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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Conclusion des XXIIes Journées : Propos d'étape

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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CONCLUSION DES XXIIes J.I.E.S.

L’éducation aux risques

santé, sécurité, environnement

-Jean-Louis MARTINAND

E.N.S., Cachan

Président des J.I.E.S.

PROPOS D’ÉTAPE

MOTS-CLÉS : ÉDUCATION - RISQUE SANITAIRE - SÉCURITÉ –

RISQUE ENVIRONNEMENTAL - COMMUNICATION

I

Cette dernière intervention avant la clôture de nos XXIIes Journées est grandement facilitée par trois textes du Journal des Journées Slalom, que tous les participants ont pu méditer :

Dans le premier texte, « reflets d’un programme », Noël Barbichon a étudié l’« offre » de communication, ses forces, ses faiblesses, ses carences.

Reflets d’un programme (extraits)

Noël BARBICHON, C.N.R.S.-P.R.C., Gif-sur-Yvette [....]

Sur près d’une centaine d’interventions y compris celles d’ouverture des Journées, j’ai recensé 39 interventions abordant leur sujet sous un angle concret pratique (par exemple, la présentation d’une expérience pédagogique) et 50 interventions caractérisées par une approche théorique, un approfondissement conceptuel.

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Parmi ces 50 interventions, 19 se placent sur un plan strictement éducatif et pédagogique, 15 traitent du risque, 7 de la prévention, 9 de la santé (à conserver ou à recouvrer). Les 39 autres se répartissent de la manière suivante : 12 se réfèrent à des expériences pédagogiques, 14 se réfèrent à des évènements dont la survenance est aléatoire et 13 se réfèrent aux risques d’atteinte à l’intégrité corporelle.

Puisqu’une part importante du programme est constituée des propositions de participants aux journées, on peut estimer qu’il reflète les centres d’intérêt de l’auditoire. Si cette estimation se révèle juste, la globale satisfaction des participants ne permettra pas d’identifier les thématiques orphelines absentes du programme.

Cette réflexion personnelle m’a conduit à explorer l’étendue du champ thématique de l’éducation au risque. Au terme de cet examen, j’ai établi un schéma regroupant les différentes composantes de ce champ, en reliant les situations à risque avec les solutions préconisées en matière éducative en vue de gérer au mieux ces situations. (La logique présidant à la structure de ce schéma n’est pas, à mon avis, déterminante dans l’ordonnancement des interventions retenues au programme des Journées).

L’analyse [....] nous montre :

♦ un équilibre entre le nombre d’interventions traitant de l’éducation (44) et celles traitant des situations à risque (43)

♦ un équilibre entre l’approche conceptuelle du risque (22) et les aspects pratiques (prévention, gestion 21).

♦ un équilibre dans l’analyse des situations à risque entre celles concernant l’intégrité corporelle (21) et celles concernant des évènements dont la probabilité de survenance est indépendante des précédentes (20)

♦ sur les 44 interventions traitant de l’aspect « éducation » et « pédagogique », seules 11 interventions relèvent du domaine santé et maladie.

♦ je n’ai pu déceler dans les interventions celles faisant référence à la démarche probabilité.

♦ seul le sport hors école fait l’objet d’interventions, lesquelles se limitent à 4

♦ il n’y a aucune intervention ni sur la nature des risques ni sur l’éducation au risque dans la rubrique éducation physique et sportive à l’école.

[....]

Dans le deuxième texte, extrait de son introduction aux Journées, André Giordan a attiré notre attention sur deux enjeux des plus importants : l’éducation pour un débat démocratique et le bon usage du principe de précaution.

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Enfin, Michel Juffé s’est risqué à une classification des risques selon les positions des acteurs et les situations.

Un point de vue philosophique

Michel JUFFE, Professeur à l’École Nationale des Ponts et Chaussées à l’Université de Marne-la Vallée

[....]

Voyons [....] à quelles sortes de risques on est confronté, qu’on le veuille ou non. D’abord les risques naturels physiques (inondations, incendies, éruptions volcaniques, avalanches, tornades...) et biologiques (infections, empoisonnements...), puis les risques liés à l’activité humaine (travail, sport, loisirs, guerre, production, distribution et consommation....), des accidents de la circulation aux effluents agricoles et industriels, sans oublier l’utilisation d’outils, instruments et machines divers (de la presse à emboutir au téléphone mobile). La variété est telle que je suis incapable d’établir une classification exhaustive. Je vais donc distinguer :

1. Les risques que l’on choisit de prendre pour soi 2. Les risques que l’on fait subir aux autres 3. Les risques inhérents à l’existence humaine.

