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Etude critique de trois traductions anglaises du premier volume de "Les Thibault" par Martin du Gard.

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(5)

DU PREMIER VOLUME DE ffLES THIBAULT" PAR ROGER MARTIN DU GARD

A Theeie Presented to

the JTaculty of Graduate studies and Kesearch KcGill Univers!ty

In Partial Fulfilment

of the Requirement8 for the Degree i._aster of Arts

by

Eleanor Jean Laing September 1948

(6)

CHAPITRE P A G E INTRODUCTION iv I . FAUTES LEXICOIOGICiUES 1

Introduction 1 Fautes d'ordre sémantique 1

Fautes d'ordre stylistique 16

Sommaire 30 II.. FAUTES D'INTERPRETATION 32

Introduction 32 Insouciance du contexte 32

Connaissance insuffisante de la grammaire

française 34 Effets des changements de forme 46

Sommaire 48 III. TRADUCTION LIBRE 49

Définitions de la traduction idéale . . . . 49

Omission • 50 Condensation 61 Addition 65 Amplification 72 Liberté de forme 78 Sommaire 88

(7)

CHAPITRE PAGE IV. TRADUCTION LITTERALE 90

Introduction 90 Faiblesses 90 Sommaire 100 V. PRESENTATION DU TEXTE ANGLAIS: Obeervatione

sur le Style et la Langue des Traductions . 102 Importance du style d'une traduction . . . . 102

Fautes de grammaire - 102 Fautes de construction 106 Fautes de diction 110 Sommaire 112 Mots d'emprunt 113 CONCLUSION 116 BIBLIOGRAPHIE 121

(8)

Depuis bien des siècles on compte sur la traduction des philosophies et des littératures grecques et latines

pour la diffusion de la culture occidentale. Lais depuis le commencement du vingtième siècle la traduction a nris une nouvelle importance pour l'homme de la rue.

La facilité et le confort des transporte modernes ont encouragé et amplifié le tourisme. Puis les deux Guerres Mondiales ont entraîné de grandes migrations d'abord de

troupes armées et ensuite de gens chassés de leur pays par la politique ou par les privations. Comme résultat de ces

mouvements, des gens de différentes nationalités et de dif-férentes langues se rencontrent de plus en plus fréquemment, ces rapprochements ont éveillé par tout le monde un intérêt

tout spécial pour les moeurs, les cultures, et les affaires étrangères.

la traduction est devenue indispensable à notre civi-lisation complexe. A cause du transport rapide des marchan-dises, les commerçants ont intérêt à annoncer leurs denréee dans plusieurs langues. Pour satisfaire la curiosité cosmo-polite des lecteurs, les éditeurs doivent publier en traduc-tion des oeuvres littéraires et techniques de toute langue. Enfin, la recherche de la bonne entente des nations à une

(9)

Malgré son importance, la traduction est marquée

d'une médiocrité surprenante. Dans une ville bilingue comme Montréal, où la plupart des actualités et des avis puhlics

doivent être traduits d'une langue dans l'autre, on est

choqué de voir de nombreuses faites grossières dans les jour-naux et sur les réclames. Quand il s'agit de traductions littéraires qui ont un but plus artistique, on demande un

niveau plus élevé. Mais à vrai dire, très peu de traductions rendent justice aux textes originaux. Ces versions

litté-raires contiennent souvent des inexactitudes élémentaires en plus des infidélités de style.

Heureusement il y a des individus et des groupes

intéressés qui font de leur mieux pour hausser le niveau de la traduction. Ils veulent en même tempe gagner pour cet art négligé l'estime qui lui est due mais qui lui manque

jusqu'à présent. Cette lutte qui s'annonce longue mérite tout l'encouragement qu'on peut lui accorder.

Ce sont ces réflectione sur la traduction qui ont

provoqué le sujet général de cette thèse. On espère tout au moins améliorer ses propres capacités à force d'étudier

minutieusement des versions de traducteurs accomplis. On espère aussi que les analyses de fautes recueillies ici

(10)

Afin que l'étude présentât un intérêt général, l'oeuvre choisie devait répondre à plusieurs conditions.

D'abord, ayant admis qu'un traducteur doit toujours traduire dans sa langue maternelle, il faut admettre que le critique aussi doit se restreindre à critiquer des traductions dans sa propre langue. Ainsi, il était question dar^s ce cas d'une version anglaise d'une oeuvre française. Il vallait mieux choisir une oeuvre moderne écrite dans un style simple mais soigné car on voulait éviter les difficultés spéciales

que présente la traduction d'une langue particulière à une époque ou à un écrivain. Le style de Roger Martin du Gari, romancier réputé de notre siècle, convient à tous ces égards. Il fallait surtout une oeuvre digne de traduction. Il n'y a pas de doute que "Les Thibault ff, qui a vallu à l'auteur le Prix Nobel en 1937, et qui a attiré l'attention des gens lettrés de tous les pays occidentaux, mérite une excellente traduction.

Puisque l'espace nécessite la limitation du sujet, on s'est contenté d'étudier le premier volume intitulé "le

Cahier griB." Ce livre, publié en 19£2, e été traduit trois fois. La première version, par Mlle Madeleine Boyd, a été publiée à New York par Boni et liveright en 1926. Ce n'est que sent ans nlus tard que John Lane The Bodiev Head Limited a publiée la version de M. Stephen Haden Guest s Londres.

(11)

la même maison anglaise a entreprie la publication en deux volumes de la traduction du roman complet par M. Stuart Gilbert. Le premier volume a raru en 1939 et le deuxième en 1941. C'est cette dernière version qui est la plus

réussie car elle est plus opportune que les deux précédentes. Cette traduction a été présentée également aux lecteurs

américains par le Viking Press, New York, 1939-1941.

On a comparé chacune des trois versions avec le texte original et on a essayé de relever toutes les inexactitudes. Une discussion de toutes ces fautes serait interminable et présenterait peu d'intérêt nour les lecteurs. On préfère se limiter dans cette thèse à l'étude de quelques exeraolee bien choisis et typiques des différentes catégories de

fautes. Ayant recueilli des analyses, on tachera de porter un jugement sur chaque version. Il n'est pas tant question de décider laquelle est la meilleure ou la pire nais plutôt de découvrir les faiblesses et les valeurs de chacune. On constatera que bien souvent une f-ute de l'une met en relief un mérite d'une autre.

Dans le premier chapitre on considérera des fautes lexicologiques qui n'embrassent que des mots ou des expres-sions isolés puis dans le deuxième chapitre on discutera des fautes d'interprétation qui ont plus d'importance. Sous les deux titres on retrouvera dee Inexactitudes sémantiques en plue des irexactitudee stylistiques. Tandis que les fautes

(12)

rassemblées dans le premier chapitre sont faciles à recon-naître et à analyser, celles du deuxième devienaent plus

complexes.

Lee deux chapitres qui suivent sont consacrés à la discussion des fautes qui proviennent des excès de liberté et de littéralité. Tous les théoriciens sont d'accord

qu'une traduction doit être "fidèle" mais ils prennent des chemins opposés pour atteindre la fidélité. Les-uns croient qu'il faut accorder une liberté au traducteur mais les

autres insistent sur la littéralité. Puisque les traductions de "Le Cahier gris" offrent des exemples des deux théories, on a l'occasion d'en comparer les valeurs.

Avant de conclure cette étude critique on va essayer de juger les traductions comme on jugerait des oeuvres

écrites en anglais. Puisque ces versions devraient être dignes du style de l'original, on ne passera pas sous silence les qualités de langue et de style.

Les citations prises dans le texte français et dans les trois versions anglaises seront nécessairement très nombreuses. Afin de simplifier les références en bas des pages, on a eu recours au système d'abréviations suivant: la lettre F renvoie à l'original, tandis que les lettres A, B, et C se rapportent aux traductions de Mlle Madeleine Boyd, M. Stephen Haden Gue6t, et M. Stuart Gilbert,

(13)

reenective-l a page de reenective-la c i t a t i o n .

