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Aspects compares des regimes juridiques de l'arbitrage au Quebec et en France : droit interne - droit international prive

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ASPECTS COMPARES DIS IIGIMIS JURIDIQUIS DB L'ARBITRAGE AU QUIBIC IT IN 'BANCE :

DROIT INTERNE - DROIT INTIRNATIONAL PRIVE

Par

Sabine Thuilleaux

Thèse présentée

à

la Faculté des Etudes

supérieures et de la Recherche pour

l'obtention du diplôme de Maîtrise en Droit.

INSTITUT DE DROIT COMPARE

UNIVERSITE MCGILL, MONTREAL

juillet 1990

c

Sabine Thuilleaux 1990

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REMERCIEMENTS

Cette thèse est dédiée

à

mes parents.

Je voudrais exprimer ma gratitude au Gouvernement du Canada

dont le support financier m'a permis d'effectuer cette Maîtrise

en droit

à

l'Institut de droit Comparé de l'Université McGill.

Mes remerciements vont également

à

mon directeur de thèse,

Armand de Mestral dont les conseils ont été très précieux

à

l'élaboration de cette thèse ainsi

qU'à

Dean Proctor pour son

soutien et sa patience.

(3)

RESUME

Avec l'adoption de la Loi moditiant le Code civil et le Code de procédure civile en matière d'arbitrage entrée en vigueur en 1986, le Québec se trouve doté d'un régime juridique moderne de l'arbitrage "conventionnel" interne ainsi que d'une série de dispositions pour faciliter l'exécution des sentences arbitrales rendues hors du Québec.

Cette thèse a pour objet d'effectuer une comparaison de certains aspects de ce nouveau régime de l'arbitrage avec celui du droit français lequel est éprouvé par une long\.e pratique et une abondante jurisprudence, tant dans le domaine de l'arbitrage interne qu'international. L'emphase sera mise sur la façon dont les tribunaux québécois ont jusqu'à présent appliqué la nouvelle Loi de 1986 sur l'arbitrage au regard de la jurisprudence française.

La première partie étant consacrée à l'arbitrage interne, nous tenterons de tirt-r toutes les conséquences du caractere hybride - mi-contractuel, mi-juridictionnel - de l'arbitrage dans l'étude de la convention d'arbitrage ainsi que dans celle de la procédure arbitrale, de la sentence et de l'exécution forcée de la sentence et les voies de recours.

certains problèmes caractéristiques posés par l'arbitrage international seront examinés afin de voir comment ils ont éte abordés en droit français la définltion de l'arbitrage international, la val idi té et le principe dl autonomie de la convention d'arbitrage, le choix du droit applicable a la procédure et au fond du lltige, enfin l'e~écution forcée et les voies de recours contre une sentence etrangère.

(4)

"

ABSTRACTS

In 1986, Quebec adopted the Act to amend the civil Code and the Code of Civil Procedure in respect of Arbitration and thereby established a new and modern regime for contractual arbitration. The new regime includes provisions to facilitate execution in Quebec of arbitral awards rendered outside the province.

This thesis dealu with certain aspects of the new regime, comparing it with the well-established French law of arbitration, which has abundant caselaw covering both domestic and international arbitration. Emphasis is placed on the manner in which Quebec courts have applied the new arbitration law in comparison with French jUdicial practice.

The first part of the thesis deals with domestic arbitration, focussing on contractual and jurisdictional issues. This is done through an examination of the arbitration agreement, the arbitration procedure, the award, as weIl as the execution of the award and remedies ta set it aside.

International arbitration is treated in the second part. The definition of international arbitration, the validity f,nd autonomy of the arnitration agreement, the choice of law relating to the procedure and the dispute itself are reviewed, as is the execution of foreign awards - that is, those rendered outside Quebec or rendered in Quebec but in the context of an international dispute.

(5)

TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS i

RESUME i i

ABSTRACT iii

INTRODUCTION 1

TITRE I. L'ARBITRAGE EN DROIT INTERNE QUEBECOIS ET FRANCAIS 14

CHAPITRE I

SECTION 1.

LA CONVENTION D'ARBITRAGE

LA CONVENTION D'ARBTT!~GE ET L'ASPEC~

CONTRACTUEL DE L'ARBITRhG~

1. DEFINITION DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE

1.1. Conception dualiste et unitaire de la convention

14

14

15

d'arbitrage 15

1.2. Conséquences de l'approche unitaire

du droit québécois 17

1.3. De quelques clauses ambigues 19

1.3.1. Les critères traditionnels en droit français 20 1.3.2. L'arrêt Sport Maska c. Zittrer

de la Cour suprême du Canada 22

2. CONDITIONS DE VALIDITE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE 28

2.1. Conditions tenant au droit commun des contrats

2.1.1. capacité et pouvoir de compromettre 2.1.2. Les règles du consentement

2.2. Spécificité de la convention d'arbitrage

28

28 31

32

2.2.1. L'autonomie de la convention d'arbitrage 3~

2.2.2. L'exigence d'une clause compromissoire parfaite

en droit québécois 35

2.2.3. Forme et contenu de la convention d'arbitrage 40

3. LE CHAMP D'APPLICATION DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE 43

3.1. Détermination des limites à l'arbitrabilité 44

(6)

p

3.3. La violation de l'ordre pUblic: le contrat illicite 53

3.4. Problèmes spécifiques au droit québécois 57

4. LES EFFETS DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE 59

4.1. Sur les parties 59

4.2. Sur les tiers 60

SECTION 2. LA CONVENTION D'ARBITRAGE ET

L'ASPECT JURIDICTIONNEL DE L'ARBITRAGE 66

1. LE PRINCIPE DE LA COMPETENCE DES ARBITRES 6t

1.1. L'investiture de l'arbitre dans son principe 66

1.2. L'étendue de l'investiture de l'arbitre 69

2. LA MESURE DE L'INCOMPETENCE DU JUGE ETATIQUE 74

2.1. ~rincipe du renvoi à l'arbitrage par les tribunaux saisis en violation d'une convention d'arbitrage 74

2.2. Moment du renvoi et critères

de renonciation implicite 76

2.3. Le contrôle operé par le iuqe avant le renvoi à

l'arbitrage ou lorsqu'il lui est demandé de statuer

sur la compétence de l'arbitre 79

2.4. Tempérament à l'incompétence du

_i

uge étatique 82

3. L'EFFECTIVITE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE ET LE CUMUL DI:S RECOURS EN RESPONSABILITE

CONTRACTUELLE ET DELICTUELLE 82

3.1. position du problème dans la jurisprudence québécoise 83

3.2. Position du problème en droit français 88

3.3. Conclusion et éléments de solution 89

3.3.1. Nécessité d'une interprétation large du champ d'application de la convention d'arbitrage 89 3.3.2. L'étendue de la compétence des arbitres 92

(7)

,

vii

CHAPITRE II LA PROCEDURE ARBITRALE ET LA SENTENCE

SECTION 1. CONSTITUTION DU TRIBUNAL ARBITRAL

1. LA QUALITE D'ARBITRE 2. LE PRINCIPE D'IMPARITE

3. LA CONSTITUTION DU TRIBUNAL ARBITRAL

4. LE CONTROLE EXERCE FAR LE JUGE AU MOMENT OU IL NOMME UN ARBITRE 96 96 96 96 97 100

4.1. Les motifs de refus de nomination en droit français 100

4.2. Silence du droit guébecois sur ce point 101

5. LA DUREE DE LA MISSION DES ARBITRES 102

SECTION 2. PRINCIPES DE LA PROCEDURE ARBITRALE 104

1. LIMITES A L'AUTONOMIE DE LA VOLONTE DES PARTIES

LES DISPOSITIONS IMPERATIVES DU C.p.e. et du C.e.~.-C 105

2. LE RESPECT DES PRINCIPES FONDAMENTAUX DE JUSTICE 106

3. LA COOPERATION DU JUGE ETATIQUE A L'INSTANCE ARBITRALE 108

SECTION 3. LA SENTENCE ARBITRALE 109

1. LA NATURE DE LA SENTENCE 109

2. LES CONDITIONS D'ELABORATION DE LA SENTENCE 110

2.1. Le principe du secret du délibéré 110

2.2. Le principû de la majorité 112

3. LE CONTENU DE LA SENTENCE ARBITRALE 113

3.1. La motivation de la sentence 114

3.2. La signature par tous les arbitres 115

(8)

