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Le Courrier anglais de Stendhal : ses jugements sur la politique et la litterature.

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(5)

Ses Jugements

sur la Politique et la Litterature

A Thesis

Presented to the Facul t~T of

Graduate Stttdies and Research I~cGill Uni V011

S ity

In Partial Fulfilment

of the Requirements for the Desree

11"" __ ,~as t er o f A r s

t

by

Norah

~~rguerite

Lenoir

(6)

Chapitre I. Stendhal Courrieriste ••••••.••..••••••• 1

Chapi tr·e II. Ijes Articles de Stendhal • • • • • • • • • • 14 Chapi tre III. Les Jusernen ts de Stendhal

sur la Politique de la Restauration •• 24 Chapi tre IV. Les Juge~-aonts de Stendb.al

sur les po~tes et prosateurs de

la Restau.ration • • • • • • • • • • • • • • • • . • • • • 53 Chapitre V. Les Jurzements de Stendhal

sur~le ~ne~tre de la Restauration •••• 81

Chapitre VI. Les Jugements de 3tendhal

sur la Litterature etran~ere ••••••••• 108

Chapitro VII. Conclusion ••••.•.••••..••••••••.••••••• 141

(7)

Annees 1821-1830

En ju:tn 1821, Beyle quitte ~l~:-~:~~qu_elnent Liilan qu'il habite depuis sept ans. Il s'est compromis par des paroles

imprudentes en matiere politique et le gouvernement autrichien, le croyant affilie

a

la secte des Carbonari, lui intime l'ordre de vider les lieux. Stendhal se ~loit done oblige d 1abandonner la ville de son ooeur, celle qu'il decouvrit avec ravissement lors de sa premi~re campagne dans 1 1armee de lhpol~on, celle

qui ouvrit les portes

a

ses premiers plaisirs,

a

ses premi~res affiours,

a

ses jouissances artistiques en musique et en peinture, cella surtout o~ i l rencontra la divine M§tilde, qui occupa ses pensees de 1818 A 1824.

Il gagne Paris qu'il trouve npire que laidn (1). Il n'a qu'une idee en t~te: que son cha~rin ne soit pas devine • Plus tard, en 1832, Stendhal avoue que cette peur raille fo:.s repetee, fut le principe diriseant de sa vie pendant dix ans.

ne

'est

la

que je SUiS Ve11U 8_ '3..VOir de 1 'esprit,

chose qui 6tait le bloc, la butte de mes m~pris

a

J',ililan, en 1818, quand j'aimais ~'.1etilc1e." (2)

(1) Souvenirs d'Egotisme, p. 9.

(8)

A 1 'hotel de Bruxelles, !~o. 47, rue ·'-ichelieu, il retrouve le Baron 1\iareste qui sera son arai inseparable de 1821

a

182 8. Bey le ren con tre son ami deux fo is par ,jour: le mat in,

au Cafe de Rouen vers onze heure s; 1 'apre s -micti,

a

o inq heure s,

a

la table d'hote de l'hotel de Bruxelles. Sa pauvrete l'oblige

a

ne manr;er qu'un bon repas par jour. A1_1 debut de son sejour,

la corapae;nie de t:areste et de deux autres amis,. 1:1. "2arot,

t~an-quier de Lun6ville et M. Poitevin, offioier en demi-solde,

aid_e11t Beyle

a

seoouer ses sombres 11everies.

Pour oaoher sa

rnelanoolie et sorl ennui, il parle beaucoup et de fa(~on si

in-coherente parfois que ses amis en epl1 01.l\rent une oertaj_ne

inquie-tud.e. C'est que i2eyle est desempar~. Il fu.it ses ancie1mes

connaissances, il ~vite ses cousins, les Daru; il veut mourir.

nEn 1821, j 'avais beaucoup de peine

a

resister

a

la tentation de nle bruler la cervelle.u (1)

Et puis il est pauvre. Ses ressources materielles sont insuffisantes: il recoit une pension militaire de neuf

J ~

cents francs et une bribe de 1 'heritage de son 9ere, retiree

a

grand'peine. Cet heritage est ~lace

a

fonds perdus en rente viagere de seize cents francs qu 1un li. Fusier

a

Saint-Cndras

(Isere) lui verse. Aussi Be~rle V se cherche-t-1·1 une s=- ua lon, ·

t

t• mais vainement. Delscluze di t que, grace

a

la ~Jrotection de

personnes influentes, il pos tule successlvemen

t

pour la place d'archiviste

a

la

prefecture

de police, de sceau des

titres

d'employ~ au minist~re de l'~nt~rieur ou aux Affaires

Etran-geres, de poste de consul fUt-ce meme dans les rbpubliques

(9)

sauvages de 1 'Amerique du Sud •• If!ais sa langue imprudente depla1t et il n 1obtient rien.

Profondement degou

te

de Paris et de lui -m§nle, i l part en octobre pour Londres (il ne sait_plus avec qual arzentl)

chercher un rernede

a

soh spleen. Il voyage avec Edward :C~dwards,

un 0'81 COlnpa,'!nOn et un n1auvai"s sujet. Stenclhal s 'enivre

a

Calais

et se fait insulter par un capitaine qu 1il recherche vainement

dans les tavernes de Londres pour le defier en duel.

Londres le charme, avec ses promenades le long de la Tamise, ses bordures de petites maisons garnies de rosiers. Les paysages de Richmond et de Vlindsor lui rappellent sa "chere Lom-bardie11 (1). Il attend avec impatience qu.e s 'ouvre la s_aison de Shakespeare. Il voit nshe stoops to conquern, il erre dans Londres, il a ses entrees dans les salons de l 1Almack, les plus exclusifs de la capitale, .gr§.ce

a

son ami Sutton-Sharpe. "Enfin

'

le ••• 1821, on affiche Othello, par Keantt (2). (le 19 novembre). Beyle

se

fait ecraser pou_r acheter u_n billet de parterre,

et

il

eprouve les m§mes s'ensations dans 1 1attente de la queue qu'aux beaux ~ours de sa jeunesse lorsqu 1il se faisait ecraser pour voir la premiere de Pinto. Son attente n'est pas deque; il est

tout

a

l'admiration de cet acteur qu'il considere un des premiers du monde.

A son retour, en decembre, Beyle reprend cout

a

la vie.

(1) Souvenirs d 1Egotisme, p. 69.

(10)

Il ne parle plus de se suicider. ~ais sa

s@ne

est extr~me.

Il l11i faut

a

tout prix trouver un travail remun·erate1Jr.

Beyle a l'id~e, en f~vrier 1822, de fonder un pGriodique sur

le modele des magazines anglais, dont il ~oute le serieux.

Il y fait allusion dans une lettre

A

Monsieur .•• (1), datee

de Paris, le 24 fevrier 1822:

nJe joins

a

ce billet le prospectus de la Revue

dont j'ai l'honneur de vous entretenir. Je

de-sire que vous y trouviez des motifs pour

accor-der votre appui

a

una-publication dont le merite

principal sera certainement d'~tre consciencieusen (2).

Ce journal s'appellera l'Aristarque (critique severe mais juste

et ~claire). Ce doit §tre

a

la fois un journal d'idees, un

or-eane

de critique et vn indicateur universal des livres A lire.

Les tendances politiques seront centre-~auche. Jacques, alias

Beyle, et ~ierre, collaborateur anonyme, ont beaucoup voya~e;

ils connaissent A fond les litt6ratures an~laise, allemande et

frangaise; leur sincerite tiendra lieu du talent litteraire 01J 1ils

n'ont pas. Le cahier de l'Aristarque paraitra le 15 du mois et le prix de l'abonnement sera de 46 francs. Mais ce beau projet

ne se realise point: les editeurs manquent de relations et de

fondsl

C1est alors que, presse par le besoin, Stendahl deviant

journalists. Il accepte l'offre d'un libraire an~lais, Colburn,

edi teur d 'un ~.1agazine (Le 1Jew l:Tonthly lTaGazine), qui lui promet cinq cents francs par mois pour deux articles paraissant tous

(1) M. Stritch

(11)

les quinze jours. C1est une esnece de Courrier de Paris dont

.!.:

le

but est de renseiener les lecteurs anglais sur les

publica-tions r6centes et la vie

franqaise-

Beyle se met courageusenent

a

la besogne. Il devore les livres et les revues, il est

a

l 1affftt de toutes les nouvelles susceptibles d~int~resser.

