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Vérité, véracité, sincérité : "fait divers" et nouvelle chez Vigneulles

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Academic year: 2021

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(1)

Acquisitions and Direction des acquisitions el Bibliographie seNices Branch des seNices bibliographiques 395 Wellington Street 395. rue Wellington

Ottawa. OntarIO Onawa(001<100)

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(2)

Vérité, véracité, sincérité.

:'Fait divers" et nouvelle chez Vigneulles

par

Sophie CHI SOGNE

Mémoire de maîtrise soumis à la

Faculté des études supérieures et de la recherche

en vue de l'obtention du diplôme de

Maîtrise ès Lettres

Département de langue et littérature françaises

Université McGi11

Montréal, Québec

Mars 1995

(3)

.

..-.

National Ubrary of Ganada

Bibliothèque nationale du Canada

Acquisitions and Direction des acquisitions et Bibliographie Services Sraneh des services bibliographiques

395 We!li!'lQtorlStreet 395.rueWellington Ottawa.Onlario Qnawa (OnlanC)

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L'AUTEUR CONSERVE LA PROPRIETE DU DROIT D'AUTEUR QUI PROTEGE SA THESE. NI LA THESE NI DES

EXTRAITS SUBSTANTIELS DE CELLE-CI NE DOIVENT ETRE IMPRIMES OU AUTRE~ REPRODUITS SANS SON AUTORISATION.

ISBN

0-612-05370-9

(4)

Vérité, véracité, sincérité.

"Fai t di vers" et nouvelle chez Vigneul les

Résumé

Par le biais d'une comparaison entre les faits divers tirés de la Chronique de Philippe de Vigneulles (1471-1525) et les récits qui forment le recueil des Cent Nouvelles nouvelles du même auteur, ce travail vise à déterminer la nature des liens entre la nouvelle et son contexte historique, en problématisant la fonction des protestations de véracité dans un corpus de fiction. L'analyse des récits fondés sur la structure minimale de l'infraction à un interdit montre, d'une part, que la visée didactique de l'écrivain, apparemment secondaire et subordonnée au comique dans ses nouvell es, est en fai t primordial e et agit comme principe organisateur et moralisateur des récits, reflétant les valeurs de l'homme. Elle montre d'autre part que la relation entre fait divers et nouvelle littéraire en est une de gémellité plutôt que de filiation, que la nouvelle est un

calque du fait divers ou, en reprenant la terminologie d'André JolIes dans ses Formes simples, qu'elle en est une Forme relative .

(5)

Truth,

truthfulness and sincerity.

"Fai t di vers" and the nouvell e in Phi lippe de Vigneull es

Abstract

The inherent contradiction that lies in the systematic

use

of

the

claim

to

veracity

in

narratives

built

on

traditional,

widely used motifs and themes is the starting

point of

this thesis.

Through a comparison of Phi lippe de

Vigneulles'

(1471-1525)

Chronique

and

his

collection

of

short

stories

the

Cent

Nouvelles

nouvelles,

this

study

analyses the link between the nouvelles and their historical

background. Analysis of those texts whose basic structure is

founded on the commission of an infraction. indicates on the

one hand that the author's didactic intention. apparently of

minor importance and subordinate to the comic of the tales,

is

in

fact

essential,

functioning

as

the

moral

and

organisational principle of these tales, and reflecting the

writer's

values.

It

shows

on

the

other

hand,

that

the

relation between the "fait divers" and the nouvelle is not

one of filiation; they are rather "twin" narrative forms or,

to use the terminology of André JolIes in Einfachen Formen,

the second is a "Relative Form" of the first .

(6)

HERCI •. •

... aux professeurs Marc Angenot et Jean-Claude Morisot,

dont les remarques judicieuses ont aidé

à

la mise en oeuvre

de ce travail .

... au

professeur

Normand

Doiron,

pour

soulever

les

bonnes questions .

... à

la professeure Jane Everett,

qui fournit par son

exemple une façon excellente d'y répondre .

... à

mon directeur, le

professeur Giuseppe Di Stefano,

pour

avoir suggéré et dirigé

ce mémoire,

et

canalisé mes

inquiétudes.

Son exemple,

sa

direction ferme

et discrète,

ses

encouragements continuels

sont

une source inépuisable

d'inspiration et de motivation (et la preuve d'une patience

à

toute épreuve, il va sans dire) .

(7)
(8)

1 5-38 5 5 6 11 13 17 :>4 24 26 27 34 39-83 39 40 40 68 84-101 84 84 85 86 87 87 91 96

102 Introduction

1 Du fait divers à la nouvelle? 1. Fondements du rapprochement

a. L'hypothèse formaliste

b. Les protestations de véracité dans les textes c. L'évolution sénantique du mot "nouvelle" d. La théorie des Formes siIrples

e. Le concept arrbigu de fait divers 2. Nature du rapprochement

a. Le problème des sources historiques

b. Hypothèse des faux-jureaux: recueil et Formes relatives c. Les lieux du calque

d. La structure Interdit/Infraction/sanction II La nouvelle en flagrant délit d'ÏJIIlC)StUre

1. Actualisations de la structure

IIs:

deux grands axes 2. Analyse; observations et ccrnrentaires particuliers

a. Crimes contre l'ordre social

b. Crimes contre l'ordre moral ou religieux

III Bullr.m cr.imeIJ sizJe lege, mz11a poeaa sizJe lege

1. Résultats particuliers a. Les interdits

b. Les infractions c. Les sanctions 2. Résul

tats

généraux

a. Perspective de l'écrivain

b. Fonction didactique du recueil c. Mimétisme et originalité

(9)

104

117 ANNEXES

117 Annexe l Liste des faits divers assimilables aux nouvelles

120 Annexe

II

Liste des nouvelles de structure Ils

123 Annexe

III

Tableau des assimilations entre les interdits 126 Annexe IV Tableau synthétique des sanctions

134

BIBLIOGRAPHIE

(10)

Introduction

La nouvelle comme genre littéraire présente, depuis les

recueils du Moyen Age et du XVIème siècle, certaines

caractéristiques récurrentes qui la rapprochent tout à fait

d'un genre journalistique des plus familiers aujourd'hui,

cel ui des fai ts di vers. Inversement, il n'est pas rare de

trouver, à la lecture de faits divers, l'amorce de récits

auxquels il manque peu de choses pour être dits

"littéraires". C'est tout naturellement alors que les deux

types d'écrits ont été liés dans le carcan d'une relation

filiale, dont l'apparente évidence, pourtant, est un

leurre1 •

Depuis les travaux des Formalistes russes,

l'association intuitive de la nouvelle brève d'information

et de la nouvelle dite littéraire, qui fait de l'une

l'amplification artistique de l'autre, les conjoignant dans

une relation identique à celle du sujet et de la fable,

semble s'être figée en un lieu commun trop facilement pris

pour acquis, dont l'analyse minutieuse, jusqu'à maintenant

laissée de côté par la critique, pourrait ouvrir de nouveaux

horizons aux recherches sur la Nouvelle2 • En effet, si la

filiation est assez assurée dans certaines oeuvres modernes

ou contemporaines pour ne pas sembler requérir d'analyse

plus développée -les auteurs, des individus connus,

identifiés, longuement interviewés, avouant sans difficulté

des sources d'inspiration souvent notoires, au besoin

vérifiables-, elle est remise en question dès que l'on

aborde la Nouvelle des orlglnes. Or, le problème d'une

définition diachronique satisfaisante de la Nouvelle comme genre littéraire-ne saurait faire l'économie d'un retour aux

(11)

genre, donc de ses premières manifestations.