4. LES EFFETS DE LA SENTENCE ARBITRALE

5. REVISION ET RECTIFICATION DE LA SENTENCE ARBITRALE

CHAPITRE II~ L'EXECUTION FORCEE DE LA SENTENCE ET LES VOIES DE RECOURS

SECTION 1. L'EXECUTION FORCEE DE I~ SENTENCE

1. L'ASPECT PROCEDURAL DE L'EXECUTION FORCEE

2. LE CONTROLE OPERE PAR LE JUGE DE L'HOMOLOGATION

SECTION 2. LES VOIES DE RECOURS CONTRE LA SENTENCE

1. LES DIFFERENTES VOIES DE RECOURS

2. LES MOTIFS D'ANNULATION DE LA SENTENCE

2.1. Contrariété de la sentence d l'ordre public

2.2. Irrégularité dans la nomination des arbitres ou dans la procedure arbitrale

2.3. Excès de compétence

2.4. Recours à l'évocation et l'ombre du "manifestement déraisonnable"

CONCLUSION

TITRE II - L'ARBITRAGE EN DROIT INTERNATIONAL PRIVE QUEBECOIS ET FRANCAIS

CHAPITRE l LA DEFINITION DE L'ARBITRAGE INTERNATIONAL 1. ORIGINE ET EVOLUTION DU CRITERE ECONOMIQUE

2. PROBLEMES SPFCIFIQUES D'APPLICATION DE CE CRITERE 3. RAPPORT DE CE CRITERE AVEC L'INTERNATIONALITE

JURIDIQUE D'UN CONTRAT

4. LA PRISE EN COMPTE DU LIEU DE L'ARBITRAGE

117 118 119 119 120 122 126 126 129 130 135 135 139 143 145 147 149 152 154 158

(9)

CHAPITRE II LA CONVENTION D'ARBITRAGE INTERNATIONAL

SECTION 1. L'AUTONOMIE DE LA CONVEN'J,'ION D'ARBITRAGE IN'!'ERNATIONAL

SECTION 2. CONDITIONS DE ~\LIDITE

1. LA CAPACITE DE~ PARTIES

2. VALIDITE AU FOND DE LA CONVE.~TION D ~ ARBITRAGE

2.1. La loi applicable au fond de la convention d'arbitrage

2.2. Le droit~plicable à l'arbitrabilité

3. FORME ET PREUVE DF LA CONVENTION D'ARBITRAGE

3.1. La loi applicable à la forme de la convention

159 159 162 163 164 164 167 168 d'arbitrage 169

3.2. Les exigences de forme de la convention d'arbitrage 172

CHAPITRE III REGLES APPLICABLES A LA PROCEDURE ET AU FOND DU LITIGE

1. LE CHOIX DES REGLES APPLICABLES A LA PROCEDURE

2. LES REGLES APPLICABLES AU FOWD DU LITIGE

2.1. Abandon de la méthode conflictua]iste

2.2. La nature du droit applicable a'l fond

CHAPITRE IV L'EXECUTION ET LES VOIES DE RECOURS CONTRE LES SENTENCES ETRANGERES

SECTION 1. L'EXECUTION DES SENTENCES E'rRANGERES

1. L' EXECi'TION D'UNE SENTENCE RENDUE HORS QUEBEC AVANT LA LOI DE 1986 SUR L'ARBITRAGE

2. PROCEDURE D'HOMOLOGATION EN DROIT NOUVEAU

3. LES RECOURS CONTR~ LA SENTENCE ETR~GERE

178 178 181 181 182 185 187 187 191 193

(10)

SECTION 2. LES MOTIFS D'OPPOSITION CONTRE UNE SENTENCE ARBITRALGE ETRANGERE

1. LA CONTRARIETE A L'ORDRE PUBLIC

195

196

1.1. L'art. 949 C.p.c. et l'ordre public international 197

1.2. L'arbitrabilité 200

1.3. La contrariéTé de la sentence à l'ordre public 202

2. LES AUTRES MOTIFS D'OPPOSITION

2.1. L'excès de compétence des arbitres

2.2. Irrégularité dans la constitution du tribunal

2.3. Sentence non encore obligatoire, annulée ou suspendue CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE JURISPRUDENCE

...

---~----204 204 205 206 210 214 225

(11)

Le Canada n'est plus un uNo man t s land,,1 en matière

d'arbitrage international suite aux réformes législatives qui ont été opérées depuis 1985 tant aux niveaux fédéral que provincial. Le point de départ est certainement l'adhésion du Canada a la Convention ùes Nations Unies pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères2 permettant ainsi une meilleure application des sentences ét-rangères sur le sol canad ien. 3 La

Convention de New York de 1958 a par la suite été entérinee dans leur droit par toutes les provinces canadiennes y compris les territoires.4 De même, la totalitéS des provinces et territoires en

. Expression util isée par E. C. Chiasson, "Canada: No Man' s Land No More" (1986) 3 J . of Int'l Arb. 67.

2 10 juin 1958, 330 U.N.T.S. 3 [ci-apres Convention de New

York de 1958J. Plus de 80 Etats y ont adhére dont la Chlne en 1987, l'Algérie en 1988 et l'Argentine en 1989. Ph. Fouchard, "Ou va l'arbitrage international ?" (1989) 34 R.D. McGill 436 a la p. 443.

3. Loi de mise en oeuvre de la Convention des Nations Unies p"Qur la reconna issance et l'exécution des sentences arbitra les étrangères, S.C. 1986, c. 21, sanctionnée le 17 juin 1986. Le Canada n'a pas adopté la réserve de réciproc';'te qui figure a l'article 1(3) de la Convention de New York de 1958, mais celle de commercialité, voir l'article 4(1), ibid. S.C. 1986, c. 21.

4. Albert~ : International Commercial Arbitratlon Act, S.A. 1986, c. 1-6.6. Colombie Britannique: International Commercial Arbitration Act, S.B.C. 1986. c. 14. Ile du Prince Edouard

International Commercial Arbitration Act, S.P.E.!. 1986, c. 14, entrée en vigueur le 1er septembre 1986. Manitoba, Loi sur l'Arbitrage Commercial International, S.M. 1986, c. 32, entrée en vigueur le 15 novembre 1986. Nouveau-Brunswick Internat iona 1_ Commercial Arbitration Act, S.1\J.B. 1986, c. 1-12.2, entrée en vigueur le 10 août 1986. Nouvelle-Ecosse: Internatioral Commercial Arbitration Act, S.N.S. 1986, c. 13, entrée en vigueur le 10 août 1986. ontario: Loi sur l'arbitrage commercial international, S.O. c. 30, er~trée en vigueur le 8 juin 1988. Qnébec: Loi modifiant le Code civil et le Code de procédure civile en matiere d'arbitrage, L.Q. 1986, c. 73, entrée en vigueur le Il novembre 1986. Saskatchewan: Enforcement of Fore.ign Arbitral Awards Act, S. S. 1986, <..:. E-9. Il, entree en vig'lcur le 10 août 1986 et Loi sur l'arbitrage commercial international, S.S. 1988, c.J-10.2, entrée en vigueur le 15 juin 1988. Territolres du Nord-Ouest International Commercial Arbitratlon Act, S.i~.W.T. 1986(1), c. 6. Au Territoire dn Yukon: Foreign Arbitral l.wards Act, S.Y. 1986, c.4, entré en viqueur le 10 aoüt 1986.

