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Contexte paléoenvironnemental du peuplement de la région du détroit de Québec, au cours des périodes paléoindienne et archaïque ancienne

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Academic year: 2021

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ISABELLE BÊTY

CONTEXTE PALÉOENVIRONNEMENTAL DU PEUPLEMENT DE LA

RÉGION DU DÉTROIT DE QUÉBEC, AU COURS DES PÉRIODES

PALÉOINDIENNE ET ARCHAÏQUE ANCIENNE

Mémoire présenté

à la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval dans le cadre du programme de maîtrise en archéologie

pour l’obtention du grade de Maître ès arts (M.A.)

DÉPARTEMENT D’HISTOIRE FACULTÉ DES LETTRES

UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC

2012

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iii RÉSUMÉ

Ce projet de recherche porte sur la relation entre le peuplement de la région du détroit de Québec lors des périodes paléoindienne et archaïque ancienne (12 000 à 7 000 ans AA) et son contexte paléoenvironnemental. Cette étude est basée sur l’analyse des grains de pollen fossiles extraits de la tourbière Saint-Nicolas et vise à reconstituer les conditions paléoenvironnementales en place lors du peuplement initial de la région. Cette reconstitution environnementale permettra de mieux comprendre les liens entre les premières occupations humaines de la région et les conditions environnementales en place à ce moment. Il sera ainsi possible de définir le couvert végétal et de voir dans quelle mesure il aura eu un rôle déterminant ou non dans le peuplement humain de la région.

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v REMERCIEMENTS

Je souhaiterais adresser mes remerciements les plus sincères aux personnes qui m'ont apporté leur aide et qui ont contribué à l'élaboration de ce mémoire. Je tiens d’abord à remercier sincèrement Madame Allison Bain, qui, en tant que directrice de mémoire, s'est toujours montrée disponible et à l'écoute, tout au long de la réalisation de ce projet, et sans qui ce mémoire n'aurait jamais vu le jour. Également, je tiens à souligner l’appui de Monsieur Martin Lavoie, co-directeur, qui a su m’assister dans mes démarches, tant sur le terrain qu’en laboratoire, et m’a guidée dans la réalisation de mon échantillonnage. J’adresse également un grand merci à Madame Élisabeth Robert qui m’a guidée tout au long de mes recherches en laboratoire; elle a su répondre à mes nombreuses questions et m’a apporté de nombreux conseils qui m’ont été très utiles. De plus, la réalisation de cette étude n’aurait pu se faire sans l’appui financier du Groupe de recherche en archéométrie.

Je remercie également ma famille, pour son soutien, ses encouragements et son support inconditionnel depuis le début de cette démarche. Merci d’avoir cru en moi et de m’avoir donné la force de continuer. À Jules et Édouard, merci d’être une si belle source d’inspiration et de motivation.

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vii TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ...iii

REMERCIEMENTS ... v

TABLE DES MATIÈRES ... vii

LISTE DES FIGURES ... x

LISTE DES TABLEAUX... xii

LISTE DES PHOTOGRAPHIES ...xiii

INTRODUCTION ... 1 ÉTAT DE LA QUESTION ... 3 PROBLÉMATIQUE DE RECHERCHE ... 8 DOMAINE D’ÉTUDE ... 10 MÉTHODOLOGIE ... 13 PLAN DU MÉMOIRE ... 17

CHAPITRE 1 - PEUPLEMENT DE LA RÉGION DU DÉTROIT DE QUÉBEC: OCCUPATIONS PALÉOINDIENNE ET ARCHAÏQUE ANCIENNE ... 19

ET CONTEXTE PALÉOENVIRONNEMENTAL... 19

1.1 MOBILITÉ ET MODES DE SUBSISTANCE CHEZ LES CHASSEURS-CUEILLEURS DU PALÉOINDIEN, DANS LE NORD-EST AMÉRICAIN .. 21

1.2. APERÇU DES PREMIÈRES OCCUPATIONS HUMAINES ACTUELLEMENT CONNUES DANS LE NORD-EST AMÉRICAIN ... 23

1.2.1. Peuplement du nord-est des États-Unis ... 24

1.2.2. Peuplement de la région des Grands-Lacs et du sud de l’Ontario... 27

1.2.3. Peuplement des Maritimes et du Bas-Saint-Laurent ... 28

1.2.4. Occupation paléloindienne du Méganticois ... 30

(8)

viii

1.2.6. Premières occupations humaines à l’embouchure de la rivière Chaudière... 32

1.2.6.1. L’occupation paléoindienne ... 39

1.2.6.2. L’occupation archaïque ancienne ... 43

1.3. LE DÉTROIT DE QUÉBEC : DÉFINITION ET MISE EN CONTEXTE PALÉOENVIRONNEMENTALE... 47

1.3.1. Évolution du paysage : état des connaissances actuelles ... 49

CHAPITRE 2 - MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE ... 64

2.1 L’ANALYSE POLLINIQUE ... 66

2.1.1. Données d’analyse ... 68

2.1.2. Traitement des échantillons ... 73

2.1.2.1. Datation radiochronologiques ... 73

2.1.2.2. Traitement et préparation des échantillons... 76

2.1.3. Calcul des influx polliniques ... 77

2.2. CROISEMENT DES RÉSULTATS DE L’ANALYSE POLLINIQUE ET DES CONNAISSANCES ACTUELLES SUR L’OCCUPATION PRÉHISTORIQUE DU DÉTROIT DE QUÉBEC... 79

CHAPITRE 3 - RÉSULTATS ... 80

3.1 CONCENTRATION POLLINIQUE DES ÉCHANTILLONS ... 81

3.2 INFLUX POLLINIQUES ... 84

3.3 DIAGRAMME POLLINIQUE ET ZONATION ... 89

3.3.1 Zone NIC-I: ≥ 8 600 ans AA ... 89

3.3.2 Zone NIC-II : 8 600 ans AA- occupation euro-québécoise ... 89

3.3.3 Zone NIC-III : occupation euro-québécoise à aujourd’hui ... 92

3.4 TRANSFORMATIONS DU PAYSAGE ... 93

CHAPITRE 4 - INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS : ... 95

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ix 4.2 LA VÉGÉTATION COMME ÉLÉMENT CLÉ DANS LE PEUPLEMENT ET

L’OCCUPATION DU DÉTROIT DE QUÉBEC ... 100

4.2.1 Comparaisons ethnographiques ... 100

4.2.2 Utilisation d’espèces végétales par les populations autochtones basée sur les connaissances ethnographiques ... 106

4.3. IMPACTS DE L’ENVIRONNEMENT SUR L’EXPLOITATION DES ESPÈCES ANIMALES ET LES TECHNOLOGIES LITHIQUES ... 115

4.3.1 Impacts de l’environnement sur l’exploitation des espèces animales ... 116

4.3.2 Impacts de l’environnement sur les changements technologiques ... 121

CONCLUSION ... 123

BILIOGRAPHIE ... 129

ANNEXE I ... 145

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x LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Localisation des sites archéologiques préhistoriques connus situés à proximité de l’embouchure de la rivière Chaudière et de la tourbière Saint-Nicolas (source : modifié à partir de Google Earth 2010, ISAQ et de la Cartographie des sites et zones

d’intervention en archéologie du Québec (MCCCF). ... 2 Figure 2: Schéma du détroit de Québec, entre l’actuelle ville de Pont-Rouge, à l’ouest et l’aval de

l’île d’Orléans à l’est (source : OCCHIETTI et al., 2001, p. 25) ... 4 Figure 3 : Localisation des mers de Champlain et Goldthwait et de la rivière Chaudière (source :

modifiée à partir de DYKE et PREST, 1987, extrait de la carte 1703A) ... 5 Figure 4: Localisation de la tourbière Saint-Nicolas (source : modifiée à partir de GoogleEarth,

2010, en ligne) ... 15 Figure 5: Sites archéologiques datés du Paléoindien et de l’Archaïque ancien, localisés dans l’est

de l’Amérique du Nord (source : modifiée à partir de Google Earth 2011 et ELLIS et al, 1998 :152) ... 23 Figure 6: Pointes planoennes (source : MCCCF, Patrimoine : Peuplement amérindien, en ligne.)

