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Etude des procédures de mise en œuvre des droits fondamentaux au travail : perspectives d'évolution du rôle de l'OIT dans le contexte de la mondialisation

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• ETUDE DES PROCEDURES DE MISE EN ŒUVRE DES DROITS FONDAMENTAUX AU

TRAVAIL: PERSPECTIVES D'EVOLUTION DU ROLE DE L'OIT DANS LE CONTEXTE DE LA MONDIALISATION

Par

Marie Amelie Tenailleau

Unmémoire soumisàla Faculté des Études Supérieures et de laRecherche en accomplissement partiel des exigences de la maîtrise en droit(LLM).

Institut de Droit Comparé Université McGill

Montré~Québec Canada

Février 2001

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Remerciements

Je voudrais tout spécialement remercier le Professeur Colleen Sheppard qui a accepté de superviser mon travail de recherches~ conclusion d'une année chaleureuse dans le cadre de l'Université McGiI!. Également, merci à toutes les personnes qui ont bien voulu répondre à mes questions en plus d'un emploi du temps bien chargé: AdelleBlacke~Antoine Lyon-Caen, Marie-Thérèse Lanquetin~ Anne-Marie Larosa qui m'a permis de découvrir l'OIT et de me passionner pour le droit international du travail, et le doyen Maurice Verdier.

Enfin je tiens à remercier tout spécialement mes parents qui m'ont pennis de réaliser ce séjour merveilleux au sein de l'université McGiIl. Merci également à ceux qui ont su m'accueillir chaleureusement pendant cette année loin des miens~merci à ceux qui ont su me soutenir.

(8)

Résumé Abstract Introduction Sommaire 6 6 7

Cbapitre Premier: Historique, fonctionnement institutionnel et action normative 10

Section 1 - Création de l'OIT 10

Section 2 - Mandat II

A) Si vis pacem cole justiciam 12

B) «Làoù les ouvriers sont faibles, c'est eux qui font les frais de la concurrence.» 12

Section 3 - Le tripartisme, rouage central de l'Organisation 14

A) Une logique tripartite, révolution institutionnelle de début de siècle (articles 3et7 de la

Constitution). 14

B) Répercussion du tripartisme sur les organes de l'OIT 14

Section 4 - Bilan de son action normative 16

A) Appréciation quantitativeetqualitative 16

B) A propos des Droits Fondamentaux des travailleurs 17

C) Caractéristiques des normes internationales du travail 22

Section 5 - La crise identitaire : manifestations et identification des facteurs 23 A) la mondialisationetle contexte international traditionnel 23 B) L'absence de force contraignante des normes internationales du travail, première

manifestation de la faiblesse de l'Organisation 25

Chapitre 2 - Delapromotionàl'effectivité des normes fondamentales au travail: bilan et perspectives d'évolution de mécanismes institutionnels centralisés 27

Section 1 - Envisager des réformes: une réflexion sur le système de contrôle de l'OIT 27

A) Lesinsuffisances de la clause sociale 29

B) Lesincertitudes d'une coordination procédurale internationale: l'OIT, l'OMCetle FMI,

relation triangulaire de la dernière chance?» 30

Section 2- typologie des procédures prévues par la Constitution OIT 31 Sous-section /- Les mécanismes de suivi post adoption (article /90/1) 32 A) De l'obligation de consulter des autorités nationales compétentes 32

(9)

B} De la procédure des rapports périodiques par les gouvernements (Articles 19et22 de la Constitution) 33

1) De l'obligation de rapportenvertu de l'article 19-5 e) de la Constitution 33 2} De l'obligation de rapports de l'article 22 de la Constitution 34

Sous-section2-Les mécanismes de contrôle en cas de violation d'une disposition

foo~m~wk 36

A) De la constatation de la violation... 37 1) Déclenchement de la procédure 31

2) Déroulement de la procédure 38 B} De la mise en œuvre des mesures 39 1) Les procédures d'enquête 39 2) les conséquences procédurales envers les États fautifs 39

B} Le cas particulier de la liberté syndicale 41

1) Une procédure propre aux Conventions fondamentales relatives à la liberté syndicale 41 2) Deux organes spécifiques aux violations des droits en matière de liberté syndicale 41 Section 2- Appréciations critiques et voies de réformes 46

Sous-sec/ion /- Agir au sein de l'OIT: nécessité et /imites du tripartisme 46

A) OIT et tripartisme, un couple indissociable mais non autosuffisant 46 1) Un fonctionnement institutionnel et normatif tripartiteencrise 46 2) Le syndicat, un rôle à redéfinir 49

B) OIT et Mondialisation: associer les nouveaux acteursàla protection des droits

fondamentaux 51

1) L'entreprise multinationale en question 51

2) Les ONG, du statut d'observateuràla participation effective 60

Sous-section2-La contrainte normativeàl'Off: utopie ou réformisme possible? 62

A) La persuasion morale, ligne directrice de la politique normative de l'Organisation 62 1) Lapersuasion morale, conséquence de la souplesse procédurale de l'OIT 62 2) L'absence de force contraignante, paradoxe de l'Organisation internationale

du travail 63 B) A la recherche d'un compromis entre l'idée des sanctions effectives et l'arme du dialogue

moral 65

1) Vers une définition plus large de la notion de sanctions : intérêts et limites 65 2) Les outils existants au sein de l'OIT 65

Chapitre 3- De la mise en œuvre rapprocbée des droits fondamentaux: des actions locales et

(10)

Section 1: Les procédures de contrôle local des nonnes, compléments et renforcement des

mécanismes généraux 73

Sous- Section /- L'action locale, vecteur d'effectivité de ['action normative de ['OIT? 73

A) Des procédures secondaires mais nécessaires 73

B) caractéristiques communes 74

1) De l'application localisée de droits fondamentaux universels 74 2) la coopération volontaire avec l'OIT, renforcement de la légitimité des actions de

l'Organisation 75

Sous-Section2-La mise en œuvre au plan local: de ['élaboration au contrôie de la mise en

œuvre des normesfondamentales au travail. 78

A) Présentation des mécanismes d'action au plan local 79

1) Les contacts directs 79

2) Lacoopération technique 81

3) Les équipes multidisciplinaires et départements techniques 83 B) Les apports des procédures non formelles au système des mécanismes institutionnels

locaux 85

1) Les actions locales réorientées: faire face au déclin de l'action locale de l'OIT, une

urgence institutionnelle 85

2) Des améliorations toujours possibles 87

Section 2-Ladimension régionalt; une voie intéressante de mise en œuvre de droits

fondamentaux: l'exemple de la Charte Sociale Européenne 90

Sous-section 1- La Charte Sociale Européenne. manifestation de la régionalisation des

instruments normatifs de

['orr

90

A) Une expérience de collaboration à l'élaboration d'un instrument régional type OIT 90

1) Laconception de la Charte 91

2) Originalité du mécanisme de ratification mis en place 93

B) Normes et mécanismes de la Charte Sociale Européenne, synthèse ou prolongement des

normes OIT? 94

1) Sur certains points la Charte va plus loin... 94

2) Sur d'autres elle est plus réservée... 95

3) Caractériser la Charte par rapport aux normes OIT 95

C) Les systèmes de contrôle OIT et de la Charte Sociale Européennt; parallélismes et

complémentarités 96

1) Analyse du parallélisme des 2 systèmes 96

2) Existence d'une procédure de réclamations collectives, alternative ou complément

(11)

Sous-section2 - L'enjeu d'une coordination pollssée des instruments juridiques ew-opéens au service des droitsfondamentatJX: vers lajusticiah/ité de la Charte. 101

A) LaCharte Sociale Européenne et la Convention Européenne des Droits de l'Homme,

critiques d'une "cohabitation forcée". 102

1) Exposé de la problématique 102

2) Une approche différente de ia protection des Droits de l'Homme 102 3) Une cohabitation mitigée:LaCharte Sociale Européenne, ombre de la Convention

