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Le corps en mouvement dans les apprentissages

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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HAL Id: dumas-01018408

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01018408

Submitted on 4 Oct 2014

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Le corps en mouvement dans les apprentissages

Fanny Le Floc’H

To cite this version:

Fanny Le Floc’H. Le corps en mouvement dans les apprentissages. Médecine humaine et pathologie. 2014. �dumas-01018408�

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UNIVERSITE DE BORDEAUX

Institut de Formation en Psychomotricité

Mémoire en vue de l’obtention

du Diplôme d’Etat de Psychomotricien

LE FLOC’H Fanny

Née le 6 novembre 1991 à LONGJUMEAU (91)

Juin 2014

« Le corps en mouvement

dans les apprentissages »

Approche psychomotrice en amont et au cours des

apprentissages ainsi qu’en aval des difficultés.

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Remerciements

L’écriture d’un mémoire est un apprentissage, et pas des moindres. Il signe notre future entrée dans le monde professionnel.

L’utilisation des connaissances donc du « savoir-faire » et surtout de ce « savoir-être » sera alors un essentiel pour exercer le métier de psychomotricien.

Doutes, questionnements, incertitudes ont jalonné ces trois années aboutissant parfois sur une

anxiété tantôt entravante mais surtout motrice de recherches et de surpassements.

Je souhaite remercier toutes les personnes qui de près ou de loin ont contribué à la réalisation de mon mémoire,

Ma maitre de mémoire, pour ses conseils avisés et ses relectures.

Mes maitres de stage, pour leur étayage théorique et pratique ainsi que leurs pistes de réflexion. Tous les professionnels du multi-accueil pour leur intégration, disponibilité, transmission de savoirs et intérêt pour mon projet.

Un énorme merci à tous les enfants du multi-accueil pour la richesse des apprentissages qu’ils ont su me transmettre et sans qui la rédaction de ce mémoire n’aurait pas pu être possible. Mes copin(e)s, pour les heures passées à réviser, écrire le mémoire, partager nos ressentis et pour ces instants de détente et de rire qui ont été bénéfiques au bon déroulement de ces trois années.

Et pour finir, ma famille, mes parents, Chloé & Emma, pour leur présence, leur relecture et surtout leur soutien sans faille, trouvant les mots pour me redonner confiance en moi dans les moments difficiles.

"Maget mat o c'horf hag o ene a chome muioc'h e barzh." *

[Proverbe Breton]

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Avant-propos

« Le bébé n’a pas un corps, il est un corps et tout son éveil passe par son corps…

C’est un corps de relations. » J.Lévy

« Aucun symbole ne peut vraiment exister dans l’esprit de quelqu’un

s’il n’a pas d’abord une réalité dans son corps. »

M.Buber

« L'enfant ne joue pas pour apprendre, il apprend parce qu'il joue. »

J.Epstein

« Vivre avec d’autres du même âge, apprendre, être curieux, être évalué, se mesurer aux autres, faire plaisir aux parents en réussissant ou s’opposer à eux insidieusement en ne faisant rien : les enjeux sont nombreux, et pas des moindres. »

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Sommaire

INTRODUCTION

4

PARTIE I : EXPERIENCES DU CORPS POUR SE PREPARER A APPRENDRE

7

A) L’unité corporelle de l’enfant ... 8

B) Les apprentissages ... 13

C) Le corps en action, support des apprentissages ... 22

D) La psychomotricité et les apprentissages ... 32

PARTIE II : LES DIFFICULTES ET TROUBLES DES APPRENTISSAGES ET

LEURS CONSEQUENCES

42

A) Les difficultés et troubles des apprentissages ... 43

B) L’anxiété : un symptôme majeur à atténuer ... 51

C) Prise en soin psychomotrice de ces difficultés & troubles ... 54

PARTIE III : MISE EN PLACE D’UN ATELIER D’EVEIL CORPOREL & SUIVI

D’UN ENFANT EN REFUS DES APPRENTISSAGES

57

A) Atelier d’éveil corporel avec les tout-petits ... 58

B) Ethan – 5 ans et demi, en refus des apprentissages ... 70

CONCLUSION

84

BIBLIOGRAPHIE

85

TABLE DES MATIERES 88

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4

Introduction

Depuis quelques années le savoir est devenu « roi », sacralisé. L’apprentissage est alors devenu un domaine socialement important et valorisé. Aristote avait déjà pointé que « l’Homme désire naturellement connaître ».

Or, les corps sont souvent modelés par les pratiques cartésiennes passant en second plan des savoirs théoriques.

Pour P. Dennison « chaque enfant apprend différemment. Il ne ressemble pas plus à un autre enfant qu’une empreinte digitale ne ressemble à une autre. […] ». Si on lui donne la possibilité d’évoluer, l’enfant est capable de mener à bien le cycle de l’apprentissage.1

Il semble donc important de laisser une place au corps dans les apprentissages, pour que l’enfant puisse être conscient et responsable de son corps, qu’il le vive pour s’épanouir. C’est-à-dire éprouver du plaisir à jouer avec le corps plutôt que le « maîtriser » à proprement parlé et tenter de le contenir à tout prix.

Des difficultés et troubles des apprentissages peuvent apparaître, menaçant le bon déroulement des apprentissages et entravant le bien-être psychique et physique des enfants. L’anxiété est une des manifestations les plus retrouvée entraînant des répercussions sur l’estime de soi notamment.

C’est au cours d’un stage en hôpital de jour en juin 2013 que j’ai pu observer ces répercussions. Les enfants présentaient des troubles alimentaires, troubles envahissants du développement, troubles déficitaires de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H), troubles des acquisitions des coordinations (TAC), des refus scolaires anxieux...

Certains étaient submergés par une anxiété massive qui était observable cliniquement aussi bien en situation de bilan psychomoteur que dans les séances de psychomotricité.

Ce fut le point de départ de la construction de ma problématique de mémoire. Celle-ci a évolué et s’est affinée au regard de la structure de multi-accueil dans laquelle j’ai réalisé mon stage de troisième année.

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5

Cette structure accueille des enfants porteurs ou non de handicap, dont des enfants en refus et échec scolaire précoces.

J’ai alors pu réfléchir sur l’approche psychomotrice aussi bien en amont qu’en aval des difficultés.

Quels sont les liens entre les apprentissages et la sphère psychomotrice ? Dans quelle mesure le psychomotricien peut-il être un soutien en amont et au cours des apprentissages scolaires ? Comment se manifestent les difficultés et troubles des apprentissages ? Sur quoi le psychomotricien peut-il agir ?

Afin de répondre à ces problématiques, je commence par exposer les cadres théoriques sur lesquels ma réflexion et mes questionnements se sont appuyés.

Dans une première partie, j’aborde « l’expérience du corps pour se préparer à apprendre ». Les différentes définitions du corps ainsi que son lien indissociable avec l’esprit mettant en avant la concordance évidente avec les apprentissages sont explicités.

L’évolution de l’activité motrice de l’enfant est décrite ainsi que le développement de son schéma corporel, son tonus, sa posture et sa conscience du corps dans l’espace reposant sur de nombreuses expériences sensori-motrices.

J’expose ensuite les différents éléments constituant les processus d’apprentissage, c’est-à-dire la boucle sensori-psycho-motrice, les émotions, les sens, l’attention, la concentration ainsi que la mémoire et très brièvement les modèles psychologiques.

Puis à l’aide des théories de H.Wallon et de J.Piaget, je montre comment le corps en mouvement peut s’avérer être un support aux apprentissages au sens large ainsi que l’éveil des sens, la créativité et l’imaginaire parfois oubliés, alors qu’ils participent activement à cette dynamique.