I l a r r i v e souvent qu'on veut a t t i r e r l ' a t t e n t i o n du

l e c t e u r sur un c e r t a i n mot ou sur une p a r t i e d'une phrase.

Dans ces cas on a souligné le mot ou les mots en question

d'un simple t r a i t . Un double t r a i t indique que les mots

a i n s i soulignés é t a i e n t déjà en i t a l i q u e s dans l e t e x t e .

Une s é r i e de t r o i s points ( . . . ) marque une omission dans

une c i t a t i o n . Les points qui figuraient déjà dans l ' o r i g i n a

(14)

FAUTES LEXICOLOGIQUES

On commence c e t t e étude c r i t i q u e des t r o i s

traduc-t i o n s de "Le Cahier g r i s " par une discussion des "fautraduc-tes

lexicologiques", c ' e s t à d i r e , des inexactitudes de

vocabu-l a i r e . Ces f a u t e s , qui n'embrassent que des f a i t s

d'expres-sions i s o l é s , vont logiquement dans le premier chapitre

parce q u ' e l l e s sont l e s plus fréquentes et parce q u ' e l l e s

sont l e s plus f a c i l e s à relever et à analyser.

On inclut sous cet entête général des questions

d'ordre sémantique et des questions d'ordre s t y l i s t i q u e .

Ces deux subdivisions représentent l e s deux buts de la t r a

-duction. Toute traduction, s o i t commerciale, s o i t poétique,

cherche d'abord à exprimer les idées et les f a i t s contenue

dans l ' o r i g i n a l . De toute traduction l i t t é r a i r e on exige

en plus la r e c r é a t i o n fidèle de l ' e s p r i t et du s t y l e de

l ' o e u v r e . I l convient, donc, de t r a i t e r en premier l i e u

des inexactitudes de sens et en second l i e u des i n f i d é l i t é s

de s t y l e .

On trouve que les a l t é r a t i o n s de sens qu'on a r e l e

-vées dans les t r o i s versions de "Le Cahier g r i s " proviennent

de diverses d i f f i c u l t é s . D'abord, dans le cas des homonyme*

l e s traduoteurs tombent quelquefois sur la mauvaise

accep-t i o n . Ayanaccep-t mal compris i l e s accep-t i n é v i accep-t a b l e q u ' i l s se

(15)

FAUTES LEXICOLOGIQUES

On commence c e t t e étude c r i t i q u e des t r o i s

traduc-t i o n s de "Le Cahier g r i s " par une discussion des "fautraduc-tes

lexicologiques", c ' e s t à d i r e , des inexactitudes de

vocabu-l a i r e . Ces f a u t e s , qui n'embrassent que des f a i t s

d'expres-sions i s o l é s , vont logiquement dans le premier chapitre

parce q u ' e l l e s sont l e s plus fréquentes et parce q u ' e l l e s

sont l e s plus f a c i l e s à relever et à analyser.

On inclut sous cet entête général des questions

d'ordre sémantique et des questions d'ordre s t y l i s t i q u e .

Ces deux subdivisions représentent les deux buts de la t r a

-duction. Toute traduction, s o i t commerciale, s o i t poétique,

cherche d'abord à exprimer les idées et lee f a i t s contenue

dans l ' o r i g i n a l . De toute traduction l i t t é r a i r e on exige

en plus la r e c r é a t i o n fidèle de l ' e s p r i t et du s t y l e de

l ' o e u v r e . I l convient, donc, de t r a i t e r en premier l i e u

des inexactitudes de sens et en second l i e u des i n f i d é l i t é s

de s t y l e .

On trouve que les a l t é r a t i o n s de sens qu'on a r e l e

-vées dans les t r o i s versions de "Le Cahier g r i s " proviennent

de diverses d i f f i c u l t é s . D'abord, dans le cas des homonymes,

l e s traduoteurs tombent quelquefois sur la mauvaise

accep-t i o n . Ayanaccep-t mal compris i l e s accep-t i n é v i accep-t a b l e q u ' i l s se

trompent en t r a d u i s a n t . "Papa est bon, tu

(16)

8ais,"l dit Jacques à Daniel. M. Guest2 et M. Gilbert3 tra-duisent ce commentaire, "Papa is kind, you know." L'adjectif français exprime, selon le cas, l'honnêteté, la vertu, ou, à certains moments, la générosité. Maie la dernière idée est contenue surtout dans l'expression "être bon pour quelqu'un". Il eet certain que Papa Thibault n'est pas digne du

quali-ficatif "kind". Il s'est convaincu et il a convaincu sa

famille qu'il est vertueux parce qu'il assiste régulièrement à la messe et parce qu'il a richement doté l'Eglise. Auprès de Jacques, cependant, il ne s'est jamais fait une

réputa-tion de générosité. La traducréputa-tion indiquée est plutôt, "Papa le a good man, you know."

Le mot "fond" a non pas un seul maie plusieurs équi-valents en anglaie selon le contexte. "Le fond d'une boîte" est rendu par "the bottom of a box"; "le fond d'une salle" par "the back of a room"; "le fond d'une chaise" par "the seat of a chair", et ainsi de suite. M. Guest pense à la notion de "bottom" quand il traduit la phrase suivante: "L'enfant c'était jeté dans le fond de la voiture et se roulait sur les coussins."4 "Jacques had thrown himself

1 F 148 2 B 102 3 C 77

(17)

on the floor of the cab and wae rolling on the rug."5 Ayant méconnu le eene de "fond" il s'est trouvé obligé

d'inter-préter "les coussins" comme "rug". Dans cette scène le

traducteur offre à eee lecteurs le portrait d'un garçon qui est encore plue violent que le véritable Jacques. Voici la version qu'on propose: "The child had thrown himself

way back in the carriage and wae rolling among the cuehions. "Taché" se traduit en général par "spotted" et

"tacheté" par "spotty" maie "taché de eon" est une unité de pensée qui n'est plue étroitement liée au sens original de "taché". "Sa peau tachée de son"6 est bien rendu par "hie freckled elcin" et non pas par "hie epotty complexion."^

Beaucoup de fautes sémantiques qu'on trouve dane les traductions ont une autre oause. Il arrive souvent que

l'anglais possède un mot qui a exactement la même forme, ou presque la même forme, étymologique qu'un certain mot fran-çais mais il est rare que ces mots aient le même sens. Des mots qui ee ressemblent par leur étymologie mais qui s'op-posent par leur sémantique s'appellent des "faux-smis."

Plusieurs traducteurs ont publié des traités au sujet de ces

5 B 127 6 F 139 7 A 94

(18)

faux-amie et d'autres en ont rédigé des listée en expliquant les différences. Ainsi on aurait cru que les traducteurs qui ont entrepris la traduction de "Le Cahier gris" seraient prémunis. Au contraire, toutes les trois versions sont par-semées de fautes de ce genre.

Dane la version de Mlle Boyd on trouve "his educa-tion"8 comme traducation de "son éducation".9 Lee deux sub-stantifs ont la même racine latine, "educare", mais le fran-çais a pris un sens plus large que l'anglais. Celui-là exprime toute l'idée de "upbringing" mais celui-ci eet l'équivalent seulement du terme français, "instruction".

L'adjectif "négligé" aussi a causé de l'embarras à la traductrice. " La pièce avait l'aspect négligé et

coquet d'une garçonnière."1° "The room had a neglected

and pleasing appearance, li_<:e a bachelor's sitting room."^ Contraire au qualificatif français, "neglected" a une valeur péjorative. On fait remarquer aueei que "neglected" et

"pleasing" se contredisent. On pourrait suggérer Ttca8ualTt oomme traduction de "négligé".

