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Analyse et caractérisation des marques de possession en matière de délimitation foncìère au Québec

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ANALYSE ET CARACTÉRISATION DES MARQUES DE

POSSESSION EN MATIÈRE DE DÉLIMITATION

FONCIÈRE AU QUÉBEC

Mémoire

MARC-ANDRÉ JUTRAS

Maîtrise en sciences géomatiques

Maître ès sciences (M.Sc.)

Québec, Canada

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Résumé

À titre d’expert de la mesure, l’arpenteur-géomètre est prédestiné à rencontrer une multitude de situations lorsqu’il exécute ses levés sur le terrain, notamment en ce qui a trait à la façon dont les propriétaires fonciers exercent et expriment leur droit de propriété. En effet, il est tout à fait normal d’user et de jouir du terrain duquel on est le propriétaire. Cette possession exercée et constatée sur le terrain peut produire certains effets et l’arpenteur-géomètre aura fréquemment à évaluer l’impact potentiel de cette possession lorsque vient de temps d’indiquer les limites séparatrices d’un bien-fonds. À titre d’exemple, lorsqu’il est investi d’un mandat de constatation et à défaut de limites de propriété clairement définies, l’arpenteur-géomètre n’aura d’autre choix que d’indiquer la position d’une limite séparative selon les marques de possession qu’il rencontre.

Lorsqu’il émet son opinion professionnelle, il est du devoir de l’arpenteur-géomètre de déterminer si les marques de possession retrouvées pourraient être jugées suffisamment significatives pour potentiellement produire des effets. Au-delà de cette question, l’arpenteur-géomètre devra être en mesure de justifier cette opinion professionnelle, ce qui n’est pas toujours aisé surtout lorsqu’il rencontre sur le terrain plusieurs traces laissant supposer une emprise matérielle du terrain par un possesseur.

Par une énumération d’une multitude d’éléments considérés et analysés en jurisprudence québécoise dans le but de prouver une possession utile et par l’élaboration d’une liste de critères d’analyse, cet ouvrage constitue pour l’arpenteur-géomètre un outil utile lorsque vient le temps d’analyser l’impact des marques matérielles retrouvées sur la position d’une limite séparative entre deux propriétés. C’est ainsi que seront traités autant les différents types de marques de possession rencontrées que les caractéristiques que peuvent avoir ces marques pour accroître leur force probante. En effet, par la présentation d’une approche systématique d’analyse, cet ouvrage a notamment pour but de guider l’arpenteur-géomètre dans son choix des marques de possession à être conservées ou à être écartées dans son analyse.

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Avant-propos

J’aimerais tout d’abord remercier mon directeur de recherche, monsieur Marc Gervais, pour ses éclaircissements tout au long du présent travail de recherche. De par sa rigueur intellectuelle et sa passion pour sa matière, j’ai pu cheminer à travers mes études supérieures tout en ayant acquis des connaissances inestimables pour ma vie personnelle et professionnelle future. Aussi, je ne saurais passer sous silence la collaboration de madame Nathalie Massé qui fut d’un soutien constant depuis quatre ans. Nos conversations et nos discussions furent définitivement bénéfiques pour l’avancement de mes travaux. Finalement, de par leurs commentaires pertinents et judicieux ayant eu pour effet d’accroître de façon significative la qualité de cet ouvrage, j’aimerais souligner le travail de monsieur Francis Roy et de Me François Brochu.

J’en profite également pour souligner l’apport de mes parents qui, chacun à leur façon et ce tout au long de mon cheminement scolaire, m’ont permis de comprendre combien il est important de surpasser ses limites pour avoir une vie plus épanouie. Sans cet apport important de leur part, ce projet de recherche n’aurait vraisemblablement jamais vu le jour. De plus, pour tout ce que ça implique de côtoyer un professionnel qui décide en plus de consacrer une bonne partie de son temps à la poursuite de ses études, j’aimerais exprimer un gros merci à ma conjointe Mélanie. Tu as su m’encourager et me motiver dans ce projet, en plus de gérer un emploi du temps qui était parfois difficilement conciliable avec nos activités de tous les jours, notamment depuis l’arrivée de notre fille Sophie et de notre fils Arnaud. J’en profite par le fait même pour te féliciter pour la fin de tes études supérieures et tu peux également être fière de ce que tu as accompli.

Finalement, mes études supérieures n’auraient pas été possibles sans la compréhension et les compromis constants de monsieur Bernard Monette. Ayant rendu réalisable la conciliation entre le travail et les études, je ne saurais être plus reconnaissant. Également responsable de ma découverte des sciences géomatiques, sa passion et sa joie de vivre contagieuse m’auront notamment permis de trouver ma place et, plus important encore, de m’y sentir bien.

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Table des matières

Résumé ... iii

Avant-propos ... v

Table des matières ... vii

Liste des tableaux ... xi

Liste des figures ... xiii

Chapitre 1. Introduction ... 1

1.1. Mise en contexte ... 1

1.1.1. Exercice exclusif de l’arpenteur-géomètre et principaux mandats exécutés .... 1

1.1.2. Types de limites et rôle de la possession ... 7

1.1.3. Fondements de la possession ... 10

1.1.4. Types de mandats et obligations de l’arpenteur-géomètre ... 14

1.2. Problématique, question et objectif de recherche ... 18

1.2.1. Problématique de recherche ... 18 1.2.2. Question de recherche ... 22 1.2.3. Objectif de recherche ... 22 1.3. Hypothèse de recherche ... 24 1.4. Cadre opératoire ... 25 1.4.1. Méthode de recherche ... 26 1.4.2. Stratégie de vérification ... 28

1.4.3. Techniques de collecte de données ... 29

1.4.4. Traitement des données... 31

1.5. Présentation du mémoire ... 35

Chapitre 2. Concepts généraux et les marques de possession significatives ... 37

2.1. Terminologie ... 37

2.2. Les qualités de la possession utile ... 40

2.2.1. La possession paisible ... 41

2.2.2. La possession continue ... 41

2.2.3. La possession publique ... 43

2.2.4. La possession non équivoque... 43

2.3. La présomption de mitoyenneté de l’ouvrage de clôture ... 44

2.4. Les éléments servant à la démarcation d’un bien-fonds ... 46

2.4.1. Les marques ponctuelles ... 48

2.4.1.1. Les monuments d’arpentage ... 48

2.4.1.2. Les autres marques ponctuelles ... 53

2.4.2. Les marques linéaires ... 58

2.4.2.1. La clôture ... 60

2.4.2.2. La haie, la rangée d’arbres, la ligne ouverte et l’arbre plaqué ... 61

2.4.2.3. Le muret, le fossé et le talus... 66

2.4.3. Les marques surfaciques et volumétriques ... 67

2.4.3.1. La structure permanente ... 67

2.4.3.2. La structure non permanente ... 70

2.4.3.3. Les diverses activités ... 71

2.5. Conclusion ... 78

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3.1. Identification des critères sur la base des qualités d’une possession utile ... 81

3.2. Présentation des critères d’analyse d’une marque de possession ... 83

3.2.1. La visibilité ... 83 3.2.2. La permanence ... 88 3.2.3. Le non-accès ... 91 3.2.4. L’usage distinct ... 96 3.2.5. L’étendue linéaire ... 99 3.2.6. La dimension géospatiale ... 102 3.2.7. L’orientation ... 106 3.2.8. La propriété commune ... 110 3.2.9. La cohérence géospatiale ... 114

3.2.10. La balance des probabilités ... 119

Chapitre 4. Grille d’analyse et son application ... 123

4.1. Grille d’analyse et recommandations quant à son utilisation ... 123

4.1.1. Hiérarchisation ou classification des critères ... 123

4.1.1.1. Identification des objets ... 124

4.1.1.2. Appréciation des attributs ... 125

4.1.1.3. Appréciation des relations ... 126

4.1.2. Grille d’analyse des marques de possession ... 127

4.2. Différentes situations pouvant être rencontrées le long d’une limite séparative . 129 4.2.1. Une seule marque le long d’une limite séparative ... 130