Pour terminer cette partie je mets en exergue les liens entre la « sphère psychomotrice » et les apprentissages ainsi que les apports que peut avoir le psychomotricien en amont et en parallèle des apprentissages dits scolaires

Dans une deuxième partie, j’évoque les difficultés et troubles des apprentissages pouvant survenir ainsi que les causes et conséquences de ceux-ci.

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6

J’aborde ensuite la place du psychomotricien qui peut repérer ces troubles « par un bilan psychomoteur et les rééduquer au moyen de techniques de relaxation dynamique, d'éducation gestuelle, d'expression corporelle ou plastique et par des activités rythmiques, de jeu, d'équilibration et de coordination. »2

Puis pour terminer, dans une dernière partie, je développe un exemple d’atelier d’éveil corporel mis en place dans une structure de la petite enfance, en amont des apprentissages dits scolaires. Ainsi que le suivi individuel d’un enfant en refus des apprentissages au travers des problématiques sous-jacentes soulevées par celui-ci.

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7

Partie I : Expériences du corps

pour se préparer à apprendre

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8

A) L’unité corporelle de l’enfant

1) Le corps

a) Définitions

Selon le Larousse, le corps est considéré comme « la partie matérielle d'un être animé considérée en particulier du point de vue de son anatomie, de son aspect extérieur ».3 Cette définition rend compte d’un corps support et matérialisé.

Or, il existe de nombreuses définitions du corps et nous pouvons définir plusieurs « types » de corps, le corps pulsionnel réceptacle permanent d’éprouvés, le corps représenté dans la vie mentale (schéma corporel et image du corps), le corps comme agent psychomoteur, le corps instrument d’actions sur le monde…

Retenons que le corps est actif et souvent mêlé à la dimension d’esprit, de psychique, c’est pourquoi nous allons nous interroger sur le lien entre le corps et l’esprit.

b) Liens entre corps-esprit

Dualisme vs monisme

Cette question du dualisme est depuis toujours mise en mouvement, elle ne constitue pas une trajectoire simple allant de la séparation à l’union.

Platon au Vème siècle av. J.-C., dans Phédon, sépare le monde des idées et celui des sens, donc disjoint le corps et l’esprit. Cette séparation devient définitive lors de la mort, le corps ayant représenté une entrave à la perfection de l’âme au cours de la vie.

Aristote (-384 ;-322) s’oppose à Platon dans le sens où il place l’âme comme acte, comme forme du corps, c’est-à-dire condition aux fonctions du corps. Les deux se retrouvent alors en symbiose harmonieuse dans son ouvrage l’Âme.

Ils ont donc remarqué l’importance de la sensation, mais s’y sont cantonnés. La connaissance intellectuelle est alors une complexification de la connaissance sensible.

R.Descartes, lui, dans les Méditations métaphysiques, rejoindra Platon dans la distinction réelle entre corps et âme et cette confusion permanente du sensible qui peut alors tromper l’âme et le cogito.

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9

Mais comment âme et corps interagissent-ils s’ils sont indépendants ? Pourquoi les progrès de la physiologie ne sont-ils pas pris en compte à cette époque ?

Démocrite (-460, -356), avait déjà une pensée atomiste moniste philosophique. Il utilise lui aussi les mots corps et âme, mais en les tenants loin de la pensée dualiste qu’il juge réductrice. L’âme est alors corps et vice versa.

B.Spinoza, dans l’Éthique au 17ème siècle, donne une version du monisme moins « extrémiste », en inaugurant de nouvelles notions : l’affect, le désir, l’impulsion, l’imaginaire, l’inconscient, la représentation, le fantasme, qui dans leur ensemble constituent une réalité à la fois physique et psychique.

Nietzsche se place dans ce courant, une hiérarchie entre corps et âme est pour lui impossible, le corps vivant est alors au centre de sa philosophie naturaliste.

Aujourd’hui dans les modèles théoriques, on ne se trouve plus dans une posture clivée du corps et de l’esprit, mais dans une posture plus intégrative.

Intéressons-nous maintenant aux liens entre la pensée, le corps et le langage et donc à la concordance évidente avec les apprentissages.

Corps, pensée & langage

Quand un individu réagit à une situation, son corps entier est sollicité dans la réponse. L'organisation manuelle, verbale et viscérale fonctionnent alors ensemble de par le fait qu’elles existent comme des parties d’une organisation totale.

Cela nous montre que le corps se retrouve traversé en permanence par le psychique. « Chaque fois que l'individu pense, c'est la totalité de l'organisation corporelle qui est en jeu... et, on peut dire raisonnablement que la pensée peut être successivement kinesthésique, verbale ou émotionnelle. Si l'organisation kinesthésique est bloquée, l'organisation émotionnelle prédomine... ». Ces propos de J.B.Watson en 1926 sont repris par J.Cosnier (1986) [4].

Le corps-esprit forme donc une entité indissociable du langage.

Concordance évidente avec les apprentissages

Apprendre demande d’être en mesure de sélectionner les informations adéquates. On retrouve ici ce besoin de justesse des systèmes sensoriels. Les expériences du monde, données de l’expérience sensible, enrichissent les connaissances à l’aide de l’intelligence. Il y a donc un va-et-vient permanent entre réalité et intelligence.

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C.Potel souligne que « les enjeux et les conflits psychiques interfèrent considérablement dans la structuration du schéma corporel et dans l’intégration des différentes organisations praxiques ». [24] Cela met en exergue ce lien entre la psyché et le corps ainsi que leur alliance dans la motricité et les apprentissages.

Le corps et le psychisme formant une entité globale, une variation tonique, plus globalement une motricité est liée à un enrichissement psychique et inversement, donnant une voie d’accès solide aux apprentissages.

De plus comme le souligne S. Robert-Ouvray, « l’organisation motrice de base est le modèle et le passage obligé du psychisme pour se construire ».[25]

F.Joly rajoute que « la psyché est, quant à elle, drainée en continu de son ancrage corporel, sensoriel et perceptif ; mieux, qu’elle trouve son fondement et sa source vive dans les enjeux pulsionnels et interactifs pris dans et sur le corps. Plus précisément selon la formule canonique d’Ajuriaguerra elle est corps-en-relation. » [17]

c) Évolution du schéma corporel chez l’enfant

Le schéma corporel est une notion complexe qui se trouve difficile à définir de manière consensuelle.

J. De Ajuriaguerra le définit comme « édifié sur les impressions tactiles, kinesthésiques, labyrinthiques et visuelles, le schéma corporel réalise dans une construction active constamment remaniée des données actuelles et du passé, la synthèse dynamique, qui fournit à nos actes, comme à nos perceptions, le cadre spatial de référence où ils prennent leurs significations. »4

H.Wallon part du postulat que l’enfant au travers de son schéma corporel, construit sa conscience de soi.

Celui-ci n’est pas inné, il évolue au gré des expériences de la motricité et des sensations extéroceptives. Pour avoir une conscience de soi, comme un tout, il faut au préalable pouvoir distinguer ce qui appartient au corps propre et au monde externe. Il va se constituer par et pour l’action, à l’aide de la synthèse des impressions sensorielles et du facteur kinesthésique et postural5, donc se structurer dans le mouvement. La somatognosie ne naît que lorsque la conscience permet à l’enfant d’être autonome. Rien n’est alors définitif, ancré, ni statique, le tout se structure à l’aide de nouvelles expériences.

4 De Ajuriaguerra, J. (1970). Manuel de psychiatrie de l’enfant. Paris : Masson.

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L’élaboration du schéma corporel se fait en effet à partir de la régulation posturale venant de la réception de signaux de rétroaction due à des informations proprioceptives. Il y a un va-et-vient et des échanges permanents entre le schéma corporel, plutôt neurologique et l’image du corps, plus psychique. On ne peut rompre l’unicité de l’individu. « Le schéma corporel n’est pas une donnée initiale ni une entité biologique, psychique, c’est le résultat et la condition de justes rapports entre l’individu et le milieu »6 donc un vécu psychomoteur s’étayant par la relation permet la construction d’une représentation corporelle propre.

