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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Ignorance et questionnement : vivre des pratiques de questionnement à l'école

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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A. GIORDAN, J.-L. MARTINAND et D. RAICHVARG, Actes JIES XXV, 2003

IGNORANCE ET QUESTIONNEMENT :

VIVRE DES PRATIQUES DE QUESTIONNEMENT A L’ECOLE

Françoise WERCKMANN

MOTS-CLES : APPRENTISSAGE – COMMUNICATION REFLEXIVE – ECOUTE – PAROLE – ORAL

RESUME : Comment donner sens aux savoirs transmis à l’école, c'est-à-dire comment lutter contre l’ignorance ? Une pratique pédagogique axée sur la communication réflexive peut favoriser les compétences de questionnement. Il s’agit de favoriser la secondarisation en facilitant l’engagement de l’élève tant au niveau de l’oral que de l’écrit. Je travaille dans ce sens avec mes collègues de classe de BTS et à l’INSA de Strasbourg dans le cadre des classes préparatoires.

ABSTRACT : How to give direction to the knowledge transmitted to the school i.e. how to fight against ignorance ? A teaching practice centered on the reflexive communication can support competences of questioning. The method is based on engagement in the oral examination of the pupils.

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1. INTRODUCTION

L’un des défis de l’enseignement est d’arriver à articuler pour tous les élèves un rapport personnel et autonome aux savoirs et aux connaissances permettant de se les approprier en faisant notamment des liens avec les connaissances antérieures, cf. P. Ansubel : “ Si j’avais à réduire la psychologie de l’éducation à un seul principe, je dirais ceci : le plus important des facteurs influençant l’apprentissage est ce que l’apprenant sait déjà ”, en faisant des liens entre les différentes disciplines et à l’intérieur des disciplines elles-mêmes. Nous pouvons nous référencer également aux théories cognitives de l’apprentissage : de la gestalt-théorie (théorie de la forme) : pour résoudre un problème il faut le situer dans un contexte plus large ; à l’insight qui est la perception soudaine et globale d’une solution à un problème et qui suppose que l’élève comprenne d’abord le sens global avant d’appliquer des procédures.

Il s’agit donc d’être moins ignorant en favorisant un questionnement continuel de l’individu. Dans cette perspective d’instruction et d’éducation, l’objectif est d’identifier, d’analyser et de diffuser des pratiques de questionnement scolaires. Nous entendons par là des démarches, procédures, processus, “ institutions ”, dispositifs, outils, qui favorisent l’accès de tous au questionnement par l’apprentissage de l’oral que nous allons retrouver dans la pédagogie de projet et dans l’apprentissage au débat dans le cadre par exemple de la formation à la citoyenneté ou à la solidarité. Ce qui aboutit pour beaucoup d’enseignant à une nouvelle approche du métier.

Sachant qu’enseigner c’est comme le dit G. Delacote “ faire apprendre ” ce qu’on ignore et qu’aucune méthode n’est universelle car nous sommes d’une part dans un système de contraintes institutionnelles, d’autre part les progressions des élèves sont très différentes les unes des autres, il s’agit donc de mettre en place un bricolage plus ou moins astucieux entre différentes méthodes et stratégies car l’enseignant essaie d’être le moins ignorant possible par rapport à son public qu’il s’efforce de questionner et surtout d’écouter afin de le connaître le mieux possible et ainsi de mieux le servir. Nous verrons dans une première approche que l’apprentissage peut être favorisé par la maîtrise de l’oral et dans un deuxième temps qu’il peut être approfondi par la maîtrise du débat.