Un des traite prédominants du caractère de Jacques

8 A 75 9 F 110 10 F 59

(19)

à travers le roman. Chaque fois M. Guest confond le mot français avec le mot apparenté, "obstinacy". Pour ne citer qu'un seul exemple, " . . . son désir de partager la belle obstination de Jacques . . ."I2 devient" . . . hie désire to 8hare Jacques' fine obstinacy."13 Il est évident que l'écri vain emploie le terme français dans un sens laudatif puisqu' il le qualifie de l'adjectif "belle". "Obstinacy", au con-traire, a presque toujours une valeur péjorative14 et par conséquent n'eet pas le mot approprié, r*i. Gilbert, en se rendant compte de cette nuance, a fait une meilleure tra-duction: " . . . his désire to share Jacques* fine tenaclty of purpose."15

"Incriminated"16 et "incriminé"17 semblent être des

12 F 139 13 B 97

14 "Obstinacy - stubbornness, pereietence: spec. of a di8ease. Rarely in neutral or good eenee." The shorter

Oxford Engllsh Dlctionary on His to ri cal Principes , ( reviaed édition: Oxford" At the Clarendon Press, 1933j

15 C 72

16 "Incriminate - To charge with a crime: to involve in an accusation or charge." The Shorter Oxford Englleh Dlctionary

17 "Incriminer - Accuser d'un crime." Larousse du XXe siècle en six volumes. (Paris: Librairie larousse, c.

(20)

tant le terme anglais, qui est juridique, est plus sévère que le terme français, qui figure dans de8 expressione ordi-naires telles que, "C'est toujours moi qu'on incrimine." "The incriminated boy"18 est trop fort pour traduire "le

garçon incriminé."19 Mlle £oyd a évalué cette locution aveo plus de jueteese: "the boy in question."20

L'étude des traductions de "Le Cahier gris" révèle une tendance chez lee traducteurs à substituer des termes particuliers à des termes généraux et vice versa. On peut rassembler une série de mots qui expriment essentiellement la même idée mais dont les uns sont plus précis que les autres. Puisque les expressions préciees 8ont d'habitude plus pittoresques que les expressions généralee, une phrase réduite à une généralité est souvent peu effective. Ainsi "Jenny was moving . . ." , ^ traduction de i._lle boyd, ne

représente pas le mouvement vigoureux euggéré dans le texte français, "Jenny se débattait de nouveau."^2 ia version de

18 B 16 19 F 19 20 A 14 21 A 54 22 F 80

(21)

was d r i n k i n g h e r hot t e a slowly as she always d i d . " ~

8

Une

v e r s i o n p l u s l i t t é r a l e s e r a i t p r é f é r a b l e : "She was d r i n k

-ing h e r 8 c a l d i n g t e a in l i t t l e s i p s as she always used t o . "

Les t r a d u c t e u r s se trompent à d ' a u t r e s moments en

t r a d u i s a n t des termes généraux par des ternies p a r t i c u l i e r s .

" L ' a i r gêné du g a r ç o n . "

2 9

Dans la v e r s i o n de l a t r a d u c t r i c e

américaine ceci d e v i e n t , "The boy's g u l l t y l o o k . "

3 0

La

c u l p a b i l i t é peut se m a n i f e s t e r par un a i r gêné, maie un a i r

gêné n ' e s t pas synonyme de l a c u l p a b i l i t é , qui n ' e s t qu'une

des p r o v o c a t i o n s p o s s i b l e s . "Embarrassment" s e r a i t une

t r a d u c t i o n plus e x a c t e .

Comme r é s u l t a t d'une connaissance i n s u f f i s a n t e de l a

v i e f r a n ç a i s e , l e s t r a d u c t e u r s de "Le Cahier g r i s " ne

com-prennent pas c e r t a i n s termes de c i v i l i s a t i o n q u ' i l s

rencon-t r e n rencon-t au COU123 du roman. Chaque c i v i l i s a rencon-t i o n possède des

i n s t i t u t i o n s e t coutumes qui l u i sont p a r t i c u l i è r e s .

P u i s q u ' e l l e s n ' e x i s t e n t pas à l ' é t r a n g e r i l e s t évident que

l e s nome que p o r t e n t ces i n s t i t u t i o n s e t coutumes n ' o n t pas

d ' é q u i v a l e n t s dan8 une a u t r e l a n g u e . Dans ces cas l e

t r a d u c t e u r e s t obligé de c h o i s i r dans sa langue l e terme

qui évoque l a même image ou le même sentiment que l e terrae

28 A 107 29 F 17 30 A 13

(22)

Le système d'instruction en France, par exemple, est bien différent de ceux d'Angleterre ou d'Amérique. Dans cee paye anglo-saxons il n'y a pas de poète semblable à celui de "censeur".31 Le "censeur", adjoint du proviseur, est responsable du programme d'étude et de la discipline. Celui qui est "assistant principal" a le même rang si non les mêmes devoirs que "le censeur". TOUB les trois

traduc-teurs ont mal rendu ce terme par "principal"32 qui est plutôt l'équivalent de "le proviseur".

Les classée d'écolee sont numérotées de différentes façons dans lee différente paye. Quand Martin du Gard dit de Daniel qu'il est "un élève de troisième",33 il donne aux lecteurs français une indication de l'âge approximatif du garçon — il a environ 15 ane. Le traducteur doit dépein-dre un garçon du même âge. Mlle Boyd dit: "A pupil in hie thlrd year."3^ Si on entend la troisième année du "high school", c'est bien. M. Guest et M. Gilbert traduieent, " a third-form pupil,"35 "a Thlrd Form boy."36 Maie un

31 F 19

32 A 14, B 16, C 7 33 F 19

34 A 14 35 B 16

(23)

é c o l i e r de "Third Form" en Grande Bretagne n'a que t r e i z e ans g é n é r a l e m e n t .3 7 Ainsi c ' e s t " F i f t h Form" qui suggère

un garçon du même âge qu'un " é l è v e de t r o i s i è m e . "

Le f r a n ç a i s , en é t a n t l a langue d'une n a t i o n qui e e t éminemment c a t h o l i q u e , e s t mieux muni, p e u t - ê t r e , de tenaes qui concernent c e t t e r e l i g i o n que l ' a n g l a i s qui e s t l a langue dee n a t i o n s de c u l t u r e p r o t e s t a n t e . Quoi q u ' i l en s o i t , on c o n s t a t e une s o r t e d'embarras chez l e s traducteurs quand i l s ' a g i t de t r a d u i r e ces termes. "Nous avons r é c i t é . . .

une d i z a i n e de c h a p e l e t . "3 8 l e chapelet e s t f a i t de g r a i n e s

de deux grandeurs - - des p e t i t e s e t des plus g r o s s e s . Entre deux g r o s s e s g r a i n e e , qui r e p r é s e n t e n t des "pater n o s t e r s " , i l y en a d i x p e t i t e s qui r e p r é s e n t e n t des "Ave Marias". Ces d i x p e t i t e s g r a i n e s s ' a p p e l l e n t "une d i z a i n e " . Ainsi une d i z a i n e n ' e e t n i " t e n r o s a r i e e "3 9 qui t r a d u i t "dix

c h a p e l e t s " , n i "a r o e a r y " ,4 0 l ' é q u i v a l e n t de'Tun c h a p e l e t " ,

qui comprend cinq d i z a i n e s . Puisque l e terme f r a n ç a i s n'a pas d ' é q u i v a l e n t en a n g l a i s , on s u g g é r e r a i t comme t r a d u c t i o n , "ten Ave Marias."

37 P e t e r Sandiford, e d i t o r , Comparative Education (London & Toronto: J. M. Dent & Sone Ltd. c. 1918) p 266.

38 F 23 39 A 16 40 C 9

(24)

Il n'est pas toujours aussi facile d'expliquer les erreurs des traducteurs, ^n a souvent de la peine à dis-tinguer entre cellee qui proviennent d'une connaissance insuffisante du français et celles qui ne reflètent qu'une inattention malheureuse.

