• Aucun résultat trouvé

Mémoire M2 Costanza Alfieri (2018/2019)

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Mémoire M2 Costanza Alfieri (2018/2019)"

Copied!
106
0
0

Texte intégral

(1)

UNIVERSITÉ AIX-MARSEILLE

Mémoire de master 2 Mathématiques et applications Parcours : Didactique des Mathématiques

présenté et soutenu publiquement par Costanza ALFIERI

le 18 septembre 2019

Diriger l’étude dans le cadre du paradigme du

questionnement du monde :

une étude de cas sur l’optimisation des grandeurs

Sous la direction de Michèle ARTAUD

JURY

Pierre Arnoux, professeur des universités, Aix-Marseille Université, examinateur Michèle Artaud, maître de conférences, Aix-Marseille Université, directrice de mémoire

Teresa Assude, professeure des universités, Aix-Marseille Université, examinatrice Yves Chevallard, Professeur des Universités, Aix-Marseille Université, examinateur Yves Matheron, professeur des Universités, Institut Français de l’Éducation – ENS de Lyon,

(2)
(3)

There is nothing more practical than a good theory. Kurt Lewin

(4)
(5)

Résumé

Cette recherche se situe dans le cadre de la théorie anthropologique du didactique (TAD) et a pour ambition de contribuer à la connaissance de l’écologie des praxéologies professorales de direction de l’étude dans le paradigme du questionnement du monde. Dans cette perspective, nous avons étudié la mise en place d’une enquête sur l’optimisation des grandeurs dans une classe de seconde. L’analyse didactique met en évidence que, si le topos de l’élève est large-ment majoritaire lors du molarge-ment exploratoire, il est en revanche très réduit lors du molarge-ment technologico-théorique. Dans ce dernier cas, on note en outre une difficulté à mettre en place la dialectique de la déduction et de l’expérimentation, ce qui gêne considérablement l’entrée de la classe dans le modèle mathématique enjeu de l’étude. Les résultats obtenus suggèrent que l’équipement praxéologique actuel de la position de professeur est typique d’une transition encore inaccomplie vers le paradigme du questionnement du monde. Pour que l’enseignant dépasse franchement la fonction de professeur-qui-professe et assume pleinement celle de di-recteur d’étude, des praxéologies professorales résolument novatrices seront nécessaires, que la didactique doit permettre de concevoir et d’outiller.

Mots clés : gestes professionnels de l’enseignant, didactique des mathématiques, dialectique de la déduction et de l’expérimentation, questionnement du monde, optimisation des grandeurs, enquête.

Abstract

This research is within the framework of the anthropological theory of didactics (TAD). It aims to contribute to a better knowledge of the ecology of the teacher position’s praxeologies related to directing the study within the paradigm of questioning the world. In this perspective, an inquiry on optimising magnitudes was implemented during the first year of upper secondary school in France (15-16-year-old students). Didactic analysis shows that the students’ topos is large enough during the exploratory moment, whereas it is poorly developed during the technologico-theoretical moment. In the latter case, the difficulty of installing the dialectic of deduction and experimentation hinders considerably the entry within the mathematical model of functions. The results of the study suggest that the current praxeological equipment of the teacher position is typical of a transition yet unfulfilled towards the paradigm of questioning the world. In order to overcome the traditional stance of the professor-who-professes and to fully assume the position of study director, firmly innovative teaching praxeologies are required, which it is up to didactics to devise and design.

Keywords: teacher’s professional gestures, didactic of mathematics, dialectic of deduction and experimentation, questioning the world, optimising magnitudes, inquiry.

(6)
(7)

Table des matières

Introduction IV

1 Cadre théorique 3

1.1 Paradigmes et problématique de recherche . . . 3

1.2 Dialectiques . . . 7

1.3 Moments de l’étude . . . 10

2 Un PER sur l’optimisation des grandeurs 17 2.1 Organisation mathématique . . . 18 2.1.1 Bloc pratique . . . 18 2.1.2 Environnement technologico-théorique . . . 21 2.2 Organisation didactique . . . 25 2.2.1 Scénario prévu . . . 31 2.2.2 Chronologie du PER . . . 41

3 Le cas du moment exploratoire 45 3.1 Grandeurs liées . . . 45

3.2 Le modèle fonctionnel . . . 47

3.3 Les tables des valeurs . . . 50

3.4 La représentation graphique . . . 51

4 Le cas du moment technologico-théorique 55 4.1 L’émergence de la définition d’un maximum . . . 55

4.2 Fonction croissante et décroissante . . . 58

4.3 Définition de la courbe représentative d’une fonction . . . 62

5 Conclusions 67

Bibliographie 71

Remerciements 73

(8)

A Devoir surveillé 79

B Devoir maison 83

C Exercices : fonctions 85

D Cahiers de texte 89

(9)

Introduction

Ce mémoire a une histoire improbable et quelque peu rocambolesque.

J’ai découvert la didactique des mathématiques presque par hasard, lors de la deuxième année du master de mathématiques en Italie, alors que je participais au programme Erasmus de l’université d’Aix-Marseille.

Dans mon plan d’études, j’avais inclus des examens de didactique du département de sciences de l’éducation d’Aix-Marseille. Mais, en France, pour des raisons administratives, cette proposition n’a pas été acceptée. Un jour, la coordinatrice Erasmus d’Aix-Marseille me dit : « Il y a un master en mathématiques appliquées dans notre département, avec un parcours en didactique : je t’inscris là-bas. »

Je ne parlais pas encore correctement le français pour comprendre réellement ce que j’al-lais faire, mais cela me sembla un bon compromis, qui me permettrait d’obtenir les ECTS dont j’avais besoin, et cela grâce à une matière – la didactique – que, naïvement, je croyais plus simple que les mathématiques ! C’est ainsi que j’ai commencé en septembre 2017 à suivre le parcours « Recherche en didactique des mathématiques » au sein du Master 2 « Mathéma-tiques et applications ».

Au cours des six premiers mois, le contenu du master m’est demeuré passablement obs-cur... Puis, un après-midi, j’ai décidé que je devais faire la lumière sur ce que j’écoutais depuis des mois et j’ai commencé à lire le texte Passé et présent de la théorie anthropologique du didactique d’Yves Chevallard (2007b). Bien sûr, il me fallut tout l’après-midi pour en com-prendre le contenu. Mais, finalement, certains points sont devenus clairs. Surtout, tout cela me semblait solide. Il y avait tout d’abord le fait que le savoir est relatif à l’institution dans laquelle il vit et que cette institution tend à présenter son choix comme absolu. Il y avait le fait que, lorsqu’on parle de savoir, on oublie trop souvent qu’il n’existe pas de théorie sans pratique, ce qui motivait a contrario la modélisation en termes de praxéologies. Il y avait aussi le fait que l’origine de la difficulté de la transposition d’un savoir (ou plutôt d’une praxéo-logie) se trouve à la fois dans le savoir lui-même et dans ce qui, en théorie anthropologique du didactique (TAD), se nomme échelle des niveaux de codétermination didactique, c’est-à-dire dans toutes les institutions qui influencent c’est-à-directement ou inc’est-à-directement la diffusion des praxéologies.

Mes études universitaires, qui se sont déroulées dans quatre universités de trois pays V

(10)

VI Introduction

différents, m’ont permis de faire l’expérience de la relativité institutionnelle dont parle Y. Chevallard en ce qui concerne les institutions et leurs choix d’enseignement. Ainsi tout cela semblait-il vrai, naturel et, surtout, original.

Je me suis intéressée aux thèmes abordés dans ce mémoire, notamment les paradigmes scolaires et les dialectiques de l’étude, car le concept de questionnement du monde m’a pas-sionnée dès mes débuts en TAD. Je croyais encore naïvement que c’était là la solution aux problèmes scolaires qui ont affligé des générations entières et j’étais toute prête à défendre avec passion la pédagogie des parcours d’étude et de recherche (PER) dans les années à venir. J’en étais là de ma réflexion quand je suis arrivée au Centre de recherche mathématique (CRM) de Barcelone, dans le cadre d’un programme intensif de recherche intitulé « Advances in the anthropological theory of the didactic and their consequences in curricula and in teacher education » (Bellaterra, 3 juin-25 juillet 2019) organisé par l’équipe de Barcelone (avec, notamment, Marianna Bosch) et auquel Michèle Artaud a pensé qu’il serait bon que je participe. Dans le cadre de ce programme, j’ai pu assister aux cours d’Y. Chevallard, qui ont pulvérisé mes croyances : car plusieurs paradigmes sont observables dans l’histoire des institutions éducatives et, surtout, dans la plupart de cas, on n’observe nullement un paradigme « pur ». On peut questionner le monde tout en pratiquant la visite des œuvres dont on a besoin pour construire une réponse R♥. Cela a donc remis en cause ce que j’avais pensé jusque-là : il ne saurait être question d’une tyrannie du paradigme de questionnement du monde qui serait la solution exclusive aux problèmes de l’enseignement – une telle solution, si elle peut un jour exister, reste à construire !