Européenne des Droits de l'Homme? 103

4) Perspectives de coordination: de lajusticiabilité de la Charte 104 B) Justiciabilité et implications en Union Européenne: la Charte Sociale, modèle universel

de protection des droits de l'homme? 107

1) L'union européenneetses instruments sociaux 107

2) L'Union sur son perchoir: perspective de coopération et rôle de la Charte Sociale

Européenne 109

Conclusion

BIBUOGRAPHIE

Textes et documents officiels Législation Publication duBrr Doctrine Monographies Encyclopédies Articles spécialisés Divers Articles de Presse Sites Internet 112 114 114 114 114 Ils 115 /16 116 120 120 120

(12)

Résumé

La régulation sociale est une préoccupation croissante des politiques, chercheurs,juri~ONG dansun contexte de mondialisation économique où larépartition des richesses se fait souvent au détriment des droits fondamentaux du travail. L'Organisation Internationale du Travail est la pionnièredans laprotection universelle des droitsdu travail.. Pourtant plusieurs facteurs ébranlent une légitimité longtemps incontestée : dépossession du monopole de régulation socialepar le seul É~ émergence de contrepoids méconnus du droit international public, auto réglementation sous forme de labels sociaux ou de codesde conduite... L'auteur vatenter, par un bilan critique, de démontrer que l'OIT détient les moyens constitutionnelsetlogistiques degarantir et de mettre en œuvre efficacement et de façon autonome les Droits Fondamentauxau Travail tels qu'elle les a défmis : liberté syndicale et négociation collective, interdiction du travail forcé, interdiction du travail des enfants, non-discrimination. L'OIT est, au sens de l'auteur,dans une phase de ttansition institutionnelle. L'organisation montre une capacitéd'adaptatio~non sans faiblesse, au nouveau contexte. Son intervention est centralisée et assez ronnelle concernant les procédures institutionnellesà Genève. A côté, existent des procédures souples et flexibles qu'il convient de redécouvrircar elles sont la clef de son intervention à venir. Enfin il convientde voir le rôle des structures régionales dans lamise en œuvredes droits fondamentaux de l'OIT, relais nécessaire dansun monde mondialiséetmultipolaire.

Abstract

Inthe context of economic globalisation, the unequaI distribution of weahh among nations often leads to infringe fundameotal workers' rights,50that it bas become a major concan forpoliticians,scholars,

juristsandNGOs.Therefore thequestionis how the social market caoheregulatedtoday.TheILü is

the firstinternational organisation that basdealtwithworkers' rights, especially fimdamentalrights~its

goal being ta protect workers universally. If ils legitimacy had been unquestioned for years, it is

shatteredby extemal economic factors today: state's lossofpowerin regulating social relatiODS~ the

emergence ofnew political counterbaJances on the international scene - unknown by international

publiclaw - andself-govemanceby sociallabelsor codes ofconduets... TheauthorWillattempt,bya

critical appraisal, ta demonstrate that the ILO bas its own constitutional and logistical means to

implement fundamental workers' rights efficiently and independently: union freedom and collective negotiation, prohibition of bard labour~ prohibition of child labour, prohibition of discrimination.

According to the author,theILüisundergoing an institutional transition. The latter is adapting to the new economic context. [n Geneva centralised procedures arestillverycentralised buttheyare inthe same rime counterweighted by local actions or soft procedmes. These more flexible and discrete

procedures are the keystone of the ILü system of supervision to implement fondamental rights.

FinaIlyitisrelevantta bave a look atregionalorganisations which deal withthosefundamentalrights, astheyhave aspecialrole in implementing the ILÜ fundamentalrights.

(13)

Introduction

«L'Organisation Internationale du Travaü, Conscience SocÜlle de l'Humanité ))•••

Ainsi s'est exprimé Albert Thomas au sujet de l'OIT, premier directeur général de cette institution qui révolutionna le Droit International lors de sa création. Pas loin d'un siècle plus tard, en une période de fortes incertitudes pour les travailleurs du monde entier,ilconvient de s'interroger sur la signification de cette afflmlation. L'Organisation a aujourd'hui plus de quatre-vingts ans. Lors de sa création en 1919 on souligna, à juste titre, ses caractères forts innovateurs et originaux. Originale, elle est en effet dans son mode de fonctionnement tripartite1 ainsi que dans ses procédures de contrôle des nonnes qu'elle édicte en matière de travail. Créée pour assurer la protection des travailleurs et à plus grande échelle de tout être humain, son rôle est pourtant aujourd'hui de plus en plus marginalisé dans un contexte de globalisation économique. Les impératifs liés à une concurrence internationale exacerbée prennent le pas sur les considérations d'ordre social. Lorsque les internationalistes parlent de l'OIT, les mots tels que crise, faiblesse, voire inefficacité, SOilt de mise2• Il est évident que le: :::Jnnes sociales internationales sont loin

d'être respectées. Il ya à peine trois ans., ~de la population mondiale vivait dans la pauvreté, 1/5 n'avait qu'un dollar par jour pour subveniràses besoins, et 50% ne recevait que 5% du revenu mondial alors même que la croissance mondiale était de l'ordre de 3% dans l'ensemble des régions du mondeJ• Et ce sont surtout les droits fondamentaux des travailleurs qui sont bafoués

(liberté syndicale, liberté de travail, non discrimination, abolition du travail des enfants - le conseil d'administration a déclaré fondamentales les Conventions internationales du travail en ce domaine). Or c'est du respect de ces derniers que dépend rédification du système normatif international du travail dans son ensemble.

Ce mémoire a pour but de pointer les conséquences de la mondialisation sur les procédures de l'OITœuvrant à la protection des Droits Fondamentaux. Le bilan est contrasté, souvent critiqué.

1Constitutionde["OIT,1crNov. 1974, BIT 1998 Genève, articles 3 et 7.

2Voir particulièrement G.Besse.,«Mondialisatioo des échanges et droits fondamentaux de l'homme au travail :

quel progrès social aujourd'hui1»(1994)3 Or. Soc. p. 841àla p. 843 ; B. A Langille,« The ILO and the New Economy: Recent Developments» (1999) Vol. 15/3, Inter'l Joum. ofComp. Law and Industr. Relations, p. 229

àla page 231 ; E. Lee,«Globalization and labourstandards:Areview of issues» (1997) Vol. 136 No. 2

(Summer) Inter'i Lab. Rev. p.173 ; M. Maindrault,«Les aspects commerciaux des droits sociauxetdes droits de l'homme au travail » (1994) Il Or.Soc. p. 50 ; G. Spyropoulos,«Encadrement social de la mondialisation de ['économie» (1996)6 Dr. Soc. p. 551.

3J.Touscoz,«Mondialisation et Sécurité économique internationale (Quelques remarques juridiques et

(14)

Certains envisagent des alternatives à l'action de l'OIT, notamment par [e biais d'organisations internationales à vocation commerciale ou financière. Le problème philosophique et social majeur de ce début de siècle est de faire de prévaloir l'intérêt général des plus pauvres qui souffrent de ['insécurité économique. Les solutions que ['on envisage actuellement pour une application effective des normes fondamentales de ['OIT mettent ['accent sur une collaboration poussée de ['OIT avec les institutions spécialisées en matière de commerce international (OMC, FMI, Banque Mondiale...}, le vieux débat de [a clause sociale connaît un regain d'actualité. A mon avis les solutions proposées au sein des Organisations internationales œuvrant pour le commerce international, bien que viables, présentent des dangers non négligeables pour la crédibilité de ['OIT, etàplus long terme pour une protection efficace des travailleurs. Pour sa mission sociale et économique, l'OIT a depuis longtemps prouvé qu'elle était l'Organisation la plus apteà soulever le défi grâce à la qualité de son système de contrôle, à son indépendance et à l'ampleur de son mandat qui lui permet de traiter des conséquences de la concurrence internationale pour les travailleurs sous toutes ses formes.