L'origine littéraire du genre a été étudiée en

~rofondeur par de nombreux critiques, et nous savons

aujourd'hui dans quelle mesure sa codification a été

influencée par les genres brefs antérieurs, exempla, lais,

fabliaux, pour ne nommer que les plus importants). Ce qui

nous occupe ici est bien l'origine historique des anecdotes, dans la mesure où la Nouvelle. en plus des éléments formels, a emprunté à ses prédécesseurs l'essentiel de leurs éléments thématiques.

Or. l'un des caractères principaux de la Nouvell e clUX

xvème et XVI ème siècles est l'insistance des auteurs/

narrateurs4 sur la véracité de leurs récits. Insistance,

parce qu' i l s ' agi t non seul ement de mettre en oeuvre des

procédés de véridiction qui. provoquant des "effets de

réel"s. assurent le réalisme. donc la vraisemblance du

récit; mais bien parce que le narrateur se fait

explicitement le garant de la vérité de ce qu'il rapporte5 ,

c'est-à-dire de l'actualisation. non seulement effective.

mais récente. de ses anecdotes7 • Cette constatation serait à

peine digne d'intérêt littéraire. si la matière qui

constitue les récits ne correspondait pas au contenu même

d'une tradition dont des traces certaines se retrouvent à

travers toute la sphère indo-européenne. jetant du coup le

doute sur la sincérité de telles affirmations.

Notre perplexité naît donc du décalage observé entre

les affirmations des textes et les résultats des analyses.

positives. des sources. Comment concilier la récurrence

véhémente des protestations de véracité avec le remaniement

-souvent superficiel- des thèmes éculés d'un folklore

millénaire? Au nom de quoi les auteurs de nouvelles de

l'époque s'obstinent-ils à présenter comme vraies et

récentes des anecdotes et aventures empruntées à la

tradition populaire? Simple caprice de forme de ce nouveau genre littéraire? Pourtant. la ressemblance bien réelle avec

(12)

les faits divers ne saurait être fortuite. Quels liens

précis peut-on établir. alors. entre la "vraie" nouvelle et la nouvelle "fictive"?

Afin de répondre à ces questions. je me propose

d'étudier ici la relation entre le fait divers et la

nouvelle littéraire' dans l'une de ses premières

manifestations. à partir de l'hypothèse suivante: si les

nouvelles sont effectivement des récits enrichis

d'événements réels. un corpus présentant ces deux aspects

-historique et littéraire- de la nouvelle devrait permettre

de retrouver. dans la partie historique. les noyaux des

récits de la partie littéraire. Le travail, en ce cas,

consistera à déterminer les modalités régissant la

filiation

des récits, le passage de l'une à l'autre partie du corpus.

Sinon, une analyse en profondeur des rapports entre ces

parties doit nous amener à préciser la parenté que nous

percevons de toute façon entre elles, qui seule pourra

rendre compte de l'usage des protestations de véracité chez

les premiers auteurs de nouvelles. Les résultats seront

d'autant plus probants que le corpus est l'oeuvre d'un seul et même auteur, et que la rédaction des deux parties a été,

à peu de choses près, simultanée.

C'est l'oeuvre du marchand messin, Philippe de

Vigneulles, qui offre les éléments de ce corpus idéal,

oeuvre constituée -entre autres- d'une chronique de

l'histoire de Metz, rédigée entre 1495 (environ) et 1525; et

du recueil des

Cent Nouvelles nouvelles,

composé entre 1505

et 1525, dans la foulée du

Décameron

de Boccace et des

Cent

Nouvelles nouvelles

bourguignonnes, dont notre auteur à la

fois s'inspire et se distingue'. Mon travai l se veut une

vérification, en vue d'en préciser les détails, des

assertions de Gabriel-A. Pérouse dans ses

Nouvelles

(13)

[Philippe], rédigeant sa

Chronique

[ ... ].

rencontre un certain nombre d'aventures qui ne méritent tout de même pas d'être enregistrées avec la "grande histoire" (encore qu'il soit peu exigeant sur ce point ... ), ou alors qui ont déjà l'air de "nouvell es" toutes faites, grâce à quelque tournure plaisante des incidents; il les classe â part et, comme il est bon "mesnager", l'idée lui vient d'en faire un cahier séparé: ce sont les

Cent

Nouvelles

nouvelles.

Les deux ouvrages sont menés de front, et le lecteur d' aujourd' hui se demande parfois pourquoi tell e aventure figure dans l'un et non dans l'autre; Philippe les traite dans le même esprit, comme le prouverait assez ce Prologue du Livre IV de la

Chronique,

où il se présente au lecteur dans des dispositions identiques à celles qu'étale le Prologue des

Cent Nouvelles nouvelles.

10

Le chapitre l établit les fondements du rapprochement entre histoire et littérature pour l'objet qui nous concerne. La méthode y est ensuite élaborée, qui consiste à définir la structure commune à partir de laquelle les deux types de récits pourront être comparés: ce sera la structure de l'infraction à un interdit.

Le chapitre II présente les données de l'analyse. On y trouve l es résumés des récits retenus, regroupés selon les interdits et suivis de commentaires et d'observations, avec des analyses ponctuelles plus élaborées lorsque l'importance du sujet l'exige.

Le chapitre III, enfin, fait la synthèse du chapitre II et tente une interprétation des résultats obtenus. Interprétation "sociale", d'une part, qui tient compte du

contexte historique de la rédaction des textes.

Interprétation théorique, d'autre part, qui tente de trouver la place et l'influence de ces résultats dans une typologie de la Nouvelle comme genre s'étant maintenu jusqu'à nos

(14)

Chapitre l

Du fait divers à la nouvelle?

1.

Fondements du rapprochement

L'hypothèse formaliste

Dans son article "Thématique", Tomachevski a montré que

le thème principal d'une oeuvre littéraire peut s'articuler

de

deux

façons

à

l'intérieur

de

celle-ci.

A un

premier

niveau, les éléments thématiques s'organisent en fonction de

la chronologie et de la causalité qui leur ont donné lieu:

c'est la fable, ou "ce qui s'est effectivement passé"l1.

Au

second niveau, ces mêmes éléments sont repris et disposés de

façon particulière, subordonnés aux choix du narrateur. Dans

cet

agencement,

ils

cO::lstituent

le sujet,

ou "comment

le

lecteur

en

a

pris

connaissance"

[de

"ce

qui

s'est

effectivement passé"]12.

