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Les lois provinciales sur les référendums constitutionnels obligatoires : un outil juridiquement possible, mais dont les effets compliquent la modification de la constitution canadienne

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(1)

Les lois provinciales sur les référendums

constitutionnels obligatoires

Un outil juridiquement possible, mais dont les effets compliquent

la modification de la Constitution canadienne

Mémoire

Stéphanie Boutin

Maîtrise en droit

Maître en droit (L.L.M.)

Québec, Canada

© Stéphanie Boutin, 2015

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RÉSUMÉ

L’objet de ce mémoire est de démontrer que les lois de l’Alberta et de la Colombie-Britannique rendant la tenue d’un référendum obligatoire avant l’adoption d’une modification constitutionnelle par une province ne contreviennent pas aux procédures formelles de modification prévues à la Constitution. Le référendum est compatible avec la partie V de la Loi constitutionnelle de 1982 et avec les exigences du fédéralisme et de la démocratie parlementaire. En plus d’être conforme à la partie V de la Loi constitutionnelle de 1982, les lois exigeant un référendum avant l’adoption d’une résolution modifiant la Constitution ont l’avantage de démocratiser l’exercice du pouvoir constituant. Toutefois, de par la manière dont le référendum constitutionnel a été légalement introduit, celui-ci ajoute une dose considérable de rigidité au processus de modification constitutionnelle en venant y ajouter une étape supplémentaire à satisfaire.

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ABSTRACT

The purpose of this paper is to demonstrate that statutes of Alberta and British Columbia requiring the holding of an obligatory referendum before the adoption of a constitutional amendment by a province do not contravene to formal procedures designed by the Constitution. The referendum is consistent with part V of the 1982 Constitutional Act and with requirements of federalism and parliamentary democracy. In addition to be consistent with part V of the 1982 Constitutional Act, statutes requiring a referendum before the adoption of a resolution modifying the Constitution have the benefit to democratize the exercice of the constituent power. However, by the manner in which the constitutional referendum had been legally introduced, this one adds a serious amount of rigidity to the constitutional amending procedure by adding one more step to fulfil.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ... iii

ABSTRACT ... v

TABLE DES MATIÈRES ... vii

LISTE DES ABBRÉVIATIONS ... ix

REMERCIEMENTS ... xiii

INTRODUCTION ... 1

Les référendums constitutionnels obligatoires: amélioration ou complication de la procédure de modification constitutionnelle? ... 1

L’hypothèse: la compatibilité des lois provinciales sur les référendums constitutionnels obligatoires avec la Constitution, le fédéralisme et la démocratie parlementaire ... 16

La méthodologie: le cumul des sources et des méthodes interprétatives ... 17

1. LE RÉFÉRENDUM CONSTITUTIONNEL À TRAVERS L’HISTOIRE CANADIENNE ... 25

1.1. La place du référendum constitutionnel dans les différents projets constitutionnels... 25

Les propositions issues des débats préconfédératifs ... 25

Les propositions issues des débats pré rapatriement ... 29

La formule d’amendement de la Loi constitutionnelle de 1982 ... 41

1.2. La pratique référendaire constitutionnelle en droit canadien ... 42

Les référendums pancanadiens ... 42

Les référendums constitutionnels provinciaux ... 48

Les référendums constitutionnels autochtones ... 61

Le poids des précédents ... 65

2. LA VALIDITÉ DES LOIS PROVINCIALES RENDANT OBLIGATOIRE LE RECOURS AU RÉFÉRENDUM CONSTITUTIONNEL ... 67

2. 1. Les arguments en faveur de la validité constitutionnelle du référendum constitutionnel obligatoire 68 2.1.1. Le pouvoir de la législature de modifier sa propre Constitution : les composantes de la législature provinciale ... 68

- Les balises du pouvoir de modifier sa propre Constitution ... 69

- La doctrine du caractère véritable ... 73

2. 1.2. La souveraineté du Parlement et l’aménagement de celle-ci ... 78

- Le référendum constitutionnel obligatoire : une limite de forme ... 79

- Le Parlement peut déléguer une partie de ses pouvoirs au peuple ... 82

2.1.3. La complémentarité des procédures de modification para-constitutionnelles ... 83

- Le référendum constitutionnel obligatoire n’est pas prévu, mais n’est pas interdit par la Constitution ... 83

- Les lois rendant la tenue d’un référendum obligatoire complètent le texte de la Constitution sans le contredire ... 84

- Le fédéralisme et la démocratie : des principes sous-jacents qui justifient le recours au référendum ... 85

2.1.4. Le caractère évolutif de la Constitution, cet arbre vivant ... 90

(8)

L’interdiction de créer un pouvoir concurrent ou de renoncer à la faculté d’approuver ou de rejeter une

modification constitutionnelle ... 93

Le caractère obligatoire du référendum affecte la charge du lieutenant-gouverneur ... 94

L’intention du pouvoir constituant et le principe de la primauté de la Constitution ... 96

Le Parlement ne peut pas se lier pour l’avenir : le problème des effets juridiques du référendum dans la législation référendaire ... 97

La violation des principes du gouvernement responsable et du gouvernement par représentation ... 101

La jurisprudence américaine sur l’interdiction du référendum dans le processus de modification de la Constitution fédérale ... 106

3. LES FINALITÉS ET LES EFFETS DU RÉFÉRENDUM CONSTITUTIONNEL OBLIGATOIRE ... 119

3.1. Les finalités avouées et inavouées du recours au référendum constitutionnel ... 119

La démocratisation de l’exercice du pouvoir constituant et le rôle éducatif du référendum : une plus grande participation des citoyens à la vie politique ... 119

Une légitimité accrue des décisions relatives à la modification des normes les plus fondamentales ... 124

Le référendum comme moyen de faire pression sur les autres gouvernements et de rapprocher les positions du fédéral et des provinces ... 125

La mise en œuvre de l’obligation de négocier les changements voulus par une majorité claire de la population ... 129

3.2. Les effets « pervers » du référendum constitutionnel obligatoire ... 136

Une « étape » supplémentaire à une réforme constitutionnelle ... 136

Un seuil de majorité accru qui peut nuire à la révision constitutionnelle ... 138

La conjugaison du référendum et des autres exigences relatives à la modification de la Constitution ... 147

La précarité du référendum ... 151

Une forme de déresponsabilisation des acteurs politiques ... 153

CONCLUSION... 157

BIBLIOGRAPHIE ... 163

TABLE DE LA LÉGISLATION ... 163

Textes fédéraux (Canada) ... 163

Textes provinciaux et territoriaux (Canada) ... 163

Texte constitutionnel (États-Unis) ... 164

Texte constitutionnel (Australie) ... 164

Texte constitutionnel (Royaume-Uni) ... 164

Travaux parlementaires provinciaux (Canada) ... 164

TABLE DES JUGEMENTS... 165

Jurisprudence canadienne ... 165

Jurisprudence américaine ... 167

Jurisprudence australienne ... 167

Jurisprudence britannique ... 167

DOCTRINE ... 168

Monographies et ouvrages collectifs ... 168

Articles de revues et études d’ouvrages collectifs ... 171

Documents gouvernementaux... 177

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LISTE DES ABBRÉVIATIONS

A. A.C Alta L. Rev. Ark. Sup. Ct Aust. L. J. B.C. Cal. Rptr. Cal. Sup. Ct. C.A.T.-N. Circ. Coll. CONST. dir. D. Div. D.L.R. éd. F. F. Supp. H.L. Jul

American Law Reports Law Reports, Appeal Cases Alberta Law Review

Arkansas Supreme Court Australian Law Journal British Columbia

West ‘s California Reporter California Supreme Court Cour d’appel de Terre-Neuve Circuit Collection Constitution Direction District Division

Dominion Law Reports Édition Federal Reporter Federal Supplement House of Lords July L.C. Lois du Canada lég. Législature L.N.B. L.O. L.Q. Lois du Nouveau-Brunswick Lois de l’Ontario Lois du Québec L.R.C. L.R.M.

Lois révisées du Canada Lois révisées du Manitoba

(10)

L.R.Q. L.R.Y. L.T.N.-O. M.J. M.S. Man. Ct. Q. B. Mont. N.J.C.L. Nov N.Y.S. N.Y. Sup. Ct. Oct. Ont. O.H.L. J.