(12)

r

a profité pour élaborer des législations complètes sur l'arbitrage international basées sur la Loi-type sur l'arbitrage commercial international adoptée par la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International, le 21 juin 1985.6 Cependant, seules la Colombie Britannique et le Québec ont en plus modifié leur législation sur l'arbitrage interne.7 Le Parlement fédéral a également adopté une Loi concernant l'arbitrage commercia18 basée sur la Loi-type de la CNUDCI. Enfin, ont été ouverts à Vancouver en 19869, le Centre d'arbitrage commercial international ainsi qU'à

Québec en 1988, le Centre d' Arbi trage Commercial National et International du Québec.

La diversification et l'intensification des échanges commerciaux du Canada sur le plan mondia110 ont suscité depuis le début des années 80 l'intér€t accru des milieux d'affaires

5 L. Kos-Rabcewicz-Zubkowski, "International Commercial

Arbitration Laws in Canada: Recent Legislation (Ontario and

Sa5katch~wan)" (1988) J. of Int'l Arb. 165 à la p. 167. Voir sur

le processus d'élaboration des législations provinciales: J. D. Gregory, "International Commercial Arbitration: Comments on Professor Graham's Paper" (1987) 13 Cano Bus. L.J. 42 à la p. 44 et M. Lalonde, "The New Environment for Commercial Arbitration in Canada" (1987) 1 Rev. of Int'l Bus. Law 31 à la p. 39.

6. Rapport de Ja Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI) sur les travaux de sa 18ème session, Doc. off. A.G. N.U., 40ème sess., suppl. n. 17, Doc. N.U. A/40/17 aux pp. 81-93 [ci-après la Loi-type de la CNUDCI].

7

Supra, note 4 pour la loi québécoise. La loi sur l'arbitrage interne de Colombie Britannique qui n'est pas citée à

la note 4 s'inti~ule : Commercial Arbitration Act, S.B.C. 1986, c.3.

8. S.C. 1986, c. 22 [ci-après Code d'arbitrage commercial].

9. S. Jarvin, "Canada' s Determined Move Towara~ International

Commercial Arbitration" (1987) J. Int. Arb. Ill.

10. A. de Mestrnl, "Commentaires" dans Actes du 1er colloque

sur l'arbitrage commercial international. Octobre 1985. Québec, Montréal, wilson & Lafleur Ltée, 1985 à la p. 34 [ci-après

(13)

canadiens" suivis des autorités provinciales envers une législation adéquate sur l' arbitrage international et l'adhésion du Canada a la Convention de New York de 1958. 12

La coexistence au Canada de systèmes juridiques de common law dans les neuf provinces et de "droit civil" au QuébecB a longtemps emppché une harmonisation des législations sur l'arbitrage.

Au milieu de cette effervescence législative, la Loi modifiant le Code civil'4 et le Code de procédure civile15 en

11. Brierley écrit à propos du traditionnel manque d'intérêt

des milieux d'affaires canadiens vis-à-vis de l ' arbitrage international : "And there has not be~n the expression of su ch interest because there has not been any widespread perception of the need for developing a law of arbitration that acknowledges the patterns of Canadian involvernent in world trade.", dans "Overview of international commercial arbitration in Quebec and in the Canadian common law provinces", "Colloque de Québec de 1985", ibid.

à la p. 275.

12

Sur les causes du retard canadien dans le domaine de l'arbitrage international, R. K. Paterson et B.J. Thompson font les remarques suivantes : "Perhaps the most se1 ious obstacle was an attitudinal problem. Over the years Canada' s international economic relations have been largely with the United states and most of the disputes arising out of this relationship have been settled by conventional modes, that is, t.hrough settlements or li tigation. The substantial similari ty of the Canadian and the united states economies have created a relatively insulated trading environment in which few perceived the need for change . . . ", et sur le changement d'attitude qui s'est opéré au Canada: "The realization, particularly in Western canada, of the enormous economic growth in the newly industrialized economies of East Asia (Tal.wan, South Korea, Hong Kong, singapore and others) and cf the opportunities this growth presents for Canadian trade and investment is perhaps a significant factor.", dans UNCITRAL Arbi tration Model in Canada. Canadian International Commercial Arbi tratio!1 legislation, Toronto, Carswell, 1987 à la p. vii.

13. "La province de Québec possede un droit prive qui s'inspire dans une large mesure de l ' ancien droit français", J. E. C. Brierley, Arbitrage conventionnel au Canada et spécialement dans le droit privé de la province de Québec, thèse de doctorat, Faculté de droit et des sciences économiques de l'Universite de Paris, 1964 a la p. 6 [ci-après Thèse de doctorat].

14

(14)

matière d' arbi trage , entrée en vigueur le Il novembre 1986 au

Québec, occupe une place privilégiée. Tout d'abord parce que cette loi tente de développer ensemble l ' arbi trage interne et l' arbi trage international à l'instar de la législation adoptée au niveau fédéral. De plus, le législateur québécois s'est fortement inspiré de la Loi-type de la CNUDCI en l'adaptant aux dispositions antérieurement codifiées du Code de procédure civile. Il a aussi tenu compte de la jurisprudence antérieure et a repris les dispositions de la Convention de New York de 1958 relatives à

l'exécution des sentences rendues hors du Québec.

C'est cette nouvelle législation québécoise sur l'arbitrage que nous nous proposons d'étudier en regard du droit français de l' arbitrage. Avant d'exposer les raisons du choix du droit français comme système de référence, il convient d'évoquer l'une des principales sources internationales de la nouvelle législation québécoise qU'est la Loi-type de la CNUDCI.

Fruit d'un travail de quatre années, la Loi-type de la CNUDCI a été élaborée par les représentants et experts en arbitrage de plus de soixante Etats et dix-huit organisations internationales. Ce n'est pas un traité internationa117 mais un modèle de loi qui codifie une grand nombre de "coutumes et pratiques courantes en matière d'arbitrage international et de droit international

15 •

. [cl-après C.p. c.].

16

S.Q. 1986, c. 73. [ci-après la Loi de 1986 sur l'arLitrage]. Elle introduit les articles 1926.1 à 1926.6 dans le C.c.B.-C. et les articles 940 à 951 (2) dans le C.p.c.

17

Elle n'a donc pas force obligatoire et peut être facultativement adoptée par les législateurs nationaux. Le traité international a l'inconvénient d'être long à élaborer et à

ratifier, ~u lorsqu'il l'est, la ratification est souvent assortie de réserves. Un auteur français, Guy de Lacharrière, fait remarquer que les Etats ont souvent peur du "produit fini" qu'est la convention internationale, voir La politique juridique extérieure, Paris, Economica, 1983 à la p. 41 et s. Voir aussi de Ph. Fouchard, "La loi-type de la CNUDCI sur l'arbitrage commercial international"

(15)

privé.,,18 Ecrite pour l'arbitrage international, elle peut être utilisée pour formuler une loi sur l'arbitrage interne pour l'Etat désireux d'éviter "toute dichotomie de sa législation sur l'arbitrage. 1I19 Le Québec a suivi cette voie puisque la Loi de 1986

sur l'arbitrage ne fait pas de véritable distinction entre l'arbitrage interne et international quant au régime juridique. La Loi-type de la CNUDCI se cêractérise par une grande place faite à

l'autonomie de la volonté des parties dans la constitution du tribunal arbitral, le choix des règles de procédure et le droit applicable au fond. Enfin, elle reprend la liste de l'article V de la Convention de New York de 1958 relative aux motifs d'opposition à l'exécution d'une sentence arbitrale. L'autre aspect intéressant dans le contexte canadien est qu'elle tente un rapprochement entre systèmes juridiques de common law et systèmes continentaux de droit civil, notamment dans le domaine du choix de la procédure et de l'administration des preuves.~

En soi, 1p choix du droit français comme système de comparaison pour examiner les nouvelles dispositions québécoises sur l'arbitrage interne et international semble comporter une

18 S. Jarvin, "La loi-type de la CNUDCI sur l'arbitrage commercial international" (1986) R. de l'arb. 509 à la p. 510. Cet auteur fait justement remarquer que la Loi-type n'offre pas toujours les solutions les plus récentes en matière d'arbitrage, notamment en ce qui concerne le choix du droit applicable au fond du litige.

