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La libéralisation des télécommunications dans l'union européenne /

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(2)
(3)

Institut de droit comparé

Université

MeGOt

LA LIBÉRALISATION DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

DANS L'UNION EUROPÉENNE

Mémoir'! remis à la Faculté d'études supérieures et de recberches en vue de l'obtention du diplôme de Master ofLIIWS

AoOt 1999

(4)

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REMERCIEMENTS

Je tiensàremercier :

• mes parents et ma famille, pour leur aide et soutien tout au long de mes études et plus particulièrement dans le cadre de ce programme deMaster ofLaws,

• le professeur Richard Janda, qui a bien voulu superviser ce mémoire, pour ses conseils et son extrême patience,

(6)

RESUME

L'ouverture du marché des télécommunicationsàla concurrence qui est intervenue depuis le début des années 1980 peut être expliquée par une combinaison de facteurs. D'une part, les gouvernements ont reconnu que le maintien des monopoles nationaux sur le secteur devenait réglementairement impossible et économiquement inefficace, du fait notamment de certaines révolutions technologiques. D'autre part, la libéralisation s'inscrit dans un mouvement d'ouverture globale des marchés, concrétisée sur un plan international par la création de

raMe.

Au niveau européen, la libéralisation correspond aux objectifs fixés dans le Traité de Rome.

L'introduction de la concurrence dans le secteur des télécommunications, dans un contexte de convergence des secteurs des télécommunications, des médias et des technologies de l'information, se révèle en pratique extrêmement complexe. La nouvelle réglementation doit trouver, à travers la définition des conditions d'interconnexion entre les opérateurs et le maintien d'un service universel, un équilibre entre les intérêts divergents des opérateurs historiques et nouveaux entrants d'une part, et des utilisateurs privés et de la clientèle professionnelle d'autre part.

(7)

OUTLINE

The opening of telecommunications to competition since the beginning of the 1980's has several explanations. Governments bave acknowledged that the regulatory preservation of national monopolies had become impossible as well as economically inefficien~ notably because of certain technological revolutioDS. Liberalization of telecommunications must a1so be seen in the context of a global opening of markets, of wmch the most obvious manifestation is the creation of the WTO. At the European level, liberalization is the logical consequence orthe Treaty ofRome principles and objectives.

Introducing competition to the telecommunication sector proves to be extremely difficult in practice, especially in a context where telecommunication, media an information technologies industries converge. The new regulation must find,through the definition of interconnection conditions between operators and the preservation of universal service, an equilibrium between the conflicting interests of mcumbent and new operators, and those ofprofessional and residential customers.

(8)

TABLE DES MATIÈRES

REMERCIEMENTS 1

RÉsUMÉ 3

OUTLINE 4

mITRODUCTION 8

PREMIÈRE PARTIE: POUROUOI OÉRtGLEMENTER LES

TÉLÉCOMMUNICATIONS? 10

TITRE PREMIER LES ENJEUX ÉCONOMIQUES ET LES BOULEVERSEMENTS

TECHNOLOGIQUES 11

CHAPITRE PREMIER LA RÉGLEMENTATION DES MONOPOLES NATURELS 21

Introduction Quelques principes de la réglementation 21

Section 1 La notion de monopole naturel 23

§ 1 Définition 23

§ 2 Les objectifs de la réglementation des monopoles naturels 2S

Section 2 Méthodes de réglementation 27

§1 Le contrôle des bénéfices ou"rate ofreturn regu/ation" 28

§2 Le plafonnement des prix ou"price·caps regulation" 28

§ 3 L'octroi de franchises 29

Section 3 L'abandon de la réglementation 29

§ 1 Un choix stratégique de la libéralisation 29

§ 2 Les critiques de la réglementation traditionnelle 31

§3 Appréciation de ces critiques 33

CHAPITRE DEUX LES ÉVOLUTIONS TECHNOLOGIQUES 3S

Section 1 Nature des évolutions technologiques 35

§1 La révolution des hauts débits . 35

§ 2 Le contournement des réseaux 40

§ 3 Le développement d'alternatives au réseau filaire 43 Section 2 Les conséquences sur les marchés longue distance et local 44

(9)

§1 L'ouvertureàla concurrence de la téléphonie longue distance: le démantèlement d'AT&T 44

§2Le marché local est-il concurrentiel? 46

TITRE DEUX LE CONTEXTE INTERNATIONAL 53

CHAPITRE PREMIER LA LIBÉRALISATION MONDIALE DES TÉLÉCOMMUNICATIONS53

Section1Structure du GATS 54

Section2L'accord sur les services de télécommunications de base 55 CHAPITRE DEUX LA POLmQUE COMMUNAUTAIRE DELIBÉRALISATIONDES

TÉLÉCOMMUNICATIONS 56

Section1Les fondements juridiques de la politique communautaire 57

§1 Le droit de la concurrence communautaire et son application aux entreprises publics et aux

monopoles 57

§ 2 La libre prestation de services 62

§3 La libre circulation des marchandises 62

Section 2 Les principes de la libéralisation et leur mise en œuvre 63

§ 1 Le processus d'harmonisation des équipements 64

§ 2 L'ouverture des réseaux et des services à la concurrence 67

DEUXIÈME PARTIE: COMMENT RERÉGLEMENTER 7S

TITRE PREMIER L'INTERCONNEXION DES RÉSEAUX 76

CHAPITRE PRÉLIMINAIRE L'HARMONISATION 77

CHAPITRE PREMIER DÉFINITION DE L'INTERCONNEXION 77

Section l Définition de l'interconnexion 78

§1 Définition 78

§2 Conditions techniques de l'interconnexion (aspects non tarifaires) 79

Section 2 Le dégroupage de la boucle locale 83

§ l Principe du dégroupage 83

§2 Fondements juridiques du dégroupage 85

Section 3 L'interconnexion et le droit de la concmrence 87

§1 L'articulation des règles du réseau ouvert et du droit de la concurrence 87

§2 Les règles du droit de la concurrence applicablesàl'interconnexion 88 CHAPITRE DEUX LA MISE EN OEUVRE DE L'INTERCONNEXION EN DROIT

(10)

Section 1 Les conditions d'interconnexion: droits et obligations d'interconnexion 94

§1 Régime général de l'interconnexion 94

§2 Rôle des autorités réglementaires nationales en matière d'interconnexion 97

Section 2 Les tarifs d'interconnexion 98

§1 Prestations incluesdansles tarifs d'interconnexion 99

§2 Normes et conventions comptables 100

§3 Séparation comptable 103

TITRE DEUX LESERVICEUNIVERSEL lOS

CHAPITRE PREMIER L'EXEMPLE AMÉRICAIN 105

Section 1 Le Communications Act de 1934 105

Section 2 Le Telecommunications Act de 1996 106

CHAPITRE DEUX LE SERVICE UNIVERSEL EN DROIT COl\tlMUNAUTAIRE 107 Section 1 Définition, textes relatifs, et objectifs communautaires 108

Section 2 Le contenu du service universel 110

§1 Les services pouvant être financés dans le cadre du service universel 110

§2 Les services complémentaires 113

Section 3 Le financement du service universel 114

CHAPITRE TROIS LES MODALITÉS DU SERVICE UNIVERSEL EN FRANCE 115

Section 1 Défmition 115

Section 2 Les opérateW'S en charge du service public 115

Section 3 Le financement du service universel 116

§1 Versement complémentaireàla taxe d'interconnexion 116

§2 Contnbution à un fonds de service universel 117

CONCLUSION 120

(11)

INTRODUCTION

L'ouverture à la concurrence des télécommunications dans l'Union Européenne s'inscrit dans un cadre plus global de libéralisation mondiale de ce secteur. Un phénomène d'ouverture des marchés à la concurrence et de privatisation des opérateurs de télécommunications se manifeste depuis le début des années 1980 tant dans les pays dits développésl que dans les pays dits en voie de développement, et est concrétisé au niveau

mondial par l'existence de négociations sur les télécommunications au sein de

rOMe.