Lois révisées du Québec Lois révisées du Yukon

Lois des Territoires du Nord-Ouest Manitoba Judgments

Manitoba Statutes

Manitoba Court of Queen’s Bench Montana

National Journal of Constitutional Law November

New York Supplement New York Supreme Court October

Ontario

Osgoode Hall Law Journal R.C.S.

R.D. McGill R.D.U.S. R.E.A.F. rev.

Rev. Const. Stud. R.L.R.Q.

R.Q.D.C.

Recueil des arrêts de la Cour suprême du Canada Revue de Droit de McGill

Revue de Droit de l’Université de Sherbrooke Revista d'Estudis Autonòmics i Federals Revue

Review of Constitutional Studies

Règlements et lois refondues du Québec Revue québécoise de droit constitutionnel

R.S.A. Revised Statutes of Alberta

R.S.B.C. R.S.P.E.I. R.-U.

Revised Statutes of British Columbia Revised Statutes of Prince Edward Island Royaume-Uni

S.B.C. Statutes of British Columbia

sess. S.S. S.C.L. R. S.W. Session Statutes of Saskatchewan Supreme Court Law Review South Western Reporter

(11)

U.S. U.S.C.A. U.S. Distr.Ct.

U. Toronto Fac. L. Rev. U.W.O.L.Rev.

Vol. W.W.R.

United States Supreme Court Reports United States Court of Appeal

United States District Court

University of Toronto Faculty of Law Review University of Western Ontario Law Review Volume

(12)
(13)

REMERCIEMENTS

J’aimerais prendre le temps de remercier mon directeur, le professeur Patrick Taillon, pour son soutien et les précieux commentaires qu’il m’a prodigués tout au long de mon cheminement. Je souhaite également remercier Mme Catherine Mathieu et Me Alexis Milette qui m’ont généreusement fait bénéficier du fruit de leurs recherches ou de leurs réflexions. Un merci particulier à la professeure Geneviève Motard qui, par ses judicieux conseils, m’a permis d’améliorer l’ossature de ce mémoire et d’en solidifier les bases. J’aimerais également remercier le professeur Henri Brun qui a accepté d’évaluer mon mémoire. Ce fut un plaisir et un honneur d’avoir pu bénéficier de ses observations. Je tiens aussi à dire un énorme merci à mon conjoint, ma famille et mes amis pour m’avoir épaulée chacun à leur façon au cours des dernières années.

Je remercie également le Conseil de recherche en sciences humaines du Canada, la Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires, la Faculté de droit de l’Université Laval

(14)
(15)

INTRODUCTION

Les référendums constitutionnels obligatoires: amélioration ou complication de la procédure de modification constitutionnelle?

[La Constitution] définit la structure de l'État, établit les règles de fonctionnement des institutions politiques et régit les relations entre les autorités politiques et les citoyens et les groupes qui composent la société. En spécifiant l'étendue du pouvoir politique, la Constitution vient en fixer les limites. Elle fixe les règles que doivent respecter les autorités politiques, en plus de déterminer l'organisation du gouvernement ou, plus précisément, l'organisation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire.1

La rigidité de la Constitution est vitale pour « assurer le maintien et la continuité des institutions politiques »2. Tout en étant rigide, la Constitution doit également être suffisamment souple pour

s’adapter aux nouvelles réalités3. C’est en partie pour cette raison que la Constitution a été comparée

à un « arbre-vivant » capable de grandir à l’intérieur de ses limites naturelles4.

Bien que la Constitution soit d’une très grande importance, sa procédure de modification est encore plus fondamentale, car c’est de la souplesse de cette dernière dont dépend son évolution5.

Cependant, dans un État comme le Canada, « le régionalisme même, qui rend le fédéralisme nécessaire, favorise une formule de modification assez rigide pour rassurer les gouvernements provinciaux quant à leurs attributions constitutionnelles »6. Après tout, l’exercice du pouvoir

constituant dans un État fédéral repose logiquement sur la participation des membres de la fédération que sont le fédéral et les provinces.

Outre la question du délicat équilibre entre souplesse et rigidité de la Constitution, la procédure de modification constitutionnelle a aussi pour objet d’asseoir la légitimité de la Constitution. Si la légitimité des textes constitutionnels peut s’analyser à partir de plusieurs principes (fédéralisme,

1 Réjean PELLETIER et Manon TREMBLAY, Le parlementarisme canadien, 4e éd. rev. et augmentée, Québec,

Presses de l'Université Laval, 2009, p. 43.

2 Benoît PELLETIER, La modification constitutionnelle au Canada, Scarborough, Ont., Carswell, 1996, p. 92. 3 Henri BRUN, Guy TREMBLAY et Eugénie BROUILLET, Droit constitutionnel, 5e éd., Cowansville, Éditions

Yvon Blais, 2008, p. 200; COMMISSION SUR L'UNITÉ CANADIENNE, Se retrouver: observations et

recommandations (rapport Pepin-Robarts), Ottawa, APPROVISIONNEMENTS ET SERVICES CANADA, 1979,

p. 109-110.

4 Edwards c. A.-G. Canada, [1930] A.C. 124, 136-137.

5 B. PELLETIER, La modification constitutionnelle au Canada, préc., note 2, p. 92. 6 COMMISSION SUR L'UNITÉ CANADIENNE, préc., note 3, p. 109-110.

(16)

primauté du droit, continuité historique), il n’empêche que le consentement du plus grand nombre au texte à l’occasion d’un référendum apparaît comme l’expression directe de la légitimité démocratique. Or, dans le cas du Canada, aucune des lois constitutionnelles en vigueur n’a fait l’objet d’un scrutin référendaire.

C’est bien en toute connaissance de cause que les responsables politiques canadiens ont écarté la participation directe des électeurs par référendum constitutionnel lors de l’adoption des principales lois constitutionnelles qui composent la Constitution du Canada.

En 1866, des membres du Parlement du Canada-Est (Québec) ont fait remarquer que le peuple ne leur avait pas donné le mandat d’entrer dans la Confédération7. Malgré cela, le peuple n’a pas été

directement consulté par référendum à l’occasion de l’adoption de la première Constitution du Canada l’année suivante8.

Pour des raisons liées à l’appartenance du Canada à l’Empire britannique, la Loi constitutionnelle de

18679 ne prévoyait pas de procédure de modification. Aucune disposition n’autorisait ni n’interdisait

le référendum. La Constitution était amendée par les autorités britanniques à la demande du Canada après consultation des provinces lorsque la modification les intéressait10.

7 Patrick J. BOYER, Direct democracy in Canada : the history and future of referendums, Toronto, Dundurn

Press, 1992, p. 14.

8 Marc CHEVRIER, «L'idée républicaine au Québec et au Canada français - les avatars d'une tradition cachée»

dans BAQUIAST, P. et E. DUPUY (dir.), L'idée républicaine dans le monde - XVIIIe/XXIe siècles, vol. 2, Paris, L'Harmattan, 2007, p. 46-48; Guy LAFOREST, Trudeau et la fin d'un rêve canadien, Sillery, Éditions du Septentrion, 1992, p. 74; Barry L. STRAYER, Canada's constitutional revolution, Edmonton, Edmonton : University of Alberta Press, 2013, p. 33; Patrick TAILLON, Le référendum expression directe de la souveraineté

du peuple? : essai critique sur la rationalisation de l'expression référendaire en droit comparé, Paris, Dalloz,

2012, p. 386.

