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L'EAU DANS L'HABITAT

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Submitted on 22 Jul 2017

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L’EAU DANS L’HABITAT

Yves Calvet, Bernard Geyer

To cite this version:

Yves Calvet, Bernard Geyer. L’EAU DANS L’HABITAT. Ras Shamra - Ougarit III : le centre de la ville, III, pp.129-156, 1987, Ras Shamra - Ougarit. �halshs-01567313�

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L’EAU DANS L'HABITAT

Y v e s C A L V E T e t B e r n a r d G E Y E R

La fouille d'un ensem ble de m aisons, m enée sur le tell de Ras Sham ra d u ran t les cam pagnes de 1979 à 1984, a mis au jo u r un ensem ble de stru c tu re s so u terrain es - puits, puisards ou silos - situées dans des m aisons ou à l’e x térieu r de b âtim ents à fonction artisanale ou d ’habitat (fig. 1). La localisation et les caractéristiq u es de ces stru c tu re s nous ont am enés à rep o se r le problèm e de l'eau dans une ville du Bronze récent, sous ses deux aspects d ’approvisionnem ent et d ’é v acu atio n 1. Si l’évacuation des eaux usées dépen d

direc-3 ; p i è c e 1062

Fig. 1. Les m a iso n s A, B et C (éta t 1984).

1. Voir Calvet 1981, p.34-38.

R SO III : Le centre de la ville,

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130 RSO III : Y. CALVET e t B. G EY E R

tem en t des am énagem ents réalisés p a r l’hom m e, l’ap p rov ision nem en t en eau d ’une cité est, avant tout, é tro ite m e n t lié aux conditions clim atiques, hydrologiques et hydrogéologiques de la région.

LE MILIEU NATUREL (Carte, p. 149)

L es c o n d itio n s c lim a tiq u e s.

Le tell de Ras Sham ra-O ugarit est situé su r la côte syrienne à un k ilom ètre environ de la baie de M inet el-Beida. La région bénéficie d ’un clim at m é d ite rra n é e n typique, a tte sté p ar la d o u ceu r des tem p ératu res, p ar l’existence d ’une saison sèche estivale, p ar un n o m bre re stre in t de jo u rs de précipitations.

Les reliefs qui b a rre n t l’horizon à l’est de Ras Sham ra et lim itent la plaine côtière jo u en t un rôle im portant. Ils bloquent en gran de p artie les vents hum ides d ’ouest su r le littoral, to u t en em p êch an t l’arrivée des vents froids continentau x en hiver et des vents désertiq u es en été. Mais c’est bien en ten d u la proxim ité im m édiate de la m er qui joue le rôle p rim o r­ dial. Elle e n tre tie n t une hum idité élevée : 67 %, en m oyenne, d ’hum idité atm o sp h ériq u e relative à L attaq u ié2 ; p ar son inertie, elle adoucit les te m p é ra tu re s (m oyenne annuelle, 19,4°) et en lim ite les am plitudes (am plitude d iu rn e m oyenne de 7,5°; am p litude annuelle m oyenne de 15,8°) ; elle déterm in e d u ra n t la saison chaude estivale une brise de m er qui a tté n u e la ch a le u r diurne.

Aussi les te m p é ra tu re s m oyennes relevées à Lattaquié sont-elles douces en hiver (11,4° de m oyenne en janvier, le m ois le plus « froid »), assez élevées m ais non excessives en été (27,2° en août, le m ois le plus chaud), su p érieu res à 20° de m ars à octobre. Des sautes soudaines peuvent toutefois se produire, n o tam m en t au printem ps, p a r tem ps de k h a m s in ,

m ais les effets en sont limités. La ch aleu r n ’épargne pas toujours le littoral puisque Lattaquié com pte 56,4 jo urs où la te m p é ra tu re m axim ale dépasse 30°, m ais seulem en t 0,3 jo u r au delà de 35°. Ce sont en fait tous les extrêm es qui sont ainsi gom m és p a r l’influence adoucissan te de la m er. Le gel est très rare (0,2 jo u r p ar an) et la neige quasi-inconnue. L’influence de la m er se fait égalem ent se n tir su r les précipitation s qui sont relativem en t ab o n d an tes (835,8 m m en m oyenne p ar an) et, som m e toute, assez bien rép a rtie s dans l’année si l’on excepte l’été (4 m ois secs, de juin à septem bre, selon l’indice x é ro th erm iq u e : P < 4 T). C ette saison connaît une sécheresse clim atique et biologique tem p é ré e p ar une hu m id ité atm o sp h ériq u e très forte (m axim um m oyen de 73 % en juillet) et p ar quelques orages. La m ajeure p artie des p récipitations a lieu en hiver. La saison hum ide com m ence dès sep tem b re et s’affirm e su rto u t à p a rtir du m ois de novem bre p o u r a tte in d re son m axim um en décem bre. Les pluies d im inuen t dès m ars et m ai annonce déjà la saison sèche. Com m e dans to u tes les régions m éd iterran éen n es, les p récipitatio ns se p ro d u isen t p e n d a n t un n o m bre de jo u rs assez restre in t (84,2 jo u rs p ar an), leur intensité m oyenne étan t proche de 10 mm p ar jo u r de pluie. Ces intensités peuvent toutefois être plus élevées : 25 m m plus de 10 jo u rs p ar an, 50 mm 2,2 jou rs p ar an, ju sq u ’à atte in d re un m axim um absolu de 127 m m (8 jan v ier 1974).

L’évaporation, facteu r d éterm in an t de la sécheresse biologique, est relativ em en t faible et le déficit hydrique lim ité grâce à l’hum id ité atm o sp h ériq u e élevée et à une nébulosité im p o rtan te (de 2,6 à 3,4 octas en été). Ce fait joue un grand rôle en été p o u r les végétaux en

2. Les chiffres ayant rap p o rt au clim at concernent tous la ville de Lattaquié, distante d ’une dizaine de kilom ètres ; ils sont tirés de Traboulsi, 1981.

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L’EAU DANS L’HABITAT 131

général et p o u r les cu ltu res en p articulier, puisque la dessiccation de la te rre et le dessè­ chem ent des plantes sont ainsi, sinon em pêchés, du m oins lim ités. La région de Ras Sham ra est fertile. A un clim at favorable à la végétation viennent s'ajo u ter des sols aisém ent cultivables ainsi que les possibilités d'irrig ation offertes p a r les napp es p h réatiq u es et les cours d ’eau.

L es c o n d itio n s h y d ro lo g iq u e s et h yd ro g éo lo g iq u es.

- La situation actuelle : les cours d ’eau et les nap pes p h réatiq u es sont à co n sid érer en p rem ier lieu, car ils p e rm e tte n t un ap p o rt sup p lém en taire d'eau aux cu ltures en été, m ais aussi parce q u ’ils fournissent l’eau douce nécessaire à to u te agglom ération.

Deux ruisseaux passent à proxim ité im m édiate du tell : le n a h r Chbayyeb au n o rd (long d ’environ 11 km) et le n ah r ad-Delbé au sud (long d ’environ 8,7 km). Ils se rejoignent à l’ouest p o u r fo rm er le n ah r al-Faydh (ou n a h r el-Fidd, long de 0,5 km) qui se jette dans la baie de M inet el-Beida3. Ces cours d ’eau, nés su r les pentes du p lateau de Bahlouliyé, à quelques kilom ètres à l’est de Ras Sham ra, sont très co u rts et d rain e n t une région d ’environ 25 km 2 où la végétation natu relle et les sols ont b eaucoup souffert de plusieurs m illénaires d ’occupation hum aine. Ces faits, associés à des pentes m arqu ées et au caractère m éd iterran éen du climat, d é te rm in e n t des écoulem ents saisonniers et souvent violents, n o tam m en t en hiver ou lors de gros orages. Le régim e des cours d ’eau suit celui des précipitations. Ils coulent d u ran t la saison des pluies et accusent une baisse de régim e dès le printem ps, pério d e pen d an t laquelle les d ern ières pluies et les ap p o rts d ’eau de la nappe superficielle {cf. ci-dessous) p e rm e tte n t un soutien des étiages. Ils sont à sec en été et le resten t ju sq u ’aux prem ières pluies d ’autom ne.