La période actuelle est particulièrement propice à une étude de la libéralisation des télécommunications dans l'Union européenne. fi est en effet possible de tirer, un an et demi après l'ouverture complète du marché communautaire des télécommunications, un premier bilan des réfonnes. L'ensemble du cadre réglementaire communautaire doit d'ailleurs faire l'objet d'une revue à lafinde l'année 1999.

Le processus communautaire de réforme, entamé au début des années 1980, a été progressif: fi se caractérise notamment par l'adoption de directives fixant des objectifs à atteindre par les États membres de l'Union européenne. Le lCf

janvier 1998 a marqué l'ouverture totale du secteur des télécommunications dans l'Union européenne. De plus, la plupart des ÉtatS membres ont achevé la transposition du cadre réglementaire communautaire dans leur propre ordre juridique. On pourra prendre pour exemple la France, où la loi nO96-659 du 26 juillet 1996, dite loi de réglementation des télécommunications

<LRn,

ainsique ses décrets d'application, ont déjà fait l'objet d'une appréciation par les différents tribunaux ftançais2•

1Les États-Unis, le Royaume-Uni etlaNouvelle-Zélande en sont les exemples les plus marquants.

2 Arrêt de la Cour d'appel de Paris du 28

am

1998 sur le rôle de l'Autorité de réglementation des télécommunications (ART) en matière d'arbitrage des conflits relatifs à('interconnexion des réseaux de

télécommunications (France Télécom cl sté Paris 1V Câble, voir DallozAffairesna120, 11juin1998) ; jugement du Conseil d'État du 23 mars 1998 relatifàl'attribution par l'ART des préfixes téléphoniques aux

(12)

Pourquoi déréglementer?

Les réformes ne sont pas toujours comprises par les populations: "avec la h"éralisation, on sait ce que l'on perd, on ne sait pas clairement ce que l'on gagne"3• La première

question soulevée par ce sujet est donc relative àses causes: pourquoi faut-il h"béraliser les télécommunications ?

Une première explication tient à l'importance économique et au fort potentiel de développement4 du secteur des télécommunications, qui représente à la fois un activité industrielle (les infrastructures et les équipements), une activité de service (les opérateurs de télécommunications) et un vecteur de communication indispensable au fonctionnement de l'économie en général. Le secteur de la communication au sens large connaît des bouleversements technologiques (et, en particulier, l'augmentation fonnidable des capacités de transmission des réseaux) qui entraînent une convergence des secteurs des télécommunications, des médias et de l'infonnatique. Le meilleur exemple en est le développement extraordinaire d'Internet, qui entraîne une explosion du trafic de données. Cette révolution est censée caractériser l'entrée dans "l'Âge" ou la "Société de l'information"s.

La nécessité ressentie par les différents États de réussir leur "entrée" et de bénéficier pleinement des retombées économiques de la Société de l'information justifierait alors les reformes engagées. En effet, les télécommunications ont jusqu'alors été caractérisées par

nouveaux opérateurs(stéAXS Télécom etsté Esprit Télécom France, voirAJD~juillet - août 1998,p. 636).

3E.Laune~Libération, 9 mai 1996, p.3.

4Le secteur des télécommunications (services et équipements) représenterait un chiffre dtaffaires mondial (fenviron 800 milliards de doUars en 1998. Voir~note 109.

5 La "Société de l'Information" est un thème omniprésent du discours "officiel", qutil soit françaisy

communautaire,améri~ ou autre.Ainsi :"Construirelasociété de l'informationestundesdéfisdecette findesiècle, défi quelaFrance, à l'instar de ses partenaires du monde entier, doit relever" inRapport d'activité 1995 de la DGPT, juin 1996, dispomble sur le site Internet du Ministère des Finances (telecom.gouv.fr). Voir également le rapport"Bangemann'" "L'Europeetlasociétédel'information" du

(13)

l'existence d'entreprises monopolistiques sur leur marché étatique respectif: Or, ces administrations traditionnelles, à caractère monopolistique, ne peuvent, àelles seules, relever le défi de la révolution technologique6. TI est également avancé que les pressions du marché liées à ces progrès technologiques rendent les réformes réglementaires inéluctables7•

Cependant, quels que soient les espoirs économiques ou sociaux fondés par les États sur ces bouleversements de la "Communication", ceux-ci ne sauraient en eux-mêmes expliquer totalement l'existence des réformes actuelles. En effet, d'autres secteurs économiques ne bénéficiant pas des mêmes révolutions technologiques connaissent eux aussi un mouvement de déréglementation. Onpense aux secteurs des transports (aérien et ferroviaire) et de l'énergie (électricité et gaz).

Une hypothèse tenant à la nature du secteur des télécommunications peut alors être avancée: il s'agit en effet d'une industrie dite de réseaux, comme les transports ferroviaires, les secteurs de l'énergie ou encore les services postaux. Toutes ces industries s'appuient sur une infrastructure impliquant de lourds investissements initiaux et présentent donc des économies d'échelles : plus le nombre de personnes utilisant le réseau sera important, moins les coûts d'utilisation du réseau par utilisateur seront élevés. La notion de monopole naturel estliéeà('existence de ces économies d'échelles: le service ne sera assuré de façon économique que s'il n'existe qu'un seul fournisseur ou opérateur sur le marché. Le monopole naturel a servi de justification à la réglementation institutionnalisant et protégeant les monopoles dont bénéficiaient la plupart des opérateurs

6Lignes directrices concernant ['application des règles de concurrence de la Communauté au secteur des télécommunications, lacE, 1991/C233/02, §3.

7Cette argumentationestsouvent reprise par divers responsables politiques afin de faire apparaître aux yeux de leur électorat comme inéluctables les changements introduits par la déréglementation pour les services publics. Cela permet ainsi d'éviter les suspicions quant à des motivations plus idéologiques (l'introduction du "hëétalisme sauvage"). Voir Y. Coussain, Le nouveau cadre réglementaire des télécommunications en Europe,rapport d'information de l'Assemblée Nationale nO 2646, Paris,. 1996, p. Il.

(14)

de télécommunications dans leur pays respectif: et ce, quelles que soient les traditions politiques et économiques des États ou le caractère privé ou public de ces opérateurs8•

Cependant, certains économistes ont souligné les coûts intrinsèques àla réglementation9

et ont avancé qu'en tout état de cause, celle-ci devait êtrelimitée aux seuls secteurs d'un marché présentant les caractéristiques d'un monopole naturel (cette analyse étant valable pour l'ensemble des industries de réseaux). Par exemple, le secteur des télécommunications présentait dans de nombreux États la forme d'une intégration verticale: un groupe assurait l'ensemble du service, depuis la construction des réseaux et des tenninaux téléphoniques (la partie industrielle) jusqu'à l'acheminement des conversations téléphoniques et le service aux usagers. Or, dans le secteur des télécommunications, si l'argument du monopole naturel se trouvait justifié relativement à l'installation du réseau, ilne l'était plus en ce qui concerne par exemple la fabrication des tenninaux et autres appareils de télécommunications. Il a ainsi été conclu que la concurrence devait pouvoir s'exercer sur certains secteurs du marché10•Puis, l'apparition d'alternatives au réseau filaire local, comme l'utilisation des réseaux câblés ou le développement des technologies cellulaires a sous tendu la logique de déréglementation totale du marché des télécommunications. La législation a dû évoluer de façonàpermettre la concurrence et le développement de ces nouvelles technologies. Même en l'absence de développements technologiques majeurs, comme dans les secteurs du transport ferroviaire ou de l'électricité, certaines solutions, telles que la séparation de la propriété du réseau et de son exploitation, ont été proposées afin d'introduire de la concurrence sur certains segments du marché.