9 Loi constitutionnelle de 1867 (R.-U.), 30&31 Victoria 1867, c. 3.

10 Renvoi relatif à la réforme du Sénat, 2014 CSC 32; par. 29; Renvoi: Compétence du Parlement relativement à

la Chambre haute, [1980] R.C.S. 54, 63-64; Frédéric BASTIEN, La bataille de Londres : dessous, secrets et coulisses du rapatriement constitutionnel, Montréal, Boréal, 2013, p. 25; Gérald A. BEAUDOIN, et Pierre

THIBAULT, La Constitution du Canada : institutions, partage des pouvoirs, droits et libertés, Charte canadienne

des droits et libertés, 3e éd., Montréal, Wilson & Lafleur, 2004, p. 270, 282; Gérald A. BEAUDOIN, «Les

aspects constitutionnels du référendum», (1977) 8-2 Études internationales 197, p. 197-198; Gérald A. BEAUDOIN, «La démocratie et les possibilités d'amendement constitutionnel au Canada, de nos jours», (2002) Nov. 2002 Canadian Issues 4; Stephen BROOKS, Canadian democracy, 7th ed, Don Mills, Ont, Oxford University Press Canada, 2012, p. 151-152; J. CAMERON, «To Amend the Process of Amendment» dans Gérald A. BEAUDOIN, Joseph E. MAGNET, Benoît PELLETIER ET J.T. ROBERTSON (dir.), Le fédéralisme de

demain: réformes essentielles, Montréal, Wilson & Lafleur, 1998, p. 315, à la page 320; COMITÉ MIXTE

SPÉCIAL DU SÉNAT ET DE LA CHAMBRE DES COMMUNES SUR LE PROCESSUS DE LA MODIFICATION DE LA CONSTITUTION DU CANADA, Rapport Beaudoin Edwards,Ottawa, SERVICES M.D.A.E.,1991, p. 4;

(17)

Malgré le fait que le Canada ait acquis l’essentiel de son indépendance en 193111, il est demeuré

longtemps sans procédure de modification constitutionnelle, car le fédéral et les provinces n’arrivaient pas à s’entendre sur une formule d’amendement. Par exception, les responsables politiques canadiens ont demandé au Parlement britannique de conserver temporairement son pouvoir de modification constitutionnelle12.

Entre 1867 et 1982, la Loi constitutionnelle de 1867 a fait l’objet de près d’une trentaine de modifications13. Aucune d’entre elles n’a fait l’objet d’un référendum, à l’exception de l’adhésion de

Terre-Neuve à la fédération canadienne14. En 1949, le Parlement fédéral s’est vu confier un pouvoir

limité de modification constitutionnelle15.

Entre 1931 et 1982, le fédéral et les provinces ont tenté de trouver une formule de modification à la Constitution canadienne. Leur dizaine de tentatives se sont cependant révélées infructueuses

Maurice CROISAT, Frank PETITEVILLE et Jean TOURNON, Le Canada, d'un référendum à l'autre. Les

relations politiques entre le Canada et le Québec, 1980-1992, Talence, Association française d'études

canadiennes, 1992, p. 58; Mary DAWSON, «From the backroom to the front line : making constitutional history or encounters with the Constitution patriation : Patriation, Meech Lake, and Charlottetown », (2011) 57 McGill

Law Journal 955, p. 957; Jacques-Yvan MORIN et José WOEHRLING, Les constitutions du Canada et du Québec : du Régime français à nos jours, 2e éd., Montréal, Éd. Thémis, 1994, p. 43; Peter C. NEWMAN,

«Defining the Constitution of Canada since 1982: the scope of the legislative powers of constitutional amendment under sections 44 and 45 of the Constitution Act 1982», (2003) 22 S.C.L.R. 423, p. 436; Lorraine PILETTE, La Constitution canadienne, Montréal, Boréal, 1993, p. 37; Peter H. RUSSELL, Constitutional

odyssey: can Canadians become a sovereign people?, 3e éd., Toronto, University of Toronto Press, 2004,

p. 26-27; David E. SMITH, Federalism and the constitution of Canada, Toronto, University of Toronto Press, 2010, p. 42; B. L. STRAYER, préc., note 8, p. 34.

11 Statut de Westminster, 1931 (R-U), 22 George V, c. 4.

12 Id., art. 7; F. BASTIEN, préc., note 10, p. 25-27; G. A. BEAUDOIN, et P. THIBAULT, préc., note 10, p. 280;

Henri BRUN, Les institutions démocratiques du Québec et du Canada, Montréal, Wilson & Lafleur, 2013, p. 6; J.-Y. MORIN. et J. WOEHRLING, préc., note 10, p. 395, 398; B. L. STRAYER, préc., note 8, p. 3.

13 Pour l’énumération de ces textes, voir Annexe, Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le

Canada (R.-U.) 1982, c. 11.

14 G.A. BEAUDOIN, «Les aspects constitutionnels du référendum», préc., note 10, p. 204; G.A. BEAUDOIN,«La

démocratie et les possibilités d'amendement constitutionnel au Canada, de nos jours», préc., note 10; P. J. BOYER, Direct democracy in Canada : the history and future of referendums, préc., note 7, p. 119-122; G. A. BEAUDOIN et P. THIBAULT, préc., note 10, p. 151; COMITÉ MIXTE SPÉCIAL DU SÉNAT ET DE LA CHAMBRE DES COMMUNES SUR LE PROCESSUS DE LA MODIFICATION DE LA CONSTITUTION DU CANADA, préc., note 10, p. 36; P. H. RUSSELL, préc., note 10, p. 59.

15 P. C. NEWMAN, «Defining the Constitution of Canada since 1982: the scope of the legislative powers of

constitutional amendment under sections 44 and 45 of the Constitution Act 1982», préc., note 10, p. 437. Ce pouvoir de modification était prévu au par. 91(1) de la Loi constitutionnelle de 1867. Il s’agit de l’ancêtre de l’article 44 de la Loi constitutionnelle de 1982.

(18)

comme le dénombre l’auteur James Ross Hurley16. L’étude de ces propositions permet de constater

que le souci de donner à cette future constitution toute sa légitimité s’est à plusieurs reprises traduit par l’inclusion du référendum constitutionnel au sein de différentes propositions de formules de modification constitutionnelle, sans que ces propositions ne soient retenues au final17.

L’étude des textes ayant mené à l’adoption de la partie V de la Loi constitutionnelle de 198218 révèle

que même s’il a été en définitive exclu de la procédure de modification constitutionnelle, le référendum constitutionnel a été initialement envisagé par le Premier Ministre du Canada, Pierre Elliot Trudeau. Il a toutefois été sciemment écarté19, notamment en raison de la position réfractaire

des provinces20 à introduire le référendum à la Constitution21. En 1980-1982, le référendum était

envisagé, du point de vue fédéral, comme une solution de rechange au consentement des provinces à une modification constitutionnelle22.

Finalement, la formule d’amendement adoptée officiellement à l’occasion du rapatriement ne prévoit ni n’interdit le recours au référendum. Elle se compose de cinq procédures que l’on regroupe en deux

16 James Ross HURLEY et CANADA. PRIVY COUNCIL OFFICE. POLICY DEVELOPMENT AND

CONSTITUTIONAL AFFAIRS, La modification de la Constitution du Canada: historique, processus, problèmes

et perspectives d'avenir, Ottawa, Canada Communication Group, 1996, p. 27-63.

Voir aussi Renvoi: Résolution pour modifier la Constitution, [1981] 1 R.C.S. 753, p. 904;G.A. BEAUDOIN, «La démocratie et les possibilités d'amendement constitutionnel au Canada, de nos jours», préc., note 10;COMITÉ MIXTE SPÉCIAL DU SÉNAT ET DE LA CHAMBRE DES COMMUNES SUR LE PROCESSUS DE LA MODIFICATION DE LA CONSTITUTION DU CANADA, préc., note 10, p. 4; M. CROISAT, F. PETITEVILLE et J. TOURNON, préc., note 10 , p. 54; M. DAWSON, préc., note 10, p. 957; Peter W. HOGG, «The Theory and Practice of Constitutional Reform», (1981) XIX Alberta Law Review 335, p. 347; J.-Y. MORIN et J. WOEHRLING, préc., note 10, p. 430.

17 J. R. HURLEY, préc., note 16, p. 51, 57, 59, 61, 64-65, 223-224, 236-239, 242, 256-261; André TREMBLAY, La

réforme de la constitution au Canada, Montréal, Éditions Thémis, 1995, p. 56, 65.

18 Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.) 1982, c. 11, art. 38-49. 19 « Textes législatifs relatifs à la Loi constitutionnelle de 1982 », (1985) R.D. McGill 753, p. 767-768; Sébastien

GRAMMOND, « Une province peut-elle subordonner l'approbation d'une modification constitutionnelle à la tenue d'un référendum ? », (1997) 38-3 Les Cahiers de droit, 569, p. 584.

20 Stephen A.SCOTT, «Pussycat, Pussycat or Patriation and the New Constitutional Amendment Processes»,

(1982) 20 U. W. Ontario L. Review 247, p. 258-259; Duff CONACHER, «Power to the People: Initiative, Referendum, Recall and the Possibility of Popular Sovereignty in Canada», (1991) 49 U. Toronto Fac. L.

Review. 174, p. 199; Patrick MONAHAN, Constitutional law, 3e éd., Toronto, Irwin Law, 2006, p. 186.

