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La place de B Corp au Québec : analyse comparative de normes et référentiels de développement durable

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Academic year: 2021

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LA PLACE DE B CORP AU QUÉBEC : ANALYSE COMPARATIVE DE NORMES ET RÉFÉRENTIELS DE DÉVELOPPEMENT DURABLE

Par

Delphine Poiré Turcotte

Essai présenté au Centre universitaire de formation en environnement et développement durable en vue de l’obtention du grade de maître en environnement (M. Env.)

Sous la direction de Madame Carole Villeneuve

MAÎTRISE EN ENVIRONNEMENT UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE

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SOMMAIRE

Mots clés : analyse comparative, outil de développement durable, responsabilité sociale des organisations, B Corp, BNQ 21 000, ISO 26 000, petite et moyenne entreprise, grande entreprise

L’objectif ultime de cet essai est de positionner B Corp par rapport à ses concurrents dans le contexte québécois. Aux fins de cette analyse, un tableau comparatif entre les normes B Corp, BNQ 21 000 et ISO 26 000 sera élaboré afin de rassembler l’information pertinente à faire un choix éclairé parmi les nombreux outils d’opérationnalisation de développement durable. Ainsi, faisant face à une variété d’outils et de référentiels de développement durable, les entreprises à but lucratif québécoises obtiendront un portrait à jour de ces outils ainsi que des recommandations afin de faciliter leurs prises de décision.

Globalement, l’analyse a permis de constater que B Corp détient plusieurs avantages comparatifs par rapport aux autres normes à l’étude, telles que sa possibilité de certification, sa communauté internationale, son processus rigoureux et sa vision innovatrice. Le dynamisme de la norme B Corp et le message qu’elle véhicule sont très attrayants pour les entreprises à but lucratif sensibilisées par le développement durable. Pour ce qui est de la norme BNQ 21 000, il a été constaté qu’elle est surtout favorisée par les organisations et de nombreux spécialistes en raison de la convivialité de son approche et des nombreux outils disponibles, en plus de son lien avec les principes de la Loi sur le développement durable du Québec. La mise à jour de la norme actuelle et l’éventuelle certification de BNQ 21 000 pourraient accroître sa notoriété auprès des organisations. L’analyse a aussi permis d’établir que la norme ISO 26 000 prenait peu son envol au Québec, alors qu’aucune certification ni aucun outil d’application concret n’ont été développés au Québec, contrairement à d’autres régions du monde comme la France.

Pour optimiser l’utilisation de B Corp, les entreprises doivent avoir minimalement introduit la notion de développement durable dans leur culture d’entreprise. Ainsi, de par sa rigueur et ses exigences élevées, elle rejoint plus difficilement les entreprises qui n’ont pas encore intégré le développement durable. L’utilisation conjointe de la norme BNQ 21 000 et de B Corp peut être bénéfique pour les entreprises ayant un faible niveau d’intégration de leur responsabilité sociale. Enfin, il est possible d’affirmer que l’arrivée de B Corp au Québec répond à un besoin flagrant des entreprises de pouvoir mesurer leur performance en termes de développement durable et de faire reconnaître leurs efforts. Étant la seule norme certifiable à ce jour, elle se différencie par sa façon de redéfinir le succès en affaires et sa position enviable auprès des organisations du Québec.

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REMERCIEMENTS

Je souhaite d’abord souligner ma reconnaissance envers ma directrice, Carole Villeneuve, sans qui le résultat final n’aurait pas été le même. Ses commentaires et son accompagnement furent énormément appréciés et m’ont grandement aidée à chaque étape de la rédaction.

J’aimerais également remercier toutes les personnes qui ont accepté de répondre à mes nombreuses questions, lesquelles ont été indispensables à la rédaction de cet essai. Parmi celles-ci je cite : Geneviève Côté, avocate et spécialiste de B Corp; Joyce Sou, représentante de B Corp au Canada; Halina Torresan, de chez Baléco; Tiffanie Murillo, de chez Prana; Marie-Ève Chapdelaine, de chez Cascades; Jean Cadieux, spécialiste de la norme BNQ 21 000; Esther Dormagen, d’Ellio et finalement Craig Ryan, de la BDC.

Finalement, je remercie chaleureusement mes amis et ma famille qui m’ont soutenue dans ce long périple et qui, de par nos nombreuses discussions, m’ont aidée à bonifier mon analyse.

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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION ... 1

1. MISE EN CONTEXTE ... 3

1.1 Le développement durable dans les organisations à l’échelle mondiale et nationale ... 3

1.2 Le développement durable dans les organisations au Québec ... 5

1.3 Les principales pratiques de développement durable au Québec ... 6

2. DÉFINITION DU CONTEXTE ET DES ENTREPRISES À L’ÉTUDE ... 9

2.1 Le développement durable ... 9

2.2 Les motivations et incitatifs au développement durable ... 10

2.3 Les petites et moyennes entreprises ... 12

2.4 Les grandes entreprises ... 13

2.5 Le contexte légal et structurel des entreprises du Québec ... 14

2.6 L’entrepreneuriat social ... 16

3. LES NORMES ET RÉFÉRENTIELS EN DÉVELOPPEMENT DURABLE ... 19

3.1 B Corp ... 19 3.1.1 Principes et thématiques ... 22 3.1.2 Démarche ... 23 3.1.3 Avantages et contraintes ... 28 3.2 BNQ 21 000 ... 34 3.2.1 Principes et thématiques ... 38 3.2.2 Démarche ... 39 3.2.3 Avantages et contraintes ... 44 3.3 ISO 26 000 : 2010 ... 45 3.3.1 Principes et thématiques ... 47 3.3.2 Démarche ... 49 3.3.3 Avantages et contraintes ... 51

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4. LA CERTIFICATION B CORP EN COMPARAISON AVEC D’AUTRES RÉFÉRENTIELS DE DÉVELOPPEMENT

DURABLE ... 54

4.1 Méthodologie de l’analyse comparative ... 54

4.2 Analyse comparative ... 57

4.3 Constats et recommandations relatifs à la place de B Corp au Québec ... 63

4.3.1 Constats ... 63

4.3.2 Recommandations ... 68

CONCLUSION ... 71

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LISTE DES FIGURES ET DES TABLEAUX

Figure 3.1 Aperçu du questionnaire d’autoévaluation en ligne ... 25

Figure 3.2 Étapes de la démarche BNQ 21 000 ... 43

Figure 3.3 Vue d’ensemble de la démarche ISO 26 000... 50

Tableau 3.1 Sous-éléments des cinq principales thématiques de B Corp ... 22

Tableau 3.2 Grille tarifaire ... 27

Tableau 3.3 Enjeux par catégories d’enjeux de la norme BNQ 21 000 ... 39

Tableau 3.4 Grille d’autoévaluation des enjeux transversaux de la norme BNQ 21 000 ... 41

Tableau 3.5 Domaines d’action des sept questions centrales d’ISO 26 000 ... 48

Tableau 4.1 Définition des caractéristiques de base de chaque norme ... 55

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LISTE DES ACRONYMES, DES SYMBOLES ET DES SIGLES AFNOR BDC BNQ BVG ECCC GE GIIRS GRI FECI IISD ISO LDD MDDELCC MESI MOUVES OCDE OIT ONU PME PPO REDD RNCREQ RSE TACEDD TACEP UNESCO

Association française de normalisation Banque de développement du Canada Bureau de normalisation du Québec Bureau du vérificateur général du Canada

Environnement Canada et Changement Climatique Grande entreprise

Investment Rating System Global Reporting Initiative

Fédération canadienne de l’entreprise indépendante International Institute for Sustainable Development Organisation internationale de normalisation Loi sur le développement durable

Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques

Ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation Mouvements des entrepreneurs sociaux

Organisation de coopération et de développement économiques Organisation internationale du travail

Organisation des Nations unies Petite et moyenne entreprise Post Publication Organization

Réseau entreprise et développement durable

Regroupement national des conseils régionaux de l’environnement du Québec

Responsabilité sociale des entreprises

Table d’accompagnement-conseil pour le développement durable Table d’accompagnement-conseil des entreprises du secteur privé Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture

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INTRODUCTION

En l’espace de quelques années seulement, le monde des affaires s’est vu submergé d’initiatives et de nouvelles certifications pour accompagner les organisations à intégrer le développement durable dans leurs pratiques (Réseau entreprise et développement durable [REDD], 2012). Devant ce nombre croissant d’outils qui visent à faciliter l’opérationnalisation d’une démarche de développement durable, il devient donc de plus en plus ardu pour les dirigeants et gestionnaires d’effectuer le choix d’outils à privilégier (REDD, 2012). En dépit de cette multitude d’outils, le concept de développement durable demeure souvent trop théorique et mal défini. L’importance d’outils permettant de transformer ce concept en exigences opérationnelles se fait donc valoir (Boiral, 2007).