Au fur et à mesure de sa construction, le schéma corporel pourra devenir pour l’enfant un repère suffisamment stable. À l’aide de cette prise de conscience d’un corps unifié, il devient un vecteur d’action et d’émotion.

L’enfant va alors s’appuyer sur la connaissance de son schéma corporel, pour orienter son corps dans l’espace, déployer ses capacités motrices et praxiques. [18]

2) L’activité motrice de l’enfant

Il existe plusieurs pré- requis de la motricité volontaire.

a) Tonus & développement postural

Dès sa naissance, l’enfant est sujet à des alternances de tonus, hypertonicité et hypotonicité, qui sont en corrélation avec les alternances de besoins et satisfactions. L’alternance plaisir-déplaisir que le bébé éprouve dans ces situations sont des référents immédiats à la communication infra-verbale. Cette communication se retrouve au niveau des situations liées aux fonctions végétatives (nutrition, soins…) ainsi que dans les impressions proprioceptives.

J. De Ajuriaguerra en 1960, la décrit comme un dialogue tonique « l’enfant, dès sa naissance, s’exprime par le cri, par les réactions toniques axiales, par des grimaces ou gesticulations où parle tout le corps. Il réagit aux stimulations ou interventions extérieures par l’hypertonie, ou se laisse aller à une paisible relaxation. Mais c’est par rapport à autrui que ces modifications toniques prennent leur sens, et ce sont des réactions expressives que la mère interprète et comprend. »7

6 Wallon, H. (1959). Enfance.

7 J. De Ajuriaguerra & Cahen, M. « Tonus corporel et relation avec autrui, l’expérience tonique au cours de la relaxation. »

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12

Selon G.Haag, l’importance se retrouve dans la répétition rythmée des expériences de nourrissage où s’associent l’interaction des regards et l’enveloppement. Cela s’avère essentiel dans le développement psychomoteur et psychoaffectif.

Au niveau musculaire, un phénomène neurophysiologique est présent, c’est le tonus. Un tonus de fond est en permanence régulé par les influx nerveux. Le tonus est alors identifié comme un support de communication, il organise et structure les conduites, il a donc un rôle relationnel, c’est en quelque sorte un « signal émotionnel » qui est bidirectionnel entre les parents et son enfant.7

La régulation tonique s’effectue donc dès le commencement du développement de l’enfant en corrélation avec la structuration de la motricité. En effet, la maturation de la fonction tonique permet à l’enfant d’explorer de nouvelles postures aboutissant à une motricité et une exploration de son environnement. Donc le tonus, les postures et les actions sont liés entre eux. Un mouvement, un geste peuvent être entrepris qu’à partir d’un tonus et d’une posture particuliers car les modulations de nos actes sont dues à un ajustement dit tonico-postural. L’enfant va découvrir peu à peu son corps pour arriver à une première forme d’« unité motrice », d’« unité du corps moteur » vers 6 mois. [25]

La non-participation du dialogue tonique (tension musculaire de base) et une mauvaise modulation du dialogue tonico-emotionnel gérant la motricité en relation pourront affaiblir le développement cognitif et social futur.

b) Conscience du corps dans l’espace

Les flux sensoriels de quelques natures qu’ils soient (visuels, auditifs, tactiles…) modulent l’état tonique et permettent soit la fonction d’alerte, soit celle d’orientation et de traitement de l’espace par rapport au corps. « Le corps va représenter le point de référence et le moyen de créer cet espace orienté. » [18]

De plus si on développe des troubles d’intégration corporelle ou sensorielle, les fonctions cognitives dites supérieures peuvent alors être affectées. [5]

Pour acquérir la conscience du corps propre dans l’espace, il faut au préalable avoir construit son axe corporel donc être conscient, avoir intégré, la symétrie, l’axe de son corps, afin de pouvoir se situer face à son environnement.

L’enfant en s’appuyant sur ses acquis et ses relations va être en mesure de faire coïncider son niveau moteur avec d’autres niveaux d’organisation psychomotrice. [25]

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B) Les apprentissages

1) Les différentes définitions

La première définition de l’apprentissage dans le Larousse le décrit comme une « formation professionnelle des jeunes en vue d'apprendre un métier ; temps pendant lequel on est apprenti ».

La seconde le décrit comme une « initiation par l'expérience à une activité, à une réalité ». La troisième est plus globale, car elle désigne plutôt les différentes acquisitions c’est-à-dire un « ensemble des processus de mémorisation mis en œuvre par l'animal ou l'homme pour élaborer ou modifier les schèmes comportementaux spécifiques sous l'influence de son environnement et de son expérience. »

On note bien, au regard du dictionnaire Larousse, que les définitions de l’apprentissage sont en amont teintées par cette représentation quasi unanime du scolaire avant qu’il soit considéré dans sa globalité d’intégration de schèmes moteurs comportementaux.

Or, J-P.Pes définit l’apprentissage comme l’« intégration complète et correcte de nouvelles informations de tout type », car « trop souvent, l’apprentissage est utilisé uniquement dans le sens « académique » : les apprentissages scolaires. En réalité, l’apprentissage est beaucoup plus large et signifie la saisie et l’intégration de toute nouvelle expérience dans les mémoires et dans les comportements et, de ce point de vue, caractérise l’être humain dès la naissance et pendant toute sa vie ».

En effet, les expériences sont des moteurs d’apprentissage. On accède dans un premier temps à leur compréhension, puis à leur mémorisation et enfin cette expérience doit être utilisée à bon escient pour créer de nouvelles expériences. C’est un système fonctionnant en boucle.

Il rajoute que « ceci veut dire que le véritable apprentissage n’est pas non seulement l’acquisition d’une connaissance particulière, pratique ou théorique. Il s’agit aussi d’acquérir la conscience de l’activité par ce qu’elle provoque en nous-mêmes. Et il s’agit d’acquérir les concepts qui enveloppent les habilités individuelles. »

« Apprendre, c’est pour un sujet, dans un milieu culturel donné, d’abord comprendre son rapport au monde. » 8

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14 C’est sur cette notion globalisante de l’apprentissage que va s’appuyer la description des apprentissages, de ses différents acteurs et du rôle déterminant non seulement du psychique, du sensoriel, mais aussi du moteur. Cela va mettre en exergue l’existence de mécanismes plutôt dits facilitateurs ainsi que d’autres plus inhibiteurs. Cependant dans un second temps nous allons nous intéresser plus particulièrement aux apprentissages scolaires.

2) Les intervenants

Plusieurs fonctions interviennent dans l’intégration du processus des apprentissages.

a) Boucle sensori-psycho-motrice

[23]

La boucle sensori-psycho-motrice est un des vecteurs des apprentissages. Elle permet de transformer les informations reçues en motricité.

Au niveau sensoriel, système dit entrant de la boucle, des informations du milieu extérieur sont transmises aux organes sensoriels au niveau des entrées sensorielles. Les informations sensorielles transitent alors vers le cerveau qui les traite (association et compréhension) puis cheminent vers les organes effecteurs en adéquation qui coordonnent les gestes et mouvements adaptés. Ce sont les sorties motrices du versant dit « sortant ». Lors de leur cheminement de l’entrée à la sortie, les informations croisent les interfaces essentielles qui sont : l’attention, la mémoire et la proprioception.

L’attention permet de capter les informations, la mémoire aide à les reconnaître pour les trier. La proprioception a pour fonction de décoder les messages, les sensations provenant de notre corps propre qui peuvent être ceux de la douleur, du bien-être …

Les informations venant de l’extérieur et celles provenant de notre corps s’unissent et se conditionnent. Cela montre que l’inter individualité ne doit donc pas être mise de côté dans les processus des apprentissages.