Les risques que l’on choisit.

Chacun est libre de jouer avec sa vie, dans la mesure où cela ne nuit pas aux autres. C’est très restrictif car nous avons des proches, que notre disparition ou nos infirmités peuvent blesser. D’un autre côté l’exploit (et l’héroïsme en général) offre des récompenses de toutes natures, et cela peut aussi faire plaisir aux autres. Ainsi, ce genre de risques est ambivalent : il comporte des gains et des pertes. L’éducation, dans ce cas, consiste à apprendre à prendre la mesure des enjeux pour une collectivité (famille, coéquipiers, employés, confrères, etc.). On ne peut supprimer ce genre de risques, car ils font partie de l’action (au sens où l’entend Hannah Arendt : ce qui lie les hommes entre eux, lien fondé sur la fragilité de la condition humaine).

Les risques que l’on fait courir aux autres.

Ils peuvent être subdivisés en cinq classes, selon ce que les uns et les autres savent et peuvent.

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• Ils savent et peuvent. Une négociation ou un conflit sont possibles. L’éducation est alors de l’ordre de la résistance à la pression ou à l’influence subie, autrement dit de l’ordre de l’autonomie de la pensée et de l’action, en termes stratégiques et politiques.

• Ils savent mais ne peuvent pas. Il leur reste alors à faire appel à ceux qui peuvent. C’est donc une éducation à la prise de parole, à la manifestation publique, à la vigilance citoyenne.

• Ils ne savent pas (et donc ne peuvent rien). L’éducation consiste alors à les former à en savoir plus long (et pas seulement à attendre passivement qu’on les informe). C’est donc une éducation scientifique et technique.

• Ils savent et nous ignorons. Il suffit en théorie qu’ils nous préviennent que nous leur causons du tort. En pratique, on hésite à affronter ses supérieurs hiérarchiques, ses maîtres ou ses parents. On hésite aussi à affronter un criminel ou un fou. On n’aime pas non plus vexer un subordonné ou un enfant. On n’aime pas humilier un faible d’esprit. Cependant l’éducation consiste à surmonter ses craintes et à oser dire ce qui nous paraît important ; c’est donc une formation de type psychologique.

• Personne ne sait rien. Dans ce cas, c’est à la grâce de Dieu, du hasard ou de la nécessité (selon nos croyances). L’éducation consiste, dans cet unique cas, à accepter de bonne grâce la fatalité. Ce qui n’empêche pas, au vu des résultats catastrophiques, d’essayer d’apprendre de quoi il s’agit.

Les risques inhérents à l’existence.

Marcher, s’abriter, manger, dormir, se lier aux autres... c’est, intrinsèquement, risquer : de tomber, de recevoir le toit sur la tête, de s’empoisonner, de ne pas se réveiller, d’être déçu ou trahi... À ce compte, il faudrait ne rien faire ou vivre une vie sans cesse sur le qui-vive (c’est le cas de le dire), une vie étriquée, sans peine et sans joie. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut faire exprès de traverser la rue sans regarder, d’habiter une zone inondable, de manger n’importe quoi et de se lier avec n’importe qui. Mais c’est accepter que nous ne soyons ni omniscients ni tout puissant et qu’exister — humainement parlant — c’est accepter que nous sommes mortels (et non rechercher la mort). Dans ce dernier cas, l’éducation est proprement philosophique (au sens ancien du terme) : apprendre à accepter les limites de la condition humaine.

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II

Au terme de détours plus ou moins longs, cette dernière séance plénière a recentré notre attention sur les problèmes et les expériences de l’éducation aux risques en elle-même, « recollant » ainsi aux intentions qui étaient explicitées dans le texte d’appel aux Journées :

« médias et école semblent rencontrer face aux risques de redoutables problèmes

d’éducation et de communication : difficultés pour aborder la complexité et l’incertitude dans la représentation et la prévision, difficultés à prendre en compte les émotions, l’imaginaire, les réactions individuelles et collectives dans l’information et l’administration. Les comportements des acteurs sont eux-mêmes facteurs de risques. Et pourtant, c’est pour eux et par eux que la maîtrise du risque est nécessaire et possible ».

Je crois que les séances plénières ont bien jalonné notre parcours intellectuel, avec quelques idées-repères :

1. Le goût du risque, caractéristique de l’homme et manifestation de la vie

2. La relation essentielle entre risque et décision, dans des situations qu’il s’agit d’affronter, avec des possibilités et des responsabilités de choix, pour gérer, communiquer, légiférer 3. Les images réelles et virtuelles qui accompagnent le développement du SIDA avec les

risques personnels et sociaux qu’il engendre aujourd’hui

4. Les démarches et outils d’une pensée rationnelle et objective du risque (expliquer, prévoir, évaluer, et donc se représenter) pour que le risque ne soit plus assimilé à un destin

5. Les composantes cognitives d’une éducation aux risques à l’école et dans les médias, c’est-à-dire les savoirs nécessaires pour des conduites souhaitables.

