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La convention collective et son extension juridique en général et en Québec plus particulièrement.

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Academic year: 2021

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EN GENERAL

ET EN QUEBEC PLUS PARTICULIEREMENT

"Ceux qui ne s'attachent qu'aux formes juridiques pour cataloguer les institutions selon leur struc-ture et attribuer k chacune les effets qui correspondent k son

etiquette, ne verront que 1'aspect contractual et chercheront k limiter les conventions collectives k la

stricte valeur d'un accord de volon-te. Ceux qui comme nous considS-rent au contraire que toute institu-tion juridique ne peut etre analys6e qu'en fonction de son but,

recon-naltront sans hesiter, k la conven-tion collective dont la finalite tend k etablir une r&gle pour tout un ensemble professionnel, la

nature effective d'un r£glement." Jean Marie Arnion "Evolution

des conventions collectives de travail.w

ThSse soumise par Marc C. Lapointe pour

lfobtention du degre de

Master at Civil Law (Industrial)

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Je n'ai pas pretendu faire de cet ouvrage, un expose strictement juridique du problSme de la convention collective et de son extension juridique. Au contraire, je crois que les consequences sociales et economiques de cette institution, imposent k l'etudiant qui y consacre ses labeurs, de soruter et prevoir les effets que la convention collective et surtout son extension juridique produiront dans le "droit social" et dans le regime economique du pays. Une certaine connaissance du droit administratif et constitutionnel devient egalement necessaire pour comprendre et determiner le jeu de la politique et de l'Etat dans ce domaine.

II mfa done fallu mettre k contribution toutes les collaborations possibles dans un domaine du droit si neuf que les autorites brillent en quelque sorte par leur absence. Je tiens cependant k exprimer ma gratitude pour le devouement in-lassable dont a fait preuve M. P.R. Scott, mon tuteur dans

lfobtention drune maltrise k la Faculte de Droit de l'Universite McGill.

Mes remerciements vont egalement k Me Guy Merrill D6saulniers, Me Jacques Perrault et Me Guy Favreau qui tous trois

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ont 6claire de la lumi&re de leur pratique, les theories exprimees dans cet ouvrage.

Me Emile Poissant s'est interesse k l'eiaboration de cette thSse et sans lui, les conditions materielles en

auraient gravement handicape le complfetement.

II convient de signaler que les biblioth&ques de la Faculte de Droit de McGill, des Hautes Etudes Commerciales, du B.I.T. et du Barreau de Montreal, offrirent une mati&re

aussi riche que possible dans les circonstances, oil jTai pulse

la substance de cette th&se.

Enfin, k Miles Gertrude Renaud et Madeleine Trudeau mes remerciements pour une precieuse aide cl6ricale.

(7)

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Lfauteur ne tentera pas de se placer dans cet

ouvrage, sur le plan strictement juridique. Le problfeme traite deborde les cadres du droit pour toucher aux rivages de la

sociologie, de la psychologie humaine et de la politique. II serait inexact de dire que de ce fait, on abandonnera le domaine juridique k quelque moment que ce soit. En fait, je veux dire que chaque fois que 1'occasion se presentera, et cela ne peut manquer k cause des repercussions implacables de la legislation

industrielle dans les autres sph&res de l'activite humaine, je laisserai voir ou soulignerai brifevement, les effets de toute cette legislation sur le ,rdroit social". On sera surpris devant

l'emploi du terme "droit social" dans ce contexte. A mon humble avis cependant, la legislation du travail, autrement designee legislation industrielle ou ouvrifere, ne constitue qu'une esp&ce d'un genre qui devrait etre plus universellement connu comme le droit social. Ce genre se distinguerait des autres branches du droit public.

Je definis tout ceci dans l'espoir de bien delimiter les bornes de 1'ouvrage qui suit. Je me refuse done k creer une

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thSse techniquement restreinte k un compartiment de droit, sans

vouloir considerer ses liens logiques avec les autres branches

du droit et surtout sans vouloir apprecier ses repercussions

sur les autres formes d'activites de la societe humaine. On

trouvera des aperqus generaux sur ces spheres dTactivite

lors-qu'une provision de la legislation sous etude les affectera.

Cependant, comme le titre de 1'ouvrage l'indique,

la substance de lfetude proposee, reposera surtout sur cette

portion du droit industriel qui se rattache A la convention

collective et k son extension juridique.

C'est une division du droit qui s'affirme de plus

en plus imperieusement k lfattention du 16gislateur et du

juriste k mesure que le developpement economique des nations

et 1'industrialisation des forces de production cree un regime

de relations juridiques de plus en plus complexe. Cette figure

nouvelle de l'economie qu'on appelle la grande Industrie

em-ployant des milliers d'ouvriers a multiplie les sujets de ce

nouveau droit. Malheureusement cette legislation est encore

dans l'enfance, dans plusieurs pays.

On arrive ainsi au resultat pratique que des

obli-gations et des droits nouveaux apparaissent et des situations

de faits emergent que l'on ne peut oser voir se crystalliser

bientot. L'epoque du tatonnement s'ach&ve et le le^islateur

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atteignent un etat statique avant de tenter d'arreter des formes Juridiques stables et permanentes, laisse les provisions statu-taires actuelles dans un etat transitoire assez souple qu'elles puissent etre modifiers, amendees et orientees a mesure que les faits, les juristes doctrinaires et le bien public indiquent les corrections a effectuer. Malheureusement cette situation insta-ble prete a des confusions et imprecision, qui rendent assez alSatoire une etude sur cette matiere.

D'un autre cote, comme la legislation ouvriere

influe tres directement sur le bien-etre social et eoonomique de la nation, il importe de toujours considerer ces deux objets de pres, dans 1»etude et 1'elaboration des principes qui la rSgiront Ceoi m'amene a une autre delimitation de la position prise dans l'Stude proposee. Au lieu de tenter seulemsnt une etude de

juriste oiviliste, Je prendrai en meme temps la position du pu-bliciste que les exigences de la philosophic du droit, du droit constitutionnel, du droit administratif et de l'economique in-teressent autant que les exigences du droit civil.

On pensera sans doute que l'enorme etendue des cadres oi-haut poses, presuppose une grande ambition, trop

grande pour les humbles connaissances de l'auteur. Cependant je pretends que le choix n'etait pas possible, a cause juste-ment de la complexity du probleme et de sa nature meme.

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Et si j'echouais devant la tache k accomplir, je demanderai qu'on ne me taxe pas d'avoir p6che par trop d'ambi-tion et dfavoir vis6 un but inaccessible, mais qu'on appord'ambi-tionne une partie de l i c h e e k la difficult* intrins&que du sujet

6tudie. Aprfcs ces considerations g6n6rales on comprendre mieux les divisions du travail presente k la lecture des etudiants du droit du travail.

En une premiere partie les principes theoriques qui gouvernent une convention collective en general et toute exten-sion juridique de convention collective seront exposee ainsi qu'un essai de syst&me id6al d'extension juridique prenant en

consideration et poussant ces principes jusqu'fc leurs conclusions les plus rigoureuses.

Dans la seconde partie, une etude pratique de la Loi de la Convention Collective, dans la province de ^u6beo offrira des points de comparaison avec cette etude th6orique.

Une troisiSme partie sera consacree k une revue de 1'attitude prise dans plusieurs legislatures du monde devant cette question.

Et une derniSre partie sera consacree k lf6bauche d'une critique constructive de notre loi quebecoise, ainsi

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PARTIE I

Chapitre I:—La situation de fait des conventions collectives sans extension en general, p. 1.

Section 1. Milieu economlque de la convention collective, p. 1. Section 2. Historique de In convention collective, p. 4.

Chapitre II: La reglementation de la convention collective, p. 7(

Section 1. Absence d'aucun element reglementaire. p. 7#

Section 2. Premieres man if es tax, ions de regl errant at ion, p. 10.

Chapitre III: Champ d'application de la convention collective p.l

Section 1. Necessite d'application aux tiers, p. 17.