19. Commentaire analytique du projet de texte d'une Loi-type sur l ' arbi trage commercial international, Rapport du Secrétaire général, CNUDCI, XVlllème session, vienne 3-21 juin 1985 a la p.

107 n. 22 [ci-après Commentaire analytique de la Loi-type].

20. E. P. Mendes précise à cpt égard : "The UNCITRAL Model law

was designed in part to set up an infrastructure for the conduct of international commercial arbitration which would incorporate the best of the common law and civil law traditions in civil litigation procedures" dans "Canada : A New Forum to Develop the Cul tural Psycho1ogy of International Commercial Arbitration" (1986/1987) J. Int. Arb. 71 à la p. 86. Voir aussi Ph. Fouchard, "La loi-type de la CNUDCI", supra, note 17 à la p. 883 et S. Jarvin, supra, note 18 à la p. 511.

(16)

certaine doee d'arbitraire. D'un point de vue théorique ,21

l'arbitrage est une justice privée dont l'origine est normalement conventionnelle. Il est donc conventionnel par sa source et juridictionnel par sa fonction.22 L'utilité du rapproch~ment avec le droit français sur l'aspect contractuel de l'arbitrage est évidente, en raison du caractère civiliste du droit des contrats au Québec. 23 Toutefois, vu l'origine désormais internationale d'une

pdrtie des sources du droit de l'arbitrage au Québec, ce dernier pourrait aussi bénéficier d'une comparaison avec d'autres régimes juridiques de l'arbitrage dans d'autres pays~ y compris les pays

21. Pour une synthèse des différentes théories sur la notion

d'arbitrage, voir A. Samuel Jurisdictional problems in International Commercial Arbitration: A Study of Belgian, Dutch, English, French, Swedish, Swiss, U.S. and West German Law, zurich, Schulthess polygraphischer Verlag, 1989 à la p. 33 et s.

22. H. Motulsky, Ecrits. Etudes et notes sur l' arbi tr~, Parj s: Dalloz, 1974, à la p. 5 et s. A. Rassis, Problèmes C1:~ base de l'arbitrage en droit comparé et en droit international. Tome 1 :

P.rbi trage juridictionnel et arbitrage contractuel, Paris, L. G. D. J . ,

à la p. 27 et

s. n.

41 et s.

23. Voir aussi J.E.C. Brierley "La convention d'arbitrage en

droit québécois interne" (1987) C.P. du N. 485 à la p. 529 [ci-après "la convention d'arbitrage ... "] : "Il n'en reste pas moins vrai que le droit français est, à mains égards, toujours pertinent. La raison en est simple. L' arbi trage, dans les deux droits, se situe dans le cadre de systèmes juridiques dont les principes généraux de droit privé sont les mêmes. Lorsqu'il s'agit de notions comme celles de capacité, de contrat, de biens, le droit français et le droit québécois puisent au même fond de pensée juridique selon lequel doit fonctionner l'arbitrage conventionnel. L'expérience jurisprudentielle et le pensée doctrinale françaises pourraient être ainsi très précieuses pour le juriste québécois. Il

24. voir aussi : W. C. Graham, "The Internationalization of

Comnl~!'C!ial Arbitration in Canada: A preliminary Reaction" (lq

87-88) 13 Cano Bus. L.J. 2 à la p. 10 qui écrit à propos des réformes législatives sur l'arbitrage au Canada: " . . . Determining what are the appropriate limits to su ch controls [local court interference in arbitration] must be based upon sorne comparative law research, for our conduct in this area can only be judged relative to the approaches adopted by our trading partners. A sensitivity to their views is essential if arb~trat:on in Canada is to develop its full potential to aid Canadidn trading interests. An internationàl and

(17)

de common 1aw, notamment sur son aspect juridictionnel.25 Cela étant dit, notre choix a porté sur le droit français parce qu'il est relativement bien développé tant dans le domaine de l'arbitrage interne qu'international.26 Cette approche a été utilisée par Mme le juge L'Heureux-Dubé dans l'arrêt de la Cour Suprême du Canada Sport Maska Inc. c. Zittrer27 relatif à l'arbitrage, bien qu'elle n'ait pas complètement exclu les sources de la common law.28

comparative law perspective is also necessary to ensure the uniform application of these measures throughout the various jurisdictions which have adopted them. While they a~e now reflected in Canadian statutes, their international source must be recognized and respected by the clJurts."

25. Brierley, supra, note 23 à la p. 529 n. 24.

u.

Le droit français de l'arbitrage interne a été modifié par le Décret 80-354 du 14 mai 1980 (J.O. du 18 mai 1930 à la p. 1238,

J. Robert (1980) D. chron. 189, (1980) Rev. Arb. 583} intégré un an plus tard dans le livre IV du NCPC par le Décret 81-500 du 12

mai 1981 (J.O. du 14 mai 1981 à la p. 1380) corl,plétant par des dispositions sur l'arbitrage international notamment les titres V relatif à l'arbitrage international et VI relatif a "la reconnaissance, l'exécution forcée et les voies de recours a l'égard des sentences arbitrales rendues à l'étranger ou en matiere d'arbitrage international."

27

. [1988] 1 S.C.R. 564 à la p. 603 où elle dit à propos de la recherche de l'intention des parties relativement a la fonction d'un tiers qu'elles ont nommé pour fixer le prix de vente dans un contrat : "Cette intention pourra s'inférer des critères dégages par la doctrine et la jurisprudence tant au Quebec qU'en France, les sources dB notre droit étant identiquement tributaires de l'ancien droit français et l'évolution de nos dispositions en la matière ayant suivi la même demarche."

28. Comparer H.P. Glenn, "Le droit comparé et la Cour Suprême

du Canada" dans Mélanges L.-P. Pigeon, Montréal, Wilson & Lafleur, 1989 197 à la p. 214 : "On ne peut exclure aucune source, comme l'a fai t dans une certaine mesure la Cour suprême dans son premier demi-cüècle d'existence. Et puisqu'on ne peut pas exclure de sources afin de créer un nouveau droit, on ne peut davantage en exclure dans la continuite de son droit. Les sources doivent être jugées selon leurs mérites. C'était l'un des leitmotivs de M. le Juge L. -P. Pigeon qui a constamment demontre dans son oeuvre comment les traditions du droit civil et de la common law ont chacune besoin de l'autre, tout en respectant l' integrité de

(18)

de

8

Enfin, l'arbitrage, moyen parallèle aux tribunaux étatiques régler des différends, n'échappe pas complètement à

l'intervention de ces derniers. Favoriser le développement de l'arbitrage interne et international exige donc de la part du juge étatique une bonne compréhension de cette institution. A cet égard, il ne sera pas question dans ce mémoire de l'arbitrage dit "légal" auquel les parties sont forcées par la loi de recourir comme l'arbitrage des griefs en droit du travail.29

Avant d'entrer dans le vif du sujet, il convient de dire quelques mots sur le contexte constitutionnel d'adoption de la législation québécoise sur l ' arbitrage. L'interprétation de la répartition des compétences entre les niveaux de législatures fédérale et provinciales exposée aux articles 91 et 92 de la Loi consti tutionnelle de 1867,30 permet de conclure sans beaucoup d' hési tation que l ' arbi trage interne relève de la compétence exclusive de la législature provinciale. A cet égard on peut se référer a l'alinéa 1431 de l'article 92 de la L. C. de 1867 et surtout a l'alinéa 13 du même article qui donne compétence exclusive aux provinces pour la propriété et les droits civi15.~ Ces deux alinéas, alliés à l'interprétation restrictive de

l'autre."