... 41 Figure 7: Extension des mers postglaciaires (source : FILION et al., 2009 : 13) ... 48 Figure 8: Localisation de l’Inlandsis laurentidien vers 12 000 ans AA (source : modifiée à partir

de DYKE et al., 2003) ... 52 Figure 9: Localisation de l’Inlandsis laurentidien vers 11 000 ans AA (source : modifiée à partir

de DYKE et al., 2003) ... 53 Figure 10: Localisation de l’Inlandsis laurentidien vers 10 000 ans AA (source : modifiée à partir

de DYKE et al., 2003) ... 55 Figure 11: Localisation de l’Inlandsis laurentidien vers 9 000 ans AA (source : modifiée à partir

de DYKE et al., 2003) ... 56 Figure 12: Tourbière Saint-Nicolas et transects de repérage où des mesures d’épaisseur de tourbe

furent effectuées (source : Google Earth 2010, en ligne) ... 70 Figure 13 : Modèle âge-profondeur de l’accumulation de la tourbe, tourbière de Saint-Nicolas .. 75 Figure 14: Diagramme pollinique basé sur l’analyse des échantillons prélevés à la tourbière

Saint-Nicolas ... 83 Figure 15 : Taux d’accumulation pollinique (influx : grains / cm2 / an) de la tourbière de

(11)

xi Figure 16 : Taux d’accumulation pollinique (influx : grains / cm2 / an) de la tourbière de

Saint-Nicolas, excluant Betula. ... 88 Figure 17 : Zones de végétation et domaines bioclimatiques du Québec (source : modifiée à partir

de MRNF, 2012) ... 102 Figure 18 : Les autochtones du Québec (source : Secrétariat aux affaires autochtones du Québec,

2012) ... 103 Figure 19 : Berges de la rivière Chaudière (environ 11 000 ans AA, 60 mètres A.N.M.) (source :

modifiée à partir de PINTAL, 2000) ... 146 Figure 20 : Berges de la rivière Chaudière (environ 10 000 ans AA, 50 mètres A.N.M.) (source :

modifiée à partir de PINTAL, 2000) ... 147 Figure 21 : Berges de la rivière Chaudière (environ 9 500 ans AA, 40 mètres A.N.M.) (source :

modifiée à partir de PINTAL, 2000) ... 148 Figure 22 : Berges de la rivière Chaudière (environ 9 000 ans AA, 30 mètres A.N.M.) (source :

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xii LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1: Sites archéologiques paléoindiens du nord-est américain et datations au 14C associées

... 24 Tableau 2: Sites archéologiques paléoindiens de la région des Grands-Lacs retenus et datations

associées ... 27 Tableau 3: Sites archéologiques paléoindiens et archaïques anciens des Maritimes et du

Bas-Saint-Laurent retenus, et datations associées ... 28 Tableau 4: Sites archéologiques préhistoriques actuellement connus, à l’embouchure de la rivière

Chaudière ... 34 Tableau 5: Échantillons de tourbe prélevés à la tourbière de Saint-Nicolas : identification et

profondeur ... 72 Tableau 6 : Datations des échantillons prélevés à la tourbière Saint-Nicolas obtenues par SMA . 75 Tableau 7 : Calcul de la concentration pollinique par espèce ... 78 Tableau 8 : Formule du calcul de l’influx pollinique ... 78 Tableau 9: Concentration pollinique (grains/cm3) des échantillons analysés, à la tourbière

Saint-Nicolas ... 82 Tableau 10: Taux d’accumulation de tourbe, tourbière de Saint-Nicolas ... 85 Tableau 11: Résultats du calcul de l’influx pollinique ... 86 Tableau 12: Comparaison des résultats de l’analyse pollinique de la tourbière de Saint-Nicolas, de Saint-Augustin-de-Desmaures, de la sapinière de Saint-Augustin-de-Desmaures, de la tourbière de Saint-Flavien-de-Lotbinière et de la tourbière de la Base de Plein-air de Sainte-Foy (BHIRY 2003; FILION, LAVOIE et QUERREC, 2009) ... 99 Tableau 13 : Utilisations de diverses espèces végétales par les populations autochtones (source :

MARLES et al., 2000). ... 107 Tableau 14: Corrélations entre les transformations culturelles, environnementales, de

l’exploitation des ressources et des technologies lithiques (sources : MCCCF, ISAQ; MCCCF, Patrimoine : Peuplement amérindien, en ligne)... 118

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xiii LISTE DES PHOTOGRAPHIES

Photographie 1: Tourbière Saint-Nicolas (source : Isabelle Bêty, 26 juin 2008)... 69 Photographie 2: Échantillon de la base de la tourbière : tourbe et argile (section grise, à droite)

(source : Isabelle Bêty, 26 juin 2008) ... 71 Photographie 3: Emballage des échantillons (source : Isabelle Bêty, 26 juin 2008)... 72

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1 INTRODUCTION

L’occupation amérindienne ancienne de la région de Québec est un épisode encore mal connu de la préhistoire du Québec. Bien que de nombreux sites archéologiques connus de même que plusieurs études apportent de l’information sur ces premières occupations du territoire, beaucoup de travail reste à accomplir afin de pouvoir comprendre ces premières formes d’occupation anthropique, ainsi que leur transformation à travers le temps. La période de contact entre Amérindiens et Européens, de même que la période historique qui s’en suit sont, dans leur ensemble, assez bien documentées, les sources historiques écrites et iconographiques venant compléter les données obtenues par la recherche archéologique. Cependant, lorsqu’on se reporte à la période préhistorique, l’absence de documents écrits contemporains à cette occupation rend plus complexe la compréhension de celle-ci, ce qui est particulièrement le cas pour les plus anciennes occupations humaines du territoire de la région de Québec. Dans le cadre de cette étude, les premières attestations d’occupation, situées à l’embouchure de la rivière Chaudière (Figure 1), sont datées approximativement de 9 500 ans Avant Aujourd’hui (AA), ce qui les situe à l’intérieur de la période paléoindienne, comprise entre 12 000 et 8 000 ans AA (PINTAL, 2003).

Cette présente recherche, intitulée «Contexte paléoenvironnemental du

peuplement de la région du détroit de Québec, au cours des périodes paléoindienne et archaïque ancienne», vise à mieux comprendre et à contextualiser le processus de

peuplement de la région de Québec et ce, au travers des données paléoenvironnementales, plus précisément du couvert végétal.

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2 Figure 1 : Localisation des sites archéologiques préhistoriques connus situés à proximité de l’embouchure de la rivière

Chaudière et de la tourbière Saint-Nicolas (source : modifié à partir de Google Earth 2010, ISAQ et de la Cartographie des sites et zones d’intervention en archéologie du Québec (MCCCF).

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3 ÉTAT DE LA QUESTION

La région du détroit de Québec fait référence au corridor situé le long du fleuve Saint-Laurent, entre l’Île d’Orléans à l’est et la ville de Pont-Rouge à l’ouest. Cet endroit constituait, autrefois, la jonction entre la mer de Champlain, à l’ouest, la mer de Goldthwait à l’est, et la rivière Chaudière (Figures 2 et 3). Cette région fut un territoire propice à l’occupation humaine ancienne suite au retrait du glacier continental en place lors de la dernière période glaciaire. Durant cette période, soit la période Holocène (10 000 ans AA à aujourd’hui), le retrait progressif du front glaciaire vers le nord fait place aux mers de Champlain et Goldthwait, laissant la région du détroit de Québec et du bassin de la rivière Chaudière largement submergée (BOURQUE, 2004) (Figure 2). La vallée du Saint-Laurent, à la hauteur de Québec, est alors ennoyée par les eaux de la mer de Champlain, desquelles émergent quelques îlots, dont la colline de Québec (AUGER, 2008 : 35).

Le climat étant généralement plus froid à cette époque qu’aujourd’hui, la végétation de même que la faune différaient de celles qu’on retrouve actuellement sur ce territoire. Néanmoins, l’abondance des ressources fauniques (phoque, baleine, morse, poissons et crustacés), telle que démontrée par les analyses ostéologiques des restes animaux trouvés sur les sites archéologiques (Ostéothèque, 1992 et 2005), donnait à ce territoire un attrait particulier pour l’homme à la recherche d’un habitat offrant des ressources capables de soutenir ses besoins alimentaires.

