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Aux sources du parlementarisme dans la Province de Québec, 1764-1791

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Texte intégral

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© Christian Blais, 2019

Aux sources du parlementarisme dans la Province de

Québec, 1764-1791

Thèse

Christian Blais

Doctorat en histoire

Philosophiæ doctor (Ph. D.)

Québec, Canada

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Aux sources du parlementarisme dans la Province de Québec, 1764-1791

Thèse

Christian Blais

Sous la direction de :

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Résumé

Cette thèse démontre que les fondements du parlementarisme québécois précèdent l’Acte constitutionnel de 1791; que les membres du Conseil de Québec (1764-1775) et ceux du Conseil législatif de la Province de Québec (1775-1791) adoptent les usages et les traditions parlementaires britanniques pour légiférer; qu’une législature peut être constituée uniquement de non-élus; bref que, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, le parlementarisme dans la Province de Québec se définit autrement que le parlementarisme en Grande-Bretagne ou dans les autres colonies royales britanniques nord-américaines.

Une analyse des procès-verbaux des corps législatifs de la Province de Québec permet de retracer les origines des coutumes parlementaires québécoises. En comparant le Conseil de Québec et le Conseil législatif avec le Parlement de Westminster, le Parlement du Bas-Canada et les parlements de certaines colonies royales britanniques nord-américaines, nous sommes à même de constater qu’il y eut, de 1764 à 1791, un parlementarisme rudimentaire, mais un parlementarisme tout de même dans sa forme, ses usages et ses traditions.

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Abstract

This thesis demonstrates that the foundations of Quebec parliamentarism precede the Constitutional Act of 1791; that the members of the Quebec Council (1764-1775) and those of the Legislative Council of the Province of Quebec (1775-1791) adopt British parliamentary usages and traditions for the purpose of legislating; that a legislature can consist solely of non-elected members; in short, in the second half of the eighteenth century, parliamentarism in the Province of Quebec was defined differently than parliamentarism in Great Britain or other British North American colonies.

An analysis of the minutes of the legislative bodies of the Province of Quebec traces the origins of Quebec parliamentary customs. By comparing the Quebec Council and the Legislative Council with the Parliament of Westminster, the Parliament of Lower Canada and the parliaments of certain British North American colonies, we are able to observe that there was, from 1764 to 1791, an rudimentary parliamentarism, but a parliamentarism all the same in its form, its uses and its traditions.

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Table des matières

RÉSUMÉ ... III ABSTRACT ... V TABLE DES MATIÈRES ... VII LISTE DES TABLEAUX ... IX REMERCIEMENTS ... XI INTRODUCTION ... 1 PROBLÉMATIQUE ET HYPOTHÈSE ... 3 ORIENTATION THÉORIQUE ... 4 SOURCES ET MÉTHODOLOGIE ... 17 CONTEXTE HISTORIOGRAPHIQUE ... 24 Le Québec et le Canada, 1764-1791 ... 25

La procédure parlementaire canadienne ... 32

La Grande-Bretagne, 1764-1791 ... 36

L’Amérique du Nord britannique, 1764-1791 ... 40

PLAN DE LA THÈSE ... 44

PARTIE 1. UNE CONSTITUTION PARLEMENTAIRE ... 47

CHAPITRE 1.LE PARLEMENTARISME DANS LA SECONDE MOITIÉ DU XVIIIE SIÈCLE ... 49

Le roi et le Parlement de Westminster ... 49

Les constitutions des colonies royales ... 69

CHAPITRE 2.LE CONSEIL DE QUÉBEC ... 81

Historiographie ... 81

La constitution et les pouvoirs législatifs du Conseil de Québec ... 93

Le gouverneur en conseil de la Province de Québec ... 100

CHAPITRE 3.LE CONSEIL LÉGISLATIF DE LA PROVINCE DE QUÉBEC ... 121

Historiographie ... 121

La constitution et les pouvoirs du Conseil législatif ... 130

La Législature de la Province de Québec ... 141

CONCLUSION DE LA PARTIE 1 ... 147

PARTIE 2. UN CADRE PARLEMENTAIRE : LES USAGES, LES TRADITIONS ET LA PRATIQUE ... 151

CHAPITRE 4.DES LÉGISLATEURS ... 155

La nomination des conseillers ... 155

La notion de représentation ... 164

La prestation des serments ... 166

Un décorum parlementaire ... 168

Le droit de débattre et la liberté de parole ... 175

Des partis en gestation ... 184

Une enceinte parlementaire ... 197

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CHAPITRE 5.LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE ... 209