Cette distinction a

traversé

1

es

courants

théoriques

de

la

narratologie,

bien

que

sa

terminologie ait été soumise

à

de nombreuses variations qui

n'en

ont

pas,

toutefois,

altéré

le

sens

profond;

ainsi

Genette, dans Figures

11[13,

oppose

histoi~'e

(ou diégèse)

à

récit (dans le sens de discours narratif); Goldeinstein dans

Pour lire le roman14 , histoire à

intrigue, et Bal, dans sa

Théorie de la narration15 ,

fable

à

histoire. Segre, dans Le

strutture e il

tempo,

complète les notions de fable et de

sujet

formalistes

(fabula

et

intreccio)

par

celle

de

discorso, qui se réfère au "texte narratif signifiant"16.

Au-delà de

la disposition des événements,

le rapport

entre

fable

et

histoire

en

est

un

d'amplification,

d'élargissement17 .

La

fable

n'est

que

la

somme

des

événements cruciaux, capitaux, essentiels, ordonnés selon la

(15)

chronologie la plus simple. celle qui dépend de leurs

relations causales. Le sujet en revanche est au moins cette

somme d'événements -dont la chronologie n'est pl us soumise

qu'à l'intention du narrateur-. plus les détails. mineurs ou

substantiels. que ce dernier juge bon d'y ajouter pour

étoffer son récit; détails qui sont. du point de vue

formaliste toujours. le lieu même du littéraire. Si le fait

divers constitue vraiment le noyau ou la fable de la

nouvelle. on devrait donc. étant donné le matériel "vrai"

qui était à la disposition de Philippe de Vigneulles au

moment d'écrire ses

Cent Nouvelles nouvelles

et qui était en

mesure de lui fournir matière à récit. trouver dans la

partie littéraire de son oeuvre. qui prétend (rappelons-le!)

constamment à la vérité. des nouvelles qui soient aux faits

divers ce que le sujet est à la fable dans la théorie

formaliste.

Cette distinction fable/sujet est le garant théorique.

du côté littéraire. de l'hypothèse selon laquelle la

Nouvelle est le développement naturel et conséquent du fait

divers. Des observations provenant de trois perspectives

différentes vont dans le sens de ce rapprochement.

Les protestations de véracité dans les textes

L'usage des protestations de véracité dans les récits

brefs en prose des XVème et XVlème siècles. nous l'avons

dit. est des plus récurrents et des plus traditionnels.

L'origine de cette tradition remonte aux

exempla

et.

au-delà, à une pratique archafque de la parole qui plaçait

l'authenticité des propos au-dessus de tout autre intérêt18 •

alors qu'un lien inextricable unissait la créativité au

mensonge et le mensonge au péché, au sacrilèqel'.

En ce qui concerne la Nouvelle française de la

Renaissance, toutefois, le fort degré de récurrence de cet

usage observé non seulement chez les différents auteurs,

dans leurs prologues, mais aussi bien à l'intérieur même des

(16)

dans ce genre littéraire une fonction précise, et

l'insistance des écrivains n'est pas gratuite2o • C'est à

cette conclusion générale que se rangent Krystyna Kasprzyk.

dans son étude sur

Nicolas de Troyes

et

le genre narratif en

France

au

XVI ème siècl

e, et Roger Dubuis, dans ses

Cent

Nouvelles nouvelles

et

la tradition de la nouvelle en France

au

Moyen Age.

La première attribue cette caractéristique à

la seule tradition, tout en en faisant l'un des trois

aspects principaux du genre21 • La pratique de certains

auteurs -Boccace en tête, suivi en cela de Bonaventure des

Périers dans ses

Nouvel 1es récréations

et

Joyeux devis-

qui

consiste à prendre à contrepied cette tradition en la

parodiant, ne fait qu'en souligner la vigueur et la

constance22 . Le second l'utilise carrément comme élément de

sa définition; il y voit la conséquence directe du critère

de "récence"23. Nous en ferons, plus généralement, une

conséquence nécessaire du calque du fait divers. Pour

l'instant, retenons que les deux critiques limitent -par la

force des choses- leur étude aux recueils littéraires, et

qu'il convient de mettre à profit la richesse de notre

propre corpus.

On constate dans les

Cent

Nouvelles

nouvelles

de

Philippe de Vigneulles l'usage habituel des protestations de

véracité24 . Mais cet usage est en plus souligné, renforcé

par les propos tenus par l'auteur dans son Prologue, de même

que par toute absence de recul ou d'ironie face à ce genre

d'assertions dans les récits, contrairement par exemple à

Boccace25 ou même à Nicolas de Troyes26 . Philippe de

Vigneulles cherche à tout prix à faire croire à ses

histoires, ce qui est d'autant moins fortuit et plus

significatif qu'il rédigeait en parallèle une chronique

historique. Dans le prologue en question, notre auteur dit

(17)

considerant que beaucop de simpl e gens dient ...

qu'on ne les doit pas croire, ... je respons et dis

qu'on peut croire que possible est esté advenus.

Et peut on croire toutes choses qui ne sont

contraires à Dieu ne à sa loy ...

Cela seul serait insuffisant pour convaincre de l'existence

véritable, de l'actualisation effective des événements

racontés. Comme le précise Livingston. Philippe "parait

confondre ici vérité métaphysique et faits véri tables"27 •

Mais il poursuit:

... considerant leur folle opp1n10n et en monstrant

que on n'ai t di t ni fai ct chose du passez qui

semblable ne se puisse aujourd'huy faire ou dire •

...• je me mis lors à escrire pluseurs adventures.

advenues la pluspart tant à la noble cité de Mets

comme au pays environ. comme moy mesme en a sceu

et veu la plus grant partie ou du moins je les ouy dire et racompter à gens digne de foy et de creance. Lesquelles adventures et nouvelles ... ay

mis en escript pour monstrer que. se les

adventures qui se font en divers lieux et que

journellement adviennent venoient à la

congnoissance d'aucun bon facteur. ilz en

pourroient faire et composer ung livre aussi bon

que ceulx qui ont esté faict devant. veu et

consideré que seulement moy, qui n'as guieres veu

ne

hanté, vous

en

a

trouvé cent et plus, la

pluspart advenues de mon tempS.28

Mises en regard avec le prologue de la Chronique. ces

affirmations semblent bien catégoriques. En effet.

contrairement à ce qu'affirme M. Pérouse. l'auteur ne se

présente pas dans celui-ci "dans des dispositions identiques

à celles qu'étale le Prologue des Cent Nouvelles

nouvelles"!', où il assène ses prétentions dans le but

surtout de convaincre le lecteur non pas tant de sa bonr.e

foi, que de la vérité de ses propos. Sa position est plus

nuancée dans la Chronique. où les affirmations sur la vérité

des faits rapportés sont atténuées par les précautions

prises pour manifester sa bonne foi. sa sincérité. ses.

(18)

Lesquell es

cronicque et

histoire

j' ay recueil 1is

de

pl usieur

traictés et

voull ume. ..

a pl us vray que

je

peu ne sceu.

Et.

jay

ce

que

1

esdi te

cronicque ne soient pas de qrandez importance •...•

touteffois

je n'y ait mis

chose.

à mon pouvoir. que

je

ne croye

estre vraye.