Je n’ai donc plus la formule magique que j’avais pensé avoir trouvée et que j’ai pensé devoir défendre. Mais j’ai quand même avancé dans la construction de ma réponse R♥ en position de chercheure : je dois continuer de questionner le monde sans jamais me satisfaire de recettes.

Aujourd’hui, je ne sais plus ce que serait la bonne prescription pour soigner l’enseignement des mathématiques. Mais c’est à partir de ce vide que je veux commencer à faire de la recherche.

(11)
(12)
(13)

Chapitre 1

Cadre théorique

1.1

Paradigmes et problématique de recherche

En Théorie anthropologique du didactique (TAD), dans le cadre de laquelle nous situons cette recherche, on modélise les processus d’étude à l’aide du schéma herbartien (Chevallard,

2009b). Une question Q étant posée, un système didactique S(X; Y ; Q)

se forme autour d’elle où X est un collectif d’étude (une classe, une équipe de chercheurs etc.) et Y une équipe d’aides à l’étude et de directeurs de l’étude (professeur, tuteur etc.). Le but de ce système didactique est d’apporter une réponse Rà la question Q enjeu de l’étude, satisfaisant certaines contraintes, dont celle de résister à sa mise à l’épreuve par la confrontation avec des médias et des milieux. Pour que R♥ puisse être produite, il convient de ressembler un milieu de travail M réunissant des ressources anciennes et nouvelles dont X fera usage.

Les ressources qui feront partie du milieu M sont des réponses R « estampillées » par d’autres institutions, des œuvres O de la culture qui fourniront des outils d’analyse des réponses R, des données D recueillies et des questions dérivées Q qui auront émergé lors de l’étude de la question enjeu de l’étude (Chevallard,2019a). Y.Chevallard (2009b) représente ce travail d’enquête par le schema herbartien, qu’on peut noter dans sa forme semi développée comme suit :

[S(X; Y ; Q) æ M] å R♥ et dans sa forme développée ainsi :

[S(X; Y ; Q) æ (R1, R2, ..., Rn, On+1, ..., Om, Qm+1, ..., Qp, Dp+1, ..., Dr)] å R.

Le rapport de l’école aux questions et aux réponses qu’elles engendrent n’est pas simple : 3

(14)

4 1 Cadre théorique

L’École, on l’a suggéré, est une institution qui doit permettre aux jeunes générations d’entrer dans la société, en « entrant » dans ses questions et dans ses œuvres, en étudiant un large choix de ses questions, et en motivant ainsi un large choix de ses œuvres, c’est-à-dire en faisant apparaître de telles œuvres comme engendrées, directement ou indirectement, par la production de réponses à un certain choix de questions.

Mais ce schéma est peu stable : la plupart des institutions scolaires vont, à la longue, enseigner directement les réponses (qui cessent alors d’apparaître comme telles), en oubliant les questions qui les engendreraient. L’École va ainsi être tentée de recopier les œuvres de la culture de manière immotivée, ou plutôt uniquement motivée par leur inscription dans la culture. (Chevallard,2001, p. 5)

L’enseignement des réponses dont parle Y. Chevallard est le paradigme qui nous semble dominant dans l’institution à laquelle on s’intéresse dans cette recherche, l’École. En TAD, on le nomme paradigme de la visite des œuvres puisqu’on visite des savoirs (ou bien des œuvres dans le sens de la TAD) qui ne sont pas motivés par des questions (Chevallard,2001,

2009c)1.

D’après Y.Chevallard (2019b), la notion de paradigme d’étude est explicitée comme pa-ramètre essentiel dans l’action d’un professeur :

What a teacher must know how to do depends on many parameters. The most important of them is the school paradigm in which the teacher acts, and which specifies “what they do in class” - do they visit works or do they question the world ? (Chevallard,2019b)

ou encore comme réponse à la question générique : « que font-ils à l’École ? » (Ibid.).

Quatre paradigmes sont distingués tout en étant considérés comme existant, ou pouvant exister, simultanément.

I will present four main paradigms designated, respectively, by the symbols $1, $2,

$3, $4. Although these models seem to follow one another historically, they should

be considered as contemporary : they exist in synchrony, even if they can be studied diachronically. (Ibid.).

Les troisième et quatrième paradigmes sont bien connus : il s’agit respectivement du para-digme de la visite des œuvres et du questionnement du monde . Nous présenterons ci-dessous les deux autres.

Le premier paradigme est le paradigme de la lecture du Livre, qui est explicité ainsi : In a given civilization, the Book (seen as unique) is a text B that both raises questions

Q and gives answers A. To say that a class [X, y] studies B means that, under the

1. L’article Chevallard (2009c) est disponible sur le site internet : http://yves.chevallard.free.fr/ spip/spip/article.php3?id_article=162

(15)

1.1 Paradigmes et problématique de recherche 5

direction of y, X studies the questions Q raised and the answers A given in B. The students do not choose the questions for study and, of course, do not officially take part in the construction of the answers A. In this study format, the teacher y will be called the reader [...]. (Ibid.).

Si le paradigme de la lecture du Livre a un long passé, avec comme livre un écrit jouant le rôle « d’encyclopédie totale » dont l’auteur a été gommé par le passage du temps, sa version actuelle comprend plusieurs « encyclopédies partielles » :

The paradigm $1 of reading the Book has descendants to this day, which we will continue to call the paradigm of reading the Book. But here, the total encyclopedia is replaced by a library of partial encyclopedias β1, β2,...,βl where βi is the book on some part of the lived world. (Ibid.).

Le deuxième paradigme est celui de la célébration des grands auteurs - écoutons à nouveau Y. Chevallard (2019b) :

The paradigm $2 is the paradigm of celebrating great authors. In it, the focus is less on a work than on the work’s author. We don’t study political science but Aristotle’s

Politics, we don’t study arithmetic or geometry but Euclid’s Elements, etc. Of course

we do so because these supposed masterpieces are (or were) the Books on political science and on arithmetic and geometry, respectively. While the implementations of the paradigm of reading the Book is often low-level, the paradigm of celebrating great authors is often high-level. One consequence of this fact is that the study of a great author’s works not only seeks to know the questions raised and the answers given by this author, but also the didactic milieus drawn upon and the dialectic of media and

milieus used. (Ibid.).

Comme nous le notions plus haut, les paradigmes ne sont pas exclusifs l’un de l’autre dans la réalisation d’un processus d’étude :

The most important point here is that the paradigm of reading the Book is not incom-patible with any other paradigm, and, in particular, with the paradigm of questioning the world : we may place ourselves in this paradigm when, during an inquiry, we want to know if a certain work W can be useful to our inquiry. The difference, as always, is that we ask what W , and therefore the β book on W , can bring to the inquiry. [...]

The paradigm $2 was part of an intellectual universe which paved the way for the

third study paradigm, $3, the paradigm of visiting works. (Ibid.).

(16)

6 1 Cadre théorique

More precisely, what we are seeing is a certain hybridization of infrastructures and superstructural gestures. This is obviously particularly the case for study formats that seem to us to fall within the paradigm of questioning the world. It is the duty of researchers to identify and explain the functioning (including what some instances may regard as dysfunctions) of didactic institutions, and their effects both economic (in terms of learning—included unlearning—and non-learning) and ecological (in terms of the sustainability of paradigms). (Ibid.).

La question de leur distinction dans l’analyse d’un processus d’étude peut alors s’avérer problématique. Voici quelques éléments à ce propos :

How does the paradigm $3 differ from $1 and $2? In the paradigm of reading the

Book, the “teacher” y is a mere reader. A reader does not claim to be a master of the discipline(s) to which the Book belongs : the one who claims to be an expert is the more or less distant and more or less anonymous author of the Book studied.