21 Patrick J. BOYER, The people's mandate referendums and a more democratic Canada, Toronto, Dundurn

Press, 1992, p. 170.

22 « Textes législatifs relatifs à la Loi constitutionnelle de 1982 », (1985) R.D. McGill 753, p. 767-768, art. 42 du

Projet de résolution portant adresse commune à Sa majesté la Reine concernant la Constitution du Canada et p. 789-790, art. 46, Comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes sur la Constitution du Canada, Rapport au Parlement.

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catégories : les procédures unilatérales modifiables par simple loi23 et les procédures complexes ou

multilatérales24 modifiables qu’avec le consentement du fédéral et d’un certain nombre de provinces.

Si les procédures unilatérales de modification constitutionnelle sont généralement plus faciles à mettre en œuvre, il en va tout autrement des procédures rigides et complexes requérant le

23 Loi constitutionnelle de 1982, préc., note 18, art. 44-45; Patrick TAILLON, Les obstacles juridiques à une

réforme du fédéralisme, Montréal, Institut de recherche sur le Québec, 2007, en

ligne:<http://irq.qc.ca/storage/etudes/IRQ-obstacles_juridiques_reforme_federalisme-PT-etude_complete_7.pdf (consulté le 23 septembre 2012), p. 5.

Le Parlement fédéral, sous réserve des articles 41 et 42, « a compétence exclusive pour modifier les dispositions de la Constitution du Canada relatives au pouvoir exécutif fédéral, au Sénat ou à la Chambre des communes » (art. 44). Sous réserve de l’article 41, une législature provinciale a « compétence exclusive pour modifier la constitution de sa province » (art. 45). Bien que cette expression ne soit pas définie, la constitution d’une province comprend les lois touchant à « la création, la constitution et le fonctionnement des législatures » et « celles qui portent sur la tenue d’un référendum ou d’un plébiscite » (B. PELLETIER, préc., note 2, p. 119, 121-122).

24 Loi constitutionnelle de 1982, préc., note 18, art. 38-42; P. TAILLON, Les obstacles juridiques à une réforme du

fédéralisme, préc., note 23, p. 5.

Pour ce qui est des procédures complexes, il est important de noter que le Sénat n’a qu’un veto suspensif de 180 jours, ce qui fait que la Chambre des communes peut adopter une nouvelle résolution après cette période et ainsi passer outre à l’absence de consentement du Sénat (Loi constitutionnelle de 1982, préc., note 18, art. 47).

Une modification concernant certaines provinces seulement nécessite des résolutions du Sénat, de la Chambre des communes et des assemblées législatives de chaque province concernée (art. 43).

Les modifications non visées par les autres formules d’amendement nécessitent des résolutions du Sénat, de la Chambre des communes et des assemblées législatives des deux tiers des provinces représentant au moins cinquante pourcent de la population canadienne (Loi constitutionnelle de 1982, préc. note 18 ,art. 38(1)). Cette procédure de droit commun est généralement connue sous le nom de formule « 7/50 ». (J. R. HURLEY et CANADA. PRIVY COUNCIL OFFICE. POLICY DEVELOPMENT AND CONSTITUTIONAL AFFAIRS, préc., note 16, p. 74.)

Une province possède un droit de retrait (art. 38(3)) lorsqu’une modification est « dérogatoire à la compétence législative, aux droits de propriété ou à tous autres droits ou privilèges d’une législature ou d’un gouvernement provincial » (art. 38(2)). Ce droit de retrait peut également être accompagné d’une compensation financière lorsque le transfert de compétences concerne l’éducation ou d’autres domaines culturels (art. 40). La formule «7/50 » s’applique également aux sujets énumérés à l’article 42(1) comme par exemple le mode de sélection des sénateurs. Pour ces questions, les droits de retrait et de compensation ne sont cependant pas possibles (art. 42(2)).

En vertu de la procédure générale, la proclamation doit être prise dans les trois ans de l’adoption de la première résolution (art. 39(2)). Durant cette période, des élections peuvent survenir et des gouvernements peuvent être renversés. Si une province n’a pas encore ratifié une modification, il se peut que le nouveau gouvernement au pouvoir refuse de le faire. La nouvelle assemblée législative a même le pouvoir de révoquer une résolution déjà adoptée, ce qui peut faire échouer l’entente conclue, mais non encore ratifiée par le nombre requis de provinces.

Le délai de trois ans s’applique également aux autres procédures de modifications multilatérales lorsque ces dernières font partie d’une entente constitutionnelle incluant des modifications requérant l’application de la formule « 7/50». Cette exigence additionnelle vient alors compliquer un processus déjà fort complexe (P. TAILLON, Les obstacles juridiques à une réforme du fédéralisme, préc., p. 16).

D’autres modifications, comme la procédure de modification constitutionnelle en elle-même, nécessitent l’unanimité, soit le consentement des deux chambres fédérales et des assemblées législatives de l’ensemble des provinces (Loi constitutionnelle de 1982, préc., note 18, art. 41). Il est pour le moins « ironique », voir paradoxal (B. PELLETIER, préc., note 2, p. 214) que la modification de la formule de modification constitutionnelle nécessite l’unanimité des provinces (art. 41 e)) alors que l’unanimité n’a pas été initialement obtenue au moment du rapatriement (H. BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 3, p. 232).

(20)

consentement de plusieurs entités. Depuis 1982, les tentatives de modifications constitutionnelles ont démontré à quel point il était difficile, voire impossible de modifier en profondeur la Constitution25.

En 1984, le Premier Ministre fédéral Brian Mulroney a proposé de « réintégrer le Québec dans l’honneur et l’enthousiasme »26. Il voulait ainsi réparer l’injustice de 1982 et permettre au Québec de

se réconcilier avec le reste du Canada. En 1986, le premier ministre Robert Bourassa a énoncé les cinq conditions pour que le Québec accepte d’adhérer à la Constitution27. En 1987, les premiers

ministres du fédéral et des provinces y ont consenti et ont signé l’Accord du Lac Meech28. L’Accord

nécessitait pour sa mise en oeuvre le consentement unanime des assemblées législatives, et ce, à l’intérieur du délai de ratification de trois ans29. L’Accord du Lac Meech s’est soldé par un échec en

25 Voir notamment P.J. BOYER, The people’s mandate referendums and a more democratic Canada, préc., note

21, p. 165; G. LAFOREST, préc., note 8, p. 139-141; Michael LUSZTIG, «Constitutional paralysis: why Canadian constitutional initiatives are doomed to fail», (1994) 27 Revue canadienne de science politique 747; P. MONAHAN, Constitutional Law, préc., note 20, p. 481; P. TAILLON, Les obstacles juridiques à une réforme

du fédéralisme, préc, note 23; José WOEHRLING,, «Fonctionnement et dysfonctionnement de la procédure de

modification constitutionnelle au Canada» dans BEAUDOIN, Gérald A., Joseph E. MAGNET, Benoît PELLETIER ET J.T. ROBERTSON (dir.), Le fédéralisme de demain: réformes essentielles, Montréal, Wilson &

Lafleur, 1998, p. 325, à la page 339.

26 J. CAMERON, préc., note 10, p. 317; M. CROISAT, F. PETITEVILLE et J. TOURNON, préc., note 10 , p. 75;

G.LAFOREST, préc., note 8, p. 65, 71; Lawrence LEDUC, The politics of direct democracy : referendums in

global perspective, Peterborough, Ont., Broadview Press, 2003, p. 53.

27 Marc CHEVRIER, Le fédéralisme canadien et l'autonomie du Québec : perspective historique, Québec,

Ministère des relations internationales, Direction des communications, 1996, p. 20; Peter W. HOGG., «The Difficulty of Amending the Constitution of Canada», (1993) 31 Osgoode Hall Law Journal 41, p. 47; Peter W. HOGG, Constitutional law of Canada, student edition, Toronto, Carswell, 2011, p. 4-8; Christopher MANFREDI, «On the Virtues of a Limited Constitution: Why Canadians Were Right to Reject the Charlottetown Accord» dans Anthony A. PEACOCK (dir.), Rethinking the constitution: perspectives on Canadian constitutional reform,

interpretation, and theory, Don Mills, Ont., Oxford University Press, 1996, p. 40, à la p. 45; Kenneth

MCROBERTS, Misconceiving Canada the struggle for national unity, Toronto, Ont., Oxford University Press, 1997, p. 191; François ROCHER, «Self-determination and the Use of Referendums: the Case of Quebec», (2014) 27 International Journal of Politics, Culture & Society 25, p. 35.