[ ... ] Et. aucy •...•

je

n'y cuide

avoir mis chose que parei Il ement je

ne thiengne pour avoir veu;U et qui ne soi t

véri té. [ ... ]

Car

biaul copt

de

chose

ont

estez

faictes

et

dictes •...•

lesquelles

chose

toucte

congneue.

toucte noctoire et de fresche mémoire.

Pareillement. de ce que durant mon eaige et en mon

tamps je conqneus et veu, je le ait mis et escript

à plus droit à la verité que

je

peu ne sceu, cellon

ma

possibillité.

Et.

pourtant.

ce cesdite

cronicque ne sont pas mise en cy biaulx tairme ne

en

cy

plaisant

stille.

avec

belle

parolles

ou

biaulx languaige aorneis. comme estre deussent. cy

n'en sont elle pas moins

à

priser, ne jay pour ce

ne laissent elle

à

estre vraye.

31

A

mon

avis.

l'insistance

du

côté

littéraire

est

une

tentative pour contourner une contradiction immanente à la

nouvelle

comme genre

littéraire,

précisément, contradiction

sur laquelle nous reviendrons mais qui s'explique déjà dans

ce qui suit.

Les précautions oratoires que constituent les prologues

révèlent

une

distinction

essentielle

entre

les

deux

ouvrages.

distinction

qui

se reflète

au

sein

des

récits

mêmes.

En effet. hors des prologues,

les protestations de

véracité

restent

très

présentes

dans

le

recueil,

alors

qu'elles ne sont qu'exceptionnelles dans la

Chronique.

Cela

met

en

lumière

la différence

de

nature entre

les

deux

corpus, et les différents présupposés qui les sous-tendent:

le fondement nécessaire de la rédaction et de la réception

d'une chronique

historique

est la bonne foi du chroniqueur.

avec

en

corollaire

la

vérité

des

événements

rapportés;

tandis qu'une oeuvre de fiction

-fictio-

est mensongère par

nature

32 •

Dès lors.

la littérature

ludique qui se prétend

réalité doit nécessairement et explicitement avoir recours

aux protestations de véracité, sous peine de voir ses récits

entraînés,

assimilés

spontanément

au

mensonge

et

à

(19)

l'illusion.

L'insistance

un

peu

lourde

devient

ainsi

un

effet

de

genre

incontournable

de

la

Nouvelle

"étymologiquement" pure

33 •

Cette distinction a aussi pour conséquence d'envelopper

l'ensemble des récits de la

Chronique

d'un halo de bonne foi

qui nous force à considérer. à défaut d'autres témoignages.

comme

vraies

et

"véritablement

advenues"

toutes

les

occurrences plausibles. Avec toutefois la réserve suivante:

il s'agit bien. pour ce qui est de la

Chronique,

de bonne

foi.

donc d'une

tendance

à la vérité.

D'une part. Philippe

de

Vigneulles

ne

présente

que

son

point

de

vue

des

événements. petits et grands. En principe. cela ne remet pas

en cause les faits eux-mêmes. mais leur interprétation: dans

la mesure où l'information transmise par le chroniqueur est

partielle. elle peut être plus facilement biaisée. mais pas

carrément inventée; on en veut pour preuve sa bonne volonté

et

la

bonne

foi

déjà mentionnée.

Cette même

bonne

foi.

rapprochant son attitude de la sincérité plutôt que de la

constatation objective -ce dont il ne se cache pas. comme on

l'a vu dans l'extrait du Prologue- met en relief.

d'autre

part. la simple tendance à la vérité de la

Chronique.

Simple

tendance.

disons-nous. mais tendance

à la véri té,

tout de

même. alors qu'en contexte littéraire. les mêmes occurrences

n'atteignent jamais. au mieux. qu'à la vraisemblance. à une

représentation de la réalité, jamais à la réalité elle-même.

Voilà qui explique en partie le paradoxe entre

prendre

tant de précautions pour rapporter des faits historiques, et

affirmer avec tant d'insistance la vérité de récits ayant

pour

but

premier

de

divertir,

non

d'informer.

L'usage

réi téré des

protestations

de véraci té.

du même coup,

est

rendu d'autant plus révélateur de la littérarité du genre.

ce qui

justifie notre interrogation concernant leur origine

et souligne sa pertinence .

(20)

L'évolution sémantique du mot "nouvelle"

Le rapprochement entre nouvelle historique et nouvelle littéraire, après avoir été suggéré par les protestations de véraci té des textes, est confirmé par une analyse philologique. L'explication qui suit est tirée de l'article de M. Dubuis, "Le mot nouvelle au Moyen Age", article qui reprend, pour en trouver confirmation à plus grande échelle, les éléments de l'analyse effectuée par M. Pérouse dans son chapitre sur Philippe de Vigneulles34 , où il arrivait aux

mêmes conclusions en se basant uniquement sur les

attestations des textes de l'écrivain messin35 •

"Nouvelle", avant de désigner la forme littéraire, désignait simplement au XIIème siècle un événement saisi dans son aspect original, dans sa conjoncture unique, inusitée. Il s'agissait avant tout de nouveauté au sens de "première occurrence d'un fait", mais on y associa peu à peu et implicitement la nouveauté temporelle, ce qui, dans une logique primaire toujours en quête de relations causales satisfaisantes, est la conséquence normale de la nouveauté factuelle. Très tôt dans l'usage, et conséquemment à cette acception première d'original i té et de "récence", le mot a servi à désigner d'une part les événements exceptionnels, en marge du quotidien et de la norme:", et d'autre part le récit de ces événements. Le second sens, avec ses deux significations, ayant fini par dominer, c'est de lui qu'est issue l'acception littéraire du mot en domaine français, acception qui s'est trouvée renforcée dans son utilisation par la traduction directe, au XIVème siècle, du terme boccacien novella.

Enea Balmas37 , en présentant sa version d'une semblable analyse sémantique, pousse pl us loin l'interprétation en tirant des conclusions théoriques sur la forme de la Nouvelle. M. Balmas voit dans la dualité sémantique du mot -événement et récit de l 'événement- la source d'un dynamisme, d'une instabilité de la signification. Une nouvelle n'est pas un fait "absolu", révolu, résolu, mais

(21)

bien un fait encore lié à une attente, une réaction, à un récit: un fait en deveniru . Cette instabilité, ce

mouvement, provoquant une tension dramatique (au sens d'action), constitue à toutes fins pratiques l'essence même du récit que nous appelons aussi nouvelle:

Il termine ["nouvelle" au sens d'événement, de

fait divers] sembra possedere [ ... ] un'intrinseca dinamicità, riposare su di una tensione, una fondamental e bipolarità [ ... ]: la real tà del già dato, che puè essere rassicurante 0 opaca, ma che comunque non lascia spazio all'imprevisto 0

all'imprevedibile, alla speranza di mutamento, al sogno e alla poesia, da un lato; e dall'altro lato ciè che mette in forse 0 in crisi il conosciuto 0 il conseguito, l'imprevisto con la sua portata incalcolabile, con le sue aperture, con il suc coefficiente di incognito, di mistero, di potenziale infinito.3 '

Cette "bipolarité intrinsèque" a chez les destinataires du réci t des conséquences psychologiques, dont une réaction

d'incrédulité, de rejet, qui est un effet de la

caractéristique principale de la nouvelle: son ambivalence, "un continuo oscillare tra verità e fantasia"4o.