Le registre des travaux ... 209

Un jargon parlementaire ... 217

Un calendrier parlementaire ... 236

Des cérémonies parlementaires ... 248

CONCLUSION DE LA PARTIE 2 ... 259

PARTIE 3. DES RÈGLES DE PROCÉDURE ET DES ACTES PARLEMENTAIRES ... 265

CHAPITRE 6.DES RÈGLES DE PRATIQUES PARLEMENTAIRES ... 269

Coutumes et règles de Westminster ... 270

Règles non écrites et règles écrites au Conseil de Québec ... 279

Règles non écrites et règles écrites au Conseil législatif ... 294

Le Conseil législatif, 1775-1779 ... 294

Le Conseil législatif, 1780-1782 ... 306

Le Conseil législatif, 1783-1791 ... 321

CHAPITRE 7.L’ÉTUDE DES PROJETS D’ORDONNANCE ... 339

L’adoption des projets de loi au Parlement de Westminster ... 340

La procédure législative au Conseil de Québec ... 344

La procédure législative au Conseil législatif de la Province de Québec ... 358

CONCLUSION DE LA PARTIE 3 ... 375

CONCLUSION GÉNÉRALE... 379

RETOUR SUR LA THÉORIE ... 384

LA CONCEPTION DU PARLEMENTARISME ... 390

OUVRIR UN NOUVEAU DÉBAT : QU’EST-CE QU’UN PARLEMENT MODERNE? ... 393

BIBLIOGRAPHIE ... 397

ANNEXE 1 ... 427

ANNEXE 2 ... 428

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Liste des tableaux

TABLEAU 1.ANALYSE LEXICOGRAPHIQUE DES CORPS LÉGISLATIFS DE LA PROVINCE DE QUÉBEC…..……224

TABLEAU 2.SESSIONS ET SÉANCES DU CONSEIL LÉGISLATIF DE LA PROVINCE DE QUÉBEC………..241

TABLEAU 3.ANALYSE LEXICOGRAPHIQUE DU JOURNAL DE MURRAY…………...………...282

TABLEAU 4.COMPARATIF DES RÈGLEMENTS DE LA PROVINCE DE QUÉBEC ET DU BAS-CANADA……...323

TABLEAU 5.PROJETS D’ORDONNANCE ÉTUDIÉS AU CONSEIL LÉGISLATIF……….……..…..329

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Remerciements

En me voyant retranscrire les procès-verbaux du Conseil de Québec (1764-1775), Gilles Gallichan m’a dit que ce serait fort pertinent de rédiger une thèse avec ces archives. « Oui, oui, un de ces jours »; « Peut-être »; « Plus tard ». Il a insisté durant trois ans. Toujours avec gentillesse. En vain. Puis, sans rien me dire, il a contacté le Cabinet du Président de l’Assemblée nationale. Le 14 juillet 2010, le président me téléphone. (C’était la première fois que je parlais à un président. Mon Dieu! Qu’est-ce que j’ai fait de mal…) Il m’appelle comme ça. Pour que je lui parle de mon projet de thèse. (Tiens donc!) Il finit par me demander ce que j’attendais pour faire ce doctorat. Je me suis inscrit dans la semaine qui a suivi. Je tiens à vous remercier M. Yvon Vallières. Gilles, je te dois une fière chandelle.

J’ai demandé à Donald Fyson s’il acceptait d’être mon directeur. « Bien sûr. Mais, à bien y penser, me dit-il plus tard, tu devrais aussi étudier le Conseil législatif de la Province de Québec (1775-1791). » Bonne idée! (Misère! Ça commence bien. Dans quoi je me suis embarqué…) J’avais toutefois la certitude que j’allais apprendre beaucoup avec Donald. Un vrai mentor. Il m’a poussé à me dépasser.

D’autres merveilleuses têtes pensantes ont joué un rôle important, notamment pour nourrir ma réflexion concernant mon plan. Celui-ci a fini par prendre une forme articulée grâce aux questions pertinentes et aux riches suggestions de l’excellente historienne Marie-Eve Ouellet, du combien intelligent Jules Racine-Saint-Jacques et du très brillant greffier Julien Tremblay. Merci aussi à Martin Pâquet et à Johanne Daigle qui ont su trouver les mots justes pour me donner la confiance et le courage d’écrire ces pages. Mille mercis à mon « comité spécial » chargé de la première lecture, de la seconde lecture et de la troisième lecture de mon projet de thèse. Sophie Imbeault et Suzanne Langevin, je n’oublierai jamais ce que vous avez fait pour moi. Vous êtes merveilleuses. Je suis vraiment bien entouré, il faut en convenir!