2. APPRENDRE PAR LA PAROLE

Car apprendre est synonyme de comprendre : il faut que cela fasse sens pour chacun qui va donner un sens particulier à ce qu’il comprend : “ apprendre contre soi ” comme le souligne G. Bachelard, car les têtes ne sont pas vides, ni les cerveaux vierges. Donc, pour apprendre, il n’y a pas qu’une seule voix, il faut interpréter les informations en fonction de ses expériences et de son projet dans

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(intentionnalité) et si cela apporte un “ plus ” dont je peux prendre conscience en dialoguant avec moi-même. Ainsi l’affectif, le cognitif et le sens sont liés en régulations multiples. Où se situe l’enseignant dans ce contexte : il peut intervenir en tant que médiateur pour faciliter le questionnement en fournissant des aides à penser (schémas, protocoles…) et inciter à donner du sens par approche favorisant la méta-communication. Comment favoriser cette approche ? en recentrant l’élève sur lui-même par le choix de méthodes et de pratiques didactiques instaurant un rapport non dogmatique au savoir et un rapport de communication réflexive appelé “ La petite conversation ” par Paul Ricœur, sachant que le questionnement fécond n’est jamais immédiat. Un des premiers exercices proposé aux étudiants est la pratique de l’oral par le biais de présentations croisées ayant comme support une grille d’analyse de l’oral qu’il faut d’abord comprendre et maîtriser. Il s’agit d’apprendre à questionner l’oral et pour cela il faut d’abord expliquer le problème : cela passe par un savoir, un savoir général concernant l’oral : comment bien poser sa voix, se tenir, regarder… Or tout le monde parle, sait parler ou croit le savoir, mais peu d’étudiants maîtrisent ce savoir que ce soit pour prendre la parole dans un cours ou un débat, dans le cadre d’un entretien, d’un exposé comme cela est demandé dans les TIPE et les TPE. Il me faut donc poser un savoir préalable à partir duquel chaque apprenant formulera son problème, ses opinions concernant l’oral. C’est pourquoi je présente les six items de la grille d’analyse empruntée à Daniel Mesguich et qui correspond en partie aux six moyens de communication présentés par Philippe Breton dans dernier livre “ L’éloge de la parole ” :

- premier item : le plaisir éprouvé par les intervenants et ressenti par l’auditoire, - deuxième item : la capacité de faire partager ses émotions avec l’auditoire, - troisième item : la personnalité et la qualité d’animation des intervenants, - quatrième item : la voix,

- cinquième item : le regard,

- sixième item : l’aisance corporelle.

Chaque item est noté sur 5. Chaque prestation est évaluée par l’ensemble des étudiants puis discutée avec l’enseignant.

Philippe Breton présente six moyens de communication qui sont en correspondances avec les six items précédents :

1- Le geste : “ L’immobilité vraie est le mouvement ” (Novarina). Il y a un lien indissociable entre le corps et la parole.

2- L’oral, la parole : qui correspond à la voix : rythme, débit.

3- La musique : qui peut s’apparenter au ton, au déroulement de la prise de parole : l’accroche ou l’attaque, la fin, la conclusion, la chute, et aussi les différents niveaux de langage.

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4- Le silence : qui correspond aux pauses, à l’arrivée, au départ. 5- L’image : qui correspond aux supports du discours.

6- L’écriture : qui est le support de l’oral.

Les prestations se déroulent dans un cadre très contraint : 3 à 4 minutes par personne, l’évaluation se fait par rapport au travail présenté et non par rapport aux personnes. L’ensemble des séquences est essentiellement basé sur l’écoute et la concentration de l’auditoire et des intervenants.

Les étudiants sont amenés à préparer puis à présenter leur travail oral qu’ils auto-évaluent grâce à la grille d’analyse, ce qui leur permet d’avoir un support “ objectif ” d’observation, mais surtout chaque étudiant en observant l’autre, s’observe lui-même :

“ Que fera-t-il quand ce sera son tour ? ” ; “ Qu’a-t-il fait tout à l’heure qui était bien ? ” ;

“ Qu’aurait-il pu améliorer… ” se calant sur les meilleurs.

Il dialogue sans arrêt avec lui-même ; il méta-communique. De même quand il se prépare, se reprépare au fur et à mesure de la formation car il va découvrir ou repréciser certains aspects de sa communication qu’il ignorait et il va se découvrir en partie lui-même et les autres.

