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La pratique religieuse des étudiants universitaires

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Texte intégral

(1)

Thèse présentée

A L’ÉCOLE DES GRADUES de 1’Université Laval

comme exigence partielle pour l’obtention du grade de maître en sciences de l’éducation

par

JEAN-PAUL GELINAS

Bachelier ès arts de 1’Université de Montréal (1947) Diplômé (professeur) en chant grégorien de l’Ecole de Musique Grégorienne de 1’Abbaye de Saint-Benoît-du-Lac

(Brome, 1949), Bachelier1 (équiv.) en théologie du Grand Séminaire des Saint-Apôtres, Sherbrooke (1959), Licen­ cié en sciences théologiques de 1’Université de Montréal

(1955), Docteur en sciences théologiques (1959) et Bachelier en droit canonique (1Ç60) de The Cacholic

University of America, Washington, D.C., Bachelier (1967) et Licencié (1969) en sciences de l’éducation de l’Uni- versité Laval.

LA PRATIQUE RELIGIEUSE DES ETUDIANTS UNIVERSITAIRES

Avril 1971

(2)

DE LA PRATIQUE RELIGIEUSE D’ETUDIANTS UNIVERSITAIRES

DANS

LE CADRE

D’UNE RECHERCHE SECONDAIRE

x A PARTIR D’UNE ENQUETE SUR LA CONTESTATION

f

(3)

olque chose d’éternel; foi. Mais les hommes ne s ceremonies auxquelles s de raison d’être, ni

’ils ne comprendraient Pour la répandre ou sirn-

justi-dans la religion

c ’est le culte, peuvent célébrer ils ne verraient accepter une foi d’aucune manière

plement pour l’entretenir il faut la

fier, c’est-à-dire en faire la théorie. Une théorie de ce genre est, sans doute, tenue de s’appuyer sur les différentes sciences, à partir du moment où elles existent; scien­ ces sociales d’abord, puisque la foi reli-

origines dans la société; , puisque la société est une synthèse de consciences humaines ; sciences de la nature enfin, puisque l’homme et la société sont fonction de l’univers et n’en peuvent être abstraits qu’artificiellement." gieuse a ses

psyc: h o 1 ogie

Em i1e Durkh eim,

Les formes élémentaires devie religieuse (615) •

"Quelque chose d’énorme est né dans l’univers, avec nos decouvertes, et avec nos méthodes de chercher. Quelque chose, j’en suis convaincu, qui ne s’arrêtera plus. Mais si nous exaltons la Recherche, et si nous en profitons, avec

quelle mesquinerie d’esprit et de moyen, et

dans quel désordre, ne cherchons-nous pas encore aujourd’hui."

Pierre Teilhard de Chardin, Le Phénomène humain.

(4)

A Monsieur Jean-Yves Drolet, Doyen de la Faculté des

J-Sciences de l’Education de 3 'Université Laval, et à tous les Professeurs et Collègues do cette faculté, pour leur franche collaboration et leur bienveillante disponibilité à l’endroit de la recherche en général, et de la nôtre, en particulier.

A Monsieur Pierre W. Bélanger, notre re cherche, pour l’orientation générale éc et le nombreux et précieux matériaux qu’il a mis

A Monsieur Claude Trottier, Premier Lecteur-Aviseur des documents de travail et des manuscrits, pour la révision assi-due, détaillée et critique des textes soumis à son attention et les suggestions et corrections enrichissantes qu’il a bien vou­ lu y apporter.

A Monsieur Henri Saint-Pierre, Second Lecteur—Aviseur de r.o t r e pro j et d e recherche, pour la revue attentive et l’annota-tion judicieuse des divers essais qui constituèrent

gvaduelle-S u p e r v i s e u r .1 _ O

y

ment le contenu de cette thèse.

Ces trois Professeurs font également partie de la Faculté ées Sciences de 1'Education de 1'Université Laval.

(5)

A Messieurs les Membres du Service des Ressources humaines du Ministère de 1’Education de la Province de Québec et, en particulier, à son Directeur, Monsieur Mario Buzzanga, pour la confiance qu’ils nous ont manifestée et l’appui qu’ils ont bien voulu accorder à notre étude et à sa réalisation.

A Messieurs les Membres de l’institut de Recherche Pédagogique de ce même Ministère, en particulier à Messieurs Maurice Goulet et Paul Lemire, pour l’assistance technique dont ils nous ont favorisé à maintes reprises pendant ces deux années de recherche. Et à Mademoiselle Nicole Beaudet, secré­ taire de cet Institut, pour la. copie et la présentation soi­ gnée du dernier manuscrit.

A Monsieur Emile Gagné, c!essinateur-”graphiste” des Nouveautés Héraldiques Canadiennes, pour la reproduction,ar­ tistique des tableaux et graphiques de notre étude.

A toutes les personnes enfin, qui, voire même sans s’en doutei"* (souvent), nous stimulèrent quotidiennement au perpétue et fastidieux recommencement de la recherche scientifique.

(6)

Page REMERCIEMENTS ... IV LISTE DES GRAPHIQUES ET DES TABLEAUX ...;... . X

INTRODUCTION 1

1- Baisse de la pratique, religieuse ... , . 2

2- Quelques facteurs pouvant favoriser la baisse de la pratique religieuse . . . ... 3

3- ' les etudiants universitaires en quête d’une nouvelle religion ... . 6

4- Les orientations academiques ... 7

(scientifiques et humanistes) 5- La démarche suivie ... 9

6- Références ... 12

Chapitre I. LE PROBLEME DE LA PRATIQUE RELIGIEUSE DES ETUDIANTS UNIVERSITAIRES A. Situation de la pratique religieuse à l’inté­ rieur de la religion 1- Définition sociologique de la religion .... 2- Eléments constitutifs de la notion de religion (excepté la dimension de la pratique religieuse) ... 21

a) Les valeurs et l’orientation des valeurs ... 22

b) Les croyances . ... 23

c) Los symboles ... 25

d) Les questions d’ultime importance ... 26

3- Définition descriptive de la pratique religieuse ... 27

a) Une dimension de la religion ... 27

b) Le culte et le rite ... 29

(7)

(scientifiques et humanistes) sur la pratique religieuse des etudiants universitaires

1- Antinomie apparente ou réelle entre la

religion et la science ... 33

2- Problème toujours en suspens ... 34

C. Résultats abrégés de recherches antérieures 1- Aux Etats-Unis ... .. 2- Dans les milieux étudiants québécois ... D. Trois hypothèses sur la pratique religieuse des étudiants universitaires 1- Les antécédents dans la .littérature et l’observation ... 46

2- L’hypothèse majeure ... 48

3- Les deux hypothèses mineures ... 49

E. Références ... 51

II. METHODOLOGIE POUR UNE ETUDE DE LA PRATIQUE RELIGIEUSE DES ÉTUDIANTS UNIVERSITAIRES 1- Type de recher elle a) Secondaire ... 51 b) Explorative et descriptive ... 62 2- L’échantillon a) Théorique et réel ... 63 b) Sa représentativité ... , 64 3- L’instrument de mesure

4- La variable, dépendante: la pratique religieuse a) Démarche conceptuelle ... b) Synthèse de la démarche ... c) Une typologie de la pratique religieuse ... d) Les croyants et les ”a-croyants”... e) Les effectifs de la variable dépendante... f) Les raisons d’être pratiquants ou

non-pratiquants ... 68 70 71 73 7 5 77

(8)

a-a) b) c)

Caractéristiques i ndivi du o11 sujets ... ... C a r a c t é r i s ti qu e s familiales Caractéristiques académiques 6- Les a ) b) c)

Antécédents des hypothèses ... Vérification de l’hypothèse majeure ... Vérification des deux hypothèses mineures via une classification'des facultés ...