Une pensée particulière pour mes vieux complices. Les sincères encouragements de Jocelyn Saint-Pierre et de Frédéric Lemieux ont été source de motivation. Merci aussi à la Société des Dix. Votre accueil, lors de l’écriture de mon dernier chapitre, m’a permis de trouver l’énergie pour continuer ce projet. Je dois aussi remercier sincèrement le député de Bonaventure, M. Sylvain Roy. En me rendant hommage à la rubrique des déclarations des députés à l’Assemblée nationale, deux semaines avant mon dépôt initial, vous m’avez encouragé à terminer ma thèse et offert une dose concentrée de fierté gaspésienne.

Je puise mais n’épuise. Telle est la devise de la Bibliothèque de l’Assemblée nationale du

Québec. Tous les livres cités dans cette thèse proviennent de ses riches collections. Quant au personnel de la référence, de la recherche et des archives, ce sont des gens d’une compétence exceptionnelle, avec le sourire en prime. Merci à mes amis et estimés collègues : Marc Audet, Julie Bélanger, David Boucher, Valérie Bourdeau, Diane Chamberland, Geneviève Court (grand merci pour ton aide lors de la mise en page!),

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Valéry Depinte, Marise Falardeau, Marie-Hélène Fournier, Merculie Kayitesi, Alexandre Laflamme, Josée Levasseur, Simon Mayer, Carolyne Ménard, Judith Mercier, Magali Paquin, Martin Pelletier, Hélène Rangers, Sylvie Robitaille, Gladys Romero Gonzalez, Pascale Santerre, Danielle Simard et Stéphane Wimart. Merci aussi au directeur Jacques Gagnon pour ses encouragements. Je tiens également à remercier l’ex-secrétaire général François Côté et son successeur Michel Bonsaint pour leur soutien.

Merci aux membres du jury: Michel Morin, Jocelyn Saint-Pierre et Martin Pâquet. Vos remarques pertinentes ont permis de parfaire mon travail.

Mens sana in corpore sano. Je le jure, je n’aurai pas réussi cette thèse sans le taekwondo

et les escaliers du Cap-Blanc. Merci à mes sympathiques entraîneurs Luc Pinsonnault, Martin Thibault, Bobby A. Aubé et Brian Wong. Des jambes plus solides m’ont permis de ne pas perdre pied…

Ma famille demeure à la base de la réussite de cette thèse. Nancy Jodoin, tu crois en moi depuis le jour où l’on s’est rencontré. J’ai vraiment beaucoup de chance de t’avoir dans ma vie. Je t’aime. À mes enfants, Julien et Antoine, je veux dire que je ne regrette pas d’avoir pris trop de temps pour en finir avec ce projet d’écriture. Je savais que vous alliez garder de meilleurs souvenirs de votre papa en train de passer de longues et froides soirées d’hiver à modeler d’énormes glissades ou à arroser la patinoire. Les bons moments passés avec vous deux avaient plus de valeur à mes yeux que le temps passé avec les défunts membres du Conseil de Québec ou du Conseil législatif. Lorsque ce fut à votre tour de passer vos soirées à faire des devoirs, j’ai suivi votre exemple. Vous avez été, pour moi, de véritables modèles de persévérance. Je suis fier de vous mes garçons! N’oubliez pas qu’à tout âge, le travail et la réussite vont de pair.

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Introduction

L’Acte constitutionnel de 1791 est souvent considéré comme le point de départ du parlementarisme québécois. Parce qu’à la suite de la sanction de cette constitution parlementaire à Westminster, des élections sont déclenchées au Bas-Canada et que, le 17 décembre 1792, les premiers députés de la Chambre d’assemblée se réunissent dans la chapelle du palais épiscopal à Québec. Parlementarisme et démocratie sont des concepts qui se fondent l’un dans l’autre. Cette jonction conceptuelle fait l’unanimité. Il n’y a pas de véritable débat historiographique sur cette question.