Une boucle de rétroaction est présente entre les organes sensoriels et les organes effecteurs, elle permet de corriger l’empreinte des comportements et assure donc les apprentissages.

Le cerveau étant plastique, c’est-à-dire modulable avec l’apprentissage, de nouvelles voies neuronales se créent et les anciennes se perfectionnent. Cette boucle de rétroaction est donc le garant des apprentissages, car elle évalue les actes par rapport à une réalité extérieure afin de développer des capacités stratégiques de plus en plus performantes.

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15

On a une modulation qui permet petit à petit de développer la coordination sensori-motrice et les stratégies motrices et cognitives et ainsi comprendre le sens de nos propres actions.

Cette boucle sensori-psycho-motrice décrit l’intégration des informations internes et externes et représente le mécanisme, le véhicule de l’apprentissage, car elle nous permet d’anticiper, mais aussi contrôler les stratégies. Donc d’adapter puis de décider et enfin d’agir sur l’environnement de manière autonome.

b) L’éducation primordiale des sens

Dans les apprentissages, les sens ont un rôle primordial, ils doivent donc être étayés précocement. En effet, ils permettent d’effectuer une analyse périphérique de l’environnement. Les récepteurs périphériques sensoriels de l’enfant sont disponibles dès la naissance. Ceci est une prédisposition du nouveau-né qui petit à petit analysera mieux les stimuli et aura des réponses motrices de plus en plus précises à son environnement.

Nous percevons à l’aide de nos cinq sens. Or, trois d’entre eux ont un lien étroit avec les apprentissages : l’ouïe, la vue et la sensibilité tactile. Le goût et l’olfaction ont eux un lien plus éloigné.

Quels sont ces liens entre les systèmes sensoriels et l’apprentissage ? [23]

L’ouïe

L’enseignement étant transmis principalement par le langage oral, le système auditif s’avère essentiel. Pour apprendre, l’enfant doit entendre, mais aussi être en mesure d’écouter l’enseignant en discriminant sa voix aux autres sons de l’environnement scolaire.

La vue

Le système visuel reçoit de nombreuses informations. L’enfant doit voir, mais aussi discriminer ce qu’il doit regarder. Pour saisir un objet (le stylo ou la feuille par exemple) de façon précise, il faut une vision « binoculaire ». Ensuite, l’analyse et l’intégration des informations visuelles sont nécessaires pour pouvoir différencier certains mots ou distinguer le fond de la forme. Cela nécessite un champ visuel dit opérant.

Enfin, l’écriture n’est pas seulement le geste moteur, mais aussi le repérage spatial sur la feuille s’effectuant avec l’œil directeur.

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Sensibilité tactile

La peau est couverte de récepteurs sensoriels qui peuvent être classés selon le type de stimuli auxquels ils répondent. Le tact, la sensorialité proprioceptive est le premier support d’identification à la naissance. La sensibilité tactile est utile non seulement pour reconnaître et discriminer les objets qui sont en contact avec notre corps, mais aussi permet la préparation et l’exécution harmonieuse des gestes ou mouvements qu’ils soient élaborés ou non (préhension fine du stylo par exemple).

Le goût

Des terminaisons nerveuses, les bourgeons, sont présents sur la surface de la bouche et de la langue. Ils permettent aux messages sensoriels d’atteindre le cerveau après une première analyse réceptive. Une diction incorrecte peut être due à un dysfonctionnement gustatif et entraîner des défauts d’apprentissages.

L’odorat

Des bâtonnets olfactifs nous aident à percevoir les molécules odorantes présentent dans l’air. Le système olfactif est sélectif ne répondant qu’à certaines combinaisons de molécules. On a une représentation, une détermination ainsi qu’une différenciation de l’odeur avant son identification et transmission au cerveau. Dès la naissance et même dans le ventre de la mère, les odeurs ont une valeur de lien précoce puisque le bébé peut reconnaître l’odeur de sa mère. Petit à petit, les odeurs sont liées à des expériences, évoquent des souvenirs. Dans les apprentissages, l’olfaction peut avoir un rôle de rappel des informations contextuelles mémorisées.

Un ou plusieurs sens défaillants peuvent entraîner un retard des acquisitions et nécessiteront un apprentissage différent pour compenser ou suppléer la difficulté ou le trouble.

c) Rôle des émotions

A.Damasio en 1994, expose le rôle des émotions dans le conditionnement opérant (qui sera développé ultérieurement), avec sa théorie des marqueurs somatiques.

En effet, les souvenirs d’expériences identiques ou proches se trouvent réactivés dans le réseau neuronal lorsque nous voulons choisir un comportement dans une situation donnée.

Les signaux émotionnels somatiques rattachés aux souvenirs et la décision seront corrélés de manière non consciente aux marqueurs somatiques positifs.

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C’est-à-dire que la mémoire des émotions constitue une aide automatique alors que nous pourrions penser que seule la raison est utilisée. R.Descartes parlait de la théorie de la raison pure qui n’existe pas, A.Damasio pense que c’est une erreur. L’émotion précède et imprègne donc la cognition. De plus, de nos jours, de nombreux auteurs admettent cette théorie : il n’existe pas d’intelligence, de validité des raisonnements possibles sans émotion. [7]

Nos émotions et leurs variations sont exprimées par des changements toniques et réciproquement le tonus peut avoir une influence sur l’état émotionnel. Cela a été prouvé par la théorie de W.James et C.G.Lange, reprise par S.Bloch (1986,1989) qui décrit l’expérience émotionnelle comme fondée sur des modifications corporelles. On est donc amené à penser que les émotions agissent sur les actions et donnent aussi du sens aux évènements. Le stress par exemple peut avoir une influence sur la mémoire. [16]

Les émotions sont alors à prendre en considération dans l’analyse des processus d’apprentissage.

d) Besoin de l’attention et la concentration

Sans attention ni concentration, la boucle sensori-psycho-motrice ne peut pas fonctionner, car rien ne peut exister mentalement sans désir de faire donc de porter son attention sur une tâche. Afin que les informations puissent être captées, intégrées, reconnues, transmises … il faut un seuil d’attention et de concentration minimum. Le processus attentionnel est déclenché par les stimuli qui provoquent une réaction des récepteurs sensoriels.

L’attention est donc la mise en relation de l’intérieur et de l’extérieur, c’est-à-dire de l’instant T perçu par le sujet avec ce qui est capté par les sens.

Il existe plusieurs types d’attention, l’attention engagée, elle peut être sélective (attention sur une seule cible, mais qui peut être fluctuante), focalisée (soutenue sur une seule cible) ou partagée (partage de l’attention sur plusieurs tâches, exemple de la réalisation de mouvements complexes). Il existe aussi une attention secondaire dite diffuse qui permet de retenir certaines informations du contexte de l’environnement.

Avoir une attention engagée ne suffit pas, en effet, il faut que cette attention soit couplée à la concentration, indispensable pour effectuer une tâche pendant un temps donné.

La concentration devient dans les situations normales, de plus en plus performante avec l’âge et plus encline à éviter les stimuli perturbateurs de l’environnement.

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18

Mais il ne faut pas oublier qu’une attention soutenue engage une dépense d’énergie importante, qui peut alors entraîner une fatigabilité et des décrochages. De plus, une attention existe que si en amont on a la présence d’une intention d’acter.

e) Et la mémoire ?

Le Larousse définit la mémoire comme une « activité biologique et psychique qui permet d'emmagasiner, de conserver et de restituer des informations. »9

Sans mémoire, il ne peut y avoir de cognition ni d'intelligence, elle est en effet nécessaire dans le raisonnement et la planification de l'action.

La mémoire intervient donc dans la boucle psycho-sensori-motrice afin de donner des informations sur la réception des messages pour savoir s’ils sont nouveaux ou déjà connus et ainsi trouver des réponses adéquates à ceux-ci. En effet, elle permet de mémoriser en gardant une trace des expériences afin que nous puissions les récupérer et les restituer au moment souhaité.