29 Voir aussi R. Tremblay, "La nature du différend et la

fonction de l'arbitre consensuel" (1988) 91 R. du N. 246 à la p.

252.

30 (R.U.), 30 & 31 vict., c. 3 [ci-après L.C. de 1867]. 31. Les législatures provinciales sont compétentes relativement "à l'administration de la justice dans la province y compris la constitution, le maintien et l'organisation des tribunaux provinciaux, de juridiction tant civile gue criminelle, y compris

la procédure en matière civile dans ces tribunaux."

~. . . d .

. VOlr aUSSl Compagnle 'assurance des cltoyens du Canada c. Parsons (19881-1882) 7 A. C. 96, qui a décidé que "les droits découlant des contrats" rentrent dans l'alinéa 13 de l'article 92

L.C. de 1867, dans F. Chevrette et H. Marx, Droit constitutionnel, Montréal, Presses de l'Université de Montréal, 1982 433 à la p.

435.

(19)

l'article 101 de la L.C. de 1867 autorisant l'établissement de tribunaux pour assurer une meilleure exécution des lois du Canada, justifient cette conclusion. Comme le dit J. Brierley :

"Que la matière de l'arbitrage soit considérée comme relevant de la procédure ou comme un contrat de droit privE::, elle appartient à la compétence législative exclusivement réservée aux provinces. Une loi fédérale sur l ' arbi trage dans les provinces serait indiscutablement considérée COlnme une invasion du domaine réservé aux autorités locales... donc ul tra vires de la compétence fédérale. ,,33

En somme, les provinces ont le droit exclusif de légiférer sur des matières de nature purement locale ou privée,~ elles l'ont d'ailleurs fait dans le domaine de l'arbitrage interne sans que cela n'ait jamais été contesté.

Plus délicat était le problème de la répartition des compétences entre le Parlement féderal et les provinces pose par l'adhésion du Canada à la Convention de New York 1958.~ En ce qui concerne l'adoption d'une législation federale sur l'arbitrage extra-provincial et international, il etait possible pour le fédéral de la justifier par l'article 91(2) de la L.C. de 1867 selon lequel la réglementation du trafic et du commerce releve de la compétence fédérale, surtout lorsqu'ils s'effectuent entre les provinces ou avec l'étranger.36 Mais d'après Brierley cette justification ne pouvait tenir car "le pouvoir de réglementer les activités économiques sur le plan national ne comprend pas celui de légiférer sur les différends qui peuvent surgir à l'occasion "du

33. "Thèse de doctorat", SUP]. a, note 13 à la p. 10 n. 5.

34. C'est l'alinéa 16 de l'article 92 de la L.C. de 1867.

35

voir aussi J. G. Castel, "Canada Arbitration" (1981) Arb. J. 8 à la p. 9.

and International

~. Selon H. Brun et G. Tremblay, les tribunaux ont concilie l'article 91(2) et l'article 92 (13) de la L.C. de 1867 " . . . en faisant prévaloir les principes de competence personnelle. Ils ont fait du commerc~ extra-territorial une matière fédérale et du commerce provincial une matière provinciale.", dans Droit constitutionnel, Montréal, Ed. Yvon Blais, 1987 a la p. 327.

(20)

l'

trafic et du commerce. ,,37 si l'on veut se risquer à résumer le problème, i l semble que le simple fait qu'une législation fédérale sur l'arbitrage extra-provincial et international pût avoir des incidences sur des do:naines de compétence provinciale exclusive empêchait le Parlement fédéral d'en connaître exclusivement.38 Par ailleurs, la L.C. de 1867 est quasiment muette sur la question des relations extérieures. 39 Dans l ' affaire dite des Conventions de

travai14o, le Conseil Privé a reconnu la compétence du Canada de conclure des traités, leur mise en oeuvre dépendant de la répartition des compétences entre les législatures fédérale et provinciales.41 En conséquence, si l'objet du traité touche à une matière qui relève de la compétence exclusive des provinces, ce sont les provinces qui doivent les exécuter par des législations

37. "These de doctorat", supra, note 13 à la p. 13.

38. En ce sens, M. Pomerleau est d'avis que la compétence des provinces même dans le domaine de l'arbitrage international est aussi excl usi ve, voir son article : "L' arbi trage interprovincial et international au Canada: aspects constitutionnel et légi.slatif"

(1985) R. de l'arb. aux pp. 373 et s.

39. Le seul article qui en parle est l'article 132 qui traite de la conclusion des traités d'empire. Cet article reçoit actuellement une interprétation restrictive visant à le considérer comme désuet. Nous dirons qu'on ne peut fonder sur cet article une compétence exclusive du fédéral de mettre en oeuvre les conventions internationales. Voir Chevrette et Marx, supra, note 32 à la p. 1184 et s.

40. Le Procureur général du Canada c. Le Procureur général de l'Ontario, [1937] A.C. 326, dans Chevrette et Marx, supra, note 32 à la p. 1182 et s.

41

Selon Lord Atkin, ibid. à la p. 354 : "Le Canada, en ce qui a trait aux pouvoirs législatifs, possède tous ceux qui sont nécessaires à l'exécution des traités, en mettant ensemble ceux du Dominion et des provinces. Mais les pouvoirs législatifs restent séparés et si, dans l'exercice des attributions découlant de son nouveau statut international, le Dominion contracte des obligations, ces dernières doivent, quant il s'agit de lois concernant les catégories de sujets relevant des prOVlnces, être remplies par l'ensemble des pouvoirs, c'est-à-dire au moyen d'une coopération entre le Dominion et les provinces."

(21)

appropriées.~ En outre, l'insertion de sentences arbitrales extra-provinciales ou étrangères dans le système juridique d'une provinC'e nécessite de sa part un certain contrôle par rapport à son propre ordre public.

Pour ces raisons et aussi a cause de la clause fedérale insérée à l'article XI de la Convention de New York de 1958 qui rend impossible au pouvoir fédéral sa ratification sans la coopération effective des provinces43, l'adhésion du Canada à la Convention de New York de 1958 a eté longtemps bloquee.44 Le problème de la répartition des compétences relativement a l ' arbitrage international et extr~-provinclal a ete resolu en fonction des matières susceptibles d'être regies par l'arbitrage. Ainsi, le Code d' arbi trage cc>mmercial adopte au niveau federal s'applique à l'arbitrage interne et international ayant lieu au Canada et où l'une des parties au moins est un ministère ou une

42 Certains auteurs ont déduit de la competence des provinces de mettre en oeuvre les traités conclus par le Canada celle de les conclure. Voir J.-Y. Morin, "Les conclusions d'accords internationaux par les provinces canadiennes a la lumiere du droit comparé" (1965) 3 A.C.D.I. 127. Voir aussi du même auteur, "La personnalité internationale du Québec" (1984) R.Q.D.I. 163 a la p. 209 et s. où il cite P. Gérin-Lajoie.

43 En effet, l'article XI(b} de la Convention de New York dispose: "(b) with respect to those articles of this Convention that come within the legislative jurisdiction of constituent states or provinces which are not, under the constitutional system of the federation, bound to take legislative action, the federal government shall bring such articles with a favourable recommendation to the notice of the appropriate authorities of constituent states of provinces at the earliest possible moment."

44. Voir la déclaration du Ministre de la Justice du Canada en 1979 qui faisait état de la nécessité d'une participation effectjve des provinces pour la ratification de la Convention de New York de 1958, reproduite dans l'article de J.G. Castel, supra, note 35 a la p. 9. Dès que les provinces en ont exprimé le désir, le féderal a demandé leur assentiment pour adherer a la Convention de New York de 1958 en 1985. Voir Chiasson, supra, note 1 a la p. 70.