By contrast, in the paradigm $3 of visiting works, the teacher is a professor, i.e., someone who professes the discipline taught. [...]

The somewhat surreptitious change from reader to professor brings about an irre-versible change in the paradigm of visiting works : the monumentalization of the works studied, with the correlative deletion of their raisons d’être. That’s where we are today. [...] (Ibid.).

C’est dans cette perspective que nous avons voulu étudier la mise en place d’une enquête (sous forme de PER) sur l’optimisation des grandeurs dans une classe de seconde d’un lycée français. L’enjeu de la recherche n’était pas de constituer un PER « idéal » puisqu’il avait à s’insérer dans l’enseignement « ordinaire » de cette classe de seconde. Il s’est agi de constituer un PER qui comporte suffisamment de caractères de questionnement du monde pour pouvoir observer les changements qui paraissent possibles dans les praxéologies professorales et ceux qui semblent plus difficile à atteindre. En effet, comme le note Y. Chevallard (2019b) :

We must continually explore the evolutions that educational systems are undergoing today from the point of view of their possible inclusion either in the paradigm of visiting works or in the paradigm of questioning the world—we must identify, analyze and explain the symptoms of the fall (or prolongation) of the paradigm of visiting works and the signs of the growth (or stagnation) of the paradigm of questioning the world. (Ibid.).

Comme témoin de l’intégration d’éléments du questionnement du monde, nous examinerons principalement la dialectique des médias et des milieux, la dialectique de l’individu et du collectif et la dialectique de la déduction et de l’expérimentation dans la réalisation de deux moments de l’étude. Nous présentons ces quatre notions ci-après.

(17)

1.2 Dialectiques 7

1.2

Dialectiques

La dialectique est une méthode de raisonnement inventée par le présocratique Zénon d’Élée, et largement utilisée dans les discours du philosophe Platon2. Elle est mise en œuvre entre

deux systèmes généralement opposés, thèse et antithèse, pour lesquels on souhaite dépasser une tension dont ils constituent les deux pôles, en formulant une synthèse3. Il y a de la

dialectique même si on n’arrive pas à un dépassement de la tension bipolaire.

Parmi les dialectiques mises en évidence au sein de la TAD et qui sont pertinentes pour la réalisation d’un PER (Kim, 2015; Chevallard et Ladage, 2010), trois dialectiques nous intéresseront plus particulièrement dans ce travail : la dialectique des médias et des milieux (ou de la conjecture et de la preuve), la dialectique de l’individu et du collectif et la dialectique de la déduction et de l’expérimentation.

Pour pouvoir expliquer la dialectique des médias et des milieux, nous devons d’abord illustrer ce qu’on désigne par média et milieu au sein de la TAD.

Comme Y. Chevallard (2007a) l’a défini dans Un concept en émergence : la dialectique des médias et des milieux, un média est un « système de mise en représentation d’une partie du monde naturel ou social à l’adresse d’un certain public ». Nous désignons donc par médias tous les dispositifs contenant des données et des notions fournissant des informations de façon intentionnelle. Par exemple, les journaux, la télévision, un cours de professeur, un manuel peuvent tous jouer le rôle de média.

Comme on l’a déjà introduit dans la présentation du schéma herbartien, un milieu, au sein d’une certaine institution, est un ensemble d’objets sur lequel l’ensemble d’étudiants X agit et dont X se sert pour la construction de la réponse Rà Q (Chevallard, 2001, 2009b;

Kim,2015).

Le milieu du schéma herbartien est évolutif : au cours du processus d’étude, le rapport aux objets change ainsi que son caractère d’être problématique ou non problématique (Chevallard,

2019b). Supposons qu’on veuille faire étudier dans une classe seconde d’un lycée français les fonctions et l’optimisation. La calculatrice graphique pourra être insérée dans le milieu car elle permet de faire des conjectures et, en même temps, elle fournit un moyen de les tester et de les expérimenter, permettant aussi de progresser dans l’élaboration d’une réponse à une question Q donnée. Initialement, toutefois, la calculatrice sera considérée comme un objet problématique, car les étudiants devront apprendre à utiliser ses différentes fonctions. Une fois passé ce stade, cependant, les étudiants auront un rapport non problématique à cet objet. En général, dans le milieu nous pouvons trouver des objets problématiques, comme l’exemple de la calculatrice au début de l’étude au moins, et des objets non problématiques, comme les organisations mathématiques étudiées dans le cycle d’étude antérieur. En prenant

2. https://fr.wikipedia.org/wiki/Zénon_d’Élée

(18)

8 1 Cadre théorique

l’exemple des fonctions, le logos qui fera partie du milieu sera principalement constitué autour de la notion de fonction, étudiée au collège, ainsi que la définition de l’image et de l’anté-cédent d’un nombre par une fonction et la définition et la représentation graphique d’une fonction linéaire et d’une fonction affine.

Plus spécifiquement, on désignera le milieu dans le sens de la théorie des situations di-dactiques de G. Brousseau (Brousseau et Balacheff, 1998) comme adidactique : on peut le considérer comme dénué d’intentions à l’égard de la réponse qu’il peut apporter, de façon im-plicite ou exim-plicite, à la question qui lui est posée. En d’autres termes, un milieu adidactique est un media qui n’a pas l’intention d’influencer d’une manière ou d’une autre la réponse à la question posée, sauf pour la production de rétroactions qui fournissent des indications sur la véracité au moins des conjectures qui lui sont soumises. Par exemple, supposons qu’on veuille savoir le résultat d’un calcul. La calculatrice jouera le rôle de média dans la réponse à la question « quel est le résultat de ce calcul ? ». Si le résultat avait été calculé par des autres voies, lorsqu’on interroge la calculatrice par la question « est-ce que le résultat est juste ? », elle jouera le rôle de milieu.

En général, les médias permettent de produire des conjectures qui doivent être mises à l’épreuve de milieux, ce qui consiste donc à mettre en œuvre une dialectique des médias et des milieux (ou de la conjecture et de la preuve). En utilisant le vocabulaire de la TAD, nous pouvons considérer la dialectique des médias et des milieux comme la réalisation alternée de deux types de tâches : le premier, produire une assertion ou un résultat, et le second « vérifier une assertion » ou « contrôler un résultat » comme cela a été mis en évidence par M. Artaud (2019a). La dialectique des médias et des milieux est un processus récursif pendant lequel tout objet peut avoir une fonction de média ou de milieu, selon la question qui lui est posée. Le processus dialectique peut être considéré comme terminé une fois que l’assertion soumise à cette dialectique reste inchangée : cela ne garantit pas la véridicité totale du résultat, mais au moins un « degré de vérité plus haut », comme le suggère S. (Kim,2015, p. 67). En particulier, la production de la réponse R♥ elle-même exige la réalisation d’une telle procédure dialectique : on considère qu’une réponse R peut être prise pour réponse R♥ si celle-là a résisté à l’ensemble du processus de la dialectique des médias et des milieux.

L’importance de la dialectique des médias et des milieux dans un processus d’étude ré-side dans le fait que cela empêche de réduire ce processus à un simple copier-coller peu critique des informations trouvées dans les médias, voire du discours du professeur, qui, dans le paradigme de la visite des œuvres, est d’ailleurs considéré en général comme l’unique mé-dia envisageable, mémé-dia dont le niveau de véridicité des messages qu’il produit n’est jamais sérieusement interrogé (Chevallard, 2007a).

La deuxième dialectique que nous allons considérer est la dialectique de l’individu et du collectif. Y. Chevallard et C. Ladage (Chevallard et Ladage, 2010) affirment que, dans le fonctionnement d’un système didactique S(X; Y ; Q), une condition essentielle qui définit le

(19)

1.2 Dialectiques 9

rôle de X est que X se comporte comme un collectif qui tente d’étudier Q et de produire une réponse R♥, plutôt que d’essayer de produire la réponse individuellement et de manière compétitive, comme cela peut être le cas dans une classe « ordinaire ». Dans ce dernier cas, en effet, chaque étudiant n’est responsable que de son propre résultat et non du résultat de la classe : cela implique, par exemple que, lors de l’étude d’une question Q, un étudiant peut penser avoir terminé son activité de recherche au moment où il pense avoir construit une réponse individuelle suffisante, au moins jusqu’à ce que le professeur lui communique que son résultat (individuel) n’est pas satisfaisant. « Par contraste, chaque élément x ∈ X, lors d’une recherche sur Q, doit entrer dans une dialectique de l’individu et du collectif, et ne pas rester dans une situation d’autonomie de comportement soumise aux demandes de Y » (Chevallard et Ladage,2010, p. 8). De cette façon, le système didactique passe de l’autonomie (individuelle guidée par la direction de Y ) à la construction d’une synnomie, c’est-à-dire d’une loi (nomos) élaborée et appliquée ensemble (sun), d’une responsabilité collective assumée en coopération avec Y (Chevallard et Ladage, 2010; Kim,2015).