L'OIT a une capacité d'action autonome dans la protection de ces droits, les faiblesses dénoncées étant souvent le reflet d'une politique institutionnelle transitoire. Les évolutions du fonctionnement de l'Organisation sont réelles, leurs portées incertaines. Plus en avant il convient de dégager quelles sont les justifications juridiques de ces changements et sur quels mécanismes ils sont envisageables. A terme, ce sont donc deux formes d'action en terme de mises en œuvre des droits fondamentaux qu'il nous faut distinguer: l'action centralisée et formelle, et l'action locale, imprégnée d'un moindre degré de fonnalisme. Je veux démontrer que c'est par la combinaison de ces deux éléments que l'OIT est aujourd'hui capable d'occuper une place autonome et forte dans la promotion et la protection des droits fondamentaux.

Il s'agit donc de montrer que l'OIT est toujours l'Organisationàqui il faut confier la tâche de contrôle et que des réformes sont envisageables pour lui donner la place qui doit être la sienne. En résumé, dans cette perspective, il faut s'interroger sur la manière d'entériner les droits sociaux fondamentaux des travailleurs grâce au système de l'OIT. Comment assurer leur mise en œuvre effective? L'OIT est-elle toujours l'institution capable de relever ce défi?

Le système de contrôle de l'OIT est une base assiseetaujourd'hui rodée. Il ne convient pas de s'en • départir alors même que les États etles organisations d'employeursetde travailleurs en reconnaissent la légitimité. Il faut plutôt l'adapter aux préoccupations actuelles en tenant compte du nouveau

(15)

contexte dans lequel les normes internationales du travail interviennent. Mon raisonnement est développé en trois points.

1) D'abord un tableau synthétique de la naissance institutionnelle de l'OIT et de son évolution dans le contexte de la mondialisation nous permettra de cibler les faiblesses qui sont aujourd'hui les siennes (Chapitre Premier).

2) Ensuite, nous continuerons sur la constatation que les procédures constitutionnelles de mise en œuvre et de contrôle sont centralisées et promotionnelles. Lorsqu'on fait référence aux faiblesses de l'OIT, ce sontàces dernières que l'on renvoie (Chapitre Second).

3) Pour autant il existe un ensemble de moyens mis en œuvre par l'OIT au plan local qui se veulent plus discrets. Ces derniers, loin d'être inefficaces, sont au contraire nécessaires à l'efficacité normative recherchée par ['OIT. On peut envisager ces moyens àun échelon local régional et national (Chapitre Trois).

Après un bref rappel sur l'évolution historique de l'OIT, nous envisagerons ses procédures de contrôle dans le contexte actuel afin de cerner les difficultés qu'elle rencontre, et enfin nous verrons comment l'OIT a intrinsèquement les facultés de réforme nécessaires à la protection efficace des travailleurs.

(16)

Chapitre Premier: Historique, fonctionnement institutioDnel et actioB Dormative

Section l-Création del'OIT

Créée en 1919, rOrganisation Internationale du Travail devient en 1946 la première institution des Nations Unies, survivant à la Société des Nations et devenant dés lors la plus vieille des Organisations internationales. L'OIT est l'aboutissement d'un long cheminement intellectuel né au 19ème siècle avec l'émergence de la conscience ouvrière. On parle alors du bien fondé d'une législation internationale dutravai~comprise comme la condition indispensable à l'existence, au maintien et au développement des législations nationales en ce domaine4• Plusieurs Conférences

traitant du sujet sont organisées, successivementàBerlin en 1890, à Bruxelles en 1897, et surtout à Paris en 1900 où l'Association Internationale pour la Protection Légale des Travailleurs voit le jours. La création de l'Organisation est précipitée avec la Première Guerre Mondiale. Les efforts de guerre subis par les travailleurs, ajoutésà la menace bolchevique suite à la révolution de 1917, assoient les revendications des organisations ouvrières. La Conférence de Leeds en 1916 met en avant l'idée que le Traité de paix mette à l'abri la classe ouvrière de tous les pays «hors de la concurrence internationale» et lui assure «un minimum de garanties d'ordre moral et matériel relatives au droit du travail, au droit syndical, aux migrations, aux assurances sociales, à la durée, à l'hygiène et la sécurité au travail»6. Elle jette aussi l'idée fondamentale d'une Commission Internationale qui devra veilleràla bonne application des dispositions liées au travail et qui devra être composée de représentants de travailleurs et d'employeurs. Le système devrait être finalisé par la création d'Un Office International du Travail permanene. Une Commission de législation Internationale du Travail est alors chargée de rédiger les dispositions qui seront insérées dans le Traité de Versailles, la future Partie XIII, Préambule à la Constitution de l'DITs. Consacrée essentiellement aux questions de travail, elle prévoit la création de l'OIT, dont la tâche première serait l'élaboration de normes internationales de travail. Il faut bien comprendre l'imponance de cette étape dans la fonnation du Droit International du Travail et plus loin dans celle du Droit

4Encyclopédie Juridique Dalloz: Répertoire de Droitdu Travail,«Organisation Internationale du Travail

(Normes et Conventions)»par N. ValticosetC. Rossillon aux nos 1-2.

SH. G. Banolomei deLaCruz et A. Euzéby,L'Organisation Internationale du Travail, 1èreéd. (1997),PariS.,

Que Sais-Je à la p. 7 :ils.,agit ici d'Wle véritable innovation encedébut de siècle, car même si elle n.,estqu'une personne de droit privé, elle est constituée de sections nationales où les États peuvent envoyer des représentants.

6Supranote 5 à la p. 10. 7Supranote 5 aux pp. 10-27.

(17)

International dans son ensemble9•Avant cette étape charnière, le Droit International était consacré

uniquement aux rapports entre les États. Le fait d'avoir chargé l'OIT de traiter de sujets qui • relevaient normalement de la compétence interne des États, à savoir les conditions de travail à l'intérieur même des pays, a transfonné le Droit International en un droit largement substantiel. Seconde étape tout aussi fondamentale: l'adoption de la Déclaration de Philadelphie en 1946, second élément de la Charte constitutive de l'OIT. Elle élargie beaucoup le champ d'action de

l'0 IT en lui reconnaissant une compétence générale touchant mêmedans certaines circonstances aux Droits de l'Homme relatif à tout être humain au delà du simple travailleur. Les principes fondamentaux qui modèlent aussi toute la philosophie de l'Organisation sont posés:

«Le travail n'est pas une marchandise .. la liberté d'expression et d'association est une condition indispensable à un progrès social soutenu.. la pauvreté où qu'elle existe constitue un danger pour la prospérité de tous .. la lune contre le besoin doit être menée avec une inlassable énergie au sein de chaque Nation et par un effort international dans lequel les représentants des travailleurs et des employeurs coopèrent sur un pied d'égalité avec ceux des gouvernements. (...) Tous les êtres humains, quels que soient leur race, leur croyance ou leur sexe, ont le droit de poursuivre leur progrès matériel et leur développement spirituel dans la liberté et la dignité, dans la sécurité économique et avec des chances égales» (Déclaration de Philadelphie, 1946).

• Les textes fondateurs posent des principes et des objectifs

suffisamm~nt

larges pour laisser à l'OIT une certaine latitude dans le choix des moyens employés. Cela ne peut que se répercuter sur le mandat même de l'organisation.

Section 2 - Mandat

Les missions de l'Organisation sont bien sûr liées aux préoccupations ayant mené à sa créationlO• La philosophie de la Déclaration de Philadelphie va transcender toute l'action future de l'Organisation. Animée d'un idéal profondément humaniste, son mandat est fondé sur le resPect des Droits de l'Homme, des conditions de vie et des conditions de travail. Le but principal de sa création est l'adoption de normes internationales pour remédier aux «conditions de travail impliquant l'injustice, la misère et les privations»Il .

8Supranote 1àlap.4.

9N.Valticos,«L'OIT et le Droit International)} (1994)11 Rev. des Aff. Soc. p. 81 à la p. 82.

(18)

Al Si vis pacem cole justiciam12

Le Préambule de la Constitution de l'OIT pose d'entrée de jeu que «la paix durable ne peut être fondée que sur la base de la justice sociale»13. La paix sociale dans les pays, la lutte contre la pauvreté et le progrès social contribuentà enrayer les éléments de tension qui risquent de se répercuter au plan international notamment en incitant les dirigeants étatiques à rechercher dans des aventures militaires un échappatoireà leurs difficultés intérieures14. La justice sociale

sous-tend donc toute l'activité de l'OIT. Ce but de justice sociale est conçu de façon large, non dérmie par aucun texte constitutionnel. De là l'Organisation peut tirer une adaptabilité de ses moyens d'action, en fonction des conjonctures politiques, économiques ou même sociales.