Section 2. ProblSme insoluble k la lumiSre des theories des ci-vilistes; (distinction entre la conception

indTvidu-aliste et la conception "sociale" de la convention collective), p. 21.

Section 3. Necessite de falre intervenir 1'interpretation r^gle-mentaire. p. 26. " " " ^ — " Chapitre IV: Pourquoi la convention collective est un

rfegle-ment. p. 50. ' "

Section 1. CaractSres du rSgleinent. p. 30.

Section 2. CaractSres de la convention collective, p. 37.

Section 5. Solut ion heureuse si la convent! on collective est interpretee comme un rSglement. p. 4:..

Chapitre V: Extension: necessite et complex nt lorique de la con-vent ion collective. Essai sur un syst^me id^al. TJT"R3

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Section 1. Facteurs economigues et sociaux. p. 54.

Section 2. Les avantages de la solut ion apport6e par l'extensiq Section 3. Opposition k I'extension. p. 66.

Section 4. Nature de I'extension. p. 69. Section 5. Effets de I'extension. p. 82. Section 6. Avenir de I'extension. p. 88.

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CEAIITRE I

SITUATION DE FAIT EN GENERAL DES OQNTJirJICro DOLI^C-IVES SANS ^TENSION. ~

Avant de tenter de definir ce qu'est une extension

juridique de convention collective, pour ensuite etablir une

theorie sur la nature, et les effets de cette institution du

droit du travail, II nous faudra faire une analyse retrospective

de la convention collective, point de depart de I'extension. Cex

te analyse risquerait de manquer de r6alisme si on ne d6peignait

auparavant le milieu social et economique qui entoure et

favori-se son developpement.

Section 1. Milieu Economique et social oti se situe la £•£.

On a dit et il fait bon de r6peter, que lfav6nement

de la grande Industrie a cause dans la vie 6conomique du monde

entier des revolutions sociales et des perturbations sans nombre.

Un des effets d6sastreux de cette industrialisation

en masse, et celui qui nous interesse dans cette etude, consiste

dans le d6sequilibre lamentable cr66 entre la position de

l'ou-vrier pris individuellement dans ses rapports avec le patron de

lfentreprise et ce dernier.

A l?epoque prec6dente, alors que le monde industriel

ne connaissait que le petit employeur ou artisan et ses dix ou

vingt employes, le contrat de louage de services contracte par

lfouvrier et le patron, nfoffrait pas de problfene r6el. Le

pa-tron etait en contact direct avec chacun des menbres de son

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et une discussion amicale des conditions de travail entre patrons et ouvriers. Lfindividualite de lfouvrier etait respect6e.

Au-jourdrhui, les grandes entreprises emploient des milliers dfou-vriers qui nfont jamais le moindre rapport avec leurs patrons. Lfouvrier est un numero de liste de paye. Cfest le "labor unit". Tout contact amical est perdu. C'est le proletariat. L'ouvrier individuellement, a perdu tout pouvoir de discussion des condi-tions de son travail. Lf6quilibre dans le contrat de louage de services est rompu.

Jfai employe plus haut l'epith&te "d6sastreux" pour qualifier un des effets de la grande Industrie. On ne devrait pas interpreter cette phrase comme une condemnation absolue du d6ve-loppement accei6re des forces industrielles. En fait cette evo-lution a cause des desastres chez la classe ouvri&re parce que lfarmature juridique et economique de la soci6t6 ne poss6dait pas la souplesse necessaire pour retablir rapidement la position de lfouvrier en face du patron.

Je fais ici allusion k l'erreur commise par les

legislateurs de la Republique Fran<jaise au lendemain de la Revo-lution de 1789, quand ils proclamferent l'av&nement du rSgne de 1*individualisme contractuel et la prohibition de toute associa-tion dont lfobjet pouvait de quelque mani&re, entraver la liber-t6 absolue des transactions commerciales.

Naturellement ces legislateurs donnaient dans les courants economiques de I'epoque qui favorisaient le lib6ralisme economique integral. Cette th6orie se r6pandit dans le monde entier. La consequence de la combineison de cette legislation economique avec la creation d'une 6norme masse d'ouvriers im-puissants k faire valoir leurs justes revendications auprSs des

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patrons fut le reveil des masses ouvri&res. Elles decid&rent de prendre en main leur propre cause.

Une longue lutte imposa aux legislateurs la recon-naissance des associations ouvriSres et 1'abolition des

prohibi-tions penales contre ces associaprohibi-tions dans plusieurs pays. Ce fut le stage de la tolerance. Les ouvriers capitalis&rent rapi-dement sur ce premier gain et presentferent un front uni aux em-ploye urs. La meilleure arme sans doute, consistait dans 1'enten-te ouvri&re, qui prit au debut le nom de contrat collectif pour evoluer et devenir la convention collective. Certains pays re-oonnurent en loi, les associations ouvriferes ou syndicats. DT

au-tres se contentSrent de les tolerer.

Grace au medium de 1'association et avec 1'arme de cette derniSre, la convention collective, ou plus generiquement 1'entente ou charte ouvrifere, les ouvriers regagn&rent le ter-rain perdu et la balance de pouvoir et puissance entre le patron et l'ouvrier non plus isole mais appuye de la masse de ses con-freres professionals.

Desormais dans le monde economique, la convention col-lective jouera le role d'un instrument regularisateur des rela-tions entre le capital et le travail. C'est le stage que nous avons atteint aujourd'hui.

On verra par la suite que le cycle n'est pas com-plet. L'extension des conventions collectives de travail qui repond au dynamisme interne de la convention collective laisse entrevoir une derniSre evolution qu'il faudra s'efforcer de ca-naliser vers des formes juridiques stables et institutionnelles si lfon veut obtenir dans le domaine economique des relations de

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Cependant, les chemins suivis par les differents pays pour

ar-river k cette forme finie de la convention collective ont

gran-dement varie. Lfintervention de l'Etat legislateur fut plus ou

moins marqu6e. Lforganisation syndicale unioniste plus ou moins

avancee. Mais il demeure que le milieu economique moderne a dd

consacrer 1'inclusion dans ses rouages de la convention

collec-tive avec son extension, ou devra l'y joindre vu sa f6condite.

Section 2. Historique de la convention collective.

Le pays de naissance de la convention collective

sem-ble bien etre la Nouvelle zeiande. Le terme lui-meme fut employe

pour la premiere fois par les commentateurs juridiques en

Angle-terre (1).

Les pays qui ont cependant progresse le plus

rapide-ment dans la voie de la reconnaissance legale de cette nouvelle

institution du travail furent: L'Australie et la Nouvelle Z61ande

qui au d6but du siScle present avaient la convention collective

avec son extension juridique. (2) On a dit de ces pays ..."..en

1900, la Nouvelle zeiande possedait deji la convention collective

avec son extension juridique". (3) Des rudiments d'extension

juridique apparaissaient egalement vers cette epoque. Lf

6volu-tlon de cette sorte de contrat k partir de ses elements amorphes

du debut jusqu'& son epanouissement actuel, offre l'histoire de

1'adaptation des formes juridiques du contrat civil aux besoins

de cette nouvelle sorte de contrat collectif ou de super-contrat.

Le but recherche par les syndicats ou unions

d'ou-(1\ Beatrice »nd Sydney Vfebb*The History of the trade-unionism"

v ; Revised edition, extended to 1920, Longmans, Green and Co.

(2) ~<n Australie. The Commonwealth Conciliation and Arbitration Act 1904. S. 38, En Nouvelle Z61ande

(3) J o' Bonenfant, Nature Juridique de la convention collective, Revue du Barreau, Tome 1, No. 9, :icv. 1941.