(22)

société d'Etat ainsi qu'aux questions de droit maritime. Son champ d'application se limite donc aux domaines de compétence fédérale exclusive.46 La possibilité de chevauchements entre les législations fédérale et québécoise a été évoquée.47 Quoi qu'il en soit, nous pensons que le fait que toutes les provinces aient adopté des législations sur l'arbitrage international inspirées des mêmes sources, conduira à une certaine harmonisation du droit de l'arbitrage au Canada. 48

45. Navigation Sonamar Inc. c. Algoma_ Steamship Ltd., [1987] R.J.Q. 1346 (C.S.), [ci-après Navigation Sonamar], dans lequel M. le Juge Gonthier (alors juge à la Cour supérieure), relevait qu'un problème de construction d'un navire est une question de droit maritime qui relève de la compétence fédérale qui donne lieu à l'application des dispositions du Code d'arbitrage commercial.

46. Voir Desbois c. Les industries A.C. Davie Inc. (11 novembre 1987), Québec 200-05-002581-861, (C.S.), [ci-après Desbois c. A.C. Davie], à la p. 14, dans lequel M. le Juge de Blois constate que "Bien que les deux palliers de gouvernements provincial et fédéral aient légiféré dans le domaine de l'arbitrage, il n'existe pas à proprement parler de conflit parfait... Les deux textes [Code d'arbitrage commercial et Code de procédure civile du Québec] ne visent pas la même matière. Le gouvernement fédéral a simplement cerné le champ d'application de sa "loi" afin de soumettre à "ses règles d'arbitrage" un domaine (droit maritime) qui relevait déjà de sa compétence".

47

A. Prujiner, "Les nouvelles règles de l'arbitrage au Quebec" (1987) R. de l'arb. 425 à la p. 428, en ce cas ce sont les dispositions fédérales et internationales qui ont préséance, S.C. 1986, c. 21 art. 5. Cette question a d'ailleurs été posée dans le domaine du droi t maritime, dans les arrêts Nav;.gation Sonamar, supra, note 45 à la p. 3, et Desbois c. A.C. Davie, supra, note 46

à la p. 4, à propos de problèmes relatifs à des contrats de construction de navire. Les deux arrêts out d'ailleurs reconnu que cette question relevait du droit maritime donc de la compétence fédérale.

~. Voir l'arrêt Navigation Sonamar, supra, note 45 à la p. 13, dans lequel M. le Juge Gonthier remarque le peu de différence entre le Code d' arbi trage commercial et la législation québécoise et rapproche l'art. 946 (2) CPCQ de l'article 34 du Code d'arbitrage commercial "qui ont un effet semblable." Dans l'arrêt Desbois c. A.C. Davie, supra, note 46, M. le juge de Blois note que la clause compromissoire est parfaite au sens du droit québécois et au sens de l'art. 7 du Code d'arbitrage commercial.

(23)

Cette étude sera divisée en deux parties consacrées respectivement pour la première, à l'arbitrage en droit interne et pour la seconde, à l'arbitrage en droit international privé. Il peut paraître étonnant d'avoir adopté un plan qui consacre une dichotomie que le droit québécois nouveau ne consacre pas formellement s'agissant de l'arbitrage interne et international. Toutefois, le droit québécois nouveau a pris en compte la spécificité de l'arbitrage international par rapport a l'arbitrage interne. Par ailleurs, l' arbitrage dit international pose des problèmes spécifiques qu'il fallait examiner séparément.

(24)

TITRE l L'ARBITRAGE EN DROIT INTERNE QUEBECOIS ET FRANCAIS Nous avons adopté un plan chronologique afin de bien examiner les problèmes posés par les différentes étapes du processus arbitral. En conséquence, le premier volet traitera de la convention d'arbitrage en droit comparé. Nous tenterons notamment d'appréhender l'incidence sur l'étude de cette convention du caractère â la fois contractuel et juridictionnel de l'arbitrage. Le second volet portera sur la procédure arbi traIe dont nous verrons que le caractère contractuel de l'arbitrage fait que les parties sont en principe libres de choisir les règles de procédure mais dans la limite du respect des principes fondamentaux de justice. Enfin, le troisième volet sera consacré â l'exécution forcée et aux voies de recours contre la sentence arbitrale.

CHAPITRE 1 -LA CONVENTION D'ARBITRAGE

SECTION 1. CONVENTION D'ARBITRAGE ET L'ASPECT CONTRACTUEL DE L'ARBITRAGE

L'un des traits saillan~s de la Loi de 1986 sur l'arbitrage est l'insertion de la convention d'arbitrage dans le C.c.B.-C. En effet, la dernière réfo~me sur l'arbitrage avait été opérée par une refonte du C.p.c. en 1965.49 L'arbitrage ressortissait alors à la procédure, ce que traduisait l'absence de définition du compromisso , bien que le C.p.c. de 1966 fît pour la première fois mention de la clause compromissoire à l'art. 951. Malgré le fait que plusieurs arrêts de la Cour d'appels1 eurent affirmé la validité de la clause

49

. S.Q., c. 80, entré en vigueur le 1er sept. 1966, art. 940

à 951 C.p.c. de 1966.

50. L'art. 1431 C.p.c. de 1897, S.Q. 1897, c. 48 contenait une défini tion du compromis. Pour une jurisprudence partisane du caractère exclusivement procédural de l'arbitrage ayant ~ffirmé la nullité de la clause compromissoire: National Gypsum Co. Inc. c. Northern Sales Ltd. [1964] R.C.S. 144. Vinette Construction Ltée c. Dobrinsky (1962] B.R. 62 (C.A.).

51. Ville de Granby c. Desourdy Construction Ltée [1971] C.A. Q71. Société Québécoise d'Exploitation Minière c. Onil Hébert et les Pétroles Laduboro Ltée (1974) C.A. 78. f{eyman c. Lafferty,

(25)

compromissoire, des doutes subsistaient encore

à

cet égard.

~2

Ce fût

la Cour Suprême du Canada jans l'arrêt Zodiak International

Productions c. Poloqne

53

qui a formellement reconnu la validité per

se de la clause compromissoire.

Nous

envi~agerons

donc

la

déf ini tion de la convention d ' arbitrage telle qu'elle apparaît

depuis la réforme de

1986 (1)

pour ensuite la replacer dans le

droit des contrats (2) et examiner son champ d'application (3).

1.

DEFINITION DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE

1.1. conception dualiste et unitaire de la convention d'arbitrage

Le car""c.:cère contractuel de l'arbitrage est affirmé par

l'adoption d'une définition générique de la convention d'arbitrage

dans le C.e.B.-C.

à

l'art.

1926.1 :

Harwood and Co.

[1979]

C.A.

231.

52

voir

J.E.C.

Brierley,

"La

validité

de

la clause

compromissoire demeure-t-elle incertaine en droit québécois

?"

(1975)

Rev. Arb.

154. W.

Sareika, "Clause compromissoire et l'art.

68

du C.p.c."

(1977) 37 R.

du B.

244. E.

Colas,

"Clause

compromissoire, compromis et arbitrage en droit nouveau",

(1968) 28

R.

du B.

129.

P.

Ferland, "L'arbitrage sans action en justice

dans la province de Québec"

(1971) 31

R.

du

B. 69

et "La

controverse au sujet de la validité de la promesse d'arbitrage,

appelée la clause compror.dssoire"

(1973) 33 R.

du

B. 136.

Cette

controverse portait

~~L la

compatibilité de l'art.

6!

C.p.c. selon

lequel une action purement personnelle peut être portée devant un

tribunal québécois "nonobstant toute convention contraire", avec

la validité des clauses d'arbitrage. J. Béguin note

à

juste titre

que la solution consisterait

à

traiter l'art.

68

C.p.c. comme une

règle de

compétence territoriale,

ce

qui

enlèverait toute

incompatibilité avec la clause compromissoire puisque cette

dernière se situe sur le plan de ]a compétence ratione materiae,

voir

L '

arbitrage commercial international, Montréal, Centre de

recherche de droit privé et comparé de l'Université McGill,

1987

à

la p.