Je m’inscris en rupture avec cette interprétation consensuelle. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, dans la Province de Québec, je ferai la démonstration que le parlementarisme n’est pas indissociable de la démocratie élective. Tout est une question de conceptualisation. Qu’est-ce qu’un Parlement? Qu’est-ce qu’un parlementaire? Quelle est la nature intrinsèque de la pratique législative? C’est donc la définition stricte du parlementarisme que je remets en question, et ce, pour le contexte particulier de l’administration de la Province de Québec de 1764 à 1791.

Un premier indice permet, en prémisse, d’accepter l’idée selon laquelle les traditions parlementaires britanniques se sont transposées dans la colonie bien avant les élections de 1792; et bien avant la création d’un club constitutionnel à Québec voué, en 1792 et en 1793, à l’enseignement des rudiments de la nouvelle constitution. Plusieurs historiens québécois s’étonnent de ce que les députés bas-canadiens de 1792 semblent déjà maîtriser les usages parlementaires britanniques1. A contrario, une thèse portant notamment sur le parlementarisme au Haut-Canada montre que l’apprentissage des règles parlementaires est plus laborieux dans cette nouvelle colonie2. Il ne faut pas se surprendre de l’avance du

1 John Hare y va d’une supposition que l’on se trouve à confirmer dans cette thèse : « Comment fonctionner

dans une assemblée délibérante selon le modèle britannique? Voici une question primordiale qui se pose aux nouveaux députés sans expérience ou presque. L’un d’eux, William Grant, ancien conseiller, avait fait partie d’un corps législatif; il semble qu’il a mis son expérience au service des autres nouveaux députés. » John HARE, Aux origines du parlementarisme québécois, 1791-1793, Sillery, Septentrion, 1993, p. 63.

2

Gary O’BRIEN, Pre-Confederation Parliamentary Procedure: The Evolution of Legislative Practice in

the Lower Houses of Central Canada, 1792-1866, thèse de doctorat, Carleton University, 1988, p. 155-156,

173. « The legislative process was better defined in Lower Canada than it was in Upper Canada. Although the basic process of three readings was common in both assemblies, the Lower Canadian practice included

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2

Bas-Canada sur le Haut-Canada à cet égard. Car plusieurs usages parlementaires apparaissent à Québec à la suite de la Proclamation royale, dès l’instauration du gouvernement civil.

La conviction que j’ai qu’il faut désormais réinterpréter le concept de parlementarisme trouve racine dans mon parcours professionnel comme historien à la Bibliothèque de l’Assemblée nationale du Québec. Au départ, en 2002, comme stagiaire à la reconstitution des débats de l’Assemblée législative du Québec antérieur à 1962, je me suis familiarisé avec la procédure parlementaire avec le Règlement de l’Assemblée

législative du Québec de 1914 et celui de 19413. Ayant précédemment consulté les procès-verbaux du Conseil de Québec (1764-1775) – lors de la rédaction de mon mémoire de maîtrise – et lu des passages des procès-verbaux du Conseil législatif de la Province de Québec (1775-1791) – lors de la corédaction du livre Québec : quatre siècles

d’une capitale –, un premier constat m’est apparu4 : ces procès-verbaux des années 1764-1791 ressemblent aux Journaux de l’Assemblée législative de la province de Québec du XXe siècle.

Durant mes études doctorales, l’analyse des procès-verbaux du Conseil de Québec et du Conseil législatif de la Province de Québec m’a permis de constater qu’il y a plus qu’une ressemblance factice entre les procès-verbaux des corps législatifs d’avant et d’après l’Acte constitutionnel. La nouvelle interprétation que je propose est le fruit d’une longue réflexion. En 2008, dans le livre Québec : quatre siècles d’une capitale, nous en étions déjà venus à une nouvelle approche pour la période allant de 1764 à 1791 : « On peut donc dire que le Conseil législatif de Québec poursuit la genèse du parlementarisme

a specific rule that "all amendments shall be reported to the House by the Chairman standing in his place. After report, the Bill shall be subject to debate and amendment in the House, before the question to engross it shall be taken". »

3

Louis-Philippe GEOFFRION, Règlement annoté de l’Assemblée législative de Québec, Québec, Dussault & Proulx, 1915; Louis-Philippe GEOFFRION, Règlement annoté de l’Assemblée législative, Québec, Assemblée législative, 1941.