86 87

La contestation: variable d’investigation

8- 9-a) b) c) Description de la contestation Types de contestataires ... Devant six incidents de contes

Références 98 100 102

105

108 7 /

III. ANALYSE DE LA PRATIQUE RELIGIEUSE DES ETUDIANTS UNIVERSITAIRES

1- Profil des pratiquants et des non-pratiquants a) Caractéristiques individuelles à partir

des variables démographiques sexe, âge

et état civil ... ...«... 118

b) Synthèse ... 125

c) Caractéristiques familiales à partir des variables démographiques taille de la famille, parents vivants ou décédés, scolarité du père, scolarité de la mère, lieu d’origine et occupation profes­ sionnelle du père ... 126

d) Synthèse ... 137

e) Caractéristiques académiques à partir des va­ riables scolaires lieu de résidence étudiante, régime d’inscription (à temps complet et à temps partiel) et niveau d’études (sous-graduées et graduées) . ... 139

f) Synthèse ... 142

2- Vérification des hypothèses a) L’hypothèse majeure ... 142

b) Synthèse ...'... 145

c) Les deux hypothèses mineures ... 147

(9)

a) La contestation: variable cl investi­ gation ... ... 149 b) Synthèse ... 152 4- Références ... 155 CONCLUSIONS 1- Quelques résultats ... 160 2- De nombreux champs de recherche ... 162 3- Une pédagogie religieuse: La participation... 169

BIBLIOGRAPHIE ... 173

(10)

selon une typologie appropriée de la

pratique religieuse ... . . ... 73 Graphique Z- La pratique religieuse et l’age ... 123

Graphique 3- La pratique religieuse et l’occupation

professionnelle du père ... 138 Graphique 4- I,a pratique religieuse et l’année univers!-..

taire ... 146 Graph.i que 5- La pratique religieuse et la faculté

universitaire ... 15b Graphique 6- La pratique religieuse et la contes­

tation ... ... ... 154

Tableau 1- Conflit entre la religion et la science évalué par quatre groupes religieux, de la

ville de Détroit (1958) ...

38

Tableau 2- Conflit entre la religion et la science

évalué par des étudiants catholiques blancs et protestants blancs de la

ville de Détroit (1958) ... 39 Tableau 3- Croyance et pratique des étudiants de

1’Université de Montréal (% globaux,

1961) 41

Tableau 4- Pratique et croyance d’étudiantes de 1ère philosophie (données d’étudiants et et 2ème année d globales, 1964)- 42 Tableau d’étudiants et globaux, 1969)

d’étu-45

Tableau 6- Pratique diantes de CEGEPS de globales> d’étudiants et classiques Tableau 7-et croyance 2Collèges la ville de Québec 1968) ... d 5 étu-et de 2 (données Croyance, du milieu à 1’Université 1969) ...

raisons de croire et valorisation universitaire par rapport à la foi

Laval (données globales, 5

1

44

(11)

s

Pratique l'oligic’ùoc G.Go CvuGia.iv^ oc J. ’ *jii versité Laval perçue à travers l’enquête sur la contestation (données globales. 1969) ... ... . . . Tableau

9-Tableau

10-Tableau

11-Tableau

12-Comparaison de l’échantillon et de la popu­ lation totale de 1’Université Laval (1969) par rapport au sexe . ... ... Comparaison de l’échantillon et de la popu­ lation globale de 1’Université Laval (1969) par rapport au régime d’études sous-graduées

et graduées ... ... Comparaison de l’échantillon et de la popu­ lation globale de 1’Université Laval (1969) par rapport aux facultés auxquelles les

répondants appartiennent ...

46

64

65

66 Les croyants et les a-croyants selon les

facultés (données de l’enquête Huot-Adarn,

1969) . ... 74

Tableau 13- La pratique rcligi euse selon le sexe ... 118

Tableau 14- La pratique reJigieuse selon l’âge ... 120

Tableau 15- La pratique religieuse selon l’état civil ... 124

Tableau 16- La pratique religieuse et la taille de la famille .... 128

Tableau 17- La pratique religieuse et les; parents vivants ou défunts 128 Tableau 18- La pratique religieuse et la scolarité du père ... 129

Tableau 19- La pratique religieuse et la. scolarité de la mère .... 130

Tableau 20- La pratique religieuse et le lieu d’origine ... 132

Tableau 21- La pratique religieuse et l’occupation pro-fossionnel10 du nôrp T 24 Tableau 22- La pratique religieuse et la résidence ... -LJ 4 139 Tableau 23- La pratique religieuse et le régime d’ins-cription. (à temps complet ou à temps partiel... 140 Tableau 24- La pratique religieuse et le régime d’études

(12)

Tableau 25- La pratique religieuse et l’année

universitaire ... ... ' 44 Tableau 26- La pratique religieuse et la faculté

universitaire ... 148 Tableau 27- La pratique religieuse et la contes­

(13)

1. Baisse de la pratique religieuse

2. Quelques facteurs pouvant favoriser la baisse de la p r a t i qu e r e 1 i g i e u s e

3. Les étudiants universitaires en quête d’une nouvelle religion

4. Les orientations académiques (scientifiques et huma­ nt st es )

5. La démarche suivie

(14)

1- Baisse de la pratique religieuse

La jeunesse étudiante présente de nos jours un double phé­ nomène: un intérêt grandissant pour les sciences et une baisse assez étonnante de la pratique religieuse à partir des études secondaires jusqu’aux études universitaires.

Apparemment plus accentué en Europe qu’en Amérique du nord, ce double phénomène socio-culturel a pris récemment de l’accélé­ ration dans nos milieux étudiants québécois.

Deux constantes ressortent des attitudes religieuses de la jeunesse étudiante actuelle:

1. l’éclipse du sacré et du divin expérimentés en institu­ tions religieuses; et

2. une vague montante de recherche d’un sacré à l’état pur, original, sauvage même, d’un sacré marginal ou détaché des reli­ gions organisées.

Ce sacré, ce contenu psychologique de l’expérience du Tout- Autre ou de Dieu, semble s’extérioriser surtout à l’occasion de

certains grands mouvements nationalistes et internationalistes. On ressent également sa présence lors de certaines manifestations d’intégration raciale et de marche massive contre la faim, la guerre et l’injustice sociale.

On le sent encore mêlé aux grands mouvements révolutionnaires et contestataires ainsi qu’à certaines organisations populaires de libération du faible.

(15)

hippies, aux caravanes cle pèlerins américains et occidentaux en route vers l’orient et dans les incantations dos drogués mysti­ ques .

nous impressionne. Cette expérience de Dieu à le sacré, semble s’intensifier à mesure que s élèvent les niveaux d’indus­ trialisai ion et d’urbanisation pendant que la pratique ecclésia--e

(en Eglise ou d’Eglise) baisse et se détériore

De son côté, Fernand Dumont (1970), sans faire état de ce contraste entre ces deux sortes de sacrés, observait cependant un certain affaiblissement de la pratique religieuse institutionna­ lisée. C’est ce qu’il déclarait à la quinzième session annuelle de pastorale organisée par l'institut de Pastorale de Montréal: "Depuis dix ans...”, au Québec, "l’adhésion à l’Eglise et les pratiques ont baissé" (2).

2- Quelques facteurs sociaux poivvant_favoriser la baisse de la pratique religieuse

Certains sociologues de la religion étudient actuellement les facteurs sociaux pouvant avoir quelqu’incldence sur la prati­ que religieuse. La plupart ont observé en premier lieu que les phénomènes d’industrialisation et d’urbanisation sont ordinaire­ ment accompagnés des phénomènes d’affaiblissement de la foi et

(16)

partiellement ce ralenti à la multiplicité et à la fluidité crois- santés des idéologies dans notre société. Ces multiples idéologies auraient pour effet

tes interprétations

différen­ d ’ inspirer un nouveau choix de valeurs.

Certains observateu: s professionnels et profanes

dent aussi pour discerner dans le manque de profondeur des attitu-des religieuses un autre facteur favorable

q ’ a c c o r —

>

pratique religieuse. Ces attitudes proviennent de l’indifférence devant le fait religieux, de la superficialité des convictions de foi, de l’appartenance non motivée à l’Eglise et de l’absence de points de réference éclairés et éclairants: et, au surplus, d’une

définition vague et capricieuse de ce que l’on veut et de ce que l’on cherche

(4)-D’autres chercheurs voient dans 1’ignorance des connaissan­ ces fondamentales de la foi, un autre facteur de cet affaiblissement de la pratique religieuse de la jeunesse étudiante (5).

Les causes de cette ignorance sont nombreuses et nous ne nous proposons pas de les rechercher dans cette étude. Cependant, Guy Rocher (1969) affirme qu’il ne semble rester dans l’esprit de nombreux fidèles que ”dcs notions vagues, imprécises, souvent

carrément fausses, que supporte une foi aveugle et indifférenciée” et dont les symptômes sont ”de douloureux bredouillements” et ”de forts sentiments d’incompétence et d’infériorité”, lorsqu’il s^agit

(17)

nière bastille d’une religion assiégée... Au Québec, la foi religieuse, au lieu de connaître un ccat de crise, serait en train de mourir d’inanition" (6).