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4 Figure 2: Schéma du détroit de Québec, entre l’actuelle ville de Pont-Rouge, à l’ouest et l’aval de l’île d’Orléans à

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5 Figure 3 : Localisation des mers de Champlain et Goldthwait et de la rivière Chaudière (source : modifiée à partir de DYKE et PREST, 1987, extrait de la carte 1703A)

Les premiers témoins du peuplement humain dans la région de Québec ont été, en grande partie, mis au jour aux abords de la rivière Chaudière, qui constituait à ce moment un axe de circulation majeur entre le Maine et le fleuve Saint-Laurent (CHRÉTIEN, 2006). La nature de ces occupations et des modes de vie alors en cours demeure mal comprise. On sait cependant que celles-ci remontent jusqu’à la période paléoindienne, soit aux environs de 12 000 ans AA.

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6 De nombreuses fouilles archéologiques effectuées dans ce secteur au cours des dernières décennies ont permis d’en apprendre davantage sur les premières occupations humaines à l’embouchure de la Chaudière, en plus de mieux comprendre le processus de peuplement qui s’y est déroulé. On dénombre plusieurs sites archéologiques localisés dans le cadre spatio-temporel de la présente étude, soit les sites 10, 11, CeEt-12, CeEt-565, CeEt-622, CeEt-657, CeEt-658, CeEt-660, CeEt-661, CeEt-679, CeEt-680, CeEt-778, CeEt-799, CeEt-887, CeEt-888, CeEt-889, CeEt-891 et CeEu-13 (Section 1.1.6, tableau 4). Ceux-ci présentent une ou des occupation(s) humaine(s) datée(s) de la période préhistorique, paléoindienne (12 000 à 8 000 ans AA) et/ou archaïque ancienne (9 500 à 7 000 ans AA). De plus, des analyses zooarchéologiques effectuées sur ces sites permettent d’établir l’existence, au cours de ces périodes, d’une fosse marine située dans le détroit de Québec où l’on retrouvait de nombreuses espèces animales, principalement marines, comme le phoque, la baleine et le morse (OSTÉOTHÈQUE, 1992; 2005).

La fin de la dernière période glaciaire s’accompagne de changements climatiques et environnementaux majeurs (AUGER, 2008 : 59). Ceux-ci entraînèrent une transformation rapide des écosystèmes terrestres et des migrations animales, en plus d’engendrer des modifications importantes des terres et des plans d’eau situés en zones périglaciaires (AUGER, 2008 : 60). Les populations humaines en place ont eu à s’adapter à un environnement changeant. On observe d’ailleurs une corrélation entre les changements technologiques et climatiques à cette époque (NEWBY et al., 2005). La réorganisation des plantes et des animaux, suite aux changements climatiques, a entrainé une migration et une adaptation rapides des groupes paléoindiens, forcés de s’adapter et de développer de nouvelles stratégies, en réponse à ces changements (NEWBY et al., 2005). Dans ce contexte, l’environnement marin offrait une stabilité saisonnière de même qu’un apport alimentaire plus régulier pour les premiers groupes qui s’établirent dans la région. Ces éléments ont fait du détroit de Québec, alors riche en ressources marines, un lieu propice à l’occupation humaine (PINTAL, 2009).

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7 Le contexte paléoenvironnemental et plus particulièrement la paléovégétation, a sans doute été un élément important dans le peuplement du détroit de Québec. La nature du couvert végétal, la présence ou l’absence de certaines espèces, la représentation proportionnelle d’espèces technologiquement et économiquement utiles sont autant de questions dont les réponses permettraient de mieux comprendre le processus de peuplement. L’établissement humain dans cette région aurait-il été influencé par son contexte paléoenvironnemental?

À l’heure actuelle, quelques études environnementales portant sur ce contexte spatio-temporel ont été effectuées. L’une d’elles, produite par Pierre Richard en 1977, a permis de dresser un portrait général de l’histoire de la végétation postglaciaire de la région de Québec (RICHARD, 1977). Cette étude présente un portrait régionalisé de la végétation présente lors du peuplement du Québec, mais couvre un territoire trop vaste pour apporter des données précises et spécifiques au détroit de Québec. Des études plus récentes se sont davantage intéressées à la reconstitution d’environnements à une échelle plus locale et couvrent certains secteurs limitrophes au détroit de Québec (BHIRY, 2003; FILION et al., 2009).

Les connaissances sur le peuplement du détroit de Québec sont donc encore préliminaires. Bien qu’il soit possible d’en faire un portrait général, plusieurs éléments sont encore manquants. De nombreuses questions restent ouvertes, à savoir comment s’est déroulé le processus d’appropriation du territoire? D’où étaient originaires ces premiers chasseurs ayant occupé le détroit de Québec? Dans quel contexte s’est déroulé ce peuplement? Les recherches dans ce domaine d’étude semblent n’en être qu’à leurs débuts. La présente étude visera à améliorer la compréhension du contexte paléoenvironnemental de peuplement du détroit de Québec, à travers une description du couvert végétal régional.

(21)

8 PROBLÉMATIQUE DE RECHERCHE

Tel que mentionné précédemment, certaines études environnementales ont été entreprises au cours des dernières décennies au Québec méridional. Cependant, ces travaux ayant été effectués dans le cadre d’études axées sur des éléments et des problématiques relevant du domaine de la géographie, elles ne se sont pas attardées à la question de l’interrelation entre les populations humaines et leur environnement. En ce sens, on obtient un portrait paléovégétal généralisé, entre autres pour la période comprise entre 12 000 et 8 000 ans AA.

Du point de vue géologique, les périodes paléoindienne et archaïque ne représentent qu’un court instant dans l’histoire de la région de Québec. Cependant, comme notre questionnement se rattache à la compréhension d’un phénomène humain ciblé, soit le peuplement du détroit de Québec lors des périodes paléoindienne et archaïque ancienne, il devient essentiel de comprendre les spécificités du couvert végétal du détroit de Québec pendant ces périodes. Pour ce faire, des analyses plus précises et plus spécifiques s’avèrent essentielles.

Dans le cadre de la présente étude, le questionnement portera davantage sur l’interprétation du contexte végétal et environnemental qui prévalait lors du peuplement du détroit de Québec, afin d’identifier les éléments qui auraient pu s’avérer déterminants pour l’établissement des premiers peuples dans cette région. La question de recherche qui oriente ce travail est donc la suivante : Dans quel contexte paléoenvironnemental s’est déroulé le peuplement de la région du détroit de Québec, au cours des périodes paléoindienne et archaïque ancienne? Le détroit de Québec, tel que mis en évidence dans la question de recherche, fait référence ici à la région précise de l’embouchure de la rivière Chaudière (Figures 1 et 2).

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9 Cette question comporte deux aspects. Tout d’abord, elle tente de connaître le contexte environnemental ainsi que ses particularités régionales, à l’intérieur desquelles s’est déroulé le peuplement de la région du détroit. Les données actuelles portant sur l’évolution géographique à une échelle spatiale régionale étant déjà existantes, celles-ci permettent de connaître les grandes étapes de transformation du paysage. On peut donc s’attendre à observer une migration graduelle de la végétation, du sud vers le nord, en réponse à un changement de température, puisque la période d’étude est associée au réchauffement climatique ayant suivi la période glaciaire (80 000 à 10 000 ans AA). Cette migration se définit généralement par une transformation du paysage d’abord caractérisée par une présence d’espèces arbustives, puis de conifères et de feuillus (BOURQUE, 2004), également appelée l’Holocene suite par John W. Williams (toundra, taïga ou forêt de conifères, forêt mixte, forêt de feuillus tempérée) (WILLIAMS et al., 2004 : 321). La présente recherche vise cependant à détailler avec précision ces changements à une échelle spatiale locale et à les mettre en parallèle avec les différentes périodes d’occupation humaine ancienne.

Un second aspect sous-entendu par la question de recherche introduit la problématique à savoir si la végétation présente dans cette région aurait agi comme l’un des éléments clés ayant permis et peut-être même entraîné ce peuplement. En ce sens, il est possible d’avancer l’hypothèse que l’environnement végétal fut un élément important dans le peuplement de la région et ce, en tant qu’élément initiateur. On envisage ici la possibilité que la présence de certaines espèces plus clémentes ou possédant une utilité particulière à l’homme, d’un point de vue économique ou technologique, aurait joué un rôle dans la décision ayant mené à l’établissement de populations dans cette région. Si les espèces animales présentes dans le détroit de Québec ont pu avoir une influence sur l’établissement d’une saisonnalité chez les habitants ainsi que sur le mode d’occupation du territoire, il pourrait en être de même pour les espèces végétales.