Alors que les attentes envers les entreprises sont grandissantes, les multiples parties prenantes exigent de plus en plus une meilleure prise en considération des aspects sociaux et environnementaux dans les pratiques d’affaires (Turcotte et al., 2011). De ce fait, l’importance de la certification afin de valoriser et de crédibiliser les initiatives de développement durable auprès des parties prenantes d’une organisation prend de l’ampleur (REDD, 2012). L’apparition de l’entrepreneuriat social est un autre phénomène très présent au Québec qui introduit bien le thème de cet essai, B Corp, une certification en développement durable octroyée aux entreprises à but lucratif. En effet, avec l’émergence d’une nouvelle façon de faire en affaires et avec l’arrivée de cette nouvelle norme au Québec depuis 2012, il convient d’évaluer sa pertinence. Avec les normes volontaires ISO 26 000 et BNQ 21 000, deux référentiels reconnus qui visent à rendre plus concret le concept de développement durable, un besoin de positionner B Corp par rapport à celles-ci s’impose.

L’objectif général de cet essai est donc d’établir la place de B Corp dans le contexte actuel du Québec afin d’aider les entreprises qui désirent adopter une démarche de développement durable à faire un choix éclairé parmi la multitude d’outils disponibles. L’information essentielle sera donc rassemblée sous forme de tableau comparatif et des recommandations seront formulées quant à l’utilisation de B Corp.

La présente analyse comparative est donc basée sur un portrait à jour des référentiels B Corp, BNQ 21 000 et ISO 26 000 au Québec. L’ensemble de l’information recueillie sur ces différents outils de développement durable a servi à créer le tableau d’analyse comparative synthétisant les caractéristiques importantes et faisant ressortir les forces et faiblesses de chacun. L’analyse est effectuée de sorte à ce que la certification B Corp soit comparée aux normes BNQ 21 000 et ISO 26 000 pour chacune des caractéristiques. Aussi, un

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sommaire des résultats est présenté afin d’établir le positionnement de chacune des normes par rapport à B Corp en fonction des caractéristiques ciblées. Dans un deuxième temps, une évaluation plus spécifique de l’insertion de B Corp dans le contexte québécois est réalisée. Finalement, à la lumière de l’ensemble des résultats et de leur analyse, des recommandations quant à B Corp sont détaillées.

Le caractère nouveau de la norme B Corp au Québec ainsi que la nature de l’essai ont rendu l’accès à l’information à jour plus difficile à obtenir. La réalisation d’entrevues s’est donc avérée indispensable, alors que la grande majorité des sources utilisées consistaient à des articles d’actualités en ligne. Néanmoins, des références plus officielles et diversifiées ont été consultées, telles que la norme BNQ 21 000 et ISO 26 000 ainsi que des recherches réalisées par le Réseau entreprises et développement durable (REDD) et autres ouvrages réalisés par des experts en développement durable. La validité des sources a tout de même fait l’objet d’analyse. La date de parution, la fiabilité du site web ainsi que la crédibilité de l’auteur sont tous des éléments qui ont été considérés dans le choix des sources.

Le présent essai est divisé en quatre chapitres. Le premier chapitre porte sur le concept de développement durable en entreprise. Plus précisément, il aborde son évolution à l’échelle mondiale, nationale et provinciale ainsi que les principales pratiques de développement durable au Québec. Le deuxième chapitre tente de définir différents éléments qui entourent le thème de cet essai et qui serviront à approfondir l’analyse. Ainsi, une définition plus détaillée du concept de développement durable en lui-même sera définie, suivie des principales motivations et incitatifs des entreprises pour entamer une démarche de développement durable ainsi que les particularités des petites et moyennes entreprises (PME) et des grandes entreprises (GE) quant au développement durable. Le chapitre trois représente l’ensemble de l’information essentielle pour chacune des normes à l’étude. Puis, le chapitre quatre expose un tableau d’analyse comparative récapitulatif du contenu du chapitre 3 afin de faire ressortir les éléments pertinents et de positionner B Corp au Québec. Ultimement, des recommandations quant à l’utilisation de la norme B Corp sont émises.

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1. MISE EN CONTEXTE

La mise en contexte présente un portrait du développement durable à l’échelle mondiale, nationale et provinciale afin d’être en mesure de comprendre le contexte dans lequel évoluent les normes et référentiels de développement durable. Les principales pratiques de développement durable au Québec seront également définies dans cette section.

1.1 Le développement durable dans les organisations à l’échelle mondiale et nationale

Ce n’est qu’à la suite de la Commission Brundtland vers la fin des années 80 que la notion de développement durable fut introduite dans les modèles d’affaires (Regroupement national des conseils régionaux de l’environnement du Québec [RNCREQ], 1998). Cette notion, qui stipule de prendre en compte les aspects environnementaux et sociaux dans les décisions, a rapidement gagné en importance à l’échelle planétaire. En effet, on note de plus en plus de pays qui prennent des mesures pour favoriser le développement durable (Environnement Canada et Changement Climatique Canada [ECCC], 2010). Le besoin urgent de changer nos façons de faire et d’agir pour lutter contre les problématiques environnementales auxquelles fait face notre société explique en partie cette tendance en effervescence. Parmi ces problématiques, on dénote particulièrement les mauvaises pratiques de consommation et de production qui se sont installées non seulement dans les pays développés, mais aussi dans les pays émergents. Néanmoins, les nombreux événements internationaux tels que le Sommet de la terre de Rio, le Protocole de Kyoto et la Conférence de Paris, qui tentent de trouver des solutions, témoignent une volonté généralisée d’améliorer le bilan environnemental mondial (International Institute for Sustainable Development [IISD], 2010). Ces événements permettent, entre autres, de fixer des objectifs communs et d’identifier des mesures qui ont pour but de faire progresser globalement la performance environnementale (IISD, 2010). En 2010, selon un sondage réalisé par le Pacte Mondial des Nations Unies auprès de 1 000 dirigeants à l’échelle planétaire, l’intégration des enjeux de développement durable dans la planification stratégique s’avérait un incontournable pour 96 % d’entre eux, une augmentation de 24 % par rapport à 2007 (Ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation [MESI], 2014). Il faut souligner, toutefois, que même si la majorité des entrepreneurs sont conscients de l’importance du développement durable, peu d’entre eux concrétisent cette volonté en réels engagements faute de savoir comment ancrer le développement durable dans leur organisation (MESI, 2014).

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Malgré tout, certains pays se démarquent particulièrement par leurs efforts soutenus en matière d’innovation et de développement durable. Les pays scandinaves tels que la Suède, le Danemark et la Norvège en sont des exemples (Environmental Leader, 2013). Le succès de la Suède, qui se positionne au premier rang, est principalement attribuable à son innovation dans toutes les sphères du développement durable. Par exemple, elle se sert d’instruments économiques tels que la fiscalité verte afin de réduire les activités qui affectent l’environnement et de favoriser l’adoption de nouvelles technologies (Organisation de coopération et de développement économiques [OCDE], 2014). Plusieurs autres facteurs lui valent cette renommée, tels que des objectifs environnementaux complets et ambitieux, un mix énergétique peu carboné, des efforts importants en matière d’éco-innovation, une priorité dans l’atténuation des changements climatiques et un engagement de longue date dans la protection de l’environnement. D’autre part, c’est aussi par son système de protection sociale bien développé, par l’accessibilité et la gratuité de l’information ainsi que par sa structure de gouvernance environnementale qu’elle parvient à une telle performance (OCDE, 2014). D’ordre général, les pays qui ont atteint de meilleurs résultats sont ceux qui ont su mettre l’accent sur les enjeux prioritaires et qui les ont pris en charge rapidement afin d’établir les bases d’un changement institutionnel à long terme (ECCC, 2010).