4.2.1.1. Identification de la limite avec une marque complète ... 131

4.2.1.2. Identification de la limite avec une marque partielle ... 131

4.2.2. Plusieurs marques consécutives le long d’une limite séparative ... 136

4.2.2.1. Identification de la limite avec à une marque ayant une force probante supérieure ... 136

4.2.2.2. Identification de la limite avec des marques ayant une force probante similaire... 138

4.2.3. Plusieurs marques en concurrence le long d’une limite séparative ... 141

4.2.3.1. Identification de la limite avec à une marque ayant une force probante supérieure ... 141

4.2.3.2. Identification de la limite avec des marques ayant une force probante similaire... 141

4.3. Recommandations pour la pratique de l’arpenteur-géomètre ... 143

4.4. Conclusion ... 146

Chapitre 5. Conclusions ... 147

5.1. Synthèse des résultats obtenus ... 147

5.2. Retour sur l’hypothèse de recherche ... 148

5.3. Limitations de la recherche ... 148

5.4. Perspectives de recherche et de développement ... 150

Bibliographie ... 153

Législation consultée ... 153

Jurisprudence consultée ... 153

Doctrine consultée ... 164

Sites Internet consultés ... 170

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ix Annexe 1A ... 172 Annexe 1B ... 175 Annexe 1C ... 178

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Liste des tableaux

Tableau n°1. – Jugements répondant à larecherche par certains mots-clés sur le site de Jugement Québec pour la période couvrant le 1er janvier

2000 au 31 décembre 2009………. 19

Tableau n°2. – Grille d’analyse applicable pour l’arpenteur-géomètre.………. 127

Tableau n°3. – Grille d’analyse applicable pour le cas pratique #1……… 174

Tableau n°4. – Grille d’analyse applicable pour le cas pratique #2……… 177

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Liste des figures

Figure n°1. – Méthode générale de recherche.……… 26

Figure n°2. – Analyse qualitative basée sur des observations documentaires…….... 34

Figure n°3. – Critère de la visibilité.………... 87

Figure n°4. – Critère de la permanence……….. 90

Figure n°5. – Critère du non-accès………..………… 95

Figure n°6. – Critère de l’usage distinct………..…………... 98

Figure n°7. – Critère de l’étendue linéaire……….. 101

Figure n°8. – Critère de la dimension géospatiale……….. 105

Figure n°9. – Critère de l’orientation……….. 109

Figure n°10. – Critère de la propriété commune………. 113

Figure n°11. – Critère de la cohérence géospatiale………. 118

Figure n°12. – Critère de la balance des probabilités……...……….. 121

Figure n°13. – Marque partielle (Analyse segment par segment)……….. 131

Figure n°14. – Marque partielle (Analyse dans son ensemble)……….. 134

Figure n°15 – Marque (partielle) ayant une force probante supérieure……….. 136

Figure n°16. – Marques consécutives (Analyse segment par segment)……….. 138

Figure n°17. – Marques consécutives (Analyse dans son ensemble)………. 139

Figure n°18. – Marques concurrentes (Principes de la zone d’indivision)…………. 141

Figure n°19. – Croquis de la décision Gravel c. Phénix... 172

Figure n°20. – Croquis de la décision Marcil c. Richard... 175

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Chapitre 1. Introduction

1.1. Mise en contexte

1.1.1. Exercice exclusif de l’arpenteur-géomètre et principaux mandats exécutés

Tout d’abord, cet ouvrage traite principalement de la pratique des arpenteurs-géomètres du Québec, soit le seul professionnel habilité à identifier ou positionner les limites de propriété entre les différents biens fonciers au Québec en vertu de l’article 34 de la Loi sur les arpenteurs-géomètres:

« Constituent l'exercice de la profession d'arpenteur-géomètre :

a) tous arpentages de terrains, mesurages aux fins de borner, bornages, levés de plans, toutes confections de plans, de procès-verbaux, de rapports, de descriptions techniques de territoires, de certificats de localisation et de tous documents ainsi que toutes opérations faites par méthode directe, photogrammétrique, électronique ou autre se rapportant de quelque manière que ce soit au bornage, lotissement, établissement d'assiette de servitude, piquetage de lots, et relevés des lacs, rivières, fleuves et autres eaux du Québec, aux calculs de superficies des propriétés publiques et privées, à toutes les opérations cadastrales ou aux compilations de lots ou de parties de lots, ainsi qu'à la représentation cartographique de territoire aux fins susdites »1.

De plus, l’article 35 du cette même loi vient compléter le précédent article en mentionnant qu’« aucune des opérations définies à l'article 34 n'est valide, à moins qu'elle n'ait été entreprise par un arpenteur-géomètre et exécutée conformément à la loi et aux règlements de l'Ordre »2. À la lecture de ces articles de loi, on constate que l’arpenteur-géomètre jouit notamment d’un exercice exclusif en ce qui a trait à tout

1 Loi sur les arpenteurs-géomètres, L.R.Q., c. A-23, art. 34, al. 2. 2 Loi sur les arpenteurs-géomètres, L.R.Q., c. A-23, art. 35.

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travail affectant la position d’une limite de propriété. Fort de son statut d’officier public3, l’arpenteur-géomètre est donc le seul professionnel habilité pour procéder à la délimitation des biens-fonds au Québec.

On peut définir la délimitation foncière, également appelée analyse foncière, comme étant « la partie des opérations où l’arpenteur-géomètre étudie et soupèse l’ensemble des renseignements recueillis en vue de formuler son opinion sur la position d’une limite »4. À titre indicatif, le Grand Dictionnaire de l’Office Québécois de la Langue Française propose de son côté la définition suivante pour ce qui est du terme « délimitation » : « indication des limites beaucoup plus lâche et moins stricte que le bornage. Très souvent les abornants ne sont pas tenus d'être présents ou de signer un procès-verbal. C'est une façon empirique d'établir le voisinage entre bien-fonds et qui présente un caractère arbitraire »5. En définissant l’adjectif « arbitraire » comme étant « qui dépend d'une décision individuelle, et non d'une raison ou d'une convention valable pour tous » 6, on comprend bien que l’indication d’une limite de propriété par un arpenteur-géomètre résulte d’une opinion professionnelle sur la base de l’analyse qu’il aura lui-même faite de la situation. Bien que tout jugement professionnel soit unique7, l’arpenteur-géomètre doit évidemment se baser sur des principes et des concepts pour appuyer son opinion.

L’article de base pour l’arpenteur-géomètre quant à la détermination de la position d’une limite de propriété est l’article 977 du Code civil du Québec, lequel

3 Loi sur les arpenteurs-géomètres, L.R.Q., c. A-23, art. 34, al. 1. ; voir également le GRAND

DICTIONNAIRE, Recherche, En ligne – http://www.granddictionnaire.com/, consulté le 1er mars 2012, où

l’on définit l’officier public comme étant une « Personne à qui l'État a donné le pouvoir de dresser ou de

conserver des actes qui sont reçus comme authentiques, ou de donner à une copie d'un acte une valeur authentique ».

4 Gérard RAYMOND, Grégoire GIRARD, André LAFERRIERE, 1993, Précis du droit de l’arpentage au

Québec, Québec, Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, p. 172.

5 GRAND DICTIONNAIRE, Recherche, En ligne – http://www.granddictionnaire.com/, consulté le 1er

mars 2012.

