ 9,7% 1,13 16 ans ■ m J C M 12 - 8 8 0 $ - 1 2 1 0 $ - 1 , 1 % 0,48 19 ans 6 8 1 $ 3 1 0 $ 9,6% 1,13 16 ans

V

O û/i PS 13 - 1 7 9 6 $ -2 2 1 3 $ -3,8% 0,29 15 ans 4 2 0 $ 2 $ 6,0% 1,00 15 ans

C OJ GS 14 - 1 2 0 6 $ - 1 6 2 3 $ -2,4% 0,36 15 ans 5 3 8 $ 1 2 0 $ 7,4% 1,05 15 ans LU C OJ M PS GS 15 16 17 - 1 2 8 3 $ -2 6 0 7 $ - 1 9 8 0 $ - 1 7 0 0 $ -2 9 3 7 $ -2 3 1 0 $ -2,6% -4,7% -3,7% 0,35 0,28 0 3 3 15 ans 19 ans 19 ans 5 2 2 $ 1 0 5 $ 7,2% 1,04 15 ans LU C OJ M PS GS 15 16 17 - 1 2 8 3 $ -2 6 0 7 $ - 1 9 8 0 $ - 1 7 0 0 $ -2 9 3 7 $ -2 3 1 0 $ -2,6% -4,7% -3,7% 0,35 0,28 0 3 3 15 ans 19 ans 19 ans 3 3 6 $ - 3 5 $ 5,7% 0 3 9 17 ans LU C OJ M PS GS 15 16 17 - 1 2 8 3 $ -2 6 0 7 $ - 1 9 8 0 $ - 1 7 0 0 $ -2 9 3 7 $ -2 3 1 0 $ -2,6% -4,7% -3,7% 0,35 0,28 0 3 3 15 ans 19 ans 19 ans 4 6 1 $ 9 0 $ 6,9% 1,03 17 ans Ç M 18 - 2 043 $ -2 3 7 3 $ -3,8% 0 3 2 19 ans 3 9 8 $ 2 7 $ 6,2% 1,01 17 ans

♦PS : Petite superficie GS : Gi ■ande superfci e M : Moyennne

La préparation de terrain par monticules, représentée dans les scénarios 7 à 12, accroît la rentabilité des plantations de peupliers hybrides. Cette préparation de terrain, moins onéreuse et plus intensive, permet d'éliminer les entretiens lors des premières années et les charges associés à ceux-ci, ce qui augmente la rentabilité de l'investissement. À l'inverse, les scénarios avec labourage forestier (scénarios 13 à 18) sont 20 % moins rentables que les scénarios avec labourage en milieu agricole (scénarios 1 à 6). Le labourage forestier et le dégagement mécanique sont deux traitements sylvicoles onéreux qui diminuent à terme la rentabilité de l'investissement.

Si nous comparons un scénario extensif (9) et un scénario intensif (12), il faudrait espérer une augmentation du prix du bois de 1 % lorsque les travaux sylvicoles sont subventionnés pour justifier l'investissement en élagage et en éclaircie commerciale. Dans le cas de scénarios non subventionnés, il faudrait plutôt espérer une augmentation du prix du bois de l'ordre 21,8 %. Il s'agit ici de l'augmentation du consentement qu'est prêt à payer un industriel pour obtenir des billes de qualité supérieure. Ainsi, les scénarios sylvicoles intensifs sont dans tous les cas moins rentables que les scénarios sylvicoles extensifs.

(28)

19

La RÉO des différents scénarios s'établit entre 15 et 19 ans pour une révolution sylvicole optimale de 21 ans. La révolution économique optimale est donc systématiquement plus courte que la révolution sylvicole optimale. Les scénarios intensifs arrivent à maturité financière plus tard.

Le WPL de l'ensemble des scénarios étant inférieur à la valeur du fond de terre estimé (1 000 $/ha), nous pouvons conclure qu'il n'est pas rentable pour un investisseur d'acheter une terre à ce prix dans une optique de production de peupliers hybrides et de la revendre après une révolution. Toutefois, le coût de la terre est très variable, ce constat pourrait changer tout dépendamment de la valeur de la terre considérée. Pour un propriétaire terrien actuel, la production de peupliers hybrides s'avère rentable dès que la VAN est positive, soit dans tous les scénarios subventionnés à l'exception du no. 16.