Quelques mois auparavant, 11 fuyait la societe, main-tenant, il la recherche. Il se fait presenter, tout d'aborc

aux vendredis de Viollet-le-Duc et aux dimanches de Del~cluze.

Chez ces deux messieurs, se reunit l'elite intellectuelle de

Paris pour s'entretenir des evenements du jour et discuter de questions litteraires et politiques. 3tendhal deviant un des

habitues les plus fideles des dimanches. C'est un cercle

d'o-pinion liberale en poli tique et ron1antique e_n l i ttera ture.

La

,

il

rencontre

Albert Stapfer, Bouffe, son cousin, Ed. Monad,

Alnpere fils, Sau tele

t, ...

viol let-le -Due, 1·:1erimee, de Jus si eu_,

Du-v.ergier de IIauranne, Vi tet, 11igne

t,

de Ren111sa

t,

Aubernon, Dubois

d 'Angers, Artaud, de Guisard, Jacquemon

t,

d1..1 Gas, :.:~on tbel,

Cer-e let, Cave, Dittmer, Comte de Gasparin, Coquerel, Taschereau.

Stendhal rapporte ses premi~res impressions:

"Je ne saurais exprimer trop cl 'estime pour cette societe. Je n 1ai jan~is rien rencontre, je ne

dirai pas de superieur, mais m§me de comparable.

Je

fus frappe le premier jour, et vingt foi~ peut-§tre pendant les trois ou quatre ans qu 1elle a

dure, je me suis surpris

a

faire le nl§me acte

d'ad-mira tion". (1)

Tout d'abord, Stendhal est aux ecoutes. Il ne veut rien perdre

de ce qui se dit oar c'est la l'arsenal ou il puise "le pl11s

abon-darunent,

pour faire

face

a

la voracite

de

la

revue anglaise".

(2)

(1) Souvenirs d'Egotisme, p. 125.126.

(12)

'Ecoutez, ecoutez bie.n ce que l'on va ·dire, afin de me four11ir de sujets, car je suis distrait, et quand je parle, j'oublie

ce que disent les autres'. Apres la seance et lorsqu'il se re-tirait avec son confiden~en descendant, tantot i l disait: 'Je n'ai rien, et vous?' ou quand la recolte etait bonne, il s 1 ecri-ai t tout joy~u_x: 1:W1on article est faitl' n.

(1)

Bientot,

ce-pendant, Beyle oubliera d 1ecouter. Il se lancera eperdument

dans les discussions; il sera le leader du groupe,

le

hussard ~

qui mene ses hommes

a

l'attaque.

Mais Stendhal glane encore ses nouvelles dans d'autres salons. Peu

a

peu les partes s'ouvrent et vers 1826 Stendhal est si m.ondain que la semaine suffi t

a

pe ine

a

remplir tous ses

engagements. Le mardi, i l va chez 1~ilme • .l\.ncelot, le 1nercredi

chez le

Baron Gerard,

le

samedi

ohez

Cuvier, le dimanche apres-midi chez Delecluze, le dlmanche soir chez les Tracy (2) et il dine trois fois par semaine au Caf~ Anclais. C'est ainsi qn'il est au courant de tout ce qui se passe

a

Paris!

Beyle rencontre I.:~r1e. Ancelot aux receptions de ra.inuit

que donne le peintre G6rard. Elle h§site tout d'abord ~ invi-ter chez elle un ennerni d6clar~ des classiques et des

acad6mi-ciens.

Dans Les Salons

de

Paris, Foyer~ eteints, elle note avec une vivaci

te

charmante les impressions que Be:rle l,Ji a laissees:

(1) Delecluze, E.-J., Souvenirs de Soixante

Annees,

p. 244-245.

(2)

Souvenirs

d'Egotisme,

p. 35

(13)

"Quels causeurs aimablesl C'etait T\1. l~erimee, ••• et enfin ea Beyle (Stendahl) (sic) dont rien ne neut rendre la piquante vi-vaci te ••• }~. Merimee et M. Beyle avaien.t ensemble des entre tiens inimitables par l'originalite tout

a

fait opposee de leur

carac-t~re et de leur intelligence, qui faisait valoir l'un par l'autre et elevait, par la contradiction,

a

leur plus grande puissance des esprits d'une si haute porteel Beyle etait

emu

de tout et

il eprouvait mille sensations diverses en quelques minutes. Rien ne lui echappait et rien ne le laissait de sang-froid,

mais ses emotions tristes etaient cachees sous des plaisanteries,

et jamais il ne semblai t aussi ,()'ai que les ,jours ou il eprouvai t de vives contrari6t~s. Alors quelle verve de folie et de sa~essel

• • • Personne n 1avait de plus vives sympathies, mais aussi des inimities plus prononcees: dans ~es ini~ities se trouvait Mme.

Gay ••• (et neliJhine )" (1).

Le comte de Tracy, ideologue et disciple de Condillao et d'Helvetius, laisse une profonde empreinte sur la pensee de Beyle. C1est dans le salon du philosophe que notre journaliste rencontre le r:,eneral La Fayette qu'il admire cormne un "heros de Plutarque'' (2). Il y a lA aussi, assises

sur

un beau divan bleu, quinze jeunes filles, petites-filles de

r..:.

de Tracy et du

seneral

La Fayette, que Beyle met six ans

a

distinguer les unes des au-tres; ces demoiselles sont entourees de leurs pretendants,

Charles de Remusat, Franqois de Corcelles et le peintre Scheffer.

(1)

Jourda, P., Stendhal raconte par ceux qui l'ont vu, p. 35. (2) Souvenirs d'Egotisme, p. 37-38.

(14)

La

se trouvent aussi Dunoyer, Victor de Tracy-fils et sa belle

femme anglaise, Sarah :Newton, ATJ.sustin et Amedee Thierry. l.lme.

Cabanis, dont le mari avait

ete

l'ami intime de Tracy, et sa

, fille haute de six pieds, paraissent aussi dans ce salon. Chez Nirne. Cabanis, Beyle renco~tre Fauriel qui deviant comme Jacque-mont un de ses meilleurs amis.

Fauriel 1 'entraine dans le salon de IJj ss Clarke,

.

"pet)_te pie-crieche

a

demi-bossuett' avec un esprit "comma les cornes du chamois: sec, dur et tordu" (1). Au bout de deux ans une querelle met fin aux visites.

Beyle frequante aussi le salon liberal des Aubernon.

Le defaut

de

ce salon c'est que tout le monde y est du m~me

.

avis. "Beyle parlait assez peu dans ce salon, preoccupe qu'il

etait sans doute d'observer les personnages qui l'sntouraient:

il faisait sa recolte pour payer son tribut 1nensuel

a

la Revu_e

anglaise. Il y avait

la,

d'aille·urs, un honnne qui le r;@nait.

A son oeil de lynx, ~ sa parole incisive, et en raison de ses

opinions spiritualistes, 11. Cousin ~tait reconnu par Beyle, qui professai t 1 'a theisme, pour 1.l.n ennemi na turel sac!lant auss i bien

attaquer que se

defendre.

Pour se venger de la fascination qu'exer~ait sur lui le brillant philosophe, Beyle disait tout

bas de lui:

"Qu 'apres Bossuet, il etai t le plus habile

a

tra5_-ter de la blague serieuse". (2).

(1) Souvenirs d 1Egotisme, p. 53.