6 GRAND DICTIONNAIRE, Recherche, En ligne – http://www.granddictionnaire.com/, consulté le 1er

mars 2012 ; voir également Marie-Éva DE VILLERS,2003,Multi dictionnaire de la langue française, 4e

édition, Montréal, Éditions Québec Amérique inc., p. 109, où le terme « arbitraire » peut être défini comme étant « qui dépend de la volonté seule » ou encore « qui dépend du bon plaisir ».

7 George A. LEGAULT, 2003, Crise d’identité professionnelle et professionnalisme, Montréal, Presses de

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3 mentionne que « les limites d'un fonds sont déterminées par les titres, les plans cadastraux et la démarcation du terrain et, au besoin, par tous autres indices ou documents utiles »8. Bien que cet article de loi traite des éléments à prendre en compte quand vient le temps de déterminer une limite de propriété, il n’en demeure pas moins que cet article est plutôt flou, incomplet et surtout sujet à l’appréciation de l’arpenteur-géomètre ou du tribunal. De plus, il s’agit du seul article de loi encadrant la pratique générale de notre profession en matière de délimitation, certains autres ne traitant plutôt que de situations très particulières9.

Les divers règlements encadrant la pratique de l’arpenteur-géomètre n’amènent pas de clarification à l’article de 977 du Code civil du Québec10. Il n’y a toujours aucune mention sur la façon d’effectuer la délimitation des biens-fonds ou, en d’autres termes, comment l’arpenteur-géomètre doit opérer de manière à accorder à chaque indice la juste valeur. En fait, ces règlements s’attardent plus au contenu des différents documents officiels pouvant être produits par l’arpenteur-géomètre et sur les éléments devant être vérifiés par celui-ci plutôt que la façon réelle d’obtenir le résultat.

À défaut d’une convention valable pour tous, la délimitation doit néanmoins « s’effectuer en respectant les règles établies par la loi et interprétées par la jurisprudence »11. Subsidiairement, les décisions des tribunaux, ayant notamment pour rôle d’interpréter les lois et les règlements, constituent une source de droit très importante pouvant guider l’arpenteur-géomètre dans sa pratique.

8 Article 977 du Code civil du Québec.

9 On peut penser, par exemple, à l’article 919 du Code civil du Québec : « Le lit des lacs et des cours d’eau

navigables et flottables est, jusqu’à la ligne des hautes eaux, la propriété de l’État. ». Cet article de Loi

traite d’une situation spécifique pouvant aider l’arpenteur-géomètre dans certains cas très précis, mais qui ne lui sont d’aucune utilité dans la majorité des situations.

10 À titre indicatif, en regardant le contenu du Règlement sur la norme de pratique relative au certificat de

localisation, A-23, r.7.1, art. 2, on mentionne que « Le certificat de localisation est un document en minute comportant un rapport et un plan, dans lequel l'arpenteur-géomètre exprime son opinion sur la situation et la condition actuelles d'un bien-fonds par rapport aux titres de propriété, au cadastre, ainsi qu'aux lois et règlements pouvant l'affecter ». On réitère donc le principe de base où l’arpenteur-géomètre doit comparer

l’occupation retrouvée sur le terrain, défini ici comme étant la « situation actuelle d’un bien-fonds », les titres de propriété ainsi que les plans cadastraux, mais il n’est pas mentionné explicitement lesquels des éléments précédemment mentionnés ont préséance sur les autres.

11 Gérard RAYMOND, Grégoire GIRARD, André LAFERRIERE, 1993, Précis du droit de l’arpentage au

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Au cours des années, on retrouve dans la jurisprudence québécoise de nombreuses décisions en matière de bornage, jugements qui ont pour but de déterminer et fixer une limite de propriété entre deux biens-fonds12. Certains jugements en reconnaissance de droit de propriété, notamment sur la base d’une acquisition possible par prescription, peuvent également être utiles pour l’application de certains concepts liés à l’analyse de la possession. Rappelons qu’en droit civil, comme c’est le cas dans une procédure impliquant deux personnes physiques ou morales, la jurisprudence ne s’impose pas, contrairement au droit public où la règle du précédent s’applique13. Néanmoins, le courant jurisprudentiel demeure très important lorsque vient le temps de prendre une décision sur une limite de propriété, puisque les tribunaux sont normalement conséquents avec les décisions rendues précédemment. Les tribunaux s’appuient très souvent sur des causes similaires lorsque vient le temps de rendre leurs décisions. La jurisprudence nous amène donc des cas concrets de délimitation où une décision quant à la position des limites de propriété fut prise.

Il est primordial que tout arpenteur-géomètre désirant œuvrer en arpentage foncier puisse être capable d’appliquer adéquatement les principes de délimitation lorsqu’il indique la position d’une limite entre deux fonds de terre. En effet, c’est par l’application des principes de délimitation que l’arpenteur-géomètre pourra apprécier et analyser adéquatement une situation, en tirer les conclusions qui s’imposent pour ensuite positionner ou indiquer l’assiette des divers droits réels existants14. Rappelons également que l’arpenteur-géomètre doit recueillir et analyser une quantité suffisante de faits avant d’émettre son opinion professionnelle15. De plus, celui-ci pourrait être appelé à témoigner en tant que témoin expert ou simplement pour justifier cette opinion professionnelle

12 Gérard RAYMOND, Grégoire GIRARD, André LAFERRIERE, 1993, Précis du droit de l’arpentage au

Québec, Québec, Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, p. 241 ; Daniel FORTIN et Marc GERVAIS, 2004, « L’abornement préalable pour soutenir le régime foncier au Québec : une nouvelle manière d’envisager la délimitation foncière », Revue Géomatique, Vol. 31, Été 2004, p.14.

13 Sylvio NORMAND, 2000, Introduction au droit des biens, Montréal, Wilson & Lafleur ltée, p.5.

14 Voir à ce sujet Marc GERVAIS, 2007, « L’arpenteur-géomètre : Dans quelle mesure doit-il être en

possession de ses limites? », 109 R. du N. 391.

15 Code de déontologie des arpenteurs-géomètres, c. A-23, r. 3, art. 3.02.05 : « L'arpenteur-géomètre doit

chercher à avoir une connaissance complète des faits avant de donner un avis ou un conseil » ; voir

également Simard c. Tremblay, 2007 QCCQ 8029, par. 11 : « Dès lors, pour avoir une vue d'ensemble et

une approche globale pour solutionner un problème précis, l'arpenteur-géomètre doit forcément procéder à une cueillette de données et d'informations élargie ».

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5 auprès d’un juge qui pourra s’en remettre en partie à l’expertise de l’arpenteur-géomètre16. L’analyse foncière est fort probablement la tâche demandant le plus de connaissances et de rigueur intellectuelle de la part de l’arpenteur-géomètre. Elle peut également être considérée comme l’étape la plus ardue de la profession, du fait que tout n’est pas que blanc ou noir17.

Concrètement, l’arpenteur-géomètre sera amené à donner son opinion sur la position d’une limite séparative lors de la réalisation de plusieurs de ses mandats. Tout d’abord, lors de la confection d’un certificat de localisation18, l’arpenteur-géomètre doit effectuer tous les mesurages nécessaires pour pouvoir vérifier les limites du bien-fonds19. L’arpenteur-géomètre doit également se prononcer sur la concordance ou la discordance entre les marques d’occupation, les données inscrites sur les plans cadastraux ainsi que celles inscrites dans les titres de propriété20, ce qui le ramène à donner son opinion professionnelle quant à la délimitation du bien-fonds à l’étude.

L’opération de piquetage a pour but de matérialiser l’opinion professionnelle de l’arpenteur-géomètre sur une limite séparative au moyen de repères d’arpentage directement sur le terrain21. Dans le Règlement sur la norme de pratique relative au piquetage et à l’implantation22, on mentionne que l’arpenteur-géomètre doit s’assurer de faire une analyse nécessaire pour déterminer la position des limites sur le terrain23. En fait, la démarcation par la pose de repères matérialisés directement sur le terrain est

16 Ruest c. Groupe Gestion 2000 Inc., [1997] n° AZ-97023103 (C.S.).

17 Marc GERVAIS, 2008, L’expertise judiciaire – Notes de Cours (Hiver 2008), Québec, Université Laval ;

Marc GERVAIS, Principes de délimitation – Notes de Cours (Automne 2007), Québec, Université Laval, p.301.