Aucun membre de X ne doit donc penser pouvoir abandonner les activités de recherche jusqu’à ce que la recherche collective soit terminée, c’est-à-dire jusqu’au moment où une réponse R♥ a été construite et approuvée en tant que réponse de la communauté.

Cette reformulation du rôle de X au cours d’un processus d’étude S(X; Y ; Q) æ M conduit, inévitablement, à redéfinir le rôle de la direction de l’étude de Y : en fait Y , en passant les responsabilités de l’étude de Q de lui-même à X (dévolution de la question), doit savoir comment faire cette dévolution non seulement à l’égard de chaque x ∈ X, mais aussi au collectif X même. De cette manière, X est établi en tant qu’institution qui doit produire Rsous la direction de Y et avec la contribution et la participation de chacun de ses membres x ∈ X. C’est cette tension entre le travail individuel et la production collective qui peut être résolue par la mise en œuvre d’une dialectique de l’autonomie (ou de l’individu) x et de la synnomie (ou du collectif) X (Kim,2015).

La dernière dialectique que nous allons présenter est la dialectique de l’expérimentation et déduction, ainsi illustrée par S. Kim (2015) :

La troisième dialectique est celle de la déduction et de l’expérimentation. Le mot de déduction est employé ici en un sens large, qui, au-delà des « raisonnements déduc-tifs » illustrés dans le cas de la géométrie, inclut également le calcul (ou plutôt les différents types de calcul possibles) [...] La notion d’expérimentation doit de même être entendue en un sens large. Nous avons parlé d’expérience graphique et évoqué la notion d’expérience numérique. Celle-ci, qui peut éclairer et contrôler en amont le processus de déduction, peut être mise en aval au service de simples vérifications. (Kim, 2015, p. 185)

(20)

10 1 Cadre théorique

dans l’institution scolaire (et au-delà), à savoir le paradigme déductiviste. Ce paradigme s’ap-puie sur l’idée que en mathématique (et même ailleurs) « tout peut se déduire » (Chevallard,

2007a) : on cherche à prouver la vérité d’une assertion mathématique (presque uniquement) par un raisonnement purement déductif, sans la mettre à l’épreuve dans le cadre d’une dialec-tique plus large des médias et des milieux, milieux qui ont peut-être « des choses à dire » sur l’assertion étudiée. Il se peut, par exemple, que cette assertion, qui semblait (à tort) résister à l’épreuve de la déduction, ne résiste pas à une dialectique plus large, par exemple à certains des calculs auxquels elle peut donner lieu (Chevallard, 2007a; Artaud, 2019b).

Pour être plus précis, présentons ce qui a été décrit par M. Artaud (2019b) : considérons le type de taches Tv : « s’assurer qu’un résultat est vrai » qu’on souhaite accomplir lors

d’un processus d’étude d’une question Q. Pour accomplir ce type de taches, un fragment de technique sera de procéder d’abord par expérimentation, pour s’assurer que le résultat est vrai dans le système S qu’on étudie ; une fois cela confirmé, on souhaite montrer que ce résultat est déductible de la théorie T dont on dispose. Pour cette technique, nous présentons dans ce qui suit le logos associé (Chevallard, 2007a; Artaud, 2019b).

Soit S un système de nature physique, chimique, mathématique etc. et θ une assertion à propos de S. On souhaite construire une théorie déductive T sur S, « c’est-à-dire une théorie telle que l’on ait, au moins, θ vraie dans S si θ est déductible dans T , c’est-à-dire est un théorème de T (au sens large, en comptant les axiomes de T comme des théorèmes) » (Artaud, 2019b). Mais la construction d’une telle théorie T implique qu’on insère dans T des assertions que l’on considère vraies dans S, qui auront donc le statut d’axiomes dans T , et qui ont été constaté en interrogeant S, c’est-à-dire en procédant à une expérimentation sur S. Cela revient à dire que T (S) sera construite par une série d’allers et retours entre expérimentation et déduction. Comme affirmé par M.Artaud (2019b), « la théorie déductive T (S) sera fondée sur un mécanisme d’induction à partir de résultats de l’expérience ».

M. Artaud (2019b) écrit encore :

On met dans T (S) des assertions que l’expérimentation a prouvé raisonnablement être vraies dans S et, en sens inverse, on vérifiera expérimentalement les théorèmes θ établis déductivement dans T (S), pour s’assurer que T (S) est « fiable » dans ce qu’elle nous révèle sur S.

C’est ce processus d’allers et retours entre déduction et expérimentation qu’on nomme dia-lectique de la déduction et de l’expérimentation.

1.3

Moments de l’étude

Dans l’article Passé et présent de la théorie anthropologique du didactique (Chevallard,2007b), Y. Chevallard décrit l’enseignement secondaire en France comme une organisation binaire

(21)

1.3 Moments de l’étude 11

cours-exercices. C’est-à-dire que tout d’abord, le professeur présentera au cours de son cours une œuvre mathématique (au sens de la TAD, le mot œuvre désigne tout artefact humain), puis il illustrera ses applications, ou l’utilisation qui peut en être faite pour réaliser un cer-tain type de tâches. Par exemple, le professeur « montrera » le théorème de Pythagore et sa preuve ; ensuite il montrera que, grâce à cette œuvre mathématique, il est possible de résoudre le problème suivant :

Un bateau quitte le port en suivant une certaine direction : au bout de 2 km, il prend la direction perpendiculaire et continue sur 3 km avant de reprendre la direction initiale sur 2 km. À quelle distance se trouve-t-il du point de départ ? (Chevallard,2007b, p. 23)

Le modèle d’enseignement décrit par Y. Chevallard pour le système scolaire français, c’est-à-dire l’organisation binaire, valorise l’œuvre présentée pendant le cours uniquement pour « son économie structurale, et non dans ses fonctions, qui se perdent alors dans l’émiettement apparemment sans fin des “applications” » (Chevallard, 2007b). Au sein de ce paradigme scolaire, le savoir que l’on souhaite construire est présenté comme non problématique, presque naturel : les raisons d’être, les motivations, les problématiques qui ont conduit à la création de cette œuvre ne sont ni expérimentées ni vécues par les élèves, mais elles sont réduites à des “applications” de l’œuvre elle-même.

Le modèle des moments de l’étude, ou encore modèle des moments didactiques, a été in-troduit pour fournir des outils pour l’analyse des organisations de l’étude (ou organisations didactiques, OD). Ce modèle permet de caractériser les gestes récurrents au sein de chaque organisation didactique, indépendamment des particularismes et des caractéristiques contin-gentes. Le terme moment que nous utilisons pour décrire ces fonctions didactiques ne fait pas référence à la chronologie de ces gestes, mais à l’observation selon laquelle, quelle que soit l’organisation didactique mise en œuvre, « quel que soit le cheminement suivi, il arrive for-cément un moment où tel ou tel « geste d’étude » devra être accompli » (Chevallard, 1998) ; par exemple, il arrive toujours un moment où, grâce à la direction d’étude du professeur, la classe rencontre pour la première fois une tâche t du type T que l’on veut étudier.

Grâce à l’analyse concrète d’organisations didactiques observables et existantes, ont été distingués six moments didactiques. Supposons que nous voulions étudier (construire, élabo-rer, développer) une certaine organisation mathématique ponctuelle (OMP) [T /τ /θ/Θ].

La première fonction de l’étude est le moment de la première rencontre avec le type de tâches T : cette première rencontre n’est pas conçue dans un sens chronologique, mais plutôt comme une première rencontre qui détermine le début d’un processus d’étude de T ; on y voit l’apparition de T comme type de tâches problématique ou à nouveau problématique.