Lorsqu’on le compare à ces modèles mondiaux en matière de mesures environnementales, le Canada a encore beaucoup de chemin à faire. Loin d’être proactif, il a fallu dix ans de résultats négatifs à la suite des vérifications annuelles du commissaire de l’environnement et du développement durable avant que le Canada décide de changer son approche. L’absence de stratégie générale de développement durable, les mesures de rendement inadéquates, les objectifs et cibles vagues et non ciblés ainsi que la séparation des rapports en matière de développement durable de ceux de base du gouvernement sont tous des éléments qui expliquent la piètre performance du Canada (ECCC, 2010).

C’est en 2007 seulement que le gouvernement du Canada a décidé de changer les choses afin d’améliorer son bilan environnemental. C’est ainsi que la Loi fédérale sur le développement durable fût adoptée en 2008. Celle-ci exigeait qu’une Stratégie fédérale de développement durable soit créée afin d’assurer que les processus décisionnels soient plus transparents, responsables et appuient l’amélioration continue de la gestion du développement durable (ECCC, 2010). Malheureusement, encore en 2015, la commissaire de l’environnement et du développement durable a fait état que les ministères ne tenaient pas

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niveau provincial, municipal et organisationnel que les plus grands avancements peuvent être accomplis (Bureau du vérificateur général du Canada [BVG], 2016).

1.2 Le développement durable dans les organisations au Québec

Contrairement au Canada, le Québec se livre à une meilleure performance en ce qui a trait à l’environnement et au développement durable. Bien que la Loi sur le développement durable ne fût adoptée qu’en 2006, le Québec porte une attention particulière au développement durable depuis l’apparition du concept (Ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques [MDDELCC], 2015a). En effet, c’est avant même la Commission Brundtland que le Québec avait commencé à s’impliquer dans le monde de l’environnement. En 1972, le Québec a participé au premier Sommet de la Terre qui a mené à la création de la Loi sur la qualité de l’environnement. Aujourd’hui, le développement durable fait partie des orientations stratégiques du ministère de l’Environnement et est devenu un enjeu incontournable dans l’ensemble de ses activités (MDDELCC, s. d.). Ainsi, pour le gouvernement du Québec, ce mouvement est bien plus qu’une mode, il est un virage collectif, une vision à long terme (MDDELCC, 2008).

Grâce à la Loi sur le développement durable (LDD), le Québec a pu se fixer des règles claires afin de placer le développement durable au centre des actions gouvernementales. Notamment, le gouvernement a dû instaurer 16 principes afin de guider l’action de l’administration publique, mais surtout, il a dû s’engager à adopter une stratégie de développement durable unique, applicable à tous les ministères et à un grand nombre d’organismes. La première qui a été mise en place fut la Stratégie gouvernementale de développement durable 2008-2013. Elle reposait sur trois enjeux fondamentaux soit : développer la connaissance, promouvoir l’action responsable et favoriser l’engagement (MDDELCC, 2013). En 2010, une des cibles de la stratégie voulait que 20 % des entreprises québécoises aient amorcé une démarche de développement durable avant mars 2013 (MESI, 2013a).

Les résultats de cette première stratégie furent concluants. En effet, le Sondage sur le développement durable réalisé par le ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation auprès des entreprises du Québec de 2013 a révélé, trois ans plus tard, le dépassement de 2 % de la cible établie (MESI, 2013a). En seulement trois ans, soit de 2010 à 2013, le pourcentage d’entreprises ayant amorcé une démarche de développement durable est passé de 13 % à 22 % (MDDELCC, 2014). Puis, en 2014, la Stratégie gouvernementale de développement durable 2008-2013 fut révisée pour introduire l’actuelle Stratégie de

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développement durable 2015-2020. Le choix des orientations, des objectifs et des mécanismes de mise en œuvre a reposé principalement sur une analyse des résultats de la stratégie précédente. Ainsi, pour faire suite à la cible sur la contribution à l’accompagnement en développement durable, le ministère s’est engagé à accroître à 30 % d’ici 2020 la proportion des entreprises québécoises qui auront amorcé une démarche de développement durable, incluant celles présentes à l’étranger (MDDELCC, 2015b).

Il est important de mentionner que l’arrivée de la stratégie du gouvernement du Québec a aussi mené à la formation de la Table d’accompagnement-conseil des entreprises du secteur privé (TACEP) en 2009, devenue aujourd’hui la Table d’accompagnement-conseil pour le développement durable (TACEDD). Sous la responsabilité du ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation (MESI), ce groupe de concertation a été mis en place afin de favoriser l’élaboration et la promotion d’une vision commune du développement durable au sein des entreprises, des organisations publiques et de la société. Une Stratégie de sensibilisation des entreprises québécoises au développement durable 2011-2013 a été élaborée en vue de concrétiser la cible de 20 % du gouvernement (MESI, s. d.). Deux de leurs principaux objectifs consistaient donc à faire valoir l’adoption d’une démarche de développement durable en entreprise et à faire connaître les outils et les ressources existants pour l’accompagnement-conseil des entreprises en matière de développement durable (MESI, 2016). Parmi leurs réalisations se trouvent la recherche et la promotion d’outils destinés aux entreprises afin de les accompagner dans leur démarche de développement durable et la mise sur pied de la phase I et II du projet BNQ 21 000 (BNQ, 2011a). Ainsi, un répertoire gouvernemental d’outils liés au développement durable pour les entreprises a été mis sur pied. Il est possible d’y retrouver, entre autres, des fiches d’information, des programmes de formation, des guides de mise en œuvre, du matériel de sensibilisation, des renseignements sur les certifications, etc. (Gouvernement du Québec, s. d.). C’est donc dans cette perspective que les outils, normes et référentiels dans ce domaine prennent de plus en plus d’importance au Québec.

1.3 Les principales pratiques de développement durable au Québec

L’adoption de ces mesures a permis de faire progresser l’état de la situation du développement durable au sein des entreprises québécoises. En effet, les résultats du sondage réalisé en 2013 par le MESI ont permis de conclure qu’une quantité croissante d’entreprises comprennent et intègrent le concept de développement durable dans leurs pratiques d’affaires. En 2013, 53,2 % des entreprises sondées étaient

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données a aussi permis de conclure que plus les entreprises sont jeunes, plus elles sont propices à entreprendre des projets ou des actions de développement durable. Il en est de même pour les entreprises de plus grande taille (MESI, 2013a).

Bien que plusieurs outils soient promus et mis en valeur par le gouvernement du Québec, amorcer une démarche de développement durable demeure relativement complexe. Effectivement, comme il n’existe pas de démarche universelle en matière de développement durable et que de multiples choix d’outils et de référentiels soient disponibles, celle-ci peut s’avérer difficile à implanter. Ceci est d’autant plus vrai pour les PME qui font face à plusieurs freins et contraintes, lesquels seront discutés dans le prochain chapitre. Plusieurs méthodes existent afin d’encadrer ou de guider les organisations désirant améliorer leur façon de faire dans le respect des principes de développement durable. Certaines entreprises préfèreront obtenir des labels ou des certifications pour faire reconnaître leurs produits alors que d’autres opteront plutôt pour une certification qui couvre l’ensemble des opérations de leur entreprise. Les organisations font donc face avec le temps à une multitude de normes et certifications, de référentiels, de guides et de labels, les dotant de cadres de référence. Elles doivent aussi choisir parmi les nombreux mécanismes et outils qui leur permettront de mettre en œuvre leur démarche de développement durable, tels que des politiques, des plans d’action, des stratégies, des normes, des indicateurs, des rapports et des systèmes de gestion (M., Bourbonnière, notes du cours GDD 704, hiver 2015).