3. APPRENDRE PAR LE DEBAT

Cet apprentissage transversal va pouvoir être utilisé dans le cadre des TIPE pour les classes préparatoires, des TPE pour les élèves de terminales (40 % des élèves de terminales ont choisi de présenter au baccalauréat des TPE), des PPCP en LEP et des travaux croisés en collège. Ces compétences vont également être sollicitées dans le cadre des programmes d’éducation politique mis en place aussi bien dans les collèges (épreuve d’éducation civique, devenue obligatoire depuis la session 2000) que dans les lycées où l’éducation citoyenne s’appelle désormais ECJS (Education Civique Juridique et Sociale) avec l’introduction du débat qui constitue la grande nouveauté de ces programmes. Mais le débat était déjà pratiqué en classe par certains enseignants avec l’organisation de tables-rondes, de conférences de revues de presse… préparées et animées par les élèves.

La pratique du débat amène également l’apprenant à repérer et expliciter ses démarches intellectuelles, sa façon de mener sa pensée, de mobiliser ses connaissances, d’inscrire de nouvelles connaissances et de nouveaux savoir-faire et être dans ceux qu’il possède déjà ou contre ce qu’il croit savoir.

Ces débats organisés à l’occasion de revues de presse ou à propos d’un thème comme l’Europe, ou l’égalité hommes-femmes… se déroulent également selon des régles précises que nous avons

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socialisation démocratique ”, en juillet 1998. Les règles à respecter sont les suivantes :

1- Par rapport au langage : la parole doit être partagée, c’est pourquoi il faut la donner, la prendre et être écouté.

2- Par rapport à la morale et à l’éthique : respect et coopération sont de règle.

3- Par rapport au savoir : il s’agit d’argumenter à partir d’exemples en tenant compte de la transversalité ou multidisciplinarité et de l’interdisciplinarité.

4- Par rapport à la distance à prendre qui suppose un travail continu sur soi : repérer l’agressivité, la passion chez soi et chez les autres par exemple.

5- Par rapport à la loi, à la règle imposée parfois et si possible négociée : respecter les procédures et les processus mis en place.

6- Par l’enseignant : être garant de la règle et du savoir.

Nous essayons ainsi d’approcher l’enseignement à l’aide de nouvelles méthodes pédagogiques de façon à former un citoyen qui soit capable d’intervenir dans la vie à plusieurs niveaux de citoyenneté et dans la vie en général en questionnant le monde.

Cela correspond également aux nouvelles directives concernant l’enseignement politique dans le cadre des cours d’histoire-géographie et plus précisément en ECJS. Marcel Spisser IA-IPR d’histoire-géographie propose une démarche très concrète pour installer le débat dans le cadre de cette discipline “ Organiser un débat consiste en une succession d’opérations qui demande une forte implication de l’ensemble des professeurs responsables de cet enseignement :

- choisir un sujet avec les élèves ; - réunir une documentation sur ce sujet ; - réaliser un argumentaire ;

- organiser le débat argumenté lui-même c'est-à-dire choisir un président et des rapporteurs, prendre la parole, respecter l’avis d’autrui, prendre position, éventuellement voter… ;

- restituer le débat sous des formes variées, compte-rendu, publication dans un journal lycéen, exposition, vidéo etc.

Dans cette démarche, avec un temps de préparation et un temps de restitution on ne peut guère envisager plus de deux ou trois débats par année scolaire. ”

La parole se situe comme un opérateur de l’action vers les autres et vers soi. Comme nous le voyons la parole est au cœur d’un nouvel univers de valeurs et permet de questionner le monde aussi bien extérieur à soi que son propre monde intérieur et ainsi d’être moins ignorant.

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BIBLIOGRAPHIE

BACHELARD G. (1978). Le nouvel esprit scientifique. Paris : P.U.F. BRETON P. (2003). Eloge de la parole. Paris : La Découverte.

GIORDAN A. (1998). Apprendre ! Paris : Belin.

RICOEUR P. (1996). Soi-même comme un autre. Paris : Point Seuil.

HABERMAS J. (1987). Théorie de l’agir communicationnel. Paris : Fayard.

SONNTAG M., WERCKMANN F. (1998) Métacognition et pédagogie réflexive. In A. Giordan, J.-L. Martinand, D. Raichvarg (Eds), Actes des XXes journées internationales sur la communication, l’éducation et la culture scientifique et industrielle.

Références

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