8L'illustration la plus frappante se trouveaux États-Unis, pays de la libre entreprise, où AT&T, entreprise privée, bénéficiait jusque dans les années 1970 d'un monopole sur l'ensemble des télécommunications. 9tJA natural monopoly arises when a singleftrmcan provide the range ofgoodr or services at a [owu total

cost than a set offirms. This cost condition is notinitselfsufficient to justifY preserving the industry as a regulated monopoly. for the cost advantage 'Wou/d need to be sufficient tojustifj the additional cost of regulating the monopoly". DM. Newbery, Competition and Regulation in the Electricity lndustry, in Proceeding ofthe OECDI World Bank Conference. OECD, Centre for Co-OperationwiththeEconomiesin Transition,p~1995, (ci.aprèsProceedingofthe OECDI World Bank Corrference), p.229.

10Ainsien 1984 aux États.Unis lel'AFJ(Modification ofFinal Judgement) a autorisélaconcurrence sur le marché delatéléphonie longue distance.

(15)

Enfin, ilpeut être avancé que les télécommunications ne font que suivre le mouvement d'ouverture globale des marchés, concrétisé par la conclusion du cycle de l'Uruguay et la création de l'OMCll. De même, la déréglementation de ce secteur dans l'Union Européenne s'inscrit dans la logique de création d'un marché unique des biens et des services: pour la Commission, "assurer une concurrence efficace dans le domaine des télécommunications ne relève pas d'un choix politique. L'option d'un marché et d'une économie de concurrence était envisagée dans le traité et les règles de concurrence du traité sont directement applicables dans la Communauté".

Il apparaît donc que le phénomène de déréglementation des télécommunications tient à une combinaison de plusieurs causes: la prise en compte de certaines réalités économiques et l'apparition de bouleversements technologiques qui ont entraîné une nouvelle analyse de la réglementation, et un mouvement de fond politique voire idéologique12• L'étude plus approfondie de ces différents facteurs et de leur interaction constituera une première partie.

Les principales questions de la réforme des télécommunicfltions

L'introduction de la concurrence dans le secteur des télécommunications n'est pas chose aisée. Une approche radicale et originale pour réaliser la libéralisation consiste às'en remettre entièrement au droit de la concurrence, sans l'intervention d'un régulateur ni d'une réglementation particulière du secteur.. Cette solution qui a été retenue en Nouvelle-Zélande13 • Toutefois, la seule application du droit de la concurrence peut se révéler difficile dans un secteur aussi complexe que celui des télécommunications. De nombreux compromis doivent être trouvés entre les intérêts des différents consommateurs et ceux

IlL'Organisation mondialeducommerce(OMqa étécrééele 1erjanvier 1995etregroupe 120pays.Elle sert de cadre aux négociationsvisantàlahDéraIisationdeséchanges commerciaux. internationaux.

12Selon l'expressionde Gérard Larcher,lafindu monopole téléphoniqueestjuridiquement inéluctable, techniquement irrésistIble, économiquement indispensable, et mondialementprogrammé. G. Larcher,

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des opérateurs, historiques et entrants, mais aussi,dans le cadre européen, entre l'Union Européenne et ses États membres. L'adaptation du droit de la concurrence au secteur des télécommunications est délicate, notamment au regard du maintien d'un service universel, des modalités d'interconnexion des réseaux de télécommunications, et du rôle dévolu aux organes de réglementation et aux droits nationaux.

Ainsi, la transition vers un véritable système concurrentiel nécessite la mise en place de certaines garanties, tant pour les utilisateurs que pour les fournisseurs de services. La nécessité d'une régulation stable et "transparente" afin d'attirer les investissements et le développement des infrastructures est régulièrement soulignée par les spécialistes du secteurl4 : "si l'objet du droit de la concurrence est de veiller à ce que la concurrence soit préservée, la régulation a pour objet de permettre l'établissement de la concurrence, ce qui est différent"lS. Aussi, l'Union européenne a privilégié une approche de la lÎoéralisation n'impliquant pas la disparition de toute réglementation directe du secteur; au contraire,il

serait plus exact de parler de reréglementation.

Au premier rang des préoccupations des consommateurs et des citoyensfigurela question du maintien d'un service public ou service universel des télécommunications. La notion de service universel reçoit différentes acceptations. Au minimum, eUe implique qu'un service de base (une ligne téléphonique) soit accessibleà tous pour un prix raisonnable qui peut varier selon les régions de l'État en question16.Dans sa version la plus extensive, le service universel constitue également un service uniforme: les usagers, quelle que soit leur situation géographique, paient tous le même tarifpour leurs services téléphoniques11 :

13 Voir R. Abdar, "Sanies in New-ZeaIand DereguIated Telecommunications Industry" (1995) 23 Australian Business Law Review

n.

14VoirProceeding ofthe OECDI World Bank Conference, supra note 9.

15F. Jenny, "La déréglementation des télécommunications: concurrence loyale ou concurrence efficace",

RAE 1996,p.91.

16Ainsien est-il delasituation aux États-Unis. Cette approche se justifie par lestrèsgrandes disparités géographiques du pays, l'existence de cfifrerentes compagnies régionalesetle rôle des commissions locales

(Public Uti/ities Commissions) danslaréglementation des télécommunications.

11 nexiste toutefois en généraldes distinctions tarifaires entre laclientèle particulière et la clientèle professionnelle.

(17)

c'est la péréquation tarifaire. En général, la fourniture du service universel par un opérateur inclut également la prestation de services tels que la diffusion d'annuaires et l'installation et l'opération de cabines téléphoniques publiques.

Le service universel représente donc un objectif "social" de la réglementation, qui est parfois en contradiction avec ses objectifs purement économiques (la recherche du système le plus efficace possible quantàl'utilisation des ressources), carilimplique une tarification des services téléphoniques relativement déconnectée de leurs coûts économiques réels.

La péréquation tarifaire repose en effet sur un système de "subventions croisées" entre les différentes clientèles et les différents services téléphoniques: les clientèles d'affaire et urbaine sont défavorisées par rapport à la clientèle rurale18, et les communications

longues distances (nationales et internationales) sont surfacturées par rapport aux communications locales. Ce système permet un prix d'accès au réseau téléphoniqueà un prix relativement bas; il représente la contrepartie de l'octroi de monopoles institutionnels aux opérateurs de télécommunications et a également serviàjustifier leur existence.

L'introduction de la concurrence sur l'ensemble du marché des télécommunications remet en cause ce système. En effet, elle permetàde nouveaux opérateurs de se positionner sur les segments les plus profitables du marché (c'estàdireceux dont le prix est surévalué) laissant ainsi potentiellement la charge de la clientèle la moins rentable à l'opérateur d'origine. Aussi, celui-ci doit procéderàun rééquih"brage de ses tarifs: hausse du prix de l'abonnement au service et des communications locales, baisse des tarifs professionnels et

18Le tarif d'abonnementàune ligne "professionnenert

estsupérieurà celui d'une lignerésidentielJ~ et les abonnements des lignes situéesdans les villes sont les mêmes que pour cenes situées dans les régions rurales, alors que les coûts d'installation et d'entretieny sont largement supérieurs.

(18)

des communications longue distance19•Ce rééquihDrageestdélicat àeffectuer et doit être progressif:

La question du service universel cristallise les oppositions idéologiques existant entre les partisans du libre marché et ceux qui souhaitent maintenir des services publics et donc une intervention de l'État dans la vie économique. Dans le cadre de l'Union européenne, le service universel relève du principe de subsidiarité :il appartient aux États membres d'en organiser le financement. Celui-ci peut être assuré soit par l'imposition d'obligations de service universel aux nouveaux opérateurs, soit en en laissant la charge à l'opérateur historique tout en imposant une contributionàson financement aux nouveaux opérateurs.

Cependant, la détermination du coût de ce service est loin d'être simple et fait l'objet d'évaluation très différentes selon les opérateurs. De nombreux nouveaux entrants contestent son existence même: selon eux, la charge du service universel constituerait pour l'opérateur historique un avantage en terme de publicité et d'image par rapport à la clientèle2°.