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vriers peut se resumer ainsi: ils cherchent k obtenir des

con-ditions de travail meilleures, uniformes autant que possible et

s'appliquant k toute une profession et mlnB k toute une

Indus-trie. Comme lfunion fait generalenent la force, ils cherchent

k rallier dans leurs rangs le plus dfouvriers possible afin que

l'employeur se voit place devant l'alternative de ndgocier

pr6-alablement k la signature des contrats individuels, une entente

generale avec la force ouvriSre dont il veut louer les services,

ou bien de risquer la mort de son entreprise, faute de

main-d'oeuvre.

Au debut, vers les annees 1850, en Angleterre comme

dans le reste de 1'Europe ainsi qu'en 0c6anie, les conventions

collectives ne constituaient pas autre chose que des ententes

ou-vri&res, sorte de trait6s de paix industrials. Les obligations

demeuraient simplement morales. C'est la raison du qualificatif de

"gentlemen's agreements" qu'on leur donne encore en certains pays.

En Angleterre par exemple, meme si les unions

englo-bent la majeure partie de la force ouvriSre, meme si presque

tou-te 1'industrie est couvertou-te d'un chasse-croise de conventions

col-lectives, les unions et ces contrats n'ont aucune force legale

devant les tribunaux dans la majeure partie des cas. Mais ces

ententes ouvriSres sont pass6es dans les moeurs et ont acquis le

statut de coutumes. On sait par ailleurs combien dans les pays

anglo-saxons, ces coutumes ont de puissance morale, et de la

sorte on 6vite une definition plus rigide en droit.

Dans d'autres pays, les tribunaux, aux prises avec

des disputes entre syndicats et patrons ou ouvriers et patrons

li6s par ces conventions ont cru mieux faire de tenter une

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D&s lors naquit la controverse qui de nos jours a attaint son declin par la victoire presque assuree des partisans de la reglementation. Les systSmes juridiques des peuples ne re-connaissaient pas au debut, un caractSre particulier k cette nou-velle forme de relations juridiques. On tenta de l'assimiler aux rfegles traditionnelles des obligations et du contrat.

Mais immediatement se soulev&rent les probl&mes du role des syndicats signataires de ces conventions collectives et vis-&-vis leurs membres et vis-&-vis leurs patrons. Les tribu-naux en France par exemple et en Quebec par la suite, assirnilS-rent les conventions collectives tour k tour, au mandat, k la stipulation pour autrui et au negotiorum gestio. Certains pu-blicistes y virent le jeu de la personnalite morale. (4)

D'au-tre part les civilistes trompes par la forme technique de contrat de ces ententes ouvriSres tenaient tenacement k la simple idee de contrat.

Malheureusement aucune de ces formes juridiques ne repondait k la nature originale de la convention collective. (5) Ce qui est plus grave, les theories emises deniaient aux syndicats et k la convention collective leur role dynamique et regulateur des relations du capital et du travail et cela, en paralysant leur evolution naturelle. Les derogations individuelles par con-trat ou par demission continuaient d'etre permises et l'applica-tion de la convenl'applica-tion collective aux tiers sans leur adhesion continuait d'etre niee. Mais la convention collective, raison

(4) Entre autres De Visscher "Le contrat collectif de travail", Th., Gand, 1913.

(5) Pour une refutation des theories du mandat, de la stipulation pour autrui, du negotiorum gestio et^de la personnalite no-rale, C.F. Planiol et Ripert., Traite rratique de Droit Civil Frangais, Vol. II, No. c82.

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d'etre des syndicats ou trade unions, satisfait un besoin t e n e -ment naturel k la masse ouvriSre, que la pression des faits et de juristes eclaires vainquit lentement tous les obstacles et

les diverses legislations intervinrent pour assurer aux conven-tions collectives I'immunite contre les derogaconven-tions individuelles et l'application aux tiers non signataires, des benefices au

moins de la convention collective.

C'est le moment plus ou moins avance, atteint rer les diverses legislatures•

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CHAPITRE II

LA REGLEMENTATION DANS LES CONTRATS COLLECTIFS. Introduction:

Je veux arriver par cette premiSre partie de thSse k demontrer hors de tout doute que les conventions collectives ne sont et ne peuvent etre qu'une reglementation absolue des rapports de patrons k ouvriers, une sorte de charte du travail, ou encore une loi interne des professions dans le sens large du mot

profes-sion. Nous avons vu dans le chapitre precedent une br&ve image du milieu social et economique ou se developpe la convention col-lective et un historique egalement rapide des conditions economi-ques qui amenSrent son evolution. II nous faudra maintenant etu-dier les differents stages par lesquels le contrat de travail est passe pour arriver k la convention collective reconnue comme a-gent regulateur des relations patronales et ouvriferes. En d'au-tres termes, le point de vue plus strictement legal nous interes-sera ici.

Section 1. Absence dfaucun element reglementaire.

a) Peu aprSs la Revolution franqaise les divers pays avaient atteint le moment de l'histoire oil toute autorite legis-lative etait tombee entre les mains de cet organe legislateur, appeie Parlement. Les fonctions du pouvoir dans les Etats se di-visaient dej& en trois ou quatre branches, selon que l'on consi-dbre le pouvoir executif different des pouvoirs administratifs. II y avait done le pouvoir legislatif ou Parlement qui monopoli-sait la fonction legislative. C'est a lui qu'incombe le devoir

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d'6dicter les lois qui rigiront les relations juridiques des su-jets de droit. II y a le pouvoir juciciaire dont le devoir con-siste k interpreter les dites lois et le pouvoir ex6cutif et ad-ministratif qui est le gouvernement, et qui execute ou

adminis-tre les dites lois. Dans certains pays comme la France et les Etats-Unis 11 existe une certaine separation des pouvoirs salon laquelle ces diverses fonctions ne peuvent etre exercees respec-tivement que par les corps ci-haut definis. D'autres pays comme l'Angleterre, admettent plus de souplesse et on y voit une cer-taine confusion de pouvoirs.

Mais pour les besoins de la demonstration presente, nous pouvons dire qu'& ce premier stage, le parlement concentrait toutes les fonctions legislatives. Dans les diverses legislatures de cette epoque on reglait par des codes ou statuts que la te contractuelle constituait un droit sacre decoulant de la liber-te des individus et qui avait eliber-te amenee par le bouleversement politique et social du temps. La seule r&gle dans les relations patronales et ouvriSres avait done sa source dans les obligations et le contrat de travail qui consacraient l'absolutisme de la

liberte individuelle de contractor. Et l'autorite unique qui a-vait edicte cette norme etait le parlement par ailleurs vendu k l'idee de la liberte absolue de contractor.

b) Une fois cette norme sacree etablie, le parlement n'intervint plus pendant un long temps dans les rapports entre ouvriers et patrons. De leur cote, les patrons qui avaient be-soin des services de plusieurs employes pour leur entreprise, con-tractaient librement avec chacun individuellement. Ce contrat etait le contrat de travail ou plus strictement un contrat de

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generales du contrat regissaient ce contrat et la seule restric-tion imposee au principe de liberte absolue, consistait dans la prohibition de louer ses services pour la vie durant d'un homme. L'esclavage etait done prohibe. Dans les divers statuts et codes

on retrouvait done une penurie renarquable de provisions sur ce contrat de travail (6). Le patron encourait une serie d'obliga-tions sous ce contrat consensuel, bilateral, commutatif et one-reux (7). Mais l'on peut dire qu'au debut de cette p6riode 11 n'y avait aucune tentative de sa part d'imposer aucune autre

sor-te de reglementation k ses employes ou debisor-teurs de services. c) De son cote, l'ouvrier negociait et contractait individuellement avec le patron et louait ses services personnels individuellement. Par le fait meme il encourait une serie d'o-bligations personnelles.

On peut done dire qu'une suite de contrats individu-els de travail liait le patron aux ouvriers et que chaque ouvrier etait lie individuellement au patron par son contrat propre.

d) On voit qu'& cette epoque recul6 du r&gne de la liberte absolue de contracter des individus, la seule autorite qui aurait pu reglementer les rapports de patrons k ouvriers e-tait le parlement, qui de son autorite se contene-tait de mainte-nir le principe sacro-saint de liberte absolue de contracter,

sauf les provisions generales sur les contrats et les obligations. Aussi longtemps que le patron ou l'ouvrier respeetait ces

provi-sions, aucune intervention administrative, jidiciaire ou

legisla-(6) L6on Mercior-Gouin, Cours de droit industriel, Tome 1: Loi>s ouvriSres.