B) «Là où les ouvriers sont faibles, c'esteuxgui font les frais de la concurrence.»15

La concurrence internationale est l'élément qui conduit à considérer l'OIT comme un«verrou de sûreté»16 international contre les reculs en matière sociale. À l'origine, la très rude compétition économique entre les États nouvellement industrialisés menaçait les progrès sociaux. Il y avait alors une réelle volonté d'égaliser les conditions de travail entre les États, c'est-à-dire de tendre à une harmonisation vers le bas des dispositions en vigueur pour qurun socle minimum de droits existe. Il fallait élaborer des règles du jeu, c'est-à~iredes règles pour favoriser l'établissement de politiques sociales cohérentes, des réglementations techniques précises, la contribution au maintien d'un développement social et économique équilibré. Peu à peu ils'est opéré une sorte de hiérarchisation des buts poursuivis et la justice sociale a pris le pas sur la concurrence internationale, mais cette dernière resteà part entière dans les domaines relevant de la compétence de l'Organisation. Cet aspect est primordial vu les données économiques actuelles. Ce retour aux sources nous pennet de poser de façon sûre la compétence constitutionnelle de l'OIT pour la réglementation des aspects sociaux menacés par la compétition internationale accrue entre les

IlSupranote 1 à la p. 4.

12Devise d'A. Thomas, Directew- du Bureau International du Travail en 1919 après avoir effectué diverses

tâches ministérielles dont celui de l'annement en 1916. 13Supranote 1àla p. 4.

14Supranote 10àla p. 62 ;supranote 5 aux pp.13ets.

15E. Mahaim«L'Organisation Permanente du Travail»(1924)3ReADIT. nO 4 pp. 69 et s. 16Supranote 4 au nO 4.

(19)

États actuellement Ainsi à la Conférence de Singapour en 1996 a été posée en principe la compétence de ['OIT pour l'édification des normes touchant au domaine du travailt, •

Ce mandat très large est la conséquence directe des buts fIXés par la Constitution de l'OIT. La Cour Permanente de Justice Internationale a consacré la compétence très large de l'OIT, affinnée solennellement par la Déclaration de Philadelphie par la suite. L'OIT prend ainsi sous sa coupe tous les travailleurs sans distinction aucune. Si l'on se réfèreàl'analyse de Nicolas Valticos, il faut comprendre la notion de travailleur ratione personae au sens large, ce qui permet de saisir l'étendue tout aussi large des compétences de l'OrganisationI8• Cela correspond en d'autres tennes à la restriction du domaine réservé de l'État sur un modèle de vases communicants. Les objectifs de l'OIT étant formellement contenus dans les textes constitutifs de l'Organisation, les États sont liés d'une part par leur ratification de la Convention mais aussi institutionnellement de par leur acceptation de la Constitution de l'OIT lors de leur adhésion. Ils ont donc peu de manœuvre pour accroître leur champ de compétence discrétionnaire en la matière et on peut dire que c'est une avancée considérable du Droit International Public. Les domaines couverts par l'action normative justifient les moyens qui sont développés à cet effet. Suite à l'élaboration de nonnes minimales, il y a également toute une machinerie passant par l'assistance technique, les fonnations et réadaptation professionnelles, les politiques d'emploi, l'administration du travail, les contrôles des conditions de travail, la formation à la gestion, les statistiques du travail, la sécurité et la santé au travail, la création d'organisations indépendantes de travailleurs et d'employeurs...

On le voit donc, la tâche qui lui est confiée est en 1919 énorme et est un véritable défi pour l'avenir. Plus innovateur encore est son fonctionnement organique.

17World Trade Organisation. Déclaration Ministérielle de Singapour" adoptée le 13 décembre 1996, Conférence

Ministérielle., Singapour" du 9-13 décembre 1996, WTIMIN(96)IDEC. Sur ce point voir notamment M. Vellano" «Le plein emploietla clause sociale dans le cadre de l'OMC» (1998)4 R.G.D.I.P. p. 879 à la p. 901ets.

(20)

Section 3 - Le tripartisme, rouage central de l'Organisation

Al Une logique tripartite. révolution institutionnelle de début de siècle (articles 3 et 7 de la Constitutioni9•

Nous venons de voir qu'à l'origine de l'OIT les organisations syndicales ont eu un rôle fondamental. Leur intervention ne se limite pas à sa seule créatio~ travailleurs et employeurs étant associés au fonctionnement d'ensemble et prenant part à tous les stades du processus nonnatif et de son mode de supervision. En effet là réside une originalité primordiale à la vitalité et à la viabilité de l'Organisation: son caractère tripartite. Représentants des gouvernements, des travailleurs et des employeurs sont tous associés sur un pied d'égalitéà la création de la règle de droiro.

Bl Répercussion du tripartisme sur les organes de l'OIT21

La structure tripartite dont nous venons de parler pennet de comprendre la particularité du mode de fonctionnement des principaux organes de l'OIT22•On le trouve dans les trois différents corps qui prennent part à l'élaboration et au suivi des nonnes internationales du travail: la Conférence internationale du Travail; le Conseild'administratio~et enfin le Bureau International23•

laConférence internationaledu travailest l'organe suprême24•La Constitution de l'OIT y

fait référence dans son article 3. Les réunions, depuis 1949, ont lieu sur une base annuelle à Genève et durent trois semaines, au mois de juin. On peut la compareràune sorte de forum de discussion à échelle mondiale (puisque l'OIT compte environ 174 membres parmi les États). Sa principale fonction est l'adoption des nonnes et les votes se font sur une base des deux tiers25• Or sa composition tripartite donne àcette règle du vote à la majorité qualifiée une

18N. Valticos, « Le travailleurendroit international» dansStudy in onore di Giuseppe Sperduti,GiuftTè editore

p 757àla p. 760.

19Supranote1aux pp.6et8.

20L.A.Beutler,«TheILaand IMF : Permissibility and Desirability of A ProposaI to Meet the Contemporary

Realities ofthe International Protection ofLabor Rights»(1988)14Syr.Joum. Ofinter'llaw and Comm. p.455

àla p. àla p. 473 ;supranote 5 aux pp. 28ets.

21Encyclopédie Juridique Dalloz: Répertoire de DroitduTravai~«Organisation Internationale du Travail

(Institution)) par N. ValticosetC.Rossillon au nO 29.

22Supranote 1,art.2.

23Supranote 20àlap.458 ; note 5àlap.28.

24Supranote 10.

(21)

consonance particulière car chaque délégation nationale comprend 2 représentants gouvernementaux, un représentant employeur et un représentant travailleur, chacun des membres votant de façon totalement indépendante. C'est ce que ('on appelle aussi la

proportionnelle 2-2-1, présente aussi dans le Conseil d'administration26• A ce titre la

Conférence est souvent vue comme le «Parlement international du Travail». Une de ses autres fonction est d'examiner le rapport du Directeur Général du BIT, rapport qui fait le point sur l'activité de l'OIT et sur la situation économique et sociale dans le monde.

leConseil d'administration27, élu par la Conférence internationale, est l'organe exécutif de l'organisation28• Il prend les décisions relatives aux programmes d'action29• Il fIXe en outre

l'ordre du jour de la Conférence et des autres organes secondaires. Il vote le budget etiljoue, comme nous le verrons, un rôle essentiel dans le contrôle de l'application des normes internationales du travail. Sa composition se répartit entre 14 représentants de travailleurs, 14 représentants d'employeurs et 28 représentants des gouvernements. Parmi ces derniers, 10 sont nommés par les États membres ayant«l'importance industrielle la plus considérable»30.