4

Christian BLAIS, L’émergence d’un établissement acadien à Tracadièche depuis 1755 jusqu’à 1801. Montréal, Université de Montréal (mémoire de maîtrise en histoire), 2001, 140 p.; Christian BLAIS, Gilles GALLICHAN, Frédéric LEMIEUX et Jocelyn SAINT-PIERRE, Québec : quatre siècles d’une capitale, Québec, Les Publications du Québec /Assemblée nationale du Québec, 2008, 692 p.

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québécois, amorcée par le Conseil de Québec en 1764, et qu’il prépare le fonctionnement des futures institutions représentatives5. » Cette présente thèse en fait la démonstration.

Les cadres chronologiques de cette recherche se situent entre la première séance du Conseil de Québec le 13 août 1764 et la dernière séance du Conseil législatif le 30 avril 1791. Après cette date, il n’y a plus de travaux législatifs en ce qui a trait au territoire de la Province de Québec. L’Acte constitutionnel – sanctionné le 10 juin 1791 et mis en vigueur le 26 décembre suivant – crée un Parlement bicaméral pour le Bas-Canada (et un autre pour le Haut-Canada). Bien que trois ordonnances soient adoptées par le Conseil exécutif du Bas-Canada avant la première législature de 1792-1793, elles ne sont pas considérées dans cette étude. Entre autres parce que les procès-verbaux de l’exécutif bas-canadien ne contiennent que trop peu de procédures législatives, ce qui ne permet pas de comparer le processus d’adoption de ces ordonnances avec celles adoptées antérieurement6. Or, bien que le cadre temporel de cette thèse corresponde au gouvernement civil de 1764 à 1791, il n’empêche que des comparaisons sont effectuées avec le Régime militaire de 1759-1764 et avec la première session de la première législature du Bas-Canada de 1792-1793.

Problématique et hypothèse

Dans l’histoire du droit constitutionnel canadien, il est le plus souvent affirmé que le « régime parlementaire québécois s’est construit empiriquement et coutumièrement, sur place », à partir de l’Acte constitutionnel de 17917. S’il est juste de dire que la province du Bas-Canada est dotée d’une chambre élective à partir de 1792, je soutiens que la formation des institutions parlementaires est antérieure.

5 C. BLAIS, G. GALLICHAN, F. LEMIEUX et J. SAINT-PIERRE, Québec : quatre siècles d’une

capitale…, p. 175.

6 Procès-verbaux du Conseil exécutif de la Province de Québec, 1776-1791. Bibliothèque et archives

nationales du Canada. State minute books of the Executive Council, Book D, R10808-28-2-E; Book E, R10808-29-4-E; Book F, R10808-30-0-E; Book G, R10808-31-2-E; Book H, R10808-32-4-E; Book I, R10808-33-6-E.

7 Henri BRUN, Guy TREMBLAY et Eugénie BROUILLET, Droit constitutionnel, 6e édition, Cowansville,

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Entre 1764 et 1791, le Conseil de Québec et le Conseil législatif de la Province de Québec – des corps législatifs formés en vertu de constitutions parlementaires – ont calqué les cadres parlementaires britanniques pour réguler leurs débats et pour adopter des actes parlementaires afin d’administrer les « affaires de la province de Québec8 »; c’est en ce sens que je prétends qu’au Québec la formation des institutions parlementaires précède l’Acte constitutionnel de 1791. Il y eut un parlementarisme sans élection, un parlementarisme rudimentaire, mais un parlementarisme tout de même dans sa forme, sa pratique législative, ses usages et ses traditions.

Selon cette perspective, j’en viendrai à circonscrire les mécanismes procéduraux entourant l’étude et l’adoption des ordonnances dans la Province de Québec9. Je pose comme hypothèse que les membres du Conseil de Québec (1764-1775) et du Conseil législatif (1775-1791) ont utilisé plusieurs éléments de la procédure, de la pratique, des principes et des rituels employés au Parlement de Westminster. Et si certains cadres et rouages du régime parlementaire québécois sont rudimentaires comparés au Parlement britannique, c’est parce que les constitutions des colonies royales britanniques diffèrent de celle de la métropole et de ceux des parlements des États modernes.

Orientation théorique

Au Québec, dans les années 1970, on a affirmé que l’histoire politique n’était plus au goût du jour; qu’elle cohabitait au mieux, en arrière-scène, avec l’histoire socio-économique et culturelle. En France pareillement, l’histoire politique apparaît « comme le symbole d’une conception étroite et désuète de l’histoire, le politique étant identifié à l’événement dans ce qu’il a de plus circonstanciel, de plus contingent10 ». Ce constat a été suivi d’un appel à un renouvellement de l’histoire politique.