18 Le but premier de ce mandat pour l’arpenteur-géomètre consiste à exprimer son opinion professionnelle

sur la situation et la condition actuelles d’un bien-fonds. Voir à ce sujet Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, Le certificat de Localisation, En ligne – http://www.oagq.qc.ca/vasteexpertise/services/certificat-localisation.php, consulté le 3 décembre 2008.

19 Règlement sur la norme de pratique relative au certificat de localisation, A-23, r.7.1, art. 4. 20 Règlement sur la norme de pratique relative au certificat de localisation, A-23, r.7.1, art. 9, al. 6.

21 Règlement sur la norme de pratique relative au piquetage et à l’implantation, A-23, r.8.1.1, art. 1, par. 3,

où l’on définit le piquetage comme étant « l’ensemble des opérations d’arpentage effectuées par

l’arpenteur-géomètre dans le but d’indiquer, au moyen de repères, son opinion sur les limites d’un bien-fonds existant ou projeté ou d’un droit démembré d’un tel bien-bien-fonds ».

22 A-23, r.8.1.1.

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généralement une action subséquente à la délimitation d’un bien-fonds24. Ce même règlement confirme également qu’il est essentiel d’identifier la position des limites séparatives avant de procéder à l’implantation d’un bâtiment, cet acte étant défini comme « l’ensemble des opérations d’arpentage effectuées par l’arpenteur-géomètre dans le but de positionner et de matérialiser par des marques le site exact d’une structure ou d’un détail de structure à être érigée ou modifiée, relativement aux limites d’un bien-fonds, à une structure existante ou à d’autres lignes de référence »25.

À moins qu’il n’ait qu’à officialiser une entente déjà conclue entre propriétaires26, l’arpenteur-géomètre ayant reçu comme mandat le bornage d’une limite de propriété devra proposer une solution dans le but de fixer cette dernière de façon immuable, définitive et irrévocable27. C’est d’ailleurs le Code de procédure civile28 qui dispose sur les actions à prendre par l’arpenteur-géomètre dans un cas de bornage :

« L'arpenteur-géomètre procède au bornage sous son serment d'office et de la même manière qu'un expert. Il peut faire toutes les opérations qui sont nécessaires pour déterminer les limites des immeubles concernés. Il dresse, pour valoir rapport, un procès-verbal de ses opérations indiquant le plan des lieux, les prétentions respectives des parties et les lignes de division qui lui paraissent les plus adéquates »29.

24 Gérard RAYMOND, Grégoire GIRARD, André LAFERRIERE, Précis du droit de l’arpentage au Québec,

Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, p. 165.

25 Règlement sur la norme de pratique relative au piquetage et à l’implantation, A-23, r.8.1.1, art. 1, par. 2. 26 Il s’agit en l’espèce de la situation applicable lors d’un bornage à l’amiable sans formalité. Voir

notamment à ce sujet Marie-Louis BEAULIEU, 1961, Le bornage, l’instance et l’expertise, la possession, les actions possessoires, Québec, Le Soleil Ltée, no. 4, p. 7 : Beaulieu propose que la délimitation n’est pas

nécessaire lorsque les voisins sont d’accord sur l’étendue de leurs fonds respectifs. Dans ce cas, l’arpenteur-géomètre peut marquer cette ligne séparatrice déterminée par les parties et produire son procès-verbal de bornage.

27 Daniel FORTIN et Marc GERVAIS, 2004, « L’abornement préalable pour soutenir le régime foncier au

Québec : une nouvelle manière d’envisager la délimitation foncière », Revue Géomatique, Vol. 31, Été 2004, p.14; Marie-Louis BEAULIEU, 1937, Du bornage et de l’action en bornage, Québec, L’Action Catholique, p. 209 et Marie-Louis BEAULIEU, 1961, Le bornage, l’instance et l’expertise, la possession et les actions possessoires, Québec, Le Soleil Limitée, p. 120, où l’on mentionne que le bornage produit un

titre définitif.

28 L.Q. 1991, c. C-25.

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7 1.1.2. Types de limites et rôle de la possession

Un article de doctrine récent30 fait état de deux grands types de limites pouvant être rencontrées par l’arpenteur-géomètre dans le cadre de son travail, à savoir la limite certaine et déterminée et la limite qui ne répond pas à ces critères, pouvant être considérée comme incertaine et indéterminée. S’appuyant sur la jurisprudence31 et la doctrine32, on nous rappelle que les titres de propriété offrent la meilleure preuve du droit de propriété. Ainsi, lorsque ces titres de propriété permettent de faire ressortir des limites de propriété certaines et déterminées, ils doivent primer les autres éléments de preuve33. En effet, en présence de ce type de limites, la publication d’un tel titre de propriété sur un bien-fonds34 se voit attribuer un poids supérieur à la présomption de titularité de celui étant en possession de ce bien-fonds35. Concrètement, lorsque l’arpenteur-géomètre est en mesure de positionner le morcellement initial sans ambiguïté, on peut alors considérer que les limites sont certaines et déterminées, indépendamment des marques de possession retrouvées sur le terrain.

Il est à noter, qu’outre les titres de propriété, l’arpenteur-géomètre a d’autres moyens à sa disposition afin de positionner ce morcellement initial, que ce soit par l’analyse d’anciens documents d’arpentage36 ou encore par la découverte de vestiges sur

30 Marc GERVAIS, Nathalie MASSE, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de

propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 129 à 167.

31 Theile c. Andrex Holdings Ltd., [2005] n° AZ-50342999, par. 21 (C.A.) ; Dumont c. Pelletier, [2003] n°

AZ-50360261 (C.A.) ; Morneau c. Langlois [2005], n° AZ-50084928, par. 28 (C.S.).

32 Pierre-Claude LAFOND, 2007, Précis de droit des biens, 2e éd., Montréal, Les Éditions Thémis, 2007,

p. 285 ; Marc GERVAIS, Nathalie MASSE, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 144 ; Gérard RAYMOND, Grégoire GIRARD, André

LAFERRIERE, Précis du droit de l’arpentage au Québec, Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, p.

170.

33 Marc GERVAIS, Nathalie MASSÉ, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de

propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 144 ; voir également Pierre-Claude LAFOND, 2007, Précis de droit des biens, 2e édition, Montréal, Les Éditions Thémis, p. 285; voir également Bolduc c. Fortier, [2008]

n° AZ-50510308, par. 34 (C.S.) ; Theile c. Andrex Holdings Ltd., [2005] n° AZ-50342999, par. 21 (C.A.)

34 Article 2944 du Code civil du Québec. 35 Article 928 du Code civil du Québec.

36 Marc GERVAIS, Nathalie MASSÉ, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de

propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 146 : Parmi la documentation pouvant permettre de retrouver la position originale de la limite de propriété, outre les titres de propriété, on propose notamment des notes d’opération, des plans, des rapports ou des notes d’arpentage primitif.

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le terrain. En fait, toute limite pouvant être positionnée en position absolue par l’arpenteur-géomètre37 pourra être considérée comme certaine et déterminée.

Au contraire, lorsque l’arpenteur-géomètre n’est pas en mesure de positionner le morcellement initial sur le terrain et que les limites de l’emplacement n’ont pas fait l’objet d’un bornage, il fera face à des limites incertaines et indéterminées. Face à cette situation, même s’il existe une présomption simple de l’existence d’un droit de propriété suite à son inscription au registre foncier, l’assiette de ce droit ne peut être positionnée avec certitude. L’arpenteur-géomètre sera appelé à utiliser d’autres moyens de preuve pour lui permettre d’émettre son opinion quant à la position d’une limite séparative38.