• le Bureau international du Travail, dit BIT, est le secrétariat permanent de l'OIT31•Son rôle

est absolument fondamental. D'ailleurs son importance est à la mesure de sa renommée: beaucoup désigne l'OIT par le sigle BIT, faisant de l'organisation et de son secrétariat une même entité. Organe permanent qui siège à Genève, il a sa tête un Directeur Générae2,

actuellement Juan Somavi~ élu en mars 1999. Sa tâche est d'élaborer les Conventions et Recommandations internationales en matière de travail. Il les propose ensuite à la Conférence. Elles prennent effet si la majorité des 2/3 leur est acquise. Mais ce n'est pas tout. Fonction annexe mais tout aussi nécessaire, il est un centre de recherche et de documentation et de publication. Il accorde aux gouvernements qui en font la demande l'assistance technique nécessaireà la mise en œuvre d'une législation du travail.

26Supranote5à la p. 29.

27Ibidàlap. 33. 21Supranote 1, art. 7.

29Supranote 10.

30Supranote 1, art. 7.

31Supranote 1, art. 9 et s.

32Albert Thomas de 1919à1932 ; Harold Beutler de 1932à1938 ;JohnWinant de 1938à1941 ; Edward Phelan de 1941à1948 ; David A. Morse de 1948à1970 ; Clarence W. Jenks de 1970à1973 ; Francis Blanchard de 1973à1989 ; Michel Hansenne de 1989à1999 ; depuis 1999 Juan Somavia.

(22)

C'est tout cet ensemble qui prend part à l'élaboration des nonnes internationales du travail et, ce qui nous intéresse plus particulièrement, le contrôle de la mise en œuvre de la législation internationale du travail.

Section 4 - Bilan de son action normative

Al Appréciation quantitativeetqualitative

L'objectif poursuivi par l'organisation étant largement défini, nous avons vu que son mandat était entenduratione materiaede façon également exhaustive. Le Code International du travail issu de cette action systématique et régulière constitue un corpus de règles complètes et perfectionnées, couvrant des domaines étendus et conjoints du travail. Le nombre des instruments est même impressionnant. On peut aller jusqu'à dire qu'il ya une prolifération normative avec un risque de blocage dont l'Organisation commence à faire les frais. Avec plus de 170 Conventions et davantage encore de recommandations, certaines ne sont toujours pas entrées en vigueur, d'autres sont devenues obsolètes et l'OIT se consacre maintenantà un sérieux travail d'élagage33• Elles

sont élaborées sur proposition des Nations Unies et des organisations syndicales internationales. • Ce travail portant sur la protection des droits fondamentaux des travailleurs, seules les normes

dites fondamentales seront envisagées ici.

Il faut en premier lieu considérer lanaturedes instruments normatifs. Ils sont essentiellement de deux ordres: les conventions et les recommandations34•Ce sont donc des instruments classiques

de droit international. Les instruments normatifs adoptés par l'OIT revêtent donc des caractéristiques identiques à celles du droit international public, à savoir la souveraineté pour l'État de ratifier en aval la Convention, comme celle de ne pas le faire. Si les Conventions créent des obligations pour les États qui les ratifient, il faut noter l'absence de sanctions en cas de violation. Quant aux recommandations, elles sont dénuées de toute force contraignante35•Ce sont

là des caractéristiques partiellement à l'origine des faiblesses majeures du système de contrôle l'OIT aujourd'hui. Le système repose en effet sur les principes généraux de droit public et notamment la clef de voûte de l'organisation est de fonctionner sur la persuasion et non sur la contrainte. Pour autant, du fait notamment de l'adoption sur une base tripartite, les conventions

33Supranote 5 à lap.70 .

(23)

internationales du travail présentent certaines particularitésJ6• Tout d'abord les États qui les

ratifient sont tous membres de l'Organisation etàce titre sont liés par les textes constitutifs. La • Conférence comporte des représentants des gouvernements, mais aussi des travailleurs et des employeurs. En conséquence ces textes ont plus de force que les Traités traditionnels. Par exemple un État ne peut pas adopter une Convention en faisant des réserves.

Hl Aproposdes Droits Fondamentaux destravailleursJ7

Quant au contenu, l'OIT veut élaborer des normes minimales pour orienter l'action législative de tous les pays du monde. Dans le contexte de forte déréglementation actuelle ('intérêt de parvenirà une protection efficace et poussée des droits fondamentaux est que ce sont eux qui permettrontà la législation secondaire de s'asseoir. Ils sont fondamentaux car préalablesà tout développement social età ce titre prioritaires sur tout autre droit: «[de leur respect] dépend les autres droits car ils sont nécessaires pour agir librement en vue de l'amélioration des conditions individuelles et collectives de travail»38. C'est ce qui motiva, entre autre, Michel Hansenne a lancer une campagne de ratification des Conventions Fondamentales en 1995, dont les résultats furent très impressionnants. Quatre Conventions furent ainsi déclarées fondamentales: celles portant sur la liberté syndicale, sur l'interdiction du travail forcé, sur l'interdiction du travail des enfants et la non discrimination39.

la liberté syndicale: conventions no 87 (1948) et no 98 (1949)40

Les sources directes sont le Préambule de la Constitution de l'OlT et la Déclaration de Philadelphie de 1946. Il s'agit donc d'un droit consacré constitutionnellement et les règles élaborées par l'OIT ont une telle répercussion au plan international qu'on les considère même

3SSupranote4,nos6-11.

36J.-MServai~ «Laclause socialedansles traités de commerce : prétention irréaliste ou instrument de progrès

social?»(1999)128(4)Inter~llab.Rev.pp.463-473.

37Supranote4,nos16-30.

38Voir les fiches de synthèse, notamment "droitsfondamentaux"~ surle siteWebwww.ilo.org

39Convention no87 surla liberté syndicale et la protection du droitsyndi~ 1948, BIT ;Convention no98 sur

l'application des principes du droit d'organisation et de négociation collective, 1949~BIT ;Convention no29 sur

le Travail Forcé, 1930~BIT;Convention nolOS surl'abolition du Travail Forcé,1957,BIT; Convention no

100 surl'Égalité desRémW1ératio~ 1951,BIT;Convention no III surla discrimination (emploi et fonnation),

1958,BIT;Convention no138 surl'âgeminim~ 1938,BITet Convention no182 surlespiresfonnes de

travaildesenfants, 1999,BIT.

40Leste1\1CS intégraux des Conventions fondamentales sont disponibles sur le sitewebde

raIT

danslarubrique

(24)

comme des règles internationales en matière coutumière41• La convention n087 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical adoptée en 1948 compte 127 ratifications au 31 janvier

200042• Elle pose que ({ les travailleurs et les employeurs sans distinction d'aucune sorte ont le droit sans autorisation préalable de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'affilier à des organisations,à la seule condition de se confonner aux statuts de ces dernières.»43. Est donc exclu le système du parti unique établi par la loi. Ensuite la Convention énumère les droits et les garanties attachés à l'existence de la liberté syndicale44• En 1970 fut adoptée une résolution pour compléter la Convention et qui affmna que la liberté SYndicale doit reposer sur certaines libertés publiques comme le droit à la liberté età la sûreté de la personne, la liberté d'opinion et d'expression, la liberté de réunion, le droit à un jugement équitable par un tribunal indépendant et impartiaL ..45 Une seconde Conventio~adoptée en 1949 et ratifiée par 141 États, laConventionn~8sur la droit d'organisation et de négociation collective. prévoit des mesures de

protection contre les actes de discrimination antisYndicale. Dans un langage plus technique, cette convention traite des relations horizontales entre organisations d'employeurs et de travailleurs. Il s'agit d'une législation qui délimite la protection des organisations les unes envers les autres46• Par exemple le fait de subordonner l'octroi d'un travail à l'adhésion à un syndicat Les organisations se voient garantir une protection contre les actes d'ingérence.

Il est intéresser de remarquer que le droit de grève n'est pas dans le champ de ces conventions internationales. Cependant ilressort de la jurisprudence du Comité de la Liberté SYndicale que le droit de grève est un corollaire indispensable du principe de la liberté syodicale41•Cependant c'est

un droit relatif et il peut faire l'objet d'une réglementation ou d'une interdiction générale dans le cas des services publics essentiels48•

41Supranote 2, E.Lee,àlap 183 ;Rapport de la Conférence Internationale du Travail sur la liberté syndicale et négociation collective,doc. off. BIT, 81èmcsess., (1994) p. 8.