3.3 Analyse de sensibilité

L'analyse financière effectuée est dépendante des hypothèses retenues. Alors que certaines hypothèses varient peu dans le temps, notamment les coûts sylvicoles réels, d'autres sont difficiles à prévoir comme l'évolution du prix du bois ainsi que le rendement d'une plantation de peupliers hybrides qui est fortement dépendante des conditions édaphiques du site, des insectes et maladies ainsi que du scénario sylvicole. Il est donc important d'effectuer une analyse de sensibilité permettant d'évaluer le caractère économique de scénarios pessimistes et optimistes. En tout, nous avons réalisé 810 analyses de sensibilité différentes pour les 18 scénarios à l'étude.

Nous présenterons les variables en ordre décroissant de sensibilité afin de simplifier la présentation des résultats. À noter que les montants et proportions énumérées ne s'appliquent qu'au scénario 12 avec subvention. Il s'agit d'un scénario intensif avec préparation de terrain par monticules et une échelle de coût moyenne. La sensibilité de chacune des variables est proportionnelle entre les différents scénarios, les résultats d'analyse de sensibilité sont donc semblables entre les différents scénarios. Nous avons stratifié les résultats en trois catégories différentes. Les facteurs primaires sont ceux qui font osciller la VAN de plus 150 $/ha pour une variation de 10 %, les facteurs secondaires font varier la VAN de 75 à 150 $/ha tandis que les facteurs tertiaires modifient la VAN de moins de 75 $/ha.

(29)

20 3.3.1 Facteurs primaires

Le prix obtenu pour la vente de bois est sans aucun doute la variable ayant le plus grand impact sur la rentabilité du scénario. Une augmentation de 10 % de la valeur du bois augmente la VAN de 314 $/ha (Tableau 5), soit une augmentation de 101 % et fait passer le TRI de 9,65 % à 12,24 %. Le deuxième facteur ayant le plus d'incidence sur la rentabilité de la populiculture est la subvention accordée pour la sylviculture. Une augmentation du taux de subvention de 10 % entraîne une augmentation de la VAN de 198 $/ha du projet, soit 64 %, et le TRI de ce scénario augmente à 13,04 %.

Tableau 5: Variation de la VAN ($/ha) en fonction du prix du bois et du taux de subvention des travaux sylvicoles pour le scénario 12

A Prix du bois 60% A Subventio 70% 80% n 90% 100% -20% -10% -$713 -$399 -$85 $228 $567 -$515 - $ 2 0 1 -$317 - $ 4 -$120 $194 $508 $ 8 2 1 $1160 $78 $392 0% 10% 20% -$713 -$399 -$85 $228 $567 $112 $426 $764 $310 $624 $962 -$120 $194 $508 $ 8 2 1 $1160 $705 $1019 $1357 3.3.2 Facteurs secondaires

Trois facteurs secondaires se sont avérés déterminants dans l'analyse de rentabilité de plantations de peupliers hybrides, soit le rendement de la plantation ainsi que les coûts de récolte et de transport. Ces facteurs, quoiqu'ayant une incidence moins grande que le prix ou les subventions sur la rentabilité du projet, demeurent importants dans la mesure où ceux-ci possèdent un potentiel de fluctuation plus élevé.

Une augmentation ou une diminution du rendement affecte grandement la VAN du scénario 12 (Tableau 6). Une augmentation du rendement à 20 m3/ha/an, équivalent à un gain de 33 %, provoque une augmentation de la VAN de 357 $/ha, soit de 115 %. Au contraire, une diminution du rendement à 10 m3/ha/an annule les profits (VAN = -57 $/ha et TRI = 5,13 %). À noter que le rendement d'une plantation de peupliers hybrides varie énormément, soit de 2 m3/ha/an sur des stations infertiles à plus de 25 m3/ha/ha (Fortier et al. 2011 a), il se peut donc que le rendement escompté ne soit pas au rendez-vous et vice-versa. Ce facteur est considéré comme secondaire puisque la variation utilisée est plus de

(30)

21 trois fois supérieure (33 % vs 10 %). La variation semble drastique, mais ramenée à une échelle de 10 %, elle est équivalente aux autres facteurs secondaires.