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tive n'etait possible.

Section 2. Premieres manifestations de reglementat ion.

La science aidant, l'industrie des pays se developpa trfes rapidement vers le milieu et la fin du 19e sifccle. Le sys-tfeme economique du monde, k accent individualiste, permettait la concentration et des capitaux et des petites entreprises employ-ant une dizaine d'ouvriers. On vit naitre, progresser et se mul-tiplier de larges entreprises enrolant un nombre de plus en plus grand d'ouvriers. Cette evolution mettait entre les mains des patrons une puissance economique formidable. Par ailleurs elle

jetait dans l'impuissance economique une masse de personnes d6-racinees des classes sociales surtout rurales, oh elles vivaient et happees par la grande industrie. Ce fut la naissance du pro-letariat dans le sens des masses d'ouvriers qui perdaient tous les avantages de leur liberte individuelle de contracter lorsque le contrat de travail etait negocie et arrete avec un subalterne de I'employeur et en face d'une concurrence implacable de milliers d'ouvriers qui se cherchaient un gagne-pain. D'une part la puis-sance economique placee entre les mains des employeurs et d'au-tre part la perte de liberte individuelle des ouvriers en concur-rence les uns avec les autres et complStement dependants de I'em-ployeur pour vivre, firent qu'une serie d'abus commencerent k se dessiner.

A) L'Etat intervient.

L'Etat ou le Parlement fut le premier k s'inquieter de cette tendance au desiquilibre economique entre une classe capitaliste qui grace k la liberte absolue de contracter et de commercer et grace k la concentration de gros capitaux et d'hom-ines impuissants pouvait causer k volonte des perturbations

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eco-nomiques et sociales desastreuses, et entre une masse proletaire sans defense.

a) L'Etat aborda la question avec assez de repugnance k

cause de sa croyance dans les bienfaits de la liberte de contrac-ter. C'est ce qui explique les interventions timides et indirec-tes qui au lieu d'aller k la racine meme du mal cherchferent k en circonscrire les effets et consequences. C'est ici qu'on trouve le fondement k travers le monde de la legislation dite sociale. On vit alors des lois et statuts sur les accidents

de travail et des modifications aux principes de la responsabili-te quasi-delictuelle et delictuelle. (8) Ce premier pas montre bien que les Etats ne voyaient pas encore comment renforcir la situation de l'ouvrier en position inferieure devant le patron et contre qui jouait le principe de la liberte absolue de con-tracter.

(8) Par example en

Quebec:-La loi des accidents tu travail, 1941 S.R.q. ch. 1GC, 21

Geo. V., c.lQO; Loi du Salaire Minimum, 1941 S.R.Q. ch. 164, 4 Geo. VI, c.39; Loi relative k la limitation des heures de

travail, 1941 S.R.3,. ch. 165, 23 Geo. V. c. 40; Loi pourvoy-ant k un jour de repos par semaine pour les employes dans cer-taines industries, 1941. S.R.Q. ch. 166, S.R.Q. 1925, c. 185; Loi pour proteger la vie et la sante des personnes employees dans les etablissements industriels et commerciaux, 1941 S.R. Q. ch. 175 S.R.Q. 1925, c. 182, 24 Geo. V. c. 55; Loi concer-nant les pensions de vieillesse, 1941 S.R.Q. ch. 179, 1 3d. VIII, c. 1; Loi de l'assistance aux aveugles, 1941 S.R.Q. ch. 181, I Geo. VI, c. 83; Loi concernant les bureaux de pla-cement 1941 S.R.Q. ch. 161, S.R.Q. 1925, c. 99; Loi relative au bien-etre de la jeunesse, 1941 S.R.Q,. 176, I Geo. VI

c. 84; Loi de l'assistance aux inures necessiteuses, 1941 S.R.Q,. 180, I Geo. VI, c. 81; Loi des ecoles d'industrie, 1941 S.R.Q,. 39, S.R.Q,. 1925, c. 160; Loi des habitations sa-lubres, 1941, S.R.Q. 240, S.R.Q. 1925 c. 128; Loi de l'aide & la jeunesse, 1941 S.R.Q. 68, II Geo. VI c. 5a ce 5 Geo. VI p. VII; Loi des Maltres et des Serviteurs S.R.Q. ch. 528 1925 S.R.Q. c. 271; Loi de 1'Engagement des pecheurs, 1941 S.R.Q.

c. 329, 1925 S.R.Q. c. 273; Loi concernant le paiement des * frais des accidents dans les institutions d'assistance pu-blique 1941, S.R.Q. c. 339, 25-26 S.5 c. 85. etc. I

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b) Le deuxieme pas, plus ose, fut la levee des prohibitions p6nales sur les associations professionnelles dont le but presu-me etait d'entraver la liberte absolue de contrat et de compresu-merce.

Cette mesure beaucoup plus difficile que la premi-ere consistait k permettre k des ouvriers ou k des patrons de s'associer en groupes pour defendre leurs droits ou faire pro-gresser leur cause commune. Cependant, au debut du moins, ces associations n'avaient aucun caractere legal personnel. On to-16rait ces associations mais on ne les reconnaissait pas. Au lieu d'etre iliegales elles devenaient non pas legales, mais aiegales si on peut dire. Pour resurner done, les Etats les premiers, at-tenterent au principe de liberte absolue dans le commerce et dans les rapports de patrons et ouvriers.

B ) Les Patrons Interviennent.

a) De leur cote les patrons profiterent assez generalement de la tolerance accordee aux associations de personnes d'interet

commun et se sentirent ainsi mieux les coudes en s'asaociant eux-memes.

b) Mais une reglementation plus directe de leur part etait k prevoir k mesure qu'ils perdaient le controle immediat sur les multitudes d'employes et que les usines par leur importance phy-sique et leur complexite administrative faisaient apparaitre la necessite d'etablir des reglements interieurs. C'est ce qu'on

a designe assez justement par le vocable de reglements d'ateliers. Ces regle::©nts consistent en un nombre plus ou moins eiev6 de directives g6nerales pour la regie interne et adminis-trative de tous les ouvriers de l'atelier: mesures de precaution contre les accidents, poste de secours en oas de feu etc, etc.

(26)

est la plus grave de toutes celles mentionnees jusqu'ici. C'est la premiere reaction contre 1'absence de reglementation dans les rapports de patrons k ouvriers. En effet qu'on imagine un ins-tant, une usine employant quelques centaines d'ouvriers, oil che-que ouvrier serait gouverne par des clauses individuelles d'un contrat de louage. Ce serait comme ce le fut avant le reglement d'atelier, l'anarchie administrative de l'usine. II fallait re-medier k cet etat de chose d'une faqon ou d'une autre sous la pression implacable des faits. Ce fut la generalisation du re-glement d'atelier. II devint une sorte de loi coutumiere qui se superpose aux contrats individuels du travail avec des sanctions en cas d'infraction.

Aucun ouvrier n'est libre de refuser cette clause et 1'element contractuel disparait car le consentement libre des ouvriers est atrophie. II est beaucoup plus logique de considerer cette coutume comme une premiere reglementation serieuse des con-trats de travail. D6J& 1'eiement contractuel est diminue par cet usage. Ainsi le patron par sa seule autorite de directeur de

I'entreprise impose pour ainsi dire a tout ouvrier les clauses du reglement d'atelier. C'est une espece de super-contrat qui lie automatiquement l'ouvrier qui signe un contrat individuel de lou-age de services. II n'y a pas possibilite pour l'ouvrier de de-roger k cette entente. II n'est meme pas necessaire pour qu'un ouvrier se voit oblige par ce reglement d'atelier qu'il en ait connaissance par le contrat individuel qu'il signe. C'est ainsi parfois une entente tacite.