42 C.I.T.~ 88èmc session 2000, Votre voirautravail. Rapport du Directeur Générai en vertu du suivi de la

Déclarationdel'OIT re/ativeauxprincipes et droits fondamentaux au Travail. Rapport I{B), BIT, Décembre

2000.

43Convention nOS7, art. 2. 44Supranote 4, nos 17-21.

4.5N. Valticos,«Un Développement du droit international du travail: les droits syndicaux et leslibertés

publiques»,dansHommageàPaul Horion, Faculté de Droit de Liège, 1972, p. 263.

46Supranote 5 à la p. 72.

47Recueilde décisions et de principesduComité de la Liberté Syndicale du Conseil d'AdministrationduBIT,

BITGenève~4emeéd.(1996) nos 473 et s. :«Si le Comité a toujours considéré le droit de grève comme étantun des droitsfondamentauxdes travailleurs (... ), c'est dans la mesure seulement oùilconstitueW1moyen de

défense de leurs intérêts économiques» ;« ( ...)comme unmoyen légitimede défense de leurs intérêts (...)>>.

(25)

• Le travail forcé et les conventions 0°29 (1930) et nOIOS (19S7}49

La lutte contre le travail forcé est la descendante directe de celle contre l'esclavage. Les deux conventions en la matière ont le même but: sa suppression totale sous n'importe quelle forme. En 1930 la Convention n"29 sur le travail forcé est adoptée à cet effet. Comptant 150 ratifications, elle pose la nécessité de supprimer graduellement les fonnes de travail forcé et dans la phase transitoire une utilisation limitée et contrôléeàdes fms publiques età titre exceptionnel. Elle le définit comme tout travail ou service exigé d'un individu, sous la menace d'une peine quelconque, et pour lequel ledit individu ne s'est pas offert de lui-mêmeSO. Certaines exceptions sont posées : le service militaire obligatoire, les obligations civiques nonnales des citoyens, le travail pénitentiaire, les travaux effectués en cas de force majeure et les menus travaux de village. Le texte stipule ensuite que toute imposition illégale du travail forcé ou obligatoire doit donner lieuà des sanctions pénales car il s'agit d'une restriction majeure de la liberté personnelle. En 1957 està son tour adoptée la Convention nO]OS sur l'abolition du travail forcé qui pose l'abolition immédiate et totale de cinq formes de travail forcé. Elle compte pour sa part 140 ratifications. Alors que la Convention n0:29 avait une conception traditionnelle des fonnes de travail forcé, cette dernière veut aborder ce qu'on appelle les formes contemporaines de travail obligatoireS1 : le travail en tant que mesure de coercition ou d'éducation politique, en tant que sanctionàl'égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologiqueà l'ordre politique, social ou économique établi; ensuite le travail forcé en tant que méthode de mobilisation et d'utilisation de la main d'œuvre à des fins de développement économique, comme mesure de discipline du travail, comme punition pour avoir participéàdes grèves ou comme mesures de discrimination raciale, sociale, nationale ou religieuse.

• L'interdiction de la discrimination au travail: Conventions nOIOO (1951) et III(1958)52

Troisième volet du bloc des droits fondamentaux de tout travailleur: la non-discrimination, principe consacré par la Convention nO]]], ratifiée par 137 États. Les motifs de discrimination interdits sont expressément posés. La Convention énonce qu'il y a discrimination pour « toute distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l'opinion

49Supranote40.

so Supranote 5àlap.73.

SIIbid.

(26)

politique, l'ascendance nationale ou l'origine sociale, qui a pour effet de détruire ou d'altérer l'égalité des chances ou de traitement en matière d'emploi ou de profession.»53 •

Les États ayant ratifié la Convention doivent la mettre en œuvre avec les moyens adaptés aux circonstances et usages nationaux. Ils sont priés de le faire sous forme d'une politique nationale visant à promouvoir l'égalité des chances et de traitement en matière d'emploi et de profession en vue d'éliminer toute discrimination en cette matière. Toujours soucieuse de s'adapter aux évolutions actuelles, l'OIT par l'intermédiaire de la Commission d'experts a étendu les motifs de discrimination. Elle est donc aussi établie quand le motif appartient à la liste ci-après:

r

affiliation syndicale, l'âge, l'état civil, l'état de santé, la fortune, les handicapés, l'orientation sexuelle, les responsabilités familiales. D'autre part la Convention nO}00 consacre l'égalité de rémunération entre les travailleurs. Il y a aujourd'hui 140 États ratificateurs. Selon l'avis de la Commission d'experts de l'OIT pour l'application des conventions et recommandations, seule une action constante permet de créer des conditions favorables à l'égalité des chances et de traitement en matière d'emploi ou de profession.

L'élimination du travail des enfants: Conventions n0138 (1938) et D0182 (1999)54

Les chiffres suffisent à justifier les préoccupations et l'action internationale en ce domaine. Les enfants seraient plus de200millionsà travailler, principalement dans les pays en développement. Un enfant sur trois en Afrique, un sur cinq en Amérique Latine, plus de la moitié en Asie...ss Le phénomène existe encore dans certains pays industrialisés. Pour beaucoup les répercussions sont physiologiques et mentales: atteinte à la dignité, troubles affectifs etc. Les conséquences sont catastrophiques tant pour l'individu que pour la collectivité toute entière et ceà court et à moyen terme. Le travail des enfants est au cœur des préoccupations de l'Organisation et cannait aujourd'hui un grand écho. Son action se concentre sur les causes même du travail des enfants, en d'autres termes la pauvreté, les déficiences des systèmes éducatifs et sur les conditions de la concurrence économique, là où les enfants constituent une main d'œuvre facile, peu coûteuse. Il existe neuf conventions sectorielles en la matière, la plus complète étant en tout état de cause la Convention traitant de l'âge minimum au travail et de l'interdiction du travail des enfants. La Convention n0138 de 1973 (seulement 77 ratifications) déclare que«[L'État] s'engage à viser, par sa politique nationale, à assurer l'abolition effective du travail des enfants et à élever

53Convention nOt11, article1.

(27)

progressivement l'âge minimum d'admissionà un emploi»56.En aucun cas cet âge ne pourra être inférieurà 15 ans niêtre inférieur à l'âge auquel cesse la scolarité. Certaines controverses existent • à leur sujet au sein des pays en voie de développement. Au vu de la situation sociale et économique, les dispositions seraient trop élevées et en décalage par rapport à la réalité économique57•Elle est complétée par la Recommandation n0146. Ilest intéressant de noter que la

Convention nO 138 n'a pas été conçue comme un instrument statique mais «dynamique.. visant à améliorer progressivement les normes en vigueur et à encourager 1"action de longue haleine nécessaire pour atteindre les objectifs fIXés.»58. Récemment., en 1999, fut adoptée la Convention nO/82sur les pires formes de travail des enfants. Son adoption59, unanime, concrétise le désir de

l'Organisation d'affranchir les millions d'enfants de l'esclavage, de la servitude pour dettes, de la prostitution et de la pornographie, des travaux dangereux et de leur enrôlement de force dans des conflits armés. Cette Convention s'applique à tout individu de moins de 18 ans et pose l'obligation de prendre toutes « mesures immédiates et efficaces pour assurer l'interdiction et l'élimination des pires formes de travail et ce, de toute urgence»60. La Convention énumère ainsi

une série de situations s'apparentant aux pires formes de travail, on peut sans doute regretter l'absence d'une définition générique nous pennettant d'étendre ces critères à d'autres situations. Sont donc du travail forcé :

• Toutes les formes d'esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente et la traite des enfants, la servitude pour dettes et le servage ainsi que le travail forcé ou obligatoire.

Le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés.

L'utilisation d'un enfantàdes fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques.

L'utilisation, le recrutement ou ('offre d'un enfant aux fins d'activités illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants.

• Les travaux qui sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ouàla moralité d'un enfant L'action devra prendre la forme de programmes nationaux ou de toute mesure similaire.