Les cinq conditions du Québec étaient les suivantes :

- la reconnaissance du Québec comme société distincte; - un plus grand rôle en matière d'immigration;

- un rôle dans la nomination des juges à la Cour suprême; - des limites au pouvoir fédéral de dépenser;

- un veto du Québec sur les modifications constitutionnelles.

28 G. LAFOREST, préc., note 8, p. 65, 72; P.J. BOYER, Direct democracy in Canada : the history and future of

referendums, préc., note 7, p. 152; J. R. HURLEY et CANADA. PRIVY COUNCIL OFFICE. POLICY

DEVELOPMENT AND CONSTITUTIONAL AFFAIRS, préc., note 16, p. 118; P. W. HOGG, Constitutional law of

Canada, préc., note 27, p. 4- 9; J.-Y. MORIN et J. WOEHRLING, préc., note 10, p. 544; P. H. RUSSEL, préc.,

note 10, p. 136, 139.

29 Puisque cet Accord formait un tout, les exigences relatives à chaque procédure étaient cumulatives. (H. BRUN,

G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 3, p. 245; J. CAMERON, préc., note 10, p. 317; M. CROISAT, F. PETITEVILLE et J. TOURNON, préc., note 10 , p. 93; J. R. HURLEY et CANADA. PRIVY COUNCIL OFFICE. POLICY DEVELOPMENT AND CONSTITUTIONAL AFFAIRS, préc., note 16, p. 119; P. H. RUSSEL, préc.,

(21)

juin 1990, faute d’avoir recueilli les résolutions nécessaires dans le délai requis. Il a suscité la grogne de la population contre le fédéralisme exécutif, cette pratique voulant que les négociations constitutionnelles fédérales-provinciales soient tenues depuis toujours à huis clos entre les élites politiques. La population de certaines provinces requérait haut et fort d’être davantage impliquée dans le processus de modification constitutionnelle30. Désormais, plusieurs réclamaient d’être

consultés en amont, sur le contenu des propositions de modification constitutionnelle et, en aval, par l’organisation d’un référendum.

Pour accroître la légitimité démocratique du processus de modification constitutionnelle et ainsi faire évoluer la Constitution sans toutefois avoir à la modifier, certaines procédures ont été mises en place par les acteurs politiques afin de compléter et combler certaines lacunes du processus de modification actuel31. Il s’agit de procédures de modification que l’on peut, à l’instar du professeur

Patrick Taillon, qualifier de « para-constitutionnelles »32, dans la mesure où elles sont édictées en

note 10, p. 140; J. WOEHRLING,, «Fonctionnement et dysfonctionnement de la procédure de modification constitutionnelle au Canada», préc., note 25, p. 331; F. ROCHER, préc., note 27, p. 35.)

30 Maude BARLOW, «The Referendum and Democracy» dans MCROBERTS, K. et P. MONAHAN (dir.), The

Charlottetown Accord, the referendum, and the future of Canada, Toronto, University of Toronto Press, 1993, p.

159, à la page 161; P.J. BOYER, The people's mandate referendums and a more democratic Canada, préc., note 21, p. 174-175, 191; J. CAMERON, préc., note 10, p. 318-319; David MACDONALD, «Référendums et élections fédérales» dans CASSIDY, M. (dir.), Les droits démocratiques et la réforme électorale au Canada, Toronto, Dundurn Press, 1991, p. 339-383, aux pages 339-341; Nancy CÔTÉ, Referendums and constitutional

amendment in Canada, North York, Osgoode Hall Law School, York University, 2000, p. 1, 5-6, 50-51, 56;

FORUM DES CITOYENS SUR L'AVENIR DU CANADA, Ministère des Approvisionnements et Services,

Rapport à la population et au gouvernement du Canada (rapport Spicer), Ottawa, 1991, p. 113-115, 118-119;

G. LAFOREST, préc., note 8, p. 165; C.P. MANFREDI, préc., note 27, p. 47; K. MCROBERTS, préc., note 27, p. 197; J.-Y. MORIN et J. WOEHRLING, préc., note 10, p. 536; R. PELLETIER et M. TREMBLAY, préc., note 1, p. 79; Jonathan ROSE, «Les citoyens sont-ils à la hauteur du processus constituant? Ce que les assemblées citoyennes peuvent nous enseigner » dans BROUILLET, E., L. MASSICOTTE ET EBRARY INC. (dir.),

Comment changer une constitution? les nouveaux processus constituants : actes du Colloque sur les nouveaux processus constituants, tenu à Québec le 15 mai 2009, Québec, Presses de l'Université Laval, 2011, p. 65-85,

à la page 70; Jean-Claude RACINE, «La condition constitutionnelle des canadiens: état des lieux et perspectives», (2013) Spring Canadian Issues 20; p. 22; P. H. RUSSEL, préc., note 10, p. 6, 152, 156; P. TAILLON, Les obstacles juridiques à une réforme du fédéralisme, préc., note 23, p. 34; J. WOEHRLING, préc., note 29, p. 336; José WOEHRLING, Les aspects juridiques de la redéfinition du statut politique et

constitutionnel du Québec, en

ligne:<http://www.saic.gouv.qc.ca/publications/documents_inst_const/10-JoseWoehrling.pdf> (consulté le 18 novembre 2012), p. 20.

Voir aussi ALBERTA, LEGISLATIVE ASSEMBLY, Alberta Hansard, 4th sess., 22nd Legislature, 17 juin 1992,

«Second Reading Bill 1 Constitutional Referendum Act », p. 1444 (Mr. Getty); ALBERTA, LEGISLATIVE ASSEMBLY, Alberta Hansard, 4th sess., 22nd Legislature, 17 juin 1992, « Second Reading Bill 1 Constitutional

Referendum Act », p. 1445 (Mr. Pashak); BRITISH COLUMBIA, LEGISLATIVE ASSEMBLY, Debates of the

Legislative Assembly, 5th sess., 34th Legislature, 27 juin 1991, « SELECT STANDING COMMITTEE ON

CONSTITUTIONAL MATTERS AND INTERGOVERNMENTAL RELATIONS », p.13222 (Mr.Shiota).

31 P. TAILLON, Les obstacles juridiques à une réforme du fédéralisme, préc., note 23, p. 43.

32 Patrick TAILLON. et Catherine MATHIEU, «Aux frontières de la modification constitutionnelle: le caractère

(22)

marge de la Constitution par le biais de lois ordinaires. Elles gravitent autour de la formule d’amendement sans toutefois en faire partie. Bien qu’elles visaient initialement à moderniser et rendre plus légitime le processus de modification constitutionnelle, ces procédures ont paradoxalement eu pour effet d’accroître la rigidité de la Constitution en venant y ajouter des exigences supplémentaires. Parmi ces réformes para-constitutionnelles qui encadrent le processus de modification constitutionnelle, on retrouve notamment33 des lois ordinaires comme la loi fédérale

sur les vétos régionaux34 et les lois provinciales rendant la tenue d’un référendum obligatoire avant

l’adoption d’une modification constitutionnelle35.

En juillet 1990, en réponse à la critique du fédéralisme exécutif suscitée par l’échec de l’Accord du Lac Meech36, la Colombie-Britannique37 a adopté le Constitutional Amendment Approval Act rendant

la tenue d’un référendum obligatoire avant l’adoption d’une résolution autorisant une modification à la Constitution. Le référendum ne remplace pas la résolution devant être adoptée par la législature provinciale, mais devient simplement une condition nécessaire38 à l’adoption d’une modification

l’arbitraire : le contrôle de la question et des résultats référendaires par le Parlement canadien », (2014) 20

R.E.A.F. 13, p. 43.

33 On peut également qualifier de réformes para-constitutionnelles:

- les conventions constitutionnelles : Renvoi: Résolution pour modifier la Constitution, préc., note 16, p. 876-878; H. BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 3, p. 46-49; André TREMBLAY, Droit

constitutionnel : principes, 2e éd., Montréal, Éditions Thémis, 2000, p. 20 et 27; José WOEHRLING, « La

modification par convention constitutionnelle du mode de désignation des sénateurs canadiens », [2008-2009] 39 R.D.U.S. 116;

- et les ententes intergouvernementales : Nigel BANKES, « Co-operative Federalism : Third Parties and Intergovernmental Agreements and Arrangements in Canada and Australia », [1991] 29 (792) Alta L. Rev., p. 1-56; Lara FRIEDLANDER, «Constitutionalizing Intergovernmental Agreements », [1994] 4 N.J.C.L., p. 153-168; Joseph E. MAGNET, «Intergovernmental Agreements », dans Constitutional Law of Canada, 7e éd., 1998, p.