Pour resumer alors, on peut dire que le regleioent d'atelier constitue en quelque sorte une atteinte assez grave aux principes que le seul regime dans les obligations entre

(27)

patrons et ouvriers est le contrat et que la seule autorite le^i* lative est monopolisee par le parlement legislateur. Le reglemei

d'atelier offre les aspects embryonnaires du reglement et c'est sur l'initiative propre de I'employeur que par son autorite, des ouvriers supposement absolument libres d'offrir leurs services

individuels sont obliges d'accepter les regies de la discipline de 1'atelier automatiquement, s'ils veulent voir leur contrat in-dividuel accepte par le patron.

C ) Les Ouvriers Eux-memes Interviennent.

Apres avoir constate que leur liberte absolue de contracter n'avait contribue qu'& les jeter dans les affres du proletariat, les ouvriers reconnurent et retournerent rapidement au besoin naturel k l'hormne de s'associer.

Malgre les prohibitions penales contre les associa-tions, qui pouvaient restreindre la liberte du commerce, les as-sociations ouvrieres et les mouvements syndicalistes naquirent spontanement. Une cohesion de plus en plus accentuee chez les ouvriers forqa la main des differents Etats qui durent lever les prohibitions sur les associations ouvrieres, trade unions et

syndicats.

Un premier stage fut atteint en ce qui concerne ces associations: on les toierait.

La consequence logique de cette cohesion et de ces mouvements d'ensemble dans les rangs ouvriers, qui se

manifes-taient par des syndicats ou unions, fut que les ouvriers en vin-rent k exiger des contrats collectifs avant la signature des con trats particuliers.

Les pays leur reconnurent bientot un statut legal plus ou moins defini selon les cas.

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Ces syndicats ou trade unions devinrent en quelque sorte les porte-paroles des membres ouvriers et au lieu de conxinuer k negocier leurs contrats individuels de travail seuls en free du patron, les ouvriers prirent la position beaucoup plus puissante de negocier en bloc une entente prealable aux contr?ts individue par laquelle ils arretaient leurs exigences principales. Les pa trons devaient alors, sous la menace d'une greve ou d'une penuri d'ouvriers qui menait k la banqueroute, tendre une oreille favo-rable aux revendications d'un groupe.

Dans les pays k tradition fortement civiliste comme en France et dans les pays du vieux continent sauf L'Angleterre et les pays d'origine anglo-saxonne, on essaya de definir ce

qu'etait la convention collective, qui jusque Ik n'avait consist qu'en des ententes morales sans reconnaissance ou sanction legal*

Tout comme dans le cas des patrons, les ouvriers usurpfc-rent le pouvoir legislatif competent k l'Etat seul, pour assurer une certaine reglementation aux contrats de travail. Ils tiraiei leur autorite de la puissance economique de leur masse unifiee ei ses revendications et de leur besoin economique de traiter en

bloc rvec les patrons afin de retablir la balance contractuelle decidement defavorable en ce qui les concernait. Cette coutume se generalisa rapidement et plusieurs industries en differents pays offraient des conventions collectives. La coutume qui s'ap puyait sur un besoin economique, incite plusieurs pays k passer les lois necessaires pour accorder un statut legal aux syndicats ou unions et une valeur legale aux conventions collectives qui

jusque Ik demeuraient de simples traites de travail.

On voit que cette concession du pouvoir legislatif cons-tituait une serieuse atteinte au principe de la liberte absolue contracter et au principe que le parlement seul possede le pouvo legislatif.

(29)

CHAPITRS III

CHAMPS D*APPLICATION KB LA CONVENTION COLLECTIVE. Introduction:

Nous avons dit plus haut que le but recherche par les groupements professionnels et syndicaux 6tait de placer I'employeur devant l'obligation de contracter avec une masse ouvriere puissante et organises et non avec des ouvriers isoies et sans defense. Pour ce faire, la convention collective devint lentement un outil assez bien approprie. Cependant, on compren-dre que la base contractuelle de la convention collective

res-treint la possibilite d'englober tous les ouvriers. Quant aux membres syndiqu6s d'un syndicat signataire, il n'existait point de problSme. Mais les tiers posaient un grave problftme. II importe done d'etudier attentivement le champ d'application des conventions collectives.

On a divise ce problfeme en trois pour suivre une division trSs logique adoptee dans un travail du B.I.T. (9)

a) le champ d'application territorial; b) le champ d'application professionnel; c) le champ d'application personnel;

Nous nous bornerons pour 1'etude en cours k examines le champ d'application personnel.

(9) Bureau International du Travail: Les conventions collect! "Etudes et Documents", S6rie A, (Vie Sociale) No.39 p# 19 et seq.

(30)

Par ce terme on definit les sujets de droit d'une convention collective. En d'autres termes quelles seront les parties liees par une convention collective. Le dynamisme

in-trinsfcque de la convention collective, exige que le plus de personnes possible soient li6es par une convention collective. C'est la raison d'une premiere section de ce chapitre.

Section 1. Necessite d'application aux tiers.

La lente evolution des conventions collectives au point de vue juridique a necessite une serie de stages pr61imi-naires.

Au premier age de la convention collective, le patron et le syndicat signataire, et les membres de ce dernier etalent les seules parties k la convention collective. Au point de vue legal les seuls pays ayant confer6 un statut legal aux groupements professionnels et par le fait meme aux contrats sign6s par eux, pouvaient imposer des obligations legales aux syndicats et k leurs membres avec recours en cas de bris, devant les tribunaux Judiciaires.

Dans certains pays on a jamais d6pass6 la p6riode ou la convention collective n'6tait consideree que comme un

simple contrat avec certaines modifications: ce sont les pays k systSme oontractuel dans les contrats de travail. La theorie du mandat s'applique au syndicat signataire pour le lier k la convention collective. Quant aux membres dudit syndicat, ils sont lies personnellement par 1'intervention du syndicat signa-taire. Finalement, le patron avec le syndicat de patrons est 116.

(31)

Naturellement la theorie du contrat laisse la

porte ouverte aux clauses derogatoires, aux adhesions en groupe et aux demissions des membres d'une partie signataire.

En resume, nous voyons 1'application des regies du droit commun contractuel k la convention collective.

Dans les premiers temps done et encore aujourd'hui dans les pays qui n'admettent que le syst&me contractuel, la reglementation de la convention collective demeure une affaire des parties signataires k la convention collective et les tiers ne sont nullement affectes meme s'ils sont employes dans une

Industrie couverte par une convention collective. II arrive cependant que par un commun accord les parties signataires

decident d'appliquer la convention collective aux tiers. Mais cette extension ne lie que les parties signataires et les tiers avantag6s peuvent en beneficier mais ne sont point lies.

On comprendra aussi que cette conception "contrac-tuelle" de la convention collective laissait la part encore belle aux employeurs, qui par diverses manoeuvres anti-syndicales pou-vaient forcer certains employes k d6missionner d'un syndicat, k accepter des conditions de salaire moindres ou k ne pas adherer k la convention collective ou meme offraient des salaires plus eiev6s aux ouvriers qui acceptaient de s'abstenir d'affiliations.

Par contre-coup, cette possibilite d'echapper k l'application de la convention collective neutralisaittoute l'autorite des syndicats et detruisait l'efficacite de la con-vention collective.

(32)

sous le pied d'un syndicat, en employant des ouvriers prets k travailler pour des conditions inferieures k celles qui r6gis-saient les ouvriers syndiques couverts par la convention collec-tive et cela etait souvent possible k cause de la surabondance de la main d'oeuvre, la position du syndicat se trouvait auto-mat iquement placee en danger.