Ces ruisseaux ne peuvent donc, à eux seuls, suffire aux besoins de l’irrigation et à la fo u rn itu re d ’eau potable. Les n appes p h réatiq u es co n stitu en t une deuxièm e source d 'a p ­ ports, m oins lim itée dans le tem ps, m ais plus difficile à exploiter. Ju sq u ’aux années soixante, seule l’eau de la napp e superficielle, contenue dans les form ations m arines ou littorales q u atern aires et les calcaires de l’Éocène m oyen, était utilisée. Son plan ch er est constitué p ar les couches m arn eu ses de l’Éocène in férieu r (cf. ci-dessous la stratigrap hie relevée dans un des puits de la tran ch ée sud-acropole, fig. 2). Les nappes plus profondes n écessitant des forages et des pom pes ne sont sollicitées régu lièrem en t que depuis une vingtaine d ’ann ées ; la nappe superficielle, surexploitée et de faible débit, ne suffisait plus aux besoins toujo urs plus grands des cultures, qu'elles soient trad itio n n elles (tabac, c éréa­ les, olives) ou, surto u t, m araîchères (agrum es, bananes, pêches, etc...). Cette surexploitation a eu p o u r effet non seulem ent l'assèchem ent de plus en plus précoce des cours d'eau, m ais su rto u t le tarissem en t de sources p h réatiq u es qui p e rm e tta ie n t l'irrigation de vastes surfaces. Un exem ple nous est fourni p a r la source Ain el-Borj, située au sud du tell et qui jaillissait autrefois à longueur d'an née d'une fissure dans les calcaires affleurants. Elle est actuellem en t à sec dès la fin du p rin tem p s et tra d u it bien la conséquence des n om breux pom pages.

- La situation passée : il est certes difficile et délicat de vouloir recréer, m êm e so m m aire­ m ent, un en v iro n nem en t passé. Sans vouloir aller aussi loin, nous pouvons cep en d ant avancer quelques hypothèses : les textes découverts à O ugarit et co n cern an t les p ro d u c ­ tions agricoles nous p e rm e tte n t d 'é ta b lir quelques parallèles avec la situatio n actuelle. Les trois cultures qui, associées, font la spécificité et la richesse du dom aine m éd iterran éen , l'olivier, la vigne et le blé (et plus g énéralem ent les céréales), sont d û m en t m en tion nées

3. Nous re p ren o n s ici les toponym es tels q u ’ils ap ­ paraissent dans Saadé, 1979, p.36 (carte).

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8,

60

m

132 RSO III : Y. CALVET e t B. G EY E R

o

o

1 9 , 3 0 m

___ ▼ _

I 0,7m CH

margelle U

o

m

3

partie construite, appareil irrégulier en pierres sèches, moellons mal équarris ou bruts en ramleh, calcaire, marne, calcarénite ou plaquettes de grès. 1 2 m *0 /°, /. '/<

S/A

y S y . ° /3 f

1,10m

W - ÿ - k - % ,cn> -te W /. formation sableuse rouge orangée plus ou moins indurée avec plaquettes de grès à la base

(niveau aquifère supérieur).

E

m —

oo —

marne éocène blanchâtre (plancher de la nappe supérieure).

k l , 1 3 m ->

1 ■?

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L’EAU DANS L’HABITAT 133

dans les textes o u garitiques4. Le schém a qu'ils nous p ro p o sen t est celui d ’une cam pagne riche où coexistent l’olivier, la vigne, les jard in s et des cu ltu res diverses. Si les céréales ne sem blent pas faire l'objet d'un com m erce sauf cas exceptionnel (famine...), le vin et l'huile sont p ro d u its en q u antité suffisante p o u r pouvoir être exportés n o tam m en t vers Chypre et l'Egypte. La région proche d'O ugarit est, com m e de nos jours, su rto u t consacrée aux cultures irriguées, grâce aux sources p érenn es et, sans doute, à des b arrag es et à des puits, tandis que la vallée du n ah r el-K ébir est p lutô t vouée aux cu ltures sèches. Ces quelques élém ents, qu'il serait certes nécessaire d'analyser plus en détail, font im m anq u ablem ent référence à une am biance dom inée p ar les caractères m éd ite rra n é e n s du clim at : un clim at en définitive assez proche de l'actuel, à quelques nuances près. La distinction essentielle tient alors sans d oute plus à des différences édaphiques et de végétation que clim atiques. Une dégradation n ettem en t m oins avancée du couvert végétal n atu rel et des sols e n tre ­ ten ait une plus g rande hum idité et lim itait la période de tarissem en t des ruisseaux. La n appe superficielle, m oins sollicitée p ar l'évaporation et su rto u t m oins exploitée, pouvait fournir plus rég ulièrem ent de l'eau p ar l'in term éd iaire des puits et assurait un soutien plus long aux étiages des cours d'eau. G ardons-nous de voir dans cette hypothèse très schém a­ tique des conditions hydrauliques idéales. La saison sèche était déjà une réalité et, si l'on p eut lui su p po ser des conséquences m oins contraign antes qu'actu ellem en t, l'eau était sans aucun doute une d en rée précieuse que l'on évitait soigneusem ent de gaspiller en été.

LE CYCLE DE L’EAU DOMESTIQUE A OUGARIT

Nous p ren d ro n s ici, à titre d'exem ple, le cas de trois m aisons o u vrant au nord su r une m êm e rue (rue 1038) et situées dans un q u a rtie r d 'h ab itatio n du cen tre de la ville du Bronze réc e n t5(Fzg. 1). Fouillé depuis 1978, ce q u a rtie r est typique de l’u rb anism e d'O uga­ rit6. L'analyse de certain s am énagem ents, qui ap p araissen t en relatio n avec l'eau, p erm et de p réciser le rôle de ce que l'on appelle com m uném ent, et parfois m al à propos, puits, pui­ sard, fosse, citerne...

L ’a p p r o v is io n n e m e n t en eau.

Des puits qui p e rm e tte n t de tire r l'eau d ire c te m en t de la nappe, des anim aux de tra it ou des hom m es qui ap p o rte n t l'eau prélevée dans les cours d 'eau : tels sont, sans doute, les deux m odes d ’app rov ision n em en t les plus co u ran ts dans la m étrop ole can anéen n e du Bronze réc e n t7. Certes, des citern es pouvaient servir à recu eillir les eaux de pluie, m ais elles ne sont attestées, à Ougarit, que dans des palais ou dans des m aisons de grande im p o rtan ce8 et ne pouvaient avoir cette fonction collectrice que p en d an t la saison hum ide ou lors des rares orages d ’été. Elles servaient sans doute plu tôt de con ten an ts p o u r les eaux tirées des puits ou ap p o rtées des ruisseaux. L’ingéniosité des hab itan ts d ’O ugarit au Bronze récent ap p araît dans certains systèm es de récu p ératio n des eaux pluviales. Un exem ple significatif est celui de l’îlot VI de la tran ch ée ville-sud : des conduites verticales en terre cuite, d o nt les traces subsistent encore p a r endroits, descen d en t des toits en terrasse de la m aison et d rain e n t l’eau vers le puits p ar un systèm e de canalisations9.

4. Pour des textes ougaritiques m en tio n n an t la vigne, la fabrication, la distribution et l’exportation du vin, voir PRU II, n° 84-91 ; p our la farine, PRU II, n°91-93; p o u r l’huile d ’olive, PRU II, n° 94-96, et

Ugaritica V, p.80-83. Il sem ble que les pressoirs à

huile aient été nom breux dans la ville m êm e d ’O ugarit, voir à ce propos la con trib u tio n d ’O. Callot dans ce volume.

5. R apports prélim inaires su r cette fouille : Yon et al., 1982; Yon etal., 1983.

6. Yon, à paraître. P our les m aisons A et B, voir supra l’étu d e de M. Yon, P. L om bard et M. Renisio. 7. Calvet 1981, p.34-35.

8. Calvet 1981, p.35. 9. Callot, 1983, p.31-35.

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- Les puits : dans ce q u a rtier du centre de la ville, le chem in m en an t à l'eau des ruisseaux est relativem en t long et l’app ro v isio nnem ent devait être assuré avant to u t p ar des puits. Le secteu r qui nous intéresse ici en co m p orte un qui n'a pas encore été fouillé, p o u r des raisons m atérielles (fig. 13). Ce puits (1071), circulaire, est pourvu d ’une m argelle m onoli­ th iq ue et g ro ssièrem en t carrée (pl. 1 a), m unie d ’un orifice a rro n d i (diam ètre, 0,55 m). Il est situé dans une vaste d em eu re (m aison B), qui n'est pas encore dégagée en to talité ; sa position, relativ em en t centrale, facilitait la d istrib u tio n de l’eau vers les différentes pièces

(fig. 1). La form e, toujou rs circulaire, des puits du site était dictée p a r la n a tu re peu cohé­ ren te des te rra in s traversés (couches archéologiques) et p a r leu r profondeur. Une estim a­ tion effectuée p a r ra p p o rt à d 'a u tre s puits du tell nous p e rm e t d 'av ancer une h a u te u r d'au m oins 8 à 10 m ètres. La construction, gén éralem en t peu soignée horm is l'atten tio n p o rté e à cette form e circulaire nécessaire à la bo nn e ten u e des parois, est en p ierres sèches m ontées en ap p areil irrégulier.