III

J’aimerais en quelques mots revenir sur certains aspects de l’éducation aux risques, en insistant sur cette notion d’éducation, de communication, fortement distinguée d’un enseignement des savoirs sur le risque.

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De ce point de vue, je crois que l’ « entrée par la question des connaissances » n’est pas la plus pertinente pour envisager notre problème. Autant et peut-être plus que de savoirs, il s’agit de valeurs, d’habitus, de capacités de décision, de volonté d’action.

D’une part ces problèmes ne sont pas vraiment familiers aux scientifiques, qui ou bien sortent de leurs domaines de compétences et n’interviennent plus au titre de scientifiques, ou bien se restreignent aux maximes d’action en situation de connaissance certaine. D’autre part, c’est précisément parce qu’il faut développer des habitus d’action en situation de connaissance incertaine et partielle, de consensus incomplet, de liberté limitée, qu’il s’agit d’éducation et non de pur enseignement.

C’est pour cela que le premier objet de cette éducation est de permettre de débattre et donc d’expliciter des valeurs, de discuter et de promouvoir des normes, de formuler des principes. Le second objet, profondément lié au premier est de développer et d’étayer des habitus, par des actions socialisées, collectives — dans et hors l’école, par et avec les médias. Cette action éducative inclut critique et réflexion sur les valeurs et les savoirs, y compris ceux qui sont l’objet des enseignements par disciplines scolaires, et ceux qui sont diffusés par les médias, les pairs..., ou ceux qui accompagnent implicitement les activités quotidiennes dans la famille, au travail ou à l’école.

Sur cette base, il importe alors de « revisiter » les savoirs. Cela me semble impliquer trois questions.

1. La première est celle de la rationalité. Celle-ci est trop souvent réduite à la seule intelligibilité, selon une perspective purement scientifique (connaître et expliquer). La notion fondamentale ici, plus encore que celle d’incertitude, objet d’évaluation statistique ou d’attente de résorption, est celle d’ignorance assumée, marque de la conjoncture, et qui n’empêche pas responsabilité et efficacité. C’est la caractéristique de toute action dans sa composante technique. Elle n’est pas cependant irrationnelle : il y a une rationalité technique, en particulier avec les normes.

2. La deuxième question est celle de la problématisation de la place de l’homme lui-même dans le risque. L’homme, individu ou groupe, est plus qu’un facteur ou un agent, c’est un acteur. Lors du fameux tremblement de terre de Lisbonne, Rousseau faisait remarquer contre Voltaire que c’est la construction de la ville par les hommes eux-mêmes qui engendrait le risque, pas les phénomènes naturels. Toute connaissance du risque est sociale et historique. Mais c’est insuffisant : l’homme est un sujet. Il n’est un « objet » d’étude pour le savoir sur le risque que selon des points de vue trop partiels pour fonder des perspectives d’action, et donc de conceptualisation du risque. Plus qu’un « objet complexe », plus qu’un

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« sujet récalcitrant », il doit sans doute être pensé comme un partenaire égal face à l’expert ou au politique.

3. Troisième et dernière question : quelle contribution l’éducation scientifique est-elle capable d’apporter à l’éducation aux risques de la santé, de la sécurité ou de l’environnement ? Quels sont les méthodes et savoirs « enseignables » pour élaborer quelques éléments de connaissance objective, quelques outils d’intelligence du monde des risques ? Comment faire face à la nécessité d’aborder les problèmes de l’incertitude, de la complexité, du sujet, au-delà des incantations rituelles mais souvent impuissantes à l’interdisciplinarité, ou à la systémique : autrement comment problématiser, dans le cadre de l’école et des médias, l’éducation aux risques, du point de vue des élèves ou des publics, comme du point de vue des enseignants ou des médiateurs ? Il y a manifestement encore à travailler sur cette question.

Comme il y a encore à réfléchir à un troisième aspect que je souhaitais souligner pour finir. L’éducation aux risques vise à promouvoir la capacité et la volonté d’action, donc d’influence et de décision des individus, des groupes, des collectivités. Qui peut imaginer que ne surgissent pas alors des conflits de pouvoir parce qu’il y a d’abord des antagonismes d’intérêts : les risques, ce sont des enjeux « chauds ». Nous n’en avons vraiment pas assez discuté.

Références

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