8

« Acte de Québec », dans Adam SHORTT et Arthur G. DOUGHTY (dir.), Documents relatifs à l’histoire

constitutionnelle du Canada, 1759-1791, Ottawa, T. Mulvey, 1921, vol. 1, p. 556.

9 Bien que le rôle des législatures coloniales consiste à adopter des lois et à voter des taxes, nous ne nous

attarderons pas sur le volet de la taxation dans la Province de Québec.

10 « "Une nouvelle histoire politique": Entretien avec René Rémond », Des repères pour l’homme, Paris,

Association des professeurs d’histoire et géographie, Bibliothèque publique d’information, Centre Georges Pompidou, 1982, p. 31.

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En 1994, l’historien Jean-Marie Fecteau a « dénoncé la mise sous le boisseau d’une histoire du politique et de l’urgente nécessité de sa renaissance ou de son renouvellement » au Québec11 . Sur quoi, Réal Bélanger a sonné l’alarme en 1997, avec un article intitulé « Pour un retour à l’histoire politique12 ». Selon lui, le politique a injustement été marginalisé. Il plaide en faveur d’une historiographie québécoise renouvelée dans laquelle les grandes interprétations politiques occuperaient une importance réelle dans l’explication historique globale. Michel Sarra-Bournet poursuit sur cette lancée en 2013, affirmant que la politique (les partis), le politique (le pouvoir) et les politiques (l’État) doivent être abordés de front, sans être traités par le biais du social et du culturel13. D’emblée, je m’inscris dans ce renouveau spécifique de l’histoire politique et institutionnelle.

Cette thèse traite des acteurs politiques et des structures constitutionnelles, gouvernementales et administratives, mais il s’agit d’abord et surtout de cerner la pratique parlementaire et son évolution. Pour ce faire, il a fallu arrimer l’histoire parlementaire du Québec à celle de Westminster et à celle des parlements des autres colonies royales britanniques nord-américaines. Cette recherche est campée dans le vaste champ du monde atlantique.

Comme l’affirme Donald Fyson dans une bibliographie consacrée aux travaux publiés au Québec et au Canada, hormis quelques exceptions, l’histoire d’après Conquête a rarement été considérée dans un contexte atlantique14. Nous avons trop souvent étudié notre passé comme s’il s’agissait d’un microcosme. Dans un bilan historiographique publié en 2008, j’affirmais d’ailleurs que l’approche comparative était certainement un des meilleurs moyens pour renouveler notre histoire politique15.

11 Jean-Marie FECTEAU, « Le retour du refoulé : l’histoire et le politique », Bulletin d’histoire politique,

vol. 2, no 3, hiver 1994, p. 5-10.

12 Réal BÉLANGER, « Pour un retour à l’histoire politique », Revue d’histoire de l’Amérique française,

vol. 51, no 2, automne 1997, p. 228.

13 Michel SARRA-BOURNET, « De la pertinence de l’histoire politique », Bulletin d’histoire politique,

vol. 22, no 1, automne 2013, p. 7-9.

14

Donald FYSON, « Quebec and the Atlantic World, 1760-1867 », Oxford Bibliographies in Atlantic

History, New York, Oxford University Press, 2017, www.oxfordbibliographies.com.

15 Christian BLAIS, « Je me souviens? Les chantiers d’histoire politique du Québec, 1608-1791 », Bulletin

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Au Québec, les historiens qui ont abordé les rouages parlementaires ont dressé trop peu de parallèles avec la Grande-Bretagne et les autres colonies britanniques. En la matière, il faut suivre la voie tracée par les spécialistes de la Nouvelle-France qui, de mieux en mieux, situent le Canada dans le contexte de l’Atlantique français. En témoigne l’historienne Marie-Eve Ouellet dans l’introduction de sa thèse portant sur les intendants du Régime français : « On assiste depuis quelques années au développement d’une histoire "atlantique", dont l’objectif est de sortir les sociétés coloniales d’une étude en vase clos pour les envisager à l’intérieur d’un espace d’interactions entre l’Europe, l’Afrique et les Amériques16. » Après la Proclamation royale, l’on doit enchâsser la Province de Québec dans le contexte de l’Atlantique britannique.