Or il existe plusieurs types de mémoires originaires de structures et processus divers qui traitent alors l’information de manière différente. On distingue tout d’abord la mémoire motrice et la mémoire cognitive, ce qui fait écho au parallèle corps-esprit évoqué précédemment.

La mémoire des habilités motrices décrite par Hotz en 1985, est aussi appelée mémoire procédurale. Elle concerne tous les apprentissages moteurs, donc les souvenirs des procédures des mouvements, c’est-à-dire le « comment-faire ». Cette mémoire se doit d’être renforcée par des pratiques motrices régulières afin devenir « automatique », optimale et de le rester.

La mémoire cognitive, dite aussi déclarative, qui elle est l’aptitude de se rappeler des expériences et faits perceptifs. Elle permet alors de les organiser, mais aussi d’évoquer, de verbaliser les souvenirs.

Ces deux types de mémoires sont liés. En effet, une expérience motrice particulière peut laisser des traces dans la mémoire cognitive du fait de la forte émotion qu’elle induit. Elles appartiennent à la mémoire à long terme (MLT), sont complémentaires et permettent alors de réorganiser les souvenirs dans la globalité.

A contrario, la mémoire à court terme (MCT) ou mémoire de travail est limitée.

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Elle a pour fonction de conserver un petit nombre d’informations avant qu’elles soient traitées et qu’une « empreinte » soit envoyée à la MLT. La capacité de rétention de cette mémoire de travail est souvent celle pointée comme responsable des difficultés et troubles scolaires.

La mémoire et l'apprentissage sont en effet liés et souvent de ce fait confondus. L’enfant pour apprendre doit avoir une attention, une motivation et fournir des efforts suffisants car le degré d’attention porté aux cibles mémorisées joue sur la quantité et la qualité des informations retenues. Il doit non seulement prêter attention à l’information reçue, mais aussi décoder l’organisation de l’information, c’est-à-dire la traiter par la MLT. Pour cela il doit pouvoir associer ses expériences au bagage antérieur afin de l’intégrer totalement. Ces étapes demandent une consolidation qui sera acquise par la répétition.

Il n’existe pas beaucoup de pathologies « pures » de la mémoire chez l’enfant. Il faudra plutôt chercher les causes de l’inefficacité de mémorisation qui reposent souvent sur un défaut de motivation, d’attention, sur une anxiété intense… [11]

3) Les 4 approches psychologiques

Nous traiterons brièvement de l’apport des neurosciences sur les mécanismes cognitifs de l’apprentissage. En psychologie, on parlera plus des notions de conditionnement qui sont développées selon quatre approches. Aujourd’hui, on assiste à une approche psychologique un peu floue avec des principes reposant sur les divers apports des modèles, changeant d’une année sur l’autre au gré des réformes scolaires.

a) Modèle transmissif

Le modèle transmissif repose sur un modèle de transmission objectivé par C.Shannon et Weaver en 1949, le télégraphe. Cette théorie est également baptisée théorie de la « tête vide de l’élève », car elle part du postulat que l’enfant « ne sait rien » et que la situation finale souhaitée est que l’élève « sache ». Les hypothèses reposent sur la non-déformation du savoir transmis et la neutralité conceptuelle de l’élève. L’enseignant a donc pour rôle de transmettre à l’aide d’un discours clair son savoir. Les élèves doivent se contenter d’écouter et écrire sans aucun travail de réflexion ou recherche personnelle. Le savoir sera alors transmis et les élèves vont assimiler le message tel quel. Les erreurs seront alors uniquement imputables à une mauvaise écoute ou à une explication erronée. Ce modèle peut être efficace et rapide dans le cas où la motivation et l’attention sont présentes chez les élèves et dans celui de la transmission d’un savoir immuable.

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Cependant, il ne prend pas en compte l’inter individualité de la compréhension des élèves due à des acquis et potentialités différents. [13]

b) Modèle béhavioriste (Skinner)

B.F.Skinner fait atteindre un point culminant au modèle béhavioriste. Il reprend la voie tracée par J.D.Watson et s’intéresse à « maîtriser », selon ses mots, les savoirs dans les domaines des comportements en se reposant sur des expériences sur les animaux. On a donc la rencontre de deux courants, celui de la physiologie animale de I.Pavlov et celui de la physiologie expérimentale de B.F.Skinner. En 1930, dans les théories béhavioristes, les mots « apprentissages » et « conditionnement » sont utilisés comme synonymes. Le but étant de décrire les liens entre les stimuli et les réponses ainsi que les corrélations avec les différents acteurs présents (Méthode opérationniste). Le comportement opérant résulte d’un conditionnement, suivi d’un renforcement produit par l’environnement. La probabilité que ce comportement se produise à l’avenir augmente. Pour B.F.Skinner, afin de changer les comportements il faut agir sur le milieu. [10]Cette méthode appliquée au scolaire consiste à se centrer sur les comportements observables et mesurables chez les enfants en rejetant la référence à la conscience à condition d’utiliser les techniques adéquates. Pour modifier ceux-ci, on s’appuie sur un renforcement des réponses positives, c’est-à-dire une pédagogie par objectifs imposés et hiérarchisés par le professeur. Les limites sont parfois le manque de sens et de vision globale donnés aux connaissances. De plus, dans cette théorie il n’y a pas de prise en compte des processus cognitifs comme les émotions, la mémoire, le langage, les perceptions… [13]

c) Modèle constructiviste (Piaget)

Le modèle constructiviste repose sur l’apprentissage dans l’interaction du sujet et de son environnement. L’enfant apprend en s’adaptant et en agissant sur le monde. C’est donc un apprentissage par l’action. L’apprentissage se fait par un équilibre entre l’accommodation (intégration des données du milieu dans des schèmes antérieurs, donc croissance à structure égale) et l’assimilation (modification des schèmes du sujet en fonction des données, donc réorganisation de la structure) qui amènent à l’adaptation. Ces étapes du développement sensori-moteur décrites par Piaget seront reprises en détail dans un chapitre ultérieur.

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Dans cette théorie, le professeur se doit de fournir un enrichissement des situations et l’élève construit ses structures à partir de ses activités. Il manque aussi ici la place du langage, de l’affectif ainsi que des aspects sociaux. [13]

d) Modèle socio-constructiviste (Wallon, Vygotsky, Bruner)

Cette théorie se retrouve dans la continuité du constructivisme et s’appuie sur le postulat de la connaissance qui est une construction, mais en rajoutant qu’elle est teintée du social donc non individuelle. L.Vygotsky met en avant l’importance de l’interaction sociale dans le développement de l’enfant et dans sa construction du savoir. Pour étayer sa théorie il pose une définition de base de la zone proximale de développement, qui est la différence entre ce que l'enfant apprendra s'il est seul et ce qu'il apprend potentiellement avec une aide externe. L’acquisition de connaissances passe par une interaction, une communication entre l’enfant et l’enseignant. A contrario du modèle transmissif, le modèle socio-constructiviste part du principe que la tête de l’élève n’est pas vide de connaissances. L’enfant doit donner un sens à ses savoirs pour qu’ils fassent écho en lui et deviennent des connaissances. Les interactions sociales ne sont ici pas négligées. L’élève doit résoudre des problèmes pendant que le professeur construit un milieu propice à l’apprentissage. Dans ce modèle, l’erreur a une place de moteur des apprentissages, d’expression de la connaissance. [13]

L’enfant quand il naît possède la capacité de sentir, connaître et reconnaître, de percevoir son environnement. Devrons-nous tout lui apprendre ?