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10 DOMAINE D’ÉTUDE

La problématique de cette recherche s’inscrit à l’intérieur du domaine de l’archéologie environnementale, qui a comme objet d’étude principal les liens entre l’environnement, ou paléoenvironnement, et l’homme (BRANCH et al., 2005 : 67). Ce domaine d’étude propose une étroite collaboration de l’archéologie avec les sciences naturelles, plus particulièrement les sciences de la Terre et la biologie (WILKINSON et STEVENS, 2003 : 14). Evans (1978) définie l’objet d’étude environnemental comme étant: « every conceivable factor of man’s surroundings, from the earth’s magnetic field

to the smallest virus, which might affect his mode of life or to which he might adapt ».

L’étude de l’homme à travers celle de la végétation et de la faune vivant en association avec les peuples du passé, permet de comprendre la façon dont celui-ci interagissait avec ces organismes vivants qui l’entouraient (WILKINSON et STEVENS, 2003 : 15). De plus, l’étude des données environnementales peut permettre la reconstruction des paysages dans lesquels ces peuples ont vécu et qu’ils ont créés (WILKINSON et STEVENS, 2003 : 15). L’apport des sciences naturelles au domaine de l’archéologie permet donc de comprendre non seulement l’homme et les sociétés du passé, mais aussi les différentes interactions qui pouvaient lier ceux-ci au monde vivant ainsi qu’au paysage à l’intérieur duquel ils évoluaient.

L’archéologie environnementale permet d’étudier les liens entre l’homme, sa diète, son économie, sa vie quotidienne, sur ses échanges et autres éléments relatifs aux sociétés du passé (BRANCH, 2005 : 67). Cette spécialité de l’archéologie environnementale se nomme paléoéconomie et permet de percevoir le paysage en termes de ressources disponibles et/ou de ressources économiques. On peut ainsi tenter de comprendre le rôle joué par l’environnement à l’intérieur des transformations sociales et économiques.

L’archéologie environnementale peut aussi s’insérer dans le courant post-processuelle. Dans cette perspective, elle tente davantage de comprendre le paysage

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11 comme l’expression par l’homme de sa façon de penser et d’agir sur le monde (RENFREW et BAHN, 2005 : 158). Il s’agit de percevoir le paysage, non pas comme une simple scène où se déroule des rapports humains, mais plutôt comme étant constitué par les significations et les actions sociales des individus qui l’habitent (MOEHLECKE, 2006 : 373).

Dans le cadre de ce mémoire, l’attention sera davantage portée sur l’analyse et la reconstitution de l’environnement en termes de contexte environnemental et de ressources disponibles, c’est-à-dire vers l’étude paléoenvironnementale, plutôt que vers une étude paléoéconomique. Une fois le portrait paléoenvironnemental local et son évolution à travers le temps établis, il pourrait être envisagé d’entreprendre des recherches portant sur l’utilisation économique de l’environnement dont firent usage les sociétés passées. En ce sens, la présente étude permettrait d’ouvrir des portes vers de nouveaux sujets de recherche ainsi que vers une meilleure compréhension du peuplement du détroit de Québec et de son occupation ancienne.

L’archéologie environnementale passe par l’étude de différentes données, par exemple les restes botaniques, zoologiques ou encore entomologiques. La technique la mieux adaptée et la plus efficace afin de dresser le portrait de l’histoire postglaciaire de la végétation est l’analyse des grains de pollen fossiles, soit l’analyse pollinique, également appelée palynologique, autant pour la qualité et l’utilité des données obtenues que pour la quantité des travaux ayant été effectués à ce jour dans ce domaine (WILKINSON et STEVENS, 2003 : 83). L’étude des grains de pollen a été retenue ici puisque ceux-ci constituent de bons indicateurs de la composition végétale d’un secteur en plus de permettre de percevoir l’évolution de celle-ci. Elle fournit entre autres des données valables sur la structure de la végétation, sur la migration des plantes, sur les changements climatiques, en plus de renseigner sur les modifications anthropiques de la végétation (BRANCH, 2005).

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12 L’analyse pollinique constitue davantage une étude biologique de la flore et ne permet pas à elle seule de répondre à la question de départ de ce projet de mémoire. Afin de permettre l’intégration de ces données à une démarche archéologique et ainsi comprendre le contexte humain, il faut donc les rattacher à un autre domaine, soit celui de l’archéologie environnementale, qui permet d’étudier non seulement l’environnement, mais aussi ses interrelations avec l’homme.

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13 MÉTHODOLOGIE

Dans l’état actuel des recherches portant sur les périodes paléoindienne et archaïque ancienne, bien qu’il existe certaines études s’intéressant au contexte environnemental de la région de Québec à cette époque, peu se sont intéressées au sujet du point de vue de l’archéologie environnementale. Jusqu’à ce jour, les travaux se sont principalement attardés à l’un ou l’autre des sujets, à savoir le contexte paléoenvironnemental ou encore l’occupation anthropique des périodes paléoindienne et archaïque ancienne à travers des assemblages d’artéfacts et de vestiges. L’originalité de ce mémoire réside en partie dans l’intérêt qui sera porté tant au contexte environnemental qu’au contexte humain de ces périodes, en tentant d’établir des liens de causalité entre ces deux éléments.

L’analyse des grains de pollen fossiles permettra de dresser un portrait détaillé de la végétation au cours des périodes visées par l’étude et ce, à l’aide d’un échantillon représentatif et d’analyses statistiques. Les données obtenues pourront par la suite être interprétées en les comparant avec les connaissances archéologiques et environnementales actuelles portant sur le sujet et permettront d’aller au-delà de la description et donc de viser l’explication.

Il faut savoir que les grains de pollen sont produits par les plantes à fleurs et à graines (soit les angiospermes et les gymnospermes). Ces grains peuvent se conserver durant plusieurs milliers d’années, mais pour cela, ils doivent être déposés dans un milieu favorable à leur conservation. Pour assurer la bonne conservation de l’exine, le pollen doit être, en général, déposé en milieu anaérobique, là où l’oxygène est absent (WILKINSON et STEVENS, 2003 : 83). Un milieu saturé d’eau, comme une tourbière, peut s’avérer être un bon endroit de conservation où le maintien d’un niveau élevé de la nappe phréatique ne favorise pas l’oxygénation. Il en résulte une accumulation de tourbe où les grains de pollen peuvent être conservés. Les tourbières non perturbées par les

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14 activités humaines assurent une conservation de la stratigraphie et donc de la chronologie du dépôt des pollens.

La méthodologie mise en pratique lors du prélèvement, du traitement et de l’analyse des échantillons sera reprise en détails au deuxième chapitre de cet ouvrage. Les éléments suivants permettent cependant de situer brièvement cette recherche dans sa démarche scientifique. Pour la présente recherche, la tourbière de Saint-Nicolas (Figure 4) localisée à proximité du secteur d’étude, soit à l’intérieur d’un rayon de 6,5 km du bassin de la rivière Chaudière, a été retenue. Les dépôts tourbeux observés sur le site de la tourbière de Saint-Nicolas sont situés directement au-dessus du dépôt argileux laissé en place par la mer de Champlain suite au retrait de l’Inlandsis laurentidien. L’accumulation des matières organiques végétales dans cette dépression s’est fait en continu depuis le retrait de la mer jusqu’à aujourd’hui.

Afin de s’assurer que l’échantillon recueilli et analysé permette de couvrir la période référant à la problématique de recherche, une demande de datation par spectrométrie de masse par accélérateur (SMA) a été faite au Laboratoire de radiochronologie du Centre d’études nordiques (CEN) de l’Université Laval afin d’obtenir l’âge de cette tourbière. L’objectif de cette démarche était de s’assurer que les dépôts qui composent la tourbière sont contemporains à l’occupation paléoindienne et archaïque ancienne du secteur. La datation de la matière organique au contact organo-minéral (à la limite inférieure de la tourbière, soit 195 cm de profondeur), est de 9 605 ans AA étal. (14C 8650 ± 25 ans AA) (ULA-702, UCIAMS-52148). Cet âge confirme que les échantillons recueillis permettent l’étude de la problématique de recherche.