On peut done dire que les consequences de la con-currence contractuelle et du manque d'application de la conven-tion collective aux tiers apparurent si graves, aprfes un temps, que le 16gislateur se vit force d'intervenir dans plusieurs

pays, soit par des moyens indirects comme des sanctions penales contre les pratiques malhonnetes des patrons vis-&-vis les syn-dicats ou comme des tribunaux de conciliation et arbitrage

pour regler les differents ouvriers, soit par des moyens directs tendant k donner aux conventions collectives la plus grande

application possible en ce qui concerne les personnes.

Et c'est ici que commencera notre demonstration que si la convention collective peut et doit s'appliquer aux tiers sans possibilite de derogation c'est que cette institution n'est pas un contrat avec finalite reglementaire, done que la theorie dualiste est fausse, mais que c'est simplement une reglementa-tion absolue de la profession, une loi professionnelle et le plus tot les legislatures comprendront ce principe, le plus tot les probiemes du capital et du travail disparaitront.

Cette necessite d'apjliquer aux tiers non

(33)

les derogations k ces clauses firent refiechir les autorites juridiques des pays sur la nature de la convention collective. On se trouva place devant la necessite de trouver une solution plus adequate k la conception d'alors de la convention collec-tive qu'elle nfctait qu'une espfece de super-contrat creant des obligations.

Aussi les legislatures comme nous avons dit plus haut, decidSrent de donner un effet legal aux conventions

collectives k l'egard de tous les salaries, meme non syndiques d'une entreprise ou d'une profession dans laquelle I'employeur ou les employeurs etaient eux-memes lies par la convention

collective. Cet effet peut se produire ou sous l'action d'une presomption legale; il y a done asservissement automatique k la convention collective sauf s'il existe des conventions contraires ou bien cet assujettissement se produit d'office,

en vertu de la loi et la consequence en est qu'il y a annulation automatique des conventions derogatoires.

Un bon exemple de cette derniere forme, soit 1'in-tervention legislative, apparait dans la loi du Qu6bec sur les Syndicats Professionnels, art. 18 (10).

Cependant cette intervention de l'Etat est tr6s

artificielle et elle laisse 1'impression que le legislateur doit

(10) S.R.Q., 1941, chap. 162 "Si dans un contrat, il est stipule que des ouvriers ou des membres d'un syndicat, d'une union ou d'une confederation de syndicats recevront un salaire determine, ces ouvriers et ces membres, bien qu'ils ne soient pas partie au contrat, ont droit k la quotite de salaire qui y est determine, nonobstant toute renonciation k ce contraire consentie posterieurement par eux, que

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imposer une violence k la loi commune oontractuelle pour lui

faire atteindre les buts recherches par la convention collective. C'est, nous croyons dans les ouvrages des

publicis-tes comme Duguit et Br&the de la Gressaye qu'on trouve la veri-table solution. (11)

Section 2. ProblSme insoluble k la lumiere des theories des civilistes.

Durand (12), Planiol et Ripert (13) Capitant (14),

(11) Louis Lucas, Les conventions collectives de travail, Rev. trimestrielle, 1919; R.L. Morel, Les conventions collecti-ves de travail et la loi du 25 mars 1919, Revue trimestri-elle, 1919; Hauriou, Precis de droit administratif lOe ed. jSze, "Principes g6neraux de droit administratif, 3e ed.; Bonnard, "Precis eiementaire de droit administratif;

Hauriou, "Principes de droit public" 2e ed.; Duguit, Trans-formation g6nerale du droit prive et TransTrans-formation g6n6rale du droit public. Precis eiementaire de legislation industri-elle.

L. Duguit, Les transformations du droit prive, 2e ed. 1920. J. BrSthe de la Gressaye, La nature juridique de la conven-tion collective de travail, th. Bordeaux 1921. A. Rouast, Essai sur la notion juridique de contrat collectif, th. Lyon 1909; M. Nast, Des conventions collectives relatives k l'or-ganisation du travail, th. Paris 1907; Bartheiemy Raynaud, Le contrat collectif de travail, 1901, 2e ed. 1921; Raoul Jay, Q,ufestce que le contrat collectif de travail, 1907; -E. Duthoit, Vers 1'organisation professionnelle,

1910;-Br&the de la Gressaye, Le syndicalisms, l'organis ation pro-fessionnelle et l'Etat, 1931; - De Visscher, Le contrat collectif de travail, th. Gand, 1913.

(12) Paul Durand, "Le dualisme de la convention collective de travail, Revue Trimestrielle de droit civil, t. 38, 1939, p. 353; Aussi, "La contrainte legale dans la formation du rapport contractuel", Revue Trimestrielle de droit civil, t. 42, 1944, p. 73.

(13) Planiol et Ripert, opus citus, No. 882, page 127.

(14) Capitant, "Evolution de la conception franqaise en mati&re de convention collective, " Recueil d*etudes en honneur de Ed. Lambert.

(35)

Josserand (15), etc. ont tous compris qu'il y avait legalenent parlant, plus qu'un contrat dans la convention collective. Ils ont pr6tendu qu'une theorie dite "dualiste" solutionnait les

donn6es du probieme pose par cette institution du droit moderne. Selon eux, la convention collective, serait un super-contrat, une convention cr6ant des obligations reciproques vis-&-vis les parties, et k un moment donne comme l'Etat intervient pour donne effet k cette convention, soit lo. (16) par decret administratif soit 2o. (17) par decision du tribunal (Australia, Nouvelle

zeiande) soit 3o. (18) d'office par une loi, un element regle-mentaire vient se joindre k l'616ment convention pour donner oet hybride qu'on appelle la convention-loi. Mais je me rappor-te aux publicisrappor-tes pour r6furappor-ter 1'aspect contractuel de cetrappor-te theorie. La convention collective n'est pas un contrat. Par definition meme le contrat est un acte subjectif en ce qui

(15) Josserand, "Apercju general des tendances actuelles de la theorie des contrats," Revue trimestrielle de droit civil, t. 36, 1936, page 1.

(16) Exemples de lo.: Union Sud Africaine, Loi sur la concilia-tion industrielle du 30 mai 1930; art. 9 et 7 mars 1933. Bresil, Loi de la convention collective, 23 aoftt 1932, art. 11; Canada, Quebec, Loi de la convention collective, art. 2, 1934; Alberta et Ontario, Standards Industriels; Grande Bretagne, Loi de juin 1934 (Industrie du coton); Mexique, Code du travail 1931, art. 58 k 67; Tchecoslova-quie, Ordonnance de 1'Indus trie du textile, 193 5; France, Loi sur les conventions collectives, 1936, arts. 31 vd et 31 ve; GrSce, Loi sur les conventions collectives, 1935 art. 6•

(17) Exemples de 2o.: Autriche, Loi de la conciliation sur les contrats collectifs de travail, 1919, art. 16 k 19 (Cette loi fut abrogee lors de l'Anschluss); Australia, Loi de la conciliation et de 1'arbitrage, 1928, art. 38 f. et g; Nouvelle zeiande, Loi sur la conciliation et 1'arbitrage,

19 25.

(18) Exemples de 3o.: Allemagne, Loi du travail, 1934, art. 32 Italie, Loi de 1926, art. 10 - Loi de la Charte du Travail de 1927; Portugual, Loi du statut national du travail,

1933, art. 33; U.R.S.S. Code du travail, 9 novembre'1922 art. 16.

(36)

concerne chacune des parties au contrat. En ce sens que chacun des parties contracts individuellement et pour soi des obligatl

sous le contrat. Or si l'on s'arrete k penser k la convention collective, on verra que tel n'est pas le cas k son egard. Les parties k la convention collective ne contractent pas des obli-gations directes et pour soi, c'est-&-dire subjectIves. Les

clauses de la convention collective sont g6n6rales et perma-nentes et s'appliquent seulement aux parties si ult6rieurement k la convention collective et k ce moment seulement elles si-gnent des contrats individuels de travail.

Un contrat n'est pas permanent. II peut etre bris en tout temps par une entente entre les parties sur un deuxieme contrat detruisant les effets du premier. Les clauses d'une convention collective sont permanentes jusqu'A un point tel que l'on peut dire qu'elles ne sont pas un contrat.