On pourra reprocher au cierge catholique québécois un en­ seignement trop directif et pauernaliste, trop moralisant, insuf­ fisamment assis sur les Ecritures et trop couné des réalités ter­ restres, et on pourra avoir raison en bien des cas. Mais, par ailleurs, une certaine part de cette ignorance religieuse pourrait

etre imputée a la diminution cte 1’enseignement scolaire de la

religion donné aux niveaux secondaire, collégial et universitaire. C’est en décrivant le déséquilibre qu’il déplorait en 1965 entre les cultures profane et religieuse, survenu à l’occasion du cou­ rant de désacralisation et de décléricalisation en cours au Québec, que Jean-Jacques Larivièrc remarquait: "A mesure que les jeunes progressent dans leurs études, en allant du primaire au secon­

daire, puis du collégial à l’universitaire, leurs études religieuses vont en diminuant. Parfois, arrivés au niveau universitaire, on constate un déséquilibre choquant entre ces deux cultures. Ainsi, à mesure que les intellectuels sentent cette disproportion, ils réagissent, mais de façons très différentes" (7). les uns

tombent dans l’indifférence, les autres, moins nombreux, pratiquent à cause de leur entourage immédiat et les derniers abandonnent

i.

(18)

A J 1 C- <1 O 03 OL)oVèi ùJLOiiS CC j_ii vll-L ClOUtS C

par le vécu quotidien, il est permis de prédire que le catholicisme québécois continuera très probablement d’être professé pai1 la majo-rité mais sera pratiqué par la minomajo-rité comme ce fut le cas pour la France (S).

3~ Les étudiants en quête d’une nouvelle religion

Malgré des apparences passables rassurantes, parce que peu fracassantes, il nous semble que les étudiants laissent quand même percer les symptômes du rejet de la religion telle qu’institu­

tionnalisée chez nous. Les formes infantiles de leur religion d’autrefois semblent les irriter. Ils se disent fatigués de pratiquer en spectateurs. Ils se déclarent frustrés de n’avoir jusqu’ici prie qu’avec leur tête, alors que tout l’être demande à prier existentiellement.

Lorsque nous observons attentivement la pratique religieuse des étudiants universitaires, maintes questions nous viennent à l’esprit. Nous nous demandons s’ils ne cherchent pas au fond d’eux-mêmes des formes nouvelles de religion? Des formes plus humaines et plus humanisantes, plus engageantes et plus partici­ pantes, où il y aura plus de vie et plus de motivation. Nous nous demandons encore s’ils cherchent dans l’espoir de trouver la

for-et le vécu? Nous nous demandons également si le rejet apparent ou réel de l’Eglise-institution, pour d’innombrables raisons plus ou moins explicitées,

(19)

gj.qu.es modernes de la religion que sont les croyances, les pra­ tiques , les symboles, les valeurs et les orientations des valeurs

qui guident l’homme dans sa recherche des réponses aux questions d’ultime importance? Enfin, si les étudiants tentent de simpli­ fier la notion de religion, sera-t-elle plutôt constituée par les objectifs et les motifs d’un humanisme athéologique où le sacré et le divin seront ramenés au profane et à l’humain?

Voilà autant de questions devant lesquelles nous place la pratique religieuse actuelle des étudiants .universitaires (9).

4- Les orientations académiques (scientifiques et humanistes)

Les facteurs d’urbanisation, d’industrialisation, d’ignorance religieuse, d’idéologies nouvelles et multiples et le rejet de la religion institutionnalisée, sont-ils les seuls à influencer la pratique religieuse des étudiants? Nous ne le croyons pas! Il

en est un autre qui, en raison de l’option personnelle devant laquelle il place l’étudiant, pourrait vraisemblablement avoir

percussions sur sa pratique religieuse. Il s’agit de 1 ’ orientation académique que l’étudiant a prise. Notons en passant

(20)

une quiiisaine d’aimées. les choix, de carrières scientifiques sont de plus en plus fréquents. Aussi croyons-nous que ce facteur, précisément parce qu’il est intimement relié à la vie de chacun des étudiants, mériterait d’être scruté en fonction de la pratique religieuse, surtout depuis qu’il est démontré qu’en général la progression académique et culturelle s’accompagne d’une diminution de la pratique religieuse (10).

Les statistiques des universités québécoises révèlent par ailleurs qu’il existe depuis ces quinze dernières années, chez un nombre toujours croissant d’étudiants universitaires, une forte poussée ou une sorte d’engouement pour l’étude des sciences exac- tes-pures, des sciences exactes-appliquées, des sciences natu­ relles et des sciences humaines. Nous savons do plus que l’influ­ ence des hommes de sciences n’a cessé de croître dans les milieux étudiants universitaires depuis ce même temps. Ce prestige semble s’appuyer- surtout sur le pouvoir merveilleux que possèdent les scientifiques de pénétrer certains secrets du monde et de l’uni­

vers. Il s’appuie aussi sur l’idée non encore clairement explicitée que ce que la science ne parvient pas à expliquer aujourd’hui, elle l’expliquera demain ou après-demain. L’ignorance dans tous les domaines, semblent se dire les étudiants, doit céder bientôt la

place à la connaissance empiriquement démontrée. L’inconnu, l’inex­ plicable contemporain, sera lui aussi scruté et expliqué. Et si telles ou telles disciplines n’offrent pas encore de réponses

satisfaisantes, ce n’est que temporairement. Attendons patiemment. Les vraies réponses ne tarderont pas à venir- (11).

(21)

L’objectif principal de notre recherche consistera à observer attentivement la relation de la pratique religieuse et des orientations académiques (scientifiques et humanistes}, de nous assurer de son existence ou de son inexistence et de tirer

les conclusions qui s’imposent. Dans le but de mettre davantage en lumière la relation de la pratique religieuse et des orienta­ tions académiques, nous ferons précéder son étude par celle de la relation entre la pratique religieuse et les diverses années universitaires. Voici la démarche que nous suivons pour atteindre

ces objectifs.

5- La démarche suivie

Notre étude s’étendra sur trois chapitres.

Dans un premier chapitre, nous commencerons par situer la pratique religieuse à l’intérieur de la notion de religion.

Ensuite, nous apporterons les raisons qui nous ont amené à croire que les orientations académiques (scientifiques et hu­

manistes) peuvent avoir quclqu’incidence sur la pratique religieuse des étudiants universitaires.

Puis nous parcourrons la littérature portant sur la pra­ tique religieuse des étudiants de niveaux collégial et uniVersi taire. Nous résumerons les résultats des enquêtes importantes menées dans ce domaine en milieux américains et québécois. Nous

i

terminerons ce chapitre en énonçant trois hypothèses que notre recherche a comme objectif de vérifier.

(22)

Le second chapitre présentera notre mothodol agi e pour

l’é-premier lieu, nous préciserons que notre étude se classe parmi les études exploratives et descriptives et non parmi celles qui

recherchent les causes.

Comme notre recherche est do plus une recherche de type secondaire qui prend sa source dans l’enquête sur La contestation et les attitudes de contestation à 1’Univer-sité Laval (1969) (12), nous spécifierons les avantages, les inconvénients et les contrain­ tes que représente cette sorte d’étude. Nous décrirons par la

suite l’instrument de mesure que nous tirons du Questionnaire sur certains aspects de l’éducation universitaire (13)•

Nous présenterons à ce moment la variable dépendante de la pratique religieuse. Nous établirons alors une typologie des pratiquants et indiquerons la façon avec laquelle s’effectuera la mesure de la pratique religieuse.

Puis nous introduirons les variables démographiques et aca­ démiques qui seront utilisées et mises en relation avec la variable dépendante de la pratique religieuse.