115-188; Johanne POIRIER, « Les ententes intergouvernementales et la gouvernance fédérale : aux confins du droit et du non-droit » dans Jean-François GAUDREAULT-DESBIENS et Fabien GÉLINAS, Le fédéralisme

dans tous ses États. Gouvernance, identité et méthodologie, Cowansville, Éditions Y. Blais, 2005, p. 441-472.

34 Loi concernant les modifications constitutionnelles, L.C. 1996, c. 1.

35 Constitutional Referendum Act, R.S.A. 2000, c. C-25; Constitutional Amendment Approval Act, R.S.B.C. 1996,

c. 67.

36 C.P. MANFREDI, préc., note 27, p. 47; N. CÔTÉ, préc., note 30, p. 2, 5, 50; BRITISH COLUMBIA,

LEGISLATIVE ASSEMBLY, Debates of the Legislative Assembly, 4th sess., 34th Legislature, 12 mars 1991,

«Introduction of Bills-CONSTITUTIONAL AMENDMENT APPROVAL ACT », p. 11672 (Hon. Mr. Vander Zalm).

37 Constitutional Amendment Approval Act, préc., note 35; J. R. HURLEY et CANADA. PRIVY COUNCIL OFFICE.

POLICY DEVELOPMENT AND CONSTITUTIONAL AFFAIRS, préc., note 16, p. 128.

38 Le référendum obligatoire est celui où l’absence de consultation de la population empêche le parlement de

légiférer ou d’agir validement. Lorsque le référendum est facultatif, le parlement a le loisir d’en tenir un ou non, sans que la validité de sa législation ou de son action n’en soit affectée. Le référendum est dit délibératif (ou décisionnel) lorsque le peuple participe directement à la fonction législative et que les résultats sont directement exécutoires (sans que la législature n’intervienne), alors qu’il est dit consultatif lorsque la population ne fait qu’exprimer son opinion et que la législature doit assurer la transposition législative des résultats si tel est son désir (Henri BRUN et Guy TREMBLAY, «Consultations populaires québécoises et référendums fédéraux»,

(23)

constitutionnelle par cette dernière. Lors de l’adoption de sa loi, la Colombie-Britannique avait espoir que les autres provinces suivent le pas et adoptent des lois semblables39. C’est ce que l’Alberta a fait

en juin 1992 avec le Constitutional Referendum Act40. Les lois de la Colombie-Britannique et de

l’Alberta sont muettes quant au moment de la tenue du référendum. Doit-il être tenu avant ou après les négociations entre le fédéral et les provinces?

En 1991, la Saskatchewan a tenu un référendum pour demander au peuple s’il devrait approuver les modifications constitutionnelles par référendum41. Le peuple de la Saskatchewan approuva cette

proposition, mais un changement de gouvernement a eu lieu42, ce qui fait que la Saskatchewan n’a

jamais adopté de loi semblable à celles de l’Alberta et de la Colombie-Britannique. Elle a simplement conservé sa loi cadre permettant l’organisation de référendum facultatif43.

En 1998, l’Ontario a tenté, sans succès, d’adopter une loi semblable à celles de l’Alberta et de la Colombie-Britannique. Le projet de loi (Referendum Act), qui a circulé pour consulation sans être soumis à la législature, requérait la tenue d’un référendum avant l’adoption par sa législature d’une résolution visant à modifier la Constitution. Les modifications constitutionnelles de nature technique auraient cependant été exemptées de cette obligation (art. 3). Les résultats référendaires auraient été contraignants si 50% des électeurs avaient voté lors du référendum et si 50% des votes supportaient la modification proposée (art. 29(1)). Ces résultats n’auraient lié que le gouvernement en place et non un gouvernement subséquent (art. 29(2)) et les résultats d’un référendum fédéral n’auraient pas lié le gouvernement provincial (art. 29(3))44.

(1979) 20 Cahiers de Droit 137, p. 139; P. TAILLON, Le référendum expression directe de la souveraineté du

peuple? : essai critique sur la rationalisation de l'expression référendaire en droit comparé, préc., note 8, p.

268-269, 292, 303-305, 337-338 ).

Le référendum est contraignant lorsque l’assemblée législative ou le gouvernement est tenu de respecter les résultats référendaires. Dans le cas contraire, le référendum est qualifié de « libre ». (B. PELLETIER, préc., note 2, p. 161).

39 P. J. BOYER, Direct democracy in Canada : the history and future of referendums, préc., note 7, p. 94;

BRITISH COLUMBIA, LEGISLATIVE ASSEMBLY, Debates of the Legislative Assembly, 4th sess., 34th

Legislature, 12 mars 1991, « Introduction of Bills-CONSTITUTIONAL AMENDMENT APPROVAL ACT », p. 11672 (Hon. Mr. Vander Zalm). .

40 Constitutional Referendum Act, préc., note 35, art. 2; J. R. HURLEY et CANADA. PRIVY COUNCIL OFFICE.

POLICY DEVELOPMENT AND CONSTITUTIONAL AFFAIRS, préc., note 16, p. 128.

41 P. J. BOYER, Direct democracy in Canada : the history and future of referendums, préc., note 7, p. 174. 42 Id., p. 175.

43 The Referendum and Plebiscite Act, S.S. 1990-91, c. R-8.01, art. 3(1).

44 N. CÔTÉ, préc., note 30, p. 42-43; Philip KAYE., Overview of federal/provincial/territorial referendum legislation

(24)

En juin 1991, à la suite de l’échec de l’Accord du Lac Meech et conformément aux recommandations de la commission Bélanger-Campeau, le Québec a quant à lui adopté une loi prévoyant la tenue obligatoire d’un référendum sur la souveraineté du Québec avant le 26 octobre 199245. Quelques

mois plus tard, cette loi québécoise fut amendée afin de permettre l’organisation d’un référendum non pas sur la souveraineté du Québec, mais bien sur de nouvelles offres de modifications constitutionnelles46.

D’autres provinces ont adopté des lois cadres permettant l’organisation de référendums au cours des dernières années. Ces lois sont cependant moins contraignantes que celles de la Colombie-Britannique et de l’Alberta , dans la mesure où l’initiative référendaire demeure facultative et du ressort exclusif des autorités gouvernementales . Cinq provinces canadiennes47 permettent la tenue

d’un référendum (facultatif) sur tout sujet, ce qui inclut bien sûr les modifications constitutionnelles48.

En 1992, le Comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes sur le renouvellement du fédéralisme (rapport Beaudoin-Dobbie) a recommandé l’adoption d’une loi référendaire fédérale permettant le référendum constitutionnel facultatif49. La même année, le fédéral a donc adopté une

45 Loi sur le processus de détermination de l'avenir politique et constitutionnel du Québec, L.Q. 1991, c. 34. 46 Cette loi n’avait vocation à rendre obligatoire qu’un seul scrutin qui devait être tenu en 1992 en guise de suite à

la Commission Bélanger-Campeau et à ses recommandations.

47 - Québec : Loi sur la consultation populaire, L.R.Q. 1991, c. C-64.1, art. 7.

- Saskatchewan: The Referendum and Plebiscite Act, préc., note 43, art. 3(1). - Terre-Neuve: Elections Act, 1991, S.N.L. 1992, c. E-3.1, art. 217-218. - Île-du-Prince-Édouard: Plebiscite Act, R.S.P.E.I. 1988, c. P-10, art. 1. - Nouveau-Brunswick : Loi référendaire, L.N.B. 2011, c. 23, art. 7(1).

48 Il en est de même pour les trois territoires: Loi sur les plébiscites, L.R.Y. 2002, c. 172, art. 1(1); Loi sur les

élections et les référendums L.T.N.-O. 2010, c. 15, art. 45(1); Loi sur les référendums (Nunavut), L.R.T.N.-O.

1988, c. P-8, art. 3(1).