Mme de Jj'ontanin vient de renvoyer Jérôme; elle trouve par terre un gant qu'il a oublié, le eaisit et le presse eur ea bouche comme ferait une jeune amoureuse. "Puis, apercevant son geste dans la glace, elle rougit, laissa retomber le gant."41 Dans le texte de Mlle Boyd on lit, "Then she caught a glimpse in the mirror of what she was doing, threw the glove to the floor."42 Par un geste à peine perceptible, Martin du Gard a fait voir l'émotion de cette dame et a fait comprendre son amour éternel pour son mari errant. Toute cette finesse eet perdue dans la vereion

anglaise. "To throw", geste violent et exagéré, eet l'ac-tion d'une personne emportée. La traductrice connaît sûre-ment l'équivalent plus fidèle, "to drop"?

"Le mur blafard."43 Il est évident que deux des

traducteurs n'ont pas compris la signification de cette des-cription. Pourquoi, le mur, est-il d'une couleur pale?

41 F 180 42 A 120-1

(25)

52

j o r e j , " M. Guest a j o u t e un t r a i t de c a r a c t è r e

désavanta-geux qui n ' e x i s t e pas dans l e t e x t e f r a n ç a i s ,

Tf

un t e n a n c i e r

g u e t t a i t l e c l i e n t . "

5 3

l ' a u b e r g i s t e a t t e n d des hôtes tout

simplement; i l n ' e s t pas question d'en f a i r e sa p r o i e . Lee

v e r s i o n s de Mlle Boyd e t de M. G i l b e r t sont t r è s a c c e p t a b l e s :

"An innkeeper was watching for e u s t o m e r e , "

5 4

e t "The p r o

-p r i e t o r was on the watch f o r c u s t o m . "

5 5

I l n ' y a pas de doute que c e r t a i n s termes sont d i f

-f i c i l e s à t r a n s p o s e r dans une a u t r e langue et le s u b s t a n t i -f

"chronique" en e s t un. " J ' a i dû s o r t i r . . . pour p o r t e r

ma chronique à l a Revue des Deux-Mondes."

56

"iy p a p e r "

5 7

e t "my n o t i c e "

5 8

ne s u f f i s e n t pas parce que ces mote n ' e x

-priment pas l ' i d é e de r é g u l a r i t é qui e s t contenue dane l e

terme f r a n ç a i s . M. G i l b e r t a mieux r é u s s i en t r a d u i s a n t

"ma chronique" par "my monthly a r t i c l e . "

5 9

On suggère

comme t r a d u c t i o n p o s s i b l e a u s s i , "The a r t i c l e for my column."

52 B 74 53 F 105 54 A 72 55 C 54 56 F 13 57 A 10 58 B 12

(26)

"Un mort c ' e s t coœrce . . . en pâte a c o p i e r

r w p u

On

n ' e s t pas s a t i s f a i t de l a v e r s i o n de I.:. Guest. Néanmoins,

i l t r a d u i t fidèlement l e s e r s de c e t t e t>hrase: " I t ' £ l i k e

. . . p a s t e f o r taiclng an i m p r e s s i o n . "

6 1

On accepte plus

v o l o n t i e r s l a v e r s i o n de I.:. G i l b e r t bien q u ' e l l e ne s o i t ras

t r è s l i t t é r a l e : " J u s t l i k e . . . p l a s t e r of P a r i s . "

6 2

On

se rend compte que dans un cas p a r e i l de comparaison c ' e s t

l ' i m p r e t s i o n ou l'image que suggèrent l e s mots plus que l e

sens i n t r i n s è q u e de ces mots qui importe. C ' e s t donc c e t t e

impression ou c e t t e image q u ' i l faut r e c r é e r dans l a t r a d u c

-t i o n . A i n s i " p l a s -t e r of P a r i s " , qui n ' e s -t pas l a même chose

que"la p â t e à copier", a l e s c a r a c t è r e s e s s e n t i e l s à c e t t e

comparaison: l a p â l e u r , l e f r o i d , e t l ' a r t i f i c i a l i t . é .

Les t r a d u c t i o n s l i t t é r a l e s de l ' a d j e c t i f "gluant."

dans l a phrase s u i v a n t e ne sont pas exactes non p l u s : " l e

pavé é t a i t g l u a n t . "

6 5

"The pavement was s t l c k y " ,

6 4

" . . .

was g l u e j ; . "

6 6

"Gluant" prend un sens s p é c i a l dans ce

con-t e x con-t e ; i l d é c r i con-t un pavé qui e s con-t mouillé assez pour qu'on

60 F 154

61 B 101

68 C 76

63 F 129

64 A 87

(27)

glisse facilement. Le mot anglais qui sert à décrire cet état est "greaey", qui, lui aussi, prend un sens spécial dans ce cas.

On trouve des exemples aussi où les fautes séman-tiques résultent d'une connaissance insuffisante chez les traducteurs de leur propre langue. Mlle Boyd traduit les mots, "Ses yeux, quelle ne fermait plus,"66 par "Her eyes,

contlnually open now."67 La traductrice confond, semble-t-il, les adverbes "continually" et "continuously".68 II est bien évident que c'est le deuxième qu'il faut dans cette phrase.

M. Guest offre "persr>icuity"69 comme traduction de "la perspicacité"•70 "Perepicuity"71 veut dire lucidité d'expression tandis que la définition de "perspicacité" est

66 F 84 67 A 57 68 " C o n t i n u a i . . . Syn. C o n t i n u a i i m p l i e s a c l o s e o r i n c r e a s i n g s u c c e s s i o n of r é c u r r e n c e ; c o n t i n u o u s , an u n i n -t e r r u p -t e d c o n -t i n u i -t y o r u n i o n , of o b j e c -t e or p a r -t s . " Web-e t Web-e r ' s NWeb-ew I n t Web-e r n a t i o n a l D i c t i o n a r y of t h Web-e E n g l l Web-e h LanguagWeb-e TTTprïnglTêld, Mass. : 5 . & C. Merrian (Tômpeny, 1927)

69 B 118 70 F 171

71 " P e r e p i c u i t y . . • 2 . C l ^ a r n e s s of s t a t e m e n t o r e x p o s i t i o n , l u c i d i t y 1 5 4 6 . " The S h o r t e r Oxford E n g l i s h D i c t i o n a r y .

(28)

"faculté de pénétrer la vérité."

7

*

L a

traduction indiquée

est "perepicacity"

7

3

q u i a l e m ê m e s e n s q u e 1 Q

^

a p p a r e n t é

-Ces fautes d'anglais ne sont pae très fréquentée maie

elles ont l'effet malheureux de diminuer la confiance du

critique dans le traducteur. Ainei leur importance et leur

gravité ont tendance à s'exagérer.

Jusqu'ici on a considéré seulement des fautes qui

concernent "la sémantique", ou le sens intellectuel des mots.

Maintenant on va étudier des fautes qui concernent des

as-pects des faits d'expression sur lesquels la stylistique

attire l'attention. Dans cette étude linguistique on

ana-lyee un mot pour déterminer ees caractères affectifs:

eet-il intensif ou neutre? est-eet-il pris en bonne part ou en

mauvaise part? la stylistique fait remarquer aussi qu'une

langue comprend plusieurs langages ou "niveaux de langue".

Afin de reproduire fidèlement le style et lee sentiments

de l'original il faut tenir compte de ces aspects d'ordre

stylistique quand on traduit.

Il arrive que les traducteurs emploient des termee

72 A. Hatzfeld, A. Darmsteter, A. Thomas,

Diction-naire général de la langue françalee du commencement d ~

XVII** siècle Juequ

T

'à""hos jours. ( ParTsI Librairie Delà

grave, 1926)

73 "Perspicacity - a. Clearness of understanding;

pénétration, discernment." The Shorter Oxford Engllsh

Dictionary.

(29)

qui, sans dénaturer néceeeairement le sene, ne rendent pas avec justesse l'intensité du terme français. Si on examine un groupe de synonymes on constate peut-être que quelques-uns des mots sont plus forts que lee autres. Quand on peut mesurer cette différence en tenues de quantité ou de

dimen-sion on dit qu'elle est intellectuelle ou logique.