Nous ”opérationaliserons” la variable des orientations aca-démiques en organisant une classification des facultés universitaires

En raison de l’importance que prend le phénomène de contes-tation en milieux étudiants et cn raison des données sur ce phéno-irtène qui sont mises à notre disposition, nous décrirons comment

(23)

cju v los a un c o s r? ( i. o s i a c u _L c o s !i »11 v o i* s J.. \ a J t * <? } *.) o u v cnt c. v o ?. r*

quelques répercussions sur la pratique religieuse.

de la pratique religieuse des étudiants universitaires. Nous

a) variables sentera 1

nous décrirons notre échantillon en utilisant douze démographiques. Ce portrait de l’échantillon repré­

îensemble des caractéristiques générales, individuelles,

familiales et scolaires de,s sujets (273);

b) ensuite nous . infirmerons ou confirmerons nos

h,7p°-thèses en démontrant statistiquement si les étudiants universitaires pratiquent proportionnellement plus ou moins en passant d’u-.e année universitaire à l’autre (de la 1ère à la 4cme et -;-) et si les

étudiants en sciences exactes-pures et appliquées pratiquent pro­ portionnellement plus ou moins que leurs confrères en sciences humaines et si ces derniers pratiquent aussi proportionnellement plus ou moins que leurs homologues en humanités;

c) en dernier lieu, sous forme de corollaire, nous vérifie­ rons quelle sorte de relation le phénomène de la contestation entre­ tient avec la pratique religieuse.

En conclusion, nous ferons d’abord la synthèse des résultats obtenus. Puis nous exposerons, sous forme de suggestions, les

possibilités d’un certain nombre de champs de recherche dans le domaine. Enfin, nous mentionnerons la forme de pratique religieuse qui offre le plus de chance de succès pour 1’avenir.

(24)

(1) Julien Harvey, "L’avenir du sacré", Relations, avril, 1970, pp. 104-105.

(2) Fernand Dumont cité par Jean-Pierre Proulx, "L’Eglise, pour donner sens à l’histoire, doit poursuivre des projets col­ lectifs", Le Devoir, jeudi, 22 janvier, 1970, p. 14.

(3) Jean-Jacques Larivière, Nos collégiens ont-ils encore la foi? Ottawa, Fidcs, 1965, p • 60. Enquête auprès de 3^108 collé­ giens et collégiennes du Québec (1ère partie du rapport). Les résultats de l’enquête de Jean-Paul Rouleau sur La men-t alimen-té religieuse des émen-tudianmen-ts emen-t émen-tudianmen-tes (732 sujemen-ts) des collèges du Canada-français, Centre de Recherches en Sociologie Religieuse, Univ. Laval, effectuée au début de 1969 dans cinq CEGEPS québécois (650 sujets) et deux autres institutions collégiales en dehors du Québec (82 sujets), démontraient l’incidence d’un haut degré d’urbanisation, sur la pratique religieuse des étudiants de collège. Ainsi la proportion des étudiants de milieu très urbain, comme

celui de la ville de Montréal, à assister à la messe dominicale, n’atteignait que 36%, tandis que celle des étudiants origi­

naires de villages et de milieux ruraux, à prendre part au culte dominical, s’élevait à 79%. La moyenne étant de 59%• Ces résultats furent donnés pour la première fois à la com­ munication présentée par l’auteur au Vlè Congrès de la

Société Canadienne de Théologie tenu à l’université St-Paul, Ottawa, le 27 août, 1969, miméogr., pp. 2-7• Lire André Char- bonneau, "Les Cégépiens veulent des prêtres plus près des gens", Le Devoir , merc . , 3 déc., 1969, P- 6.

(4) Ja cques Grand’Maison, "Les chrétiens et l’engagement politique", .Relations, avril, 1970, PP• 106-107.

(5) J--J. La rivière, op.. cit . , tableau 8, p. 6, Nature de la foi, p. 99, rapporte que 40% des collégiens avaient accepté une notion erronée de la foi, à savoir "une évidence acquise par la réflexion et le raisonnement", tandis que 50% refu­

saient d’en accepter une notion orthodoxe exprimée en ces termes: "une certitude absolument inébranlable garantie par Dieu".

(6) Guy Rocher dans préface de Fin d’une Religion? Monographie d’une paroisse canadienne-française de Colette Moreux, Montréal, Les Presses de 1’Université de Montréal, 1969,

p. XI-XII.

(25)

(S)

Gabriel Lebras, "L’Eglise et la Société sous la IVè République" dans La République française, Revue el | a de l'idéolo­ gie républicaine et démocratique, NevT'VcTrk, 1950, vol. Vlï" ~ no 1-2, p. 35•

(9) Le phénomène du changement se fait également sentir dans la pratique religieuse. Lire à cette fin E. Poulat, "La société religieuse et le problème du changement". Revue française

de sociologie, vol. VII, no 3, 1966. p. 295'.

(10) En particulier les études approfondies de Andrew M. Greeley, The Influence of Religion on the Carrer and Occupâtional Values of June 1961 College Graduâtes, thèse de 3è cycle publiée sous le titre de Religion and Career, New York, Sheed and VTard, 1963 et de Charles Y. Glock and Rodney Stark,

Religion and Society in Tension, Chicago, Rand McNally & Company, second printing, 1966.

(11) Lire à ce propos Jérôme Grynpas, La philosophie: sa'vocation créatrice, sa position devant la science, ses rapports avec l’homme de la société d’aujourd’hui, Belgique, Marabotit Université, no. 130, 1967, PP- 64—65 et 92.

(12) Projet de recherche conçu et exécuté à la Faculté des Sciences de l’Education (F.S.E.) de 1’Université Laval, printemps 1969, par Pierre W. Bélanger assisté par César Rutigliano, Claude Trot-

tier, Roland Ouellet et Aimée Leduc.

(26)

LE PROBLEME LE LA PRATIQUE RELIGIEUSE DES /

ETUDIANT S UN1V ERSITAIRES

A . Situation de la pratique religionse à religion

l’intérieur de la

1- Définition sociologique de la religion

2- Eléments constitutifs de la notion de religion (excepté la dimension de la pratique religieuse) a) Les valeurs et l’orientation des valeurs b) Les croyances

c) les symboles

d) et les questions de souveraine importance. 3- - Définition descriptive de la pratique religieuse

a) Une dimension de la religion b) I culte et le rite

c) Lefinition descriptive.

B. Répercussion des orientations académiques,(scientifjoues et humanistes) sur la pratique religieuse des étudiants universitaires

1- Antinomie apparente ou réelle entre la religion et la science

2- Problème toujours en suspens.

G• Résultats abrégés de recherches antérieures 1- Aux Etats-Unis

2- Dans les milieux étudiants québécois

Trois hypothèses sur la pratique religieuse des étudiants universitaires

1- Les antécédents dans la littérature et l’observation 2- L’hypothèse majeure

3~ Les deux hypothèses mineures E. Références

(27)

1- Définition sociologique de la religion

Il nous apparaît logiquement impossible de considérer la

pra-gion dont elle est une dimension et une composante. Ce faisant, nous suivons Emile Durkheim (1912) qui maintient tout le long de son ouvrage, Les_ formes élémentaires de la vie religieuse, ce lien logique entre la pratique religieuse et la religion. C’est aussi de cette façon qu’il relie les cultes aux croyances ”... comme une traduction extérieure, contingente et matérirelle de ces états in­ ternes...” que sont ”... les croyances ... considérées comme l’é­ lément essentiel de la religion” (1). C’est encore selon ce même processus logique qu’il situe la religion dans la société (2) et l’Eglise dans la religion (3).

Avant de décrire la pratique religieuse, il importe de préci­ ser la notion de religion et d’adopter comme nôtre une définition pour cette dernière.

La notion de religion était demeurée jusqu’au début du siècle dernier, la propriété quasi-exclusive de la science théologique. Vers la fin du XlXè siècle et au tournant du XXè, l’on remarque que l’anthropologie, la psychologie et la sociologie commencent à scruter la notion de religion à la lumière de leur discipline res­ pective .

(28)

La définition sociologique de la religion a pris assez de

temps à se préciser. Aussi, en 1905, le sociologue George Simmél (4) déplorait-il le fait qu’on n’avait pas encore trouvé de la religion une définition pouvant s’appliquer à toutes les religions.

Les sociologues ont rencontré plusieurs difficultés en tentant de définir la religion. Leurs difficultés provenaient sans doute du fait que celle-ci constituant un concept tellement large, est plus

là tés existentielles comme l’amour (5), la souffrance, la culture (6) etc . .., qui se vivent beaucoup plus qu’elles ne se disent. Selon Charles Y. Glock (19Ô7) la religion appartient ” à ce genre de mots qui semblent presque défier toute définition, du moins toute

définition capable de provoquer un accord général” (7). Walter Houston Clark (1958) partage le meme avis lorsqu’il écrit qu’”il n’y a pas de mot plus difficile à définir que celui de religion”(8).