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15 Figure 4: Localisation de la tourbière Saint-Nicolas (source : modifiée à partir de

GoogleEarth, 2010, en ligne)

Les échantillons de tourbe sont prélevés sur le terrain à l’aide d’une sonde russe, ils sont transportés en laboratoire et conservés au frais, afin d’assurer le maintien de leur état de conservation. Par la suite, chacun des échantillons est traité chimiquement afin d’isoler les grains de pollen de la matrice végétale et minérale puis, observé sous microscope. Les données obtenues suite à l’identification de la composition pollinique des échantillons sont par la suite présentées à l’intérieur d’un diagramme pollinique. Ce dernier permet de visualiser les résultats obtenus, pour ensuite permettre l’interprétation des données, la création d’un portrait de la paléovégétation et permettre les interprétations subséquentes.

Le portrait de la paléovégétation fourni par l’interprétation des données obtenues par l’analyse pollinique est par la suite mis en comparaison avec les données archéologiques portant sur l’occupation humaine ancienne du détroit de Québec à une

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16 période contemporaine. Ce croisement des données permet d’apporter des réponses à la problématique de départ, à savoir dans quel contexte paléoenvironnemental s’est déroulé le peuplement de la région du détroit de Québec, au cours des périodes paléoindienne et archaïque ancienne.

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17 PLAN DU MÉMOIRE

Afin de présenter les résultats de cette recherche de façon cohérente, le premier chapitre est consacré à la mise en contexte du cadre spatio-temporel de la problématique. Tout d’abord, la première section du chapitre 1 est consacrée à la compréhension de la mobilité et des modes de subsistances chez les chasseurs-cueilleurs paléoindiens du détroit de Québec, afin d’être en mesure de contextualiser ces pratiques, leurs modifications ou adaptations durant les périodes à l’étude et ce, parallèlement aux changements environnementaux en cours durant ces mêmes périodes.

Par la suite, un portrait général du peuplement initial des régions limitrophes au détroit de Québec permet de documenter les origines de l’occupation de celui-ci. Pour ce faire, les régions situées à l’est, à l’ouest ainsi qu’au sud de Québec sont prises en compte. Ces régions, libérées du glacier continental avant la région de Québec, pourraient constituer le point d’origine des groupes paléoindiens s’étant établis dans le détroit.

Comme cette recherche vise ultimement à comprendre l’occupation humaine du détroit de Québec aux périodes paléoindienne et archaïque ancienne, il s’avère essentiel de faire un rappel des connaissances existantes sur le sujet. Pour cela, un bilan des études archéologiques portant sur le sujet, des différents travaux en archéologie et de leurs résultats est présenté par période chronologique et, subséquemment, sont exposées les connaissances actuelles relatives aux transformations de la paléogéographie et du climat.

Le second chapitre couvre la méthodologie de recherche appliquée au cours de cette étude. Les différentes étapes suivies ainsi que les arguments ayant mené aux choix méthodologiques y sont décrits et discutés. Ce chapitre couvre l’ensemble des démarches scientifiques entreprises, du choix de la méthode (l’analyse pollinique) jusqu’à la production et la présentation finale de résultats.

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18 Ensuite, le chapitre portant sur les résultats permet de présenter les données obtenues suite à la mise en application de la méthodologie de recherche. On y retrouve la description et l’interprétation du diagramme pollinique, l’indentification des espèces composant le couvert végétal, la description des transformations du couvert végétal en différentes périodes, ainsi qu’une image générale des transformations du paysage.

Dans le quatrième chapitre, intitulé : Contexte paléoenvironnemental du détroit de

Québec aux périodes paléoindienne et archaïque ancien, on tente d’apporter réponse à la

problématique de départ en venant confronter les résultats obtenus suite aux analyses polliniques et les connaissances déjà acquises sur l’occupation humaine ancienne du secteur en plus de celles portant sur les contextes environnementaux des régions voisines, présentées au premier chapitre. Ce dernier chapitre constitue l’argumentation ainsi que la discussion suivant le questionnement de départ pour lequel le projet de recherche fut entrepris. Au terme de ce chapitre, la conclusion de l’analyse permet d’apporter une réponse à la question de recherche ainsi que de nouvelles connaissances, dans le but d’améliorer notre compréhension des premières occupations humaines de la région de Québec.

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19 CHAPITRE 1 - PEUPLEMENT DE LA RÉGION DU DÉTROIT DE QUÉBEC:

OCCUPATIONS PALÉOINDIENNE ET ARCHAÏQUE ANCIENNE ET CONTEXTE PALÉOENVIRONNEMENTAL

La recherche portant sur les premières occupations humaines au Québec a beaucoup évolué au cours des 25 dernières années. En 1985, aucune donnée archéologique ne démontrait avec certitude l’occupation amérindienne associée à la période paléoindienne, datée entre 12 000 ans et 8 000 ans AA, sur le territoire de la province de Québec. La découverte au cours des dernières décennies de nombreux sites archéologiques, principalement à l’embouchure de la rivière Chaudière ainsi que dans la région de Mégantic, a permis d’apporter de nombreuses connaissances relativement à cette occupation. Il est maintenant possible de démontrer l’existence d’une occupation humaine de ce territoire dès la période paléoindienne ancienne, datée entre 12 000 ans et 10 000 ans AA (PINTAL, 2002 : 43). Cette occupation est attestée par la présence d’une préforme d’outil lithique retrouvée sur le site CeEt-657, à l’embouchure de la rivière Chaudière. Cet outil, caractérisé par une cannelure imposante et des retouches latérales largement espacées et non régulières, démontre un savoir technique de la taille de la pierre, associé au Paléoindien ancien (PINTAL, 2002 : 50-51).

Ce chapitre vise à mettre en lumière les modes de subsistance et de mobilité des chasseurs-cueilleurs, afin d’être en mesure de comprendre le mode de vie des Paléoindiens ainsi que les stratégies et modèles d’adaptation qu’ils ont pu mettre en place afin de se familiariser à un nouvel environnement, celui du détroit de Québec qui, à ce moment, se trouvait au centre de nombreux changements, tant climatiques qu’environnementaux.

Un bref aperçu des occupations paléoindiennes actuellement connues dans les territoires en périphérie du détroit de Québec sera présenté. Ce dernier permettra de comprendre l’origine des groupes ayant possiblement contribué au peuplement de la

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20 région de Québec, d’observer les similitudes et/ou les dissemblances entre ces populations et celles du Québec. Par la suite, un bilan des connaissances acquises à ce jour concernant l’occupation humaine ancienne du détroit de Québec sera fait, tout en replaçant ces données dans leur contexte environnemental. Cette deuxième étape franchie, il sera possible de situer l’importance de la présente recherche dans l’avancement des connaissances.

Dans une approche géographique, il est possible de documenter avec une certaine fidélité le cadre naturel général dans lequel a eu lieu cette occupation. La période glaciaire wisconsinienne a recouvert d’un inlandsis (glacier continental) une grande partie du nord de l’Amérique. Durant cette période, qui s’étira de 80 000 à 10 000 ans AA, la vallée du St-Laurent se trouvait sous une immense couche de glace pouvant atteindre plusieurs centaines de mètres d’épaisseur (BOURQUE, 2004). Les Basses-Terres du Saint-Laurent seront recouvertes durant l’intervalle compris entre 60 000 et 12 000 ans AA (AUGER, 2008 : 35). Le territoire à l’étude n’était ainsi pas propice à l’occupation humaine, du moins jusqu’au retrait du glacier qui s’amorça vers 11 500 ans AA. Plusieurs études ont documenté cette période qui suivit le retrait du glacier, aussi appelée postglaciaire, notamment dans le domaine de la paléogéographie et de la paléoécologie. Un bref retour sur ces études permettra de mettre en contexte l’occupation primaire du détroit de Québec, en la repositionnant dans son contexte géographique.

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21 1.1 MOBILITÉ ET MODES DE SUBSISTANCE CHEZ LES

CHASSEURS-CUEILLEURS DU PALÉOINDIEN, DANS LE NORD-EST AMÉRICAIN Les recherches actuelles ont démontré différents modèles de variation dans les modes de subsistance, les technologies, l’utilisation de l’environnement et l’organisation sociale au travers des groupes chasseurs-cueilleurs documentés ethnographiquement (PANTER-BRICK et al., 2001 : 101). D’après ces recherches, l’environnement jouerait un rôle direct dans la variation de ces modèles (PANTER-BRICK et al., 2001 : 101).