Ainsi la plus grande difficulte pour les civiliste oonsistait k demontrer comment les employeurs et les employes membres des syndicats ou unions contractantes pouvaient etre li6s individuellement par une convention qu'ils n'avaient pas personnellement signee. Res inter alios acta, dans tous les textes de loi, 6tait le principe mill6naire s'opposant k cette id6e. Et cependant si l'on niait le caractSre "liant" de la convention collective l'on niait absolument cette derni&re.

La jurisprudence en 6tait arrivfe k parler d'un vague consentement tacite pour expliquer cette application k des tiers non signataires.

Mais les doctrinaires et le jurisprudence des pays semblent avoir 6te tromp6s longtemps par la caracteristique de

(37)

convention qui, indeniablement, appartient k 1'entente survenue entre un syndicat patronal et un syndicat dfemployes. Et selon

eux, toute convention etait un contrat, avec toutes les conse-quences inherentes k la loi du contrat.

Or il est beaucoup de conventions qui ne sont pas des contrats. Ainsi deux ou plusieurs personnes peuvent en venir k un accord sur un point specifique sans qu'il soit cree par la suite une situation juridique subjective, un rapport particuli&reiaent individuel et temporaire de cr6ancier k

debi-teur: ce qui est un contrat. Mais cet accord peut donner auss naissance k une rSgle permanente ou k une situation juridique objective, k un etat: c'est le cas de la convention collective II nfen demeure pas moins que formellement, 1'accord est une

convention. En d'autres termes, la forme exterieure de l'acte est contractuelle, mais le fond ne l'est pas.

Or les publicistes ont demontre que le contrat constitue' ce qu'on a convenu d'appeler un acte subjectif qui cree une situation juridique individuelle, concrete et subjec-tive, done speciale aux parties. (Hauriou et Duguit ont sur-tout demontre ce oaractfere du contrat). (19)

Qufest-ce que oherche k atteindre la convention

collective ? Voici un syndicat de patrons et un syndicat ouvrier qui s'accordent pour rediger une convention generale qui certes regira les rapports entre les deux syndicats, mais les membres de ces syndicats respectifs sont egalement lies. Le caractere d'acte subjectif disparalt done. Premiere diffe-rence.

(38)

Les syndicats sont individuellement 116s par

l'accord, tr6s bien, mais ils sont de plus collectivement lies avec les membres qui les forment respectivement. Le caractere

individuel de la situation juridique du contrat disparalt k son tour: Deuxieme difference. La situation juridique etablie par l'accord collectif n'est pas concrete mais bien abstraite. Un contrat etablit la situation de tel ouvrier pris en parti culler Au contraire la convention collective reglera la situation de tout salarie qui tombera sous le coup de la convention collecti" Troisieme difference.

Ainsi l'on voit que si les civilistes et il en est encore, continuant k vouloir astreindre la convention collective aux regies des obligations et du contrat, ils n'atteindront ja-mais k une solution heureuse de tous les probiemes souleves par 1'application de la convention collective.

Le grand mal dans cette obstination des civilistes est qu'ils ne veulent pas abandonner la conception individua-liste. Si l'on aborde le probieme avec un esprit ouvert sur les probiemes sociaux et economiques, l'on decouvre avec les publicistes la conception "sociale" de la convention collective et alors tout s'eclaire. Arnion dans son volume (20) a une

remarque tr&s juste k ce sujet:

"II est de tradition d'opposer...theories contrac-tuelles et theories regie mentaires. En r6alit6 les auteurs que l'on groupe dans l'une et 1'autre categorie ne se placent pas exactement sur le

meme plan. Les uns s'attachent surtout au premier problems...se pr6oocupant surtout d'expliquer les decisions de la jurisprudence dans le cadre des textes juridiques existant. Les autres depassant

(20) Arnion "Evolution des conventions collectives de Travail" Partie II, chap. Ill, Sect. II B.

(39)

ces perspectives restreintes, envisagent le pro-bieme de la convention collective en fonction de ses possibilit6s d'avenir, de "lege condenda" et tracent le schema ideal de ce qu'elle pourrait

et devrait devenir. Les premiers sont done amen6s k se limiter k la forme juridique presente et k parler le langage du droit prive; tandis que les seconds preoccup6s du contenu reglementaire, en envisagent le d6veloppement dans des termes de droit public. Peut-Stre y a-t-il eu au fond, une certaine meprise sur la formule de "nature juri-dique de la convention collective", les uns

d6signant par Ik la forme technique et les autres, la nature profonde de 1'institution etudiee."

Section 5: Necessite de faire lntervenir 1'interpretation r6glemen7aTre.

La conviction qu'une convention collective evoluee

et aid6e par une legislation favorable jointe k une conception plus sociale de sa nature et k l'impossibilite de lui faire jouer son r6le parfaitement en l'assimilant k un contrat, a

permis aux publicistes de faire triompher peu k peu leurs idees sur la convention collective. Selon eux c'est une reglementatioj pure et simple des conditions de travail.

Nous avons vu plus haut que 1'absence de

reglemen-tation dans le domaine du contrat de travail avait amen6 l'anar-chie dans I'economie humaine des peuples et une s6rie d'abus de la part des capitaines d'Industrie tendant k la ruine sociale et economique des salaries. La premiere reaction est venue de l'Etat qui par sa legislation sociale et ouvriere a reconnu le droit d'association et le droit de contracter collectivement, ainsi que les conventions collectives. Une reaction paralieie se fit sentir dans 1'organisation professionnelle elle-meme. Les patrons et les ouvriers s'organiserent de fe<jon k r6glemen-ter les relations ouvrieres. Ce fut la fin d'un cycle de

(40)

liberte absolue oil l'on nia un caractfcre interne de la race humaine, k savoir que l'homme est un etre essentiellement

sociable. II faut done une sorte de reglementation dans le domaine patronal et ouvrier afin de regulariser les relations qui lient les membres de la profession.

L'Etat peut intervenir et est intervenu dans plu-sieurs pays en imposant une s6rie de lois regulatrices de sa-laire (sasa-laires minima) des conditions de travail (lois des

conditions de travail dans les industries) des heures maxima et de l'age minimum du travail des femmes, etc. Heureusement

cependant, k mon avis, les sujets de ce droit du travail ont m§mes indiqu6 la vole k suivre pour se reglementer eux-memes. La convention collective est devenue l'outil par

ex-cellence de la reglementation des conditions de travail. Le seul defaut de cette evolution a 6te la lente acceptation des ideologistes k transformer le contrat de travail pur et simple en une reglementation. II serait peut-etre plus juste de dire que l'on ne pouvait imaginer la convention collective comme une institution autre qu'un contrat et avec cette fausse premisse on a longtemps cherche k atteindre des conclusions qui par leur logique meme d6truisaient le dynamisme naturel de la convention collective. On commence seulement k realiser au-jourd'hui que la convention collective n'est pas un contrat, mais bien simplement un reglement avec peut-etre une ecorce formelle contractuelle. C'est, pour dire comme Arnion (21) un accord avec une forme contractuelle mais avec une essence

(41)

et une finalite r&glemsntaire. Pour demontrer que la convention collective, inalgre son caractere farmel apparent de convention collective, est une espece de loi, il suffit d'etablir 1'ana-logic suivante. Au Parlement, l'acte-regle qui est la loi, pro-vient en fait, d'une espece de convention arretee entre plusieur volontes pour changer I'ordre juridique. On n'appelle pas cette entente de volonte, qui dans les Parlements modernes comme celui du Canada et de l'Angleterre, est le r6sultat d'un caucus du

parti au pouvoir, du parti majoritaire ou d'une coalition de

partis, on ne l'appelle pas disons-nous, une convention, mais en fait, c'est une convention. Voici ce qui se produit au Parlemen Un caucus majoritaire arrete les actes-regles a proposer comme lois. Ces bills sont proposes et combattus par la minorite, mais gen6ralement acceptes et deviennent lois. La majorite im-pose sa volonte k la minorite. Pour forcer l'analogie encore plus, on peut ajouter que la majorite au pouvoir devra faire accepter ses actes par les gens qu'elle repr6sente. Mais cela ne viendra qu'aux elections suivantes. Quant k la minorite elle doit adherer k la volonte de la majorite. La situation est la meme dans la convention collective. En effet supposons pour un moment qu'une organ!sation-ouvriere nationale devienne assez puissante et evoluee, elle acquerra une telle autorite prof essionnelie qu'elle pourrait tr&s bien poser des actes-rSgles internes k le profession auxquels la minorite non

or-ganises devra adherer. Cependant aussi longtemps que le pouvoir legislatif demeurera exclusivement entre les mains du Parlement, les conventions collectives ne seront que des reglements, foimej