Le système scolaire, l’éducation au sens large, porte une importance considérable aux savoirs de l’enfant, à ses connaissances, à faire en sorte que l’enfant ait comme il est communément dit « une tête bien pleine et bien faite », qu’il puisse engranger des savoirs et savoir-faire. Garder une définition de l’apprentissage uniquement dans le domaine scolaire, fait penser que les organes des sens sont les seuls récepteurs passifs de celui qui apprend ?

Où se trouve donc la place du corps ?

Ne participe-t-il pas dans son entier aux apprentissages ? Est-il considéré comme acteur indissociable du cognitif dans les apprentissages ?

En effet, une prise en compte globale du corps permet à l’enfant d’accroître une confiance en soi ainsi que la curiosité pour permettre la stimulation, l’animation du désir et surtout du plaisir d’apprendre. Il ne faut donc pas oublier les processus affectifs et motivationnels se jouant parallèlement.

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C) Le corps en action, support des apprentissages

1) Motricité & apprentissages

a) La période sensori-motrice : clé des apprentissages

Selon Piaget

Dès son plus jeune âge, même in utero, le bébé prend connaissance, s’éveille par l’intermédiaire de sa sensorialité. Le dialogue tonico-émotionnel lui permet par différents canaux de rentrer en relation avec ses parents. Il utilise aussi la motricité de façon réflexe, notamment par les réflexes archaïques posturaux et ceux de survie (le réflexe de succion, le grasping, le réflexe de Moro, le réflexe Babinsky par exemple). On assiste alors à une systématisation des réflexes les uns par rapport aux autres, qui constitue la période des exercices réflexes de 0 à un 1 mois et demi environ.

Le nouveau-né au départ réagit aux stimuli de son environnement de manière instinctuelle, biologique ce qui l’amène à utiliser son corps de manière globale dans des expériences. Mais il existe tout de même une petite capacité adaptative. J.Piaget, lui préfère parler d’une première assimilation reproductrice. Le corps est au départ agi par l’action de l’autre et deviendra corps agissant et transformateur. [18]

Puis, petit à petit, cette découverte de l’environnement mobilise son corps et lui permet de découvrir toutes ses potentialités motrices, les réflexes archaïques, neurologiques sont consolidés et vont être intégrés dans des mécanismes de régulation, d’équilibre, de coordination de la motricité.

J.Piaget évoque la période des adaptations acquises ou premières habitudes se développant

entre 8 semaines et 4 mois. L’enfant reproduira très souvent ces actions trouvées par « hasard », qui sont des réactions circulaires primaires.

Vient ensuite la période de la préhension intentionnelle (de 4 à 8-9 mois), le bébé face à une certaine situation pose un geste. Ce schème de préhension s’opère sur diverses conduites et l’enfant prendra plaisir à saisir les objets et les jeter pour écouter le bruit produit par exemple. Cela constitue les réactions circulaires secondaires pour J.Piaget, car l’enfant reproduit activement un résultat obtenu par « hasard » non plus sur son corps propre, mais sur des objets extérieurs.

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Puis jusque 11-12 mois le bébé accède à la coordination des moyens et des buts. Cette étape joue un rôle clé dans les transformations des structures cognitives. En effet, jusque maintenant pour l’enfant, seules existaient les choses qu’il voyait. À ce stade, l’enfant acquiert la permanence de l’objet. On parle d’intelligence sensori-motrice, qui permet une appropriation du réel par assimilation et le comprendre par l’usage.

Après ce stade, l’enfant se trouve en mesure de découvrir activement des moyens nouveaux, donc dans une intention. J.Piaget parle de réactions circulaires tertiaires qui sont moins rigides, égocentriques et stéréotypées ainsi que plus variées dans l’espace et sur les objets.

Puis à 18 mois, il est en capacité d’inventer de nouveaux schèmes de coordination interne. L’enfant peut répéter des activités sans la présence de modèle, c’est l’imitation différée. Il est capable d’intériorisation, ce qui le mène à une forme primaire de jeu symbolique en passant d’une pensée en actions à une pensée représentative et mobilisatrice. Il utilise son corps pour reproduire une action sortie de son contexte.

Cela constitue un rudiment de langage avec des moyens non-verbaux. J.Piaget décrit cette étape comme précurseur du développement du raisonnement et de l’objectivation des connaissances. Elle clôture les six étapes de la période sensori-motrice. [10]

« L’intelligence sensori-motrice est donc une intelligence vécue et nullement réflexive. »10

Selon Wallon

H.Wallon, dans la description des différents stades de développement de l’enfant, prouve qu’une des origines de la vie sociale est la motricité.

Il décrit le stade de l’impulsivité et de l’émotion de 0 à 1 an, la motricité ainsi que l’émotion organisent le développement.

Ensuite, l’enfant passe au stade sensori-moteur où l’activité motrice est ouverte sur les objets extérieurs. L’enfant peut avoir des conduites instrumentales d’exploration, car il est en capacité de gérer les flux sensoriels de son environnement, donc d’avoir un équilibre tonique.

L’intelligence est à la fois motrice et sensorielle. La capacité de représentation symbolique, de la représentation de l’objet apparaît. Puis l’enfant va utiliser la sensori-motricité, pour accéder à des activités psychiques plus élaborées.

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Quand les systèmes sensori-moteurs sont stables, l’enfant peut accéder à la motricité instrumentale et gérer ses interactions avec le milieu. Il va alors utiliser la sensori-motricité, pour effectuer des activités psychiques plus élaborées.

Un bébé apprend à partir de son corps en action que ce soit au niveau cognitif, affectif ou émotionnel. Tout ce réseau d’échanges participe à la construction du soi. Les mouvements du corps dans l’espace structurent les représentations spatiales qui assurent ensuite un décodage des signaux sensoriels. C’est ce que souligne J.Paillard « l’appareil moteur des organismes apparaît comme une structure assimilatrice, transformatrice et génératrice d’ordre spatial. » [22] Si cette intégration est de bonne qualité, cela pourra alors faire office de support aux apprentissages.

De plus, les parents avec leurs regards, leur dialogue verbal et non verbal constituent un point d’ancrage pour l’enfant, sont porteurs, ce qui peut apporter une aide dans la construction d’une identité, une confiance en lui tout en s’appropriant son corps propre.

b) Du sensori-moteur au cognitif

L’intégration des messages sensoriels, sensori-moteurs, mnésiques ainsi que des messages venants de notre corps propre forme une base pour les apprentissages. En effet pour C. Solignac « c’est le corps qui représente le centre d’organisation des premières connaissances du monde environnant. » [4] La frontière entre perception et cognition se retrouve au carrefour de l’utilisation automatique des réflexes au passage d’un geste volontaire.

Il faut différencier le sensori-moteur du sensori-psycho-moteur. Lors de l’enfance, la sensori-motricité s’acquiert par la pratique et s’enrichit par les expériences sensorielles, mais sans que les processus dits cognitifs et attentionnels interviennent. Cela se fait sans la conscience de l’enfant donc de manière automatique. Alors que dans le sensori-psycho-moteur, les fonctions supérieures du cortex interviennent, donc la conscience est présente, on a les notions de volonté et de contrôle de soi qui interagissent. C’est ce qu’on appelle une motricité gestuelle volontaire.

Les expériences corporelles ont donc un rôle majeur dans l’évolution de l’enfant vers la pensée opératoire arrivant vers 7-8 ans et débouchant sur la possible connaissance du réel.