Il existe toutefois des normes et référentiels plus connus au Québec lorsqu’on s’intéresse au développement durable et à la responsabilité sociétale de l’entreprise. Les normes ISO 26 000 et BNQ 21 000 en sont des exemples. Ce sont les deux outils les plus souvent référencés dans les guides sur le développement durable au Québec. D’autres référentiels, tels que les principes du Pacte Mondial, The Natural Step, les principes de la Loi sur le développement durable et la Global Reporting Initiative (GRI) sont aussi bien connus comme approche pour une démarche de développement durable. Tous ces éléments ne permettent cependant pas d’obtenir de certification ou de titre reconnu au Québec.

En revanche, l’émergence de l’entrepreneuriat social a mené à la création d’une nouvelle certification internationale qui fait tranquillement son apparition au Québec (Bérard, 2014). Cette norme, nommée B Corp, s’adresse à tous types d’entreprises à travers le monde qui sont ou souhaitent devenir socialement et écologiquement responsable (Plamondon Edmond, 2013). L’approche de B Corp répond aux besoins des entreprises désirant être encadrées dans leur démarche. En effet, en plus d’être une certification,

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B Corp se veut un outil de gestion et d’analyse en développement durable. Étant la seule norme permettant d’obtenir une certification en développement durable au Québec, B Corp détient-elle un incitatif réel par rapport à ses concurrents BNQ 21 000 et ISO 26 000? Comment les entreprises parviennent-elles à faire un choix éclairé lorsqu’elles souhaitent amorcer une démarche de développement durable sur la base de référentiels reconnus? De plus, avec tous les efforts et les ressources investis dans la restructuration de BNQ 21 000, il convient de déterminer la pertinence de l’arrivée d’une nouvelle norme au Québec. B Corp a-t-elle donc réellement sa place au Québec?

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2. DÉFINITION DU CONTEXTE ET DES ENTREPRISES À L’ÉTUDE

La population en général est souvent portée à croire que les principaux responsables des impacts environnementaux sont les grandes entreprises (GE), mais, au Canada, ce sont les petites ou moyennes entreprises (PME) qui sont garantes d’approximativement 80 % des impacts négatifs sur l’environnement (REDD, 2012). Ceci s’explique par le fait que 99,8 % des entreprises du Québec sont des PME (Gouvernement Canada, 2016). Pour ces deux raisons, l’analyse comparative mise principalement sur celles-ci. Néanmoins, la GE est tout de même traitée dans l’optique de pouvoir les comparer par rapport aux normes qui font l’objet de cette étude. Donc, afin de bien saisir l’essentiel des particularités des organisations dans lesquelles une démarche de développement durable peut s’insérer, ce chapitre explique en détail les deux types d’entreprises qui sont mises à l’étude, soit, les petites ou moyennes entreprises (PME) et les grandes entreprises (GE). Dans le but de bien orienter le fondement de cet essai, une définition du développement durable est d’abord énoncée. Une description de ce qui motive et incite les entreprises à s’investir dans le développement durable est ensuite détaillée. Puis, pour chacune des catégories d’entreprises, il est question de leurs principales spécificités. Une section sur le contexte légal et structurel des organisations du Québec qui permet de mieux définir les bases de la certification B Corp suit. Finalement, le concept d’entrepreneuriat social ou d’entreprise sociale comme outil de développement économique durable est décrit.

2.1 Le développement durable

La notion de développement durable est très large. Elle peut s’appliquer tant sur le plan gouvernemental qu’au niveau des groupes d’intérêts publics et des organisations de tous types (Cadieux et Dion, 2012). Au Québec, la définition du développement durable qui s’inspire du rapport Brundtland est la suivante :

« Développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Le développement durable s’appuie sur une vision à long terme qui prend en compte le caractère indissociable des dimensions environnementale, sociale et économique des activités de développement. » (BNQ, 2011b)

Cette définition illustre bien le développement durable dans un contexte général, mais que représente-t-il plus précisément dans un contexte organisationnel? Le réseau entreprise et développement durable (REDD) fournit une simple description qui permet de mieux cibler son sens en entreprises :

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« Le développement durable consiste à rendre les entreprises résilientes, c’est-à-dire à leur donner la capacité de s’adapter au changement. Les entreprises durables sont préparées à affronter l’avenir, car elles :

 créent une valeur financière à long terme;

 comprennent comment leurs actions influencent l’environnement naturel et s’efforcent de réduire leur impact;

 conçoivent les liens qu’elles entretiennent avec la société — par exemple, les employés et les communautés — et favorisent un changement social positif. Ces entreprises voient plus loin que les objectifs financiers à court terme et considèrent les répercussions environnementales et sociales — autant dans le cadre de leurs activités quotidiennes que lorsqu’elles effectuent des investissements à long terme. » (REDD, s. d.)

Il est rare que le concept de développement durable soit abordé sans parler de responsabilité sociale de l’entreprise (RSE). Bien que ces deux concepts soient indissociables, ce sont deux notions différentes. La RSE se définit surtout comme étant la contribution des entreprises au développement durable, alors que le développement durable, de nature plus globale, se caractérise plutôt comme « un objectif de durabilité de la société dans son ensemble et de la planète » (ISO, 2010). Donc, généralement, lorsqu’une organisation se lance dans une réelle démarche de développement durable, on parle alors, bien souvent, de RSE. La responsabilité sociale selon ISO 26 000 (2010) constitue :

« la responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et activités sur la société et sur l’environnement, se traduisant par un comportement éthique et transparent qui contribue au développement durable, y compris à la santé et au bien-être de la société, qui prend en compte les attentes des parties prenantes; qui respecte les lois en vigueur tout en étant en cohérence avec les normes internationales de comportement et qui est intégré dans l’ensemble de l’organisation et mis en œuvre dans ses relations ».

2.2 Les motivations et incitatifs au développement durable

Il est indispensable d’identifier quelles sont les principales raisons qui poussent une organisation à s’investir dans la RSE afin de mieux saisir comment les différents outils et référentiels de développement durable permettent de répondre à ses besoins. Il a été démontré par deux groupes de recherches distincts que l’intérêt quant au développement durable est équivalent tant pour les GE que pour les PME. Toutes deux savent reconnaitre les bénéfices y étant associés (REDD, 2014a). Les motivations qui mènent à l’adoption d’une démarche de RSE peuvent toutefois varier d’un type d’entreprise à l’autre. Il a d’ailleurs

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avantages juridiques le fait de pouvoir anticiper et de répondre aux attentes réglementaires. Les avantages symboliques sont quant à eux liés à l’amélioration de la réputation de l’entreprise ainsi que l’adéquation aux valeurs de la société (REDD, 2014a). En ce sens, la pression des consommateurs a donc un rôle clé dans le déploiement des efforts de développement durable par les PME (Normandin, 2015). D’autres pressions externes peuvent mener à l’adoption d’une démarche de développement durable tel que les fournisseurs et les investisseurs. En effet, faisant partie intégrante de la chaîne d’approvisionnement, une organisation peut se faire exiger de respecter certains standards en matière de gestion du développement durable, comme la certification ISO 26 000, par exemple (Fédération canadienne de l’entreprise indépendante [FECI], 2014).