(15)

!\lime. Recamier invite a11ssi Beyle de ternps en temps

pour dis traire le "crand ennuyett. Et pour :f"aire contras te,

l'ami Edward Edwards le presente chez son beau-frere, le

doe-teur Edwa.rds, dans un salon arcb.i-bourgeois. T.':ine. ~dv1ards est

trop moralisante au cout de Beyle, mais il estime le sa,rant docteur. f·TR.lQ're 1 'ennui qui rezne dans ce salon, Beyle y est

fidele comme

tta

une ma!tresse laideu (1). Il ne neut se l'expll-quer, d 'autant qu 'on_ 1 'Y prend pour un "monstre de seductionn

et "d'esprit infernal"

(2).

Beyle ne manque jamais,

a

la fin de ses 4ournees, de

faire une visite

a

sa voisine IVfme. Pasta, celebre cantatrice nt-lanaise. LA, il se· retremp~ avec delioes dans l'Rtmosnh~re de

sa patrie d 1adoption.

Lorsque Sutton-Sharpe fait son sejour annuel

a

Paris, un groupe se forme autour de lui

a

la Rotonde: "Nous etions huit

qui d~nions ensemblen, ecri t lierimee,

a

la COlntesse de ~-.Tontijo,

ttBeyle, Sutton-Sharpe, le Gomte de ~.lareste, Koreff, (med_ecin de Beyle) spiritual et debauche, Viel-Castel, diplomate et gastro-nome, Delacroix;- Alfi'ed de ~russet parfois que le champagne ren-dait (sltoul au dessert) natural et amusant." (3)

Comment Beyle se comporte-t-il dans les salons et quelle impression laisse-t-il sur ses amis?

Apres

son retour d'Italie·en 1821, Beyle 6tait taciturne, il r@vait encore~

(1) Souvenirs d'E~otisme, p. 114. (2) iden1.

(16)

TJetilde. Il commence

a

briller vers 1826, pour s 1 eto,,rdir

o

Sainte-Beuve dit qu'"habituellement, Beyle tenajt le d~ et

fai-sait le diable

a

quatre ••• tenait t~te

a

Courier

et

relan~ait

un chacun jusque dans les derniers retranchements de ses

doc-trines n ( 1) • Il ne brille d 'ailleu~rs qu 'au_ 1nil ieu d 'ami s

s~rr1-pathiques, l'hostilite le glace. Sainte-Beuve 1 1a vu ainsi "un

peu ~§ne, un peu sur ses ~ardes, un peu preocoupe de la

disposi-tion

a

son egard de ses interlocuteurstt

(2).

Si Beyle a un besoin absolu de soojete pour aizuiser son esprit et ohasser sa melancolie, le but essential de ses

frequentations est de recolter les nouvelles politiques et lit-teraires, musioales, artistiques et sociales pour les articles

promis aux magazines anglais. Autrefois, il avait ete dilettant~:

il ecrivait pour le plaisir d 1ecrire, oomrae on fume un ci~are,

pour passe1~ le temps. l'la.intenant, il est ,5otirnaliste; il fait

de la ncopien; il doit remplir ses en0'agements

a

date fixe.

Beyle prend son metier fort au serieux. Il se pose la question:

fa,,t-il plaire Ott fau.t-il dire la veri te? Au contralre de ses

ooll~gues fran0a~s, il ne fera aucune concession aux convenances. Il dira la verite toute nue:

"Quel est le degre d'absurdite et de mensonge exige par le redacteu.r en chef?tt se demande-t-il' tf That is the question. Con~e on fin~t toujours par §tre

connu, s 'il fa ut ~tre ridict1le et mentir trop, je

n'en suis pas. Du reste si l'honneur est sauf, je

promets l'exactitude et ~e laisserai tant qu'on

voudra, mutiler mes articles par le redacteur en

(1) Boulanger,

J.,

Candidature au Stendhal Club, p. 12.

(17)

chef, grand _l11,~e de la "9artie des convenances

et des amollrs-propres

a

menager.n ••• "Je me

moque des honoraires mais non pas de

l'honneur.n

(1)

l'·:'lais

comme il

se rend

compte

qu.e sa francl1ise pourrai t @tre

blessante, 11 pr~vient que sa seule intention est ~'§tre impartiol:

n Je crains, ~{1ons ieur, que vous ne tro11vie z mon

ton un peu tranchant; je vous assure que je

cherche seulement

a

~tre

bref et

clair.

Per-sonne n'est au fond plus tolerant que moi.n (2)

Les intentions sont bonnes n1ais Stendhal s 1illusionne sur lui-m~me.

Sa chronique parisienne est le reflet des

conversa-tions entendltes dans les salons, et des pro nos qu 'il tient

lui-m@me. Aussi ne faut-il poipt

y

chero~er de plan precongu: les reflexions sur les lectures, les anecdotes, les critiques, les revendications, les sarcasmes et les admirations se succedent p@le-m~le. Cette forme decousue convient

a

son esnrit plus

apte

aux saillies qu 'aux raisonnen1ents profonds. Aussi n 1

est-i l jamais

ennuye11.x:

1 1imprevu amuse et

ohoqu_e

tout 8. la foi"s o Ses aoces de mauvaise humeur l'emportent souvent sur sa raison, et i~ se permet des remarques irreflechies et injustes qui lui font plus de tort que de bien.

Une

fois

l'artiole

redice,

il

l'envoie

outre-~anche pour ~tre

traduit

en anslais par Stritch tout d'abord, et par

la

suite, par d'autres traducteurs dont

il

n'a pas tou~ours

a

(1)

Correspondance inedite,

vol.

I,

p.

267-68.

(2) Lettre a Stritch, 5

aout

1822.

(18)

se feliciter. Sarah Austin fait exception: c 1est une femme

intelligente, tr~s r~pandue dans. le Paris litt~raire de 1'~­

poque et avec laquelle Stendhal entretient des rapport cordiaux.

Avec les annees, les articles se multiplient et s'allongent. Les annees 1825 et 1826 sont particuli~rement prolifiques.

Les deux-tiers des revenus de Beyle proviennent de

Colburn. Avec les deux cents livres de cette collaboration,

sa pension militaire, les revenus de ses livres et ses colla-borations frangaises, il reussit

a

mener la vie mondaine qu'il

aime,

·a

faire le dand~r,

a

rnanger en r;ot1rmet et surtout A voyar"';er.

En 1826, il fait un troisieme voyage en Angleterre. Son ami

Sutton-Sharpe, un des avooats les plus distingues de son pays, un lettr6 spiritual et ~ai, et un fin juge de la politique,

entra1ne Beyle aux Assises de Lancaster. Ils explorent ensemble le nord de l'Angleterre, Manchester, les lacs de Cumberland et

~sestmoreland, York, Birmingham, Stourbridge ou ils sent requs

dans la famille Rogers, les oncles mdles et femelles de

Sutton-Sharpe. En outre, Beyle fait deux assez lon~s sejours en Italie

en 1823- 1824 et en 1827-1828. En 1829, il visite le midi de .

la France et pousse jusqu'en Espagne.

h:ais oette vie d 'abondance est de courte duree. Des

la .fin de 1827 la malchance semble s 1acl1arner sur Be:rle.

Col-burn espace de plus en plus ses paiements; voici que cesse sa rubrique

sur le

the~tre italien le 8 5uin 1827; sa pension

n1ili taire

est-

redui

te

de moi

tie

en 1828. Ses revenus qlli

(19)

si-tuation deviant veritablement tragique. Sa corres~ondance re-,

vole ses embarras. Stendhal son~e ~ se suicider; il dessine

des pistolets en marp:e d.e ses manuscrits. D 1ao11t

a

sentembre

1828, il ne fait pas moins de huit testaments.

Ses amis se demenent pour lui trouver un emploi.

