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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Proposition d'un cadre possible pour une transposition didactique de la démarche expérimentale

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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PROPOSITION D'UN CADRE POSSIBLE

POUR UNE TRANSPOSITION DIDACTIQUE

DE LA DÉMARCHE SCIENTIFIQUE

Bernard DARLEY

I.F.M. - Université Joseph Fourier, Grenoble 1

MOTS-CLÉS: TRANSPOSITION DIDACfIQUE - DÉMARCHE SCIENTIFIQUE

RÉSUMÉ : L'analyse épistémologique de la démarche scientifique ne doit pas conduire l'enseignantàeffectuer un choix d'école (positiviste contre rationaliste) ou privilégier une forme de penséeà une autre (induction contre déduction) mais doit, à l'inverse, l'amener à envisager cette diversité des approches comme un objectif d'enseignement. Considérer la transposition didactique comme une construction finalisée par ses seuls objectifs permet, une fois pris en compte l'ensemble des contraintes, d'effectuer des choix dont le degré de liberté sera justifié par les objectifs assignésà la séquence.

SUMMARY : The epistemological analysis of the scientific process must not lead the teacher to make a choice (positivist versus rationalist) or ta give a greater importance to one way of thinking rather than another (induction versus deduction), but it must lead him to consider a variety of approaches as a teaching objective. Considering the didactic transposition as a construction finalised by its own objectives, once the ensemble of contraints are taken into account, permits choices whose degree of freedom willhejustified by the objectives wich are set for the sequence.

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1.INTRODUCTION

L'enseignant qui se propose d'initier ses étudiants à la démarche scientifique se trouve confronté à un problème dont les termes sont les suivants:

- partir d'un savoir dont il n'est que le dépositaire et pas l'un au moins des initiateurs, · disposer d'une formulation de ce savoir déjà plus ou moins imprégnée de dogmatisme, · disposer d'un temps pédagogique qui n'est pas le même que celui dont dispose les chercheurs, · prendre en compte la diversité des approches possibles de formulation et de résolution scientifique d'un problème et faire un choix qui soit justifié par ses objectifs,

· devoir initier une réflexion à partir de critères établis pour fonctionner dans une communauté de pairs alors qu'il existe, entre ses élèves et lui, une différence de statut évidente dont l'une des composantes est son rôle d'évaluateur,

- prendre garde, en cours de procédure, que la connaissance qu'il cherche à faire acquérir et les conceptions des élèves sur ce même concept ne soient pas incommensurables,

- veiller, enfin,à ce qu'au terme de la procédure, et à la différence de ce qu'on peut attendre d'une communauté scientifique et tout en privilégiant une réflexion critique, l'ensemble de la classe ait acquis une connaissance commune,

Comme toute transposition didactique, celle de la démarche scientifique doit, d'abord, être une construction. Si ses racines sont à rechercher, sans conteste, dans l'épistémologie (ce qui implique une formation des enseignants dans ce domaine), elle doit tenir compte, dans une interaction constante

- des capacités des élèves à gérer l'abstrait,

- des obstacles liés au concept en jeu (notion d'échelle, de transfert d'énergie, de transformation de la matière, etc.),

· des contraintes, qu'elles soient techniques (matériel disponible, taille des salles, etc.) ou institutionnelles (programme, nombre d'élèves ou d'étudiants par classe, etc.),

· mais aussi, et surtout, des objectifs de l'enseignant.

Ce sont ces derniers qui justifieront les libertés consciemment prises avec l'épistémologie ou l'histoire des sciences que la construction de séquences d'enseignement doit autoriser.

2. OBJECTIFS D'UN ENSEIGNEMENT SCIENTIFIQUE EXPÉRIMENTAL L'objectif d'un enseignement scientifique est d'abord, c'est une évidence, de transmettre des connaissances scientifiques. Mais c'est aussi de permettre aux élèves et aux étudiants de différencier ce qui est de l'ordre du scientifique de ce qui ne l'est pas. Il ne suffit pas d'affirmer que les connaissances transmises sont scientifiques pour que les élèves soient à même de percevoir en quoi elles le sont réellement.

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2.1 Le caractère scientifique du savoir transmis

Le caractère scientifique d'un savoir enseigné peut s'évaluer selon deux critères: sa "valeur scientifique" et sa"qualité scientifique"

La "valeur scientifique" des connaissances transmises, en terme de contenu, trouve sa justification dans ses origines. Être tirées d'un ouvrage de référence leur confère un crédit scientifique immédiat. L'enseignant n'étant pas, en règle générale, le producteur du savoir qu'il dispense,ilse rend crédible en lui assignant une valeur scientifique qu'il emprunte aux auteurs et le rend crédible par l'autorité qu'il incarne.