SSSupranote 5 aux pp. )00 et s. S6Convention n0138 de 1973, article 1. S7Supranote 41 àla p. 184.

S8Supranote 40.

S9Si l'adoption fut Wlanime, en septembre 2001 143Étatsl'ont ratifiée. Pour Michel Hansenne,ilfalIait viser une ratification Wliverselle de la Convention pour l'an 2000.

(28)

Suite à la compagne de ratification lancée par Hansenne à ['occasion du 75èrœ anniversaire de l'Organisation et des débats occasionnés par le Sommet mondial pour le développementsocia~de • nombreuses ratifications furent enregistrées, en particulier pour les Conventions fondamentales.À côté ['OIT a laissé savoir que des pays ont lancé des procédures officielles de ratification ou sont en cours d'examen de l'opportunité de ratifier les sept Conventions.

Cl Caractéristiques des normes internationalesdutravail

Les nonnes ainsi adoptées présentent plusieurs caractéristiques dont il faut prendre conscience pour la suite du débat. Ce sont des normes à vocationuniverselle,c'est-à-dire ratifiables et donc applicables de par le monde. L'OIT veut encolh-ager le maximum d'États à ratifier les Conventions élaborées. Les disparités de développement économiques et sociales des États posent donc un véritable défi à l'Organisation quant au degré de contrainte de la norme. En effet la Constitution de l'OIT pose que la Conférence devra «en fonnant une Convention ou une recommandation d'une application générale (...) avoir égard aux pays dans lesquels le climat, le développement incomplet de l'organisation industrielle ou d'autres circonstances particulières rendent les conditions de l'industrie essentiellement différentes, et elle aura à suggérer telles modifications qu'elle considérerait comme pouvant être nécessaires pour répondre aux conditions propres à ces pays»61. Concilier universalité et particularismes régionaux, voilà une gageure de taille pour l'Organisation. A quel niveau la situer? II faudrait un niveau assez élevé pour entraîner un progrès social généralisé mais sans pour autant décourager les États d'adopter les nonnes dans leur législations internes, parce qu'hors de portée62•

Un autre point est la fonnulation même de la norme qui ne doit pas être trop rigide pour ne pas heurter les diversités des traditions juridiques des États Membres, alors même que trop générale elle serait au contraire totalement inefficace. D'où l'intérêt des nonnes desouplesse63laissant aux États une certaine latitude pour appliquer matériellement les dispositions en cause64• La souplesse

dans la fonnulation et l'adoption des nonnes est la conséquence directe de leur caractère universel. Mais en ce qui concerne les droits fondamentaux une telle flexibilité nonnative ne peut pas être retenue. Fondamentales, elles ne peuvent souffrir aucune dérogation dans leur contenu ni

61 Supranote 1~art. 19§3~p. 13.

62Supranote4~nO 9.

63Supranote41 à la p. 184 ; N. Valticos«Les Conventions Internationales à la croisée des

anniversaires »(1996)1 RGDIP~ p.7 aux pp. 23-36. 64Supranote 36àla p. 201 et s.

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dans leur mise en œuvre. Tous les États, quels qu'ils soient, doivent les adopter et les mettre en œuvre intégralement65•

Section 5 - La crise identitaire : manüestations et identification des facteurs

Les moyens mis en œuvre sont à la mesure des objectifs poursuivis, mais l'OIT est confrontée aujourd'huià une crise identitaire. Par identitaire j'entends que sa légitimité est mise en cause car on ne la reconnaît plus comme une institution apte à protéger les droits fondamentaux des travailleurs (puisque la clause sociale ne porte que sur ces derniers). La campagne de ratification lancée par Hansenne en 1995, la Déclaration de principes de 199866 sont des palliatifs à une inadaptabilité de son action normative. Cette institution, novatrice lors de sa création en 1919, est, au regard de la conjoncture actuelle, relayée au second rang par rapport aux objectifs économiques des autres organisations internationales. Ce sont ces dernières qui réclament les rênes pour réguler le monde du travail international. Face au manque de respect patent des nonnes internationales du travail, c'est une solution envisageable, voire attrayante de prime abord, mais ce ne doit être pas la seule. L'intervention des organisations internationales du commerce ne peut répondre qu'à des problèmes sociaux liésà la concurrence internationale, leur mandat étant de ce fait plus limité que celui de ('OIT.

Al la mondialisation et le contexte international traditionnel

Le thème de la mondialisation est à l'heure du jour. Il s'agit aussi d'une des causes premières des faiblesses que ("OIT connait dans la mise en œuvre les nonnes fondamentales au travail. Son rôle n'est pas défini clairement, les droits fondamentaux violés et libres de toute sanction.

Tout d'abord demandons nous ce qu'il faut entendre par mondialisation67•

65E.Ro~«Enjeux et ambigw"lés du concept de clause sociale ou les rapports entre les normes de travail et le

commerce international» (1996)24 Rev. BelgedecIr.inter'l, p.144,àla p. 185.

66Déclarationdel'OIT relative aux principes et droitsfondamenttnIX au travail. Rev. int. dutrav.(Genève), Vol.

137 (1998),n~,pp. 273à277.

67Voir notamment G.Besse,M. Maindrault, G. Spyropoulossupranote 2;supranotela;supranote 3 ;J.

Dupuy, « Le dédoublement du monde» (1996) R.G.D.I.P. p. 313 ; O. Greenawayet C. Milner, «The World trade system and the Uruguay Round: Global Employment Implkations» (1995)134 Inter'1lab. Rev. p. 497.

(30)

Au sens étroit, il faut la comprendre comme le développement technique des activités, sans présence physique ou matérielle et sans aucune interruption. Cela se manifeste par la possibilité

d~optimiser les implantations et les flux par des décisions extrêmement rapides en fonction des coûts ou des législations. De façon plus large on entend par mondialisation l'universalisation du marché et une libéralisation des échanges. La mondialisation s'identifie donc à la création d'un grand marché mondial dans lequel l'État est un acteur panni d'autres, les multinationales étant plus de 40 000 sur la scène internationale et ayant une capacité de négociation bien supérieureà celle des États68•

La mondialisation est donc essentiellement la conjonction de trois phénomènes69• Le premier est

le développement du commerce international avec la libéralisation des échanges. Le second est le rôle croissant des multinationales sur la scène internationale, et enfin l'explosion des mouvements internationaux de capitaux. Cela engendre des risques: risques de dumping social, risques des importations à bas prix et risques d'augmentation des inégalités sociales et économiques et de chômage7o•Dans une économie en voie de globalisation, l'hypothèse que l'unification des marchés des biens et des services s'étende au marché du travail est de plus en plus défenduell. Pour G. Besse, la transformation de l'économie mondiale accentue les revendications des acteurs économiques qui veulent voir traiter globalement tous les problèmes qui naissent des distorsions de la concurrence mondiale : le social, l'environnement...

La transformation du contexte social, économique et financier72a donc eu des effets sur l'OIT, et donc sur la dimension sociale et économique de son mandat. Au printemps 1999 le Directeur Générae3 souligna l'impact de la mutation de l'environnement économique et social par la mondialisation sur les fondements traditionnels de l'Organisation. La relation entre le Travail, le Capital et l'État n'est plus la même. L'activité économique, autrefois dépendante de l'intervention étatique ou des acteurs sociaux, est aujourd'hui sous la coupe des multinationales. Le problème de la faiblesse des normes internationales du travail est celui de fa dissolution de la responsabilité

collective internationale: non seulement l'absence de sanctions, effectivement, envers les acteurs

68Supranote 3.

69Supranote5p. lOS. 70Ibid. àlap.107.

71Supranote2~ G.Besse~ àlap.843.

72Supranote67.

73Rapportdudirecteurgénéral~un Travail Décent, Conférence InternationaleduTravail~85emesessio~ 1999,

(31)

traditionnels, mais aussi des instruments noonatifs aujourd'hui inaptes à viser les nouvelles forces internationales. Sur quelles bases peut-on faire reposer l'action future de l'OIT?