Sur le tell, un seul de ces puits est suffisam m ent dégagé p o u r p e rm e ttre une d escription partielle. Situé dans la tran ch ée sud-acropole, au sud-est du tell, il était ferm é d 'u ne dalle qui a longtem ps em pêché son rem blaiem ent. Depuis son ouverture, dans les ann ées soixante, p ierres et te rre en ont com blé le fond su r une h a u te u r im possible à préciser. Dans l'état actuel, sa p ro fo n d eu r est de 8,60 m, à p a rtir du hau t de la m argelle (altitude absolue 19,30 m). D'un diam ètre de 0,70 m sous cette m argelle, il s’évase quelque peu vers le bas où, bien arro ndi, il a tte in t 1,13 m. Du hau t vers le bas, le puits se p résen te com m e suit (fig. 2).

Sur 4,50 m, c'est-à-dire su r ce qui c o rresp o n d sans doute à la h a u te u r du tell à cet endroit, il est c o n stru it en pierres sèches, m ontées en ap p areil irrégulier. Le puits est ensuite foré su r 1,65 m dans une form ation sableuse littorale plus ou m oins indurée, c o n ten an t des blocs de sable agrégés, avant de s’enfoncer su r au m oins 1,85 m dans des m arn es qui co n stitu aien t le p lan ch er d ’un p rem ier niveau phréatiqu e. M arnes et form ation litto rale sont creusées, à intervalles réguliers de 0,50 m, d ’encoches disposées sy m étriquem en t dans la paroi et qui p e rm e tta ie n t de re m o n te r aisém ent ju sq u ’à la p artie co n stru ite du puits, où les p ierres irrég u lièrem en t appareillées offraient des prises suffisantes. Le puits s'enfonce dans les m arnes p o u r a tte in d re un deuxièm e niveau p h réatiq u e encore inexploré p o u r l'instant.

- Les cours d'eau : bien qu'ils aient sans d oute peu servi à l'alim en tatio n en eau des m aisons o rdinaires, il est nécessaire de souligner quelques aspects du régim e et des am énag em ents h ydrauliques que l'on peu t tro u v e r sur les cours d'eau. Nous avons déjà m en tio nné le cara c tè re saisonnier et parfois violent des écoulem ents. Les débits peuven t ê tre im p ortan ts, m ais sont toujours lim ités dans le tem ps, restre in ts à la saison hum id e ou aux p ériod es de gros orages estivaux. Ce fait a am ené les hom m es, au cours du 20e siècle, à am én ager su r les cours d ’eau des barrages-ponts, qui p e rm e tte n t d 'a rrê te r les eaux et de c ré e r des rete n u es dans lesquelles il est alors aisé d 'étab lir des pom pages. Nous avons pu o b serv er un tel am énagem ent, au no rd du tell, su r le n a h r Chbayyeb (fig. 3). Le lit du ruisseau est b a rré p ar un « pont » à deux arches, long de 7 m et large de 2 m, co n stru it en blocs éq u arris et bien ap pareillés de ra m leh , et appuyé, au m oins sur la rive nord, contre u ne calcarénite très d u re form ant la berge. Les arches pouvaient ê tre p artiellem en t ferm ées p a r des planches ou des poutrelles qui rete n aie n t les eaux. Cet ouvrage est a u jo u rd ’hui aban d o n n é ; une vieille p o rte a rem placé la boiserie disparue. Ce type d ’am énag em en t a une efficacité certaine. Il est, de plus, assez facile à m ettre en œ uvre dans un pays où la p ierre ne m anque pas. C’étaient p eut-être de tels barrag es qui p e rm e tta ie n t aux h ab itan ts d ’O ugarit de se p ro c u re r plus facilem ent l'eau d ont ils avaient besoin, n o tam m en t en été après les orages. C'est en to ut cas dans ce sens qu'il nous faud ra o rie n te r les rech erch es sur le terrain , m êm e si le pouvoir érosif élevé de ces ruisseaux ren d aléato ire la conservation de tels vestiges.

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L’EAU DANS L’HABITAT 135

Fig. 3. P o n t-barrage s u r le n a h r Chbayyeb.

L 'év a cu a tio n des eaux.

On peut se d é b a rra sse r des eaux usées ou pluviales de diverses façons. La plus sim ple consiste à les d év erser dans les rues, mais, o u tre le m anque d'hygiène d 'u n tel systèm e, il ap p o rte une constan te hum idité, de la boue, et ren d difficile la circulation dans des a rtè re s le plus souvent étro ites et non pavées. En outre, la pente du te rra in fait que certaines m aisons (no tam m en t les m aisons A et B étud iées ici) sont en co n treb as de la rue. Pour pallier ces inconvénients, il fallait évacuer l’eau soit p ar un systèm e d ’égouts, d on t un exem plaire draine les eaux usées de la région du Palais, dans la p artie occidentale de la ville10, soit en creu san t des puisards. C’est cette d e rn iè re solution qui a été très gén éra­ lem ent rete n u e et qui nous in téresse ici.

Avant d ’é tu d ie r leur rép a rtitio n et de d iscu ter du danger de p ollution q u ’ils en g en d raien t du fait de la proxim ité des puits, nous allons décrire les puisards dégagés lors des cam pa­ gnes de 1981 et de 1984 dans les m aisons no rd du ch an tier A.

Les puisards :

- L e puisard 1269 de la m aison A (fig. 4, 5 et 6) se trouve dans un petit réd u it (1039) de form e trapézoïdale (longueur 1,43 m /1,20 m ; largeur 0,92 m /1,07 m), situé sous un escalier placé dans l’angle nord-est de la pièce 1040 ; il est partiellem en t ferm é au sud p a r un m u ret de trois p ierres dressées, qui ne laissait com m e seuil q u ’un espace étroit. De la pièce 1040, on accédait au réd u it de plain-pied, du m oins dans l'état final de la m aison. Comblé, le p uisard d isparaissait alors sous des dalles de pierre et n 'était plus en fonction, ainsi que l'indique un socle de jarre posé à plat , dans l’angle sud-ouest, su r une des dalles co ndam ­ nan t le puisard.

Dans un état antérieu r, ce p etit local servait de latrines et était en grande p artie m asqué par un m uret. Le seuil est constitué d ’un bloc de calcaire (1,15 x 0,50 x 0,70 m) su p p o rta n t le m u ret et placé de façon à être en surplom b de 0,20 m au-dessus du puisard, p o u r réd u ire

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Fig. 4. Le p u is a r d 1269 so u s les la trin es 1039. A gauche, la rue 1038. Vue p rise vers l ’est.

Fig. 5. Le p u is a r d 1269, d é ta il de l ’o u vertu re.

l’espace ouvert. Un ressaut, taillé su r la face no rd de ce bloc, p e rm e tta it de p o ser et de caler une ou plusieurs planches p o u r ferm er le puisard. Ce m ode de cou verture, facile à déplacer, lim itait la p ro p ag atio n des o d eurs et facilitait d'éventuelles vidanges. De form e rec tan g u ­ laire (pour les caractéristiques, voir le ta b le a u 1), le p uisard est co n stru it en p ierres sèches, m o ntées en assises irrégulières. La fouille du rem plissage a révélé, su r to u te la h a u te u r (1,90 m), une te rre très sableuse de tein te grisâtre, co n ten an t de la pierraille éparse, de no m breu x tessons, des fragm ents d ’os et de lam es de silex retouchées. La seule variation

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L’EAU DANS L’HABITAT 137 fscaiier 1056 m u r 10 2 5

coupe A A'

1269

RUE 10 31)

coupe BB'

c o u p e C C ‘

1096

Fig. 6. Les p u is a rd s 1269, 1087 et 1096 (avec les co u p e s de 1269 et 1096).

notable consiste dans la présence, en tre 1,50 m et 1,80 m, de fragm ents de céram iq u e plus nom breux et plus gros, dont un petit vase m ycénien. L 'hom ogénéité du rem plissage et sa tex tu re très sableuse, l'abondance du m atériel, n o tam m en t céram ique, et la couv ertu re u lté rie u re de dalles calcaires sem b leraient in d iq u er un com blem ent volontaire de ce puisard.

Au fond du puisard, où aucun am én ag em ent p articu lier n'est perceptible, la co uleu r de la te rre ne varie guère ; sa cohérence est b eaucoup plus grande. La tex tu re y est plus fine, la terre est m arq u ée de nom breuses traces d'oxydes de fer et de m anganèse, très n ettes égalem ent su r les seuls tessons retro u v és à cette p rofondeur. Sous le niveau de la dern ière

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138 RSO III : Y. CALVET e t B. G EY E R

assise, la terre, fouillée sur 0,20 m, s'est révélée beaucoup plus com pacte, sans d oute colm atée p ar les déchets qui s’y sont accum ulés p en d an t la périod e de fonction nem ent des latrines.