141.

La Cour d'appel dans l'arrêt Les

Importat~ons

Cimel

c. pier Augé Produits de Beauté

[1987]

R.J.Q.

2345

(C.A.) a levé

l'ambigu1té en suivant ce raisonnement.

53. [1983J 1

R.C.S.

529

[ci-après Zodiak]. Voir sur cet arrêt

E. Groffier, "Jurisprudence récente en matière d'arbitrage"

(1983) 43 R.

du B.

928.

1

(26)

7

"La convention d' arbi trage est un contrat par lequel les parties s'engagent à soumettre un différend né ou éventuel à la décision d'un ou de plusieurs arbitres, à l'exclusion des tribunaux."

A première ";'üe, cet article ne fait plus de distinction formelle entre compromis et clause compromissoire. En cela, la loi québécoise a retenu une conception uni taire de la convention d' arbi trage qui est celle des provinces de common law. 54 Au contraire, le droit français distingue entre compromis et clause compromissoire qui font l'objet de deux articles distincts dans le NCPC.55 Le mérite de cette définition générique, selon nous, est de reconnaître à la clause compromissoire le caractère de convention d' arbi trage à part entière, à l'instar du compromis. Comme le relevait Mme le Juge L'Heureux-Dubé dans l'arrêt de la Cour Suprême du Canada Sport Maska56 :

"On pourrait croire que, ce faisant, le législateur a voulu fondre en un seul concept ces deux conventions distinctes que sont le "compromis" et la "clause compromissoire". A mon avis, tel n'est pas le cas, la distinction demeure le différend né se référant au compromis et le différend éventuel à la clause compromissoire qui tous deux étaient et demeurent les composantes de la convention d ' arbitrage. "

(nous soulignons)

Ainsi, la clause compromissoire permet aux parties de prévoir

à l'avance un recours à l' arbi trage en cas de di fférend. Le compromis permet aux parties qui sont confrontées à un différend, d'écarter les tribunaux étatiques et de le soumettre à des arbitres. Chaque type de convention d'arbitrage doit être distingué

54. Brierley, "Quebec's New (1986) Arbitration Law", (1987) 13 Cano Bus. L.J. 58 à la p. 64 et 65. Voir aussi "thèse de doctorat", supra note 13 à la p. 164 n. 77.

55

L'art. 1447 NCPC relatif au compromis énonce "Le compromis est la convention par laquelle les parties à un litige né soumettent celui-ci à l'arbitrage d'une ou plusieurs personnes." L'art. 1442 NCPC définit la clause compromissoire comme suit: "La clause compromissoire est la convention par laquelle les parties à un contrat s'engagent à soumettre à l' arbi trage les litiges qui pourraient naître reldtivement à ce contrat."

(27)

parcequ' il pose des problèmes spéci f iques. 57 En conséquence, la définition unitaire de la convention d'arbitrage retenue par le droit québécois semble plus formelle que réelle, mais il n'est pas inutile de préciser les conséquences attachées à une approche unitaire de la convention d'arbitrage.

1.2. Conséquences de l'approche unitaire du droit québécois

Une conséquence importante attachée à la reconnaissance de la clause compromissoire comme une convention à

que les parties ne sont plus obligées de passer une telle clause, comme l'exigeait l'art. 951 L'existence d'un différend est une condition

part entière, est comprom=s suite à

58 C.p.c. de 1966.

de formation du compromis, alors qu'il n'est qU'une condition de mise en oeuvre de la clause compromissoire, celle-ci ne prenant véritablement effet que lorsque le litige est réalisé. 59 Le droit français est au

même effet à ceci près que la conception dualiste de la convention implique qu'à l'instar du compromis, la clause compromissoire doit

57. Voir l'art. 7(1) Loi-type de la CNUDCI : "Une convention d'arbitrage peut prendre la forme d'une clause compromissoire dans un contrat ou d'une convention séparée."

58. Mais le juge pouvait y suppléer en faisant la nomination des arbitres ou la désig •• ation des objets en litige comme dans l'affaire Gaz Métropolitain Inc. c. Lalonde (5 juillet 1983), Montréal 500-05-003971-833, J.E. 83-790 (C.S.). Mme le Juge L'Heureux-Dubé dans l'arrêt Sport Maska, supra, note 27 à la p. 582, note à propos de l'exigence de l'art. 944 C.p.c. selon lequel "la partie qui entend soumettre un différend à l'arbitrage doit en donner avis à l'autre partie, en y précisant l'objet du différend ... " : "Si l'obligation de passer compromis suite à une clause compromissoire s'en trouve réduite d'autant, l'avis prévu à l'art. 944 C.p.c. fait office de ce compromis ... "

59. Voir aussi Mme le Juge L'Heureux-Dubé, ibid. a la p. 613: "Rien n'empêche que la clause compromissoire puisse prévoir les modalités de l'arbitrage." Avec respect, les nouvelles dispositions du C.p.c. n'exigent pas que la clause compromissoire prévoie les modalités de l'arbitrage pour que celle-ci soit valide.

(28)

prévoir

à

peine de nullité au minimum le mode de désignation des

arbitres.

60

En conséquence, la structure unitaire de la convention

d'arbitrage permet d'envisager la clause compromissoire conclue

à

titre

~rincipal à

propos d'un différend éventuel comme le souligne

le professeur Brierley61 ainsi que le Commentaire analytique de la

Loi-type. 62 Chose inadmissible en droit français dans lequel la

clause compromissoire est nécessairement incidente par rapport

à

un contrat principal. En outre, on peut concevoir une clause

compromissoire au sujet d'un différend éventuel découlant de tout

rapport juridique qu'il soit contractuel ou non. 63

Enfin, le champ d'application du compromis et de la clause

compromissoire ne sont pas distingués dans la Loi de 1986 sur

l'arbitrage. L'approche dualiste du droit français, motivée par

une méfiance vis-à-vis de la cla" .

.! ••

e compromissoire, explique un

champ d'application plus restreint pour cette dernière. En effet,

60. Respectivement art. 1443 al.2 et 1448 al.2 NCPC.

61. "La convention d'arbitrage ... ", supra, note 23

à

la p. 534

n. 37. La définition donnée de la clause compromissoire par le

Dictionnaire de droit privé, Montréal : Centre de recherche en

droit privé et comparé du Québec, 1985,

à

la p. 37, ne semble pas

retenir cette interprétation : "Clause par laquelle les parties

à

un contrat conviennent, avant toute contestation, de soumettre

à

l' arbi trage les différends qui pourront s'élever entre elles

à

propos ou contrat" (nous soulignons). Il serait intéressant de voir

si cette définition sera "affectée" par la réforme de 1986.

62. Supra, note 19

à

la p. 116, signale

à

propos de l'art. 7(1)

qui définit la convention d'arbitrage : "De par la nature des

choses, une clause compromissoire dans un contrat serait adapté aux

différents futurs,

alors qU'un accord séparé le serait non

seulement pour les différends existants, mais également pour les

différends futurs" (nous soulignons).

63. Brierley, "La convention d'arbitrage ... " supra, note 23

à

la p. 550 n. 85. Voir aussi l'art. 7(1) de la Loi-type de la

CNUDCI.

(29)

19

au contraire du compromis, la cla'.1se compromissoire "est nulle s'il

n'est autrement disposé dans la loi.,,64

La définition proposée par le professeur Brierley, de la

convention d'arbitrage telle qu'elle apparaît après la réforme de

1986 met en lumière ses éléments constitutifs

:65

"La convention d'arbitrage •.. consiste, juridiquement, en une

expression de volonté dont la preuve écrite est possible, de

la part de personnes capables de se soumettre

à

l'arbitrage

au sujet d'un différend, né ou éventuel, concernant un objet

licite."