Amedee

Pastoret, alors conseiller d'Etat et Commissaire du roi

pres la Co~~ission du Sceau fait conferer

a

Beyle le titre de

verificateur adjoint des Armoiries. Ce titre ne lui impose

aucune fonction et il ne para1t jamais dans les bureaux du Soeau. Beyle sollicite la place vacante de la Bib~iotheque Royale du

ministre de l'Interieur. Uais en depit de bienveillantes

recom-mandations la place est donnee

a

Paulin Paris. La belle-fille de Cuvier, Sophie Duvaucel, essaye d 1obtenir pour lui le poste de bibliothecaire d·u Wiuseu.m,

a

la place de Debleuze, mais

oelui-ci ne songe pas

a

demissj_onner. Ce n'est qu'a la Revolution de

juillet, et ,~r~ce aux recommanda tions de ;,Jme. de Tracy aupres

dt-1 due de ~~1ole, que Stendhal obtient 1 'emnloi tant desire, celui de r.onsul de France

a

Trieste, le 26 _septembre 1830.

Sa carri~re de journaliste est termin~e. Une autre

(20)

CF.tAPI'l1RE II

Les Articles de Stendhal

Les premiers articles que Stendhal envoie, adresses

a

M. Stritch,sont des comptes-r~ndus succincts sur les

publi-cations recerr~ent parues, et agrementes de quelques commentaires sur la vie parisienne. Delecluze note qu 1un nirlandais de ses

amis traduisait sa prose, qui devenue an~laise et retraduite en franqais, etait prise

a

Paris par les lecteurs de la Revue b·ri tannique pour les articles ori.sinairement composes et ecri ts

a

Londres". (1) Qui est cet Irlandais dent parle nelecllJ_Ze? On en sait fort peu de chose; il n'est mentionne qu'une fois dans les Souvenirs d'F~otisme.

"Chez Iv1me. Edvvards, (12, rue du Helder) je connus ~- Stritch, an~lais impassible et triste, parfai-tement honn~te, victime de 1 1amiraute, car il

6tait irlandais et avocat, et cependant defendant

comma faisant part le de son honneu.r, les pre ju.ses

sem~s et cultives dans les t§tes an~laises uar 1 1aristocratie". (2)

--M. Stritch avait-il

ete

le professeur de Stendhal comme le

sug-sere

Doris Gunnel? l~. T.:artineau ne le pense pas. Beyle, qui savait

l'anglais tres

incorrectement,ne

semble

pas avoir eu de le~ons depuis le temps

ou

il etait

eleve

d'un franciscain ir-landais du nom de Jeki, vin~t ans auparavant. E. Paupe

renro-(1) Deleolu.ze E.

-J.,

Souvenirs c1e soixante annees, p. 244

(21)

duit dans 1 'I~istoire des oeuvres de Stendhal (1904) une note

autographe de Stendhal

(1)

que son contexte permet de dater d'une faqon assez precise de 1821 ou de 1822. Cette note

in-dique que Stritch Esq., etait

a

Londres, directeur de la

Ger-1nan Review. :M. I'ilartineau pense que Stritch devait avoir des

rapports avec Colburn, propri~taire des principales revues de

I..Jondres auxquelles Stend.hal collabora, que Stri tch etai t m~me

son associe car "il semble que oertains des nombretlX magazines

auxquels Colburn s'int~ressait eurent plusieurs editeurs au

sens franc;ais du mot". (2)

On

est sur que les Lettres

a

M ••••

decouvertes par

Colomb dans les papiers de son cousin, et publiees dans son

edi-tion de la Correspondance in6dite, chez L6vy en 1855, sent bien

adressees

a

ce ~~1. Stritch. Colomb, dans ses pages supplemental-res

a

sa notice, dit que ces articles "avaient probablement ete traduits en anglais par Stritch, co1nme ceux envoyes plus tard

a

Colbu.rntt. (3) Colomb se contente de reproduire ces lettres

sans donner d'indication sur leur sort definitif. Ces

vingt-huit lettres s'echelonnerent du 5 aout 1823 au 28 novembre 1836.

M. Martineau constate que tout le contenu des lettres n'est pas passe dans les articles anglais. Ces lettres ont cependant

l'a-vantage d'~tre originales, de reproduire le style et l'esprit

m~me de Stendhal. On n'en peut dire autant de ses articles

tra-dui

ts

sans

precis io11 et

ave o

lour'deur.

(1) Guillemi11, J.,

p. 319-320. (2) I/Iarti11ea1.1, II.,

(3) Streveno R.C.,

Intermediaire des

Chera~eurs et des

Curieux,

Courrier

an_slais,

Preface,pp.

XVIII et XIX.

Soirees du Stendhal Club, 1904.

(22)

Si Beyle ~e fait allusion

a

Stritch

que

rarement,

le nom de Colburn revient par contra plusieurs fois

dans

sa

corresponclance, surto11t

lorsque

ce

dernier

manque

a

ses

en-:a~ements.

Colburn

ava~-t ete a-r;"0renti-libraire chez 1

Sil1iam Earle

a

Aberr.1arle Street

puis chez

I~Iorgan, 50 Conduit

Street •

Il devint propri6taire de la Morzan's Library de 1816

A

1825.

En

1824

il en

fonda

une

autre, 8 New

nurlington

Street.

Il

edita pour son compte p1usieurs auteurs, et dirizea une

co1lec-tion de 1835

a

1841' Colburn's I.:odern

Standard

}Tovelist. I\Tais i1 s 1occupe plus pa~ticulierement de journalisme. En 1814, il

fonda The 1Tew Tr;onthl7 }'_a~A.zine and TJniversal Register, ou Beyle

collabora assez regulierement.

Il dirigea de 1817

a

1842 The

Literary Gazette.

Il devint

co-proprl~taire

en

1827

de

L'A-thenaeum

ou

Beyle p1.1blia plusieurs seri-es d 1artlcles. Il

fon-da The

Court

Journal en 1828

et

The United Service 1'.1azagine and 1Javal and :,:Iilitary Gazette en 1829. (1) D'ailleurs

c'est chez

Col burn que Stendhal publia en 1818 1 'edj_ tion

de

Rome, ~Naples

et ?lorence--Beyle n'avait done pas d 1u~ ~tre pr~sent6.

Outre les lettres envoyees

a

Stritch, Beyle

ecrit

des

articles

pour le Ne\v lt1onthly T.'Ia~azine and Literary Jou_rnal (2)

edite

par

Colburn. Ils para~ssent dans le Recueil Eistorique ie oette

revue sous le

titre

de Publications

Etrangeres. ~ette gection est consacree A

des

notices

litteraires, des

critiques,

ies

annonces etc.,

tandis

que le

reste du cahier contient les

(1)

Martineau H., Courrier Anglais,

Preface

p.

XIX _

xx.

(2)

The

l'Tew

~~onthl;r J;Iarrazine

and TTniversal

Re_~Zister fonde

en

1814, devint en 1821 The New J~nonthly ~;Tas~zine ~nd Liter~ry

(23)

ttarticles originaux". Stendl1al · inaugure la serie de ces publi-cations 8trangeres. Les comptes-rendus succincts, vu l'espace

1 "' ... m1 . t, e, paraissent regulierement le prenier du mois

a

partir du ler novembre 1822 jusqu 'au ler janvier 1826. i'~pres 1826, oes

articles s'espacent de plus en plus; il n'en para1t qu'un en 1827 et c'est le dernier. Il y a, en tout, trente-six notices,

d'apres M. Martineau.

At-1 1Te1JV 1/Ion thly J..Iagazine, Beyle envoie e,;alernent

tren-te-oinq articles qui paralssent mensuellement (avec quelc:,J.e ir-regularite cependant) dans la section des noriginal Papersn du

mois de septembre- 1824 au 1nois d 'aout 1829. Ces articles sont

intitules: Sl{etches of Parisian Society, Politics, and

Litera-Beyle col·labore aussi au London JVIagazine (l) pour

le-quel i l ecrit onze articles de critique SUl~ des livres recemL1ent

parus, des etudes sur les moeurs et les litte~a~ures franqaise et italienne. Ils paraissent tres irregulierement du 30 novem-bre 1824

a

octobre 1826. En outre, il compose une serie de

douze articles signes P.:t~ .D.G. (peti t-neuveu de Grinnn) sous le

titre de Lettres de ?aria. Ce sont des articles assez

cons~-quents, d'une trentaine

de pages chacun, qui

traltent

des

evene-ments du mois. Ils paraissent regulierement de dece~:ilire 1e24

a

novewbre 1825 et sont dates du 18 de chaque mois.