Les chasseurs-cueilleurs du Paléoindien ont eu à s’adapter, non seulement à des environnements nouvellement dégagés des glaces, mais également à des environnements en plein changement et peu cléments (AUGER, 2008 : 60). Dans une région inconnue, localiser et se procurer des ressources animales est alors plus facile que de tenter l’exploitation des ressources végétales (KELLY et TODD, 1988 : 234). De plus, l’exploitation des ressources animales et la chasse aux grands mammifères offrent un meilleur rendement énergétique que la collecte de plantes (en termes de calories par exemple), ce qui est particulièrement vrai dans un environnement nordique, caractérisé par une végétation à faible production primaire (KELLY et TODD, 1988 : 233). L’exploitation des ressources végétales ne devait cependant pas être ignorée, mais plutôt reléguée à un second rôle, afin de compléter l’alimentation (KELLY et TODD, 1988 : 233).

En réponse aux changements climatiques et aux déplacements des espèces animales et végétales, les Paléoindiens ont eu à adapter leur mode de vie afin de survivre à ces périodes de stress alimentaire. La mobilité s’est avérée une technique d’adaptation efficace à ce monde en mouvement (KELLY et TODD, 1988 : 234). En ce sens, les Paléoindiens ont probablement fait un usage à court terme et saisonnier de leur environnement, se déplaçant fréquemment d’un endroit à l’autre au gré des saisons et des migrations. Sans nécessairement prendre le temps d’apprendre à bien connaître, de maîtriser et de se familiariser avec l’ensemble des particularités locales d’une région, ils

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22 ont plutôt exploité certains secteurs et ressources, non pas parce qu’ils étaient les meilleurs, mais simplement parce qu’ils leur étaient connus (KELLY et TODD, 1988 : 235). Ces groupes sont considérés comme nomades et évoluant dans de petits campements, à l’intérieur d’un contexte environnemental de toundra ou de toundra-forestière (DUMONT, 1989 : 8). Durant cette période, les conditions environnementales et la faune se modifiaient rapidement et on voit disparaître la mégafaune de l’Amérique du Nord (PINTAL, 2009 : 22). La clé de la survie des Paléoindiens dans l’environnement changeant de la fin de Pléistocène1 reposait probablement sur une connaissance généralisée des comportements animaux, plutôt qu’en une connaissance spécifique d’un lieu d’habitat et de toutes ses caractéristiques (KELLY et TODD, 1988 : 239).

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1.2. APERÇU DES PREMIÈRES OCCUPATIONS HUMAINES

ACTUELLEMENT CONNUES DANS LE NORD-EST AMÉRICAIN

Le retrait plus hâtif de l’inlandsis dans certaines régions situées au sud, à l’est et à l’ouest de Québec, a permis un peuplement de ces secteurs antérieurs à celui du détroit de Québec. Ces différentes occupations sont brièvement discutées ici, afin de pouvoir contextualiser le ou les lieux de provenance des migrations humaines à l’origine du peuplement de la région de Québec (Figure 5).

Figure 5: Sites archéologiques datés du Paléoindien et de l’Archaïque ancien, localisés dans l’est de l’Amérique du Nord (source : modifiée à partir de Google Earth 2011 et ELLIS et al, 1998 :152)

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24 1.2.1. Peuplement du nord-est des États-Unis

Le peuplement du nord-est des États-Unis peut être associé à la transition Pléistocène-Holocène et se situe entre 11 500 et 9 000 ans AA (ELLIS et al., 1998 :151 et 162). Plusieurs sites archéologiques de cette région proposent des datations au 14C allant dans ce sens (Tableau 1). Cette région doit également attendre le retrait de l’inlandsis avant d’être habitable par l’homme. Dans la perspective d’une migration des populations humaines du sud vers le nord, lors du réchauffement climatique suivant la période glaciaire, les peuples ayant occupé le nord-est des États-Unis pourraient être à l’origine du peuplement du Québec. Le tableau 1 présente les principaux sites archéologiques associés à cette période et qui démontrent certaines similitudes avec les occupations observées dans la région de Québec.

Tableau 1: Sites archéologiques paléoindiens du nord-est américain et datations au 14C associées

Site archéologique Datation 14C (années AA) Références

Vail, Maine 10 600 à 10 040 GRAMLY, 1982; HAYNES et al. 1984

Hedden, Maine 10 590 à 10 510 SPIESS et MOSHER, 1994; SPIESS et al., 1995

Bull Brook Site I et II,

Massachussetts 11 000 à 10 000 ans AA

BYERS, 1954; ELDRIDGE et VACCARO, 1952; GRIMES, 1979; GRIMES et al., 1984; JORDAN, 1960 Shawnee Minisink,

Pennsylvanie 10 750 à 10 590 HAYNES et al. 1984; McNETT, 1985 Templeton,

Connecticut 10 190 MOELLER, 1980

Whipple, New

Hampshire 11 600 à 10 250 CURRAN, 1984 et 1994

Hiscock, New York 11 250 à 10 220 LAUB, 1994; STEADMAN, 1988 Arc, New York 10 300 à 10 300 MULLER et CALKIN, 1988

Dans l’état du Massachussetts, on retrouve les sites de Bull Brook I et II qui furent mis au jour en 1956, dans une carrière de sable et de gravier de la ville de Ipswich, située

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25 à 7 km de la côte Atlantique (GRIMES et al., 1984 : 159). Ces sites voisins présentent des occupations similaires qui remontraient à la période paléoindienne, soit entre 11 000 et 10 000 ans AA (GRIMES et al., 1984 : 160). À cette époque, ce territoire était occupé par une forêt de transition, composée de conifères et de feuillus (GRIMES et al., 1984 : 160). Cette région boisée subissait alors d’importantes modifications, dues à une régression marine importante de l’ordre de 1,2 m/an qui influençait grandement la composition floristique et faunique de la zone côtière (GRIMES et al., 1984 : 160). Les occupants de ce territoire devaient donc être en mesure de faire face à un environnement changeant, en établissant par exemple des modes d’occupation du territoire basés sur une mobilité et une saisonnalité caractéristiques de l’exploitation d’espèces animales comme le caribou (CLIMATE CHANGE INSTITUTE, 2011 : en ligne). Le site de Bull Brook constitue l’un des exemples les plus probants en Amérique du Nord d’un regroupement à grande échelle de groupes paléoindiens, associé à une chasse communale du caribou (ROBINSON et al., 2009 : 442). Cette occupation contribue à démontrer l’existence d’une organisation sociale à grande échelle au Paléoindien, lors de rassemblements basés ici sur l’exploitation d’une ressource essentielle : le caribou (ROBINSON et al., 2009 : 442). L’assemblage lithique découvert sur ces sites, comprenant entre autres des pointes de projectile de type pointe à cannelure, confirme la période d’occupation paléoindienne.

Les sites de Bull Brook possèdent certaines similarités avec le site Whipple, localisé dans le New Hampshire, dont la présence de pointes de projectile de type flutes

point (GRIMES et al., 1984 : 168-169). Les datations 14C obtenues pour ce site situeraient son occupation entre 11 250 et 10 220 ans AA (CURRAN, 1984; CURRAN, 1994). Les analyses polliniques effectuées dans ce secteur démontrent la présence d’un couvert forestier lors de l’occupation du site (CURRAN, 1984 : 8). L’analyse de 49 fragments d’os mis au jour au site Whipple a démontré l’exploitation de caribous et de cerfs (GRIMES et al., 1984 : 169).

Dans l’état de New York, les sites archéologiques Hiscock et Arc démontrent une occupation datant du Paléoindien. Le site Hiscock, daté au 14C entre 11 250 et 10 220 ans

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26 AA, contenait des restes de mastodonte, de caribou, d’orignal et autres espèces de la mégafaune (ELLIS et al., 1998 : 158). Ces restes fauniques ont été retrouvés en association avec des outils de pierre taillée de type pointe à cannelure, suggérant clairement une occupation paléoindienne de la région dès le 11e millénaire AA (ELLIS et al., 1998 : 158). Le site d’Arc propose une occupation probablement contemporaine au site d’Hiscock, avec des datations au 14C de 10 300 ans AA. Ce dernier possède également des bifaces de type pointe à cannelure (ELLIS et al., 1998 : 158).