Un autre problème soulevé par le financement du service universel est relatif à son équité: on a vu que les habitants des zones géographiques faiblement peuplées étaient favorisés par rapport aux citadins. Ne serait-il pas plus juste de poser la question en terme de revenus des abonnés plutôt qu'en terme de résidence ? De plus, est-ce le rôle d'entreprises privées d'assurer des missions étatiques, comme l'est l'aménagement du territoire? Si l'État souhaite préserver un équilibre entre régions urbaines et rurales, ne

19 Selon une étudede ItART sur révolutiondes prixduservice téléphonique de France Téléc:om entre 1996-1999,lapériode a été marquéepar unrééquilibragetarifaire:stabilité des prix forfaitaires dtac:c:ès, hausse des prix dtabonnement (cfenvîron 48% pour les utilisateurs privés et de 4 à 73% pour les utilisateurs professionnels" en fonction du type d'abonnement), baisse du prix des communications (dtenviron45 % pour les communications longues distances etentre5et 10% pour les communications locales~ selon les catégories cfusagers).Cependant,cerééquilibrage tarifaire aessenticllc:ment profité aux abonnés professionnels (baisse de 22% du panier de consommation,. contre seulement 6% pour les abonnés résidentiels).Enoutre, le prixdupanierdeconsommationdesménages a augmenté en 1999 (étude dispomble sur le site de ItART).

(19)

devrait-il pas le faire par le biais de subventions directes aux régions, plutôt qu'en imposant des charges aux entreprises? Le partage des compétences et des rôles entre État et entreprises est parfois délicat à réaliser dans le cadre de la déréglementation des télécommunications.

Le calcul des charges d'interconnexion ou d'accès aux réseauxestune autre question "clé" de la rerégiementation. Il est logique qu'un opérateur souhaitant n'offrir, par exemple, que des services téléphoniques longue distance reverse une partie du prix de l'appel à l'opérateur local, qui assure l'acheminement de la communication depuis l'abonné jusqu'au central de l'opérateur longue distance. Ce montant doit être relatif au coût d'installation et de maintien du réseau local. Cependant, faut-il prendre en compte les investissements d'origine, ou ceux qu'il serait nécessaire d'effectuer pour dupliquer ce réseau en utilisant les meilleures technologies disponibles? Les coûts, et donc les charges d'interconnexion seront beaucoup moins élevés dans ce dernier cas du fait des progrès technologiques. Toutefois, une telle approche est susceptible de décourager l'investissement, caril sera alors généralement plus rentable pour un nouvel entrant de demander l'interconnexion plutôt que de bâtir une infrastructure alternative. Tout comme la contribution des nouveaux opérateurs au service universel (qui est toutefois une question financière distincte), il s'agit d'un arbitrage entre opérateurs que les pouvoirs publics doivent effectuer dans leurs respectives lois de réglementation des télécommunications.

fi faut également apprécier si la position dominante que les opérateurs historiques continuent de détenir après ('ouverture du marché peuvent leur imposer des obligations plus lourdes que pour les nouveaux entrants, par le biais d'une réglementation asymétrique21, du moins pendant une période de transition. En tout état de cause, la régulation doit imposer aux entreprises une stricte séparation comptable entre leurs

20Voir G. Larcher, supra note 1~pp. 135-6, citant desestimations variant de t à 10 quant au coût du

service universel en France.

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différentes activités de télécommunications afin d'éviter qu'un opérateur ne subventionne une activité concurrentielle déficitaife22 par des profits tirés d'une autre activité.

Aux questions du service universel et de l'interconnexion des réseaux est liée celle de l'attribution des licences aux opérateurs de télécommunications.

Qui

sera autorisé à proposer quels services téléphoniques, et selon quels critères ?Les États peuvent vouloir s'assurer que les nouveaux entrants présentent des garanties de fiabilité et de compétence dans la téléphonie. Cependant, l'octroi des licences et autorisations doit se faire sur une base non-discriminatoire, et ne doit pas être utilisé par les États membres comme un moyen de restreindre la concurrence naissante.

Quelles que soient les solutions retenues par les différents États membres, il leur faut prendre en compte le rôle de la Commission des Communautés européennes. Cette dernière est chargée de veiller au respect du droit de la concurrence communautaire, qui a vocation à s'appliquer au secteur des télécommunications déréglementé" Il faudra déterminer dans quelle mesure ce droit peut être adapté au secteur des télécommunications. La Commission a publiéà cet effet lesLignes directrices concernant l'application des règles de concurrence de la Communauté au secteur des télécommunications23 (les "Lignes directrices"), ainsi qu'une Communication relative à

l'application des règles de concurrence aux accords d'accès dans le secteur des télécommunications24(la "Communication sur les accords d'accèsn

)"

Le phénomène de convergence des industries de la Communication affecte également la réglementation des télécommunications2S• En effet des modes de réglementation différents ont été appliqués jusqu'alors aux télécommunications, à l'informatique et aux

22Comme peut l'être par exemplelatéléphonie mobile, dufaitde l'importancedesinvestissementsinitiaux. 23Lignes directrices, supra note 6.

24JOCE C26S10~22août1998.

2S L. Gasman, Telecompetition: the Free Market Road to the fnfo Highway (Washingto~ OC: Calo

(21)

médias26• Or, il devient de plus en plus difficile de distinguer entre ces industries: les câblo-opérateurs offrent des services de télécommunications et il est possible de téléphoner par l'Internet. Même sil'ampleur de ce dernier phénomène resteàétablir, son existence même présente un sérieux défi pour les opérateurs traditionnels. La Commission européenne a d'ailleurs publié un "Livre vert" sur la convergence des secteurs des télécommunications, des médias et des technologie de l'information27• Elle a également publié une Communication28et adopté une directive29relativesàl'opération de réseaux de

télécommunications et de réseaux câblés par un même opérateur. La directive vise à garantir que les réseaux de télécommunications et les réseaux câblés de télévision appartenant à un seul et même opérateur constituent des entités juridiques distinctes. La Commission considère en effet que l'appartenance des réseaux de télécommunications et des réseaux câblés de télévision à une même entreprise étouffe le développement des marchés de télécommunications, décourage l'innovation et empêche de tirer pleinement parti des avantages de la convergence des secteurs des télécommunications, des médias et des technologies de l'informationJo•

Enfin,ilresteraàdéterminer quelle type d'autorité veillera au respect des nouvelles règles concurrentielles. Outre l'application du régime général du droit de la concurrence au secteur des télécommunications, où les tribunaux sont chargés de sanctionner à posteriori les violations du droit teUes que les abus de position dominante, deux systèmes sont envisageablesJ1.

26La réglementation des télécommunications privilégie le maintien du serviceuniverse~ celle delapresse vise en général à assurer la pluralité d'expression, et celle de la télévision contrôle le contenu des programmes di.ffusés. Voir Telecommunications and Broadcasring: Convergence or Collision? (paris:

OECO, Committee for Information, Computer and Communications Policy, vo1.29, 1992), p. 84.

27Livre vert du 3 décembre 1997 surlaconvergence des secteursdestélécommunications, des médias et des technologies de rinformation, et les implications pour la réglementation, COM (91) 623.

28JOCE C71/04,7 mars 1998, p. 4.

29Cette directive aétépubliée sous fonnedeprojet au JOCE C71/0S,7 mars 1998, p.23.Ladirective aété adoptée le 23juin1999.

30Voir communiqué delaCommission du 23 juin 1999, référenceIP/99/413.

(22)

fiest tout d'abord possible de créer un organe de réglementation spécifique au secteur des télécommunications. Celui-ci peut être chargé de l'attribution des fréquences et des licences d'exploitation et des arbitrages entre opérateurs. D'ailleurs, avant la "démonopolisation"32 du secteur, la plupart des opérateurs dépendaient d'organes de réglementation étatiques33 • Cependant, une séparation structurelle des fonctions d'opération et de réglementation est indispensable avant toute privatisation des opérateurs et ouverture des marchés à la concurrenceJ4. La possibilité de créer une instance de réglementation des télécommunications au niveau communautaire a également été évoquée3s.