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En effet l’enfant a besoin d’une base solide au niveau physique et représentatif, d’une conscience corporelle harmonieuse pour que l’action soit réalisée par les muscles spécifiques et aboutissent à un mouvement. 11

2) Mettre le corps en « condition » pour les apprentissages

Il est important de mettre le corps en « condition » pour les apprentissages, car il est sans cesse mis à rude épreuve lors des longues journées d’école. Il faut donc aider l’enfant à habiter l’espace pour pouvoir concevoir le temps d’apprentissage. C’est-à-dire veiller à ce que l’enfant soit bien installé, écarter les objets qui ne seront pas utiles, faire de la place pour écrire sans gêne, avoir le dos bien droit, les yeux à la bonne distance sont autant de paramètres auxquels il faut porter attention …

Il faut donc aménager l’espace de travail pour être dans les meilleures conditions possibles pour les apprentissages. L’ergonomie est donc un paramètre important, car elle s’intéresse au corps pour lui éviter la fatigue en prenant en compte non seulement l’espace de travail, mais aussi les aires de déplacement.

En effet, une mauvaise installation pourra entraîner des tensions à certains endroits du corps et ces crispations pourront alors se déplacer au niveau psychique et causer des pertes d’énergie. Celles-ci peuvent être à l’origine de situations d’anxiété ou de troubles du sommeil et générer un cercle vicieux.

L’enfant doit de plus être présent et attentif dans le temps dédié aux apprentissages, donc ramener l’esprit là où se trouvent le corps et ses actions. Les observations, visualisations où tous les sens sont sollicités, visuel, auditif, olfactif, kinesthésique… donc les diverses représentations si elles sont de bonne qualité, peuvent amener à une bonne disponibilité mentale dénuée de pensées parasites. Un travail sur ces visualisations et sur le souffle en amont peut avoir un impact sur la détente et la centration et donc sur la disponibilité nécessaire.

Une attention préliminaire à son corps peut être bénéfique avant d’attaquer une journée scolaire pour aider à une mise en condition à la fois du corps qui sera alors moins en souffrance et par conséquent de l’esprit.12 « L’approche globaliste des attitudes permet de comprendre les implications motrices de la posture assise, de repérer des lieux et de les qualifier à partir des indicateurs de lectures retenus : crispations, bâillement, extensions, rétractions…, signes de fatigue ou de détente, de bien-être ou de mal-être, d’agitation ou de calme. » [12]

11 Bullinger, A. (2004). Le développement sensori-moteur de l’enfant et ses avatars.

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3) Les expériences corporelles préparent l’apprentissage

Outre le langage, l’Homme possède une expressivité du corps. Il peut être soit acteur principal, soit témoin muet, mais tout ce qui est expérimenté alimente le vécu du corps gardant tout en mémoire. C’est grâce à cette expressivité que nous pouvons nous développer et communiquer. C’est ce qu’on appelle le langage non verbal primaire.

Or petit à petit, le développement du langage peut opprimer l’expression du corps qui s’avère moins facile à interpréter. L’enfant doit éprouver à la fois un plaisir de l’être et de l’agir, c’est-à-dire un plaisir de s’exprimer grâce à sa corporalité.

Le plaisir entraînera la nécessaire motivation à la mise en action de l’enfant. Sans celle-ci, l’apprentissage n’aura pas lieu, car il faut un investissement de l’enfant. « Donner à l’enfant le désir d’apprendre et toute méthode sera bonne ». 13

Cette expression corporelle de l’enfant influe sur trois registres préparant à l’apprentissage qui sont l’expérience du corps propre, l’expérience du corps en relation et l’expérience d’une création, une imagination. [1] En effet, elle est « toujours créatrice, porteuse, expression des émotions et des affects ». [27] L’expérience d’une création et imagination, qui tient une place forte dans les mécanismes d’apprentissage sera reprise plus en détail dans le paragraphe suivant. Il faut laisser l’enfant réaliser ses propres actions, qui seront tissées d’émotions, pour que

celles-ci soient enregistrées dans sa mémoire et qu’il puisse mettre des mots sur ses expériences. Si l’on fait à sa place, rien n’est mémorisé ou alors seule l’inefficacité de son action, puisque

quelqu’un agit à sa place et qu’il se retrouve dans une impossibilité d’agir. Il y a un besoin de création d’un espace mental pour réfléchir, expérimenter. [21]

Un temps est nécessaire à l’indispensable, « expérience du corps pour se préparer à

apprendre». [27] P.E.Dennison, Ph.D, éducateur professionnel et chercheur en neurosciences,

relate la corrélation entre le développement physique, l'acquisition du langage et la réussite scolaire. Il démontre le lien entre les muscles du corps qui bougent, l’activation des réseaux neuronaux du cerveau et l’apprentissage qui sera alors intégré par la répétition et l’enchainement des mouvements que les enfants pratiquent d’eux-mêmes.

Il note alors le procédé antinomique dans le fait d’obliger les enfants à rester des heures assis sur leur chaise. Cela va à l’encontre de leurs besoins physiologiques et leur capacité innée d’apprendre par le mouvement. 14

13 Rousseau, J.J (1762). L’Emile ou de l’éducation.

14 Dennison, P.E « C’est par le mouvement que nous apprenons. »

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De plus, par la mise en jeu du corps, l’activité corporelle, l’enfant peut réaliser une activité de symbolisation c’est-à-dire qu’il va passer de moyens de symbolisation (motricité signifiante) à un contenu symbolique (le signifié) qui demande une mobilisation imaginaire, relation au réel et tout ceci va amener à des situations de communication c’est-à-dire être sous le regard d’autrui…15

4) Apport de la sensorialité et du toucher dans les apprentissages

Nous avons déjà abordé le rôle prépondérant des sens dans la sphère sensori-psycho-motrice qui gère les apprentissages. Ils sont donc impliqués dans le développement physiologique, cognitif et psychologique de l’enfant.

Comme l’imaginaire, la sensorialité de prime abord, paraît fort éloignée du domaine des apprentissages. Un cadre suffisamment riche et adapté peut aider l’enfant à se construire des représentations et ainsi accéder aux processus des apprentissages. Ces actions et expérimentations sont effectuées obligatoirement par une « utilisation » du corps et de ses organes sensoriels captant les informations. Pour l’enfant et notamment jusque 6 ans, les sens sont les piliers de leurs sources d’informations qui seront transformées en des pensées et actions matures.

Ceci peut se retrouver dans « l’ambiance » que l’on peut qualifier de sensorielle. Elle est décrite par M.Montessori comme ce contexte dans lequel l’enfant se sent libre et peut ainsi agir avec une certaine spontanéité des mouvements. La multiplication des expériences et notamment sensorielles permettent d’accroître les représentations indispensables aux apprentissages. C’est donc à la fois un vecteur des apprentissages, mais dans le même temps un acteur dans le développement et l’épanouissement des enfants.16 Les sens peuvent alors avoir un rôle d’objet d’étude, mais aussi d’outil, comme médiateur pour accéder aux savoirs.

De plus, le niveau d’éveil est en diminution quand les signaux physiques qui véhiculent des informations sont pauvres ou quand la situation est monotone. [12]

On retrouve ici cette manière active de vivre les apprentissages, de les faire passer par le corps, qui recoupe nos observations précédentes. C’est aussi un moyen d’apprentissage du corps par le corps.

15 Berliaz, R & al. (1988). Les activités corporelles d'expression à l'école maternelle et à l'école élémentaire. Paris : Revue

EPS.

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Ainsi les enfants partent de leur environnement concret pour après pouvoir utiliser l’abstraction nécessaire à l’activité de l’écriture et la lecture. (Cf : D) b) liens apprentissages – sphère des acquisitions psychomotrices).

Le toucher, un des cinq sens, est souvent retrouvé et utilisé en psychomotricité, c’est pourquoi nous le développerons un peu plus en détail. Il permet de réaliser plus efficacement les associations arbitraires entre stimuli auditifs et visuels. Chez les enfants, le sens haptique permet la même fonction, donc cette communication entre les sens. L’apprentissage de la lecture et des lettres peut alors se faire de manière multi sensorielle et l’entrainement visuo-haptique pourrait permettre l’apprentissage des formes géométriques. 17

Certains élèves utilisent le toucher comme canal sensoriel pour acquérir des apprentissages, ils ont besoin de passer au préalable par des savoir-faire, pour assimiler afin d’être capables de les retranscrire. [12]

L’utilisation des sens est donc un atout supplémentaire pour enrichir et accéder plus facilement aux différents domaines et exigences des apprentissages.