[M]entre da un lato possiede una matrice

realistica (è la relazione di un fatto •.. ), da un altro lato si stempera in una dimensione di errore, di improbabilità e il suc contenuto conoscitivo è costantemente minacciato di vanificazione, sempre al limite di essere riassorbito nell'illusione. 41

La bipolarité en question est par ailleurs le reflet symétrique et inverse de l' opposi tion complémentaire entre

la forme littéraire récurrente, stable (au moins

synchroniquement), et l'événement dont elle se saisit, qui est élément de rupture, d'inattendu.

cette interprétation, dans la mesure où·le dynamisme du récit littéraire y est fondé sur celui du terme dans le langage, va dans le sens d'une origine -voire, d'une nécessité- anthropologique du genre, et permet la transition

(22)

entre les fondements pragmatique et théorique de notre recherche.

La théorie des Formes simples

Du point de vue structural. le rapprochement se trouve renforcé par la théorie des "Formes simpl es" de Joll es. La thèse de JolIes vise à montrer qu'à l'origine des différents types de récits que connait toute civilisation. se trouve pour chacun une forme première de récit simple qui en constitue la structure minimale et qui est le produit naturel du langage humain. Jolles isole neuf (ou dixU )

Formes simples. et montre que chacune est le fruit d'une "disposition mentale" distincte qui, agissant comme principe ordonnateur d'une partie de l'univers, s'actualise dans le langage et grâce à lui en appréhendant et en ordonnant les événements qui s' y produisent selon l'orientation de l'esprit qui la caractérise: volonté d'imitation, sentiment d'appartenance, désir de connaissance, absolue ou relative, certitude de l'expérience, évaluation des normes, totalité signifiante du réel, morale nafve et dissolution des codes de communication, orientations que l'hypothèse de Jolles veut universellement observables. Le résultat de cette opération de distinction, la Forme simple, devient un paradigme où se rangent les événements compatibles, et d'où ils puisent leur signification. Ce paradigme toutefois n'est pas rigide comme un moule: souple, il offre plutôt des repères, des balises autour desquelles la pensée s'articule, qui se solidifieront graduellement au cours du processus d'actualisation. et que JolIes appelle les "gestes verbaux" de la Forme. Lorsque les événements et leur enchaînement, leur articulation, se font très prec~s, lorsqu'ils se concrétisent en des cas, des exemples particuliers, la Forme simple devient une "Forme actualisée".3.

Parallèlement à ces deux stades de la Forme simple, un autre type de Forme naît quand l'esprit, par l'usage du langage, a recours aux procédés d'une Forme sans que les

(23)

éléments auxquels il l'applique, de force en quelque sorte,

en soient de véritables "gestes verbaux"". Au lieu que la Forme naisse de l'appropriation de l'objet de pensée par le

langage, c'est le langage qui impose à l'objet une Forme

déjà créée qui lui est extérieure. Dans ce cas, "un élément

qui n'appartient pas directement à [telle] disposition

mentale prend cependant la figure de sa forme et la Forme

simple et la Forme actuelle se doublent d'un analogue. d'une

Forme relative"45.

Enfin, à ces trois modes de la Forme s'en ajoute, pour

les Formes ouvertes, un quatrième. c'est la Forme dite

"savante", qui s'avère être l'achèvement artistique de la Forme simple ou relative: les Formes savantes en effet sont

des formes littéraires qui sont précisément

conditionnées par les choix et par les

interventions d'un individu, formes qui

présupposent une ultime et définitive fixation

dans le langage, formes qui ne sont plus le lieu

où quelque chose se cristallise et se crée dans le

langage, mais le lieu où la cohésion interne la

pl us haute est atteinte dans une acti vi

artistique non répétable. 46

Dans cette théorie, le lien explicite entre la Nouvelle comme Forme savante, littéraire, et les faits "véritablement

advenus" passe par la Forme dite du Mémorable. Le Mémorable

en effet est la Forme simple qu'emprunte la disposition

mentale "où l'effectif devient concret": où ce qui se

produit incidemment dans l'univers actuel se fige et prend

un sens precJ.s, unique; où un événement particulier est

perçu de telle sorte qu'il en vient à signifier, par le

biais des circonstances qui l'entourent et comme par

métonymie, le sens de l'événement général où il s'insère

comme partie. Pour reprendre la terminologie de JolIes,

c'est la Forme qui

s'efforce d'extraire, d'un événement général,

l'unicité d'un élément qui signifie, en tant que

tout, le sens de cet événement; à l'intérieur de

(24)

que, pris isolément, pris dans leurs relations et

pris dans leur totalité, ils soulignent le sens de

l'événement

par explication,

par discussion,

par

comparaison, par confrontation.

47

Insistons sur le fait que ce sont ces détails qui permettent

la

concrétion

du sens. Les

connotations

que véhicule cette

chaine d'événements pertinents (les circonstances), donnent

à l'événement supérieur le sens (ou l'un des sens possibles)

de l'événement général; elles en orientent l'interprétation.

Notons

surtout,

pour

ce

qui

nous

occupe,

que

ces

connotations "ne sont aucunement de nature littéraire, [ce]

ne sont pas non plus des idées, [elles] sont emprunté[e]s au

déroulement

concret

de

l'événement,

[elles]

sont

historiques"u:

l'effectif

est

par conséquent

le mode du

réel, du vrai, de l'historique par opposition au légendaire,

de la réalité par opposition à la fiction.

Hais JolIes lie aussi la Nouvelle aux Formes simples du

Cas

et

du

Conte.

Il

convient

donc

d'expliquer

ces

deux

Formes,

avant

de

nous

attarder

aux

problèmes

qu'elles

soulèvent. Il existe, nous dit JolIes,

une

disposition

mentale

qui

se

représente

l'univers comme un objet que l'on peut évaluer et

juger selon des normes; dans cette disposition, on

ne se borne pas à mesurer les actions selon des

normes, on va jusqu'à juger les normes entre elles

par ordre ascendant.

4 '

Cette disposition est celle qui préside

à

la formation du

Cas.

Lorsque

l'esprit

perçoit

les

événements

et

les

interprète

à

travers le filtre de cette Forme simple, il se

trouve

à

mesurer deux normes "par ordre ascendant",

c'est-à-dire selon une certaine échelle de valeurs.

Peut-on préciser ce que sont

ces normes,

et

définir

cette échelle de valeurs? Réduites à leur expression la plus

générale,

ce sont celles de l'action et de la sanction

5o •

Norme de l'action, c'est-à-dire prescription, interdiction,

obligation,

en

regard

de

laquelle

s'inscrit

le

geste en

cause, qui devient infraction

à

une norme. A ce comportement

(25)

anormal doit répondre une sanction qui, ayant force de loi, a pour fonction de rétablir l'équilibre mis en péril par l'infraction: punition surtout, récompense parfois, qui doit sanctionner le geste "perturbateur de norme". La sanction ne doi t pas être arbitraire. ell e est aussi subordonnée à une norme, relative à la première. c'est cette relation,

précisément. qui est soumise à évaluation. en accord avec la disposition mentale "qui pèse et qui soupèse". Il y a ainsi interrogation. (re)mise en question de la norme. de la loi qui garantit le respect de cette norme. Jolles utilise la métaphore de la balance pour montrer qu'il y a pesée. évaluation. appréciation d'un événement. non pour lui-même. mais en tant qu'objet d'une sanction dont la justesse. la proportion par rapport à une autre norme doivent. elles. être questionnées: ce sont les normes elles-mêmes qui prennent place dans les plateaux de la balance. qui sont mesurées l'une à l'autre.