Le site Hedden, dans l’état du Maine, bien que n’ayant pas révélé la présence de pointes à cannelure, possède un assemblage également caractéristique du Paléoindien avec la présence d’outils unifaciales. Les datations au 14C obtenues pour ce site se situent entre 10 590 et 10 510 ans AA (ELLIS et al., 1998 : 158). Également dans le Maine, le site Black Stream se trouve près de la rivière Penobscot. Cette rivière constitue une voie d’accès pour la région de Québec, puisqu’elle permet de rejoindre le bassin versant de la rivière Chaudière (ELLIS et al., 1998 : 160-161). L’inventaire lithique retrouvé sur ce site atteste d’une occupation lors du Paléoindien.

Dans le Vermont, le site Reagen est localisé à environ 13 km au sud-est de la Baie Missisquoi et à seulement 9,5 km de la frontière sud du Québec (RITCHIE, 1953 : 249). Ce site fut fréquenté de façon intermittente par des groupes de chasseurs du Paléoindien.

Un peu plus au sud, d’autres sites archéologiques sont également rattachés à une occupation paléoindienne et associés à une exploitation de la mégafaune, tel le mastodonte (site 40WM31, Tennessee; Big Bone Lick, Kentucky et Kimmswick, Missouri). L’occupation de ces sites remontrait également au 11e millénaire AA (ELLIS et al., 1998).

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27 1.2.2. Peuplement de la région des Grands-Lacs et du sud de l’Ontario L’occupation humaine de la région des Grands-Lacs et du sud de l’Ontario est également antérieure à celle du Québec. Deux sites archéologiques ont ici été retenus afin de dresser un portrait synthèse de cette occupation, soit les sites Fisher et Udora (Tableau 2).

Tableau 2: Sites archéologiques paléoindiens de la région des Grands-Lacs retenus et datations associées

Site archéologique Datation relative (années AA) Références Fisher, Ontario 11 000 à 10 500 ELLIS et al., 1998

Udora, Ontario 11 300 à 10 500 STORCK et SPIESS, 1994

Les vestiges observés sur le site Fisher portent à croire en une occupation du sud des Grands-Lacs à partir de 11 000 - 10 500 ans AA. Au moment de cette occupation initiale, cette région devait être occupée par une végétation ouverte, dominée par des conifères (ELLIS et al., 1998 : 157).

Le site Udora, dans le centre-sud de l’Ontario présente une occupation humaine contemporaine à celle du site Fisher (ELLIS et al., 1998 : 157-158). La présence d’espèces animales telles que le renard arctique, le lièvre et le caribou (PREVEC, 1987), suggère un environnement de toundra ou encore de pessière ouverte à ce moment, c’est-à-dire entre 11 300 et 10 500 ans AA (STORCK et SPIESS, 1994 : 121). Les données paléobotaniques et entomologiques vont dans ce sens, proposant une végétation de type toundra arbustive et un climat comparable aux latitudes boréales actuelles (STORCK et SPIESS, 1994 : 133).

Le matériel recueilli sur ce site est caractéristique du Paléoindien, incluant des pointes de projectile de type pointe à cannelure (STORCK et SPIESS, 1994 : 122). La matière première utilisée dans la fabrication de ces outils provient d’une source

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28 géologique située à environ 100 km au nord-ouest du site, ce qui démontre en partie la mobilité des populations ayant occupé le site Udora (STORCK et SPIESS, 1994 : 122).

1.2.3. Peuplement des Maritimes et du Bas-Saint-Laurent

Les nouvelles données concernant le retrait du glacier de la péninsule gaspésienne et l’habitabilité du territoire portent maintenant vers l’hypothèse d’une occupation primaire de la région entre 10 000 et 9 000 ans AA (CHALIFOUX, 1999 : 75) (Tableau 3). Les terrasses situées entre 25 et 35 mètres d’altitude auraient émergé entre 9 500 et 9 000 ans AA, puis les premières phases d’afforestation auraient débuté entre 9 000 et 8 000 ans AA (CHALIFOUX, 1999 : 75).

Tableau 3: Sites archéologiques paléoindiens et archaïques anciens des Maritimes et du Bas-Saint-Laurent retenus, et datations associées

Site archéologique Datation 14C et relative

(années AA) Références

Debert, Nouvelle-Écosse 11 026 à 10 128 MacDONALD, 1968 La Martre, Gaspésie, Qc 10 000 à 9 000 ans CHALIFOUX, 1999 CjEg-3, Témiscouata, Qc 8 000 à 6 000 ans CHALIFOUX, BURKE et

CHAPDELAINE, 1998

De nombreux sites archéologiques rattachés à une culture paléoindienne récente ont été mis au jour dans la région de La Martre, sur la péninsule gaspésienne (CHALIFOUX, 1999 : 70). L’embouchure de la rivière La Martre est caractérisée par la présence de plusieurs terrasses, dont les altitudes varient entre 20 et 60 mètres au-dessus du niveau de la mer, résultat de dépôts deltaïques et glacio-marins (CHALIFOUX, 1999 : 71).

L’assemblage lithique trouvé sur les sites de La Martre est essentiellement constitué de matière première locale. Les outils trouvés sont caractéristiques d’une occupation paléoindienne (pointes de projectile avec enlèvements parallèles, pointes de projectile lancéolées, couteaux bifaciaux lancéolés et autres) (CHALIFOUX, 1999 : 71).

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29 L’absence de restes fauniques à La Martre limite la compréhension de cette occupation et des stratégies de subsistance alors mises en application (CHALIFOUX, 1999 : 77). La localisation de ces sites dans un environnement marin suggère cependant l’hypothèse d’une exploitation de poissons et de mammifères marins (CHALIFOUX, 1999 : 77). Plus à l’intérieur des terres, le caractère arctique de l’environnement végétal à la période Plano suggère une exploitation intensive du caribou lors de ses mouvements migratoires dans l’est du Québec (DUMAIS, 2000 :105).

Plus à l’ouest, dans la région du Témiscouata, très peu de preuves d’occupation paléoindienne et/ou archaïque ancienne ont été recueillies. Les premières véritables manifestations culturelles amérindiennes connues de la région sont postérieures à 8 000 ans AA. Les témoins culturels d’une occupation lors de l’Archaïque démontrent une influence des groupes situés au sud, notamment dans la région du Maine, comme le démontre la présence de matière première exogène originaire du Maine et des Maritimes. (CHALIFOUX et al., 1998 : 145).

La découverte de matériel archéologique à l’intérieur de dépôts deltaïques indique possiblement une occupation de la région du Témiscouata dans un contexte périglaciaire (CHALIFOUX et al., 1998 :34). Cependant, l’absence d’objet diagnostique ne permet pas de s’avancer davantage dans cette direction. Quant à la période de l’Archaïque, aucun site ne peut y être associé avec certitude. Cependant, une collecte de surface sur le site CjEg-3, situé sur une terrasse de 460 mètres au-dessus du niveau marin actuel, a permis de mettre au jour 34 outils lithiques et deux éclats dont certains possèdent des affinités stylistiques et morphologiques avec certains outils de sites du Paléoindien ancien et récent (CHALIFOUX et al., 1998 : 34 et 40).

Le site Debert représente la seule occupation paléoindienne attestée à ce jour en Nouvelle-Écosse. Situé à un endroit stratégique pour l’interception du caribou, alors présent dans cette région, le site Debert est caractérisé par une occupation de courte

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30 durée, probablement saisonnière, et revisité successivement par plusieurs générations. Près de 4 500 artéfacts ont été mis au jour sur ce site, dont plusieurs outils caractéristiques du Paléoindien (Nova Scotia Museum, 1996-2000, Debert Palaeo-Indian

Site. http://museum.gov.ns.ca/arch/sites/debert/debert.htm). Les pointes à cannelure retrouvées sur ce site témoignent d’une phase ancienne du Paléoindien (MacDONALD, 1968).

1.2.4. Occupation paléloindienne du Méganticois

Le Méganticois désigne un haut corridor transappalachien permettant le passage entre la rivière Kennebec au sud et les basses-terres du Saint-Laurent au Nord, à une altitude comprise entre 300 et 450 mètres (CLERMONT, 2001 : 9). Ce corridor, d’une longueur approximative de 100 kilomètres, relie entre autres la branche nord de la rivière Morte (Dead River) au Maine, à la vallée de la rivière Chaudière (CLERMONT, 2001 : 9). De plus, il s’agit du passage le moins élevé entre le bassin de la rivière Chaudière et celui de la rivière Kennebec au Maine (CHAPDELEINE, 2004 : 4). Cette section des Appalaches fut l’une des premières, au sud du Québec, à émerger de son couvert de glace entre 13 500 et 13 400 ans AA (LOEWEN et al., 2005 : 268). Le lac qui s’y forme alors est progressivement drainé par la rivière Chaudière, libérée des glaces vers 12 000 ans AA (CHAPDELAINE, 2004 : 5). Il se crée ainsi un corridor qui relie les bassins hydrographiques des rivières Kennebec et Penobscot au Maine, à celui de la rivière Chaudière, en passant par l’Estrie (CHAPDELAINE, 2004 : 4). Cette période fut cependant caractérisée par une instabilité du système hydrologique en place et par de grandes variations saisonnières (LOEWEN et al., 2005 : 285), mais la période suivante, soit entre 9 500 et 8 000 ans AA (10 750 à 8 800 ans étal.) se définie cependant comme relativement stable (LOEWEN et al., 2005 : 285).