À l’heure actuelle, les autres provinces prévoient la tenue d’un référendum uniquement sur certains sujets bien spécifiques. C’est le cas de l’Ontario et du Manitoba pour l’augmentation du taux de taxation (ÉLECTIONS CANADA, Compendium de l’administration électorale au Canada : une vue d’ensemble comparée, 27 juin 2012, Ottawa, p. 119 et 122, en ligne: <http://www.elections.ca/res/loi/com/compoverview2012jun_f.pdf> (consulté le 20 juin 2013)), du Manitoba pour la privatisation d’Hydro-Manitoba (Loi sur l'Hydro-Manitoba, L.R.M. 1987, c. H190, art. 15.3(1)) et de la Nouvelle-Écosse pour l’exploitation d’un magasin vendant de l’alcool ou d’un établissement avec permis d’alcool (ÉLECTIONS CANADA, Compendium de l’administration

électorale au Canada : une vue d’ensemble comparée, préc.). Dans ces provinces, l’adoption d’une loi spéciale

serait donc nécessaire pour permettre la tenue d’un référendum constitutionnel.

49 COMITÉ MIXTE SPÉCIAL DU SÉNAT ET DE LA CHAMBRE DES COMMUNES SUR LE RENOUVELLEMENT

DU FÉDÉRALISME, Un Canada renouvelé (Rapport Beaudoin-Dobbie), Ottawa, SERVICES, M.D.A.E.,1992, p. 98.

(25)

telle loi50. C’est d’ailleurs en vertu de cette loi, et non des lois provinciales de l’Alberta et de la

Colombie-Britannique, que le référendum sur l’Accord de Charlottetown s’est tenu en octobre 1992. Le Québec a cependant organisé son propre référendum conformément à la loi sur la consultation populaire. Malgré cette volonté de satisfaire aux demandes du Québec et de démocratiser l’exercice du pouvoir constituant, cet accord a cependant lui aussi échoué, faute d’avoir recueilli l’appui nécessaire51.

Les échecs des accords du Lac Meech et Charlottetown permettent de constater non seulement la rigidité de la Constitution et l’impasse dans laquelle se trouvent présentement le fédéral et les provinces face aux modifications constitutionnelles nécessitant des négociations multilatérales52,

mais aussi l’importance de cette réflexion relative à la place des électeurs dans l’exercice du pouvoir constituant au Canada. Or, depuis le référendum constitutionnel d’octobre 1992 sur l’Accord de Charlottetown, une question se pose : le référendum constitutionnel constitue-t-il un évènement isolé ou est-il devenu la norme ou le standard en droit canadien? Bien que diverses, les réponses avancées par la doctrine à cette question reposent indirectement sur une appréciation à tout le moins implicite de la constitutionnalité de ce type de référendum. En effet, une telle évolution des pratiques politiques, bien que conforme à un idéal de démocratisation de l’exercice du pouvoir constituant, soulève la question de la conformité du référendum à la partie V de la Loi constitutionnelle de 1982 qui ne prévoit ni n’interdit le recours au référendum.

50 Loi référendaire, L.C. 1992, c. 30, art. 3; J. R. HURLEY et CANADA. PRIVY COUNCIL OFFICE. POLICY

DEVELOPMENT AND CONSTITUTIONAL AFFAIRS, préc., note 16, p. 128.

51 G.-A. BEAUDOIN. et P. THIBAULT, préc., note 10, p. 312-313; P. J. BOYER, Direct democracy in Canada :

the history and future of referendums, préc., note 7, p. 62, 75-76 ; S. BROOKS, préc., note 10, p. 154-155; H.

BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 3, p. 110-111; M. CHEVRIER, Le fédéralisme canadien et

l’autonomie du Québec, préc., note 27, p. 22; S. GRAMMOND, préc., note 19, p. 596; P. W. HOGG., «The

Difficulty of Amending the Constitution of Canada», préc., note 27, p. 42-44, 50; J. R. HURLEY et CANADA. PRIVY COUNCIL OFFICE. POLICY DEVELOPMENT AND CONSTITUTIONAL AFFAIRS, préc., note 16, p. 136-138; K. MCROBERTS, préc., note 27, p. 215-216; J.-Y. MORIN et J. WOEHRLING, préc., note 10, p. 567, 569, 576; B. PELLETIER, préc., note 2, p. 14-15; Réjean PELLETIER, Le Québec et le fédéralisme

canadien : un regard critique, Québec, Les Presses de l'Université Laval, 2008, p. 46-47; F. ROCHER, préc.,

note 27, p. 36.

52 P.J. BOYER, The people's mandate referendums and a more democratic Canada, préc., note 21, p. 165; P.

MONAHAN, Constitutional law, préc., note 20, p. 481; M. LUSZTIG, préc., note 25; P. TAILLON, Les obstacles

juridiques à une réforme du fédéralisme, préc., note 23; Patrick TAILLON, et Alexis DESCHÊNES, «Une voie

inexplorée de renouvellement du fédéralisme canadien: l'obligation constitutionnelle de négocier des changements constitutionnels», (2012) 53-3 Cahiers de Droit 461, p. 463-465; A. TREMBLAY, La réforme de la

(26)

La montée en puissance de la pratique référendaire en matière constitutionnelle et, au premier chef, les lois provinciales rendant la tenue d’un référendum obligatoire, soulèvent des questions importantes quant à leur conformité à la Constitution et quant à leurs conséquences sur le processus de modification constitutionnelle. À ce jour, ces questions ont été peu analysées par la doctrine. Dans ses écrits dédiés à la démocratie directe, le professeur Patrick J. Boyer relate l’histoire du référendum au Canada53 de manière à démontrer que les acteurs politiques ont eu recours au

référendum constitutionnel à plusieurs reprises par le passé, tant au niveau canadien qu’au niveau provincial, et ce, même si le référendum n’était pas prévu à la Constitution. On peut penser, en plus

du célèbre référendum pancanadien sur l’Accord de Charlottetown de 199254, aux référendums sur la

sécession du Québec en 1980 et 199555 de même qu’aux plus récents scrutins provinciaux sur la

réforme du mode de scrutin56 pour ne nommer que ceux-ci. Certains auteurs se questionnent

d’ailleurs sur l’émergence ou l’existence d’une convention constitutionnelle sur le référendum obligatoire57. Bien que la vaste majorité des modifications ou tentatives de modifications

constitutionnelles n’ont pas été précédées d’un référendum, il est juste de prétendre que les plus récentes ont conduites à l’organisation de tels scrutins58.

53 P. J. BOYER, Direct democracy in Canada : the history and future of referendums, préc., note 7. 54 P. W. HOGG., «The Difficulty of Amending the Constitution of Canada», préc., note 27, p. 42. 55 H. BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 3, p. 108 et 111.

56 Exemples : Colombie-Britannique (2005 et 2009, Île-du-Prince-Édouard (2005), Ontario (2007) : P. MONAHAN,

Constitutional law, préc., note 20, p. 187; P. TAILLON, Le référendum expression directe de la souveraineté du peuple? : essai critique sur la rationalisation de l'expression référendaire en droit comparé, préc., note 8, p. 51

et 387; Electoral Reform Referendum Act, S.B.C. 2004, c. 47; Electoral Reform Referendum 2009 Act, S.B.C. 2008, c. 9; Loi de 2007 sur le Référendum relatif au système électoral, L.O. 2007, c. 1.

57 P. J. BOYER, Direct democracy in Canada : the history and future of referendums, préc., note 7, p. 235; H.

BRUN, G. TREMBLAY et E. BROUILLET, préc., note 3 , p. 246; P. MONAHAN, Constitutional law, préc., note 20, p. 187-188; P. TAILLON, Les obstacles juridiques à une réforme du fédéralisme, préc., note 23, p. 36-37; A. TREMBLAY, La réforme de la constitution au Canada, préc., note 17, p. 90 et 100; J. WOEHRLING, Les

aspects juridiques de la redéfinition du statut politique et constitutionnel du Québec, préc., note 30, p. 22.