Une autre solution consisteàrattacher les télécommunications àun organisme chargé de veiller au respect du droit de la concurrence pour l'ensemble des activités économiques et de définir les principes généraux pouvant être appliqués à l'ensemble des industries déréglementées en relation avec les problèmes de politique de la concurrence36•

32L'expressionestde G. Larcher. supra note 12.p.16.

33Ainsien France. France Téléc:om était lié àlaDirection Générale des Postes et des Télécommunications, rattachée elle·même à un Ministère de tutene.

34Voir G. Epstein.in"Symposium: Telecommunicationsinthe '90s-from WastelandtaGlobal Network"

(1993) Il Boston UniversityLawJournall33,p.159. 3SVoir Y. Coussain. supra note 7, p.23-24.

(23)

TELECO~CATIONS?

On tentera de décrire, dans cette partie, les principales causes du mouvement de déréglementation affectant sur le plan mondial et depuis le début des années 1980 le secteur des télécommunications.

Si la libéralisation des télécommunications peut s'expliquer par la recherche d'une réglementation plus efficace liée à la reconnaissance des évolutions technologiques affectant ce secteur (titre premier), il doit également être pris en compte certaines influences économiques ou contraintes juridiques ou politiques externes. Ces influences peuvent être, pour chacun des États libéralisant le secteur des télécommunications, le modèle suivi par d'autres États connaissant une organisation économique similaire, l'appartenance à des organisations supranationales telles que l'Union européenne, ou encore la participationàdes négociations organiséesdans un cadre multinational, comme l'Organisation mondiale du commerce (titre deux).

(24)

TITRE PREMIER LES ENJEUX ECONOMIQUES ET LES BOULEVERSEMENTS TECHNOLOGIQUES Les télécommunications ont longtemps été considérées comme un secteur économique présentant les caractéristiques d'un monopole naturel, c'est..à-dire justifiant une réglementation monopolistique. Les grandes lignes de cette analyse et de cette réglementation seront évoquées dans un premier chapitre. Puis, on s'intéressera dans un second chapitre aux mutations technologiques qui permettent l'entrée sur le marché d'autres opérateurs économiques et de rendre éventuellement contestable le monopole naturel.

CHAPITRE PREMIER LA REGLEMENTATION DES MONOPOLES

NATURELS

Introduction Ouelques principes de la réglementation

Dans son acceptation technique, le tenne "réglementation" désigne l'intervention des pouvoirs publics dans le champ économiqueafinde pallier les défaillances du marché37•

Le marché connait des défaillances lorsque le marché n'assure pas une répartition efficace des ressources38• Le régulateur doit alors, en théorie, déterminer quel aurait été le comportement de l'entreprise si elle avait été placée en situation concurrentielle, et faire en sorte que l'entreprise adopte un tel comportement.

37Dans ce sens technique, la déréglementation d'un secteur économique impliqueralafin de l'intervention étatiquesur ce marché et l'application des seules règles du droit de la concurrence aux entreprisesquiy participent. Toutefois, le mot déréglementationestparfois utilisé, notamment dans la presse, pour désigner la suppression des monopoles existant dans le secteurdes télécommunications et l'ouverture des marchésà

la concurrence.fiserait plus exact de parler de "démonopolisation'\ ou plus simplement de bDéraIisation, car ces réformes n'impliquent pas la fin de toute réglementation, comme on le vetTa dans une seconde partie.

38"The proper raie ofregulation isIhatofa subsutute for competitive marketforces where theseforces are wealc or absent The regulator's task then becomes a two-part undertalcing:first.to determine the TUles of behavior that the regulatedftrmcould have bem expected to follow ifit had operatedfree ofregulationin

a market with fuOy competitive forces; second. to canstTain the regulatedftrmta behave asifilwouldin

such a competitive market. and to circumscribeilsbehavior no less and no moretlumthis".W. Daumol et J.Si~Toward CompetitioninLocal TeIephony (Cambridge: MITPress, 1994}7 p. S.

(25)

L'intervention étatique peut prendre différentes fonnes :

• une réglementation de la structure d'une branche d'activité~ par laquelle l'État (ou l'autorité chargée de la réglementation) détermine quels seront les opérateurs économiques ayant la possibilité, voire l'obligation, de se livrer à des activités économiques données,

• une réglementation du comportement des entreprises présentes sur le marché, et notamment des investissements qui devront être réalisés, de la nature et des prix des services fournis aux utilisateurs par ces entreprises,

• une intervention directe de l'État sur le marché par le biais d'entreprises ou d'administrations publiques39•

Ces différentes modalités de l'intervention étatique peuvent être combinées entre elles. Ainsi, pour prendre un exemple particulièrement significatif, le secteur des télécommunications en France avant les réformes de juillet 1996 était caractérisé par une triple intervention étatique.

n y

avait réglementation du secteur d'activité, puisque seul l'opérateur national, France Télécom, était autorisé à fournir des services de télécommunications au public, réglementation du comportement">, par l'imposition d'un cahier des charges4., et intervention directe de l'État, puisque France Télécom était (et demeure) sous contrôle étatique42•

39Voir Réforme réglementaire, privatisation et politique de la concurrence, Paris, OCDE, 1992,pp. 13 et suiv.

40 Préalablement à la réforme du 2 juillet 1990 (voir ci-dessous note 42), il n'existait pas en France de séparation entre les fonctions d'opérateur et celles de régulateur du services de télécommunications, car France Télécom était une administration publique dépourvue de la personnalité morale et dépendant directementduMinistère des Postes et des Télécommunications. La réglementationducomportement de l'opérateur n'était donc même pas nécessaire.

~l La loi nO90-566 du 2 juillet 1990, relative à l'organisation du. service public de la Poste et des télécommunications, prévoyaitainsidans son article 8 que "un cahier des charges approuvé par décret en Conseil d'État (...] fixeypour [France Télécom], ses droits et obligations, le cadre général dans lequel sont

gérées ses activités, les principes et les procédures selon lesquels sont fixés ses tarifs et les conditions dtexécutiondesservices publics qu'il a pour mission d'assurer".

42La loi na90-568 du 2 juillet 1990 a transformé France Télécom,. jusqu'alors administration publique

dépourvue de la personnalité juridiquey en exploitant autonome de droit public (désigné, en droit

administratif français, comme un "EPIC"yétablissement publicà caractère industriel et commercial).Laloi nO96-660du26 juillet1996 a ensuite transfonné L'opérateur national en une "entreprise nationale" (enfait,.

(26)

La réglementation d'un secteur économique peut notamment être justifiée lorsque ce secteur présente les caractères d'un monopole naturel43•

Section 1 Lanotiondemonopolenaturel

§1 Définition

Un secteur économique présente les caractéristiques d'un monopole naturel lorsque une seule entreprise peut assurer la production nécessaire à la satisfaction de la demande à un coût moindre que celui qui résulterait de la présence de deux ou plusieurs entreprisessur ce marché.

Une des principales caractéristiques des industries qualifiées de monopoles naturels est la présence de coûts fixes et d'investissements non récupérables (nsunk costsn) très élevés. Des coûts fixes constituent une barrière à l'entrée de nouveaux concurrents, car ils ne pourront être amortis que sur une très longue période de temps.

Les monopoles naturels sont souvent associés à des économies d'échelles, c'est·à·dire à une baisse des coûts unitaires de production à mesure que la production s'accroit : les coûts marginaux sont donc inférieurs aux coûts Wlitaires. Dans le secteur des télécommunications par exemple, une fois le réseau construit, les coûts liés à la transmission des appels d'un client supplémentaire sont minimes, car la capacité de transmission est déjà présente et le réseau est déjà construit:ilsuffit alors de "tirer" une ligne depuis, par exemple, la rue jusqu'au domicile du client.