L’occupation la plus ancienne identifiée dans le secteur du Méganticois remonte à plus de 12 000 ans AA. Sept objets, constituant les plus anciens indices de l’occupation humaine de ce territoire, furent mis au jour sur le site Cliche-Rancourt. Il s’agit de pointes à cannelure, distinctes par la technique de taille utilisée et dont l’origine se situerait dans

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31 l’Ouest américain. Des objets similaires ont été mis au jour sur les sites archéologiques du Maine, du New Hampshire, du Vermont, de l’Ontario et de la Nouvelle-Écosse précédemment mentionnés. L’emplacement de ce site, à la source de la rivière Chaudière, indique la trajectoire de passage de chasseurs nomades lors de la période paléoindienne, possiblement originaire du Maine, en direction des terres plus au nord, sur le territoire actuel du Québec. Ce mouvement de population était probablement entraîné par la recherche de ressources alimentaires, entre autres le caribou, qui pouvait y être intercepté lors de son passage migratoire vers le nord pendant l’été (CORBEIL et CHAPDELEINE, 2007 : 33-35). C’est donc sans doute à la poursuite du caribou que les chasseurs de la culture paléoindienne Clovis auraient pénétré dans le territoire québécois (BARIL, 2003 : en ligne).

L’occupation du site Cliche-Rancourt lors de la période paléoindienne et la proximité de l’axe de la rivière Chaudière viennent appuyer l’hypothèse voulant que cette rivière ait constitué une route migratoire du nord des États-Unis (Maine) vers le fleuve Saint-Laurent (détroit de Québec) (CHAPDELEINE, 2004 : 3).

1.2.5. Site CeEv-5, Saint-Augustin-de-Desmaures

Situé sur la rive nord du fleuve Saint-Laurent, à quelques kilomètres à l’ouest du détroit de Québec (Figures 2 et 5), le site CeEv-5 occupe un petit replat d’environ 75 mètres de diamètre entouré d’affleurements rocheux, sur une ancienne terrasse marine s’élevant à environ 100 mètres au-dessus du niveau de la mer (NMM) (PINTAL, 2003b : 7). L’environnement du secteur devait se rapprocher de celui de coteaux et collines, où le substrat rocheux affleure en maints endroits (PINTAL, 2003b : 7). La matrice pédologique identifiée sur le site et dans laquelle la majeure partie du matériel archéologique se trouvait, est constituée de sédiments littoraux, prélittoraux et d’exondation mis en place en eaux peu profondes, lors de la phase plénimarine et lors de l’exondation, témoignant de l’ancienneté du site (PINTAL, 2003b : 47).

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32 Des charbons de bois prélevés sur le site ont permis d’obtenir une datation radiocarbone de 8 890 ± 50 ans (PINTAL, 2003b : ii). De plus, la découverte d’une pointe de projectile en rhyolite, représentative de la période du Paléoindien récent (10 000 à 8 000 ans AA), permet de confirmer la date absolue obtenue, bien que de nombreux objets pédonculés, associés aux occupations archaïques anciennes et moyennes aient été également retrouvés (PINTAL, 2007b : 42; PINTAL, 2003b : 46). Vers 9 500 ans AA, la limite glaciaire ayant retraité à la hauteur du lac Saint-Jean, une végétation de pessière à cladines colonisait la région, rendant celle-ci clémente et favorable à l’habitation humain (PINTAL 2003b : 47). Cependant, cette terrasse marine n’a pu être facilement accessible qu’entre 10 000 et 9 000 ans AA, alors que le niveau de la mer de Champlain se situait entre 80 et 100 mètres (PINTAL, 2003b : 47).

Les analyses préliminaires des données archéologiques permettent d’associer l’occupation de ce site à des activités de travail de la pierre (PINTAL, 2007b : 39). On y retrouve de nombreuses ébauches, nucléi et percuteurs qui confirment l’importance de cette activité sur le site (PINTAL, 2003b : 45). Également, on y retrouve des traces d’activités artisanales de transformation du bois et de l’os (PINTAL, 2007b : 39). En effet, la présence d’outils tels que des grattoirs, racloirs et vastringues vient confirmer ces données. Ces objets en bois et en os peuvent suggérer la production d’autres outils ou de composantes techniques liés à leurs activités socio-économiques (PINTAL, 2007b : 39).

L’occupation humaine observée sur le site CeEv-5, à quelques kilomètres seulement de la rivière Chaudière, vient confirmer que la région de Québec était habitable et fut fréquentée lors de la période du Paléoindien récent et possiblement de l’Archaïque ancien (PINTAL, 2007b : 42).

1.2.6. Premières occupations humaines à l’embouchure de la rivière Chaudière

On avance l’hypothèse que les premiers groupes humains à avoir peuplé le détroit de Québec soient originaires du Vermont, du Maine et de l’Estrie (CHAPDELAINE,

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33 2004 : 3). La région du Méganticois, en Estrie, fut l’une des premières au Québec à être libérée de l’emprise des glaces, vers 13 000 ans AA. Cet axe aurait pu constituer un lieu de passage migratoire pour les populations humaines et animales. Le nombre important de sites archéologiques préhistoriques situés à l’embouchure de la rivière Chaudière confirme la présence de groupe dans ce passage migratoire, ce qui tend à appuyer cette hypothèse. La rivière Chaudière aurait peut-être constitué une voie de communication transappalachienne importante, reliant les états plus au sud à la vallée du Saint-Laurent et permettant l’exploration et éventuellement l’exploitation de ce nouveau territoire libéré des glaciers.

Le peu d’indice d’une présence amérindienne attribuée au Paléoindien ancien à Québec s’explique en partie par la présence d’un environnement naturel contraignant, caractérisé par une glaciation tardive, une immersion importante des basses terres par les mers postglaciaires, un climat rigoureux ainsi qu’un lent peuplement végétal (DUMAIS et ROUSSEAU, 2002 : 4). La question de l’habitabilité du territoire constitue un thème central pour la compréhension du peuplement du détroit de Québec (DUMAIS et ROUSSEAU, 2002 : 4). Avec l’établissement par endroits d’une toundra vers 10 500 ans AA, il est probable que la colonisation animale s’en soit suivie. La présence de troupeaux de caribous et d’autres espèces animales aurait fourni à ce milieu de type arctique, une capacité de support suffisante pour soutenir une population humaine (DUMAIS et ROUSSEAU, 1985 : 139). Le retrait graduel des mers et lacs postglaciaires, l’adoucissement progressif du climat et la capacité de support croissante de la région auront par la suite permis l’établissement de groupes anthropiques dans ce secteur.

On compte, à l’embouchure de la rivière Chaudière, près d’une vingtaine d’occupations préhistoriques (Tableau 4, Figure 1). Elles sont les témoins les plus anciens actuellement connus des premières occupations humaines du territoire (PINTAL, 2003c). Cette réalité vient appuyer l’hypothèse selon laquelle la rivière Chaudière aurait constitué une voie de communication importante, ayant permis la colonisation du détroit de Québec.

Figure

Figure 5: Sites archéologiques datés du Paléoindien et de l’Archaïque ancien, localisés dans  l’est de l’Amérique du Nord (source : modifiée à partir de Google Earth 2011 et ELLIS et  al, 1998 :152)
Tableau 1: Sites archéologiques paléoindiens du nord-est américain et datations au  14 C  associées
Tableau 2: Sites archéologiques paléoindiens de la région des Grands-Lacs retenus et  datations associées
Tableau 3: Sites archéologiques paléoindiens et archaïques anciens des Maritimes et du Bas- Bas-Saint-Laurent retenus, et datations associées
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