Le p uisard 1269 était rem pli d'un m élange de terre, de fragm ents de céram ique, de déchets divers, d atan t pratiq u em en t tous du m om ent où le puisard ne servait plus à c o n te n ir les eaux usées des latrines, c’est-à-dire après leur désaffection. Le rem plissage a pu se faire en qu atre phases (pl. II, I I I et IV ) :

P hase I : p artie inférieure de - 2,00 m à - 1,85 m, pauvre en m atériel, d atan t d ’une époque où l’on utilisait encore le puisard p o u r évacuer les eaux usées des latrines. On y a trouvé deux fragm ents de silex (une pointe R 84 1232 et un fragm ent de lam e R 84 1233), un jeto n taillé dans un tesson (R 84 1231), deux fragm ents de céram ique locale (R 84 1228 et 1229) et un tesson de vase ferm é M y cén ien I I I B.

P hase 2 : la partie située en tre - 1,85 m et - 1,50 m a été la plus riche en m atériel. Lorsque le p uisard fut désaffecté, il fut rem pli de d é tritu s divers, chronolo giq uem en t assez h om o ­ gènes. Il s’agissait su rto u t de tessons, m ais aussi de pièces d ’outillage lithique et de restes de faune. La céram ique im portée consistait p rin cipalem ent en bols à lait chypriotes (R 84 1195, 1196, 1197 à 1202, 1215) et en fragm ents de vases M y c é n ie n I I I B (R 84 1178, 1203; flacon R 84 1183). La céram ique locale était ab o n d am m en t re p ré s e n té e : bol caréné (R 84 1187), cruches (R 84 1204, 1216, cette d e rn iè re p rése n tan t une bouche pincée), jarres (R 84 1184, 1185, 1186). On y a,tro uv é égalem ent un m urex (R 84 1224), un coquillage ré u ti­ lisé en p en d en tif (R 84 1211), trois petits coquillages percés v o lo ntairem ent (R 84 1227 a,b,c) et une corne d ’anim al, sans doute de chèvre (R 84 1225). Tout ce rem plissage sem ble avoir été effectué en une fois et volontairem ent, lorsque l’on a désaffecté les latrines.

P hase 3 : de - 1,50 m à - 1,05 m, le m atériel est m oins abondant. Les tessons de céram ique im po rtée y sont plus rares : un fragm ent de bol à lait chypriote, pas de tessons m ycéniens. La céram iq ue locale est p résen te sous la form e de fragm ents de jarre (R 84 1175) et d ’un jeto n taillé dans un tesson (R 84 1164). L’outillage lithique se com pose de quelques frag­

m ents de silex et d ’un b roy eur en basalte.

P hase 4 : il s'agit, de -1 ,0 5 m à 0 m d ’une sorte de bourrage, d estiné à o b stru e r c o m p lètem en t le puisard, qui fut alors recou vert de dalles de pierres. La p ro p o rtio n de céram ique chypriote y est plus a b o n d an te : bols à lait (R 84 1018, 1037, 1061), vase B a se -R in g

(R 84 1019), R e d -o n -b la c k chypriote (R 84 1021). La céram ique m ycénienne en est to ta le ­ m ent absente. Les fragm ents de p o terie locale sont relativem ent nom breux, m ais atypi­ ques ; on n o tera seulem ent un jeto n taillé dans un tesson (R 84 1022). L'outillage lithique se com pose p rin cip alem en t de fragm ents de silex (27 pièces). Les restes osseux, qui ne sont pas rares, p o rte n t des traces de découpe.

- Le p uisard 1096 se trouve dans la rue 1038, accolé à la m aison A (fig. 6 et 7). Ce p uisard est creusé dans la rue qui longe au nord le q u a rtie r en cours de fouille11. Il était ferm é p ar une dalle calcaire (R 81 241) qui devait, à l'origine, le couvrir dans sa to talité (pl. I b). Cette dalle, retrouv ée brisée (1,05 m x 0,86 m x 0,19 m), rep osait sur une canalisation m onoli­ thique (1107) qui, trav ersan t le m u r 1024, provient de la pièce 1041 et débouche dans le puisard. Dans la pièce, une cuve cylindrique (diam ètre e x térieu r 0,69 m) et un sol fait de m o rtie r étanche, am énagé à proxim ité de la canalisation, tém oig nen t de l’utilisation de l’eau. Le puisard servait donc à l’évacuation des eaux usées du bâtim ent, m ais captait égalem ent une partie des eaux de ruissellem ent de la rue et co n trib u ait ainsi à son assai­ nissem ent. Il est con stru it en pierres sèches, appareillées irrég u lièrem ent. Sa form e est appro xim ativ em ent celle d’un fer à cheval. Il est appuyé co ntre le m u r 1024 et ses fond a­ tions qui lui servent de paroi. Son rem plissage ne p résen te pas la m êm e hom ogénéité que

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L’EAU DANS L'HABITAT 139

CARACTÉRISTIQUES DES PUISARDS ET SILOS

FORME DE PROFONDEUR

DIMENSIONS EN METRES

LOCUS Ouverture fond COUVERTURE

L’OUVERTURE EN METRES

NS EO NS EO

puisard 1096 fer à cheval 1,75 1,05 1,1 0,85 ? dalle calcaire

(n° R 81 241)

puisard 1080 ± rectangulaire 1,20 1,15 0,95 1,10 0,85 dalle calcaire

(n° R 81 1240)

puisard 1269 rectangulaire 1,90 0,50 0,80 1,05 0,75 bois ?

silo 1270 semi-circulaire 1,50 0,60 0,95 0,50 0,85 bois ?

silo 1279 ± rectangulaire 1,00 0,55 0,70 0,55 0,70 bois ?

puisard 1087 semi-circulaire non fouillé 0,60 0,88 ? ? p

TABLEAU 1

dans le cas p récéd en t et s’est fait au m oins en deux phases (voir ci-dessous). Ju sq u ’à - 1,10 m, la terre, beige clair, est sablo-lim oneuse et contien t de rares tessons rép artis dans la masse. Les pierres, rares ju sq u ’à - 0,80 m, sont su rto u t n o m breuses en tre - 0,90 m et - 1,10 m, où elles form ent un niveau discontinu. A - 1,10 m, les pierres disp araissent p o u r faire place à une terre ap p arem m en t uniform e et accusant une légère concavité vers le cen tre du puisard. Il y a là un p rem ier niveau c o rre sp o n d an t peut-être à une réfection ou à une rem ise en fonction du puisard. Ju sq u ’au fond, à - 1,75 m, la fouille, effectuée su r les deux tiers de la surface, n ’a révélé q u ’une te rre sableuse, hom ogène, ne co n ten an t que de rares p ierres et tessons. Ce type de puisard, servant à recu eillir à la fois les eaux usées d ’une h ab itatio n et les eaux de ruissellem ent de l’extérieur, se trouve fréqu em m en t dans les rues d ’O ugarit : on en a un exem ple caractéristique le long de la m aison dite « de R apanou »12, dans la rue qui longe ce b âtim en t à l’ouest. Un vaste p uisard a p p a rtie n t à une installation légèrem ent différente. Il sert à recueillir les eaux usées de la pièce 226 du Palais su d 13. Là aussi, com m e dans le cas du p uisard 1096, il est situé à l’e x térieu r du bâtim ent, contre le m ur, et il reçoit les eaux usées p ar l’in term éd iaire d ’une canalisation p assant à travers le m u r ; m ais cette canalisation se déverse à un m ètre de h a u te u r et in te rd it donc to u t systèm e de co u vertu re de ce puisard. Ces conditions d ’évacuation des eaux ren d aien t vraisem blab lem en t inutilisable to u t cet espace.

Le m atériel trouvé dans le pu isard 1096 (pl. IV ) tém oigne de plusieurs phases, c o rre s­ p o n d an t vraisem blablem en t à des u tilisations successives de cet am énagem ent, peut-être entreco u p ées de périodes de curage :

P hase 0 : de - 2,00 m à - 1,75 m, donc sous la co n structio n p ro p re m e n t dite, une couche de te rre sans aucun m atériel de quelque o rd re que ce soit co nstitue le fond du puisard, c’est-à- dire la m atière filtrante m êlée aux d ép ôts laissés p ar les eaux usées après leu r infiltration dans la te rre (niveau archéologique non rem anié).

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140 RSO III : Y. CALVET et B. G EY E R

Fig. 7. Le p u is a r d 1096, d a n s la rue 1038 (à gauche, brisée, la da lle de c o u v e rtu re R 81 241). Vue p rise ve rs le sud.