Par ailleurs, un monopole naturel peut également être caractérisé par la présence d'économie de gammes, lorsque le coût de fabrication ou de fourniture conjointe de deux produits ou servicesestmoins élevé que le coût de leur production ou fourniture par deux entreprises.Onpeut prendre comme exemple, dans le secteur des télécommunications, la fourniture de services de base et de services à valeur ajoutée par le même opérateur, ou encore la fabrication d'équipements et la fourniture de services par la même entreprise.

plusde lamoitié du capital social

(27)

Dans ce dernier cas, le secteur pourra présenter la forme d'une intégration verticale, avec une seule entreprise assurant la production de l'ensemble des produits et services du secteur.

Enfin, il existe des économies de réseaux: l'utilité et valeur économique d'un réseau de télécommunications augmentera en fonction du nombre d'utilisateurs de ce réseau44• La

construction d'une multiplicité de réseaux (par exemple, un réseau dans chaque ville d'un État) ne servirait à rien si ces réseaux n'étaient pas compatibles et connectés entre eux. Dans la pratique, les économies de réseaux ont été obtenues en confiant la maîtrise de l'ensemble des réseaux de télécommunications d'un Étatàun seul opérateur45•

Les industries des télécommunications, de l'énergie (électricité, pétrole ou gaz), de l'eau et des transports ferroviaires sont toutes censées présenter les caractéristiques d'un monopole naturel, car elles nécessitent la construction d'infrastructures extrêmement lourdes: les réseaux.ils'agit des voies ferrées pour les transports ferroviaires, des canalisations d'eau, de gaz ou d'électricité, ou du réseau téléphonique. Les coûts associés à la construction età l'entretien de ces réseaux sont tels qu'il n'existe pas d'incitation économique à la duplication du réseau et à la participation d'autres entreprises sur le marché46•

44 Voir notamment G.W. Brocle, Telecommunication Policy for the Information Age (Cambridge, MA:

Harvard University Press, 1994), p. 61, et P. Bernt & M. Weiss, International Telecommunications

(Canne~IN.: Sams Publishing; 1993), chapitre 2 "Regulatory issues".

4Sna été avancé qu'il aurait été possible, dès l'originedutéléphone, deréalisercette interconnexion des réseaux tout en ayant une diversité d'opérateurs.Eneffet,ilexistait aux États-Unis jusqu'en 1915 environ, plusieurs opérateurs de téléphonie locale. Cene structure du marché aurait pu être conservée si la réglementation avait rendu obligatoire finterconnexion des réseaux et si AT&T avait été empêché d'absorber ses concurrents. W. Baumol 8tJ. Sidak, Toward CompetitioninLocal Telephony, (Cambridge, MITPress, 1994), p. 9. Toutefois, cette solution aurait permis le développementdeplusieurs entreprises au niveau national,.maispas de développer une concurrenceentreopérateurs auniveauloc:aI.

46Le juge Harold Greene, dans le cadredudémantèlement delasociété AT&T au début des années 1980, a

ainsipu noterque"the evidence introducedalthe trial ofIhis case c/early demonstratedthatduplication of the ubiquitous local achange lletworh exchange would reqrdre an enormous and prohibitive capital

investment~ and no one seriously questions !hat this is true" (cité par D. Spulber, Deregulating

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§Z Les objectifs de la réglementatioD des monopoles naturels

Dans un grand nombre de cas, les opérateurs en charge du monopole naturel bénéficient d'un statut privilégié et d'une protection du monopole par la loi: ils sont les seuls entreprises autorisées àfournir des services sur un marché donné. Ainsi, les barrières à l'entrée de nouveaux opérateurs ne sont pas seulement d'ordre technique ou économique, mais également d'ordre réglementaire.

n

s'agit,dansce cas, d'une institutionnalisation du monopole naturel par une réglementation de La structure du marché. Cette réglementation s'appliquait en particulier à la plupart des opérateurs de télécommunications41 des États

membres de l'Union européenne avant l'ouverture du marché des télécommunications au 1crjanvier 1998.

Les raisons d'une telle réglementation de la structure du marché peuvent de prime abord paraître obscures. En effet, si un marché présente véritablement les caractéristiques d'un monopole naturel, aucune protection réglementaire ne devrait être requise: par définition, Le marché ne peut "supporter" qu'un seul acteurs. Onpourrait en tirer la conclusion que certains segments du secteur érigé en monopole légal ne présentent pas les caractères d'un monopole naturel49 •Toutefois, la réglementation peutêtrejustifiée par des considérations d'ordre économique,ainsique par des objectifs politiques et sociaux.

41 La présence de monopoles institutionnalisés ntest pas nécessairement liée au mode de propriété de ltopérateur du monopole. Silaplupart des opérateurs de télécommunications européens étaient ou sont des entreprises publiques, AT&T est une entreprise qui a longtemps bénéficié d\m monopole quasi-exclusif sur le secteur des télécommunications aux États-Unis.

n

importe ainsi de distinguer entre les questions liéesàla

privatisation des opérateurs et celles relativesàlalibéralisation.

48 A. Heimler & P. Saba, RoIe and EnfoItement of Competition Polic:y in ReguIated Sectors, in Proceedings ofthe OECD/World Bank Conference, supra note 9, p. 12

49 Par exemple, dans le secteur de ltélectricité, seule l'exploitation des infiastmetures constitue un monopole naturel: comme on l'a w,ilne sertàriendedupliquer le réseau de câbles allant des centres de productions aux utilisateursfina~saufàce que les capacités du réseau soient saturées et ne puissent être augmentées. La partie production présente eUe la plupart, si ce n'est tous les caractères d'un marché

conc:unentieL Eneffet, à Pexception peut-être des miao-États, les besoins en énergie dtune économie entière ne pourront être satisfaits par un seul site de production.Or,ilexisteplusieurs modes de production pOSSIble (centrales thermiques, hydroélectriques, nucléaires, utilisationdelténergie solaire oudu vent) qui peuvent être exploités par différents opérateurs sans perte d'efficacité économique.

(29)

A. Les objectifs économiques de la réglementation

La présence d'un opérateur unique sur le marché justifie notamment la réglementation du comportement de cet opérateur. Eneffet, en l'absence de réglementation, les opérateurs auront tendance à facturer des prix reflétant leur situation de monopole sur le marché, c'est-à-dire supérieurs aux coûts augmentés d'un retour sur investissement raisonnable, puisqu'il n'existe pas de solution de substitution pour les consommateurs. Puisque tous les coûts peuvent être répercutés sur le consommateur, iln'existe pas d'incitation "naturelle" pour la direction de ces opérateurs à les gérer de façon rationnelle. La réglementation doit alors pallier les carences du marché, car celui-ci ne peut être auto-régulé par le jeu de la concurrence.

Les méthodes de réglementation de l'opérateur unique du monopole sont étudiées dans la section 2 ci-dessous.

B. Les objectifs politiques et sociaux de la réglementation

La réglementation ne sert pas exclusivement des buts économiques : elle vise également à la satisfaction de buts d'intérêts généraux et de besoins collectifs. Ces buts peuvent consister notamment en :

• le développement d'une infrastructure efficace et performante,

• la fourniture de services (de télécommunications,d'ea~ d'électricité,...)àl'ensemble de la population, quelle que soit sa localisation géographique (le "service universel"), • la recherche d'une qualité et tme tarification identique de ces services quel que soit

l'utilisateur (la "péréquation tarifaire"),

• l'utilisation de normes et de techniques uniformes de façon àassurer la compatibilité des réseaux sur l'ensemble du territoire,

• le maintien d'une branche d'activité ou de l'emploi.

Or, les gouvernements ont longtemps considéré que ces buts ne seraient pas remplis par l'opérateuràmoins d'y être contraint, ou alors que les coûts associésàla réalisation de ces

(30)

objectifs sont tels que l'opérateur doit bénéficier de "subventions croisées" générées par d'autres services.