(24)

Colburnl paye au debut oinq11ante 1i vres pour trois ar-ticles, mais etant en mal d'argent, ses paiements deviennent in-termittents, ce qui cause de graves inquietudes

a

3tendhal qui depend de ce revenu pour vivre. Vers la fin de 1826, une que-relle s'ensuit entre les deux hommes et en fevrier 1827 Colburn assure qu'il n 1a pas l'intention nde deranger M:. Beyle pour de nouveaux articles" (1) et qu'il considere les deux derniers de

janvier et de

fevrier

comme des supplements aux envois de 1826.

Stendhal ecrit encore deux articles en mars et en avril et

sus-pend temporairement ses relations avec le lJew Iv1onthly Tv!:agazine

pour ne les re_prendre qu 1en avril 1828. Colburn veut renouer en mars L827 en payant quatre guinees, mais eohoue parae qu 1il doit encore mille francs

a

Stendhal.

Stendhal tente de s'aboucher

a

une .autre revue et

de-mande

a

son ami Sutton-Sharpe de lui trouver un autre editeur: "Com.vne tout peut se rencontrer dans oe monde,

m§me un honn~ta libraire,. et que vous puissiez

faire un ar~angement pour moi, je quitterais

avea plaisir Colburn, qui, pour payer tous les

trois mois, se fait tj_rer l'oreill~"· (2)

Il s'adresse

a

1 1Edinburgh Review qu'il admire beauooup mais

sans suo

cas.

Il note en 1816 que la decouverte de l-a Revue

d'Edimbourg est nune grande epoq1le dans l'histoire demon

es-prit" (3). Il essaie la Literary Gazette, la Vvestminster

Re-view, et finit par faire des arrangements avec 1 1Athenaeu~ en 1828, qui vient de se fender. (4). Six articles paraissent de

(1) Gunnel D., Stendhal et l'Angleterre, p. 167o

(2) Correspondanoe, 23 mars 1828.

(3). Souvenirs d 1Egotisme et Lettres ineditas, p. 229.

(4)

The

Athenaeum London

Literary

and Critical Journal.

(25)

fa~on irr.eguliere entre le 5 fevrier 1828 et le 21 janvier 1829.

C'est ·qu'entre

temps Stendhal

a renoue

avec

le

l~ev1 I,!~onthly

Magazine et se trouve surcharge de besogne. Il envoie

a

cette

revue une serie de quatre articles sous le titre de:

La

Socie-te

et la Litterature de France par 11n habitant de Paris, du 5

-mars 1828 au 30

avril

1B28. Le 3 avril 1828 para!t un article intitule: Les The~tres de Paris, puis

vient

une

serie

de

qua-tre nLetqua-tres

de Paris", signees F. du29 octobre 1828 atl

24 d_ecembre 1828, enfin deux articles sous le titre de

"Memoi-res

de Vidcoq" des 7

decembre

1828 et 21 janvier 1829.

Certains articles du

London

~vfagazine et

du

Nevv 1'1onthly Magazine sont retraduits

en

·frangais

et

publies dans

la

Revue britannique, feuille mensuelle publiee

a

Paris.

Le 15 de ohaque mois, des articles de Stendhal pa~

raissent aussi dans le ?aris Monthly Review (1),

fonde

en 1822.

Cette

revue reimprime

les meilleurs articles qui viennent de

parattre daps les magazines anglais,

pour

le benefice des Pari-siens et de la colonie anglo-saxonne habitant la capitale.

Certains de oes articles sont des originaux. De janvier 1822

a

mai 1823,

Stendhal

pub lie dix articles en fi'an~ais. Ils traitent de la musique de Rossini,

du

the~tre etranger, de peinture, de

philosophie

et

de

la litterature italienne,

etc.

Tous oes articles sus-mentionnes,

a

1 1exoeption des lettres

a

Stritch dont

·on a

conserve les

originaux,

ont

ete

reu-nis

et traduits de main de ma1tre par 11.

l.Iartineau

et

ses

col-{1) The Paris 1fonthly·

Revie¥1

of British and Continental Literature by a

Society

of·English Gentlemep, de jan-~ier 1822

A

janvier 1823.

En

f~vrier 1823

11

(26)

laborateu~rs: 1\U'JT. Robert Sa~e, Jacques-Fernand t;ahen, John

1/Ieyer et 1'i!lle Isabelle Bo,1wens, et pub lies dans dans la

Gollec-t1on du Divan, 1935-1936. Ces Articles avaient ~t6 si~nal~s

-par Colomb, recherchcs ~ar I'.r,.iss Doris Gunnel. Tt1. R.obert Vigne-ron denuis lors a indique de nouveaux articles et il est fort

nossible qu'il yen ait encore

a

decouvrir.

M. Robert Vigneron

(1)

a d6cele les caract~ristiques

stendhaliennes dans d 1autres articles du London Magazine et du

ttsa recolte de r.etits faits \Traistt et envoya au l'Jew ITonthly

J.Ta.~;azine, a'l1.Quel i l collaborait deD'l~J.s c1et1X ans, une serie de

"Let tre s de Rorne" ;

I. nLetter from Rome. Roman Puppet Shovvs". 1-Tev.r T·Ionthl:r

tia.g-azine XI, Se-_oternber 1st, 1824. "'l;J. 269-76. (sir~nee B.) (2)

II. nLetter from Rome!f. ITo.

rr:

lTev1 !~onthly TTa~~azine,

1Jov. 1st, 1824, pp. 467-72, (siPnee B.) -r11e traite des debuts

du cardinal Annibale de lJ e '+en.~"a, c ouronne pape sous le nom de

Leon XII. (3).

III. nLetter from. Romet. 1Jo. III. 1'Tev1 I·:ontb.ly l1Tagazine

XIV, July 1st, 1825, pp. 33-39, (si?n~e R~), sur la stu~idit~

et la brutalit~ des voya:eurs an~lais en Italie et la soci~t~

romaine. ( 4)

IV. "Letter fro!'.1 Rome". i'Jo. IV. I'Tev; l1onthl:r -:-,~ac-azine

XIV1 Sept. 1st, 1825, pp. 243-48 (sign6e V.~.) sur la vie

( 1)

( 2)

(3)

Vigneron R. Du Stenrlhal re trou.ve ." 1.Tnclern P11"~ lolosy, vol 30,

1932-33.

Pages d 1Italie, Po 195o

1Jfanusorit decouvert "9ar r·r. C!h11quet. l:~elan~es cle PolitiC1,,_e

(27)

de Scipion Ricoi. (1)

Dans le London Magazine, auquel Beyle envoya des articles des novenibre ~824, I'.1. Vignero~ a o.ecouvert une

Let-tre de Rome -publiee en j"uillet 1825, inti tt1lee: "History of

the Last- Conclaven, (London l{agazine, J11l~r 1st, 1825, pp. 321-332); una Lettre de Rome, intitulee: "On the Present State

of Italian Literature", (Sept. 1st, 1825, pp. 36-45); una Let-tre de Rome sous le m~me ti-tre (London 1\IIagazine, January ls

t,

1826' pp-. 18-26) •

Ces sept lettres seraient la somme des observations

politiques, sociales et litteraires faites par Beyle·lors- de

son voyage de 1823-24 en Italie, et auraient ete plus tard

uti-lisees dans Rome, l'Japles et Florence, et les Promenac1es dans

Rome. Un autre groupe d 1articles sur la France pourrait

s'ajou-tar aux nLetters from Paristt

a

cau_se cles remarques poli tiques, sooiales et l i tteraires qu 'elles contiennent: "liien, !·-~:·easu~es

and lvfanners in France at the Opening of the s·ess ion of 1825n, (London Magazine, Feb. 1st, 1825,

pp.