A ce point précis sont atteintes les limites du Cas. dans les questions qu'il soulève. dans le doute qu'il insinue. Un pas de plus, une réponse à la question. un

jugement décidant du bien-fondé ou non de la tournure de l'événement. et c'en est fini de la Forme simple: c'est en effet une particularité de cette Forme. qu'elle "cesse d'être tout à fait [ellel-même quand une décision positive abolit le devoir de décision"sl. Pour Jolles. une fois ce pas franchi, une fois la décision prise. la Forme simple devient savante. devient Nouvelle.

Le Conte quant à lui est la Forme simple où agit la disposition mentale à la "morale nafve". la

morale

étant ici entendue comme éthique de l'événement plutôt que de l'action: il ne s'agit pas de décider. à la suite d'un événement perçu comme injuste. de l'action à prendre ou du geste à poser

en fonction

dudit événement. mais d'adopter une attitude nafve de

rejet

de l'événement -na!ve parce que primaire, en ce sens qu'elle contourne le problème au lieu de l'affronter- qui se traduit par une fuite dans un monde

(26)

où la réduction de l'écart entre une injustice perçue et la réparation souhaitée est certaine, consentie à l'avance par les règles du jeu. Ce monde. cet univers, c'est celui du Conte où, selon la formule consacrée. les bons sont toujours

récompensés et les méchants toujours punis.

Ces trois sources possibles pour la Nouvelle soulèvent deux questions. Dans un premier temps. si le Conte comme origine éventuelle ne pose pas de problème particulier dans ce travail, dans la mesure où son influence. clairement localisée ·::t aisément identifiable. a peu à voir avec une éventuelle source historique. il n'en va pas de même pour le Cas et le Mémorable. Ces deux Formes semblent avoir un fondement assuré dans le réel. que confirme le bref aperçu de la théorie paru dans la revue CommunicationsS2 où elles ont été respectivement -et pertinemment. il va sans dire-renommées "fait divers" et "information". A laquelle de ces deux Formes fait-on allusion quand. pour différencier la nouvelle de la Chronique de la nouvelle du recueil. on oppose la nouvelle comme fait divers à la nouvelle comme récit littéraireS3? Une définition précise du terme "fait

divers" s'impose.

Le concept ambigu da "fait divers"

Notons d'abord que la Chronique de Philippe de Vigneulles ne constitue pas un ensemble de récits ou d'anecdotes homogène: l es événements qui y sont consignés n'appartiennent pas tous à la même catégorie d'information. Les mêmes distinctions que celles relevées par Jean-Pierre SeguinS 4 dans le contenu des bull etins d'information qui circulaient à l'époque dans d'autres régions de la France peuvent être établies. dans l'ensemble. dans la matière traitée par le chroniqueur messin:

(27)

i- "vie nationale", ou ce qui concerne la politique générale des gouverneurs de la cité et les événements majeurs qui s'y sont déroulés, c'est-à-dire ceux qui ont eu et/ou ont encore des répercussions sur l'ensemble du peuple

messin:

ii- "guerres et paix", tant au plan local (Metz, la Lorraine) que national (la France);

iii- "faits divers", incluant les crimes, apparitions. merveilles et cataclysmes en tous genres;

auxquelles s'ajoutent

iv- des observations systématiques sur le climat. les récoltes. le coût de la vie. et

v- des données biographiques concernant "l'escripvain".

Georges Auclair, dans

Le

Mana

quotidien.

étudie la fonction des chroniques de faits divers. La première distinction qu'il établit rejoint en les interprétant les divisions déjà marquées par Seguin. Elle concerne le champ élargi de l'information, où l'on distingue

d'un côté les événements qui, relatifs à la

"res

publica" ,

entraînent un changement, si minime soit-il, dans le fonctionnement du corps social et qui. de ce fait, s' inscri vent -ou sont regardés comme devant s'inscrire- dans une continuité historique; de l'autre, des tai

ts

où 1es hommes n'entrent jamais qu'en tant qu' indi vidus ou personnes privées, et qui, du point de vue de

l'ensemble social, pourraient avoir été

différents, ne s'être pas produits. apparaissent comme

purement contingents;

qui. à

l'exception

du

décor et des accessoires,

auraient pu être d'hier comme d'aujourd'hui; que l'histoire en conséquence oublie ou abandonne à la chronique. Autrement dit encore, d'un côté, le significatif; de l'autre,

l '''insignifiant".55

De l"'insignifiant", du fait divers s'opposant à l'événement significatif, nous retiendrons d'abord la "pure contingence" historique. Nous remarquerons surtout qu'il se nourrit de "faits", c'est-à-dire d'occurrences attestées, réelles; et

(28)

d'hier comme

justement par

que ces faits qui "auraient pu être

d'aujourd'hui" sont d'hier ou d'aujourd'hui "[le] décor et [les] accessoires".

Dans un premier temps, cette conception du fait divers le fait correspondre au Mémorable de JolIes, qui résume les c<:.ractéristiques de cette Forme par le terme "crédible".

Dans un second temps, elle explique déjà que le lien se

fasse plutôt entre nouvelle littéraire et fait divers

qu'entre nouvelle et, par exemple, information politique:

question de format ou d'envergure. d'une part. la nouvelle

étant à prime abord le genre bref par excellence; et

question d'essence. d'autre part et surtout. dans la mesure

où elle semble privilégier -fondement de sa brièveté- le

moment et non la durée. La nécessité du lien reste encore à

montrer et à justifier (ce qui aidera à préciser ces

"questions de brièveté et d'essence" à peine effl eurées) •

mais la définition d'Auclair confirme la validité de

l' intui tion qui fait associer. spontanément. nouvell e et

fait divers. opposant du coup nouvelle et roman. instant et

continuité.