Lorsque les limites ne sont pas certaines et déterminées, il a été mentionné à maintes reprises que la possession est le meilleur interprète des titres de propriété lorsque ceux-ci ne permettent pas de déterminer avec certitude la position des limites de propriété39. Partant de ce principe, il est donc logique que ce soit la présomption voulant que le possesseur soit titulaire du droit réel qu’il exerce qui prime et que la limite séparative devrait être indiquée de façon à respecter la possession des parties40. Il s’agit essentiellement d’une situation où la présomption édictée à l’article 2944 du Code civil du Québec41 doit céder le pas à la présomption de l’article 928 du Code civil du

37 Marc GERVAIS, Nathalie MASSE, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de

propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 144 et 145.

38 Marc GERVAIS, Nathalie MASSE, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de

propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 148 ; voir également Daniel FORTIN et Jacques SYLVESTRE, 1999, L'analyse foncière, Québec, Formation continue de l’Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, p. 21 ; Gérard RAYMOND, Grégoire GIRARD, André LAFERRIERE, 1993, Précis du droit de l’arpentage au Québec, Québec, Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, paragr. 309 et suiv.

39 Pierre-Claude LAFOND, 2007, Précis de droit des biens, 2e éd., Montréal, Les Éditions Thémis, 2007,

p. 231 ; Marc GERVAIS, Nathalie MASSE, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de

propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 149 ; voir également Berlinguet c. Parent, [2007] n° AZ-50424402, par. 40 (C.Q.).

40 Marc GERVAIS, Nathalie MASSE, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de

propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 149 ; voir également Girard c. Gosselin, [2006] n° AZ-50368411 (C.S.), cité dans Giguère c. Jacques, [2007] n° AZ-50475968, par. 25 (C.S.)

41 Article 2944 du Code civil du Québec: « L'inscription d'un droit sur le registre des droits personnels et

réels mobiliers ou sur le registre foncier emporte, à l'égard de tous, présomption simple de l'existence de ce droit ».

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9 Québec42. Ainsi, il en découle donc que, sans preuve contraire permettant de renverser les présomptions protégeant la possession retrouvées aux articles 92143 et 928 du Code civil du Québec, la limite séparative devra être positionnée en fonction des marques matérielles présentes sur le terrain. Bien qu’il ne s’agisse que d’une présomption réfragable de titularité du possesseur44, « faute de meilleur argument, le tribunal reconnaîtra le possesseur comme titulaire du droit qu’il invoque »45. Il a également été mentionné que « l'un des critères qui peut nous guider dans la recherche des justes bornes d'un héritage, c'est de s'en rapporter à la situation des lieux, à l'organisation que les voisins ont donnée à leur héritage respectif, aux marques externes matérielles qu'on relève […] »46. C’est donc dans ce contexte que la possession prend toute son importance, puisqu’elle guidera directement la position de la limite séparative entre deux propriétés.

42 Article 928 du Code civil du Québec : « Le possesseur est présumé titulaire du droit réel qu'il exerce.

C'est à celui qui conteste cette qualité à prouver son droit et, le cas échéant, l'absence de titre, ou encore les vices de la possession ou du titre du possesseur ».

43 Article 921 du Code civil du Québec: « La possession est l'exercice de fait, par soi-même ou par

l'intermédiaire d'une autre personne qui détient le bien, d'un droit réel dont on se veut titulaire. Cette volonté est présumée. Si elle fait défaut, il y a détention ».

44 Au même titre d’ailleurs que la présomption de titularité de celui qui a publié un titre de propriété au

registre foncier, à l’article 2944 du Code civil du Québec: « l'inscription d'un droit sur le registre des droits

personnels et réels mobiliers ou sur le registre foncier emporte, à l'égard de tous, présomption simple de l'existence de ce droit », ou encore la présomption d’exactitude du plan cadastral à l’article 3027 du Code civil du Québec. : « Le plan cadastral est établi conformément à la loi et fait partie du registre foncier; il est présumé exact » et Loi favorisant la réforme du cadastre québécois, L.R.Q., c.R-3.1, art. 19.2 : « À compter de l'inscription visée à l'article 19.1, la description du lot contenue dans le titre d'acquisition du propriétaire et dans les actes constatant les charges, priorités, hypothèques ou autres droits affectant ce lot, est présumée concorder avec celle du lot montré sur le plan de rénovation. En cas de discordance, la description contenue dans ce titre ou dans ces actes n'a pas à être corrigée par l'obtention d'un jugement ou autrement ».

45 Denis VINCELETTE, 2004, En possession du Code civil du Québec, Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, par.

463.

46 Jacques c. Dallaire, [1962] B.R. 235, page 237, cité dans Leclerc c. Bensouda, [2007] n° AZ-50446415,

(24)

1.1.3. Fondements de la possession

L’un des articles de base traitant de la possession et résumant notamment ce qu’est la possession d’un bien immobilier au Québec est l’article 921 du Code civil du Québec : « La possession est l'exercice de fait, par soi-même ou par l'intermédiaire d'une autre personne qui détient le bien, d'un droit réel dont on se veut titulaire. Cette volonté est présumée. Si elle fait défaut, il y a détention »47. Reprenant l’essentiel de cet article, il a été mentionné à maintes reprises par la Cour d’appel du Québec que la possession est une question ou une situation de fait48. Il s’agit d’une différence importante en comparaison avec les titres de propriété, qui eux sont plutôt rattachés à une situation de droit49. D’ailleurs, cette différentiation entre le droit de propriété et la possession est clairement présentée à l’article 911 du Code civil du Québec: « On peut, à l'égard d'un bien, être titulaire, seul ou avec d'autres, d'un droit de propriété ou d'un autre droit réel, ou encore être possesseur du bien » 50. Rien n’empêche que la possession de ce bien puisse éventuellement mener à sa titularité, notamment pas le biais de la prescription acquisitive51.

47 Article 921 du Code civil du Québec; voir également Hubert REID, 2001, Dictionnaire de droit québécois

et canadien, 2e édition, Wilson & Lafleur, Montréal, p. 422.

48 Turgeon c. Germain Pelletier ltée, [2001] n° 50082341 (C.A.) ; Thibault c. Chabot, [1998] n°

AZ-98011293 (C.A.) ; Marceau c. Shipton (Corp. municipale du canton de), [1995] n° AZ-96011145 (C.A.) ;

Desjardins c. Montréal (Ville de), [1989] n° AZ-89011751 (C.A.) ; voir également Bourcier c. Provost,

[2004] n° AZ-50273012 (C.S.) ; Denis VINCELETTE, 2004, En possession du Code civil du Québec,

Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, par. 189.

49 Article 2944 du Code civil du Québec: « L'inscription d'un droit sur le registre des droits personnels et

réels mobiliers ou sur le registre foncier emporte, à l'égard de tous, présomption simple de l'existence de ce droit » ; voir également Pierre-Claude Lafond, 2007, Précis de droit des biens, 2e édition, Les Éditions

Thémis, Montréal, p. 201 : « En droit, contrairement au sens de la langue courante, le terme «posséder»

n’a pas le même sens qu’être propriétaire. La propriété est le droit; la possession est le fait »

50 Article 911 du Code civil du Québec..

51 Article 916 du Code civil du Québec: « Les biens s'acquièrent par contrat, par succession, par

occupation, par prescription, par accession ou par tout autre mode prévu par la loi » ; Article 930 du Code civil du Québec. : « La possession rend le possesseur titulaire du droit réel qu'il exerce s'il se conforme aux règles de la prescription ».