P hase 1 : de - 1,75 m à - 1,10 m, on trouve une phase d ’utilisation relativ em en t intense du puisard, avec un rem plissage h abitu el à ce type d ’am énagem ent. Les tessons n'y sont pas très n om breux : il s’agit presque u n iq u em en t de céram ique locale (P la in -w h ite syrien) : fragm ents de vases ouverts ou ferm és (R 84 1143 et 1146). La seule im p o rta tio n était, semble-t-il, un fragm ent de bol m onochrom e chypriote. Il faut n o te r aussi quelques fragm ents de silex et des déchets osseux.

P hase 2 : de - 1,10 m à 0 m, cette phase rep ré sen te a p p a re m m e n t l’ab an d on du pu isard à la suite d ’un m anque d ’en tre tie n ou de curage. Il est p rob ab le que des p ierres sont venues l’o b stru e r en partie, tom bées des reb o rd s ou de ru ines voisines ; à p a rtir de ce m om ent, seule la p artie su p érieu re du p uisard pouvait recueillir l’eau et il est p rob able q u ’il devait se rem p lir très vite, puisque sa capacité avait dim inué de m oitié p a r ra p p o rt à l’origine. Les tessons trouvés dans le rem plissage de cette phase sont très rares ; à l’excep­ tion d ’un fragm ent de bol à lait chypriote (R 84 1037), il ne s’agit que de céram ique locale, de fragm ents de ja rre et d'un jeto n taillé dans un tesson (R 84 1003).

- Le pu isard 1087 de la m aison A (fig. 6, en haut, et 8) est situé dans l’angle n ord-ouest de la pièce 1041, à 0,45 m en co n treb as du seuil o u vrant su r la rue 1038. De form e semi- circulaire (p our les caractéristiques, voir ta b lea u 1), il sem ble s'ap p u y er con tre les fondations du seuil. Le dégagem ent des deux assises su p érieu res a p erm is de c o n sta ter que plusieurs des p ierres du puisard étaien t im briquées dans les assises inférieu res du seuil, alors qu'elles ne sont q u'apposées co ntre le m u r ouest 1003. De d iam ètre à peu près équ i­ valent à la largeu r du seuil, le puisard sem ble bien être en relation directe avec celui-ci. Une fouille et une étu d e du m atériel qu'il co n tient sero n t nécessaires p o u r p réciser sa fonction. N otons que d ’au tre s cas sem blables de p uisard s devant des seuils sont connus à O ugarit :

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L’EAU DANS L’HABITAT 141

Fig. 9. Le p u is a r d 1080 et sa d a lle de c o u v e rtu re R 81 1240. Vue p rise vers l ’est.

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142 RSO III : Y. CALVET et B. G EY E R

Fig. 10. Le puisard 1080.

pièce 52 du Palais Royal d ’O u g arit14 p a r exem ple. Ils peuvent servir à recueillir des eaux de ru issellem en t venues de rues ou de cours, lorsque le seuil est en contrebas.

- L e puisard 1080 se trouve dans la pièce (ou c o u r? ) 1064 de la m aison C (fig. 9 et 10).

Situé dans l'angle sud-est de cette espace, ce puisard est placé sous une fenêtre in té rie u re ouv rant su r la pièce 1049, dans laquelle ont été trouvées de no m b reu ses ja rre s fichées dans le sol, m ais aussi près d ’une cuve de p ierre située à l’en trée de la pièce 1066. Une dalle de

14. Nous rep ren o n s p o u r le Palais royal d ’O ugarit la n u m éro tatio n des pièces selon le plan de H. Kuss, paru dans plusieurs publications, notam

-m ent Ugaritica IV, p.26 et 28 et plan d épliant I et

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L’EAU DANS L’HABITAT 143

couverture (R 81 240), légèrem ent concave (1,30 m x 1,10 m x 1,15 m) et percée en son cen tre d ’un tro u (diam ètre 0,14 m), ferm ait le p uisard { p l .I c ) . La construction, grossiè­ rem ent rectan gulaire (pour les caractéristiques, voir ta b le a u 1) et réalisée en pierres sèches m ontées en assises irrégulières, est to talem en t in d ép en d an te des m u rs et de leurs fonda­ tions. En 1981, la fouille avait été a rrê té e à - 1,15 m su r une te rre « hom ogène ». La rep rise du dégagem ent en o ctobre 1984 a to u t d ’ab o rd révélé une ép aisseu r de q u atre à cinq centim ètres de colluvions a p p o rtées là p ar ruissellem ent depuis 1981 et qui form aient un véritable « mille-feuilles », tém oin des diverses phases pluvieuses. A la p ro fo n d eu r de - 1,20 m, la te rre est m arquée p ar des oxydes de fer et de m anganèse qui tach en t les galets et les tessons. De - 1,20 m à - 1,60 m, la fouille, poursuivie su r les deux tiers de la surface, a d ém o n tré que l'assise de pierres in férieure s'appuyait sur des niveaux archéologiques plus anciens et que les traces d'oxydes étaien t no m breuses su r les quinze prem iers centim ètres. Cette couche est p a r ailleurs noircie p a r des m atières organiques et sem ble colm atée. La terre, n e tte m e n t plus argileuse que celle des rem plissages, sem ble jo u e r le rôle de filtre non intentionnel, m ais néanm oins efficace. Nous reviendrons su r ce sujet à prop os des essais de vitesse d'infiltration.

Le puisard 1080 a fourni trè s peu de m atériel (R 81 226 à 232); il ne s'agit que de fragm ents céram iques peu significatifs dans l'ensem ble : b ords d 'assiettes locales, m ais aussi trois tessons chypriotes (un fragm ent de cruche B a se-rin g II, un bol à lait, et un tesson de vase W h ite-p a in ted ). Dans le fond, sous - 1,20 m, les tessons et les fragm ents d ’outils en p ierre tachés d ’oxyde (voir plus haut) sont to u t aussi rares que dans la couche su p érieure (R 84 1244 à 1253) ; ce n ’est que de la céram ique locale du Bronze récent, à l’exception d ’un fragm ent de ja rre à d écor peigné d a ta n t du B ronze ancien.

- Les silos 1270 et 1279 de la m aison B, pièce 1062 {fig. 11 et 12) : l’am én agem en t 1270, que nous pensions être un puisard, s’est révélé, en cours de fouille, être un silo double (1270 et 1279), co nstru it d ’un seul tenant, com m e l’indiquent les pierres im briquées de la paroi com m une. Am énagés dans l'angle sud-ouest d'une pièce (1062) subdivisée p o u r l'occasion p ar des m u rets peu fondés, ces silos (pour les caractéristiques, voir ta b lea u 1) ne co m p o r­ taien t pas de co uverture lors de leu r dégagem ent. On peu t p en ser qu'ils étaien t sim plem ent ferm és p ar des planches. Com m e les puisards, ils sont m ontés en p ierres sèches ap p areil­ lées ici très irrégulièrem ent. La co nstruction est très peu soignée en com paraison des puisards. Les q u aran te cen tim ètres in férieurs de chaque silo p rése n ten t de n o m breux m anques de pierres, ce qui au rait risqué de p rovoquer glissem ent ou effondrem ent si ces am énagem ents avaient été destinés à recevoir des eaux usées. L'hypothèse des silos est égalem ent confirm ée p ar l'existence, en tre les deux fosses, d'une com m unication sous form e d'une o u v ertu re rectangulaire (0,40 m x 0,30 m), pratiq u ée dans la paroi com m une ; deux dalles de chant so utienn en t un linteau ; les trois élém ents sont en calcaire. Enfin, plusieurs fragm ents d'un enduit très épais (R 84 1106, 1267, 1268, 1269 et 1277), retrou v és dans les fonds des silos p o u rraien t confirm er a p p a re m m e n t cette d estination, m êm e si les parois n'en g ard en t pas de traces a u jo u rd ’hui. Il faut aussi signaler que les couches arch éo ­ logiques com posant le fond de ces silos ne p résen taien t p ratiq u em en t pas de traces d ’oxydes, com m e on en trouve souvent dans les puisards. Le silo 1270, de form e semi- circulaire, est am énagé sous le petit m u r 1022 et est donc an térieu r, sans d o ute de peu, à celui-ci. Le rem plissage, hom ogène su r to u te la h a u te u r (1,50 m), était constitué d ’une terre très sableuse, beige à b ru n clair, c o n ten an t très peu de pierres et quelques graviers et tessons épars. Le silo 1279, profond seulem en t d ’un m ètre, était com blé de la m êm e façon.