Parmi une multitude d’avantages associés au développement durable dans les entreprises, en voici quelques-uns selon neuf grands thèmes :

 Citoyenneté : permet de renforcer l’intégrité et de responsabiliser les chefs d’entreprises comme citoyen responsable (REDD, s. d.);

Économique : permet une réduction des coûts (baisse de la production de déchet, diminution de la consommation énergétique, etc.) (REDD, s. d.);

Financier : permet d’assurer une meilleure situation financière au niveau des liquidités, de la rentabilité et de la pérennité (Cadieux et Dion, 2012);

 Gestion des risques opérationnels : permet de prévoir et de mieux gérer les pressions associées à la chaîne d’approvisionnement et au resserrement de la réglementation (REDD, s. d.);

 Innovation : favorise l’innovation et l’amélioration continue (Cadieux et Dion, 2012);

 Investissement : permet un meilleur accès au financement ainsi que de meilleures relations avec les investisseurs (Cadieux et Dion, 2012);

Maintien de l’acceptation sociale : permet d’entretenir des relations solides avec ses parties prenantes (employés, clients, communauté locale, autres entreprises, organismes de règlementation, etc.) (REDD, s. d.);

 Marketing : permet d’avoir une meilleure réputation, une meilleure image de marque (Cadieux et Dion, 2012) et des arguments de vente intéressants (Normandin, 2015) en plus d’amener un positionnement compétitif par rapport aux concurrents (Fiorucci, 2012) et d’offrir un accès à de nouveaux marchés (Labelle, 2013);

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Ressources humaines : attire et retient une main-d’œuvre qui tient à cœur les orientations sociales et écologiques de l’organisation en créant un milieu de travail sain et stimulant (Normandin, 2015) (Fiorucci, 2012) et une plus grande mobilisation des employés y découlant (Labelle, 2013).

2.3 Les petites et moyennes entreprises

Selon Industrie Canada, une PME consiste à toute entreprise de moins de 500 employés. Parmi celles-ci, on distingue les moyennes entreprises, des petites entreprises et des très petites entreprises ou microentreprises. On considère que la moyenne entreprise détient entre 100 et 499 employés, la petite entre 5 et 99 employés et la très petite entre 1 et 4 employés. Au Québec, on comptait 239 966 entreprises en juin 2016 (Gouvernement du Canada, 2016). De ces entreprises, 99,8 % étaient des petites et moyennes entreprises (PME). Si l’on pousse l’analyse plus loin sur l’ensemble des entreprises du Québec, les moyennes entreprises représentent 1,8 % alors que pour les petites entreprises le pourcentage s’élève à 98 % (Gouvernement du Canada, 2016). Au Canada, plus de 54 % des entreprises sont des microentreprises. Leur prise en compte dans l’analyse comparative est donc non négligeable. Dès lors, cette section fait état des particularités des PME en ce qui concerne le développement durable.

Évidemment, ce qui distingue le plus la PME de la GE est l'importance de son effectif. On caractérise normalement les PME par leur indépendance, leur souplesse et leur fonctionnement multitâche, l’importance des relations interpersonnelles, leur méthode de résolution de problèmes à court terme, etc. (REDD, S. d.). Une entreprise de petite taille, tout comme la GE, comporte son lot d’avantages et d'inconvénients. Les spécificités de ces deux types d’entreprises doivent absolument être considérées dans une approche de développement durable (REDD, 2014b).

D’une part, voyons en quoi la petite taille d’une organisation peut faciliter une démarche de développement durable selon la REDD et ISO 26 000. D’abord, sa structure de gestion informelle, sans procédures ni structures bureaucratiques, permet une plus grande flexibilité, une facilité d’adaptation aux changements et une grande capacité d’innovation (REDD, 2014b). Cette flexibilité est un atout important pour une organisation afin de faciliter la diffusion et la promotion des valeurs et des orientations des dirigeants (REDD, 2014a). Son fort ancrage territorial assure une proximité avec la communauté et les différents acteurs locaux. Aussi, du fait que les PME sont généralement gérées en partie ou en totalité par

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que sur le comportement de leurs employés joue un rôle clé (REDD, s. d.). Les objectifs de développement de la PME dépendent ainsi de la personnalité de l’entrepreneur.

D’autre part, les PME disposent de bien moins de moyens que les GE pour la gestion du développement durable. Notons premièrement le manque de ressources tant au niveau financier, temporel qu’au niveau des ressources humaines. Le manque de connaissance contribue également à rendre plus difficile l’appropriation du développement durable dans la culture d’entreprise (Fiorucci, 2012). Dans les faits, 40 % des dirigeants de PME ne connaissent pas le concept de développement durable (Labelle, Hervieux et Turcotte, 2014). Additionnée au manque de compétence de développement durable, la complexité des outils peut s’avérer être un facteur démobilisant pour une petite organisation désirant démarrer une démarche de développement durable. De plus, la plupart de l'instrumentation existante est généralement peu ou pas adaptée à la situation des PME (structure, moyens financiers et humains) (Laperrouze, 2016). Finalement, la difficulté à comptabiliser les bénéfices directs associés au développement durable contribue à refroidir l’engagement des PME envers celui-ci. Se référer à une tierce partie s’avère donc souvent très utile afin de favoriser une meilleure mise en œuvre des efforts de développement durable et de les communiquer (REDD, 2014b).

Malgré les obstacles auxquels peuvent être confrontées les PME, celles-ci semblent tout de même prédisposées à s’engager dans une démarche de développement durable (REDD, 2014a). Si bien que par définition, la PME peut être considérée comme étant une entreprise durable. C’est essentiellement sa proximité avec ses parties prenantes ainsi que l’intégration des activités de la PME à la vie familiale qui lui valent ce titre. Elles se trouvent donc souvent en meilleure position que les GE pour agir en harmonie avec les communautés et leur environnement (REDD, S. d.).

2.4 Les grandes entreprises

On considère une grande entreprise à partir du moment où elle emploie 500 employés et plus. (Gouvernement du Canada, 2016). Au Québec, on ne compte que quelque 590 grandes entreprises, soit 0,2 % de la totalité des entreprises. Contrairement aux PME, la grande entreprise se démarque généralement par sa taille organisationnelle appréciable ainsi que par sa meilleure capacité financière. Afin de pouvoir mieux comparer ces deux types d’entreprises, il va de soi d’établir les principales caractéristiques spécifiques aux GE.

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On associe plus communément le terme « RSE » avec la GE du fait qu’elles sont plus profitables et qu’elles ont une plus grande couverture médiatique (Craig Smith, 2013). De plus, comme les grandes entreprises détiennent une visibilité plus importante au sein de la société que les PME, cela engendre une pression supplémentaire envers la transparence et la responsabilité sociale de celles-ci. Donc, au niveau de l’image de marque et de la réputation de l’entreprise, ce sont les GE qui bénéficient le plus de la RSE (Jenkins, 2009). Toutefois, les GE peuvent être victime d’un sentiment d’apathie de la part des consommateurs qui ne savent plus comment identifier le véritable fondement des engagements des organisations. Cette méfiance des consommateurs représente un enjeu important pour les entreprises qui souhaitent promouvoir des produits et services durables (REDD, 2014c). Les organisations se doivent donc de trouver un moyen d’améliorer leur positionnement et leurs communications pour bien faire valoir le développement durable auprès des consommateurs et parties prenantes externes (REDD, 2014c).

De plus, en raison de leurs meilleures capacités financières, ce sont les GE qui utilisent le plus les services de consultation (Banque de développement du Canada [BDC], 2011). Il en va de même pour le marketing et la communication de leurs efforts et pratiques en développement durable. Les ressources étant plus abondantes, ce genre de dépenses est plus accessible (Lindegaard, 2012).

Parmi les difficultés que peuvent rencontrer les GE face à une démarche de développement durable, on compte comme enjeux la lenteur au niveau de la prise de décision et l’attitude plus frileuse par rapport au risque. En effet, la complexité de la structure et des processus rend l’entreprise beaucoup moins souple. Prendre une décision devient alors un processus en soi qui peut nécessiter un temps considérable avant d’aboutir à un résultat et donc une mise en œuvre (Lindegaard, 2012). L’attitude de la grande entreprise face au risque est souvent plus fermée, car comme la GE existe depuis des années, elle est généralement stable et ainsi, elle a beaucoup plus tendance à conserver le statu quo plutôt que d’essayer quelque chose de nouveau et de potentiellement risqué (Lindegaard, 2012).