Avant d’adapter, comme fondement théorique de la pratique re­ ligieuse, l’une des nombreuses définitions de la religion que nous avons trouvées, nous en citerons quelques-unes qui nous prépareront graduellement à saisir celle que nous avons .choisie.

Herbert Spencer, définit les religions comme ”la croyance à l’omniprésence de quelque chose qui passe l’intelligence.” Sa spéculation porte donc sur tout ce qui échappe à la philosophie et à la science.

Friedrich Max Muller ramène toute religion à ”un effort pour concevoir l’inconcevable, pour exprimer l’inexprimable, une aspiration

(29)

L’historien des religions^ A. Réville^voit surtout dans religion la reconnaissance de la divinité et la satisfaction

la de s’y sentir uni. "La religion", écrit-il* 7 î p c + la détermination de la vie humaine par- le sentiment d’un lien unissant l’esprit humain à l’esprit mystérieux dont il reconnaît la domination sur le monde

et sur lui-même et auquel il aime à se sentir- uni."

Comme la définition de Réville ne tenait pas compte d’un certain nombre d’êtres spirituels, tels que les âmes des défunts et les autres esprits, Edward Burnett Tylor a préféré "... poser comme définition minimum de la religion la croyance en des êtres spirituels" (9). Semblable simplification ne permet pas de

différencier la religion de la magie.

La définition de la religion de Max Weber (10), a été claire­ ment présentée par Talcott Parsons (1968) qui la traduit en ces termes: "... toutes sociétés conçoivent qu’il existe un ordre sur­ naturel, des esprits, des dieux et des forces impersonnelles Qui dépassent en quelque sorte l’ordre naturel, qui diffèrent des forces conçues comme présidant aux événements ordinaires de la nature et dont les activités donnent, à leur manière, un sens aux aspects inusités, déconcertants et rationnellement inexplicables de l’expérience" (11). Ici ressortent quelques-uns des rôles de la religion où "... les forces religieuses sont conçues comme ayant la capacité indépendante de guider la destinée humaine^ ce que les forces magiques n’ont pas" (12).

(30)

vers Emij.e Durkheim fut l’un ùes premiers à signaler que la cause principale qui empêchait la sociologie de définir la religion de façon compréhensive (englobante) provenait de l’absence de distinction claire et précise entre le sacré et le profane. Il proposait alors la classification des êtres selon deux

grandes catégories: les sacrés de

1 ’ importante dichotomie proposée par Durkheim, il est étonnant que Max Weber ” . ait négligé d’approfondir une relation aussi im­

portante que celle du sacré et du profane’' (14).

Dans 1 esprit de Durkheim, c’est la logique consciente OU

inconsciente (si tant est qu’une logique inconsciente puisse exister) et la simple convenance qui inclinent l’homme à séparer le sacré

du profane et à voir comme un vide rationel entre ces deux ordres de choses qui ne peuvent être confondues ni mises en contact sans égards particuliers. La dissociation entre ces deux catégories d’êtres apparaît avec une telle clarté dans 1’esprit de Durkheim,

!

qu’elle l’amène à définir le sacré par opposition au profane. ”La chose sacrée,” écrit-il, ”c’est, par excellence, celle que le profane ne doit pas, ne peut pas impunément toucher.” Il précise cependant que cette opposition n’implique pas pour l’homme une interdiction du sacré, mais lui indique qu’il ne peut entrer en relation avec lui que par ”... une opération délicate qui réclame des précautions et une initiation” appropriées.

Ce partage de 1'univers connu et connaissable en deux genres d’êtres qui s’excluent, constitue la caractéristique fondamentale du phénomène religieux. Poussant plus avant son raisonnement,

(31)

les interdits s’appliquent et qui doivent rester à distance des premières . ■'

contraire, le profane, engendre, pour ainsi dire, dans la pensée de Durkheim, les deux dimensions essentielles de la religion: les croyances et les rites. Les premières sont les représentations

intérieures et intimes des choses sacrées, de leurs rapports mutuels et de leurs re 1 at j ons avec les choscs pr*ofa n. Les seconds "sont des règles de conduite qui prescrivent comment l'homme doit se

comporter avec les choses sacrées”

(15)-Enfin, Durkheim complète sa définition de la religion en y ajoutant une troisième dimension, celle de l’église, de la collec­ tivité humaine, qui rassemble tous ceux qui partagent les mêmes croyances et adoptent le même comportement à l’égard

Cette troisième dimension découle tout naturellement

du sacré. de sa théorie sociologique bien personnelle de la religion qui est

phénomènes essentiellement' sociaux" (16).

C’est ainsi qu’à partir de cette dichotomie du sacré et du profane, Durkheim conçut sa définition de la religion qui fit école en sociologie religieuse pendant un bon demi—siècle près. La voici : "Une religion est un système solidaire de croyances et de pratiques relatives à des choses sacrées, c’est-à-dire séparées, interdites, croyances et pratiques qui-unissent en une même communauté

(32)

(17)-T - J____ ___ • .1 .

1-Co 14‘vlb ILUdci 4 cS_i. OïiS C<’ sbilucives de cette définition5

ressortent par elles-mêmes. Ce sont: les croyances, les pratiques et l’Eglise. Elles sont à retenir.

Talcott Parsons adopta cette définition de la religion

sans modification substantielle. "Nous définissons une religion”, écrit-il, "comme un ensemble de croyances, de pratiques et d’ins­ titutions que les hommes ont établies dans diverses sociétés” (18).

Autour des années 60, le sociologue Glock proposa une défi­ nition de la religion qui s’inspire largement de celle de Durkheim. Elle la complète cependant en y insérant trois autres dimensions: Les symboles, les valeurs et l’orientation des valeurs. Cette orientation des valeurs dirige la recherche de solutions aux questions d’ultime importance.

Cette définition nous apparaît plus universelle que celle de Durkheim en ce sens qu’elle peut embrasser toutes les religions possibles: les passées, les présentes et les futures, celles exis­ tant à l’intérieur comme à l’extérieur' de l’Eglise.

Voici donc la définition de la religion que nous faisons nôtre et que nous utiliserons comm

de notre recherche explorative de diants universitaires.

Religion is ”...as one variety of values orientations, those insti­ tut ionalized Systems of beliefs, symbols, values, and practices, that provide groups of men- with solutions to their questions of

ultimate meaning” (19)•

ï centre de références au cours la pratique religieuse des

étu-La religion revient à ”... une variété des orientations des va­ leurs, à ces systèmes institution­ nalisés de croyances, de symboles, do valeurs et de pratiques, qui

apportent à certains groupes d’êtres humains des solutions à leurs ques­ tions d’ultime imoortance.”

(33)

et biblique que sociologique, peut quand même être rapprochée de celle de Glock. Elle se lit ainsi: ”La religion..., c’est la structure réflexive d’attitudes, de sentiments, de rites et de préceptes moraux qui se développe dans une communauté de croyants à partir de l’expérience directe ou indirecte de Dieu” (20). Nous voyons apparaître trois nouvelles dimensions: ”la structure réflexive d’attitudes et de sentiments” que Glock n’a pas mentionnée dans sa définition, mais dont il traite dans ”0n the study of Religion

Commitment” qui constitue le chapitre deuxième de son ouvrage Reli­ gion and Society in Tension; ”les préceptes moraux” dont Glock ne parle pas non plus dans sa définition mais qui pourraient être im­ plicitement contenus dans le terme de valeurs ; enfin, ”1’expérience directe ou indirecte de Dieu.” Harvey donne explicitement le nom de Dieu, alors que Glock no le fait pas. Implicitement encore, pourrait-

on faire remarquer que Dieu est ressenti dans les éternelles ques­ tions d’ultime importance de Glock (questions of vltimate meaning). Quant à l’expérience directe ou indirecte du sacré et du divin,

Glock en traite in extenso, dans le chapitre troisième de son ouvrage ci-haut cité : ”A Taxonomy of Religious expérience.”

2- Eléments constitutifs de la notion de religion (excepté la dimension de la pratique religieuse)

Avant de proposer une définition descriptive de la pratique religieuse qui, comme on l’a dit, représente une des dimensions im­ portantes de la religion, et qui constitue la variable dépendante

(34)

(ou d’intérêt) de notre recherche, nous commenterons sommairement et dans l’ordre suivant les quatre autres éléments constitutifs de la notion de religion:

a) les valeurs et l’orientation des valeurs; b) les croyances;

c) les symboles et

d) les questions d’ultime importance.

a) Les valeurs et l’orientation des valeurs

En tant que "système institutionnalisé", la religion possède ses valeurs propres et essentielles. Que veut dire valeur? Neil

J. Smelser (1963) en a donné une définition sociologique. "La valeur”, écrit-il, "qui constitue la composante la plus générale de l’action sociale, indique en termes généraux les divers états ("states") de la fin désirable qui joue le rôle de guide des réalisations humai­ nes" (21).