Le m atériel d écouvert dans les silos 1270 et 1279 n ’est pas ex trêm em en t ab o n d a n t {pl. V et VI) ; il n'est pas possible de d iscern er une quelconque stratig rap h ie dans le rem plissage, hom ogène de h au t en bas. Il est p rob able que les deux silos ont été com blés relativ em en t vite, après abandon. La p lu p art des fragm ents de céram ique et les objets viennent du silo 1270, le plus g rand des deux. Dans ce silo, la céram ique locale est rep ré sen té e p ar des

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144 R SO III : Y. CALVET et B. G EY E R

2

1

Fig. 11. L es silo s 1270 et 1279. Vue p rise du m u r 1022.

(État 1984 ; voir état 1980 :

supra, Yon, Lombard, Renisio, fig. 52).

c o u p e DD'

Fig. 12. Les s ilo s 1270 et 1279

form es bien connues de P la in -w h ite sy rien : vases ouverts (R 84 1070, 1071, 1073 et 1074), une lam pe-coupelle (R 84 1084), diverses assiettes (R 84 1111 + 1128 + 1112, 1114, 1115 et 1116), un fragm ent de cruche (R 84 1109) et un vase com posite dit C u p -a n d -sa u cer

(R 84 1240). On y trouve égalem ent de la céram ique im p ortée de Chypre : bol m onochrom e (R 84 1075), bols à lait (R 84 1087 + 1099, R 84 1120 et 1121, R 84 1132) ; la céram ique m ycé­ nienne est égalem ent présen te (classe III B), m ais sous form e de petits fragm ents : coupelle (R 84 1102), petits vases ferm és (R 84 1103 et 1134), goulot de vase à é trie r (R 84 1123). Il faut n o te r aussi la présence d ’une perle en faïence bleue (R 84 1094 = PO 34), de deux galets utilisés com m e outils (R 84 1095 et 1107) et de quelques fragm ents de silex. Dans le silo

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L’EAU DANS L’HABITAT 145

1279, le m êm e type de m atériel est attesté, avec de la céram ique locale: ja rre à décor peigné (R 84 1263 et 1274), jarre com m erciale (R 84 1266), vase syrien (R 84 1273) et lampe- coupelle (R 84 1276); de la céram ique c h y p rio te: bols à lait (R 84 1264 a et b, 1275), fragm ent de vase B a se-rin g (R 84 1265). Il y avait là aussi quelques p etits déchets osseux et lithiques (silex).

Signalons p o u r m ém oire deux au tres am énagem ents analogues, le silo 1069 (exploré seulem ent en 1986: voir su p ra Yon, Lom bard, Renisio, p. 45 et note 19), et la fosse 1076 dont le m auvais état de conservation ne p erm et pas de p réciser la fonction de façon certaine.

L es risq u es de p o llu tio n .

La proxim ité des puisards d'une part, des puits, silos ou citern es d ’au tre p art pouvait, et a dû, dans certains cas, pro v o qu er une pollution, que ce soit p ar co ntam in ation des eaux potables ou p ar des ém anations pestilentielles. R appelons, en p rem ier lieu, l’estim ation d ’au m oins 8 à 10 m ètres que nous avons proposée p o u r la p ro fo n d eu r des puits, et qui doit co rresp o n d re à peu près à la p ro fo n d eu r m oyenne de la nap pe p h réatiq u e su p érieu re sous le ch an tier A. Cela signifie, en théorie, une épaisseur sensiblem ent équivalente de couches archéologiques qui pouvaient filtrer les eaux usées avant q u ’elles ne rejoignent la nappe, à la condition toutefois que ces couches ne soient pas tro p perm éables. En effet, les fouilles en trep rises su r une p ro fo n d eu r de vingt à q u aran te cen tim ètres dans le fond des puisards ont d ém o n tré q u ’il n ’existe aucune installation p articulière de filtrage sous ces d ern iers et q u ’ils étaient co n stru its d irectem en t su r des niveaux archéologiques plus anciens et non p ertu rbés. Il devenait alors indispensable de d é te rm in e r le degré de p erm éab ilité des terres qui recevaient q u o tid ienn em en t des eaux usées. Nous avons donc procédé, dans les puisards et silos fouillés en 1984, à des m esures d ’infiltration des eaux (voir ta b lea u 2). Ces m esures doivent être considérées com m e une p rem ière ten tative d ’estim ation des p erm é a ­ bilités ; les cas étudiés sont tro p peu no m breux et la m éth ode em ployée tro p ru d im en taire p o u r p ré te n d re à tro p d ’extrapolations. Ces résu ltats sont toutefois suffisam m ent concor­ dants p o u r p e rm e ttre certaines constatations.

Les p rem ières m esures (ta b lea u 2, n° 1, 5 et 7) ont été réalisées su r les te rre s de rem plissage. Sur sol sec, elles ont donné les résu ltats de vitesse d ’infiltration les plus élevés (0,41 à 0,51 cm p ar m in u te); su r sol « saturé », les valeurs, bien q u ’inférieures de m oitié environ, resten t fortes (0,21 à 0,26 cm p ar m inute). Ces terres, jetées dans les p uisards et les ayant peu à peu com blés, ne sont pas tassées ; elles sont souvent très sableuses et relati­ vem ent hétérogènes. Elles laissent « filer » l’eau et n ’au ra ien t donc eu q u ’un pouvoir filtrant limité.

Il en va to ut a u tre m e n t po u r les terres qui co n stituen t le fond non rem anié des puisards et des silos, où l’on attein t des couches archéologiques plus anciennes et non p e rtu rb ée s lors de la construction de ces am énagem ents. Les m esures de vitesse d ’infiltration su r sol sec (ta b lea u 2, n° 2, 3, 6 et 8) sont toujours inférieures (0,14 à 0,32 cm p ar m inute) à celles, équivalentes, qui sont réalisées dans les rem plissages. Mais ce sont su rto u t les m esures sur sol saturé qui, n ettem en t plus faibles (0,06 à 0,16 cm p ar m inute), indiq uen t une infiltration lente, très favorable au dépôt des m atières en suspension. Il y a donc bien là un effet de filtre n atu rel qui peut expliquer l’absence de tou t am én ag em en t p articu lier au fond des puisards. Une m esure (n° 4) réalisée dans le puisard 1080 à q u a ra n te cen tim ètres sous le niveau de la d ern ière assise confirm e, avec une vitesse de 0,09 cm p ar m inute, la len te u r de l’infiltration, donc le bien-fondé de n o tre constatation. N otons que les capacités d ’infiltra­ tion, rap p o rtée s à la surface totale du fond des puisards, font a p p a ra ître des chiffres proches du litre p ar m inute (0,81 à 0,99 1 par m inute) ; cela suffit à éviter to u t d éb o rd e m en t dans des puisard s pouvant co n ten ir plus d ’un m ètre cube. A titre de com paraison, une

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146 RSO III : Y. CALVET e t B. G EY E R VITESSE D ’INFILTRATION LOCUS Carré Profondeur en mètres V ol. O en litre SUR SOL « H. T. en cm en mn SEC» V.I. cm/mn SUR SOL H. T. en cm en mn «SATURÉ» V.I. C J.T. cm /m n 1/mn 1 puisard 1096 A2d - 1,10 1,5 15,0 37 0,41 15,0 57 0,26 2 puisard 1096 A2d - 1,80 1,5 11,3 65 0,17 7,1 81 0,09 0,81 3 puisard 1080 A ie - 1,20 1,5 14,0 100 0,14 15,0 150 0,10 0,95

4 puisard 1080 A ie - 1,60 1,5 sol trop humide 12,7 140 0,09 0,86

5 puisard 1269 A2d -1,05 1,5 16,3 32 0,51 14,3 55 0,26 6 puisard 1269 A2d -2,05 1,5 10,5 45 0,23 13,8 84 0,16 0,99 7 silo 1270 A2c - 1,20 1,5 15,2 32 0,47 10,6 50 0,21 8 silo 1270 A2c - 1,45 1,5 12,2 38 0,32 8,8 140 0,06 9 collecteur du palais sol 1,5 10,0 70 0,14 7,8 402 0,02

Vol. O : Volume d’eau dans le cylindre en début d’expérience: fixé à 1,5 litre pour avoir, au départ, une colonne d ’eau et une pression au sol équivalentes dans chaque cas.

H. : Hauteur d’eau infiltrée durant un temps T, exprimée en centimètres. T. : Temps de l’expérience, exprimé en minutes.

V.I. : Vitesse d ’infiltration en fonction de H. et de T., exprimée en cm / mn.

C.I.T. : Capacité théorique d’infiltration sur la totalité du fond du puisard, exprimée en litre/mn.