Ce champ n’est pas complètement vierge. Fyson dresse une bibliographie commentée de l’espace atlantique et du Québec préconfédératif. Les études ciblées sont, en substance, en interaction avec la Grande-Bretagne et l’Amérique du Nord britannique. L’histoire politique (qui est à la fois sociale, économique, légale, militaire, etc.) se trouve ordonnée en de multiples rubriques : « Historiographical Interpretations of Quebec in the Atlantic World »; « The Conquest »; « Quebec and the British Empire »; « British Policy and Colonial Governance »; « Law »; etc. Fait à souligner, on n’y trouve rien ou presque au sujet de l’histoire parlementaire du Québec, sauf exception de deux articles de Jean-Pierre Wallot concernant le Bas-Canada dans la rubrique « Ideologies and Political Ideas »17. Là encore, les institutions parlementaires ne constituent pas le sujet principal de Wallot.

Il existe pourtant diverses publications sur le parlementarisme québécois. John Hare, par exemple, a écrit Aux origines du parlementarisme québécois, 1791-179318. Comme l’indique le titre, cet ouvrage présente l’Acte constitutionnel comme étant à « l’origine »

16 Marie-Eve OUELLET, « Et ferez justice. » Le métier d’intendant au Canada et dans les généralités de

Bretagne et de Tours au 18e siècle (1700-1750), Québec, Université de Montréal (Ph. D. histoire), 2014,

p. 1.

17 Jean-Pierre WALLOT, « Révolution et réformisme dans le Bas-Canada (1777–1815) », Annales

historiques de la Révolution française, vol. 45, n°3, 1973, p. 344-406; Jean-Pierre WALLOT, « Frontière

ou fragment du système atlantique: Des idées étrangères dans l’identité bas-canadienne au début du XIXe

siècle », Historical Papers, vol 18, n°1, 1983, p.1-29.

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de nos pratiques parlementaires. D’autres études s’intéressent à l’histoire parlementaire québécoise suivant la Confédération de 1867. Citons notamment Les premières années du

parlementarisme québécois (1867-1878), une thèse que Marcel Hamelin réalise à la suite

de la reconstitution des débats de l’Assemblée législative du Québec19. Les débats reconstitués ont également servi de sources primaires pour le collectif Histoire

parlementaire du Québec, 1928-1962. La crise, la guerre, le duplessisme, l’État providence20. Or, malgré ce que laisse entendre les titres de ces trois ouvrages, il s’agit-là de synthèses politiques et non d’études proprement parlementaires. Au Québec, rares sont les études consacrées exclusivement à l’histoire parlementaire; il y en a moins encore sur l’analyse de la pratique parlementaire21.

Force est de constater que les études sur le parlementarisme au Québec et au Canada se concentrent sur la création des diverses assemblées législatives, soit 1758 pour la Nouvelle-Écosse, 1773 pour l’Île-du-Prince-Édouard, 1786 pour le Nouveau-Brunswick et 1792 pour le Bas-Canada et le Haut-Canada22. Les chercheurs privilégient toujours l’histoire de la Chambre basse et jettent peu ou pas de lumière sur la Chambre haute. Sans compter que ces études s’inscrivent toujours en vase clos du monde atlantique.

19 Marcel HAMELIN, Les premières années du parlementarisme québécois (1867-1878), Québec, Les

Presses de l’Université Laval, 1974, 386 p.

20 Christian BLAIS (dir.), Histoire parlementaire du Québec, 1928-1962. La crise, la guerre, le

duplessisme, l’État providence, Québec, Septentrion, 2015, 716 p.

21 Christian BLAIS, « Le rôle des avocats dans l’adoption des ordonnances au Conseil de Québec,

1764-1775 » dans J. Michel DOYON (dir.), Avocats, politique et société au Québec, 1763-1867, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2018, p 3-36; « Acte constitutionnel (1791) »; « French Party »; « Grossoyer »; « Liste civile »; « Proclamation royale (1763) »; « Acte de Québec (1774) »; « Adresse en réponse au discours du trône »; « Lex parlementaria »; « Portier »; « Serment du test », Encyclopédie du

parlementarisme québécois [en ligne], Assemblée nationale du Québec; Christian BLAIS, « Les plus

anciens règlements parlementaires au Québec et au Canada », Revue parlementaire canadienne / « The Oldest Parliamentary Rules in Quebec and Canada », Canadian Parliamentary Review, vol. 8, n° 4, 2015, p. 27-33.