157-83) traite de

la

si-tuation politique et morale de la France

a

l'avenement de Char-les X.

"History of :Napoleon and the Grand Army 1812, by

General

Comte Philippe de

Segur".

(London

Magazine,

Feb. 1st, 1825, pp. 205-24).

nr~1emoirs of ·1v!me. Haussettt. (London l./Iagazine, Wlaroh

(1)

New

Nfonthly

~~1agazine No.

IV,

Sept.

1st, 1825 Vol. II

(28)

1st, 1825, pp. 434-46).

"Ptaesent

French Prose

Literaturen.

(New

London

Maga-zine

XIII, June

1st,

1825,

pp.

581-8~.

La similarite

des

idees, la tournure d'esprit et le

style sent autant de preuves que M. Vigneron

avance

en faveur

de

l'authenticite

de ces

articles.

"La

collaboration

de Beyle

au

.New J~;Tonthly Magazine et au London r.1agazineu ajoute-t-il dans

sa

conclusion, unous appa·ra1t

done pour 1824 et 1825 connne

beau-coup plus abondante et plus

variee

qu'on ne

l'a

cru

jusqu

1

a

present.

·Des 1824,

au New Montply Magazine, tout en continuant

ses

oomptes-rendus

pqur

l'Historical Register,

il

s'introduit

avec

las

·pre·mieres

"Letters of Romen

et

ttpresent French Prose

Literaturen.

En m~me

temps,

il entre au London Magazine

et,

en

1825 ~

s

1y

etale:

dans se·s

"Letters.

from

Paris", dans ses

oomptes-rendus

de 1 'Histoire de

la

Grande Arm.ee,

des

Memoires

de Mme. Hausset, de 1

1Etrangere, des Proverbes

dramatiques,

du

The§tre de

Clara

Gazul,

i l

fait la.

chronique

de la

vie

li

tte-raire;

dans

ttiVIen,

l\r1easures

and ~Iannersn,

il

se

lance dans une

etude

politique et sociale de la Restauration;

dans

les trois

'Lettres ·de Rome'',

il touche

a

1

'histoire diplomatique et

lit-teraire de l'Italie; bref, cette

annee-la,

sur

1800

pages du

London Magazine, plus de 200 lui reviennent.

Si bien qu'en

1824 et 1825,

o

1est

de M. Stendhal masque et d'autant

plus

im-pertinent, que les dignes lecteurs des plus importants magazines

anglais regurent

la

plupart de

leurs

idees sur

la

France

et

1 'Italie: et quelles

ideesl" (1)

(29)

Si l'on ajoute

a

cette production importante les

articles oooasionnels que Beyle eorit pour les journaux

fran-oais tels que le Mercure de France, la Revue Trimestrielle,

Le Courrier Frangais, Le Globe, ·Le National, Le Temps et la

Revue de Paris, et la

publication

de plusieurs

de_

ses

oeuvres

entre les

annee~

1820 et 1830 telles que:

De l'Amour, 1822,

La Vie de Rossini en 1823, Rome, Naples et Florence, en 1826,

Armance en 1827, promenades dans Rome en 1829 et le Rouge et

t

le Noir en 1830, on aura una petite idee de l'activite

prodi-gieuse de Stendhal au cours de ces dix annees.

(30)

CIIAPITRE III

Les Jugements de Stendhal

sur la Politique de la Restauration

La politique passionne Stendhal. C1est un interet

qui l'arl'l_ache

a

son ennui • . Lorsqu 1en 1821, il fut tente de se bruler la cervelle, il declara que nee fut la curiosite politique qui l'erap~cha d 1en finir". (1) Cette preoccupation se retrouve dans toute son oeuvre et il est rare que ses

ar-ticies aux magazines anclais ne fassent pas allusion aux

eve-nements du jour. "La poll tique au milieu des5 inter@ ts d'

in1a-gination, c'estun ooup de pistolet au milieu_ d'un concertn, (2)

le

brult

en est desagreable, mais il retient l'attention. Pourtant, 3tendhal n'est pas ambitieux; est-ce par paresse, est-ce par depit, est-ce par horreur des conventions? Il dit avoir refuse

a

Jv1. Beugnot une prefecture q·u'il lui of-frai

t•

"Je serais offj_cier de la Legion cl'Hon11eur, mais j 1aurais passe trois ou quatre heures

par jotlr

a

ces platitudes d'alnbition qu'on

decore du nom de po]~ltiquo;-"-j'a11rais fait beaucoup de ·demi-bassesses, je serais pre-fe t du rvians. tt (3)

Il ne cb.erohe pas non ·plus

a

oo~struire 1J.n sys teme poli tique; i l en eut

ete

incapable; i l fait plutot c_e l 'analyse politique. C'est un dhrbniqueu~ qui ()bserve aveo perspioaoite

(1)

Souvenirs d'Egotisme, Le Divan p.

s.

(2) Le Rouge

e~

le Noir, Le Divan,'Vol. II, p. 189.

(31)

et

real1'sme et qui commente.

Il sonde les mobiles du coeur

hu-main car

nsa

grande affaire c'est de ne pas se tromper" (1).

Malgr·e sa

constante recherche de

la veri

te, il

n

'est pas

impar-tial--l'est-on jamais?--parce qu'il est affecte par des

pre-jug~s

de jeunesse

qui

ne sont pas du ressort de l'intelligence

mais de l'emotion, et ce oonflit entre la raison et le

senti-ment est un des aspepts de son beylismfJ.

Au milieu des arabesques oompliquees de sa pensee,

un trait domine tous les autres, c

1

est le liberalisme.

C

1

est

ce que cette etude va tenter de faire ressortir. Stendhal hait

le despotisme sous toutes ses forme_s:

le despotisme imperial,

le despotisme des. Boul ... bons, le despotisme du olerge.

Stendhal admire Napoleon-general

parae

qu

1

il

person-nifie son

ideal

de l'energie.

Cette energie qui anima les

violentes passions de la Renaissance et les grands hommes de

la Revolution:

Danton

a

la stature gigantesque, Carnet,

N~e.

Roland,

s'e~t

eteinte durant la Restauration.

Il aime

~ana­

parte aveo

una

ferveur religieuse et ne pardonne ni

a

1we de

Stagl

ni·a

Ch§.teaubriand leur hostilite envers son heres.

C'est pour repondre aux attaques de oette derniere dans ses

"Consideration sur les prinoipaux Evenements de la Revolution

fran~aise",

1818, qu

1

il eorit sa Vie de Napoleon, parue en 1837.

nJ'eprouve une soi•te de _sentiment

religieux en

ecrivant

la premiere phrase de l'histoire de

(32)

"Napoleon.

Il s 'azit, en effet, d.u. plus

crand

homme qui ait

paru dans

le monde depuis

Cesar."

(1)

Ce

culte

n 1

aveugle

pas Stendhal

cependant:

"L'amour pour Napoleon est la

seule passion

qui me soit restee; oe qui ne m'emp~che pas de voir

les

defauts

de

son esprit et les miserables faiblesses qu 1on peut lui reprocher. Zn 1797

on pouvait l'aimer aveo passion et sans

restric-tion; il n'avait point encore

vole

la liberte

a

son pays; rien d'aussi grand n'avait paru depu.is des sie ales. n (2)

C'est le general qui mena ses

armees

de victoires en victoires et que Stendhal suivit en Italie, qu'il venere; et c'est l'em-pereur despote et ambitieux qu'il mepl~ise:

"J'aime

tendrem611t

le heros, je meprise le des-pate donnant audiel109

a

son chef de police .n (3)

Il

reproche

A

Napoleon-consul d'avoir exile Moreau, assassin~ le due d'Enghien, violente Volney, retabli le Concordat. Il

hait

lJapoleon-empereur pour avoir rappele les jesultes.