Voici un exemple, cité par M.Artaud(2016), de réalisation d’un fragment du moment de la première rencontre avec le type de tâches Teq « Construire l’ensemble des points équidistants

(22)

12 1 Cadre théorique

Figure 1.1 – Activité sur la bille

Le professeur, P, distribue l’activité ci-dessous (figure 1.1). Il lit le texte de l’activité et explique :

« Vous avez le dessin de la planche avec les deux aimants qui sont en A et B. Vous lancez la bille doucement car il faut lui laisser le temps de rouler, à partir de la zone de départ pour aller jusqu’à la zone d’arrivée. Le problème est donc : comment lancer la bille pour gagner ? Si on est à la même distance des deux aimants, comme l’un n’est pas plus fort que l’autre, la bille continue d’avancer. Par contre si on est plus près d’un aimant, la bille va être attirée. Est-ce que quelqu’un a une idée, un endroit à me proposer sur la planche ou il est sûr que la bille va passer ? » (Artaud,2016, p. 13)

Dans l’exemple cité, nous voyons que l’exécution de la tâche proposée, c’est-à-dire la déter-mination des points où la bille passera, implique la réalisation du type de tâches enjeu de l’étude, c’est-à-dire « la construction de l’ensemble des points équidistants de deux points donnés ». En soumettant à la classe l’étude de la situation de la bille, on crée des conditions a priori suffisantes pour que la classe rencontre le type de tâches Teq comme problématique.

La deuxième fonction de l’étude est d’explorer le type de tâches T , à travers certains spé-cimens, et de construire, ou de faire émerger, un premier embryon de technique τ permettant de réaliser T . Cette fonction est donc appelée moment de l’exploration du type de tâches et de l’émergence de la technique, ou encore moment exploratoire. Voici un exemple d’un épisode du moment exploratoire, cité par M. Artaud (2016), sur le même type de tâches Teq.

La classe réfléchit, des élevés discutent entre eux et P trace au tableau en oralisant le point A, le point B, prend un point M quelconque (voir figure 1.2) et demande si ce point M est à égale distance de A et de B.

(23)

1.3 Moments de l’étude 13

Figure 1.2 – Tracée au tableau

La classe répond que non, il est plus près de B. Le professeur demande alors comment devrait être le triangle AM B pour que M soit à égale distance de A et de B. Certains élèves disent « rectangle », d’autres « isocèle ».

P : « Oui, isocèle ; donc on va en tracer plusieurs, on ne va pas tracer les triangles, ça ne serait pas beau et ça nous servirait à rien ; on va tracer des points qui soient des sommets de triangles isocèles ». Il demande à Li : « comment fait-on pour tracer un triangle isocèle ? », rappelant qu’on a pour base [AB] et qu’il s’agit de construire le sommet, M . (Artaud,2016, p. 13)

Il est à noter que le professeur place dans le milieu l’objet « triangle isocèle » pour faciliter l’élaboration d’une technique. Dans ce cas, on observe que le type de tâche « construire le sommet d’un triangle isocèle » déjà connu par les élèves contribue à la réalisation du moment exploratoire du type de tâches Teq et, donc, il ne fera pas partie de l’OM enjeu de l’étude,

mais il restera au niveau de l’OD qui permet la construction de l’OM.

La troisième fonction de l’étude, le moment de la construction du bloc théorique, ou moment théorique, vise à établir l’environnement technologico-théorique lié à la pratique [T /τ ], c’est-à-dire à justifier, produire et rendre intelligible la technique τ en constituant ainsi une technologie θ, à son tour justifiée et rendue intelligible par une théorie Θ.

Nous prenons toujours l’exemple de la classe sixième qui étudie le type de tâches Teq

(Artaud, 2016, p. 14). Dans l’extrait suivant, on voit surgir un élément technologique : tous les points de la médiatrice de [AM ], définie comme la perpendiculaire au segment [AM] en son milieu, sont à la même distance de A et de B.

P annonce : « Une fois que vous avez tracé cette droite, c’est effectivement le résultat que certains attendaient ; à peu de choses près, vous avez une droite qui est perpendiculaire au segment [AB] et comme cette perpendiculaire passe par le milieu on est à peu près sûrs qu’on vient de tracer la médiatrice » et il fait le tracé au tableau. Puis il poursuit : « En fait, cela va être une propriété de la médiatrice que certains d’entre vous connaissaient, tous les points de la médiatrice sont tous les points qui sont à la même distance de A et de B. On va aller coté synthèse et on va noter ce résultat-là ».

(24)

14 1 Cadre théorique

La quatrième fonction de l’étude est le moment de travail de l’OM, qui prévoit un processus d’exercices et d’amélioration de l’OM afin de la rendre plus sûre et plus fluide et d’accroître sa maîtrise. Ce moment est généralement réalisé selon une didactique traditionnelle, c’est-à-dire par le biais du dispositif de résolution d’exercices.

Le cinquième moment est le moment de l’institutionnalisation de l’OM au cours duquel on clarifie l’OM construite et analysée lors de l’étude des types de tâches T , en distinguant les éléments qui ont seulement contribué à la construction de l’OM mais n’en feront pas partie de ceux qui, au contraire, constituent le cœur de l’OM construite.

Voici un exemple de réalisation d’un épisode du moment d’institutionnalisation, tiré de l’étude déjà mentionnée sur la médiatrice (Artaud, 2016, p. 13)

P demande aux élèves de sauter une ligne puis écrit au tableau en l’exprimant orale-ment :

III. Construction de la médiatrice au compas.

Il précise que la règle sert à la tracer, mais qu’on ne l’utilisera pas pour mesurer et enchaîne : « on va noter une propriété ». Il écrit au tableau en oralisant :

Propriété : Les points de la médiatrice d’un segment [AB] sont les points à égale dis-tance

Il s’interrompt pour expliquer : Il y a un mot mathématique pour dire “à égale distan-ce”, c’est « équidistant » ; il finit d’écrire :

Propriété : Les points de la médiatrice d’un segment [AB] sont les points à égale dis-tance (équidistants) de A et B.

Reprend l’explication de équidistant et ajoute : « c’est un mot qui est construit comme un autre mot que vous connaissez », des élèves répliquent : « équilatéral », et P pour-suit : « équilatéral, on avait dit que cela voulait dire, mêmes côtés. Dans un triangle, tous les côtés sont identiques et là c’est la même construction qu’équilatéral ».

La dernière fonction, enfin, est le moment de l’évaluation de l’OM et de sa maîtrise qui évalue non seulement la maîtrise acquise de l’OM, mais aussi l’OM elle-même : ainsi par exemple, lors d’un devoir surveillé, un échec massif des étudiants en accomplissant un type de tâches peut révéler généralement un problème dans l’organisation mathématique elle-même, l’un des problèmes les plus fréquents étant le manque d’étapes de contrôle explicitement présentes dans la technique (Artaud, 2019a).

L’ordre dans dans lequel nous avons présenté les moments didactiques n’est qu’un ordre d’exposition et ne coïncide pas nécessairement avec leur réalisation chronologique, comme sou-ligné par Y.Chevallard(1998). Généralement, dans un processus d’étude, les moments didac-tiques se réalisent en différents épisodes : par exemple, les moments exploratoire, technologico-théorique et du travail de l’OM se font souvent de manière dialectique comme une succession d’épisodes croisés de chaque moment (Artaud,2016, 2011).

(25)

1.3 Moments de l’étude 15

Lorsqu’on souhaite se situer dans un paradigme de questionnement du monde, la direction de l’étude réalisée par Y prévoit que Y dirige le processus d’étude permettant la réalisation de tous les moments de l’étude sans qu’il valide ou invalide les assertions des élèves, qui doivent être mises à l’épreuve par une dialectique des médias et par des milieux. Il s’agit de ne pas rendre le processus d’étude non critique et de fournir aux étudiants suffisamment de moyens pour vérifier leurs résultats. La mise en œuvre de la dialectique de l’individu et du collectif est également essentielle afin de permettre à toute la classe de progresser de manière homogène. La dialectique de la déduction et de l’expérimentation est produite par un logos relatif à la nature du travail mathématique : les mathématiques ont pour fonction (parmi d’autres) de produire des mathématisations de systèmes extra-mathématiques. C’est au cours d’un tel processus de mathématisation qu’on est conduit à essayer de déduire, dans le cadre d’une théorie déjà en partie élaborée (ne serait-ce que de façon très parcellaire), des assertions relatives à un modèle censé représenter le système étudié.