Mais appliquer le terme "faits divers". qui date du

XIXème siècle. à un corpus de la fin du XVème peut sembler

maladroit. voire arbitraire. Auclair abolit la difficulté.

lorsqu'il isole le concept universel de fait divers (le

fait-divers. syntagme au singulier paradoxal. qui est le

produit d'une certaine attitude de l'esprit devant une

espèce distincte d'événements ou de phénomènes) • des

exemples ponctuels. de format typographique précis et daté.

qui l'illustrent pour le XXème siècle occidental (divers

faits. divers récits d'événements de type particulier

récoltés dans les rubriques spécialisées des périodiques

(29)

le fait divers. quelle que soit la place à lui accordée par tell e ou telle société. défini tune certaine catégorie d'occurrences qui. en marge de

l'histoire. se retrouve dans toutes les

civilisations et. en tant que notion. possède donc une valeur transhistorique et transculturelle.~6·

Le sens habituel dans lequel nous percevons le terme. alors. n'est qu'une moderne spécification. liée à de nouvelles formes de communication au sein de la société. [ ... ]. d'un certain mode de perception des occurrences.57

Dès lors que l'intérêt de la thèse. pour les fins de ce travail. réside dans sa portée socio-anthropologique. et que par conséquent. l'usage qui sera fait du terme se réfère au concept plutôt qu'au genre journalistique éponyme.

l'expression peut être appliquée. sans anachronisme. à un corpus médiéval. Il est intéressant cependant de noter que. matériellement. les faits divers de la Chronique se présentent déjà sous une forme annonçant les faits divers à nous contemporains: ils sont souvent regroupés. formant une espèce de rubrique au sein des autres informations (l'éditeur ne s'y est pas trompé, qui chapeaute ces regroupements de titres tels "Evénements divers au pays de Metz"); et ils comportent la plupart du temps un titre (de

la main du chroniqueur, ajouté en marge du texte

concerné58 ), révélant le sujet de l'action et sa conséquence (la sanction, habituellement5 ' ) . L'importance accordée par Auclair aux titres des ~aits divers nous conduit à souligner leur présence révélatrice chez le chroniqueur messin. bien que l'analyse de leur contenu, secondaire en ce qui concerne

le présent travail, y restera superficielle.

Pour Auclair, le fait divers en tant que mode universel de perception des occurrences est le signe de l'actualisation de certaines dispositions de l ' espri t humain. Ces dispositions sont celles de la pensée naturelle, pensée qui fonctionne selon les principes de la logique binaire, élémentaire, où les propositions sont vraies ou

(30)

fausses, où les données que la pensée appréhende se rangent

dans la norme ou hors la norme. Au contraire de la pensée rationnelle ou scientifique qui attend seulement d'un effet

qu'il soit produit par une cause, la pensée naturelle

cherche de pl us une juste proportion entre la cause et

l'effet, une proportion conforme à la norme, une "relation

d'équivalence"'o. En conséquence, lorsque l'inégalité,

l'écart entre les éléments d'un énoncé est trop choquant, il se produit pour l'esprit une fonction dite "rare" entre ces

éléments, d'où naît le fait divers51 • En ce sens plus

précis, celui-ci se rattache donc au Cas dans la théorie des Formes simples.

Bien sûr, si la pensée naturelle est universelle, les

normes, elles, ne le sont pas. Cependant, les conditions qui

forgent une norme, et qui justifient en conséquence la

rareté d'une occurrence, peuvent être définies

théoriquement: la norme est établie par "l'imaginaire

collectif, dans la mesure où il se définit par le

vraisemblable social"'2. Pour qu'une occurrence devienne

notable, digne d'intérêt, il faut donc qu'elle rompe

l'homogénéité des stéréotypes, des croyances ou des valeurs qui constituent le vraisemblable social. Auclair précise que

ce sont les connotations associées aux termes de l'énoncé du

fait divers qui marquent l'écart entre l'occurrence et la

norme: le sens qui choque ne vient pas de l'articulation

première -l'action, le quoi?-, mais d'une ou de plusieurs

articulations secondes -les circonstances, qui? où? quand?

comment? pourquoi? avec l'aide de qui?-, qui demeurent le lieu de l'ultime détermination du sens'3. Ces articulations

secondes permettent d'établir une hiérarchie au sein même

des occurrences perçues comme des faits divers, puisque

c'est il leur niveau que se fait, lorsque besoin est, la

sélection des faits les plus exceptionnels parmi ceux qui

(31)

tout écart noté par rapport à une certaine

"normalité" statistique du pathologique et de l'aberrant ... , et d'une façon plus générale, toute

"circonstance" qui contredi t aux di verses et

fortes probabilités où le vraisemblable ... enferme

la "vie".'"

Les parallèles entre les positions d'Auclair et celles

de JolIes sont évidents. La difficulté tient dans ce que la

catégorie "fait divers" englobe chez Auclair ce que Jolles

avait soigneusement distingué. Mais la distinction

qU'Auclair établit (sans la nommer) au sein même des faits divers entre le "beau" (le mot est de lui) fait divers et le

fait divers "banal" reflète tout à fait la distinction

essentielle, qui n'en est pas une de degré, entre le Cas et

le Mémorable. Ainsi. si le fait divers "banal" accentue des

possibles sociaux réalisés pour confirmer leur validité

signifiante, le "beau" fait divers se distingue par les

interrogations (les inquiétudes) qu'il soulève, par la

rupture qu'il consomme avec le vraisemblable social. Et

alors que celui-là est vrai par nature, celui-ci, à la

limite, peut se satisfaire de n'être que possible: sa

fonction ne dépend pas de son actualisation effective.

Cette conception nuancée qui distingue l'information

secondaire et le fait divers, le Mémorable et le Cas,

Philippe de Vigneulles la partage explicitement:

Or est il ainssy que en mon temps, en diverse

année et en diverse saison, j'ay veu faire pour

plusieurs raison diverse justice, et essécuter

diverse parsonne, tant homme que femme, pour

diverse cas: desquelles je n'en dis riens pour

cause de briesté, jay ce que plusieurs en ayent

escript. Mais à moy ne plaît de mestre tel chose

en mon livre; et me semble une chose de petitte

vall ue de tel follie mettre en cronicques: car

chose semblable et perreille avient tous les

jours, de pouvre lairon ou aultre malfaicteur qui desroube, puis sont pandus. Et pour ce" n'en fais

compte d'en rien mettre, se n'est doncquez pour

aulcuns grant cas lesquelles n'aviennent pas

souvant, ou sinon doncque qu' il Y aye aul cune

chose à esmerveillier et non accoustumée de veoir ou ouyr.6S

(32)

Comme on constate aisément par ailleurs que cette intention

du chroniqueur ne se réalise pas et que sa Chronique recense

autant de faits divers "banals" que de "beaux" faits divers,

comme tous deux sont par ailleurs des sources possibles de

la

nouvelle,

j'entendrai

désormais

le

terme

dans

cette

acception élargie qui ne distingue pas le Cas/fait divers du

Mémorable/information. Quand il sera nécessaire de maintenir

cette distinction, j'utiliserai la terminologie originale de

JolIes.

Le

premier

élagage de

la

Chroniqué>'

produit

un

corpus de quelques

200

faits divers, incluant les accidents

et

les

prodiges,

qui

servira à

la

première étape

de

la

recherche:

si

les nouvelles du recueil

sont effectivement

des amplifications des occurrences de la Chronique, c'est de

cet ensemble qu'elles proviennent.

Le recueil de nouvelles de Philippe de Vigneulles a été

édité pour la première fois en

1972;

avant cette date,

i l

n'avait

jamais été imprimé.

Il nous est parvenu grâce à un

manuscrit unique et très mutilé'7:

des cent dix nouvelles

que

contenait

le

manuscrit

original,

quatorze

manquent

complètement".

Quarante

et

une

sont

incomplètes

à

des

degrés divers, de quelques lignes partiellement mutilées à

quelques

lignes

restantes.