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11 La doctrine et la jurisprudence ont également scindé la possession en deux (2) éléments distincts52, à savoir l’élément matériel de la possession (également appelé corpus) et l’élément intentionnel de la possession (également appelé animus).

L’une des définitions reconnues par les Tribunaux, au sujet du corpus53, est celle de Pierre-Claude Lafond, lorsqu’il explique que « le corpus renvoie à l'emprise matérielle de la possession. Il prend la forme d'actes d'utilisation, d'occupation, de jouissance ou de transformation du bien » 54. Toujours à propos du corpus, Denis Vincelette ajoute qu’on :

« retrouve certainement l'élément matériel de la possession dans les manifestations extérieures du rapport d'exploitation économique de la chose par le possesseur. L'élément matériel de la possession consiste justement en la maîtrise physique de la chose, son contrôle, plus précisément l'ensemble des actes que l'exercice du droit possédé comporte normalement, mais sans égard à la véritable titularité du droit, sans se demander si le possesseur agit a tort ou à raison. Il s'agit donc d'un élément objectif de la possession, aisé à constater extérieurement; c'est l'exercice effectif du droit, tout simplement » (le soulignement est de moi)55.

Nous retiendrons donc de ces propos que l’analyse du corpus est une situation de fait56. En effet, nous sommes généralement à même de constater la présence ou non d’un élément physique directement sur le terrain. Finalement, notons que l’article 924 du Code

52 Jean GOULET, Ann ROBINSON et Danielle SHELTON, Théorie générale du domaine privé, 2e édition,

Montréal, Wilson & Lafleur, 1984, p. 266 ; voir également Denis VINCELETTE, 2004, En possession du Code civil du Québec, Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, par. 7.

53 Hubert REID, 2001, Dictionnaire de droit québécois et canadien, 2e édition, Wilson & Lafleur, Montréal,

p. 139. : « Élément matériel de la possession. Il désigne le pouvoir de fait qui est exercé sur le bien,

l’ensemble des faits visibles de la possession ».

54 Pierre-Claude LAFOND, 1999, Précis de droit des biens, Montréal, Les Éditions Thémis, pp. 209-218, cité

dans 9127-5404 Québec inc. c. Officier de la publicité des droits de la circonscription foncière de Québec, [2007] n° AZ-50437980, par. 23, (C.S.) ; voir également Dubé c. Savoie McNeil, [2010] n° AZ-50618398, par. 23, (C.S.) ; Harvey c. Thibeault, [2006] n° AZ-50357968, par. 7 (C.S.)

55 Denis VINCELETTE, 2004, En possession du Code civil du Québec, Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, par.

519, cité dans 9126-4531 Québec inc. c. Chalifoux, [2008] n° AZ-50474935, par. 88 (C.S.)

56 Bourcier c. Provost, [2004] n° 50273012, par. 79 (C.S.) ; Thibault c. Chabot, [1998] n°

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civil du Québec apporte une contrainte importante en rapport au corpus, à savoir que les actes de pure faculté57 ou de simple tolérance58 ne peuvent fonder la possession59.

Si le corpus est étroitement lié à une situation de fait pouvant normalement être constatée directement sur le terrain ou par d’autres moyens de preuve sur la base de faits, l’animus60 est plutôt défini comme l’intention des gens de posséder à titre de propriétaire. La Cour suprême du Canada a également eu l’occasion de proposer une définition de l’animus : « l'animus est l'intention, la volonté chez le possesseur de soumettre une chose à l'exercice du droit auquel correspondent normalement les actes matériels d'usage et de transformation »61. Toutefois, c’est cette volonté qui est généralement la source de conflits entre voisins. En effet, « comme c'est habituellement le cas en semblables matières, les parties en conflit agissent en fonction des droits qu'elles croient posséder »62. À ce propos, comme le mentionnait André Gide : « nous pénétrons si mal,

57 Hubert REID, 2001, Dictionnaire de droit québécois et canadien, 2e édition, Wilson & Lafleur, Montréal,

p. 16. : « Acte qu’un propriétaire accomplit dans les limites de son droit de propriété, sans empiètement sur

le droit d’autrui et sans que le tiers contre qui il est dirigé n’ait aucun moyen légal de l’empêcher » ; voir

également Pelletier c. Canuel, [2005] n° AZ-50291458, par. 23 (C.S.), où le juge Gendreau a défini les actes de pure faculté comme étant « ceux qu'une personne a le droit de poser et qui ne constituent pas un

empiètement sur le droit d'autrui ».

58 Hubert REID, 2001, Dictionnaire de droit québécois et canadien, 2e édition, Wilson & Lafleur, Montréal,

p. 16. : « Acte qu’un propriétaire permet sur son propre fonds, uniquement pas obligeance ou esprit de bon

voisinage, et qui ne révèle pas chez son auteur une intention de prescrire. Cet acte suppose la permission tacite du propriétaire et celui-ci peut la révoquer à son gré » ; voir également Pelletier c. Canuel, [2005]

n° AZ-50291458, par. 24 (C.S.), où le juge Gendreau a mentionné que l’acte de tolérance « peut se définir

comme celui qu’un propriétaire courtois tolère […] parce qu’ils ne semblent pas impliquer la prétention à un droit de propriété de la part de la personne qui les pose » ; voir également Denis VINCELETTE, « La Possession », dans Chambre des notaires du Québec, R.D., «biens», Doctrine – Document 5, Montréal, 1989, pp. 81 et 82, lorsqu’il mentionnait que « la simple tolérance concerne des actes que le titulaire

pourrait réprimer, puisque, contrairement aux actes de pure faculté, ils constituent un empiètement véritable quoique partiel et très modeste. Le titulaire s'abstient alors de faire valoir ses droits, tant à cause du peu de préjudice qu'il en subit que par suite de l'utilité pratique que l'auteur de l'empiètement retire. Son silence procure ainsi, par amitié, bon voisinage, obligeance ou altruisme, un avantage à autrui compatible avec sa propre jouissance […] les infractions de l'intrus restent trop minimes pour constituer l'élément matériel de la possession » ; voir également Véronneau c. Ibis Investerigen, REJB 2000-20867

(C.S.).

59 Article 924 du Code civil du Québec.

60 Hubert REID, 2001, Dictionnaire de droit québécois et canadien, 2e édition, Wilson & Lafleur, Montréal,

p. 37 : « État d’esprit, intention ou volonté d’une personne. S’applique à une personne qui se comporte

comme le titulaire d’un droit sur un bien; il est généralement utilisé avec un autre mot qui en précise la nature ».

61 Bilodeau c. Dufour, [1952] n° AZ-50293070 (C.S. Can.), cité dans Marc Gervais et Nathalie Massé,

Cadre juridique concernant la délimitation des propriétés au Québec, 2011, Formation continue de l’Ordre

des arpenteurs-géomètres du Québec, Québec, p. 57.

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13 si peu avant, dans le for intérieur d'autrui »63. Il en découle qu’il est généralement plus ardu de statuer sur l’animus que sur le corpus.

Tentant de définir et de préciser ce concept de possession non équivoque à titre de propriétaire, les Tribunaux en rajoutent en mentionnant que cette possession doit être certaine64. Plus précisément, « une possession non équivoque implique que l’immeuble possédé comporte des limites fixes reconnues par les deux propriétaires. Les signes de propriété doivent être suffisants pour établir les limites »65. Règle générale, on peut affirmer que la découverte de la réelle intention du possesseur de se conduire comme le véritable propriétaire du bien se reconnaît par les agissements du propriétaire et de ses auteurs66.