2.5 Le contexte légal et structurel des entreprises du Québec

Il y a plusieurs options envisageables lorsque vient le temps de fonder une entreprise. En effet, les nombreuses formes juridiques qui existent au Québec permettent, de par leur structure, d’encadrer et d’orienter la mission de l’entreprise. Par exemple, une coopérative, une société sans but lucratif et une société par actions ont toutes des buts distincts. Le statut juridique d’une entreprise est donc essentiel

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besoins communs, les décideurs sont donc l’ensemble des membres qui bénéficient de la coopérative alors qu’une société par actions, communément nommée compagnie, a comme priorité de réaliser des bénéfices pour ses actionnaires, le mandat principal des administrateurs est donc de maximiser le rendement financier pour les actionnaires. Dans le cas d’une entreprise sociale, on parle généralement d’une compagnie qui s’impose de considérer tant les aspects sociaux et environnementaux que l’aspect financier (Boussole entrepreneuriale, S. d.), peu importe la structure juridique choisie.

Aux États-Unis, un nouveau statut légal a dû être créé afin de pallier un manque d’intégration des parties prenantes et des considérations environnementales et sociales dans le processus décisionnel d’une organisation à but lucratif. Ce nouveau statut légal, nommé Benefit Corporation, a fait son apparition aux États-Unis vers 2010. Une Benefit Corporation est un statut légal qui permet d’élargir la portée de la loi afin d’introduire les concepts de mission, de responsabilité sociale et de transparence tout en considérant les préoccupations, non seulement des actionnaires, mais aussi de l’ensemble de ses parties prenantes (Morris Nichols, 2016). Une fois qu’une entreprise s’incorpore en tant que Benefit Corporation, elle détient notamment l’obligation de mesurer l’impact que ses activités ont sur la société et est tenue de considérer la création d’impacts positifs sur la société et l’environnement autant que le profit dans son processus décisionnel (B Lab, 2016).

Étant donné qu’un arrêt de la Cour suprême du Canada a été décrété pour admettre qu’il est acceptable de considérer d’autres éléments que les intérêts financiers des actionnaires dans la prise de décisions, la mise en place d’une loi pour créer une structure juridique comme celle des Benefit Corporation est moins pressante au Québec (G. Côté, Entrevue, 8 septembre 2016). Ainsi, un actionnaire ne pourrait poursuivre un administrateur qui aurait considéré l’intérêt des autres parties prenantes dans sa prise de décision. Il est toutefois à noter que tout cela n’a pas encore été testé dans un contexte de B Corp (G. Côté, Entrevue, 8 septembre 2016). Comme aucun statut juridique adapté au contexte des entreprises sociales n’a été adopté au Québec, ce sont plutôt le statut et la structure de l’entreprise à but lucratif qui doivent être adaptés en fonction des motivations, valeurs et intérêts ainsi que des façons de faire de son ou ses fondateurs (Boussole entrepreneuriale, s. d.) Comme affirmé par Marc Belley (2012), pour qu’une organisation du Québec devienne une B Corp, elle doit simplement modifier son statut d’entreprise afin d’intégrer les parties prenantes dans l’ADN de son entreprise et ainsi être reconnue comme une B Corp. Pour ce faire, l’entreprise doit, entre autres, inclure un texte adapté à sa réalité qui mentionne les éléments suivants à son statut :

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« Les administrateurs, agissant de façon équitable et responsable, considèrent les intérêts à court terme et à long terme de l’entreprise y compris, mais sans s’y limiter, les actionnaires, les employés, les fournisseurs, les créanciers, les consommateurs, ainsi que le gouvernement et l’environnement (les “parties prenantes”) de la communauté et de la société dans laquelle l’entreprise opère, pour prendre leurs décisions » (Cadieux, 2012a).

Pour bien faire la distinction entre une Benefit Corporation et une B Corp, voici une brève description de ces deux concepts. D’abord, dans les deux cas, on vise un impact social et environnemental positif. Une Benefit Corporation est une structure légale choisie du dirigeant qui protège les décideurs et qui les autorise à considérer les facteurs sociaux et environnementaux dans leur processus de prise de décision (Bérard, 2014). L’entreprise certifiée B Corp, quant à elle, est une entreprise qui modifie son statut pour intégrer le concept d’entreprise sociale à son modèle d’affaires et à sa gouvernance, qui doit nécessairement atteindre un pointage minimal selon la certification et qui est soumise à des vérifications externes. Selon Geneviève Côté, avocate en droit des affaires, il est moins prioritaire de créer le statut de Benefit Corporation au Québec, puisque le contexte est moins incertain grâce à l’arrêt de la Cour suprême. La menace de poursuite y est donc moins présente qu’aux États-Unis. Toutefois, la pertinence d’un statut juridique propre aux Benefit Corporation demeure et celui-ci pourrait éventuellement voir le jour au Québec (G. Côté, Entrevue, 8 septembre 2016). D’ailleurs, c’est déjà le cas dans les provinces où la concentration de B Corp y est plus élevée, tel que la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse (Tobin, 2015).

2.6 L’entrepreneuriat social

Le concept d’entrepreneuriat social ou d’entreprise sociale, qui est au cœur de cet essai, est un concept en plein essor dans la réalité québécoise. Bien que pour suivre la norme ISO 26 000 une entreprise ne doit pas immanquablement être considérée comme une entreprise sociale, il n’en est pas de même lorsqu’on parle de la certification B Corp. En effet, toute entreprise certifiée B Corp est une entreprise sociale (Kim, Karlesky, Myers et Schifeling, 2016). C’est donc, entre autres, pour cette raison que ce concept unique est défini dans cette section. Plusieurs définitions existent pour expliquer le concept d’entreprise sociale en grande effervescence. L’entreprise sociale englobe tant les entreprises à but lucratif que les entreprises à but non lucratif et les coopératives et représente une nouvelle approche d’affaires pour toutes entreprises désirant faire une différence positive dans le monde (BDC, 2016).

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Aux fins de cette analyse, l’entreprise sociale dont on fait mention fait office d'entreprise à but lucratif (entreprise individuelle, société par actions ou société en nom collectif), mais dont les profits générés demeurent raisonnables. Plus concrètement, une entreprise sociale doit, selon la BDC, intégrer dans son modèle d’affaires la réalisation d’activités bénéfiques pour l’environnement ou pour la société. Elle doit mesurer sa performance soit par double ou triple résultats, c’est-à-dire au niveau du profit, de la valeur sociale ou des impacts environnementaux (BDC, 2016). Les entreprises sociales doivent ainsi être en mesure de combiner performance, efficacité économique, innovation et intérêt général (Mouvement des entrepreneurs sociaux [MOUVES], S. d.). Les profits qu’elles génèrent sont en grande partie utilisés à des fins sociales. Selon Gervais, fondateur de l’Esplanade, un incubateur d’entreprises et d’innovation sociale, « l’entrepreneur qui se dit social refuse le statu quo, contribue à améliorer la société et se passionne pour le changement » (Devenir entrepreneur, 2015). Il est important de préciser qu’une entreprise sociale n’a pas systématiquement une vocation environnementale. Sa mission peut autant être orientée vers l’éducation que l’environnement, la santé, la culture ou tout autre domaine de nature sociale.

Comme l’affirme le mouvement des entrepreneurs sociaux (MOUVES), l’entreprise sociale n’est pas tributaire du statut juridique de l’organisation. Ainsi, que ce soit une association, une coopérative ou une société par actions, l’entreprise sociale privilégie autant l’action sociale que la pérennité financière (Devenir entrepreneur, 2015). Pour les entreprises à but lucratif, l’essentiel est que leurs dirigeants fassent du profit un moyen et non une fin en soi. De plus, toujours selon le MOUVES, l’entreprise sociale s’organise autour de ces quatre principes :

1. Un projet économique viable;

2. Une finalité sociale ou environnementale; 3. Une gouvernance participative;

4. Une lucrativité encadrée.

Il peut être facile de confondre « entrepreneuriat social », « responsabilité sociale des entreprises » et « organisme communautaire ». En réalité, l’entreprise sociale est un modèle qui diffère grandement des organismes communautaires ou des actions de responsabilité sociale que toute entreprise peut décider de faire à tout moment (Bérard, 2015). L’entreprise sociale va beaucoup plus loin que la simple responsabilité sociale des entreprises (Devenir entrepreneur, 2015). En effet, la RSE est seulement périphérique aux activités d’une organisation. Celle-ci peut choisir de s’investir dans une démarche de RSE à tout moment et si elle cesse ses efforts en la matière, l’entreprise continue d’exister. L’entreprise sociale,

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quant à elle, ne peut tout simplement pas dissocier l’impact social du rendement financier (Bérard, 2015). Pour l’entrepreneuriat social, « […] ce sont les processus de l’entreprise qui génèrent l’impact, pas les décisions quotidiennes de l’entrepreneur. Le bien qu'occasionne une entreprise sociale ne doit jamais dépendre d’une personne » (Bérard, 2015).