Com-parons, par exemple, "ville" et "hameau," "lao" et "étang." Quand il s'agit de concepts abstraits on ne peut plue mesurer la différence, l'inteneité de ces mots est relative à un

norme qui oscille selon lee émotione de la personne qui les emploie. Ce sont des intensifs affectifs. C'est à dire, en s'en servant, l'écrivain montre à quel point ees senti-ments ont été affectés ou bien il choisit des termes

inten-sifs afin d'affecter ses lecteurs. Prenons des exemples où 1'intensité n'est plus intellectuelle: "admirer" et "s'ex-tasier," "crainte" et "effroi," "fatigué" et "épuieé." Dans les trois versions anglaisée de "Le Cahier gris" ce sont dee intensifs affectifs qui suscitent des difficultée de traduc-tion.

M. Gilbert a tort de traduire "à jeun"74 par l'adjec-tif plus faible, "hungry".76 On a en anglais des qualifica-tifs plus forts, "starved" et "etarving". En traduisant

(30)

m I 76

l'agacement" par "exaspération", M. Guest77 et !.:. Gil-bert vont jusqu'à l'autre extrême car "exaspération" est trop fort pour remplacer fidèlement le eubetantif françaie. "Annoyance" a la même intensité à peu près que "l'agacement"

"C'est un misérable. Oui, un misérable, - ayons au moins le courage des mots."79 La répétition de "misérable"

et puis la pensée qui suit, "ayons . . . le courage des mots," le rendent évident que l'auteur emploie un terme

assez fort. M. uuest traduit: "He is a wretched créature. Yes, wretched . . .8 0 En étant vague cet adjectif anglais

est faible. Par contre, i__lle Boyd81 et te. Gilbert82

choi-sissent des mots qui s'appliquent à des gens improbes, iv.lle Boyd se sert du terme, "blackguard"83 et xv_. Gilbert du terme

76 F 55 77 B 41 78 C 27 79 F 171-2 80 B 118 81 A 115 82 C 90

83 "Blackguard - s b . 6. One of the i d l e c r i m i n e l c l a s s - a ' r o u g h ' hence a low w o r t h l e s s c h a r a c t e r a d d i c t e d to or#ready f o r crime; an open s c o u n d r e l . " A rew __]nglleh D i c t i o n a r y on n l s t o r i c a l P r i n c i p l e s lOxford: ATThe

(31)

"ecoundrel".84 Dans ce contexte où Jérôme se décrit, ces mots sont trop forte. Le qualificatif "despicable" eemble

être indiqué: il n'est ni trop indulgent ni trop sévère. "Je suis rongée d'inquiétude."85 Cette fois, au lieu d'un mot simple, on a une série d'intensité qui est la forme superlative de l'expression, "être inquiet." M. Guest tra-duit mot à mot: "I am devoured by anxiety."86 Comme dans le cas de la plupart des idiotismes, une traduction litté-rale ne veut rien dire. En anglais il existe une série d'intensité analogue: "to be worried to death."

Les autres éléments affectifs aussi exigent de l'at-tention. Chaque langue possède des expressions qui, par comparaison aux termes impartiaux, ont des valeurs péjora-tives, laudapéjora-tives, ou attenuatives. En traduisant il faut choisir l'expression qui a la même valeur que le terme

original afin de suggérer les mêmes sentiments que le texte. Traduire un terme neutre par un terme péjoratif, par

exemple, constitue une infidélité. M. Guest a donc tort de

villain. (J) Now usually with stronger sensé; An auda-eetitute of ail moral ecruple. lbld. 84 "Scoundrel. A. sb. A me an rascal, a low petty

( J) Now i cious rascal, one di

85 F 69 86 B 50

(32)

remplacer "dégingandé"87 p a r "g aw k y " .8 8 "Dégingandé" n ' e e t

pas un mot f l a t t e u r ; "gawky", qui sous-entend un manque d ' i n t e l l i g e n c e , e s t nettement p é j o r a t i f . Selon l e p o r t r a i t que nous f a i t l ' a u t e u r , l e pasteur Gregory n ' e s t pas beau mais i l n ' y a pas de r a i s o n d'exagérer l a l a i d e u r de ce

per-sonnage. M. G i l b e r t trouve l ' a d j e c t i f "ungainly"8 9 qui e s t

b i e n . I l y a a u s s i l e mot " l o o s e - j o i n t e d " qui i r a i t à ce c o n t e x t e .

" I l [[Daniel] a v a i t rodé aux environs de l a gare . . . . "9 0 M. G i l b e r t a bien f a i t de t r a d u i r e l e verbe par "He

had roamed round . . . "9 1 Par l ' e m p l o i du verbe p é j o r a t i f ,

"He had prowled around . . .",92 i:. Guest suggère une i n t e n

-t i o n malhonnê-te qui n ' e s -t pas indiquée par l e mo-t f r a n ç a i s e t qui ne s ' a c c o r d e pas avec l e c a r a c t è r e de D a n i e l .

A d ' a u t r e s moments l e s traducteurs atténuent des

p a s s a g e s par l a s u b s t i t u t i o n des termes neutres à des t e r r e s p é j o r a t i f s . La v e r s i o n qui omet l a couleur de v o c a b u l a i r e e s t a u s s i i n f i d è l e que c e l l e qui en a j o u t e . "On voue l a i s e e

87 F 70

88 B 51

89 C 35

90 F 125

91 C 65

(33)

ensemble jusqu'à la soupe, le temps de vérifier vos racon-t a r s # "Racontars" a une valeur péjorative qui n'est pas reproduite dans les versions anglaises: " . . . while we find out if what you say is true."9* . . . ior_g enough to verify your etory,"96 " . . . while we check up on your

story."96 Le mot "racontars" donne à la phrase un ton d'in-crédulité, de ricanement, qui disparaît dans les textes

anglais. Afin de garder le ton original on pourrait rempla-cer "story" par "yarns" ou même "taies", qui ont les mêmes nuances que le substantif français.

lorsqu'ils traduisent "la marmaille"97 par "ohildren" M. Gilbert98 et Mlle Boyd99 sont coupables de la même faute.

C'est M- Guest qui trouve le mot en anglais qui a la valeur péjorative du français: "urchins",100 Et encore, Mlle Boyd a tort de rendre "ricana le bonhomme"101 par "laughed the

93 F-154 94 A 103 95 B 106 96 0 80 97 F 129 98 C 67 99 A 87 100 B 90 101 F 120

(34)

man." 0 2 Et encore une fois c'est M. Guest qui est tombé sur le mot juste: "jeered".103

Trop souvent les traducteurs choisissent des termes sans souci du niveau de langue. La stylistique fait remar-quer que chaque langue comprend une série de langages.

Chaque métier a son vocabulaire qui est trop technique pour la compréhension du profane; de même que les différent as classes sociales ont des manières différentes, chacune a aussi sa façon de s'exprimer; la langue écrite est déjà plus soignée que la langue parlée et la langue poétique est plus recherchée. Ainsi la substitution d'un mot d'un certain niveau à un mot d'un autre niveau est accompagnée d'un

changement de style. Si le traducteur fait prononcer à un enfant des termes techniques, il le rend pédantique ou s1 il emploie des termes très littéraires là où l'auteur s'est contenté des mots de tous les jours, son style devient précieux.

Ce sont quelquefois des faux-amis qui déroutent les traducteurs. De même que des mots apparentés n'ont pas toujours le même sens, ils n'appartiennent pas nécessaire-ment au même niveau de langue. Le verbe "deviner" est un mot tout à fait ordinaire, mais le verbe anglais "to

(35)

divine" est recherché. En traduisant l'un par l'autre M. Guest donne à son texte un ton affecté: "Elle CJenny] avait deviné qu'il se passait un drame."104 "She had dlvined that there was some criais."105 il n'y a pas de raison de rejeter le verbe simple, "to guess."