(42)

inf6rieures dans la hi6rarchie des actes-regles. Mais nous ver-rons ce qu'est le r6glement plus loin. Certain pays comme

l'Allemagne nezie de 1933 k 1945, l'ltalie Mussolienne des dernieres ann6es avant la guerre et l'U.R.S.S. actuelle, k I'economie etatique, ont maintenant abandonne la forme con-tractuelle entierement et la convention collective a pris dks lors, le caractere de reglementation absolue et etatique des conditions de travail.

J'ose esperer personnellement que l'on ne poussera pas trop loin I'etatisme reglementaire mais que l'on s'en tidra k un minimum de liberte intra-professionnelle dans les en-tentes ouvrieres tout en obtenant quand meme une reglementation harmonieuse.

Dans le prochain chapitre j'essayerai de demontrer comment la convention collective constitue un exemple parfait de reglement, non pas un contrat.

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CHAPITRE IV

POURQJJOI LA CONVENTION COLLECTIVE EST UN REGLSMSNT. Section 1. Caractferes du reglement.

Ici j'aimereis referer les lecteurs k des ouvrages de Duguit (22), Br6the de la Gressaye (23), Hauriou (24),

Bonnard (25) et jeze (26). II va nous falloir en quelque sorte entrer dans la philosophie du droit pour asseoir solidement que la convention collective est un reglement ou en d'autres termes une loi.

Tout norme juridique qui attaint les rapports et les agissements des hommes fait partie de ce que l'on appelle I'ordre juridique. C'est 1'etat social qui existe h un moment donn6 dans une societe. Cet etat social provient des regies de droit qui s'imposent aux hommes de tel ou tel groupement social plus ou moins etendu selon que le champ d'application est plus ou moins etendu et aussi il provient des situations juridiques qui decoulent de ces regies de droit. II est done possible de dire que toute especes de societe se trouve

assujettie k un systeme de regies normatives qui ordonne ou

(22) Duguit, Traite de droit constitutionnel, 2e ed. et 3e ed. Vol. I.

(23) Brethe de la Gressaye, Etudes de Droit civil k la m6moire de Henri Capitant: "La convention collective de travail est-elle un contrat" p. 101.

(24) Hauriou,"Precis de droit administratif" et"Principes de droit public", 2e ed. 1916 p. 137.

(25) Bonnard, Pr6cis eiementaire de Droit administratif.

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defend aux sujets soumis k ce systeme selon que la r6gle est positive ou negative et cela sous le coup d'une sanction.

Mais cet ordre juridique n'est pas stable et cela tr6s heureusement, car avec la constante evolution dans les

soci6t6s humaines, l'6tat social s'il n'6voluait pas, risquerait de s'atrophier. Aussi on remarque dks lors, qu'il y a des mo-difications k I'ordre juridique. Ces momo-difications sont amenees par des actes juridiques. Or ces actes juridiques sont par

essence des actes de volonte avec 1'intention qu'une modification survienne dans I'ordre juridique.

Les elements constitutifs de l'acte juridique sont: lo. la capacite; 2o. 1'objet immediat et m6diat et finalement, 3o. le but ou motif determinant.

Mais il existe plus qu'une seule espece d'actes juridiques en ce qui concerne leurs effets. II y a d'abord les regles, puis les conditions et enfin les

actes-subjectifs.

L'acte-regle est celui qui est fait avec 1'intention qu'il se produise une modification dans les regies de droit.

Les actes-conditions conditionnent 1'application k une personne de rSgles objectives de droit. Grace k ces actes, les sujets de droit peuvent se soumettre k une situation juri-dique dont l'6tendue et les effets ont dej& 6te determines d'une faqon generale et impersonnelle par I'ordre juridique. II y a finalement les actes subjectifs dont 1'effet est de susciter une situation juridique bien individuelle, concrete

(45)

et sp6cifique aux parties la creant. (Voir Duguit, Bonnard et jeze) (27).

Les differences apparaissent dans la formation et dans les effets.

Au point de vue formel en effet, le contrat est une convention, ce que la loi n'est pas ou ne semble pas etre. Dans la plupart des pays la loi est le produit de la volonte de quelques representants de la societe qui etablissent une norme nouvelle qui sera approuvee par d'autres volontes et le r6sultat sera un acte d'adhesion de la volonte minoritaire k la volonte majoritaire.

On a dit au debut de cette analyse que la plupart des pays ont adopte la conception que seul le gouvernement, Etat ou Parlement a le pouvoir de faire des lois qui sont des actes juridiques. Nous parlons ici dans le sens large du mot en designant ou embrassant sur les vocables "gouvernement" "Etat" ou "Parlement" tous les organes representants et les eius par le peuple ou sa majorite ainsi que les organismes crees par ces organes. On salt qu'aujourd'hui la liberte de la separation des pouvoirs a ete grandement discr6ditee au Canada par exemple on constate que des lois sont imposees par l'ex6outif ou cabinet et par les deiegues de ce dernier.

Nous venons aussi de voir qu'un acte juridique est un acte de volonte avec intention de modifier I'ordre juri-dique ou etat social. Done les gouvernements, ceux qui sont

(27) Duguit (opus citus) 3e ed. Vol. 2, p. 398 et s. Aussi "Collective acts as distinguished from contracts" Yale Law Journal, 1918, Vol. 27, Bonnard, (opus citus) p.36 et seq., Jbze (opus citus) Vol. I, p. 25 et seq.

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investis des fonctions de l'Etat ont une volonte qui leur permet de poser des actes de volonte capables de modifier I'ordre ju-ridique. Des lors, il apparait qu'il y a eu une erreur dans la conception absolue et exclusive que les parlements, corps doues du pouvoir 16gislatif pouvaient seuls faire des lois.

Mais nous reviendrons sur cette anomalie ideologique

II convient maintenant de voir ce qu'est une loi au point de vue formel et materiel.

Duguit dit:

"Au point de vue formel, est loi toute

"decision eman6e de 1'organe qui d'apres "la constitution du pays considere k le "caractere d'organe legislatif. Dhs lors "est loi formelle toute disposition et "seulement la disposition qui est votee "par le Parlement et promulguee (par "1'auto rite executive) quels que soient "le caractere interne et l'objet de cette "disposition.

"Au point de vue materiel, est loi tout

"acte qui possede en soi le caractere in-"trinslque de loi, et cela independamment " de 1'individu ou du corps qui fait l'acte. "C'est l'acte legislatif d'apres sa nature "qui peut etre en meme temps une loi for-"melle, mais qui aussi peut ne pas l'etre, "qui tr6s souvent ne l'est pas...."(28). On peut egalement dire qu'au point de vue materiel,

la loi est l'acte par lequel l'Etat formula une regie de droit objectif ou ores des rdgles. Comme les regies que formule le Parlement, ou pour statuer le droit objectif ou pour l'activer, sont elles-memes des regies de droit objectif on pourra affir-mer qu'est loi mat6rielle tout acte emane duParlement et conte-nant une regie de droit objeotif. La loi est done un acte-regle

(28) Leon Duguit "Traite de droit constitutionnel, t.2. (2e ed.) p. 140.

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