"··· Le retablissement du culte catholique en France ne decouvre pas un des meilleurs cOtes du caract~re de Na~oleon. Cette

me-sure amen.a la restall.ration des jesuites." (4)

Il meprise les basses flatteries que l'Empereur prodigue

a

l'an-cienne noblesse. En 1802, les roJralis tes n 'etaient nullement

redoutables mais ils le sont devenus lorsque Napoleon a

restau-re

le

trone.

Ce

dernier area

ainsi "le

parti qui le

renversa".

(5)

Il

lui reproche son manque d'~ducation, sa vanit~, sDn

am-bition

personnelle:

(1) Vie de

Napoleon,

cl1. I, p. 1.

(2) Vie de Napoleon, Fragments, Preface, p. XIII. (3) Chuquet A., Stendhal-Beyle, p. 368.

(4) New Ivlonthly ~n:agazine, mars 1827, vol. III, p. 316. (5) New ~.Ionthly

JY1agazine, avril

1827, vol. III,

p. 334.

(33)

"l'!apoleon sut se faire obeir cormne eenere.l,

mais i l ne sut pas commander en roi et j'at-tribue l'imperfection de son genie

A

l'absen-ce totale d 1education premiere". (1)

"Il ne savait que les simples faits appris au

College de Brienne,

ou

le systeme

d'instruc-tion

e

tai

t

execrable. n (2)

Il lui reproohe son despotisme, l'etablissement de la censure,

de la police par orainte du jacobinisme:

"En France, le despotisme de ~Ja.poleon etait

plus venenoux; il craignait les livres et le souvenir de la republique, le seul que

le peuple ait garde, i l redoutait le vieil

entl1ousiasme des jacobinsn. (3)

Napoleon tua l'esprit de liberte en France:

ttLa liberte n 'a pa~

a

pleur.,er un honune qui

etait son ennemi non seulement par

princi-. . . t. t" ( Lt)

pe ••• ma1s aussl ••• par 1ns 1no • • •

Par contre Stendhal reconnait que Napoleon area un

mouvement de liberte en Italie. Celle-oi a benefioie de

l'Em-pire plus que la France.

Done, en 1825, Stendl1al brule 1 'idole qu 'il a11ai t

adoree. Il voit m§me dans le generalglorieux un danger de

mi-litarisme:

nQuelle chance que les r.ranqais aient perdu.

la ba taille de VJa terloo l Si 1Tapoleon avai

t

ete .vainqueur, nous serions encore des

louP-.dauds, eblouis par la cloire militaire,

oom-me rious 1 1

§tlons

en 1812. Les j§suites nous

tyrannisent ••• I Sous Napoleon q 'eut

ete

le brigadler-g~n~ral qui eftt accablG ohacun

d'in-solences

et.d 1injures, m~rne le maire, qui, apres t-out, n'est qu 1un pekin." (5)

(1) Vie de rTapolcon, p. 62. Le b:t,ran.

(2)

lJew

lv1onthl~r l.Ta[Sazine, avril 1827, Vol. III, p.

335.

(3) Rome, lJaples et Florence, Vol. I, p. 178. Le Divan.

(4)

New

Monthly

Magazine,

ler avril 1825, Vol. II, p. 151.

(34)

La France peut

se

feliciter d'~tre

debarras·see

de "la

lepre

militaire". (1)

Stendhal constate que le bonapartisme disparait. "L'illusion qui nous a fait consid~rer

Bona-parte

oowme le

parfait modele

du heros

eminem-ment

utile

a

la

France, a

au~ourd'hui disparu

ou n'a plus d'empire que sur l'esnrit des

bou-tiquiers et des lieutenants •.• ~en _demi-solde." (2)

Le heres jacobin est devenu un parvenu, le defenseur de la

Re-volutio~un tra1tre. Ces derniAres remarques refl~tent l'oni-nion qui r~gne autour de Stendhal

vers

1825 et que oelui-ci ·adopta~~ peut-@tre 1J.n peu lAcheraent, car, au fond, il conserve

toute sa vie sa flamrne d.es premiers jours.

On peut dire que la haine du despotisme des Bourbons

d§:te de la tendre enfance de Be~rle. Ce

sentiment

violent

etai

t lie A sa haine d'enfant pour l'abb~ Raillane, son precepteur,

pour

sa

tante

Seraphie et

pour son pere qui

tous trois incarnaient

1 'ultra-conservatisme.

l{e dans une famille

mi-aristocrate,

1.1ltra-royaliste, d'avooats et de

magistrats distingues, Henri

prit

l'ha~itude, qu'il

conserva,

de dire et de faire le contraire de

oe

que r~clamait l'autorite. Par centre, le jeune rebelle ad-mirait son grand-pere maternal, Henri Gagnon, disciple de

Vol-taire

et

liberal, et dent l'influence fut considerable sur la formation de son esprit. Il

nous dit,

dans

son Journal,

que

tout

enfant, il avait applaudi

A

la nouvelle de l'execution de

(1) London Magazine, aout 1825, Vol. V, P• 130.

(2)

idem. p. 126.

(35)

Louis XVI et qu'il aimait

a

voir les soldats republicains re-venus d'Italie attacher leurs chevaux sous la fen@tre grillea

de

la

maison paternelle.

Plus tard, de 1806

a

1814, Beyle avait joui d'une si-tuation enviable corrn:ne auditeur au Conseil d'Etat, gr§.ce

a

l 1

in-tervention du comte Daru. Il connut le prestige, avait sa

voi-ture

a

Paris et rencontrai t la noblesse. La ·chute de TTap_oleon

mit fin

a

cette opulence. Il n 1est done pas etonnant qu'a sa

haine des Bourbons se ~reffe le depit d'§tre retombe dan~ la

me-diocrite.

Sa haine s'etend

a

tousles Bourbons, excepte Henri IV

qu ' i l admire Dour sa tolerance, ses vertu.s P:1Jerrieres et son e

s-pri

t.

Il meprlse Louis XIV po·ur son despotisme, quant ~. Lou.is

XVIII, ttle ~ros Louis XVIII avec ses yeux de .boeuf, traine len-tement par ses six gros chevaux, que 5e renoontrais sans cesse,

me faisait particttlierement horreur" •' (1) Louis XVIII a la na~-vete de croire au droit divin des rois, apanage reserve

a

quel-ques familles seulement, dont lea Bourbons et les Habsbourgs.

Il pense que l'intellizence et le talent sont des signes de

ja-cobinisme, tandis que le due d 11\.n~oul§me, que Stendhal menage, encouraae le m~rite. Il est regrettable que oe prince vertueux

'_/

soit entoure de gens sots et ignorants, oar il montra du

carac-tare, du cot1rage et du bon sens lors de la oampagne d 'Espagne qtl'il dirigeait. La duchesse d'Angou.l§me a du bon sens aussi:

(36)

elle a reolame

A-

un dtn~r

a

Bordeaux, la presence d'un offioier qui avait

ete

ecarte

parae que son pare avait vote la mort de Louis XVI; elle s'ennuie

a

la cour car il

n'y

a pas salon plus mortal -A Paris que oelui de la cour; elle ose parler poli tique; elle ose se moquer des niaiseries de Sosth~ne de la Rochefoucauld,

de la devotion de Mathieu de Montmorency et elle demande souvent: nQu'a fait le mari de telle duchesse?u. (1) Elle fait preuve d'une independance d 1esprit exceptionnelle. La duchesse du

Barry est charmante aussi par la vj_vaci te ·de son teraperament et de ses reparties.

Charles X, au debut de son regne, est mains imbu de ses droits divins que son frere, et il charme par son amabilite. Mais l'opinion de Stendhal change; il reproche au nouveau roi la domination grandissante du clerge et des jesuites en particulier, sa devotion hypocrite, le regime de la censure qui oondamnait au B~ranger d Sainte-P~lagie. Il lui reproche pardessus tout son

despotisme qui encourage la venalite et la veulerie d~s ambitieux: rtDans un pays despotiqu_e comme la France, le

carac-tere personnel du souverain,, qui dispose d 1un bu.d-get d'un milliar~ dolt materiellement influencer le ton du gouvernement". (2)

Les deux Ghambres ne sont etablies que depuis dix ans cependant la Chambre des

Deputes

a deja ete achetee et vendue. Elle est un

ndes soutiens les plus

surs

du pouvoir absolu. Elle sert A leurrer le peuple au moyen d'une

ombre de liberte. Le vote des impots, par -eeux-m~mes qui vent en partager les benefices,

quoi-(1) London Magazine, ler fevrier 1825, Vol. IV, p. 73.