De

celles-ci,

cinq

sont

inutilisables pour notre propos,

quatre parce que rien ne

subsiste qui puisse donner un sens narratif au bout de texte

arrivé jusqu'à nous"

et une parce qu'on n'en a conservé que

le titre7o • Enfin,

cinquante-cinq sont complètes, du titre

au point final (sauf les nouvelles

87

et

110,

auxquelles il

ne manque que le titre). Par ailleurs, plusieurs des

quatre-vingt-onze nouvelles utilisables se subdivisent en récits

autonomes,

certaines nouvelles étant

en fait

des collages

d'anecdotes structuralement indépendantes

71 •

Nous obtenons,

après

ces

subdivisions,

un premier

corpus

de

cent vingt

récits .

(33)

2. Nature du rapprochement

Le problème des sources historiques

A partir de ces deux premiers groupes de récits a été

effectuée la première partie du travail.

qui consistait

à

repérer dans la Chronique des occurrences dont les nouvelles

du recueil seraient des amplifications, afin d'accréditer ou

de

réfuter

formellement,

du moins

pour

la

Nouvelle

des

origines,

l'hypothèse

de

la

filiation

fondée

sur

le

paradigme formaliste.

Or, première constatation: aucun fait rapporté dans la

Chronique n'est

la

source directe

d'un récit

littéraire.

Malgré des ressemblances évidentes entre plusieurs récits.

malgré

des

rapprochements

thématiques,

aucun

réseau

de

filiation

(j'insiste

sur

le

sens

fort

de

ce

terme)

indubitable n'a pu être mis

à

jour entre les deux ouvrages.

Le rapport qui existe bel et bien entre eux ne repose donc

pas sur une simple amplification.

Evitons

en revanche de

conclure trop tôt

à

l'invalidité de l'hypothèse formaliste:

que

le

matériau brut

du recueil

ne

provienne pas

de

la

Chronique ne signifie pas nécessairement qu'il ne provienne

pas de faits vécus (et pas non plus que la source en soit

purement

littéraire,

d'ailleurs).

Nous

pouvons

encore

postuler

une

source

parallèle

à

celle

de

la

Chronique,

puisque le premier résultat n'élimine pas la possibilité que

les

nouvelles

du

recueil

soient

des

Formes

savantes

de

Formes simples dont nous aurions perdu toute trace autre que

le recueil, précisément.

En

effet, selon le point de vue de G.-A. Pérouse

72 ,

les

Cent

Nouvelles

nouvelles

seraient

"les

restes"

de

la

Cbronique, la toute petite histoire, les menus événements de

l'époque

de

Philippe

de

Vigneulles,

par

opposition

à

l'Histoire,

grande

(l'é".1énement

qui

fait

date)

ou petite

(les faits divers).

Les anecdotes

à

la base des nouvelles

racontées par Vigneulles auraient été réellement vécues dans

son entourage plus ou moins immédiat, et sa connaissance en

(34)

serai t

directe;

mais

comme ell es n'étaient

pas

dignes

de

figurer parmi les grands événements qui marquent, au-delà de

la vie de quelques individus,

la vie d'un peuple,

il

les

aurait rassemblées dans un ouvrage à part.

Bien que cette

hypothèse

soit

valide

pour

plusieurs

anecdotes,

voire

probable dans le cas de quelques nouvelles pour lesquelles

Li vingston

n'a

pas

trouvé

de

source,

littéraire

ou

folklorique,

la très grande majori té

~'inscri

t,

rappelons-le,

dans une tradition de motifs littéraires qui n'étaient

pas inconnus du drappier, que sa source supposée en ait été

orale ou écrite.

Mais plus encore, en révélant l'absence de recoupement

de récits particuliers, la première analyse a mis en relief

des choix d'auteur paradoxaux. D'un côté, nous l'avons vu,

des nouvelles n'ayant pas de source connue dans les thèmes

du

folklore

et

constituant,

selon

les

conclusions

des

spécialistes,

Livingston

en

tête,

une

petite

banque

de

matériel original, la

Chronique ne conserve pas trace -ou,

à

la limite, une trace trop lointaine pour être concluante. De

l'autre côté, de nombreux récits de la

Chronique

73

sont

à

vue

de

nez

des

nouvelles

au

sens

littéraire,

ils

en

présentent

en

tous

cas

et

la

forme

et

les

caractères

habituels;

pourtant,

ils

ne

se

retrouvent

pas

dans

le

recueil. Du coup, une fois confrontées pour chaque anecdote

les

probabilités

d'actualisation

effective

ou

d'emprunt

déguisé,

la pertinence de la question de l'historicité des

sources se dissout d'elle-même.

En revanche, le fait même que notre recherche ne nous

permette pas de conclure

à

une source historique certaine

des récits littéraires soulève avec encore plus d'acuité les

questions qui étaient

à

l'origine de ce travail. Pourquoi,

si les nouvelles du recueil sont vraies, ne figurent-elles

nulle

part

dans

la

Ch~onique?

Si

elles

sont

fausses,

pourquoi essayer de les faire passer pour vraies? Dans le

premier

cas,

invoquer

leur

"manque

de

mérite"

est

insuffisant: encore faudrait-il expliquer

en quoi elles "ne

(35)

méritent tout de même pas d'être enregistrées avec la "grande histoire""74. Dans le second. plutôt que de montrer comment l'auteur s'y prend. il s'agit de répondre vraiment à la question:

pourquoi

le fait-il? En définitive. il s'agit maintenant de comprendre la gémellité des corpus. le rapport

horizontal qui les lie l'un à l'autre.

Hypothèse des faux-jumeaux: recueil et Formes relatives

Ce rapport horizontal se conçoit en termes de Formes relatives. Nous avons vu déjà ce qu'étaient ces Formes relatives: des formes dérivées. qui empruntent à la Forme simple sa configuration. son apparence. sans émerger d'une disposition mentale naturelle. essentielle. D'une part. le réci t d'une occurrence As' inscri vant contre un interdit codifié est une Forme simple du Cas; si cet interdit n'est pas codifié. mais que A est présentée (donc perçue. par extrapolation) comme une infraction. le récit est une Forme relative. Voilà précisément l'endroit où le Cas de Jolles s'ouvre à l'''imaginaire collectif". au "vraisemblable social" d'Auclair. et où devient difficile à manier le concept de Forme relative. qui ne semble plus s'appliquer qu'à une conception personnelle. individuelle des normes.

D'autre part. si cet te même occurrence A est

actualisée. si son récit rapporte un événement réellement advenu. c'est une Forme simple du Mémorable. Si l'occurrence reste virtuell e tout en étant présentée collU1le réell e. le récit en est une Forme relative. Mais nous avons vu déjà. en d'autres termes. l'impossibilité dans le recueil de trancher quant à cette actualisation. On ne peut s'attarder qu'à son aspect

crédible.

Afin de cerner avec précision le lien significatif qui lie désormais le littéraire au réel (et non plus à l'historique). il faut commencer par définir la Nouvelle: avant de chercher à quoi elle ressemble. il faut savoir en effet ce qu'elle est.

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