De son côté, Louis Wirth (1959) a précisé la notion de valeur en la présentant comme un système d’énoncés sur ce qui doit être. Les énoncés des valeurs sont caractérisés pai1 le fait qu’elles sont totalement acceptées,_ hors de doute et évidentes en soi (22).

Ainsi, pour tout homme, chrétien ou non-chrétien, 1’amour signifie une valeur incontestée. Pour le chrétien, l’amour a trois projec­ tions (vers soi-même, vers son semblable et vers son Dieu) tel que commandé par le Christ et les Evangiles, constitue aussi une valeur religieuse indiscutée. Rappelons en passant que la connaissance de ces valeurs varie ordinairement d’un individu à l’autre et que les moyens choisis pour les acquérir, les conserverles faire croître,

(35)

peuvent aussi diverger, voire même se contredire. d’un homme à l’autre, d’un chrétien à l’autre, mais qu’il reste toujours que personne ne met jamais en doute l’existence et l’importance de ces valeurs.

N’étant pas nécessairement cohérentes dans les schèmes de pensées de l’homme, les valeurs exigent un modèle d’orientation, une "value orientation". Clyde Kluckhohn (19ô2))a formulé en ces termes ce qu’il entend par l’orientation des valeurs: "... une conception généralisée et organisée de la nature, de la place de l’homme dans la nature, de la relation de l’homme avec l’homme et de ce qui est désirable et indésirable par rapport au milieu et aux interrelations humaines" (23)- Cette notion de l’orientation des valeurs, se rapproche de celle de perspective offerte par Tamotsu Chibutani. La perspective écrivait-il en 1955> ”... est une vue ordonnée de l’univers d’un quelqu’un", en d’autres mots, la perspective est ce qui est considéré comme admis dans le do­ maine des choses, des "événements et de la nature humaine" (24).

En reconnaissant à la religion le rôle de rechercher et de proposer "à certains groupes d’êtres humains", identifiés ici comme croyants, les meilleures solutions aux problèmes "d’ultime impor­ tance" (ultimate meaning)", Glock se trouvait à spécifier la sorte d’orientation des valeurs que constitue la religion.

b- Les croyances

"En sociologie, le système de croyances est un phénomène cul­ turel et représente la religion d’un groupe, rattachée à toutes les

(36)

Est-il nécessaire de le rappeler?

Les croyances comportent cinq dimensions oui sont communes à toutes les religions et que nous résumons ici.

Une dimension exnériencielle qui se ramène à une impression intérieure et profonde de posséder un jour la connaissance directe de la réalité par excellence, Dieu, peu importe le nom que les hom­ mes lui donnent. Cette dimension contient de plus la possibilité

d’entrer un jour en communication bilatérale avec Dieu. Bilatérale, cette communication ne consistera pas seulement à le contempler ou à l’écouter passivement, mais à échanger et à dialoguer vraiment avec lui.

Une dimension idéologique dans laquelle les croyants s’atten­ dent à ce que les adhérents d’une meme religion acceptent à peu près le même ensemble de vérités qu’ils ne peuvent pas: comprendre totale­ ment mais qu’ils croient vraies, parce qu’il leur apparaît impossible à l’homme d’avancer sans une foi triangulaire, ce qui veut dire sans une foi envers soi-même, envers autrui et envers l’Absolu.

Une dimension, cultuel le qui fait que les croyants maintiennent que la foi, comme toute autre forme de vie, a besoin d’activités et d’extériorisation pour survivre et se développer. D’où les diverses formes d’expressions cultuelles‘et de manifestations communautaires.

(37)

j--- --- n n /J

<•-VU.C-ÙJ.C viciiio laquelle jes croyants, sans

prétendre que la croyance découle de la toutes connaissances religieuses soient

connaissance humaine ni que appuyées uniquement sur la foi, désirent approfondir, selon leurs capacités respectives, les données fondamentales de leur foi et les vérités révélées qui en sont le substratum.

Enfin, une dimension conséquencielle constituée d’attitudes et de comportements qui caractérisent les croyants et qui jaillissent de•convictions intérieures nourries par les croyances et les pra­ tiques religieuses, l’expérience et la connaissance (26).

c- Les symboles

Toutes religions comportent aussi un certain nombre de sym­ boles (27). Au sens large, il faut dire que le symbole peut se définir comme une figure, un signe ou un objet concret auxquel

est attachée la représentation schématisée et caractéristique d’une idée abstraite ou d’un ensemble plus vaste. Le symbole diffère de l’emblème parce qu’il est "constant, primitif, traditionnel, d’une origine divine ou inconnue" (28), tandis que l’autre est le résultat du choix de l’intention ou de l’imagination de l’homme, sans impliquer nécessairement la ressemblance entre l’objet et l’idée exprimée.

Par symboles, Glock n’entend pas les formulaires d’articles de foi, mais plutôt l’ensemble des moyens d’expression de la religion comme les rites, les cultes, les liturgies et les sacrements qui en contiennent des centaines. En nous limitant au catholicisme,

(38)

sagesse et le cierge allumé, symbole de la foi: pour le mariage: les anneaux, symboles de l’amour et de la fidélité; pour la

confirmation: l’huile du saint chrême, symbole de la force et du courage, etc... Ces symboles remplissent deux rôles prin­ cipaux: contribuer à l’extériorisation des valeurs religieuses et favoriser 1’intercommunication des croyants et des pratiquants.

Nous les retrouvons un peu partout dans les oeuvres socio­ logiques de Durkheim et de Weber. Mais nulle part n’en trouve-t-on la nomenclature. Poui1 sa part, Glock en mentionne quelques-unes comme la nature de l’homme, l’origine et le terme de

la possibilité du bonheur à l’ère technétronique, le

la vie, sens de la

vie sans bonheur, le juste qui souffre et le mauvais qui prospère (29). Les pères de Vatican II ont proposé un regroupement des questions

d’ultime importance. En voici l’énumération: T,Qu’est-ce que l’homme? Quel est le sens et le but de la vie? Qu’est-ce que le bien et qu’est-ce que le péché? Quels sont l’origine et le but de

la souffrance? Quelle est'la voie pour parvenir au vrai bonheur? Qu’est-ce enfin que le mystère dernier et ineffable qui entoure notre existence d ’où nous tenons notre origine et vers lequel nous tendons? (30). Toutes ces questions et bien d’autres, les hommes

J

(39)

a- Une dimension de la religion

Nous avons commencé par situer dans les cadres de la notion de religion, les quatre dimensions qui n'entrent pas dans les objectifs de notre étude, à savoir: les valeurs et l'orientation des valeurs, les croyances, les symboles et les "troublantes" questions d'ultime importance. Nous avons également tenu à dé­ crire brièvement ces dimensions afin de mieux faire ressortir, dès le départ, la dimension de la pratique religieuse qui constitue la variable dépendante ou l'objet principal de notre recherche. Nous visions ainsi à éliminer toute ambiguité qui pourrait se glisser entre la pratique religieuse et les valeurs, les croyances, les symboles et les immortelles questions qui hantent l’homme.

Toute religion attache une grande importance à la pratique. Certaines en font même une obligation sévère pour leurs membres. Ainsi en est-il de la messe dominicale et des devoirs pascaux pour

les catholiques, du pèlerinage à La Mecque une fois dans leur vie pour les mahométans, de la célébration de la pâque ancienne pour les juifs, etc. . .

Avant de s’intéresser à l'extériorisation des croyances, la sociologie, comme on l'a vu, s'est d'abord arrêtée à l'essence de la religion qui constitue, selon Weber, "l'une des antennes de la sensibilité humaine" et que "c'est se condamner à manquer le phéno­ mène de la culture que de montrer de l’indiffcrence à son égard" (31)-Durkheim va plus loin et considère la religion comme un phénomène

(40)

pourrait s’appliquer à la religion. ”un système de forces agis­ santes, une nouvelle manière d’expliquer l’homme "

(33)-La sociologie s’est surtout intéressée aux pratiques ro­

de pénétrer les croyances. En effet, les actes individuels ou collectifs qui concrétisent la pratique religieuse ne sont-ils pas des signes visibles et révélateurs de la conscience? Ne constituent-ils pas aussi un témoignage observable d’une réalité intérieure de l’homme?