Tableau 6: Analyse financière du scénario 12 en fonction de différentes hypothèses de rendement

Hypothèse de rendement WPL VAN TRI B/C ÉC* RÉO 10m3/ha/an à 23 ans 315$ - 5 7 $ 5,1% 0,98 13 ans 17 ans

15 mVha/an à 20 ans 20 m3/na/an à 18 ans 681$ 1 0 6 0 $ 310$ 667$ 9,6% 13,1% 1,13 1,28 13 ans 12 ans 17 ans 16 ans

* Moment où l'éclaircie commerciale doit s'effectuer pour maximiser la rentabilité

Les coûts associés à la récolte et au transport ont aussi un impact direct sur la rentabilité du scénario 12 (Tableau 7). La diminution du coût de transport et de récolte est évidemment envisageable compte tenu des hypothèses. Une augmentation du coût de transport de 34,5 % a pour effet d'annuler la rentabilité de l'investissement (VAN = 0 $/ha) alors qu'une diminution de 10 % du taux moyen de transport augmente de 29 % la rentabilité du scénario 12. En considérant un taux de transport de bois en fonction de la distance de camionnage en forêt privée (SPBAT 2011), nous pouvons prétendre que les plantations de peupliers hybrides doivent être situées dans un rayon de camionnage équivalent à 175 km de l'usine de transformation pour demeurer rentables. De plus, la diminution du coût de récolte est envisagée puisque la récolte en plantation est moins onéreuse qu'en forêt naturelle (Morley et Balatinecz 1993). Par exemple, une diminution de

10 % du coût de récolte a pour effet d'améliorer la VAN du scénario analysé de 36 %.

Tableau 7: Variation de la VAN ($/ha) du scénario 12 en fonction des coûts de récolte et de transport

A Coût de A Coût de récolte

transport -20% -10% 0% 10% 20% -20% $715 $603 $490 $377 $265 -10% $625 $513 $400 $287 $175 0% $535 $423 $310 $197 $85 10% $445 $333 $220 $107 - $ 5 20% $355 $243 $130 $17 -$95 3.3.3 Facteurs tertiaires

Les dernières variables démontrant un impact sur la rentabilité des scénarios étudiés sont le taux de taux de rendement préconisé, la valeur du fond de terre, l'intensité de l'éclaircie commerciale ainsi que la variation du coût des traitements sylvicoles. Le choix

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du taux de rendement constitue la variable tertiaire ayant le plus d'influence, toutefois cet effet s'estompe avec l'augmentation du taux de rendement préconisé puisqu'il s'agit d'une relation quadratique (Figure 1). Une diminution du taux de rendement de l'ordre de 10 %, soit à 5,4 %, augmente la rentabilité de l'investissement de 24 %. À noter que la VAN du scénario est inversement proportionnelle au taux de rendement choisi.

Les traitements sylvicoles analysés séparément se sont avérés des facteurs moins sensibles qu'anticipé. Une augmentation de 10 % du coût d'un traitement sylvicole diminue la VAN du scénario selon l'ordre de grandeur suivant, soit 19 % pour la préparation de terrain, 19% pour l'éclaircie commerciale, 15 % pour la mise en terre et 10 % pour la taille de formation ou l'élagage. Toutefois, lorsque nous prenons en compte une augmentation de l'ordre de 10 % pour l'ensemble des traitements sylvicoles, la rentabilité du scénario 12 diminue de 64 %.

L'augmentation de l'intensité de l'éclaircie commerciale à 40 % permet d'augmenter la rentabilité du scénario 12 de 7 % et ce puisqu'un volume plus important de bois est récolté plus rapidement. Une augmentation du coût de la terre de 10 % ne diminue la rentabilité que de 5 %. Ces deux derniers facteurs se sont avérés peu sensibles lors de l'analyse financière des 18 scénarios établis. À noter que les travaux sylvicoles sont plus sensibles dans les scénarios non-subventionnés.