Ces essais de vitesse d'infiltration (V.I.) on t été effectués en octobre 1984, à l’aide d 'un cylindre m étallique de 25 cm de haut et d ’un d iam ètre in tern e de 10,56 cm, b iseauté à la base de sa face externe su r 1 cm de haut. Le cylindre était enfoncé en te rre d ’environ 6 cm, avant que l’on y verse 1,5 1 d ’eau. Les essais 1, 5 et 7 ont été réalisés dans les te rre s de rem plissage des puisards et des silos ; les essais 2, 3, 6 et 8 ont été réalisés su r le fond des puisards et silos. L’essai 4 donne un exem ple d ’infiltration dans le m atériel en place, sous un puisard. L’essai 9 sert de com paraison, dans le cas d ’un sol argileux rap p o rté. Dans chaque cas, une prem ière m esure a été réalisée su r sol « sec », c'est-à-dire dans l’é ta t où la fouille l'avait dégagé. La deuxièm e m esure, su r sol « satu ré », a été faite, au m êm e niveau ap rès que 20 litres d 'eau eu ren t été déversés et absorbés, créan t ainsi un état de « p seu d o ­ satu ratio n » du sol, plus proches des conditions d ’utilisation norm ales.

TABLEAU 2 E x p é rim e n ta tio n B. G eyer

m esure (n° 9) a été réalisée su r le fond du collecteur principal de la région du Palais ro y al15, dans une te rre argileuse b ru n âtre, tassée et sans doute rap p o rtée. Le chiffre de vitesse d ’infiltration o b ten u (0,02 cm p ar m inute su r sol saturé) caractérise un lieu où les eaux usées d evaient co u ler p o u r être évacuées le plus rap id em en t et le plus efficacem ent possible et où une étan chéité m axim ale du p lan ch er du co llecteur était donc nécessaire.

On p eu t conclure, à la suite des do nnées dont nous disposons, à un risque trè s faible de pollu tion de la nap p e p h réatiq u e p a r infiltration à trav ers les couches archéologiques. Il reste c e p en d an t que certains puisards se tro u v en t à proxim ité de puits ou de silos et que des dangers de contam in atio n en résultent. Ce risque est déjà re stre in t p a r l’effet de filtre

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L’EAU DANS L’HABITAT 147

m entionné ci-dessus et p ar le fait q u ’une infiltration se p ro d u it de m anière préférentielle vers le bas, créan t à p a rtir du point ou de la surface d ’infiltration un cône hum ide où l’extension verticale l’em po rte très g én éralem en t sur l’extension latérale. Toutefois, l'h été­ rogénéité du m atériel, l’existence dans les couches archéologiques de niveaux plus ou m oins im perm éables (par exem ple des sols en terre battu e) peuvent c ré e r localem ent des conditions de ruissellem ent p référen tiel sub-horizontal ou oblique. Les risques de pollution p ar proxim ité sont alors réels, m ais d ’a u ta n t plus restre in ts q u ’un puits et un p uisard seront plus éloignés l’un de l’autre. La localisation des différentes stru c tu re s so u te rra in es les unes p ar rap p o rt aux au tres prend ici to u te son im portance.

R é p a rtitio n des s tru c tu re s so u te rra in e s d a n s u n e n se m b le d o n n é.

Dans l’îlot de m aisons qui nous intéresse (fig. 1), ou tre une tom be qui pose un problèm e de voisinage particu lier et qui n ’est pas n o tre propos ici (tom be 1068)16, coexistent un puits (1071), qu atre puisards (1080, 1096, 1087 et 1269) dont un à usage de latrines (1269), un silo double (1270 et 1279), un silo sim ple (1069) ainsi q u ’une stru c tu re (1076) à usage non défini (puisard ou silo ?). Le prem ier point rem arq u ab le tient à l’éloignem ent existant en tre le puits et les latrines (distance : 13 m), ce qui exclut p ratiq u em e n t to u t risque d ’interféren ce en tre eux, donc de pollution. Soulignons que les réd u its sous les escaliers ont parfois été choisis p o u r am énag er des lieux d ’aisance, m ais que l’espace situé sous l’escalier 1070, à m oins de trois m ètres du puits 1071 ne com p orte pas de latrines, sans doute en raison m êm e de cette proxim ité (fig. 13). Ce qui est vrai po u r cet îlot ne l’est cep en d an t pas pou r d ’au tres m aisons d ’Ougarit, com m e p ar exem ple la m aison « de RaSapabou » où le puits se trouve p ratiq u em en t contre le p uisard qui sert à évacuer les eaux usées de l’espace dallé et à cinq m ètres seulem ent du puisard situé sous les la trin e s17. A ce propos, l’exem ple de l’îlot VI de la tran ch ée ville-sud18 est significatif. On y trouve deux puits ; l’un est dans la pièce 6, l’au tre au bord de la co u r 10. Mais l’état actuel du bâtim ent, fouillé il y a déjà longtem ps, en 1959 et 1960, et la d étério ratio n des ruines depuis cette époque n ’ont pas perm is d é voir s’il existait des puisards. Pourtant, deux canalisations, qui ont pu être déplacées depuis (l’une dans la pièce 1, l’au tre dans la pièce 12), laissent su p p o ser q u ’il en existait dans la m aison. Quoi q u ’il en soit, ces canalisations se trouvent a u jo u rd ’hui à une resp ectable distance de chacun des puits (8 à 9 m ètres dans les deux cas). Une partie des eaux usées était évacuée dans la rue, à p a rtir de la pièce 6. En revanche, la tom be située dans la pièce 13 de cet îlot VI se trouve près du puits de la cour 10 (m oins de 3 m ètres) et les risques d ’infiltration polluante ne sont pas à exclure.

Si l’on en revient m ain ten an t au secteu r étudié ici, on peut ajo u ter la rem arq u e suivante : à distance égalem ent des latrines, m ais aussi des au tres puisards, sont les silos 1270 et 1279 (7 m environ). En fait, cette distance p o u rra it m êm e être m oindre : les silos étan t peu profonds, les risques de contam in ation p ar diffusion oblique sont très réd u its et une diffu­ sion latérale, peu courante, ne se conçoit guère sur plus de quelques m ètres. Seuls des p uisards se retro u v en t à proxim ité im m édiate des latrines, ce qui ne p résen te pas b eaucoup d ’inconvénients, leu r fonction étan t d ’évacuer des eaux usées.

16. Voir dans ce m êm e volum e la con trib u tio n de 17. Calvet, 1981, p.39, fig.l.

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148 R SO III : Y. CALVET e t B. G EY E R

Fig. 13. L ’escalier 1070 et le puits 1071 (pièce 1067 de la maison B). Vue prise vers l’est

Les conditions géographiques et hydrologiques du littoral m éd ite rra n é e n de la Syrie sont relativ em en t co ntraignantes. Si l'ap pro visionnem ent en eau, grâce aux cours d ’eau et aux puits, est facilem ent assuré d u ra n t la saison hum ide et au d éb u t de la saison sèche, il n ’en va pas de m êm e au co u ran t de l’été et to u t p articu liè re m e n t en ao û t et en septem b re. Les ruisseaux sont alors à sec et la nappe p h réatiq u e superficielle, trè s basse, ne suffit plus aux besoins cum ulés de l'irrigation et des h abitants. La situation devait être assez com p arab le au B ronze récent. Des conditions édaphiq ues plus favorables, liées à une m oind re d é g ra d a ­ tion des m ilieux naturels, lim itaient alors la sécheresse biologique sans toutefois créer, d ans une am biance m éd iterran éen n e bien m arquée, des conditions hydrauliques idéales.

Le p roblèm e de l’évacuation des eaux usées à O ugarit a été trè s largem en t résolu p a r le creu sem en t de nom breu x puisards. La proxim ité de ces d ern iers avec les puits laisse to u te ­ fois su p p o ser des risques im p o rtan ts de pollution. Il sem blerait que ce d ang er ait été écarté grâce à l’infiltration lente des eaux usées, p e rm e tta n t aux couches archéologiques plus an ciennes de jo u e r le rôle de filtre n aturel. Ce pouvoir é p u ra te u r des te rre s co n stitu an t le sol n ’est toutefois réellem en t efficace que si puits et puisard s (et p articu liè re m e n t ceux qui sont liés à des latrines) sont suffisam m ent éloignés les uns des autres. La rép a rtitio n des stru c tu re s so u te rra in es dans l’îlot pris en exem ple sem ble aller dans ce sens et p e rm e t de su p p o ser non seulem en t une réflexion préalable à l'installation de to u te stru c tu re de ce type au sein d ’une m aison, m ais aussi une co n certatio n en tre les h ab itan ts de m aisons contiguës p o u r éviter to u te proxim ité fâcheuse. De tels risques ont pu a m e n e r à co n d am n er certain s puits ou à m ettre hors service des puisards qui n ’assu raien t pas c o rre c te m e n t leu r fonction. Les h ab itan ts d ’O ugarit devaient veiller p a rticu lièrem en t à la bonne m arche de tous ces systèm es, sous peine de graves dangers, p ar un e n tre tie n régulier.