58 Voici quelques référendums constitutionnels récents tenus au sein de la fédération canadienne au cours des

dernières années:

- Référendums sur la sécession du Québec de 1980 et 1995; - Référendum pancanadien sur l’Accord de Charlottetown de 1992;

- Référendums de 1995 et 1997 sur les écoles confessionnelles à Terre-Neuve : P. MONAHAN, Constitutional

law, préc., note 20, p. 187;

- Référendums sur la réforme du mode de scrutin tenus en Colombie-Britannique (2005 et 2009), à l’Île-du-Prince-Édouard (2005) et en Ontario (2007) : P. MONAHAN, Constitutional law, préc., note 20, p. 187; P. TAILLON, Le référendum expression directe de la souveraineté du peuple? : essai critique sur la rationalisation

de l'expression référendaire en droit comparé, préc., note 8, p. 51 et 387; Electoral Reform Referendum Act,

préc., note 56; Electoral Reform Referendum 2009 Act, préc., note 56; Loi de 2007 sur le Référendum relatif au

(27)

Mme Nancy Côté, sous la direction du professeur Patrick Monahan, a rédigé un mémoire de maîtrise sur la place du référendum dans le processus de modification constitutionnelle au Canada59.

L'auteure note que malgré la tradition de fédéralisme exécutif, le référendum est devenu important dans le processus de modification constitutionnelle. Mme Nancy Côté est d’avis que les lois référendaires provinciales et fédérale ont été adoptées en réponse à la formule d’amendement déficiente qui ne requiert actuellement pas le référendum constitutionnel. Selon elle, les lois référendaires provinciales et le référendum sur l'Accord de Charlottetown ont conduit à l'acceptation du référendum comme moyen légitime à employer dans le cadre du processus de modification constitutionnelle. Elle est d'avis que l’obligation de négocier face à une majorité claire à une question claire dégagée par le Renvoi relatif à la sécession du Québec de 199860 et la Loi sur la clarté

adoptée par le fédéral en 200061 ont solidifié l'acceptation du référendum dans le processus de

modification constitutionnelle. Selon Mme Nancy Côté, la montée récente de l'usage du référendum constitutionnel est le reflet d'un dialogue constitutionnel constructif et d'un renouvellement constitutionnel positif pour le Canada.

Le professeur Sébastien Grammond s’est quant à lui interrogé sur la possibilité pour des provinces comme l’Alberta et la Colombie-Britannique de subordonner l’approbation d’une modification constitutionnelle à la tenue d’un référendum. Il a dressé un portrait des arguments avancés par les deux camps, mais a répondu négativement à cette question62. Les professeurs Benoît Pelletier63 et

Gérald-A. Beaudoin64 ont également consacré quelques passages à cette question dans leurs

ouvrages respectifs et en sont venus à la même conclusion. Le professeur Henri Brun s’est lui aussi prononcé sur l’inconstitutionnalité de ces lois puisque, selon lui, elles « ont pour objet l’amendement de la constitution formelle »65. Le professeur Patrick Taillon a rédigé un article portant notamment sur

les lois provinciales rendant la tenue d’un référendum obligatoire avant l’adoption d’une modification constitutionnelle par une province. Selon lui, ces lois constituent des obstacles à une réforme du

59 N. CÔTÉ, préc., note 30. 60 [1998] 2 R.C.S. 217.

61 Loi donnant effet à l'exigence de clarté formulée par la Cour suprême du Canada dans son avis sur le Renvoi

sur la sécession du Québec, L.C. 2000, c. 26.

62 S. GRAMMOND, préc., note 19.

63 B. PELLETIER, préc., note 2, p. 108-110 160-167 et 195-198. 64 G.-A. BEAUDOIN. et P. THIBAULT, préc., note 10, p. 147, 152, 272. 65 H. BRUN, préc., note 12, p. 40.

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fédéralisme, car elles ajoutent des exigences supplémentaires à une procédure déjà fort complexe66.

Paradoxalement, dans un autre texte, rédigé avec Me Alexis Deschênes, il nuance la thèse du référendum comme obstacle à la révision constitutionnelle en montrant que le référendum constitutionnel facultatif tenu en amont du processus de négociation constitutionnelle peut faciliter le renouvellement du fédéralisme en enclenchant l’obligation de négocier lorsqu’une majorité claire de la population vote en faveur du changement proposé67.

Outre la question de la conformité des lois rendant obligatoire le référendum constitutionnel avec la partie V de la Loi constitutionnelle de 1982, se pose aussi celle, plus générale, de la compatibilité du référendum avec la démocratie représentative. L’introduction du référendum constitutionnel en droit canadien laisse entrevoir, de prime abord, une apparente contradiction entre la démocratie directe et notre système parlementaire de démocratie représentative. En effet, dans un système de type représentatif, la volonté du peuple est exprimée via leurs représentants élus. Les élus prennent les décisions à la place du peuple et tirent « leur légitimité du consentement de la population qu’ils gouvernent »68. Or, le principe à la base de la démocratie directe est que le peuple devrait se

gouverner lui-même et prendre les décisions qui le concernent69. Ces deux types de démocratie

sont-ils conciliables ou mutuellement exclusifs au Canada? Quelques auteurs ont, directement ou indirectement, tenté de répondre à cette question.

Me Karl Delwaide est d’avis qu’une législature comme le Québec peut implanter un système complet d'initiative et de référendum. Selon lui, cela serait constitutionnel en raison du pouvoir de la législature de modifier sa propre constitution et des principes de suprématie législative et de souveraineté parlementaire. Cependant, ce pouvoir comporte certaines limites comme la « charge de lieutenant-gouverneur », les principes de démocratie représentative et de gouvernement responsable et le principe de souveraineté du Parlement qui empêche une législature de se lier pour l'avenir70.

66 P. TAILLON, Les obstacles juridiques à une réforme du fédéralisme, préc., note 23. 67 P. TAILLON, et A. DESCHÊNES, préc., note 52.

68 S. GRAMMOND, préc., note 19, p. 588.

69 Pierre MARQUIS, Les référendums au Canada : les conséquences d'un processus décisionnel populiste pour

la démocratie représentative, Ottawa, Service de recherche Bibliothèque du Parlement, 1994, p. 2-3.

70 Karl DELWAIDE, «La législature québécoise peut-elle implanter un système complet d'initiative et de

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Sur le plan du droit comparé, le professeur Patrick Taillon a largement analysé les processus de rationalisation et d’encadrement de l’expression référendaire71, c’est-à-dire l’ensemble des procédés

juridiques utilisés pour limiter l’impact des résultats référendaires. Ainsi, par le biais de ces procédés, les acteurs politiques tentent de « contourner », avec plus ou moins de succès, la volonté exprimée par la population. Les majorités renforcées de même que le fait de qualifier le scrutin de «consultatif» en font partie et permettent de faire fi des résultats référendaires dans certains cas bien précis. Enfin, dans un article, les professeurs Louis Massicotte et Antoine Yoshinaka notent que le référendum constitutionnel n'est obligatoire que dans quatre des fédérations étudiées, ces fédérations étant toutes libres et démocratiques. Selon eux, le référendum constitutionnel obligatoire devrait cependant être la norme au sein d’une fédération72. L’auteur Pierre Marquis s’est d’ailleurs

penché sur les arguments pour et contre le référendum et sur l’opportunité pour les acteurs politiques d’y avoir recours dans certaines circonstances bien précises73.

En s’appuyant sur ces travaux déjà effectués sur le référendum au Canada, le présent mémoire vise à examiner en profondeur les conséquences de ce recours obligatoire du référendum constitutionnel, tel qu’il ressort de la législation de certaines provinces. Sur le plan constitutionnel, le recours au référendum obligatoire avant l’adoption d’une modification constitutionnelle par une province est-il juridiquement possible et souhaitable pour compléter la procédure formelle de modification constitutionnelle? Autrement dit, le référendum constitutionnel est-il conforme avec la partie V de la

Loi constitutionnelle de 198274 et compatible avec le parlementarisme et le fédéralisme canadien?

Est-ce que l’adoption de lois provinciales rendant la tenue d’un référendum obligatoire avant l’adoption d’une modification constitutionnelle se révèle efficace pour faire évoluer la Constitution et renouveler le fédéralisme canadien ou apporte-t-elle davantage de rigidité et de complexité au processus de modification actuel? Quels sont les objectifs recherchés par les législatures provinciales lors de l’adoption de ces lois? Est-ce que les lois rendant la tenue d’un référendum obligatoire avant l’adoption d’une modification constitutionnelle par une province ont des effets

71 P. TAILLON, Le référendum expression directe de la souveraineté du peuple? : essai critique sur la

rationalisation de l'expression référendaire en droit comparé, préc., note 8.

72 Louis MASSICOTTE et Antoine YOSHINAKA, «Les procédures de modification constitutionnelle dans les

fédérations», (1999-2000) 5 Rev. Const. Stud. 138.

73 P MARQUIS, préc., note 69.

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