Figure 1 : Évolution de la VAN ($/ha) du scénario 12 en fonction de la variation du taux de rendement et du coût des traitements sylvicoles

S 700 S 600 $500 -5 $400 z < > S 300 $200 $100 ♦ Préparation de terrain '••... Reboisement Élagage — — Éclaircie commerciale Reboisement Élagage — — Éclaircie commerciale ^ ^ ^ a a m ^ ^ * * ~ -^ -^ -^ a a m -^ -^ * * ^ ^ ^ ^ * m ^ ^ ^ -30% -20% -10% 0% Variation 10% 20% 30%

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4. Discussion

Les résultats obtenus démontrent que les investissements importants nécessaires à la culture du peuplier hybride restreignent fortement la fenêtre de rentabilité de cette sylviculture pour un propriétaire privé. Toutefois, lorsque supportée par une aide financière adéquate, cette culture peut s'avérer rentable dans la plupart des situations observées.

Une analyse financière réalisée par Rose et al. (1981) a permis d'établir que les variables les plus sensibles à la mise en place de plantations de peupliers hybrides sont le prix obtenu pour la matière ligneuse, le rendement ainsi que les coûts inhérents à la récolte de matière ligneuse, corroborant ainsi nos résultats. Les études de Lothner et al. (1986) et Rose et al. (1981) indiquent également que le prix du bois demeure la variable ayant la plus grande incidence sur la rentabilité de la populiculture.

La recherche de débouchés pour la matière ligneuse de peuplier hybride est donc déterminante pour rentabiliser cette sylviculture. De nombreux projets en génomique ont comme objectif d'augmenter le rendement ainsi que la qualité de la fibre du peuplier hybride (Richardson et al. 2007). Une amélioration de la qualité de la fibre pourrait permettre l'utilisation du bois de peuplier hybride dans la production de biens de qualité supérieure, et donc d'augmenter la valeur de la fibre de peuplier hybride en diversifiant son utilisation potentielle.

La configuration actuelle du marché limite la production de bois de qualité grâce à des scénarios sylvicoles intensifs. La plus-value obtenue pour la matière ligneuse de qualité (6,6 %) par rapport à la trituration ne permet pas au producteur forestier de rentabiliser les traitements sylvicoles supplémentaires que sont l'éclaircie commerciale et l'élagage. Ceci est d'autant plus vrai que les scénarios élaborés ne comprennent qu'un seul élagage alors que plusieurs auteurs (Gauthier 2008 et Périnet et al. 2009) supportent qu'il faille plutôt effectuer plusieurs élagages successifs pour obtenir des billes de haute qualité. La production de billes de qualité grâce à des scénarios super intensifs est donc tributaire d'une augmentation substantielle du prix de la bille en fonction de la qualité de cette dernière.

Le coût de transport est proportionnel à la distance de transport entre la plantation et l'usine de transformation. Cette variable peut donc être rapidement identifiée à la phase d'évaluation du projet et permettrait de discriminer rapidement les projets qui ont peu de

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chance d'être rentables. Une diminution des coûts de transport en localisant les plantations à proximité de l'usine associée à une baisse du coût de récolte permet d'anticiper une hausse de rentabilité importante pour chacun des scénarios évalués. Certains scénarios non-subventionnés pourraient même devenir rentables, notamment ceux extensifs préconisant une préparation de terrain par monticules. De plus, un propriétaire dont l'objectif d'investissement principal est la production de bois devrait préconiser cette préparation de terrain pour minimiser les charges associées à l'entretien de la plantation lors des premières années de la plantation. Le hersage ou le dégagement mécanique de plantation de peupliers hybrides étant très coûteux par rapport à l'application de phytocides par voie aérienne ou terrestre (Fortier et Messier 2006), il pourrait s'avérer judicieux de permettre la subvention de traitements aux phytocides afin de diminuer les coûts sylvicoles d'entretien.