La réponse réglementaire "classique" à cette problématique a été, jusqu'il y a environ vingt ans, de permettre la constitution d'entreprises monopolistiques sur le marché des télécommunications, et ceci quelles que soient les traditions politiques et économiques des États ou le caractère privé ou public de ces entreprises. Cette réglementation permet une grande souplessedansl'établissement des tarifs, car ceux-ci, affranchis des forces du marché et des possibilités "d'écrémage" par des opérateurs concurrents, peuvent être très largement déconnectés de leurs coûts économiques réels. La pratique de subventions croisées permet ainsile financement du service universel : de façon générale, les services locaux (accès au réseau et communications locales) sont facturés en dessous de leur coût réel, alors que les communications longue distance (interurbaines et internationales) sont surfacturées. De même, les tarifs professionnels (clientèle d'affaire) sont supérieursàceux appliqués à la clientèle particulière, en considération de prestations et d'un service supposés de meilleure qualité. Ainsi, les revenus dégagés sur les segments du marché surfacturés "subventionnent" l'accès au réseau et les communications locales.

En outre, la réglementation a étendu le champ du monopole protégé à la fourniture de services connexes, comme la production d'équipements. Ces services connexes présentent généralement des aspects concurrentiels, mais sont protégés de l'entrée d'opérateurs concurrents et inclusdansle monopole natureL Des revenus sont garantisà l'opérateur en placeafinqu'il réalise les objectifs d'intérêt généraux qui lui ont été confiés.

Enfin, le monopole conféré àun opérateur lui garantit que les investissements réalisés dansla construction du réseau notamment pourrontêtrerentabilisés sur le long terme.

Section 2 Méthodes de rglementatïon

La réglementation du monopole naturel implique généralement l'imposition dim cahier des charges, définissant les obligations de l'opérateur, ainsi qu'un contrôle des tarifs pratiqués par cet opérateur. Le contrôle peut prendre plusieurs formes, brièvement exposées ci-dessous.

(31)

§ 1 Le contrôle des bénéfices ou"rllte ofretllm regll/mon"

Avec cette forme de réglementation, l'entreprise est autorisée àfixer ses tarifs de telle sorte qu'elle puisse récupérer ses coûts de production, augmentés d'un taux de rendement des capitaux investis égal à celui qui aurait été obtenu dans un secteur économique comparable. Ce système présente comme avantage d'êtretransparen~ fiable et prévisible.

ilprésente toutefois les inconvénients suivants :

• le processus de détermination des taux de dépréciation des actifs et de taux de rémunérationestlong et compliqué,

• il Yapeu d'incitation pour l'entreprise àréduire ses coûts de production, puisqu'elle bénéficie d'un taux de rendement garanti50.

§2 Le plafonnement des prix ou"price-eaps regu/lllion"

Cette méthode de réglementation, désignée également sous l'appellation "RPI-X" (Retail Priee Index moinsX) a d'abord été adoptée au Royaume-Uni dans le secteur du gaz, des télécommunications et des aéroportsSl • L'organe de réglementation plafonne les prix pouvant être pratiqués par l'opérateur monopolistique ou dominant àun niveau égal à l'index des prix de détail, diminué d'une certaine valeur(X)qui doit refléter la diminution attendue des coûts moyens de productions2• Ainsi, si la diminution des coûts de l'entreprise assujettie à la réglementation est inférieure à celle que supposait la formule, l'entreprise sera pénalisée par une faible rentabilitéS3• Si, au contraire, elle abaisse ses coûts d'un montant supérieur àcelui qui résulte de la formule RFI ... X, elle verra ses bénéfices augmenter, maisilexiste un risque que le régulateur réévalueàterme le niveau de "X".

La difficulté de cette fonnule réside dans la détermination du niveau de réduction des coûts de l'opérateur assujettiS4•

50VoirProceedings ofthe OECD/World Bank Conference, supra note 9, p. 12.

SIVoir Réforme réglementaire, privatisation et politiquedelaconcurrence, supra note 39, page 14. 52Voir SaulEstriD, "Larégulation des monopoles natureIs'\inL'art du management, Les Échos, 2S avril

1997.

53Réforme réglementaire, privatisation etpolitiquedelaconcurrenc~supra note 39, page15.

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§J L'octroi de franchises

Dans certains secteurs économiques, le gouvernement peut également accorder une concession exclusive àune entreprise sur le monopole naturel pour une période donnée, éventuellement selon un cahier des charges préétabli. Dans cette situation, plusieurs opérateurs sont invités à proposer un prix pour obtenir cette concession exclusive et exploiter le monopole pendant une période déterminée. Ce système permet une certaine concurrence pour l'obtention du marché, même si le marché en lui·même n'est pas concurrentiel. D'autre part, le système des franchises suppose soit une mise àdisposition d'un réseauàl'opérateur, soit une industrie présentant des coûts non récupérables faibles mais des coûts fixes élevés (faute de quoi le marché serait concurrentiel). Un exemple de ces industries est le transport aérien. On peut enfin noter que ce système ne favorise pas les investissements à long tenue, car l'entreprise titulaire de la concession hésitera à réinvestir ses bénéfices (surtout vers la fin de la période de concession) si elle n'est pas assurée du renouvellement de la concession.

Section 3 L'abandondela rglemeDtatioD § 1 Un choix stratégique de la libéralisation

L'une des premières raisons au changement d'attitude des gouvernements quant à la réglementation peut s'expliquer par le fait que la réglementation a, en partie du moins, rempli son rôle. En effet, dans la plupart des pays industrialisés, la construction, puis la modernisation des réseaux de télécommunications ont été achevées, et les taux de raccordement des foyers dépassent souvent les 90%. Dès lors, il n'existe plus de raison valableàrestreindre plus longtemps le jeu de la concurrence sur les marchés du secteur des télécommunications présentant un caractère concurrentiel, sous réserve toutefois que le maintien d'un service universel soit assuré.

La libéralisation des télécommunications peut alors être analysée comme un choix politique déhoéré entre les avantages offerts par un système monopolistique

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(essentiellement, le service universel et l'uniformité des services et des tarifs entre les utilisateurs) et ceux d'un système concurrentiel (innovation, prix réduits pour certains services, tarification plus proche des coûts, serVices spécialisés).En effet,"at the base of any discussion of monopoly and competition lies the tension between universal service concerns and the benefits of innovation and efficiency promised by competitionffSS •Un système monopolistique est particulièrement adapté à la phase de développement du réseau (uniformité des normes, interconnexion des réseaux, et financement sur un long terme du réseau assurés). Or, la plupart des pays industrialisés ayant hoéralisé les télécommunications ont réalisé cette première phase et disposent d'une infrastructure suffisante pour pouvoir confier le développement du secteur aux seules forces du marché. Cette approche se retrouve dans l'ouverture du marché mondial des télécommunications négociée dans le cadre de l'OMCS6. Elle est conforme à celle de la Commission européenne, qui relève que les administrations des télécommunications, bien que gardant leur rôle essentiel de fournisseurs de services publics, commencent à raisonner comme des entreprises commercialess1.

Par ailleurs, les régulateurs ont pris conscience des inconvénients présentés par une structure tarifaire trop éloignée des coûts réels. Certes, les subventions croisées ont permis de financer le service universel; cependant, elles pénalisent les entreprises par la surfacturation des communications longue distance. fi importe donc de procéder à un

rééquilibrage des tarifs. La libéralisation se justifie par la nécessité de préserver la compétitivité d'une économie.

Cependant, la réforme réglementaire s'explique également par certains échecs de la réglementation.

SSP.Bernt&M. Weiss, supra note 44, chapitre2,Regulatory Issues. S6Voir E. Launet,in.Libération, 9mai1996 et 17 février 1997.