Antoine raconte, "Je lui confisquais sa lampe. . ."106 M. Guest traduit la phrase: "I confiscated his lamp. . Z 1 0 7 Encore une fois pour traduire un mot commun M. Guest se eert d'un mot moins usuel. "To confiscate"108 est un terme juri-dique et s'emploie dans un contexte tel que le suivant: "On

the third offence his driver's licence was confiscated." Le verbe français109 est plus général et peut se remplacer souvent par "enlever". On propose comme version du passage cité, "I would take his lamp away from him . . . "

Il existe en français beaucoup de mots courants dont

104 F 128 105 B 89 106 F 19 107 B 17

108 "Confiscate - trans. To appropriate Iprivate property) to the publio treasury by way of penalty." The Shorter Oxford English Dictionary.

109 "Confisquer - Saisir au nom du fisc, ou en vertu d'un rglement quelconque: confisquer à un écolier un livre défendu." Larousse Universel en 2 Volumes: Nouveau

(36)

la forme anglaise est scientifique et, par conséquent, peu usuelle. "L'atmosphère lui sembla s'être raréfiée."110

Tant que cette phrase aille bien au style de l'original, le lecteur anglais est surpris de rencontrer au cours du récit des termes qui ont une saveur technique: "The atmosphère seemed suddenly to hâve become rarefied." Pris dans son sens concret, "atmosphère" est légèrement scientifique tan-dis que "rarefied"112 est nettement technique. Il serait préférable d'employer des mots plus simples: "Suddenly it seemed to him that there was no air."

Sans qu'il s'agisse de faux amis, les traducteurs choisissent un mot parfois qui n'est pas fidèle au niveau de l'original. "Nous avons pu nous emparer de lui,"113 dit lfabbé Binot. "S'emparer" est un mot ordinaire qui prend un ton familier quelquefois. Le mot dont se sert M. Guest

est moins usuel: "We managed to se cure him."114 Mlle Boyd donne une traduction plus acceptable: I was able to get

110 F 70 111 B 51

n ? «Rarefv - 1. trans. To make rare or thin esp. by o.nn ta lessen the density or solidity of (a substance, S T ï ï i ! kit. lr.Tn Path.. b o i p 3 » SÈ°£Îer Oxford E ^ -llah Dictionary.

(37)

hold of him."1^ on pourrait suggérer un verbe encore plus familier, "to grab".

"Les montées furtives au sixième . . ."116 H . Guest traduit cette locution, "The furtive ascents . . ."117

"Ascents" est bien l'équivalent intellectuel du substantif français, mais en étant un mot moins usité, il donne à la phrase un ton presque pédantique. Puisque la mention du "sixth floor" suggère déjà l'idée de "monter" on peut em-ployer un autre mot tout à fait afin de garder le niveau original: "His furtive visits to the sixth floor . . . "

Il arrive souvent qu'un mot familier est plus imagé que son synonyme du niveau ordinaire. "Daniel fut sur le point de . . • déguerpir."118 "To ro away,"119 traduit le sens de ce verbe mais en se servant de ce terme anglaiB Lille Boyd n'est pas fidèle au style pittoresque de l'auteur. M. Guest et M. Gilbert n'ont pas été plus heureux dans leur

choix, l'un traduit, "Daniel was on the point of . . . de-camping,"120 et l'autre, "Daniel was on the point of . . .

115 A 16 116 F 66 117 B 48 118 F 120 119 A 81

(38)

b o l t i n g w i t h o u t more ado."121 La d e r n i è r e version e s t l a

m e i l l e u r e mais e l l e souffre de sa longueur car l ' é l é m e n t

e s s e n t i e l du verbe e s t l a r a p i d i t é . On a p l u s i e u r s verbes

en a n g l a i s qui a p p a r t i e n n e n t à l a langue familière e t qui

ont l ' a v a n t a g e d ' ê t r e e f f e c t i f s par l e u r son: " s c o o t " ,

" s k i d d a d d l e " , " s c u r r y away".

" J e s u i s . . • au-dessus des coassements de l ' a u t r e

p a r t i .

n x

^ "Coassements" a u s s i e s t un terme f a m i l i e r e t

p i t t o r e s q u e . " I n s u l t s " 1 2 3 and "calumniee",124 l e s mots

q u ' e m p l o i e n t Mlle Boyd e t M. G i l b e r t , t r a d u i s e n t l e sens

mais i l s ne r e s p e c t e n t pas l a q u a l i t é imagée du mot

franç a i s qui désigne dans d ' a u t r e s contextes l e c r i des g r e

-n o u i l l e s . D'u-n a u t r e côté l a t r a d u c t i o -n de M. Guest, "the

c r o a k i n g s of t h e o t h e r s i d e , "

1 2 6

ne présente pas d ' i d é e

c l a i r e au l e c t e u r a n g l a i s . Le mot f a m i l i e r e t p é j o r a t i f

qui s ' e m p l o i e en a n g l a i s pour exprimer l ' i d é e voulue e s t

" m u d - s l i n g i n g . "

Une lettre écrite par Jacques à Daniel termine le

premier volume de "Les Thibault". Ce n'est

DIUS

le style

121 C 62

122 F 48

123 A 32

124 C 23

(39)

de Martin du Gard mais le style du jeune Jacques. Sa langue est l'exagération du style littéraire. Dans la bouche d'une personne mûre elle serait affectée et précieuse. Puisque c'est un garçon qui écrit ces phrases elles reflètent ses aspirations à une carrière d'écrivain et ses efforts

con-scientieux pour y atteindre. Ses paroles prennent un ton de sincérité qui appartient à son âge; sa mélancolie profonde résulte des déceptions qu'il a souffertes et non pas d'une mode romantique. S'il dit "Adieu" c'est qu'il croit qufil ne reverra plus son camarade. Il choisit cette expression aussi parce qu'elle est au-dessus des banalités quotidiennes. Afin que la lettre affecte les lecteurs anglais de la même

façon, il faut que le traducteur en reproduise minutieuse-ment le style. "Good-by.",126 qui paraît dans la version de ivUe Boyd,n'est ni l'équivalent intellectuel ni l'équi-valent affectif de "Adieu".127 Ce mot anglais n'exprime pas la finalité qui est contenue dans le terme français et il

n'est pas du même niveau de langue non plus. C'est le moment d'employer le mot plus recherché, "Farewell."

On a dit que le milieu social d'une personne est reflété dans son parler. Au cours de leurs aventures les deux garçons rencontrent un marin. Tout en causant il dit,

126 A 134 127 F 200

(40)

"Non, celui-là [le bateau] ne part que jeudi. ..aie si tu veux voir un départ, faut t'amener ce soir à 6 heures."128 Par l'emploi de la deuxième personne du singulier, de l'ex-pression populaire, "t'amener", et de l'ellipse, "faut",

l'auteur a réussi à reproduire la langue vulgaire d'un marin. La traduction de M. Guest, au contraire, est écrite dans un anglais soigné qui n'est pas la langue d'un homme du peuple: "No. She doesn't eail till Thursday. But if you want to see a boat leaving, you must corne along hère this afternoon at 5 o'clock."129 Afin de suggérer le même milieu social que le français il conviendrait mieux de traduire, "Better corne back 'bout five this afternoon." En choisissant le

vocabulaire, M. Guest ne tient pas compte non plus du métier de l'interlocuteur. Il est vrai qu'un marin dit "she" en parlant de son navire mais il est certain qu'il ne l'appel-lerait jamais "a boat". Dans la langue du peuple navigateur "a boat" est très petit, par exemple, "life boat", "sail

boat", "row boat", et cetera. Dans la phrase en question il vaudrait mieux dire "ship".

L'expression "grâce à Dieu"130 est courante en fran-çais mais l'expression anglaise qu'emploient Mlle Boyd131

128 F 108 129 B 76 130 F 18

(41)

et M. Gilbert,132 "thank God", est vulgaire et touche au juron. Puisque c'est l'abbé Binot qui prononce ces mots il est probable qu'il leur donne leur vrai sens: il rend des grâces à Dieu. Ainsi la version de M. Guest convient: "God be thanked."133 Il serait plus usuel, cependant, de dire

dans un cas pareil, "Praise be to God."

