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Michel Bougard, La chimie de Nicolas Lemery, Turnhout, Brepols Publishers, 1999

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Submitted on 26 Oct 2018

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Michel Bougard, La chimie de Nicolas Lemery,

Turnhout, Brepols Publishers, 1999

Rémi Franckowiak

To cite this version:

Rémi Franckowiak. Michel Bougard, La chimie de Nicolas Lemery, Turnhout, Brepols Publishers, 1999. Varia, n° 214/1, 2002, pp.174-175. �halshs-01906010�

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compte-rendu du livre La chimie de Nicolas Lemery de Michel Bougard (Turnhout, Brepols Publishers, 1999), XVIIe Siècle 214 (2002): 174-175.

Quand le Cours de Chymie de Nicolas Lemery de 1675 est évoqué, il l’est rarement sans l’épithète « célèbre ». Le donc si célèbre Cours de Chymie de Nicolas Lemery, pas tout à fait le dernier de la longue série d’ouvrages d’enseignement de la chimie édités au XVIIe

siècle, est en tout cas celui qui connut assurément la fortune la plus extraordinaire pour un tel genre de littérature. Le manuel n’a pas été la seule source de renom de cet apothicaire parisien, les leçons publiques de chimie qu’il dispensa dès 1672 dans des salons, puis dans son officine ont achevé de lui faire une réputation qui, à elle seule, « sollicita et obtint » une place d’associé chimiste au sein de l’Académie royale des sciences, selon le mot de son secrétaire perpétuel, en 1699 lors de la refonte de l’institution. Nommé très rapidement pensionnaire de l’Académie, Lemery est encore l’auteur de nombreuses communications qu’il y fit, d’un Traité de

l’Antimoine, d’un Traité des Drogues, et d’une Pharmacopée Universelle très appréciée. Et

pourtant, c’est à un oubli de la part des historiens des sciences que Bougard souhaite ici remédier en présentant l’étude d’une pensée de la chimie prélavoisienne, contemporaine de la réception des travaux de Boyle, bornée et masquée par deux moments de la philosophie chimique, la tradition paracelsienne et la doctrine stahlienne. L’examen de l’œuvre de Nicolas Lemery lui est apparu comme un sujet « neuf » qui, bien loin de marquer une simple transition mécaniste entre iatrochimie et phlogistique, constitue au contraire un domaine de pratiques et de théories autonomes et originales. Bougard a fait le choix de proposer une analyse des activités et des opinions chimiques de Lemery depuis l’intérieur de son laboratoire, depuis l’intérieur de ses alambics et cornues. Deux grandes parties composent son ouvrage, la première se penche sur la vie et l’œuvre du chimiste, la seconde y apporte des réflexions d’ordre épistémologique.

Partie I. Michel Bougard a le souci affiché d’insérer la pensée de l’apothicaire dans son décor historique. La philosophie chimique dans laquelle celui-ci a pu puiser ses conceptions de la matière est exposée de manière étonnante dans deux chapitres dont on a peine à percevoir la pertinence du discours et de son organisation, et où les liens avec les travaux du chimiste, s’il y en a parfois, sont laissés à l’appréciation du lecteur. Le premier traite des doctrines cartésienne (avec même un détour par un « développement du cartésianisme en Angleterre »), gassendiste, leibnizienne, et newtonienne (alors que, outre l’annonce de la gravitation universelle de 1687, l’influence de l’Anglais sur la chimie réside essentiellement dans la question 31 de son Opticks de 1706 dont les premiers effets se sont faits sentir à partir de 1718, trois ans après la mort de Lemery). Le second, quant à lui, en quatre pages environ, fait le tour des doctrines d’Aristote, de Platon, des Stoïciens et de Paracelse. Puis, « afin d’insérer les vues personnelles de Nicolas Lemery […] pour comprendre les idées chimiques du temps, je pense, nous annonce l’auteur, qu’il convient de faire d’abord une sorte de revue de ces conceptions qui alimentèrent la littérature tout au long du XVIIe siècle » (pp. 112-113). Se succèdent alors toute une série de citations de Beguin, Croll, de Clave, Davisson, Van Helmont, Lefebvre, Glaser, Matte-La Faveur, Boyle, Du Clos, Homberg, qui ne nous apprennent rien sur les auteurs, ni ne permet de nous faire une idée de la science chimique du Grand Siècle, ni n’éclaire la pensée de Lemery (mais il faut bien justifier l’impressionnante bibliographie en fin de volume). C’est là le défaut majeur de l’ouvrage ; et cette critique est généralisable à l’ensemble du texte. L’utilisation de très longues citations entrecoupées de quelques lignes d’un commentaire trop succinct, très peu fouillé, révèle une faiblesse d’analyse, un manque de compréhension synthétique de l’époque concernée. L’auteur en reste uniquement à la reprise de passages de livres de philosophes et chimistes qu’il considère comme « significatifs ». Le maniement abusif de citations construisant une étude qui sonne creux, se poursuit même dans l’examen de la philosophie chimique de l’apothicaire. « Il m’apparaît […] nécessaire de produire in extenso les principales pages dans lesquelles Lemery explique sa conception de la matière […] », avertit Bougard (p.