Le second alinéa de l’article 921 du Code civil du Québec67 a pour effet de présumer l’animus de celui qui occupe un terrain. Ainsi, le simple fait d’avoir l’emprise matérielle (corpus) sur un fonds de terre laisse présumer que ce possesseur détient également l’élément intentionnel (animus) sur ce fonds de terre68. Pour reprendre les mots de l’auteur Martineau, « toute occupation est présumée constituer une possession et non une détention »69. Cette présomption pourra s’avérer déterminante lorsque la preuve invoquant un défaut d’animus est non concluante ou tout simplement absente. De façon analogue, Vincelette affirme que « l’élément intentionnel dure jusqu’au changement prouvé par la partie adverse »70. Cependant, cette présomption ne peut être renversée que par une preuve que le détenteur n’utilise pas l’immeuble comme s'il en était le véritable propriétaire ou que celui-ci sache pertinemment que l'immeuble qu'il détient ne lui

63 Denys-Claude LAMONTAGNE, 2005, Biens et propriété, 6e édition, Les Éditions Yvon Blais, Cowansville,

p. 443.

64 Gauthier c. Dupuy, 2011 QCCS 189, par. 53.

65 Boivin c. Perron, [2002] n° AZ-50121152, par. 6 (C.S.)

66 9126-4531 Québec inc. c. Chalifoux, [2008] n° AZ-50474935, par. 90 (C.S.)

67 Article 921 du Code civil du Québec: « Cette volonté est présumée. Si elle fait défaut, il y a détention » 68 Desjardins c. Montréal (Ville de), [1989] n° AZ-89011751 (C.A.); Denis VINCELETTE, 2004, En

possession du Code civil du Québec, Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, par. 106.

69 Pierre MARTINEAU, La prescription, coll. «Traité élémentaire de droit civil», Montréal, P.U.M., 1977, n°

99, p. 57, cité dans Mitchell c. Paquette, 2012 QCCS 737, par. 20.

70 Denis VINCELETTE, 2004, En possession du Code civil du Québec, Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, p.

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appartient pas71. Par exemple, la preuve d’une reconnaissance d’un domaine supérieur72 suffit pour prouver un défaut d’animus, entraînant une possession équivoque.

1.1.4. Types de mandats et obligations de l’arpenteur-géomètre

On peut distinguer deux (2) grands types de mandat pouvant être réalisés par l’arpenteur-géomètre au Québec, à savoir le mandat d’expertise et le mandat de constatation.

Tout d’abord, le travail attendu d’un arpenteur-géomètre investi d’un mandat d’expertise implique « non seulement de faire des constatations, des mesures, des relevés, ainsi que des analyses, des recherches et/ou des hypothèses, mais il implique également une lecture juridique de la factualité »73. Or, « la question de savoir si la possession est suffisamment caractérisée ou si elle est équivoque, est une pure question de fait, abandonnée à l’appréciation des tribunaux »74. Pourquoi l’arpenteur-géomètre tenterait-il d’évaluer les diverses qualités de cette possession et d’évaluer s’tenterait-il y a ou non prescription alors que ce devrait normalement être le rôle du juge? Tel que mentionné par le juge Goodwin dans l’arrêt Ruest c. Groupe Gestion 2000 Inc. :

« en amendant le Code de procédure civile en 1965, le Législateur voulant dégager les tribunaux de ces parfois très longs procès de bornage, a décidé de demander au professionnel du droit de propriété, l'arpenteur-géomètre, de faire pour eux, le plus de chemin possible dans la résolution des litiges de bornage. C'est donc dire que l'expert arpenteur-géomètre est alors revêtu d'une autorité certaine et d'une responsabilité tout aussi certaine. L'expert, conformément aux articles 414 et suivants du Code de

71 Gauthier c. Dupuy, 2011 QCCS 189, par. 46.

72 Denis VINCELETTE, 2004, En possession du Code civil du Québec, Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, par.

536 ; Article 923 du Code civil du Québec: « Celui qui a commencé à détenir pour le compte d'autrui ou

avec reconnaissance d'un domaine supérieur est toujours présumé détenir en la même qualité, sauf s'il y a preuve d'interversion de titre résultant de faits non équivoques »

73 Marc GERVAIS, Nathalie MASSE, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de

propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 137.

74 Paquet c. Blondeau, [1913] 22 B.R. 330, p. 335, cité dans Larouche c. Lavoie, [2002] n° AZ-50117182,

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15 procédure civile relatifs à l'expert et à l'expertise de même qu'aux articles

787 et suivants du susdit Code et relatifs au bornage, a le devoir de faire en sorte que son expertise aboutisse à une proposition, celle de la ligne de division qui lui paraît juste et que sa proposition soit motivée. Dès lors, les choix ne sont pas légion. Il doit prendre tous les moyens qu'il juge appropriés pour y arriver et ce à toutes les étapes de son expertise, la plus délicate étant, sans doute, celle de l'audition des parties et des témoins (les soulignements sont de moi) »75.

En mandat d’expertise en bornage, l’arpenteur-géomètre effectuera donc une enquête complète qui l’amènera invariablement à se prononcer sur la prescription acquisitive76, l’une des façons possibles d’acquérir un bien immeuble77. Par la proposition de la ligne de division qui lui paraît la plus juste, l’arpenteur-géomètre devrait en venir à apprécier la possession sur le terrain, dans le but notamment de déterminer si l’une partie pourrait vraisemblablement avoir acquis une parcelle de terrain par les effets de la prescription acquisitive78. L’évaluation des différents éléments de possession par l’arpenteur-géomètre est donc primordiale pour statuer sur une possible acquisition par prescription. D’ailleurs, « une mauvaise interprétation des règles de la prescription pourrait conduire à douter de notre régime de la publicité des droits »79, régime « dont la force probante est particulièrement notable »80, selon les commentaires du ministre de la Justice émis lors de la mise en vigueur du Code civil du Québec en 1993.

Devant une telle tâche, une analyse juste, précise et surtout complète de la possession devient essentielle. En effet, traitant de la délimitation d’un fonds en cas de bornage, Paul Lachance écrivait que l’arpenteur-géomètre : « doit cependant recevoir la preuve qui est faite devant lui en toute objectivité et accorder à chaque indice la valeur et

75 Ruest c. Groupe Gestion 2000 Inc., [1997] n° AZ-97023103 (C.S.)

76 Bouchard c. Duchesne, 2007 QCCS 2281.

77 Article 916 du Code civil du Québec.

78Gérard RAYMOND, Grégoire GIRARD, André LAFERRIERE, 1993, Précis du droit de l’arpentage au

Québec, Québec, Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, p. 236 : « L’arpenteur-géomètre doit tenir compte de la possession afin d’établir si les titres ont été modifiés par la prescription ».

79 Bolduc c. Fortier, [2008] n° AZ-50510308, par. 91 (C.S.)

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l’importance qui les caractérisent »81. Pour y parvenir, l’arpenteur-géomètre devra prendre tous les moyens qu’il juge appropriés, ayant notamment accès à la preuve testimoniale lui permettant de mener une enquête conforme au principe du contradictoire. Plus particulièrement, en ce qui a trait à l’analyse de la possession, l’arpenteur-géomètre sera à même d’entendre la preuve présentée par chacune des parties. Ainsi, en plus d’entendre les prétentions de chacun quant à l’emprise matérielle (corpus) du bien-fonds en litige, l’arpenteur-géomètre sera à même de statuer sur l’élément intentionnel de la possession (animus). En fait, l’analyse du corpus ainsi que de l’animus est primordial pour l’arpenteur-géomètre s’il veut être en mesure de statuer sur la prescription acquisitive pour l’une ou l’autre des parties.

Pour ce qui est des mandats autres que le bornage, on dit plutôt de l’arpenteur-géomètre qu’il est investi d’un mandat de constatation, où son travail est essentiellement de constater « la situation juridique de l’immeuble et de la représenter fidèlement sur les documents qu’il prépare »82. Au surplus, de ce type de mandat, il résulte des opérations d’arpentage unilatérales qui ne sont valables que pour le seul bénéfice du client et qui ne lient pas les tiers83. Il s’agit donc essentiellement pour l’arpenteur-géomètre de relever et d’analyser les faits qu’il constate et d’utiliser certains principes juridiques pour justifier son opinion. En fait, on peut définir le constat comme étant une « opération réalisée par un officier public par laquelle il atteste l’existence d’un fait ou d’une situation. Par extension, le résultat de cette opération ou l’écrit dans lequel ce résultat est consigné »84.