La question de recherche à la base de la constitution et de la réalisation du PER sur l’op-timisation des grandeurs concerne précisément le manque de praxéologies détaillées pour les professeur.es afin qu’ils puissent mettre en pratique une direction de l’étude adéquate pour construire, dans le cadre du paradigme de questionnement du monde, l’organisation mathé-matique établie (Artaud, 2011). En particulier, l’articulation entre le moment exploratoire et celui de la constitution de l’environnement technologico-théorique est considérée, dans la recherche en didactique des mathématiques (Artaud, 2011), comme un passage délicat qui pose de nombreuses difficultés empêchant que la technologie puisse émerger de façon com-plète, bien justifiée par une théorie, et pas seulement sous la forme de quelques assertions dispersées.

Les observations de la réalisation de ce PER présentées dans les chapitres suivants portent précisément sur ce point : quels sont les éléments saillants qui se dégagent lors du passage entre le moment de l’exploration et le moment technologico-théorique ? Quelles praxéologies pro-fessionnelles pour le professeur manque-t-il pour atteindre le moment technologico-théorique de manière adéquate ?

La fabrication d’un PER est donc le moyen par lequel on veut observer quelles conditions et quelles contraintes favorisent ou empêchent la réalisation des certains moments de l’étude au sein du PER, notamment dans la perspective du paradigme du questionnement du monde et dans l’esprit de sortir de la condition de semi-profession du professeur (Chevallard,2009b).

(26)
(27)

Chapitre 2

Un PER sur l’optimisation des

grandeurs

La construction du PER sur l’optimisation des grandeurs en classe de seconde en France (15 -16 ans) a été constituée de deux phases préalables à l’expérimentation en classe : la première phase consistait à établir et à spécifier l’organisation mathématique (OM) enjeu du PER ; la seconde phase consistait à établir l’organisation didactique (OD) permettant de construire cette OM et de prévoir des scénarios possibles de manière à pouvoir travailler au préalable avec à la professeure qui devait réaliser le PER dans sa classe.

Le PER a été testé dans une classe de seconde d’un lycée français. En moyenne, les élèves disposaient de quatre heures d’enseignement de mathématiques hebdomadaires, dont une heure et demie se déroulait généralement en salle informatique. Dans tous les cas, la professeure disposait d’un vidéoprojecteur avec ordinateur relié et chaque élève disposait d’une calculatrice graphique.

L’enseignante qui a réalisé le PER connaît les concepts de organisation mathématique, organisation didactique et PER. Cela a en partie réduit les obstacles qui auraient pu être créés si l’enseignant chargé de réaliser le PER n’avait pas été familier de ces notions. Par ailleurs, cela nous a permis de collaborer avec l’enseignante avant et pendant la mise en œuvre du PER. Après chaque séance, nous avons pu discuter, analyser et modifier l’organisation de l’étude en fonction des besoins et des difficultés de l’enseignante et de la classe. Notons que un travail de dévolution du PER portant aussi bien sur l’organisation mathématique que sur les praxéologies de réalisation des moments a été mené dans les entretiens régulières que nous avons eu avec la professeure dirigeant l’étude du PER. Ce travail a été important mais nous n’avons pas eu le temps de l’exploiter dans ce mémoire.

(28)

18 2 Un PER sur l’optimisation des grandeurs

2.1

Organisation mathématique

Au cours de la première phase, une analyse des programmes1, ainsi que du manuel de la

collection Transmath 2de, 2014, a été conduite pour avoir une vision claire des attentes

insti-tutionnelle. Cette analyse a été réalisée afin de pouvoir décrire l’organisation mathématique locale en termes de types de tâches, techniques, technologies et théories (c’est-à-dire en termes de praxéologies), en respectant les attentes du ministère de l’Éducation Nationale.

L’analyse menée a été guidée par l’organisation mathématique déjà établie parArtaud et Menotti (2008) dans Fabriquer et faire vivre une organisation mathématique régionale et par l’organisation mathématique sur les fonctions de second degré établie par Artaud (2018a) dans Constituer une organisation mathématique et une organisation de l’étude, dont certains aspects ont été modifiés car ils ne sont plus présents dans le dernier programme ministériel publié en 2017.

L’organisation mathématique conçue est caractérisée par deux types de tâches générateurs qui, en pratique, ont pour effet une division de l’enquête sur les fonctions en seconde en deux parties distinctes :

1. T1 : Déterminer la ou les valeur(s) d’une grandeur satisfaisant à certaines conditions.

2. T2 : Étudier un phénomène continu.

Le temps a manqué et la recherche n’a été développée que sur une OM liée au type de tâches T1; nous ne présenterons l’OD et son analyse que pour cette seule OM.

Il faut cependant remarquer que cela n’affecte pas trop notre analyse car, comme nous l’avons mentionné précédemment, la réalisation de ce PER n’est qu’un moyen par lequel nous souhaitons étudier les praxéologies utiles ou indispensables aux professeurs de mathématiques pour réaliser les différents moments de l’étude.

2.1.1

Bloc pratique

Nous considérons donc le type de tâches générateur :

T1 : Déterminer la valeur ou les valeurs d’une grandeur satisfaisant à certaines conditions

dont un sous type de tâches est :

Tmax/min : Déterminer le maximum ou le minimum d’une grandeur

qui est le type de tâches qui sera effectivement étudié dans le PER.

1. Bullettin Officiel du 4 mai 2017 et des documents complémentaires, Proposition d’ aména-gement du programme de classe de seconde mathématique du 15 décembre 2016 disponible sur le site internet : http://eduscol.education.fr/maths/sinformer/textes-officiels/programmes/ lycee-general-et-technologique/seconde.html

(29)

2.1 Organisation mathématique 19

Ici, les conditions portant sur la grandeur sont donc d’être la plus grande ou la plus petite possible.

La technique de réalisation de ce type de tâches peut être décrite comme suit :

— τmax/min: Si la grandeur peut s’exprimer en fonction d’une grandeur connue ou

connais-sable :

Si cette fonction est une fonction polynôme du second degré :

— Si cette fonction peut s’exprimer sous la forme x 7→ ax2+ bx + c :

Pour obtenir l’antécédent, xm, de l’extremum, on trouve deux réels x1 et x2 tels

que f (x1) = f (x2) ; on calcule alors (x1+x2 2) et on écrit que ce nombre est xm.

On calcule f (xm) et on conclut qu’il s’agit du minimum ou du maximum cherché.

[Si on n’y arrive pas numériquement ou pour vérifier le résultat, on peut calculer f (0) et chercher k tel que f (k) = f (0) ; on se ramène à une équation du type k(ak + b) = 0 que l’on résout.]

On vérifie à la calculatrice en traçant la courbe de f et en déterminant la valeur de l’extremum avec la calculatrice ; on vérifie également que a(x−xm)2+f (xm) = f (x)

en tabulant les deux expressions avec la calculatrice ou en demandant la forme canonique à un logiciel de calcul formel. Cette vérification peut se faire aussi par le biais d’une feuille de calcul, en traçant le graphique et en cherchant les coordonnées du maximum ou minimum dans la table des valeurs du feuille.

On teste avec une valeur, k : si f (k) ≥ f (xm), c’est un minimum, sinon c’est un

maximum.

— Si l’expression de la fonction est de la forme a(x − xm)2 + β, on montre alors,

soit que f (x) ≤ β et on conclut que β est un minimum ; soit que f (x) ≥ β et on conclut que β est un minimum ; ou bien on teste avec une valeur, k : si f (k) ≥ β, c’est un minimum, sinon c’est un maximum. On vérifie à la calculatrice en traçant la courbe de f et en déterminant la valeur de l’extremum avec la calculatrice. Cette vérification peut se faire aussi par le biais d’un feuille de calcul, comme précédemment.

— Si la grandeur est exprimée par une fonction dont l’expression ne peut pas se mettre sous l’une des deux formes précédentes, tracer la représentation graphique de la fonction ; déterminer le point le plus haut (maximum) ou le plus bas (minimum) de la courbe et ses coordonnées. Justifier que c’est bien le maximum ou le minimum en utilisant les variations de la fonction. Vérifier ou préciser ces coordonnées en faisant une table de valeurs de la fonction à l’aide de la calculatrice ou du tableur. Comme dernière étape de contrôle, vérifier le résultat obtenu en utilisant un programme ou la fonction fmax ou fmin de la calculatrice.