Le psychomotricien peut étayer les sensations et perceptions du corps pour ensuite favoriser l’accès à la symbolisation et enrichir les représentations.

De plus, nous verrons qu’un défaut sensoriel peut être à l’origine d’une difficulté d’apprentissage.

5) L’imaginaire ouvre une porte à la réflexion

L’imaginaire et la créativité sont souvent délaissés dans les méthodes éducatives alors que les susciter accompagne la capacité d’accroître le temps d’écoute et d’attention. L’enfant développe ainsi une présence attentive et donc une aptitude à apprendre plus grande.

Le système éducatif porte sur des « faire pareil », des recopiages d’actions donc privilégie la mémorisation au profit de la réflexion. Cette mémorisation s’accompagne d’une rigidité de l’esprit dans sa façon de penser et ne permet plus une fluidité.

17http://webcom.upmfgrenoble.fr/LPNC/LpncPerso/Permanents/EGentaz/web/?Apprentissages_scolaires:5._Apprentissage_d

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Devant l’exigence des programmes éducatifs et les pressions sociétales et parentales, il n’y a plus qu’une infime place pour le rêve gommé par cette notion d’efficience. De plus, l’imagination étant une donnée subjective et propre à chacun, donner une note à celle-ci comme le demande l’exigence scolaire s’avère assez compliqué.

J-P.Pes exprime que « l’accès à la connaissance se fait grâce à la qualité des stratégies d’enseignements mises en place » et que « l’imagination est mue par le sens commun, par l’intelligence et par l’appétit ». [23] Dès lors, la richesse informationnelle devient centrale dans les apprentissages. Pourquoi ne pourrait-elle pas se construire dans l’imaginaire qui plait tant aux enfants ?

Du point de vue de la phylogenèse, la créativité apparaît au cours de l’évolution comme le moyen de développer de nouvelles stratégies.

À tort, l’imaginaire est souvent pris dans un amalgame avec la créativité, les pensées « délirantes », alors qu’il est tout aussi utile dans la capacité de cerner les problèmes et de trouver des solutions différentes. Imaginer le monde, avoir un esprit de curiosité, permet de le comprendre et de donner vie à ses idées. L’imagination liée à l’effort participe à la réflexion bien que ces deux termes soient antinomiques, car le premier n’obéit à aucune règle alors que la réflexion demande logique et rigueur.

Or, pour réfléchir, il faut oser sortir des chemins battus, des cadres normatifs, des modèles de penser et aller vers l’inconnu. Cela nécessite donc d’oser prendre des risques de se tromper et d’échouer une ou plusieurs fois avant de réussir. Imaginer peut permettre de ne pas se retrouver bloqué devant l’inconnu, d’être dans une curiosité quand on découvre qu’il peut exister d’autres solutions que celles déjà expérimentées ou inculquées. On accède alors à une vision plus large et affinée des possibilités et de la réalité.

Ainsi allier l’imagination et la logique permet de leur donner une plus grande efficience. La pensée peut se laisser aller à des instants créatifs, tout en veillant à ce qu’elle vienne aux moments opportuns se ré-ancrer dans la réalité. [21] Ces étapes étayent la capacité de réflexion, l’affirmation et accroissent la confiance en soi.

L’imagination est donc bel et bien un processus mental qui est dynamique, mobile, anticipateur, c’est-à-dire une élaboration intellectuelle riche. Pour imaginer il est nécessaire d’associer des images stockées que l’on perçoit ou que l’on connaît pour inventer, créer un nouveau sens.

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On transforme, on associe des choses partant de la réalité, du connu, mais on doit s’en extraire pour concevoir du personnel et de la nouveauté. « L’imaginaire permet à l’enfant de vivre la réalité. »18

La lecture d’un livre, par exemple, demande un effort de mise en scène pour illustrer les propos dans notre tête, donner du sens aux mots, après les avoir préalablement décodés. C’est donc un processus actif mettant à disposition la créativité et l’imaginaire. Lire ou raconter une histoire sont des ouvertures structurantes vers une pensée logique. Cet étonnement, cet émerveillement ouvrent la porte aux savoirs et aux connaissances.

Or, les jeux actuels laissent de moins en moins de place à l’imagination.

Il est donc intéressant de donner du temps aux tout-petits pour partager des activités, des temps de rencontre, d’échanges portant sur le rêve, le merveilleux. L’enfant est un être symbolisant qui plonge dans les mystères de la vie avant de pouvoir en organiser rationnellement le savoir. L’utilisation de l’incarnation permet d’investir des choses pour en tirer des connaissances en étant capable d’en sortir pour alors les décrire ou les utiliser. Cela est rendu possible uniquement par l’imagination. [21] Ainsi cette familiarisation avec le monde de l’imaginaire est favorable à une réflexion, une pensée symbolique et logique qui se structure très tôt.

D.Winnicott introduit la notion de jeu et notamment du jeu symbolique, jeu d’imagination. Ce type de jeu permet de revivre des situations vécues, par imitation, par identification c’est-à-dire en les transposant symboliquement, donc en ayant recours à l’imagination afin d’assimiler le réel au Moi. Pour D.Winnicott en jouant, l’enfant se situe dans l’espace des phénomènes transitionnels dans une « aire d’illusion », où la réalité, tout en étant prise en compte, peut être remodelée en fonction des désirs.

Les jeux qu’ils soient du domaine du game (jeu réglé, conventionné) ou du play (jeu spontané sans règle formelle) développent la pensée, le raisonnement, la mise en place de stratégies ainsi que l’acceptation des règles et de l’échec. [31]

Il est aussi important, en amont des apprentissages scolaires, de repousser le plus loin possible l’époque de la « bonne réponse » de l’école, la pensée binaire, cette obligation de résultat. Cette époque est génératrice de compétition, d’anxiété de performance qui est néfaste pour le développement psychique et corporel de l’enfant.

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La notion d’éveil repose sur un modèle de « laisser-faire » qui remplace l’étouffante spirale du « faire pareil » ou « faire faire ». La rêverie, l’accès à l’imaginaire permet le «lâcher-prise», c’est un élément essentiel pour composer avec ses difficultés et de donner du sens tout en protégeant l’enfant d’éventuelles angoisses pouvant être liées au sentiment de compétition. On a l’apparition du « si » à la place du « oui » ou « non » ou du « juste » ou « faux » qui permet d’accéder à l’imagination donc à la réflexion. C’est-à-dire aller plus loin que la logique objective. [21]

Cependant, la vie ne s’apprivoise pas que dans le mouvement et les sur-stimulations, mais aussi dans une lenteur sensorielle où l’enfant peut se poser librement pour observer et se trouver en capacité de réfléchir.

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D) La psychomotricité et les apprentissages

1) Liens entre la « sphère » psychomotrice et les apprentissages

a) La boucle sensori-psycho-motrice & les concepts psychomoteurs [23]

Nous avons montré précédemment le lien entre cette boucle sensori-psycho-motrice et les apprentissages.

Un autre lien est notable entre cette boucle et les concepts psychomoteurs :

Temps

ESPRIT

PSYCHO

SENSORI

MOTEUR

Hormones

Rythme(s) Espace Qualité des informations Latéralité Tonus & Axe corporel Image du corps & Schéma corporel Equilibre Coordination

Figure

Figure 1 : La Boucle sensori-psycho-motrice et les concepts psychomoteurs
Figure 2 : La sphère des répercussions des difficultés et troubles des apprentissages Agressivité  réactionnelle
Figure 3 : Effets des dominos des apprentissages adaptés à la situation d’Ethan

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