Le taux de subvention des travaux sylvicoles par l'État de 80 % varie entre les organismes subventionnaires de différentes régions du Québec. En comparant les coûts réels aux subventions réelles, il est étonnant de constater une disparité entre le coût et le financement accordé, ce dernier variant entre 79 % et 140 % du coût réel du traitement sylvicole. Ainsi, les organismes régionaux subventionnent plus que suffisamment la populiculture pour permettre à cette dernière d'être rentable du point de vue d'un producteur forestier propriétaire. À noter que certaines régions ne bénéficient pas du soutien de l'État pour le développement de la populiculture. Un développement de la populiculture y est donc hautement improbable.

Pour ce qui est du cas d'une usine de transformation de bois, le rendement escompté dans le projet sylvicole n'est pas un facteur prépondérant. II faut plutôt considérer la valeur de ce projet par rapport aux différentes options. Si ce projet s'avère un meilleur choix, donc moins coûteux qu'une autre source d'approvisionnement, alors il constitue une opportunité pour l'industriel forestier. La qualité de la matière ligneuse, le contrôle du produit, l'accessibilité et la facilité de récolte constituent des avantages indéniables dans le développement de plantations forestières pour un industriel forestier, et ce, même si la matière ligneuse issue de la forêt naturelle est abondante (Morley et Balatinecz 1993).

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4.1 Limites méthodologiques

La méthodologie empruntée ne nous permettait pas de déterminer la variation de la valeur d'une bille de peuplier hybride en fonction de l'augmentation de son diamètre et de sa qualité. Il est donc difficile d'évaluer précisément la rentabilité de scénarios intensifs menant à la production de billes de déroulage et de sciage. Pour pallier à ce problème, il aurait fallu insérer dans le modèle une matrice de prix en fonction des dimensions et de la qualité des billes, multipliant ainsi les hypothèses dans l'analyse. C'est pourquoi nous avons jugé plus utile de fonctionner en établissant un prix moyen pour le bois d'œuvre et pour le bois de trituration.

Les coûts de récolte et de transport utilisés sont issus d'enquêtes réalisées pour le peuplier naturel. Le coût de récolte du peuplier en forêt naturelle surestime sans doute le coût réel de récolte dans une plantation de peupliers hybrides puisque ce dernier diminue en fonction de l'homogénéité du peuplement (Morley et Balatinecz 1993). Le coût de transport est plutôt tributaire de la distance de la plantation par rapport à la destination des volumes de bois.

Le coût de l'éclaircie commerciale présenté dans cet article est demeuré théorique par manque de sources d'information, ce qui a limité l'analyse de rentabilité des scénarios plus intensifs. L'éclaircie commerciale s'effectuant entre la 10eme et la 15eme année pour les scénarios intensifs, nous avons appliqué une contrainte dans le modèle financier, soit que la récolte finale doit s'effectuer au moins trois ans après l'éclaircie commerciale. Toutefois, les objectifs sylvicoles peuvent différer de cette condition. L'éclaircie commerciale diminuant la rentabilité de chacun des scénarios, une distorsion était inévitablement engendrée. Ainsi, le modèle cherchait à repousser dans le temps le moment où effectuer l'éclaircie commerciale, puis à raccourcir le délai entre l'éclaircie commerciale et la récolte finale.

5. Conclusion

Depuis les débuts de la populiculture au Québec, le reboisement du peuplier hybride a toujours été source de controverses entre gens du milieu forestier. Tous estiment le potentiel de croissance inégalé de cette essence, même si beaucoup croient qu'il ne s'agit pas d'une avenue à exploiter. La faible valeur du bois de peuplier, autant pour la trituration

Figure

Tableau 1: Coûts réels des traitements sylvicoles en  populiculture au Québec (S/ha de 2010)
Tableau 3: Évolution du prix du peuplier naturel en forêt privée ($/m 3 )  (FPBQ 2007-2011)
Tableau 4: Analyse de rentabilité des différents scénarios  pour  une plantation d'un hectare
Tableau 5: Variation de la VAN ($/ha) en fonction du prix du bois et  du taux de subvention des travaux sylvicoles pour le scénario 12
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