La"qualité scientifique" est, elle, davantage liée à la mise en forme didactique qui accompagne l'exposé des savoirs scientifiques. Si la dogrnatisation qui apparaît lors de la mise en texte des savoirs n'est pas tempérée par une reformulation, le mode de transmission aura toutes les chances d'être lui-même dogmatique. Cest l'autorité de l'enseignant et J'étiquette de scientifique qui lui est attribuée qui feront de son enseignement un enseignement "scientifique".

La "qualité" scientifique d'un savoir ne se mesurera pas seulement à la qualité du discours qui l'expose, elle se mesurera égalementàla démarche de validation qui doit J'accompagner.

2.2 La convergence des acquisitions individuelles vers un savoir commun

Cet objectif està la limite de la contrainte. Cest en effet, un objectif essentiel, pour un enseignant que de conduire l'ensemble de sa classe vers un savoir qui sera commun, sinon identique,à tous.Àla différence des communautés scientifiques qui peuvent fonctionner en s'opposant sur le fondement même de leurs théories, tous les élèves d'une classe devront,àterme et sur chacun des concepts abordés, tendre vers J'appropriation d'un savoir identique.

Cet objectif demande une grande vigilance dans la mesure où le savoir enseigné et les conceptions des élèves ne doivent, en aucun cas, être incommensurables. Si l'on veut pouvoir faire évoluer ces dernières, il convient qu'elles présentent avec le savoir enseigné un minimum de convergence.

3. PROPOSITION D'UN CADRE POUR UNE TRANSPOSITION DIDACTIQUE DE LA DÉMARCHE SCIENTIFIQUE

Le cadre présenté ici est,ilconvient de bien insister, un choix parmi de nombreux autres possibles.li

ne s'agit donc pas de prétendre imposer une approche unique et universelle de la démarche scientifique, mais de proposer un synopsis pour la mise en acte d'une approche analytique à fondement réaliste. L'objectif visé est d'amener les élèves à explorer une problématique de manière totalement autonome, de formuler des hypothèses et de proposer des modèles testables expérimentalement associésàun protocole totalement explicite.

L'objectif est donc de recréer dans la classe ce que Guy Brousseau appelle une «micro-société scientifique». Le propre d'une société scientifique étant de fonctionner entre pairs, l'enseignant en est donc ipso facto exclu puisqu'il y jouirait d'une autorité trop écrasante.ÀJ'égal des chercheurs, les

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élèves vont donc devoir s'approprier un problème, personnaliser et expliciter leur approche et leurs propositions de résolution, tenter de valider ces dernières avant de proposer une réponse qui devra être acceptée par la communauté et qui deviendra, après reformulation (avec l'aide de l'enseignant) un savoir appartenantà cette même communauté : ce sera le savoir du groupe, ou de l'ensemble des groupes de même niveau.

Ce contexte pédagogique et épistémologique rappelé, les étapes de la transposition didactique, adaptées de celles définies par Guy Brousseau dans sa théorie des situations, seront les suivantes: - une phase de contextualisation,

- une phase de dévolution du problème,

- une phase d'appropriation et de personnalisation du problème et des réponses à y apporter, - une phase de validation expérimentale,

- une phase de dépersonnalisation et de socialisation de la réponse au problème.

3.1 La phase de contextualisation

C'est dans cette phase que le contexte conceptuel et scientifique du problème sera élaboré. Elle va permettre également de donner aux étudiants les outils conceptuels nécessaires pour que le problème qui leur sera soumis ait un sens.

3.2 La phase de dévolution du problèmel

Cette phase et la précédente constituent les phases-clés de toute la démarche. Ce sont elles qui vont donner sa crédibilitéàl'ensemble des étapes qui vont suivre.

La phase de contextualisation doit être menée jusqu'au point où l'on est assuré que les étudiants sont prêts à recevoir et, surtout,às'approprier le problème qui va leur être soumis.

La phase de dévolution est le moment critique où le problème proposé par l'enseignant doit devenir un problème intéressant à résoudre pour l'étudiant en l'absence de toute contrainte liée à une évaluation sommative. Il faut donc que la formulation du problème lui permette,àl'aide des outils proposés au cours de la phase de contextualisation, d'en saisir les implications et que l'enjeu lui paraisse mériter le temps qu'il va devoiryconsacrer.

Une des principales difficultés de cette phase réside donc dans la formulation du problème lui-même qui doit être:

- suffisamment simple (en particulier en ce qui concernelenombre de facteurs en jeu) pour que les élèves pensent pouvoir le résoudre,

- original sous peine de voir les élèves aller chercherlabonne solution dans le pretnier ouvrage venu, - enfin, il doit faire appel au raisonnement davantage qu'à des connaissances prérequises de façon à laisser aux élèves une marge d'invention aussi large que possible (en leur précisant que cette possibilité d'inventer plusieurs solutions sans faire intervenir de critères de valeur2fait partie de la

règle du jeu).

tOuphase de "proposition du problème" pour reprendre la terminologie de Johsua et Dupin (1993). 2C'est bien, c'est pas bien, c'est ridicule, loufoque, impossible, etc.