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141). Aussi l’analyse des principes chimiques manipulés par Lemery avec son train de passages extraits de la partie théorique du Cours de Chymie (celle-ci est d’ailleurs complètement reproduite en annexe 2) avec son discret appareil critique apparaît-elle également pour le moins superficielle. La difficulté pour l’auteur de porter un regard critique sur la pensée de Lemery, le conduit à prendre pour argent comptant un topos de la littérature (al)chimique du XVIIe siècle, repris par l’apothicaire qui prétend dévoiler enfin au lecteur de manière intelligible le vrai travail de la nature et du chimiste en son laboratoire.

Le livre de Michel Bougard ne semble réellement débuter qu’au chapitre V, page 159 (il y a bien les 45 pages biographiques). Bougard amène à ce moment une interprétation moderne des opérations chimiques du Cours de Chymie qui est loin d’être inintéressante. La volonté de l’auteur est certainement de proposer l’image d’un chimiste du XVIIe

siècle travaillant sur une matière qui est la même qu’aujourd’hui, dont l’œuvre est à rapprocher davantage de celui des chimistes contemporains que de celui de la classe de ce qu’on nomme avec toutes les connotations habituelles qui y sont attachées alchimistes. Malheureusement, cette méthode le pousse à juger cette chimie avec un regard trop actuel, à analyser par récurrence les recettes du manuel de Lemery ; ce qui contrevient pourtant à la ligne de conduite que doit adopter tout historien des sciences annoncée en seconde partie de l’ouvrage. On est surpris de lire des phrases du genre : « Lemery se trompe lorsqu’il assimile la corrosivité de la chaux à l’action des corpuscules de feu libérés par l’eau […] » (p. 167). Ou encore au sujet d’une réaction effervescente : « Si on peut trouver quelque vérité au mécanisme corpusculaire proposé (il y a bien agitation moléculaire et combinaison entre ions qui s’associent en agrégats moléculaires, finissant par précipiter sous l’action de la pesanteur), la volonté de tout expliquer conduit Lemery à des propositions erronées […] » (p. 175). La volonté de tout comparer à nos connaissances actuelles conduit de même Bougard à un commentaire parfois anachronique et inconsistant. C’est là le second défaut de taille de la méthode de Bougard, qui malgré tout, fait également l’intérêt du livre. Il reconnaît pourtant le risque d’anachronisme, et se défend de « juger la qualité intrinsèque du travail [des] chimistes [d’alors], encore moins de sanctionner leurs erreurs » en introduction de son chapitre VI qui marque certainement l’apport à retenir le plus personnel de Bougard. Il y expose une série de préparations chimiques extraites du Cours qui a le mérite de nous permettre de suivre Lemery et certains de ses contemporains dans leur pratique de laboratoire tout en ayant en parallèle pour support une traduction moderne de ce qu’ils opéraient. Cette façon de faire doit rappeler que la chimie de la fin du XVIIe

siècle ne peut pas être réduite à un simple genre littéraire, mais constitue une réelle pratique scientifique dont le discours s’appuie sur une puissante analyse expérimentale de la matière, devant déboucher sur une application thérapeutique (chapitre VII).

Seconde partie. Contrairement à son titre, « Critique épistémologique de l’œuvre de Nicolas Lemery », le chapitre VIII présente plutôt un état des lieux de la pensée de philosophes sur la manière de mener une recherche en histoire des sciences. Les propres réflexions de Bougard centrées sur le travail de Lemery sont rares, et ne se retrouvent pas non plus au chapitre suivant qui a pour propos précisément de traiter de « quelques obstacles épistémologiques et autres » dans l’œuvre du chimiste. En revanche, dans cette même section est réaffirmé qu’« il serait en effet malhonnête de sanctionner la pensée chimique de Lemery à partir de nos connaissances » (p. 329), alors qu’au sujet de l’opération menant à la « découverte fortuite » du gaz hydrogène par l’apothicaire, il est inscrit que « Lemery interprète mal cette réaction » parce qu’il n’avait pas pris en compte le carbone du charbon, le potassium du salpêtre et le monoxyde d’azote qui se dégage (p. 332). Par ailleurs, le chapitre, « Nicolas Lemery au regard des modernes », méritait-il vraiment de constituer un chapitre ?

Le dernier chapitre abordant des thèmes tels que la question du rapport entretenu entre chimie et protestantisme, la diffusion du savoir chimique, les démonstrations publiques de chimie, demeure un volet intéressant de l’ouvrage de Bougard, avec sa lecture des recettes, et l’annexe 1, dont les éléments auraient dû prendre place dans le corps de l’ouvrage, sur un examen de l’évolution du contenu du Cours de Chymie au cours des diverses rééditions

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françaises, et en comparaison avec les autres manuels de chimie du siècle. Mais on ne peut s’empêcher de penser que Nicolas Lemery est le grand absent de ce travail. Si oubli il y avait, oubli il y a encore. Pourquoi ne pas proposer plutôt une réédition commentée du Cours de

Chymie de Lemery, à l’image de celle déjà réalisée par Baron d’Hernouville en 1757, qui eût

sûrement été plus profitable aux historiens de la chimie et aux lecteurs curieux ?

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