(30)

20 2 Un PER sur l’optimisation des grandeurs

La réalisation de Tmax/min, on l’a vu, nécessite parfois d’étudier les variations d’une fonction,

c’est-à-dire de réaliser le type de tâches suivant : Tvar : Étudier les variations d’une fonction.

— Si la fonction f est linéaire, on détermine le coefficient directeur m et on examine le signe.

— Si m = 0, la fonction f est constante ;

— Si m > 0, la fonction f est croissante ; sinon, f est décroissante.

— Si la fonction f est une fonction polynôme du second degré, on détermine l’extrémum de f et la valeur xm correspondante ; s’il s’agit d’un maximum, alors la fonction est

croissante sur l’intervalle (−∞; xm] et décroissante sur l’intervalle [xm; +∞) ; sinon c’est

le contraire. On vérifie en traçant la courbe de la fonction à l’aide de la calculatrice. — Si la fonction f ne rentre pas dans les cas précédents, on trace la courbe de la fonction

à calculatrice et on détermine ses variations à partir de l’étude de la courbe.

D’autres types de tâches relèvent de T1 et sont présents dans le programme de seconde.

Teq : Résoudre une équation du type : f (x) = k, avec k ∈ R.

— Si la fonction f est linéaire, les élèves ont appris une technique au collège pour réaliser ce type de tâches. Elle ne sera pas décrite dans cette OM puisqu’elle n’est pas enjeu de l’étude en seconde.

— Si la fonction f est une fonction polynôme du second degré, on se ramène à une équation du type X2 = p. Pour cela, on détermine l’abscisse correspondant au maximum ou

minimum, xm, et puis on écrit f (x) sous la forme a(x − xm)2 + β. Ensuite, on résout

l’équation f (x) = k en se ramenant à l’équation (x − xm)2 = s, avec s = k − β. On

vérifie à calculatrice en traçant la courbe représentative et en calculant les images des valeurs trouvées.

— Si la fonction f ne rentre pas dans les cas précédents, on trace le graphique de la fonction à calculatrice et on cherche toutes les valeurs x des abscisses des points où la courbe de f et la droite d’équation y = k se coupent ou sont tangentes. Ces nombres x sont les solutions cherchées. Vérifier en calculant f (x) pour toutes les valeurs x trouvées pour déterminer s’il s’agit de solutions exactes ou approchées.

Tin : Résoudre une inéquation du type f (x) < k, avec k ∈ R.

— Si la fonction f est linéaire, les élèves ont appris une technique au collège pour réaliser ce type de tâches. Elle ne sera pas décrite dans cette OM puisqu’elle n’est pas enjeu de l’étude en seconde.

(31)

2.1 Organisation mathématique 21

— Si la fonction f est une fonction polynôme du second degré, on se ramène à une inéqua-tion du type g(x) < 0, où g(x) = f (x) − k. On cherche ensuite les valeurs exactes de u1

et u2tels que g(ui) = 0 pour i = 1, 2 en réalisant le type de tâche Teq; on calcule l’image

par g d’un nombre situé dans le complémentaire de l’intervalle [u1; u2] : si cette image

est positive, l’ensemble des solutions est vide si u1 = u2, sinon c’est l’intervalle ]u1; u2[ ;

si cette image est négative, alors l’ensemble des solutions est l’union des intervalles ] − ∞; u1[∪]u2; +∞[. On vérifie en traçant la courbe de la fonction g et déterminant les

intervalles où la courbe est sous l’axe des abscisses.

— Si la fonction f ne rentre pas dans les cas précédents, on trace la courbe de la fonction à calculatrice et on cherche l’intervalle ou la réunion d’intervalles tels que la courbe de la fonction f soit sous la droite y = k. Si l’inéquation est de signe opposée, on exécute la même technique en cherchant l’intervalle ou la réunion d’intervalles tels que le graphique de la fonction f soit au-dessus de la droite y = k.

2.1.2

Environnement technologico-théorique

La justification de la pratique explicitée précédemment repose sur des résultats que nous donnerons ci-après sans commentaires. Lorsque c’est possible dans le cadre du programme de seconde, nous en donnerons une preuve.

θcrois : On considère une fonction f définie pour x compris entre a et b. f est croissante

si pour tous x1 et x2 compris entre a et b vérifiant x1 < x2, on a f (x1) < f (x2).

θdécrois: On considère une fonction f définie pour x compris entre a et b. f est décroissante

si pour tous x1 et x2 compris entre a et b vérifiant x1 < x2, on a f (x1) > f (x2).

θmax : On considère une fonction f définie pour x compris entre a et b. M est le maximum

de f si f (x) < M pour tout x compris entre a et b et qu’il existe x0 compris entre a et b tel

que f (x0) = M .

θmin : On considère une fonction f définie pour x compris entre a et b. M est le minimum

de f si f (x) > M pour tout x compris entre a et b et qu’il existe x0 compris entre a et b tel

que f (x0) = M .

θext : une fonction f admet un extremum si elle admet un minimum ou un maximum.

θrep : On considère une fonction f définie pour x compris entre a et b. La courbe

repré-sentative de f est l’ensemble des points de coordonnées (x, f (x)) pour x variant entre a et b.

θrep−ext : Le minimum d’une fonction est l’ordonnée du point le plus bas de sa

représen-tation graphique. Le maximum d’une fonction est l’ordonnée du point le plus haut de sa représentation graphique.

Démonstration. A est le point le plus haut de la représentation graphique d’une fonction f définie pour x compris entre a et b équivaut à A a pour coordonnées (x0, y0 = f (x0)) avec

(32)

22 2 Un PER sur l’optimisation des grandeurs

x0 compris entre a et b et y0 est “le plus grand possible” parmi les ordonnées des points de

la représentation graphique ; pour tout x compris entre a et b, on a donc f (x) < f (x0) et

y0 = f (x0) est le maximum de f et réciproquement si M est le maximum de f , f (x) < M

pour tout x compris entre a et b et il existe x0 compris entre a et b tel que f (x0) = M ; donc

le point de coordonnées (x0, M ) est le point le plus haut de la représentation graphique de

f . Déduction analogue pour B, point le plus bas de la représentation graphique de f . θcan : Une fonction polynôme du second degré f donnée par f (x) = ax2+ bx + c se met

sous la forme f (x) = a(x − xm)2 + β. Cette expression est appelée forme canonique de la

fonction et on a que xm est l’abscisse du point où elle atteint son extrémum.

Démonstration. Le développement de a(x − xm)2 + β donne bien une fonction du second

degré. Établissement expérimental du fait qu’une fonction du second degré se met sous cette forme.

θvar : Une fonction polynôme du second degré est monotone sur chacun des intervalles

I1 =] − ∞; xm] et I2 = [xm; +∞[ où xm est l’abscisse du point où elle atteint son extrémum.

Elle est soit croissante puis décroissante, soit le contraire.

Démonstration. Considérons donc une fonction polynôme du second degré f . Son expression se met sous la forme f (x) = a(x − xm)2+ β.

On considère deux réels x1 et x2 tels que x1 < x2 < xm. On a alors x1− xm < x2− xm < 0.

Comme la fonction x 7→ x2 est décroissante sur R

, on a alors (x1 − xm)2 > (x2− xm)2.

Si a est positif, la fonction affine x 7→ ax + β est croissante sur R et on obtient donc a(x1 − xm)2 + β > a(x2 − xm)2 + β, ce qui prouve que la fonction f est décroissante sur

] − ∞; xm].

Si a est négatif, la fonction affine x 7→ ax + β est décroissante sur R et on obtient donc a(x1−xm)2+β < a(x2−xm)2+β, ce qui prouve que la fonction f est croissante sur ]−∞; xm].

On montre de même la croissance, respectivement la décroissance, sur [xm; +∞[.

θsym : La courbe représentative d’une fonction du second degré est une parabole ; elle est

symétrique par rapport à la droite perpendiculaire à l’axe des abscisses et passant par son sommet, le point qui a pour ordonnée le maximum ou le minimum de f sur R.

Démonstration. On considère les points A et B de la courbe d’abscisses respectives u et v = 2xm− u. Comme l’expression d’une fonction polynôme du second degré se met sous la

forme a(x−xm)2+β, on a : f (v) = f (2xm−u) = a(2xm−u−xm)2+β = a(xm−u)2+β = f (u).

Les points A et B ont bien la même ordonnée et la courbe représentative de f est symétrique par rapport à la droite d’équation x = xm.