Bref, on assiste à une multiplication des projets socialement innovants au Québec et ce phénomène va de pair avec l’intérêt accru à l’égard de ce nouvel outil de développement économique durable, B Corp (Devenir entrepreneur, 2015) (Bérard, 2015).

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3. LES NORMES ET RÉFÉRENTIELS EN DÉVELOPPEMENT DURABLE

L’objectif de ce chapitre est de bien connaître les particularités, le mode de fonctionnement, les exigences, ainsi que les points forts et les limites associées à l’usage des trois outils qui sont évalués dans cette étude, soit B Corp, BNQ 21 000 et ISO 26 000.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, la distinction entre une norme ou un référentiel et une certification doit être clairement définie. En fait, une norme est par définition volontaire et donc non contraignante. Elle est conçue par consensus et vise à éclairer et informer l’utilisateur (Association française de normalisation [AFNOR], S. d.a). Les normes en matière de responsabilité sociale englobent et guident les pratiques des organisations en tenant compte des enjeux, des parties prenantes, de la gouvernance ainsi que de la transparence d’une organisation. Dans le contexte d’outils de développement durable, une norme constitue un document de référence qui permet de concentrer et de décrire des balises concrètes basées sur le savoir collectif du milieu, mais qui ne permet pas de certification (BNQ, S. d.a). La normalisation est un outil de développement incontournable volontaire pour une organisation qui désire innover et gagner la confiance de la clientèle par rapport aux services, produits ou systèmes visés par la norme (BNQ, S. d.a). La certification, quant à elle, permet de garantir la conformité d’un produit, d’un service ou d’un système par une attestation réalisée par une tierce partie. Elle offre donc une meilleure assurance à ses parties prenantes quant au respect des exigences de la norme (BNQ, S. d.b). Des sceaux, logos ou attestations officiels permettent de fortifier cette assurance.

Tous ces outils servent à accompagner les entreprises pour l’amélioration de leur performance sociale et environnementale à leur manière. Voyons maintenant en quoi ils permettent d’apporter un changement positif et ce qu’ils représentent concrètement.

3.1 B Corp

Le mouvement B Corp, qui a vu le jour en 2006 aux États-Unis, est le fruit de la vision commune de trois entrepreneurs de Philadelphie qui voulaient se consacrer à l’essor d’un modèle d’entreprise plus responsable (Utopies, S. d.). Menée par l’organisme à but non lucratif, B Lab, l’idée principale de ce mouvement est de créer une communauté d’entreprises certifiées B Corp, de promouvoir ce nouveau modèle d’affaire à travers le monde et de venir en aide à des milliers d’entreprises et d’investisseurs à mesurer ce qui compte vraiment (B Corporation, 2016a). B Lab a donc pour rôle de gérer et d’attribuer la

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certification aux organisations. En créant cet organisme, les fondateurs de B Lab, Jay Cohen Gilbert, Bart Houlahan et Andrew Kassoy, avaient l’humble intention de faire évoluer le capitalisme (Ihler, 2015). En effet, selon eux, nous assistons à une évolution du capitalisme de maximisation à court terme de la valeur des actionnaires à une maximisation à long terme des valeurs communes, à laquelle ils souhaitent participer (Honeyman, 2014, p. XI). Leur vision est qu’un jour les entreprises se concurrenceront non pas pour être les meilleures au monde, mais aussi pour être les meilleures pour le monde.

À ce jour, on retrouve plus de 2 000 B Corps dans une cinquantaine de pays, réparties dans 130 types d’industries. Le Canada fait partie des plus grandes communautés du mouvement B Corp (B Corporation 2016b). En effet, avec ses quelque 167 entreprises certifiées, le Canada est la seconde plus grande communauté au monde. La Colombie-Britannique et l’Alberta représentent 35 % d’entre elles. Ce mouvement est aussi en train de gagner peu à peu le Québec (Albors, 2016). En effet, la certification B Corp est très convoitée par les entreprises sociales à but lucratif (BDC, 2016). Selon Craig Ryan, directeur de la responsabilité sociale d’entreprises du Québec à la BDC, on assiste à une explosion d’intérêt auprès de tous types d’entreprises envers le mouvement B Corp au Québec (C. Ryan, entrevue téléphonique, 13 décembre 2016). La première entreprise à être certifiée fut la firme de services-conseils en développement durable Takt-Étik, en 2012 (Cadieux, 2012a). En l’espace d’à peine quatre ans, le Québec est passé à une dizaine d’entreprises ayant obtenu la certification B Corp. Il est cependant à noter qu’encore aucune grande entreprise au Québec n’a obtenu la certification à ce jour. En effet, il semble que la tendance jusqu’à maintenant est particulièrement populaire auprès des PME (Kim, Karlesky, Myers et Schifeling, 2016). Ce sont des entreprises de moins de 50 employés qui constituent la majorité des B Corp (B Corporation, 2016c). Pour celles-ci, la certification permet d’outiller l’entreprise dans l’établissement de base solide pour l’organisation, notamment par la création de procédures et de processus bien établie (politique d’achat, contrat employé/fournisseur, etc.) (G. Côté, entrevue, 8 septembre 2016). Toutefois, selon Geneviève Côté, avocate spécialisée dans la certification B Corp au Québec, de plus en plus de grandes entreprises d’ici commencent à s’y intéresser (Cadieux, 2015). Une des raisons qui justifierait l’absence de grandes entreprises détenant la certification à ce jour est qu’il est plus complexe et donc plus long de passer au travers du processus de certification pour celles-ci que pour une PME (J. Sou, conversation téléphonique, 16 septembre 2016). Selon Joyce Sou, représentante de B Corp au Canada, plusieurs grandes entreprises du Canada auraient entamé les démarches de certifications (J. Sou,

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sociales. La banque du développement du Canada (BDC) a, pour sa part, établi un partenariat avec la certification B Corp à l’été 2016, afin d’augmenter le bassin d’entreprises socialement responsables. Le choix de la BDC de travailler avec le mouvement B Corp vient des entrepreneurs de l’ensemble du Canada qui manifestaient leur fort intérêt pour celui-ci. Selon Craig Ryan, il y a une évolution dans la mentalité des entrepreneurs qui est en train de se produire (C. Ryan, entrevue téléphonique, 13 décembre 2016).

La certification B Corp est bien plus qu’une simple certification. Elle est un mouvement à l’échelle mondiale qui regroupe les entreprises désirant se servir du monde des affaires comme force pour changer le monde. Ce mouvement, qui ne cesse de croître, s’inscrit d’ailleurs dans le monde de l’entrepreneuriat social (Bérard, 2015). La certification B Corp s’adresse aux entreprises à but lucratif qui visent un impact positif social ou environnemental en plus du rendement financier. Elle est donc disponible pour l’ensemble des entreprises dans le monde, peu importe s’il existe une structure légale propre aux Benefit Corporation et peu importe son lieu d’incorporation (Honeyman, 2014). Pour y prétendre, une entreprise doit atteindre de hauts standards de responsabilité sociale et environnementale ainsi qu’à des critères de transparence, de divulgation et d’imputabilité (Bérard, 2014). En effet, la certification est attribuée aux entreprises qui intègrent la création de valeur sociale et environnementale dans leur modèle d’affaires et, par le fait même, dans leurs activités quotidiennes (C. Ryan, entrevue radio, 4 mars 2016).