Ce n'est pas le vocabulaire seul qui affecte le ni-veau de langue. Le style d'une phrase varie selon la forme du verbe. "Savez-vous où est mon frère?"134 la phrase est écrite dans un style ordinaire et est bien rendu par Mlle Boyd13^ et k- Guest:136 "Do you know where my brother is?" M. Gilbert écrit, "Know where my brother is?"1 3 7 De

l'el-lipse de ce verbe il résulte un ton familier qui ne figure pas dans le texte français.

"Allez, mes amis,"138 dit _i-jne de jontanin à Jacques

132 C 7 133 b 18 134 F 11 135 A 9 136 a 11 137 C 4 138 F 158

(42)

et Antoine. M. Gueet139 et M. Gilbert140 o n t t p a d u l t f nGûf my friends." L'impératif des verbes intransitifs est devenu

très rare en anglais. Employé dans cette phrase ce tempe rappelle la langue biblique qui ne va point au contexte. "You'd better go along," serait moins brusque et ainsi plus poli.

Les fautes citées dans ce chapitre sont bien disper-sées dans toutes lee versions. Aucun des traducteurs n'est innocent des inexactitudes de détail qui résultent de l'in-attention ou d'une connaissance médiocre de la langue fran-çaise. On constate aussi que certaines fautes témoignent d'une connaissance imparfaite de la civilisation française chez toue les traducteurs.

Mais il y a d'autres inexactitudes qui semblent

refléter des tendances particulières à l'un ou l'autre des traducteurs. Mlle Boyd a l'air de se contenter dee versions approximatives. C'est elle, surtout, par exemple, qui tra-duit des termes précis par des termes généraux et des termes généraux par des tenues précis.

la version de M. Guest, au contraire, souffre de la littéralité. On a vu qu'il est souvent dévoyé par des faux-amie. En suivant le texte de trop près, il emploie des

(43)

termes qui n'ont pas exactement la signification désirée ou bien 11 emploie des expressions qui n'appartiennent pas au même niveau de langue que les expressions de

l'original-M. Gilbert ne commet pas autant de fautes grossières mais lui aussi fait des fautes d'inattention qui sont in jus

(44)

FAUTES D'INTERPRETATION

Dans les trois versions anglaises de "Le Cahier gris" on trouve beaucoup de fautes de sens qui embrassent non pas un mot isolé mais une locution ou une phrase. Il s'agit

dans ces cas des fausses interprétations du texte. D'abord, quand ils traduisent une phrase à la fois sans l'évaluer

et l'interpréter selon le contexte, les traducteurs risquent d'en tirer un contre-sens. Et puis quelquefois, à cause

d'une connaissance médiocre des constructions grammaticales, ils ne comprennent pas le développement ou la relation des idées.

Toutes les trois traductions fournissent des éviden-ces d'une insouciance du contexte. On dirait que cette négligence témoignait d'une méthode fautive de travail.

Les traducteurs, est-ce qu'ils rendent des mots sans essayer de comprendre le tout?

"Moi, je renvoie _3es lettres à son pays . . ."1 M. Guest traduit, "Tes, I forward his letters to the country, where he cornes from . . ."2 Si on se rapporte au passage duquel la phrase est tirée, on apprend que Noémie vient

(45)

d'annoncer à Mme de Fontanin que Jérôme l'a quittée pour

partir avec la bonne. Mme de Fontanin, qui veut à tout prix retrouver son mari, demande à sa cousine l'adresse de cette personne. Ne la sachant pas elle-même, elle suggère que la conoierge pourrait la savoir. L'auteur interrompt la narra-tion à ce point. Quand il la reprend c'est la concierge qui parle- On dirait qu'elle répond à la même question que

Madame a déjà posée à Noémie. C'est l'adresse de la bonne qu'elle demande; c'est donc "her address" et non pas "his address" . Pour vérifier cette supposition on n'a qu'à lire un peu plus loin. Madame envoie le télégramme à "Victorine Le Gad".

"Il £ Daniel] avait pour un instant le coeur délivré de son fardeau."3 A quoi fait-il allusion, le fardeau? Mlle Boyd comprend "free of ail cares,"4 et M. Gilbert

l'interprète de la même façon: "oarefree".6 Ayant lu soigneusement la page précédente, on conclut que l'auteur a une misère particulière en vue. Il vient de dire que "Daniel se sentit désormais isolé par cette expérience qui lui troublait le sang."6 (Il s'agit de la nuit qu'il a

3 F 141 4 A 95 5 C 74

(46)

passée chez une fille.) Mais tout d'un coup la

contempla-tion de la mer en toute sa splendeur lui fait oublier son

regret: "Il avait pour l'instant le coeur délivré de son

fardeau." C'est M. Guest qui a raison: "For a moment hie

heart was freed of its burden."

7

M. Gilbert a commis une faute d'interprétation qu'il

aurait évitée s'il avait suivi le français de plus près.

Après l'accident duquel les garçons ont été des spectateurs,

ils regardent les débris. "Sur quatre [chevaux], trois

étaient blessés dont deux, les pattes de devant brisées,

étaient effondrés sur les genoux. Le quatrième était mort."

8

Voyons la version libre du traducteur: "Of the four only

one esoaped unscathed: two, their forelegs broken, were

9

kneeling on the road. The fourth was dead." S'il n'y a

que quatre chevaux dont trois de blessé et un de mort, il

n'y en a pas de sain et sauf. C'est peut-être une erreur

d'arithmétique!

La majorité des fausses interprétations proviennent

non pas de cette insouciance du contexte mais d'une

con-naissance médiocre du françaie. Cette étude dee traduotions

prouve que la possession d'un vaste vocabulaire ne suffit

7

98

(47)

pas pour comprendre une langue. Il faut en ^lus connaître à fond la grammaire. Souvent les traducteurs n'ont pas pu suivre l'enchaînement des idées parce qu'ils n'ont pas

reconnu les constructions grammaticales.

L'accord du verbe et de son sujet, de l'adjectif et du substantif, ou du relatif et de son antécédent sert sou-vent à indiquer le lien entre les diverses parties d'une phrase. "Il la [main] tenait crispée sous son menton,

pareille à une araignée de cauchemar."10 Lorsqu'il traduit ce morceau, " . . . and now held it clenched beneath his chin,—he looked like some nightmare spider,"11 il est évident que iv_. Guest ne se rend pas compte que "pareille" se rapporte au mot féminin, "la main", et non pas à "il". C'est"la main" qui fait penser à une araignée: "The hand he held clenched beneath hie chin looked like some nightmare spider."

"M. l'abbé Vécard, secrétaire particulier de iv.gr. l'Archevêque de Paris, directeur spirituel de ia. Thibault et grand ami de la maison,"12 En français les noms en apposition ne prennent pas d'article. Ainsi il n'y a pas de doute que toutes lee trois locutions de cette phrase

10 F 73 11 B 53 12 F 42

(48)

sont appositives à "M. l'abbé Vécard". C'est lui qui est en même temps "secrétaire", "directeur spirituel", et

"grand ami". On lit dans la version de Mlle Boyd, "Abbé Vécard, the private secretary to the Archbishop of Paris, M. Thibault's spiritual adviser and trusted friend."13

Parce qu'il n'y a pas de règle en anglais concernant l'emploi d'article avec les noms en apposition, la traductrice a eu l'indiscrétion de se servir d'un article dans la première locution et de ne pas en mettre dans la deuxième. Comme réeultat de cette inconsistance on conclurait de cette ver-sion que c'est l'Archevêque qui est directeur spirituel et grand ami de ia. Thibault. M. Guest et :a. Gilbert ont peut-être envisagé le problème mais ils n'ont pas réussi à le résoudre. Voici leurs traductions:

. . . M. l'abbé Vécard, private secretary to i.onsig-nor the Archbishop of Paris; he was spiritual director

to M. Thibault, and a great friend of the family. 1 4

. . . the abbé Vécard, private secretary to His Grâce the archbishop of Paris. This priest was M. Thibault's confessor and a great friend of the family. 15

On a toujours de la peine à décider à qui se rapportent les mots "he" et "this priest". Une construction parallèle

assurerait plus de clarté:

13 A 29 14 B 32

(49)

Abbé Vécard, private secretary £f Konsignor the

Archbishop of Paris, spiritual adviser oi: M. Thibault,

and lntimate friend of the family.