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3.3 La phase d'appropriation et de personnalisation

Cette phase, qui se déroulera en dehors de la classe, doit être suffisamment longue pour permettre à l'élève de s'imprégner du problème posé, de l'accommoderàsa personnalité, d'en donner sa propre interprétation et, enfin, de proposer ses solutions personnelles. Elle doit également être suffisamment courte pour qu'il ne se désintéresse pas du problème, simplement parce que le moment de sa résolution est trop éloigné du moment où il a été posé.

C'est au cours de cette phase que l'élève sera amenéà proposer des hypothèses et à en explorer les conséquences en élaborant des modèles susceptibles de donner du sens au phénomène qu'il doit mettre en évidence tout en leur donnant une forme qui les rende transmissibles au reste de la communauté. Il y a donc une double contrainte: construire un modèle qui soit heuristique (au sens où il doit aiderà la compréhension du phénomène soit d'un point de vue descriptif, soit d'un point de vue explicatif) et transmissible (au sens oùildoit être intelligible par des pairs).

3.4 La phase de validation

C'est le T.P. proprement dit. Au cours de celle phase les élèves vont devoir, sous une forme ou une autre, exposer publiquement leurs propositions de solution, et éventuellement les justifier si d'autres en font la demande.

Avec l'aide de l'enseignant, ils devront mettre en œuvre le protocole expérimental qui doit faire partie des propositions et tenter de vérifier si les solutions avancées sont, ou non, validées. Le critère de validation du résultat de la manipulation ne sera plus la conformitéàune norme imposée par l'enseignant mais la conformité aux prévisions faites par les étudiants eux-mêmes.

3.5 La phase de dépersonnalisation et de socialisation de la réponse

Cette phase va consister à mettre en commun tous les résultats et àouvrir un débat sur ce qu'il convient de retenir comme réponse au problème. La communauté "scientifique" que constitue l'ensemble des élèves réunis va devoir statuer sur une réponse qui dépassera l'individu qui l'a émise pour devenir une réponse acceptée par tout le groupe et prendre ainsi le statut de savoir socialisé. Du fait de sa miseàl'écart pour permettre le fonctionnement de cette micro-société scientifique, l'enseignant devra jouer un rôle de meneur de jeu (mais aussi de modérateur lorsque les esprits ont tendanceàs'échauffer3).Les difficultés de ce rôle ne sont pasàsous-estimer. Il requiert, en effet, la capacitéà s'adapter, à réagir et, surtout, à relancer les débats en fonction des propositions, parfois inattendues, des élèves. Il faut accepter toutes les propositions, ne rien rejeter qui n'ai fait l'objet d'un débat contradictoire ou d'une invalidation expérimentale. L'enseignant devra également se garder d'intervenir systématiquement pour remettre les élèves "sur la voie". Sauf cas d'impasse totale, ceux-ci devront apprendreà aller jusqu'au bout de leurs raisonnements et de leurs fausses pistes. La non intervention volontaire, mais contrôlée, fait partie du processus pédagogique.

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4. CONCLUSION

Ce canevas didactique posé, il convient, bien entendu, de lui associer un contenu disciplinaire.Ce

cadre de transposition didactique de la démarche scientifique a été testé avec succès dans deux structures d'enseignement très différentes en mettant en scène deux concepts égaiement différents.La première expérimentation s'est déroulée en classe de 3ème des Collègesàpropos de la digestion de l'amidon par l'amylase salivaire; la seconde en 2ème année d'université, dans le cadre des T.P. de physiologie animale portant sur le potentiel d'action nerveux.

BIBLIOGRAPHIE

BROUSSEAU G., La transposition didactique, inÉcole d'été de Mathématiques, Orléans, juillet 1985.

BROUSSEAU G., Fondements et méthodes de la didactique des mathématiques,Recherche en Didactique des Mathématiques, 1986,2,33-115, Grenoble:LaPensée Sauvage.

BROUSSEAU G., Ingénierie didactique, d'un problèmeàl'étudea priori d'une situation didactique, inSeconde École d'été de Didactique des Mathématiques, juillet 1982.

CHEVALLARD Y., JOHSUA M.-A., La transposition didactique, du savoir savant au savoir enseigné, Grenoble:La Pensée Sauvage, 1991.

JOHSUA S., DUPIN J.-J.,Introductionàla didactique des sciences et des mathématiques, Paris: Presses Universitaires de France, 1993.

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