Mais aussi excellente que soit une définition de la

convention d'arbitrage, certaines clauses ambigues amènent

à

s'interroger sur les critères de distinction entre l'arbitrage et

d'autres notions voisines, comme l'expertise, la perfection et la

révision des contrats.

1.3. De C@.e1ques clauses ambiguës

L'arbitrage étant une notion

66

hybride

67,

il n'est pas toujours

facile de dégager des critères qui lui soient propres et qui

permettent

à

coup sûr de distinguer une clause d'arbitrage d'une

clause d'expertise, de perfection ou de révision des contrats. En

droit français, on distingue de façon traditionnelle deux critères

de l'arbitrage (1.3.1), qui ont été retenus par la Cour suprême du

Canada dans l'arrêt Sport

Maska.~

(1.3.2)

64. Art. 2061 C.c.F. Ainsi, la clause compromissoire n'est

permise qu'en matière commerciale, voir l'art. 631 C.Com.

65.

"La convention d' arbi trage ... ", supra, note 2 3 a la p. 547.

66.

Sur la notion d'arbitrage voir l'ouvrage de Ch. Jarrosson,

La notion d'arbitrage, Paris, L.G.D.J. 1987.

67.

Motulsky, supra, note 22

à

la p. 5 et s.

(30)

1.3.1. Les critères traditionnels en droit français

Il s'agit d'une part de l'existence d'un "litige" ou "différend précis mettant aux prises des intérêts opposés et susceptibles d'entraîner un recours en justice,,69 et d'autre part, du caractère juridictionnel de la mission que les parties ont entendu confier aux tiers. Ces critères sont-ils cumulatifsro ou exclusifs l'un de l'autre? si le critère du litige n'est pas une "panacée", il n'en est pas moins essentiel à l'existence d'un arbi trage. 71 Ce n'est qu'en présence d'une contestation ou d'un litige que l'on va s'interroger sur la nature de la mission confiée aux tiers par les parties. Encore faut-il déterminer le type de différend qui peut faire l'objet d'un arbitrage. Par exemple, la simple opposition d'intérêts est-elle un "différend arbitrable" ? La réponse la plus commode est que la simple opposition d'intérêts ne devient litige que si celle-ci est la base d'une prétention juridique. Selon Ch. Jarrosson:

"En résumé, on dira qu'il ya litige, contestation ... dès lors qu'une partie résiste en pouvant s'appuyer sur une argumentation juridique, au point de vue qu'une autre partie essaye d'imposer, et qui diffère du sien. Tout litige est susceptible à plus ou moins brève éch8ance de recevoir une solution juridique. C'est pourquoi il faut préciser que le litige existe dès qU'une partie résiste en pouvant s'appuyer sur une argumentation juridique car la situation peut à notre avis être déjà litigieuse avant même la formulation de l'argumentation juridique. Le litige peut n'être que virtuel. ,,72

Dans la même veine, Brierley souligne que la notion de différend implique certainement un rapport juridique conflictuel

69. P. Garant, "Commentaire de l'arrêt Sport Maska", (1989) 68

Cano Bar Rev. 166 à la p. 167.

70 Pour une jurisprudence française qui les a appliqués

cumulative~ent : Casso civ. 2e, 25 mai 1962, (1962) Rev. Arb. 103

et Casso civ. 1re, 26 oct. 1976, (1977) Rev. Arb. 337.

71. Tremblay, supra, note 29 à la p. 251: "Le différend doit être né pour que commence l'arbitrage."

(31)

qui oppose des adversaires ayant, de part et d'autre, des prétentions différentes à faire valoir. Lorsque la cause du conflit est reconnue comme revê~ant un intérêt juridique adéquat, le conflit est susceptible de faire l'objet d'une action en justice. n A. Kassis précise de façon intéressante qu"'il n'y a litige que s ' i l y a un rapport juridique parfait, une relation juridique définitivement et complètement formée."n

Mme le Juge L' Heureux-Dubé dans l'arrêt Bport Maska75 n'a pas donné de définition précise de la notion de différend susceptible d'être soumis à l'arbitrage, si ce n'est:

"Dans le contexte de 1 ' arbitrage, le terme "1 i tige" peut s'entendre de deux façons. Dans son sens premier, "litige" signifie "poursu ite civile" ("lawsui t"). C'est ainsi que l'art. 1341 C.p.c. de 1867 énonce que le compromis est un acte par lequel les parties pour éviter un litige ou y mettre fin, promettent de s'en rapporter à la décision d'un ou de plusieurs arbitres dont elles conviennent". Dans un deuxième sens, le terme "litige" peut s'entendre plus généralement de tout différend. compte tenu de l'art. 951 C.p.c., dans la lignée duquel s'inscrivent les modifications de 1986, il m'a semblé préférable d'utiliser ici le terme "di fférend" de préférence à "litige" lorsqu'il s'agit de différencier l'arbitrage de l'expertise afin d'éviter toute ambigu1té.,,76

~. Brierley, "La convention d'arbitrage . . . , supra, note 23 à la p. 534 n. 38. Voir aussi Kassis, supra, note 22 à la p. 32 n. 49.

74 •

• Ib1d. à la p. 38 n. 58. 75

• Supra, note 27.

~. Ibid. à la p. 583 et s. Il semble que le problème de la définition du litige dépasse la question du langage puisque le droit positif attache peu de différence entre les vocables utilisés: contestation, controverse, litige, différend sont employés indifféremment dans les législations aussi bien en France qu'à l'étranger. Sur la controverse doctrinale portant sur la distinctiort entre litige et contestation en droit français et les termes de ce débat, voir Jdrrosson, supra, note 66, à la p. 252 et s. n. 521 et s. A noter que l'Office de révision du Code civil québécois n'avait pas opé~é de distinction de cet ordre dans ses travaux sur la convention d'arbitrage, Rapport du Comité sur la convention d'arbitrage, 1973.

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22

L'autre critère a trait à la nature juridictionnelle de la mission confiée aux arbitres, ces derniers devant avoir mission de trancher un différend. MM. Robert et Moreau ont même nuancé ce critère en mettant l'accent sur la finalité de la mission juridictionnelle des arbitres afin de la distinguer de la perfection du contrat de vente prévue à l'art. 1592 C.c.F." :

" ... la distinction entre l'une et l'autre [1 ' arbitrage] opération peut se faire en ce que si l'intervention du tiers a trait au maintien du "lien" dans sa fonction ~ctive, c'est l'art. 1592 avec ses conséquences qui sera applicable, tandis que l'arbitrage tendra à consacrer et sanctionner la désagrégation d'un élément du même lien. ,,78

C'est justement sur la nature d'une clause de perfection d'un contrat de vente que la Cour Suprême du Canada s'est prononcée dans l'arrêt Sport Maska.~

1.3.2. L'arrêt sport Maska de la Cour suprême du Canada Il s'agissait de la vente par le séquestre d'une société en faillite d'une part importe.nte de ses actifs à Sport Maska. L'offre de vente soumettait la révision de l'évaluation des stocks aux vérificateurs de la faillie (zittrer) qui s'engageaient à tenir compte des arguments de l'acheteur (Sport Maska). Les vérificateurs devaient ensuite remettre à chaque partie un avis à partir duquel "le compte et l'évaluation du stock étaient présumés être déterminés de façon définitive •.. "M Par lettre, la faillie permettait à l' appellante d'assister à l'évaluation et de faire des

77. Cet article prévoit à propos de la formation du contrat de vente: "Il [le prix] peut cependant être laissé à l'arbitrage d'un tiers; si le tiers ne veut ou ne peut faire l'estimation, il n'y a point de vente."

~. MM. Robert et Moreau, L'arbitrage, droit interne, droit international privé, 5è éd., Paris, Dalloz, 1983 à la p. 8 n. 3. Contra: Kassis, supra, note 22 à la p. 34 et s., selon qui cette distinction ne tient pas notamment lorsqu'il Y a exécution en na ... ure. 79 • Supra, note 27. 80 . IbId. à la p. 571 et s.

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