La certification se caractérise par sa flexibilité qui permet d’adapter une démarche à la réalité de chaque entreprise et ainsi assurer que les politiques et mesures adoptées soient réellement appliquées une fois l’entreprise certifiée (Cadieux, 2015). On nomme B Corps ou Entreprise B les entreprises qui possèdent la certification. Le processus de certification comprend une évaluation d’impact B (B Impact Assessment), développée par B Lab, qui permet non seulement de structurer l’engagement social et environnemental, mais aussi de mesurer quantitativement la performance sociale, environnementale et économique d’une entreprise (Cadieux, 2015). Fortement inspirée de référentiels connus, l’évaluation d’impact B reflète bien les définitions et les standards de reddition de comptes du GRI et de l’IRIS (B Corporation, 2016c). Il est donc aisé d’adopter les deux outils en parallèle. De plus, grâce aux résultats générés par l’évaluation, les organisations sont en mesure de se comparer avec les autres acteurs d’une même industrie et de mieux partager leur performance avec leurs parties prenantes (Honeyman, 2014, p.34). Ainsi, la certification B Corp s’adresse aux entreprises qui désirent prouver à leurs parties prenantes que leurs engagements consistent à bien plus qu’une astucieuse campagne de green washing (Mendleson, 2012).

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3.1.1 Principes et thématiques

La certification B Corp repose sur plusieurs grandes thématiques. Puisque l’évaluation d’impact B évolue constamment dans le temps, les thématiques sont sujettes au changement. B Lab lance une nouvelle version de l’évaluation d’impact B environ tous les deux ans (B Corporation, 2016c). Par exemple, dans la première autoévaluation qu’a réalisée Baléco, une entreprise spécialisée dans la commercialisation de produits nettoyants écoresponsables, les catégories étaient la gouvernance, les employés, la communauté, l’environnement et l’impact du modèle d’affaires. La nouvelle version du questionnaire ne comprend pas exactement les mêmes thématiques. À ce jour, l’autoévaluation traite des questions qui touchent la gouvernance, les employés, la communauté, l’environnement et les consommateurs (H. Torresan, entrevue, 6 septembre 2016). Pour pouvoir obtenir le renouvellement de sa certification, Baléco devra ainsi revoir son questionnaire en entier et faire en sorte qu’elle dépasse toujours le minimum requis. (H. Torresan, entrevue, 6 septembre 2016). Le tableau 3.1 présente les principaux éléments évalués dans chaque thématique de la version plus récente du questionnaire.

Tableau 3.1 Sous-éléments des cinq principales thématiques de B Corp (Traduit de B Impact Assessment)

Thématiques Sous-éléments Gouvernance Mission et engagement Responsabilité sociale Gouvernance Transparence Protection de la mission Employés Rémunération et récompenses Bénéfices

Formation et développement professionnel Part des employés dans la compagnie Gestion et communication aux employés

Modèle d’affaires : impact positif pour les employés

Communauté

Création d’emploi Diversité et inclusion Engagement civil et dons Implication locale

Entretien des standards des fournisseurs, distributeurs et produits

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Tableau 3.1 Sous-éléments des cinq principales thématiques de B Corp (suite)

Thématiques Sous-éléments

Environnement

 Préservation de l’environnement par la gestion des biens de l’entreprise (usine, bureau, terre)

 Conservation de l’énergie, l’eau et des matériaux dans les opérations de l’entreprise

 Réduction des émissions de gaz à effet de serre et des rejets

Efforts environnementaux auprès des fournisseurs importants et des méthodes de distribution

Modèle d’affaires : impact positif sur l’environnement

Conception de produits ou services permettant de limiter les impacts environnementaux

 Reconnaissance des produits ou services qui préservent ou restaurent les milieux naturels ou qui protègent les animaux

 Reconnaissance des produits ou services qui réduisent ou éliminent les toxines ou la pollution Consommateurs

 Modèle d’affaires : impact positif pour ses clients au-delà de la valeur normalement fournie par les biens ou services

3.1.2 Démarche

Une des forces de la certification B Corp repose en fait sur son processus très rigoureux (Honeyman, 2014). Celui-ci comprend trois grands critères à rencontrer. Le premier, qui est sans doute le plus laborieux, consiste à atteindre le niveau de performance requis pour obtenir la certification. Le second consiste à rencontrer les exigences légales requises et, le dernier, représente l’officialisation de la certification par la déclaration d’indépendance. Les grandes étapes suggérées par B Lab pour parvenir à rencontrer tous les critères de la certification sont les suivantes :

1. Obtenir une vue d’ensemble des performances sociales et environnementales de l’organisation Pour ce faire, il faut notamment réaliser l’évaluation d’impact B (B Impact Assessment) en ligne et implémenter les pratiques de l’organisation en fonction des résultats de celle-ci. Cette autoévaluation entièrement gratuite constitue un questionnaire qui permet d’évaluer la performance environnementale et sociale sur une échelle de 200 points selon les cinq grandes thématiques présentées précédemment (B Impact Assessment, S. d.). Le pointage minimal pour obtenir la certification est de 80 points alors que la moyenne des entreprises se situe entre 40 et 60 points (Honeyman, 2014). Les questionnaires évoluent constamment afin de s’assurer qu’au moment de la recertification, tous les deux ans, les entreprises soient

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soumises à des standards plus exigeants et donc à une amélioration continue (J. Sou, conversation téléphonique, 16 septembre 2016). Le B Impact Assessment sert d’outil permettant de transformer l’idée d’utiliser les affaires comme force pour le bien commun en une série d’étapes concrètes et mesurables (Honeyman, 2014). Il existe également une version rapide de l’évaluation (Quick Assessment worksheet) qui permet de fournir un aperçu de ce à quoi pourrait ressembler le résultat du B Impact Assessment en quelques minutes. Pour la version longue, on estime plutôt 90 minutes. Celle-ci est plus fastidieuse, mais peut être complétée en plusieurs fois.

Malgré les questions qui peuvent nécessiter un peu plus d’effort, l’autoévaluation en ligne demeure facile d’utilisation. D’ailleurs, plusieurs outils sont mis à disposition pour accompagner l’entreprise dans sa démarche (Honeyman, 2014). D’une part, il y a The B Corp Handbook, qui aborde, notamment, les questions les plus difficiles, fournit quelques idées quant aux meilleures pratiques pour l’amélioration de la performance, en plus de permettre de mieux comprendre le processus dans son ensemble. D’autre part, directement à partir de l’évaluation en ligne, des définitions et des indications supplémentaires sont disponibles afin de faciliter la réponse aux questions. On retrouve aussi plus de 40 bonnes pratiques réparties dans l’évaluation pour aider à mettre en œuvre de nouvelles pratiques ou politiques (Honeyman, 2014). Finalement, il est aussi possible de faire appel à B Lab qui est disponible pour répondre aux questions, suggérer des manières d’améliorer la performance, etc. (Honeyman, 2014) À cette étape-ci, l’accompagnement par un consultant externe peut s’avérer fort utile pour traiter adéquatement les notions de gouvernance et de transparence (Cadieux, 2015).

Pour ceux qui le désirent, l’évaluation est utilisée comme un système de gestion, car il y est possible de spécifier les objectifs et les pratiques que l’entreprise désire mettre en place à la lumière de questions en particulier. Il est également possible d’établir un échéancier et d’utiliser le questionnaire comme plan de travail à long terme et ainsi de pouvoir mieux structurer et planifier l’implémentation de la stratégie (Utopies, S. d.). Le B Impact Assessment permet de comparer les résultats avec des milliers d’entreprises. En effet, ce sont plus de 17 000 entreprises dans le monde qui utilisent l’évaluation d’impact de B Corp (B Impact Assessment, S.d). Les données recueillies par le B Impact Assessement sont compilées de manière anonyme de sorte que toutes les évaluations demeurent confidentielles. Voici donc un aperçu du questionnaire d’autoévaluation en ligne à la figure 3.1 ci-après.

Figure

Tableau 3.1 Sous-éléments des cinq principales thématiques de B Corp (Traduit de B Impact Assessment)
Tableau 3.1 Sous-éléments des cinq principales thématiques de B Corp (suite)
Figure 3.1 Aperçu du questionnaire d’autoévaluation en ligne
Tableau 3.2 Grille tarifaire (Inspiré de : B Corporation, 2016)  Pour les entreprises qui ont soumis leur
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