"Elle a dû entendre aboyer Puce, croire que c'était

son frère, accourir."

16

Les trois infinitifs soulignés

dépendent du verbe "a dû". On est surpris, cependant, de

constater que deux des traducteurs ont mal compris cette

phrase. Mlle Boyd et M. Gilbert ont attribué l'action

d'ac-courir à "son frère". La première traduit: "She muet hâve

heard Puce barking and thought her brother was coming."

17

L'autre écrit: "She must hâve heard Puce bark and thought

her brother had corne back."

18

Il

n^y

a que M. Guest qui

rend fidèlement le passage: "She must hâve heard Puce bark,

thought it was her brother and rushed m . " ^

Les formes et les fonctions des temps des verbes

anglais diffèrent de celles des temps français. Ainsi il

n'est pas toujours facile de transposer d'une langue dans

l'autre l'effet créé par l'emploi d'un certain tempe. En

fait, on a trouvé de nombreux cas où les traducteurs ont mal

rendu une phrase parce qu'ils n'ont pas compris les nuancer

contenues dans le temps du verbe.

16 F 33

17 A 23

18 C 15

19 B 26

(50)

"Donc, en entrant, nos yeux tombent sur l'ami

Jac-quot."20 Il eet vrai qu'on peut traduire le présent histori que21 par le "prétérit"22 en anglais. Mais il faut quand même que les actions qui sont simultanées en français le

soient aussi dans la traduction. Pour cette raison on ne peut pas admettre la version de M. Gilbert: "No sooner had we entered than our eyes fell on our little friend Jacques."23 D'ailleurs, l'expression, "no sooner f . .

than" donne 1'impression que c'est par accident que Jacques attire l'attention de l'abbé, ce qui n'est point le cas. Au contraire, c'est exprès pour surveiller ce garçon que

l'abbé est entré dans la classe. Donc, on proposerait cette traduction: "So, as I entered, my eyes turned to our young friend Jacques."

Les traducteurs se trompent en rendant l'imparfait surtout. Ce temps français, qui a plusieurs fonctions, est rendu en anglais par divers temps. Il y a d'abord

l'impar-20 F 17

21 En ce qui concerne les termes de grammaire fran-çaise on a adopté la nomenclature de "la Grammaire Larousse du XXe Siècle," (Paris: Librairie Larousse, c. 1936)

22 En ce qui concerne les termes de grammaire anglaise on a adopté la nomenclature de "Essentiale of English Gram-mar" par Otto Jespersen, PH.D., Litt.D., L.L.D. (New York: Henry Holt & Company Inc., c. 1933)

(51)

fait qui sert à décrire ou à indiquer une action continue. Si la phrase contient déjà une expression de durée, on peut

traduire le verbe à l'imparfait par le "prétérit". Ainei pour traduire "Dès les premiers vers je frissonais,"24 on peut dire, "From the first lines I trembled." Par contre, on ne peut pas dire, comme le dit Mlle Boyd, "As soon as I had read the first verse, I shlvered,"2^ car cette construc-tion indique plutôt une séquence d'acconstruc-tions.

"Il tenait sa barbe dans sa main, fronçait les sour-cils et regardait à terre."26 L'emploi de l'imparfait pour ces trois verbes donne l'impression que ces actions ne sont pas seulement continues mais qu'elles sont également

simul-tanées. La traduction de M. Guest ferait croire que ce soit une eérie d'actions: "He held his beard in his hand, frowned and looked at the floor."27 Chez Mlle Boyd cette fois on

trouve une version préférable: "The young man was etroklng his beard, frowning and looking at the floor."28 On voit que là où on dépend complètement du temps du verbe pour

créer l'effet de durée on est obligé d'employer le "expanded

24 F 96 25 A 65 26 F 24 27 B 20 28 A 17

(52)

prétérit" en anglais.

Dans d'autres cas on emploie l'imparfait dans le but d'exagérer la durée d'une action ou d'amplifier son

impor-tance. Il devient difficile de rendre des verbes à ce tempe puisqu'il n'y a pas de temps en anglais qui a cette valeur. "Hours passed"29 n'est pas traduction exacte de

"Les heures passaient."30 M. Guest et M. Gilbert ont trouvé des moyens efficaces de produire l'effet voulu. M. Guest a ajouté une locution adverbiale: "The hours passed one by one."S1 M. Gilbert s'est permis d'introduire un autre verbe tout à fait: "The hours dragged on."32

L'imparfait exprime dans d'autres contextes une habitude du passé. Ayant méconnu cet emploi de ce temps dans la phrase suivante, Mlle Boyd a mal interprété le pas-sage:

Le vieux pasteur était mort, une main dans celles de sa fille et l'autre dans celles de Gregory, qu il appelait son fils.33

29 A 19 30 F 27 31 B 22 32 C 12 33 F 74

(53)

As the old pastor lay dying, one hand in his

daugh-son

B

sf

1

°

t h e r i n G r e

ê

o r

y

, s

.

**

called Gregory his

La traductrice fait croire que c'est la première foie que

le pasteur Perrier l'appelle son fils. En fait, il le

traite comme son propre enfant depuis longtemps. Parce qu'il

n'existe pas de temps en anglais qui corresponde à

l'impar-fait de coutume, on est obligé de se servir des verbes

auxiliaires comme "would" et "used" ou des expressions

telles que "always", "to hâve a habit of" , et ainsi de suite.

Dans la phrase citée on pourrait dire, "The old pastor had

died holding his daughter by one hand and Gregory, whom he

used to call his son, by the other."

Généralement on peut rendre le passé simple

fidèle-ment et facilefidèle-ment par le "prétérit". Mais, comme on l'a

déjà vu, ce temps anglais traduit également l'imparfait de

description ou d'action continue. Pour cette raison une

ambiguïté peut se produire dans certains cas.

Le souffle frais . . . sembla venir attaquer l'air

vicié . . . et ea caresse atteignit le visage ardent

de la malade, qui frissonna.

f

a&

Par l'emploi du passé simple Martin du Gard a réussi à

créer une image pittoresque, "le souffle frais" semble

toucher le visage de Jenny avec la tendresse et la rapidité

34 A 51

35 F 79

(54)

d'une caresse. Par l'emploi du passé simple encore dans la dernière proposition il a suggéré que la réaction de l'en-fant est également subite. Lr. Guest malheureusement a

failli à reproduire cet effet: " . . . and its caress came at last to the burning face of the sick child, who shlver-ed."36 Puisque le verbe "shivered" au temps "prétérit" se trouve dans une proposition subordonnée, on pense d'abord à la valeur descriptive. Pour attirer l'attention sur la rapidité du mouvement on ferait mieux de changer cette propo-sition subordonnée en propopropo-sition coordonée.

. . . a fresh breath of air . . . seemed to corne to attack the unpure atmosphère . . . At last it touched with its caress the burning face of the sick child and

she shivered.

Le verbe "venir" sert d'auxiliare dans deux expres-sions différentes. "Venir de faire quelque chose" indique une action qui a eu lieu dans le passé dernier. "Venir

faire quelque chose" veut dire venir avec l'intention de

faire quelque chose. "Je venais demander à votre maman . . . ."37 En traduisant cette phrase M. Guest et M. Gilbert ont confondu ces deux expressions: "I hâve just been asklng . .

#»38 rfjtve jugt been asking . . ."39 Pour exprimer

36 B 56 37 F 38 38 B 29

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