81 Paul LACHANCE, 1981, Le Bornage – Notes de Cours, 3e édition, Sainte-Foy, Les Presses de l’Université

Laval, p.25 ; Code de déontologie des arpenteurs-géomètres, c. A-23, r. 3, art. 2.01: « La conduite de

l'arpenteur-géomètre doit être empreinte d'objectivité et d'honnêteté intellectuelle. Son premier devoir est de servir le public ».

82 Marc GERVAIS, Nathalie MASSE, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de

propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 146.

83Gérard RAYMOND, Grégoire GIRARD, André LAFERRIERE, 1993, Précis du droit de l’arpentage au

Québec, Québec, Ordre des arpenteurs-géomètres du Québec, p. 208 : « Une deuxième forme de démarcation résulte de la pose de repères par un arpenteur-géomètre sur une limite de terrain, à la demande d’un propriétaire sans l’intervention du propriétaire voisin. La piquetage est une opération unilatérale qui est l’expression de l’opinion d’un arpenteur-géomètre sur les limites d’un immeuble qu’il a marquées par la pose de repères dûment identifiés à son nom ».

84 Hubert REID, 2001, Dictionnaire de droit québécois et canadien, 2e édition, Wilson & Lafleur, Montréal,

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17 Rappelons que l’élément matériel de la possession est essentiellement une question de fait, étant généralement à même d’être constaté directement sur le terrain85. Dans la réalisation de ses mandats de constatation, l’arpenteur-géomètre devrait donc relever et positionner tous les éléments retrouvés qui pourraient indiquer une emprise matérielle du terrain. Cependant, de la définition même du mandat de constatation, l’arpenteur-géomètre n’a pas l’obligation de « s’enquérir de l’élément intentionnel (animus) des différents propriétaires et/ou possesseurs »86. En ce qui a trait du traitement de l’animus, il s’agit donc d’une situation qui diffère du mandat d’expertise. À défaut de pouvoir statuer sur l’élément intentionnel de la possession par le biais du débat contradictoire, il existe une assise juridique sur laquelle l’arpenteur-géomètre peut baser son opinion professionnelle, à l’effet que la volonté d’être titulaire du droit de propriété est présumée87.

Ainsi, la preuve factuelle d’une marque matérielle laissant supposer une emprise jusqu’à une certaine limite est suffisante pour laisser présumer une possession jusqu’à cette même limite. D’un point de vue plus pratique, on demande à l’arpenteur-géomètre d’analyser les diverses marques de possession ainsi que les actes de possession en toute objectivité88. Il est également du devoir de l’arpenteur-géomètre de relever le plus d’indices possibles lui permettant de justifier son opinion professionnelle89. De plus, la qualité du levé d’arpentage sur le terrain est directement proportionnelle aux efforts

85 Denis VINCELETTE, 2004, En possession du Code civil du Québec, Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, par.

519, cité dans 9126-4531 Québec inc. c. Chalifoux, [2008] n° AZ-50474935, par. 88 (C.S.) : « Il s'agit donc

d'un élément objectif de la possession, aisé à constater extérieurement; c'est l'exercice effectif du droit, tout simplement »

86 Marc GERVAIS, Nathalie MASSE, 2011, « Entre le constat et l’expertise, où se situe la limite de

propriété ? », Revue du Barreau, tome 70, p. 151.

87 Article 921 du Code civil du Québec: « La possession est l'exercice de fait, par soi-même ou par

l'intermédiaire d'une autre personne qui détient le bien, d'un droit réel dont on se veut titulaire. Cette volonté est présumée. Si elle fait défaut, il y a détention »

88 Code de déontologie des arpenteurs-géomètres, c. A-23, r. 3, art 2.01 : « La conduite de

l'arpenteur-géomètre doit être empreinte d'objectivité et d'honnêteté intellectuelle. Son premier devoir est de servir le public » et art. 3.02.01 : « L'arpenteur-géomètre doit s'acquitter de ses obligations professionnelles avec intégrité » ; voir également Walter G. ROBILLARD, Donald A. WILSON et Curtis M. BROWN, 2006,

Evidence and procedures for boundary location, fifth edition, John Wiley & Sons Inc., Hoboken, New

Jersey, p. 17.

89 Code de déontologie des arpenteurs-géomètres, c. A-23, r. 3, art 3.02.02 : « L'arpenteur-géomètre doit

chercher à avoir une connaissance complète des faits avant de donner un avis ou un conseil » ; voir

également Walter G. ROBILLARD, Donald A. WILSON et Curtis M. BROWN, 2006, Evidence and procedures

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investis pour le préparer, notamment par le biais des recherches effectuées au sein du greffe et au registre foncier90. En effet, si les marques visibles seront généralement à même d’être constatées sur le terrain, des recherches préalables au levé d’arpentage peuvent être primordiales pour savoir où rechercher les différentes marques de possession, certaines d’entre elles pouvant s’avérer être moins visibles ou ensevelies. Il s’agit essentiellement du comportement que devrait avoir un arpenteur-géomètre prudent et diligent91. Rappelons également les propos du juge Goodwin, lorsqu’il mentionnait que « les propos de l'arpenteur-géomètre responsable du bornage, peuvent généralement être qualifiés de relativement certains, en ce qui a trait à ses constatations et observations sur le terrain, le mesurage, le placage, etc… »92. Bien que l’on traite du travail de l’arpenteur-géomètre dans le cadre du bornage, il n’y a aucune raison de ne pas appliquer ce même raisonnement lors d’un mandat de constatation, les observations sur le terrain étant une question de faits. Il est donc du devoir de l’arpenteur-géomètre de relever et d’analyser tous les faits pouvant être constatés sur le terrain.

1.2. Problématique, question et objectif de recherche

1.2.1. Problématique de recherche

Peu importe le type de mandat confié, l’arpenteur-géomètre devra invariablement analyser les marques de possession retrouvées sur le terrain, celles-ci pouvant jouer un rôle important en ce qui a trait à la délimitation foncière au Québec.

Ayant pour but l’interprétation de la source principale de droit qui est la loi, les décisions des tribunaux peuvent permettre d’établir la force probante de chacune des marques matérielles rencontrées93. Il existe en effet une quantité importante de jugements

90 Walter G. ROBILLARD, Donald A. WILSON et Curtis M. BROWN, 2006, Evidence and procedures for

boundary location, fifth edition, John Wiley & Sons Inc., Hoboken, New Jersey, p.323.

91 Code de déontologie des arpenteurs-géomètres, c. A-23, r. 3, art 2.03 : « L'arpenteur-géomètre doit tenir

compte des conséquences prévisibles que peut avoir son activité professionnelle sur la société » ;

92 Boucher c. Rousseau, [2000] n° AZ-50398471 (C.S), cité dans Durand c. Delorme, [2008]

n°AZ-50469931, par. 7 (C.S.), cité dans Von Hlatky c. Semenuk, 2010 QCCS 2562, par. 40.

93 Gérard RAYMOND, Grégoire GIRARD, André LAFERRIERE, 1993, Précis du droit de l’arpentage au

Figure

Tableau n°1 – Jugements répondant à la recherche par certains mots-clés sur le site de  Jugement Québec pour la période couvrant le 1 er  janvier 2000 au 31 décembre 2009
Figure n°1  - Méthode générale de recherche
Figure n°2  - Analyse qualitative basée sur des observations documentaires
Figure n°4 – Critère de la permanence
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