B) L'absence de force contraignante des nonnes internationales du travail, première manifestation de la faiblesse de l'Organisation

L'OIT des nonnes internationales du travail dans la logique traditionnelle de droit international public, c'est-à-dire par le biais des conventions et recommandations internationales du travail. Il y a une réelle difficulté pour mettre en œuvre effectivement ces instruments dans la législation interne des États. Cela est du essentiellementà['absence de contrainte du système normatif de

l'OIT qui repose sur le bon vouloir des États74•Puisque le système de l'Organisation repose sur la

persuasion. et non sur la contrainte7S, que les conventions sontdénuées de toute fOrce obligatoire,

le système de contrôle de l'organisation ne répond plus aux préoccupations du système économique actuel. II y a donc une réelle faiblesse du volontarisme étatique76• On peut aussi

s'interroger sur l'information et le suivi des normes auprès des États. Une campagne sur les nonnes fondamentales et sur les conséquences attachées àleur ratification et leur mise en œuvre concrète a déjà montré ses fruits: la démarche de Hansenne en ce sens en 1995 a été porteuse. Ne convient-il pas de continuer dans cette voie?

De plus ce système normatif a pour seul destinataire l'État sujet de droit et ne vise donc pas les acteurs de droit privé, de plus en plus nombreux sur la scène internationale et jouant un rôle direct dans le mise en œuvre des droits fondamentaux du travailleur77•

Les normes internationales du travail et réalité économique connaissent donc une divergence croissante78• Elles ne poursuivent pas les mêmes buts. Le champ d'application des normes internationales semble de moins en moins correspondre aux réalités économiques, suite à quoi les préoccupations de l'OIT sont mises dans l'ombre car considérées comme des obstacles au progrès économique des États. Ce qu'on veut dire par là est que les préoccupations de l'économiste et du

74Supranote 2.

75Supranote10 àla p.64.

76F. Maupain,«Laprotection internationale des travailleurs et la libéralisation du commerce international :lm

lien ou un frein?»(1996) R.G.O.I.P.p.52. 77Voir G. Spyropoulossupranote 2.

(32)

travailliste sont de plus en plus en contradiction79• Le point important à noter ici est que l'on

assisteà une sorte de diktat de

r

économie sur le social, ce dernier étant au service du premier. • Comme Alain Euzéby l'explique dans une récente recherche, on parle de l'économisme80• Or il

convient de se demander si l'on fait bonne route et s'il ne convient pas d'inverser la donne de départ. L'économie néolibérale a pour but final le bien-être collectif et individuel. La prospérité économique ne saurait être une fin en soi! Finalement c'est bien le progrès économique qui doit être vecteur de progrès social, comme le souligne le texte même de la Constitution de l'OIT. Bien sûr les buts de la politique commerciale et de la politique sociale ne sont pas les mêmes,ilne faut pas d'ailleurs pas qu'ils le soient. Par contreil faut se demander comment dépasser les éventuelles contradictions dans les mesures adoptées. Dans le même sens plusieurs spécialistes de la question dénoncent le paradoxe du pointillisme des dispositions actuelles81• Les juristes internationaux n'ont de cesse de réglementer de plus en plus et sur de plus en plus de domaines liés au travail. La cadence d'adoption des normes doit se ralentir quitte à mieux cerner les sujets sur lesquels on intervient. De cette attitude dépend aussi la viabilité du système de contrôle de l'organisation.

19J.DilIer..«Responsabilité et mondialisation: qu'attendre des codes de conduite, des labels sociauxetdes Eratiques d'investissement?» (1999)138(2) Inter'llab. Rev. p. 107.

oSupranote 10àla p. 63 :«système de valeurs dans lequel les choix sont politiquesetles diverses sphères de la vie humaine sont subordonnéesàdes considérations d'ordre économique et, plus particulièrement, aux exigences de la compétition économique à laquelle se livrent les entreprises. Cettelogiqu~soutenue par les doctrines néolibérales,estexacerbéeparla mondialisation de l''économie. Elle ne considère les personnes que comme des consommateursetfait de la croissance économique unefin en soi, sans s'interroger sur son contenu et sa signification. )}

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Chapitre 2 - Delapromotionà l'effectivité des normes fondamentales au travail: bilan et perspectives d'évolution de mécanismes institutionnels centralisés

La problématique de ce chapitre est axée sur la notion depromotion des nonnes. Le contrôle se fait de Genève, du siège de l'organisation: le déclenchement des procédures de supervisio~

l'émission des sanctions, l'ey.amen des rapports et des diverses demandes... Dans le schéma du droit international public, une des faiblesses de l'OIT tientàl'absence de contrainte des nonnes internationales qu'elle édicte. Les réfonnes que l'on envisage actuellement dans le contexte de la mondialisation sont fondées sur la mise en œuvre de sanctions, de caractère économique, en cas de violation des normes fondamentales. Leproblème de ces solutions est qu'elles sont contrairesà la philosophie de l'OIT. Cette dernière réfute donc actuellement l'idée de sanction attachée à ces nonnes au profit du dialogue et de la persuasion. En ce sens a été adoptée la Déclaration solennelle sur les droits fondamentaux en 199882• Il s'agit de montrer que raIT peut avoir des

moyens autonomes de mise en œuvre des droits fondamentaux à côté des solutions envisagées dans le cadre de l'OMC. Cela conduit à analyser les procédures existantes dans le cadre de l'Organisation dans cette optique et de se demander 1) si les nonnes peuvent être mises en œuvre et être respectées sans passer par la force contraignante des procédures (caractère autonome ou non des mécanismes de contrôle des normes àl'QIn; 2) comment réformer en conséquence les procédures existantes à l'OIT.

Section 1 - Envisager des réformes: une réflexion sur le système de contrôle de l'OIT

L'hypothèse à vérifier est celle de savoir si l'OIT détient les moyens d'établir un système procédural de supervision autonome. Les deux questions essentielles auxquelles il convient de répondre seront donc :

81 Voir M. Maindrault supra note 2 ; N. Valticos« Les Conventions Internationalesàla aoisée des

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1. Pourquoi laisser à POIT un rôle de supervision alors même que l'on constate la faiblesse de ses résultats en ce sens ?

2. Comment doit se présenter le système de supervision dans le cadre de l'OIT face aux changements mondiaux qui interviennent?

Le système de contrôle de l'OIT compte panni les plus élaborés en matière de nonnes internationales: régularité, indépendance et efficacité sont autant de caractéristiques qui ont contribué à en établir la renomméeS3• Reposant sur un double système de rapports et de plaintes

ou de réclamations84, l'OIT peut suivre l'évolution des normes qu'elle adopte au sein de la Conférence internationale du Travail et ceàtous les stades de la vie de la norme: avant et après la ratification, avec ou sans violation des nonnes post ratification. Mais conçu au départ pour un nombre très limité d'instruments, le système doit connaître aujourd'hui plus de 200 conventions et recommandations, sur plus de 6000 ratifications au lieu de un ou deux milliers... 1l faut donc que l'OIT soit capable de répondre aux impératifs des transformations du monde actuel, c'est~à~dire

avoir un système plus rapide et sans doute plus contraignant pour ses membres85•Sur ce pointil faudra bien sûr comprendre ce que nous entendons par contraignant La sanction en Droit International Public est en efTet une notion très large. Or c'est à un phénomène contraire que l'on assiste: le système de contrôle, face à l'accroissement des nonnes internationales de travail et face au mouvement contradictoire de la déréglementation due à la forte concurrence internationale, connaît un certain relâchement86•

Dans ce contexte, la notion de clause sociale est souvent avancées comme la solution la plus adéquate pour résoudre les difficultés rencontrées par l'OIT dans la défense des droits fondamentaux. Cependant cette solution présente des inconvénients majeurs qui nous feront préférer la voie d'une autonomie de contrôle laissée à l'OIT. S'il existe un lien entre les normes internationales du travail et le commerce international, ce lien est souvent réduit au simple débat de la clause sociale. S'il existe un réel intérêt du concept de la clause sociale (A), cette solution présente des risques (B).

82Supranote 4.

83Supranote 18àla p. 763.

84Supra note 1, art. 22, 24 et 26.

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