(34)

§2 Les critiques de la réglementation traditioDneUe

A. L'OCDE

La réglementation des industries de réseaux, telle que décrite dans ses grandes lignes ci-dessus, a fait l'objet de nombreuses critiques, dont les plus représentatives émanent de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Cette organisation intemationaleS8s'est attachéeàpromouvoir, au travers de nombreux rapports

et études, la réforme de la réglementation et l'introduction de la concurrence dans les secteurs réglementés. En effet, l'OCDE considère que "l'expérience de plusieurs décennies de réglementation a conduità reconnaître que de plus en plus que les marchés ne sont pas les seulsàconnaître des défaillances : les gouvernements peuvent aussi échouer"s9.

Ces critiques ont trouvé un certain écho auprès des gouvernements de nombreux pays industrialisés. L'OCDE explique les changements dans l'attitude des gouvernements des États membres de l'OCDE quantàla réglementation par une meilleure compréhension de ['étendue et de la nature de ses échecs. Ceux-ci seraient les suivants60 :

• une qualité inadéquate des services ou des produits aux consommateurs. Tantôt les services offerts sont trop fréquents (dans le secteur des transports par exemple), ou ces services présentent des nonnes de qualité trop élevées par rapport aux attentes des consommateurs, tantôt les prestations fournies sont médiocres,

• un frein à la diffusion des progrès technologiques, les opérateurs en situation de monopole n'ayant aucun intérêtàpromouvoir le développement de technologies plus avancées qui rendraient obsolètes leurs propres infrastructures61 ,

58L'OCDEregroupe 29 pays (dont les IS États membres de l'Unioneuropéenne~ les États-Unis, leIapo~ le Cana~ et l'Australie) ayant adoptéunrégime de démocratie pluraliste et les principes de l'économie de marché. Lebut de L'OCDEestd'encourager la coopération et le dialogue entreses membresafind'assurer le meilleur développement économique possible.

S9Réformeréglementaire~ privatisationet politique delaconcurrence,supra note 39, p. 17.

60Idem, supra note 39, pp. 18à22.

61 On aainsipu noter que"monopo/ists are often not innovator:s" (S.G. Sunshine, Antitrust Policy Toward Telecommunications Alliances (address before the American Enterprise Institute for Public Policy

Research,Washingto~ DC, 7 JuIy 1994). Et:"the evidence from manycountries has shown that state-owned enterprises have frequent/y failed to reaet adequately to changesindemand and to technological developmentst

(35)

• les médiocres résultats économiques des secteurs réglementés, par comparaison avec les secteurs déréglementés d'autres pays. Cette médiocrité peut notamment être attribuéeàla faiblesse des incitationsàaméliorer l'efficacité économique de l'opérateur placé en situation de monopole sur le marché,

• une mauvaise information du régulateur de la situation des entreprises réglementées (c'est l'asymétrie de l'information entre le régulateur et l'entreprise régulée),

• certains effets néfastes sur le marché du travail, dus en particulier à la différence des conditions de travail entre secteur privé et secteur public (ou protégé),

• une réévaluation des carences du marché par rapportà l'évolution des techniques, et notamment de la perte par certains segments d'un secteur économique de leur caractère de monopole naturel.

Par ailleurs, la déréglementation peut correspondre à certains objectifs des gouvernements :

• des objectifs budgétaires, la privatisation de certaines entreprises servant àalléger la dette public des États, alors que les subventions directes aux entreprises nationalisées diminuent,

• des objectifs plus généraux, comme par exemple la promotion de l'actionnariat populaire en Grande-Bretagne, ou le développement de la Bourse de Paris, au moyen de privatisations dans chacun de ces deux pays.

B. La Commission européenne

Pour la Commission européenne, les mouvements de déréglementation affectant le secteur des télécommunications s'expliquent notamment par les facteurs suivants :

• des progrès technologiques fondamentaux,

• l'incapacité des opérateurs traditionnels à relever seuls les défis de cette révolution technologique, et à apporter aux consommateurs les nouveaux services qui en sont issus,

in Proceeding of the OECDI World Bank Conference on Competition and Regulation in Network

(36)

• une nouvelle dynamique économique, entraînant un vaste mouvement de restructuration, par le biais de fusion et d'entreprises communes, et devant permettre aux entreprises de mener une concurrence plus efficace par des économies d'échelle et des mesures de rationalisation62•

§J Appréciation de ces critiques

Chacune de ces appréciations sur les effets de la réglementation pourrait être discutée. Par exemple, une critique récurrente adressée aux monopoles protégés est de freiner l'innovation et la diffusion des progrès techniques. Cependant, cette critique ne devrait pas nécessairement être limitée à ces entreprises et pourrait être étendue à toute industrie nécessitant des investissements importants: l'introduction d'une nouvelle technologie pose toujours un problème au détenteur de l'ancienne technologie63• Ainsi, l'industrie automobile, qui n'est pas réglementée, n'a rien "inventé" depuis la création du moteur à explosion, même si les inconvénients en tenne de pollution de ce moteur sont largement reconnus. Les solutions alternatives, comme les véhiculesàmoteur électrique, voient leur diffusion freinée, car elles remettent en cause la structure et les modes de production de l'industrie automobile. Pourtant, le secteur de la construction automobile est un marché concurrentiel, où dix huit concurrents s'affrontent dans le monde64• En poursuivant le raisonnement, on peut se demandersi cette absence de garantie quantà la pérennité des investissements ne constituera pas un frein à la diffusion des progrès technologiques : les entreprises seront-elles préparéesàinvestir des capitaux importantsdans une technologie peut...être efficace mais risquant d'être obsolèteà plus ou moins brève échéance?On peut se demander par exemple si le réseau téléphonique classique (fil de cuivre) aurait été construit en l'absence du monopole accordé à son opérateur.

Par opposition, la modernisation du réseau téléphonique français dans les années 1970 ainsi que la diffusion du Minitel dans les années 1980 constituent des exemples d'innovations techniques provenant d'un secteur réglementé et étatisé.

62Lignes Directrices, supra note 6, § 3.

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D'autre part,ilest intéressant de noter que les effets et les causes de la concurrence sont discutés. Ainsi, malgré l'existence d'un grand nombre de statistiques, il est difficile d'évaluer les effets réels de l'introduction de la concurrence, notamment en termes de coûts ou d'effets sur l'emploi. Les données existantes donnent lieu à des interprétations divergentes. Par exemple, on a pu relevé que les prix moyens des billets d'avion ont chuté suite à la déréglementation du secteur du transport aérien aux États-Unis, mais que,sil'on prend en compte les coûts ducarburant~ ils baissaient en fait plus rapidement avant la déréglementation6s• Les tarifs des télécommunications à partir d'un poste fixe ont eux connu un rééquilibrage, avec une hausse des communications locales et de l'abonnement et une baisse des communications longue distance. Chaque catégorie d'utilisateurs ayant des types de consommation de différents, il est difficile d'évaluer l'effet global de la libéralisation.

Quelle que soit l'appréciation que l'on porte sur les avantages et les inconvénients respectifs de la réglementation et de la libéralisation, force est de constater qu'il existe un consensus minimum sur l'idée que seuls les éléments d'un secteur économique présentant un caractère de monopole naturel devraient être réglementés et que, pour les autres segments, ildevrait y avoir libéralisation. Il s'agit alors de dissocier, au sein d'un même secteur d'activité ou d'une même entreprise, les activités concurrentielles de celles qui constituent des monopoles naturels66• Or, l'apparition de nouvelles technologies a

bouleversé l'économie des télécommunications et a permis de réduire le champ du monopole naturel. On devra maintenant examiner les évolutions technologiques ayant contribué à l'ouvertureàla concurrence des télécommunications.

64Libératio~Sjuin1998~p.21.

6SR. Kuttner, "Déréglementer, ouimais ..•"tLePoin~Savril 1997.

66Réforme réglementaire, privatisation et politiquedelaconcurrence, supra note 39,pp.21-22.

Un exemple estfoumi par le marchédeséquipements danslesecteurdestélécommunications ~aux

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