Pour être véritab lem en t p rob ante, n o tre analyse devra p o rte r su r un espace plus vaste, p ar exem ple la to talité d ’un quartier. Les solutions peuvent en effet être différentes, d é p e n d an t de conditions spécifiques : d ensité de l’habitat, utilisation d ’eau en plus grande qu an tité dans certain s b âtim ents (palais, ateliers, lavoirs...).

Y. C. : ER 309, C.N.R.S., Lyon, B. G. : Ï.F.A.P.O., Damas.

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L’EAU DANS L’HABITAT 149

OUVRAGES CITÉS

CALLOT (O.), 1983, R a s S h am ra - O u g a rit /, Une m a iso n à O ugarit, Éd. Recherche sur les civi­ lisations, Mémoire n°28, Paris.

CALVET (Y.), 1981, « Installations hydrauliques d’Ugarit », L ’h o m m e et l ’eau en M éd iterra n ée et au P roche O rien t I, Travaux de la Maison de l'Orient n°2, Lyon.

MONCHAMBERT (J.-Y.), 1983, « La céramique de fabrication locale à Ougarit à la fin du Bronze récent : quelques exemples », S yria

60, p.25-45.

PRU II = C. VIROLLEAUD, Le P alais royal d ’Uga­ rit, II, Textes alphabétiques des archives est, ouest et centrales, Paris, 1957.

PRU V = C. VIROLLEAUD, Le P alais royal d ’Uga­ rit, V, Textes alphabétiques des archives sud, sud-ouest et du Petit Palais, Paris, 1965. SAADÉ (G.), 1979, O ugarit, m étro p o le c a n a n éen ­

ne, Beyrouth.

TRABOULSI (M.), 1981, Le c lim a t de la S y r ie : ex em p le de d ég ra d a tio n vers l ’a rid e du c lim a t m éd iterra n éen , thèse de 3e cycle, Lyon.

U garitica IV, par C.F.A. SCHAEFFER, Paris, 1962.

U garitica V, par J. NOUGAYROL, E. LAROCHE, C. VIROLLEAUD et C.F.A. SCHAEFFER, Pa­ ris, 1968.

YON (M.), CAUBET (A.), MALLET (J.), 1982, « Ras Shamra-Ougarit : 38e, 39e et 40e campa­ gnes (1978, 1979 et 1980) », S yria 59, p.169-197.

YON (M.), CAUBET (A.), MALLET (J.), LOM­ BARD (P.), DOUMET (C.) et DESFARGES (P.), « Fouilles de Ras Shamra-Ougarit 1981-1983 (41e, 42e et 43e campagnes) », Syria

60, 1983, p.201-224.

YON (M.), à paraître, « Aspects de la civilisation urbaine d’Ougarit », C o llo q u e M ari E bla O u ­ g a rit (Rom e, 1984).

(23)

150 RSO III : Y. CALVET et B. G EY E R

PLANCHES

N.B. Les tessons et objets illustrés ici constituent un échantillonnage du matériel découvert dans les puisards ou silos étudiés plus haut et ils ne représentent pas la totalité du matériel qui y fut trouvé. La place apparemment privilégiée occupée par la céramique importée vient de ce qu’elle est, dans l’état actuel de nos connaissances, plus significative bien souvent que la céramique locale. Les tessons de céramique locale (fragments de panse de jarres, de cruches, d’assiettes...) sont en effet les plus nombreux en proportion, mais en règle générale, ils restent peu interprétables19.

Les figures 1 et 2 et la carte o n t été m ises au net p a r Y ves M o n tm essin ; les figures 6, 10 et 12 o n t été réalisées p a r M argo R e n isio ; les d essin s d es p la n c h e s I à VI s o n t de Jean -P ierre Lange. N o u s te n o n s à les rem ercie r ici p o u r le u r co lla b o ra tio n .

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L'EAU DANS L'HABITAT 151 □

/

/ / / / g a : m argelle du puits 1071. b : dalle du puisard 1096. c : dalle du puisard 1080. PLANCHE I E c h . 1/20

(25)

152 RSO III : Y. CALVET et B. G EY ER

a : R 84 1197, bol à lait chypriote. Engobe gris ; p ein tu re brune. b : R 84 1196, bol à lait chypriote. Engobe crèm e ; pein tu re brun-rouge.

c-e: R 84 1183, flacon m ycénien (Mvc. III B). Panse g lo b u laire; petite base légèrem ent saillante. Décor de bandes

horizontales en séries ; sur l’épaule, papyrus stylisés.

PLAN CHE II

(26)

L'EAU DANS L’HABITAT 153

a : R 84 1187, lèvre de bol caréné. Plain-white syrien.

b : R 84 1204, col de cruche syrienne à une anse. A rête à h a u te u r de l’attache su p érieu re de l’anse. c : R 84 1216, haut de cruche à bouche pincée. Plain-white syrien. Anse de la lèvre à l’épaule. d : R 84 1184, fond de jarre. Base annulaire en b o u rrelet arrondi.

e : R 84 1185, fond de vase fermé. Base annulaire aplatie.

/: R 84 1186, col et épaule de jarre-cratère. Col court à lèvre é ta lé e ; anse verticale. Plain-white syrien. D iam ètre indéterm iné.

g : R 84 1224, m urex (L. 5,5 cm).

h : R 84 1227, trois coquillages percés, p o u r une p aru re (L. 1,8 cm),

z : R 84 1211 et 1223, deux coquillages, dont l’un est percé, p o u r une p aru re (L. 3 cm). / : R 84 1225, corne (de chèvre ?), avec deux entailles à la base (L. 14 cm).

PLANCHE III

(27)

154 RSO III : Y. CALVET et B. G EY E R

fi - 180 mm.

a : R 84 1175, fond de jarre, légèrem ent saillant. A l’intérieur, traces de feu et concrétions. b : R 84 1003, jeto n taillé dans un tesson. Pâte grise locale (diam. 3,5cm).

c : R 84 1164, jeto n taillé dans un tesson. Pâte orange locale (diam. 2,5 à 3 cm). d: R 84 1022, jeton taillé dans un tesson de ja rre syrienne (diam. 3 cm).

e : R 84 1018, fragm ent de bol à lait chypriote. White-slip I. Pâte grise, engobe blanc crèm e épais ; pein tu re m arron

cuisson d u re (h. 3 cm).

f: R 84 1061, fragm ent de bol à lait chypriote. Pâte grise fine ; engobe blanc épais et p ein tu re brun-noir. g : le mêm e.

h : R 84 1021, fragm ent de bol Red-on-black chypriote. Décor de bandes horizontales. i : R 84 1143, pied co u rt de vase ouvert. Plain-white syrien.

j : R 84 1146, épaule et col de jarre très fermée, à lèvre m oulurée. Plain-white syrien. k : R 84 1037, fragm ent de bol à lait chypriote. Engobe blanc crèm e épais ; p ein tu re m arron.

PLAN CHE IV

(m a té rie l d u p u is a rd 1269, p h a se s 3 et 4 : a, b, d, e, /, g, h ; et d u p u is a rd 1096 : c, i, j, k)

(28)

L'EAU DANS L’HABITAT 155

a : R 84 1106, fragm ent d ’enduit, co n ten an t de petits galets de m odule assez régulier (diam. 1 cm), pris dans un

m o rtier (épaisseur 3 cm).

b : R 84 1084, reb o rd de lam pe-coupelle syrienne ; traces de feu.

c : R 84 1263, fragm ent de ja rre à d éco r peigné. Pâte rose, dégraissant blanc. d : R 84 1070, bol caréné. Plain-white syrien.

e : R 84 1071, bol évasé. Plain-white syrien.

/: R 84 1073, assiette. Plain-white syrien. Pâte très grossière.

g : R 84 1074, bol à lèvre am incie. Plain-white syrien.

/z : R 84 1114, assiette évasée. Plain-white syrien. D égraissant brun. Traces de feu à l’intérieur.

i : R 84 1115, assiette à lèvre en b o u rrelet intérieur. Plain-white syrien.

/ : R 84 1116, base annulaire (d’assiette ?). Plain-white syrien.

k : R 84 1111 + 1128 + 1112, assiette à lèvre amincie. Plain-white syrien.

PLANCHE V

Figure

Fig.  1.  Les  m a iso n s  A,  B  et  C (éta t  1984).
Fig.  2.  C oupe  sch ém a tiq u e  d'un  p u its   de  la  tra n ch ée su d -a cro p o le.
Fig.  3.  P o n t-barrage s u r  le  n a h r Chbayyeb.
Fig.  4.  Le p u is a r d   1269  so u s  les  la trin es  1039.
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