(37)

uque cette farce puisse, jusqu'a un certain point, contenter les niais de la nation et

les

~ens

a

courte vue, fournit en m~me temps

aux

ruses et aux rapaces un honn~te

pretexte

de se vendre". (1)

Stendhal ne tarit pas d 15nvectives cnntre 1 1

influ-ence du clerr~e et des jesu-i_tes. Son ant~_-clericalisme

ctate

au.ssi de son enfance. Sa haine est une hantise. Il

de

testa

les deux abbes qui furent ses precepteurs, surtout la

ntyran-nien Raillane:

nlr. Ralllane, comme un vrai journal

r!'l.iniste-rjel

de

nos iours, ne savait parler que des

dangers de la liberte11 ... (2) · ·

L'athetsme de Beyle a sa source dans 1 'hypocrisie relirrieuse

de son entourage. Un jesuite est l'incarnation de l'hypocrisie,

de l 1i:?:'norance, du fanatisme. ~t pl,_is i l est anti-liberal.

Stendhal constate, non sans

indignation,

que si le

cou-vernement

de Lo1.1is XVIII

avai.t

pris une attitude tolerante

a

l'egard des 5esuites,

par centre Charles X leur

est

nettement

fa-vorable.

Stendhal

s 1

alarme

de

1

'ascension vertigine11se

de leur

puissance.

Ils s

1

infiltrent partout:

ils envahissent

la

Cham-bre

des pairs; ils s

1

ornent des plus

beaux noms:

l'abbe de

Ro-han, le due de f:Iontmorency ••• et

"leurs chefs sont parmi les plus ~A.biles honnnes

de France:

l'abbe de Lamennals, LI. de

Lat-i_l,

confesse1J.r

du

roi,

1

'abbe

Rous in,

chef des

je-sui te s

a

Parj_s 11 • (3)

Le1.1r infl11ence

penetre dans

les salons du Fa,,o0,Jrr!" Saint-n-ermain.

(1) Lond_on J..~a,~azine, ler fevrier 182€', 'rol. IV, Po 75.

(2)

Vie

de Henri

Brulard,

Le Divan,

Vol. 1, p. 110.

(38)

La con~r~~ation s'organise dans chaque ville o~, au dire de Stendhal, elle se divise en trois sections: cella des hpberaux, a·vec l.ri. Ferd:tnand de Serthier,

a

la t~te des jesuites

de robe oourte; celle des "Bonnes Etudes" pour "raccoler les

etudiants en droit et en medecinett; celle enfln du "peupl.e,

dont le but est de faire des adeptes parmi les nomesti_q_ues et de les er;~loyer

a

espionner leurs

mattresnl

(1)

Les positions dans !'administration sont accaparees

par les jesuites. Stendhal affirme que la moitie des prefets sont des .jesuites de robe courte et "le dann-er c 'est qu 'ils se

consid~rent comma independants de la loi qua~~ leurs cap~ices

ou leurs inter§ts sont en jeu. Les crimes les plus atroces de-meurent imp1..1.nis qu~and ils ont ~our aute111" les men1bres du clerge.

Plus leur pouvoir augmente, plus leurs pretent~ons deviennent audacieuses: le clerge reclame l'independance de l'Etat

par

1 'acqu.isi tion des biens mobiliers; i l demande la remise rJes

re-I

gistres civils; il se r~serve les droits ~e sepulture. Stendhal

envisage -cette dor1in8.tion d 'un tres ma11~Tais oeil, car elle si-~nifie la mort O.es lihertes indi viduelles acquises ~nr la

rev()l.:,_-tion et garanties par la Charte. L'ing~rence du r.ler~e dans les affaires de l 1Etat, ~-son avis, ne peu.t §tre que nefaste au_ gOUVSrnement

At ;)

la nation.

Comma

l'esprit de la revolution n'est pas mort,

Sten-dhal craint que le peuple ne se souleve de nouvea1J s~- on 1

(39)

pere. Que devienc1_ra la France qui n 'est pas religieusG, le jour

ou

les jesuites gouverneront?

"Le s alarmi s te s affirn1en t qu ' i l y aura une 3t1erre civile et que la granc1e raajol'"'ite de la poptllation se fera protestante." (1)

IJa lutte du clerge est celle de vie ou de mort. La perspective de desordre serait mains

a

redouter s'il existait J un sentiment religieux en France, si le bas clerge etait mains ignorant et si les j~suites etaient mains machievaliques et malhonn§tes. Les consequences de cet etat de chose .c'est qu'il n'y a plus de liberte, plus de justice.

"Les heretiques du jour, qu:_ sont des honnnes de lettres, ne sont point expedies au bucher mais seulement

a

Sainte-Pelagie ou

a

la

pri-son de Poissy; la ils sont enfermes dans la

m~1ne piece que la lie de la societe avec des galeriens non seule1nen t moralemen t, mais

phy-sique:'1er:t repoussants de salete et de maladie." (2) Stendhal voit l'opposition centre les jesuites 1non-ter comme une vagu.e de .fond. Il suit avec un inter§t passionne les phases de la· lutte. Ses syrnpatb_ies vont nettement aux

de-fenseurs de la Charte; i l se lance dans la pol~mique avec sa

fougue coutun1iere. I l fonce sur le clerge et le gouverne1nent aveo une virulence, une temerite qui ne devaient pas manquer d'etonner et de scandaliser ses lecteurs d'outre-lianche.

L'opposition se manifeste par la voix de quelques per-sonnalites qui osent s'elever contre les jesuites. Stendhal

men-(1) London hla~azine, f~vrier 1825, Vol. IV, p. 90. ( 2) idem, p. 78.

(40)

tionne I.1I. Dun1esnil, .janseniste, qui revele les iniquites des

bons peres, les basses flatteries que l'abbe de Lamennais et

1~1. de 0 0Ulogne

(le calant ev@que de Troyes) adresserent

a

}Ja-pol~on; M. S~guier, president A la Cour Royale de Paris, qui reuss it en juille t 1826

a

faire rendre un arr§ t c ontre la

pagnie de Jesus. L1.Abbe de Pradt eorit sur les jesuites; T\.1r. de lviontlos ier a fait sensation par son a ttaque centre eux. I l a publie: IviEnnoil'les

a

cons1:t.lter sur un sJTsten1:e religieux et

poli-tique tendant

a

renverser la religion, la societe et le

trone.

L 1auteur montre

ttle danger que la France .encour·rait si les jesuites s'emparaient du pouvoir; et le bonheur dont nous jouirions au ,

contraire sous une triomphante noblessett. (1)

NI. de 1-.Iontlosier a oblige la Cou.r H.oyale de Paris

a

prendre po-sition centre les jesuites et toutes les cours royales de

Fran-ce

imitent

Paris.

"J1.ttaquer les jesuites en 1826n, ••• c 'est "reolamer le re1naniement comnlet c1e 1 'ad-ministration inter ieure du paysn. (2)

Stendhal note que l'opposition s'empare des publica-tions; on r eimpr irae Vol taire (clouze editions ) , l\ous seau ( tre

i-~ditions), Diderot (trois ~ditions), d'autres encyclop~distes, Ba-belais, le rrart1..1fe de Iviol5_ere. L'imprimeur Beaudoin a

sagne

en-viron dix mille francs en deux 1nois en ~lencLan

t

ce tte piece cinq sous.

IJ'oppos:ttion se manifeste surtout par la voie des journaux, car la liberte de presse est cqnstamment menaoee. (1) Ne\'V Monthly t;a,3azine, avril 1826, Vol. III, p. 8.

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