θext−abs : la valeur xm en laquelle f admet un extremum est la demi somme des abscisses

(33)

2.1 Organisation mathématique 23

Démonstration. En effet, puisque la courbe représentative d’une fonction du second degré est symétrique par rapport à la droite d’équation x = xm, si A et B sont deux points de

même ordonnée, y0, ils sont symétriques par rapport à cette droite ; le point I de coordonnées

(xm; y0) est le milieu de [AB] et on a donc xm qui est la demi somme des abscisses de A et

de B.

Θcar : la fonction qui à x associe x2 est décroissante sur ] − ∞; 0] et croissante sur [0; +∞[.

Démonstration. En effet, si a < b < 0, a−b et a+b sont négatifs et leur produit est positif ; on a donc a2− b2 > 0 et a2 > b2, ce qui prouve que la fonction qui à x associe x2 est décroissante

sur ] − ∞; 0] ; si 0 < a < b, on a que a − b est négatif et a + b est positif ; leur produit est alors négatif et on a donc a2− b2 < 0 et a2 < b2, ce qui prouve que la fonction qui à x associe

x2 est croissante sur [0; +∞[.

La première partie du PER permet de construire l’OM liée à la recherche de l’extre-mum d’une fonction d’une manière générale, en utilisant des techniques graphiques et al-gorithmiques, notamment en utilisant des calculatrices graphiques et des tableurs, cela en conformité avec les programmes scolaires (Bulletin Officiel du 4 mai 2017, figure 2.1) :

Figure 2.1 – Utilisation des logiciels dans les programmes

Cette OM est donc conforme aux attentes du programme de la classe de 2de. En outre,

l’étude des dérivées est prévue pour l’année suivante, l’optimisation des fonctions n’est donc pas réalisée avec cet outil dans le cadre du PER.

On peut noter que d’autres techniques reposant sur des travaux algébriques pourraient exister sans qu’on ait recourt aux dérivées. On peut penser par exemple à une technique2

reposant sur le théorème suivant :

Théorème 2.1.1. Étant donné des réels a et S > 0, soit E l’ensemble des n-uplets (x1, x2, ..., xn)

tels que 0 ≤ xi ≤ a (oùi = 1, 2, . . . , n), et x1+x2+. . . +xn= S. Alors le produit P = x1x2. . . xn

est maximal sur E lorsque x1 = x2 = . . . = xn(= S/n).

2. Ce qui suit a été développé par Y. Chevallard à plusieurs reprises mais nous l’avons rencontré dans

(34)

24 2 Un PER sur l’optimisation des grandeurs

On recherche, à l’aide du théorème cité ci-dessus, le maximum sur ]0,a2[ de l’expression v(x) = x(a − 2x)(b − 2x), où a < b. La somme des facteurs de q n’est pas constante. En revanche, la somme des facteurs de 4x(a − 2x)(b − 2x) l’est. Mais il n’existe pas de valeur de x qui rende égaux les facteurs a − 2x et b − 2x. On introduit alors un paramètre λ > 0 en posant vλ(x) = [2(1 + λ)x](a − 2x)(λb − 2λx), expression dont la somme des facteurs

est constante, égale à a + λb. L’équation 2(1 + λ)x = a − 2x a pour solution x = 2(2+λ)a . L’équation 2(1 + λ)x = a − 2x a pour solution x = 2(1+2λ)λb . Il convient donc de prendre pour valeur du paramètre λ une solution positive, si elle existe, de l’équation 2(2+λ)a = 2(1+2λ)λb , qui s’écrit encore : bλ2+ 2(b − a)λ − a = 0. Cette équation a une seule solution positive, à savoir

λ0 = 1b[

q

(b − a)2+ ab) − (b − a)]. L’expression étudiée est donc maximale quand

x = a

2(2 + λ0)

= ab

2[2b +q(b − a)2+ ab − (b − a)]

Pour a = 21 et b = 29, 7, on a : x = 4.0423362197191. . . 3

L’existence de cette technique suppose cependant un rapport institutionnel à l’algèbre qui n’est pas celui de la position d’élève aujourd’hui à l’entrée en seconde.

Soulignons que l’utilisation de techniques graphiques, comme celle que nous avons déve-loppée précédemment, est coûteuse, car elle implique l’utilisation de divers dispositifs, souvent peu pratiques.

Dans la figure 2.2, la calculatrice montre le graphique de la fonction f (x) = −1, 5x2+25, 5x

pour laquelle il faut chercher le maximum et sa table des valeurs pour affiner les coordonnées du point de maximum :

Figure 2.2 – Graphique et table des valeurs

Afin de justifier leurs résultats, dans le cadre d’un devoir surveillé les étudiants doivent rendre le graphique et la table des valeurs. Cela met immédiatement en évidence la nécessité de rechercher une technique plus rapide et plus automatique pour la recherche de cet extremum lorsqu’une telle technique existe, par exemple lorsqu’on étudie les fonctions polynomiales du second degré.

La mise en œuvre de ces techniques est donc convenable pour deux raisons : lors de la première partie de la réalisation du PER, elle permet de mettre en évidence la nécessité de

3. Ce calcul a été fait à l’aide du « big online calculator » (qu’on trouve à l’adressehttps://www.ttmath.

(35)

2.2 Organisation didactique 25

représenter graphiquement la fonction, puisque le seul milieu dont les élèves disposent alors pour chercher l’extremum est constitué principalement de la calculatrice (ou du tableur), dont les tables de valeurs ne sont pas toujours faciles à lire ; dans la deuxième partie du PER, cela permet de mettre en évidence la technique selon laquelle l’abscisse de l’extremum d’une fonction du second degré est la demi-somme des abscisses de deux points quelconques qui ont même ordonnée, ainsi que les éléments technologiques qui en résultent, offrant une technique plus économique pour la détermination des extremums des fonctions du second degré.

L’OM décrite ci-dessus, à la fois la praxis (types de tâches et techniques) et le logos (tech-nologie et théorie), est ce dont la réalisation du PER doit permettre l’institutionnalisation ; la maîtrise des praxéologies mathématiques par les élèves pourra donc faire l’objet d’une évaluation.

2.2

Organisation didactique

Comme nous l’avons déjà évoqué dans la section 2.1, nous présentons ici une OD relative à l’OM autour du type de tâches Tmax/min qui vise à mettre en place la partie de la technique

« graphico-numérique » et l’environnement technologico-théorique correspondant.

Nous allons présenter l’organisation didactique du PER en commençant par présenter l’ensemble des activités d’étude et de recherche (AER) qui le constituent pour l’essentiel. Nous les présentons telles qu’elles ont été introduites en classe. D’autres dispositifs qui contribuent à la réalisation du PER seront également présentés. Nous détaillerons par ailleurs quelques outils qui ont favorisé la réalisation des moments didactiques.

Avant de commencer l’étude des fonctions, les élèves ont passé un test d’entrée pour évaluer les connaissances acquises au Collège.

Figure

Figure 1.1 – Activité sur la bille
Figure 1.2 – Tracée au tableau
Figure 2.2 – Graphique et table des valeurs
Figure 2.3 – Test d’entrée, premier exercice
+6

Références

Documents relatifs

Le dernier chapitre de ce livre nous donne un aperçu du centre de notre personnalité, le Soi : «Ce quelque chose qui est tout nous-même, nous est à la fois si étranger et si

L'originalité de Platon est d'avoir su associer la spéculation hardie de Parménide et la méthode prudente de Socrate; c'est d'avoir fait sortir de cette méthode une solution

486 « On doit premièrement définir ce qu’est l’œuvre (Û m) du bon répondeur, ainsi que du bon demandeur.. nature, qu’elles soient assurées par une raison ou par

Such an analysis necessitates preoperative anatomic images, a postoperative anatomic image series (electrode artifact) and the correspondence between both image series

The polynomial chaos expansion has been applied to a small water distribution system to evaluate the effect of demand uncertainties on the resident time of water in the network. It

Figure 3: Period of contamination according to period of sales per pesticide and per unit in 2009 3.3 Sold quantities versus contamination levels. For this study, we did not

En relation avec le thème de la 18ème école d'été (la prise en compte du collectif), nous proposons essentiellement dans cette communication de détailler nos

Offrir des espaces publics plus verts pour lutter contre les changements climatiques et les îlots de chaleur;.. Confirmer l’engagement