Dans son approche la plus globale, la pratique religieuse signifie l’ensemble des relations extérieures de l’homme avec son Dieu. Dans un sens plus restreint, elle veut dire l’ensemble des actes publics manifestant les rapports officiels de l’homme avec son Dieu. Ainsi, pour les catholiques le précepte de l’as­ sistance de la messe dominicale et des devoirs pascaux

(34)-Lorsque Durkheim (1Ç12) définit d’une façon abrégée la reli­ gion comme ”l’ensemble des croyances et des rites correspondants7. .”

(35), il se trouve à faire ressortir ses deux dimensions fondamen-' talcs : la partie intérieure faite de croyances et la partie exté­ rieure composée de pratiques (36).

Puis, lorsque Durkheim s’efforce de visualiser, pour ainsi dire, la vie religieuse qui ”a pour objet”, écrit-il, ”d* élever l’homme au-dessus de lui-même et de lui faire vivre une vie supé-rieure à celle qu’il mènerait s’il obéissait uniquement à ses

(41)

spontanéités individuelles”, il énonce aussi sa conception des croyances et des rites. Les premières "expriment cette vie supé­ rieure en termes de représentation" et les seconds organisent cette vie et "en règlent le fonctionnement" (37) • Considérés par rapport au sacré, Durkheim souligne bien que les rites sont "des règles de conduite qui prescrivent comment l’homme doit se comporter avec les choses sacrées" (38).

b- Le culte et le rite

Avant d’âtre en mesure de construire une définition descrip­ tive de la pratique religieuse, nous devons nous faire une concep­ tion nette du culte et du rite qui en constituent des modalités

essentielles.

C’est en comparant le culte ancestral des sociétés avancées comme celles de Chine, d’Egypte, d’Athènes et de Rome, aux rites funéraires des sociétés primitives de l’Australie, que Durkheim fait la distinction entre culte et rite.

Selon la pensée sociologique, il n’y a de culte que lorsqu’un hommage est rendu à Dieu ou à des créatures divinisées. C’est ainsi que l’on parlera de l’office divin de la messe chez les catholiques, de culte sacrificiel chez les Hébreux et de culte familial du sab­ bat. chez les juifs orthodoxes.

Le rite, lui, est contenu dans le culte et compose l’ensemble des règles et des cérémonies établies pour la célébration d’un culte. D’où la nuance: tout culte implique des rites mais tout rite n’impliqu.c

(42)

un 'I ~ 4 _ ,,4 _1_ \-z Lz' U U- K-t- Ui Olxi %-* K_j4——i—

la recherche de la sagesse et qui ne reconnaît aucune divinité, ne comporte pas de culte mais seulement des rites. L”’anjali” ou salu­ tation avec les mains allongées et jointes, est un rite et non un culte (39).

Ajoutons en outre que les célébrations et les cérémonies reli­ gieuses ne peuvent constituer un culte qu’à la condition de présenter toutes ce caractère bien particulier de retour périodique. La pério­ dicité représente donc aussi l’un des éléments importants du culte (40).

c- Définition descriptive

Nous possédons maintenant assez de matériaux pour composer une définition descriptive de la pratique religieuse que voici:

L’ensemble des gestes obligatoires ou facultatifs d’ordre cultuel auxquels participent extérieurement toutes personnes affiliées à une Eglise.

Les notions que nous avons précisées antérieurement ont pré­ paré en quelque sorte cette définition qui ne devrait pas susciter de graves difficultés. Voilà pourquoi nous nous limiterons à com­ menter seulement les points de la définition susceptibles d’éclairer

la formulation des hypothèses de recherche qui seront bientôt pré­ sentées .

Obligatoires ou facultatifs. Cette distinction s’applique sur­ tout à la différence entre, d’une part, la messe dominicale et les devoirs pascaux qui sont obligatoires et, d’autre part, la messe en semaine, la confession et la communion de dévotion personnelle ou facultative.

(43)

Cultuel. Extérieurement. Ces deux mots se complètent et spécifient le type de pratique religieuse dont il s’agit: une pratique extérieure, par conséquent observable. Ces caractéris­ tiques éliminent leur contraire: les pratiques intérieures et intimistes.

Les actes cultuels peuvent se partager en trois catégories: les actes solennels qui ponctuent chacune des grandes "saisons" ou moment de la vie et qui procurent un statut religieux parti­

culier et introduisent dans un groupe. Ils comportent des droits et des devoirs, à l’exception de la sépulture qui introduit dans une vie exempte de lois. Ces actes solennels sont: le baptême, la profession de foi. le mariage et la sépulture;

les actes périodiques qui témoignent par leur régularité, de l’or­ thodoxie et de la soumission des pratiquants et stimulent à la prière. Ces actes périodiques sont la messe dominicale, la con­ fession et la communion pascales;

et les actes exceptionnels répétés extériorisant et activant une dévotion importante. Ils n’entrent pas dans les dimensions de notre étude. Ces actes exceptionnels sont, chez les catholiques toujours: l’assistance à la messe et la communion sur semaine et ,1a parti­ cipation aux offices mineurs comme les neuvaines, les pèlerinages, les processions, l’affiliation aux confréries et autres mouvements religieux, la présence aux retraites paroissiales, etc...

Ces trois catégories d ’actes de culte ont inspiré à Gabriel Lebras une typologie de la pratique religieuse connue en France et en Europe: les conformistes, les pratiquants réguliers et les dévots (41)•

(44)

Enfin, le dernier' élément de la définition: toutes pevson— nés affiliées à une égJise, qui implique l’intégration des pra­ tiquants à une Eglise, peu importe laquelle.

Jusqu’à présent, nous avons situé la pratique religieuse dans le champ conceptuel de la notion de religion, ce qui devrait empê­ cher de faire de la pratique, la religion, et vice versa. Et nous avons identifié et décrit sommairement les cinq dimensions cons­

titutives de cette notion: les valeurs et l’orientation des valeurs, les croyances, les symboles} la pratique et les questions dites

”d’ultime importance" .

Maintenant, nous nous arrêterons à considérer brièvement le problème sous-jacent aux incidences que les orientations académiques

(scientifiques et humanistes) peuvent avoir sur la pratique reli­ gieuse des étudiants universitaires. Ce problème que de longues disputes idéologiques laissent toujours en suspens, est celui de l’antinomie apparente ou réelle entre la religion et la science.

B- REPERCUSSION DES ORIENTATIONS ACADEMIQUES ^SCIENTIFIQUES ET HUMANISTES)SUR LA PRATIQUE RELIGIEUSE DES ETUDIANTS UNIVER­ SITAIRES

Nous mentionnions^dans 1 ’introduction un certain nombre de facteurs sociaux reconnus comme ayant quelqu’influence sur la pratique religieuse.

La recherche que nous poursuivons, ne se propose pas comme objectif de vérifier de nouveau les incidences que ces facteurs peuvent avoir sur la pratique religieuse. Semblable étude cons­

(45)

tituerait une sorte d’exercice de contrôle factoriel qui pourrait être intéressant mais de peu d’utilité. Par notre étude, nous désirons plutôt nous assurer si les facteurs socio-culturels des orientations et de l’année universitaires peuvent avoir certaines répercussions sur’ la pratique religieuse des étudiants universi­ taires? Nous nous proposons aussi de poursuivre la même obser­

vation par rapport au phénomène social de la contestation étudiante qui sera alors utilisée comme variable d’investigation.

1-' Antinomie apparente ou réelle entre la pratique religieuse et la science

Nous constaterons un peu plus loin,dans ce même chapitre^ lorsque nous ferons la revue des enquêtes sur le comportement des hommes de science et des étudiants do niveaux collégial et uni­ versitaire par rapport à la foi et à la pratique religieuse, que celle-ci a généralement tendance à diminuer lorsque l’étudiant

gravit l’échelle des divers niveaux académiques; que celle-ci indique aussi une baisse plus marquée dans les collèges et universités de haute qualité scientifique et que les étudiants catholiques améri­ cains sont moins nombreux à choisir les carrières scientifiques que les étudiants des autres dénominations religieuses, sans oublier que la majorité des scientifiques américains ne pratiquent presque pas .

L’ensemble de ces comportements où se croisent, dans la cons­ cience ou l’inconscience, le fait religieux et le fait scientifique, sous-entend qu’il existe peut-être encore une certaine incompati­ bilité apparente, non encore résolue, entre les deux termes de

(46)

cette relation socio-culturelle.

Selon Charles Y Glock (42), les perspectives d’incompatibi­ lité entre la religion et la science, découlent d’une évaluation

divergente de l’autorité de la raison humaine telle que conçue, d’une part, par certains hommes de sciences, et, d’autre part, par les

croyants. La religion ne se rattache-t-elle pas à un système de connaissance non empirique où la foi devient nécessaire pour at­ teindre les vérités transcendantes permettant d’arriver à quelques éléments de réponse aux questions d’extrême gravité posées par la vie, l’amour, la mort, le bonheur et le salut? N’est-ce pas de tradition catholique de considérer la raison comme l’humble ser­ vante de la foi? Et ne conserve-t-on pas l’habitude de pointer du doigt les redoutables dangers d’erreur, d’orgueil et de vanité aux­ quels s’exposent ceux qui, en matière de salut, s’appuient sur la raison seule? La science, par contre ne tend— elle pas vers la vérité comme une réalité démontrable logiquement ou empiriquement?

Et la raison, en science, loin d’être une faculté subalterne, n’est- elle pas considérée comme maîtresse et guide de la connaissance? La difficulté viendrait au moment où certains savants voudraient ériger la raison en, maîtresse absolue.

2- Problème toujours en suspens

Théologiens, philosophes et sociologues ont apporté maints arguments dans le but de résoudre le problème de l’antinomie appa­ rente entre la religion et la science. On rejeta d’abord la

(47)

scientifique, distinction posée pour mieux éclaire^ Je problème et offrir de meilleures solutions.

Un groupe de penseurs, ayant à leur tête, Merton White (1962), virent dans cette distinction une forme d'antâ-intellectualisme

en raison de la "dichotomisation" de la vérité (43).

Charles Herzfeld (1929) avait déjà proposé une solution à ce problème en soutenant qu'au niveau idéologique tout conflit est

impossible entre les résultats scientifiques et les vérités théologi­ ques et qu'un conflit n'est possible qu'au niveau méthodologique

(44)-Herbert Feigl (1953) ne voit de solution que dans une meil­ leure différenciation des rôles de la religion et de la science: celui de la religionlétant un dévouement inconditionnel au service des valeurs humaines et justice, de paix, de soulagement des souf­

frances, et celui de la science: expliquer l'univers et ses lois

(45)-En utilisant avantageusement la distinction entre la socié­ té traditionnelle et la société technologique, Pierre W. Bélanger

(i960) fait mieux ressortir que Feigl les rôles respectifs de la religion et de la science.- "Dans la société traditionnelle, la principale fonction de la religion et de la magie consiste à four­ nil" aux hommes des explications sur les phénomènes de la nature. Dans la société technologique, cette fonction échoit à la science et à la technique qui mettent à jour les relations entre cause et

effet" (46). L'auteur précise ensuite: "Si la religion demeure une source d'explication du cosmos, c’est à un niveau global, et ultime et non au niveau des activités quotidiennes...".

(48)

Les pères au deuxieme concile du Vatican, par le message df Paul-Emile Léger, en date du b

de la pensée et de la science, religion-science était en voie à l’idéal commun de recherche

décembre 19o5, adressé aux hommes laissait entendre que le conflit de solution très prochaine, grâce e la vérité. Il déclarait alors: "...jamais peut-être ... n’est si bien apparue qu’aujourd’hui la possibilité d’un accord profond entre la vraie science et la vraie foi, servantes l’une de l’autre de l’unique vérité"

(47^-A la lecture de positions aussi divergentes à l’endroit d’une question débattue depuis tant de siècles, il semble bien qu’en

pratique la compatibilité entre la religion et la science ne soit pas entièrement réalisée. Que nous rapportent les recherches anté­ rieures sur le sujet? Est-ce que cette incompatibilité est obser­ vable dans la conduite et ]a pratique religieuse des hommes de sciences, des collégiens et des étudiants universitaires? Telles sont les questions auxquelles répondront partiellement les données et les faits que nous avons puisés dans la littérature américaine et québécoise.

C- RESULTATS ABREGES DE RECHERCHES ANTERIEURES

1- Aux Etats-Unis

En 1966, Glock prédisait qu’à l’avenir "... l’homme tendra à être soit un scientifique soit un religieux, et non les deux à la fois" (48).

(49)

Tnrvi OC?

OC4AAX Cz O H. Leuba (1916) semble avoir été le premier

Etats-Unis à approfondir la pratique religieuse des hommes de sciences. Sa recherche le contraignait alors à conclure que la grande majo rité des scientifiques américains n'acceptaient pas les croyances religieuses traditionnelles (49) des églises chrétiennes.

Quelque quarante ans plus tard, Anne Roc (1952) scruta de nouveau ce problème en se servant du procédé de recherche par l’entrevue. Elle interrogea personnellement soixante-quatre scientifiques américains dont soixante-trois étaient affiliés à une église. Elle résumait ainsi les conclusions de ses interviews:

"...maintenant, seulement trois de ces intellectuels en sciences sont sérieusement actifs dans une Eglise. Ouelaues autres vont bien à l’église occasionnellement, ou apportent quelque appui financier à une église qu’ils ne fréquentent pas, mais, au fait, ne.sont pas personnellement intéressés aux questions religieuses" (50).

A la même époque, Françis Bcllo (1954) (51), effectua pour le magazine Fortune une brève étude de la situation auprès des scientifiques et ne fit que corroborer les découvertes de Leuba et d’Anne Roe.

Lors d’une recherche très poussée effectuée auprès de l’ensem­ ble de la population religieuse de la ville de Détroit (52) en 1958, le sociologue Gerhard Lenski de l’Université de Michigan, explora l’image que quatre groupes religieux importants se faisaient de la religion. Les interviewés de ces quatre affiliations religieuses

i

étaient respectivement des. catholiques, des protestants blancs, des protestants noirs et des juifs. Aux questions: "Penses-tu

(50)

religieux enseignent? Si oui? Dirais-tu que ces conflits sont ils avaient répondu de la façon suivante:

Tableau 1.

Conflit entre la religion et la science évalué par quatre groupes religieux de la ville de Détroit (1958).

Conflit entre religion et science Catholiques Protestants blancs Protestants noirs Juifs très sérieux Zi assez sérieux 28 23 20 15 très peu sérieux 54 51 57 74 autres 18 26 23 11

Parmi les trois catégories de chrétiens, remarquons que ce sont les catholiques qui perçoivent le plus de conflit entre ces deux sources d enseignement et que les juifs, par conséquent les non-chrétiens, sont ceux qui en perçoivent le moins.

L’enquête de Lenski révéla de plus qu’un conflit de généra-tions existe aussi en ce domaine. Nous voyons en effet les jeunes

T

soutenir qu’un conflit "très sérieux ou assez sérieux" existe entre la religion et la science, tandis que les plus âgés ne se préoccu-pent même pas du problème (54) •

Avec l’élévation du niveau académique, en passant du high school au collège, cette enquête indique encore que la proportion des étudiants qui estiment- qu’un conflit sérieux existe entre la religion et la science, croit chez les catholiques blancs et décroît

(51)

chez les protestants blancs.

Tableau

2-Conflit entre la religion et la science évalué par des étudiants

catholiques blancs et protestants blancs de la ville de Détroit (1958) Niveaux scolaires

High school College

Conflit D Catho­ é sérieux n liques 27 32 o entre El blancs i

religion & n Protes­ a

science t tants 24 17

i

o blancs n

Une éducation plus poussée semble donc favoriser le sens de ce conflit chez les catholiques blancs et l’atténuer chez les protestants blancs.

Selon Lenski, les principales causes de ce conflit chez les catholiques résident dans la haute valorisation spirituelle de l’obéissance envers l’autorité qui dispose psychologiquement à la dépendance intellectuelle au détriment de l’autonoinie de l’esprit (55). Or, quand ces jeunes catholiques entreprennent une carrière scientifique orientée vers l’autonomie de l’esprit, ils ressentent plus profondément un contraste entre les exigences scientifiques et leur formation première.

Figure

Tableau 1- Conflit entre la religion et la science  évalué par quatre groupes religieux, de la

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