22

Frank MacKINNON, The Government of Prince Edward Island, Toronto, University of Toronto Press, 1951, 385 p.; J. Murray BECK, The Government of Nova Scotia, Toronto, University of Toronto Press, 1957, 372 p.; William Odber RAYMOND, « A Sketch of the Life and Administration of General Thomas Carleton, First Governor of New Brunswick », New Brunswick Historical Society, no 4, vol. 6, 1899, p. 439-481; Michel MORIN, « L’évolution du mode de scrutin dans les colonies et les provinces de l’Amérique du nord britannique de 1758 à nos jours », Revue de droit de l’Université de Sherbrooke, vol. 39, nos 1-2, 2009, p. 159.

(22)

8

Hormis les travaux réalisés par les historiens, il existe fort heureusement une multitude de cadres théoriques pour analyser les causes étant à la source de l’évolution de la pratique parlementaire sous l’Ancien régime.

Il y a les pionniers. Quatre grands penseurs ont scruté la constitution britannique au XVIIe et au XVIIIe siècle23 : Locke (1632-1704) défenseur du libéralisme, du pacte social et des droits naturels des individus; Montesquieu (1689-1755), penseur libéral qui décrit notamment la séparation des pouvoirs (exécutif, législatif, judiciaire) en Grande-Bretagne; Blackstone (1723-1780), juriste, spécialiste des lois anglaises, député à la Chambre des communes de 1761 à 1770, dont les Commentaires sur les lois anglaises offrent une description de l’État britannique du milieu du XVIIIe

siècle; et De Lolme (1740-1806) qui, par ses travaux sur le gouvernement britannique, loue les libertés dont jouissent les Britanniques par l’équilibre de l’exercice du pouvoir entre le roi, la noblesse et le peuple. Il importe de s’imprégner des écrits de ces grands théoriciens puisque leurs œuvres circulaient dans la Province de Québec avant 1791, véhiculant ainsi les principes mêmes des libertés anglaises et du partage des pouvoirs entre la monarchie, l’aristocratie et le peuple. Mais il faut comprendre d’emblée que ces auteurs sont des théoriciens; que leurs théories décrivent un idéal du parlementarisme britannique; qu’aucun ne dresse un portrait véritable de la pratique parlementaire du milieu du XVIIIe siècle et des relations complexes entre le roi, le Conseil privé et le Parlement de Westminster.

Plus près de nous, au Canada, le constitutionnaliste Henri Brun et le politologue Gary O’Brien proposent diverses théories permettant de comprendre l’évolution du parlementarisme au Bas-Canada, au Haut-Canada et dans la province du Canada. Ce sont les travaux de Brun qui ont fait école au Québec.

23 John LOCKE, Traité du Gouvernement civil, par M. Locke; traduit de l’Anglais; Revue et corrigée

exactement, sur la dernière Édition de Londres, Paris, Royer, 1795, 486 p.; William BLACKSTONE, Commentaires sur les lois anglaises par W. Blackstone, avec des notes de M. Ed. Christian; traduits de l’anglais sur la quinzième édition par N. M. Chompré, ancien conseiller au Conseil des prises, Paris,

Bossange, 1822. Tome 1; Charles de Secondat, baron de la Brède et de MONTESQUIEU, De l’Esprit des

Lois. Paris, Gallimard, 1970 [1748]; Jean-Louis DE LOLME, Constitution de l’Angleterre, ou État du Gouvernement Anglais, comparé avec la forme républicaine et avec les autres monarchies de l’Europe, par De Lolme […], Paris, Delarue, 1822, 2 vol.

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9

Avec La formation des institutions parlementaires québécoises, 1791-1838, Brun démontre que l’avènement d’une assemblée élue en 1792 concourt au développement de nouvelles pratiques parlementaires24. Les concepts développés dans sa thèse, en ce qui concerne les origines du parlementarisme québécois, ont été transposés dans l’ouvrage

Droit constitutionnel, un outil qui fait autorité en la matière25.

La thèse de Brun dissèque les institutions parlementaires bas-canadiennes de manière à présenter son « organe non représentatif » (Gouverneur), ses « organes représentatifs » (Assemblée législative, Conseil législatif), ses « organes collégiaux » (Bicamérisme) et les relations qui interagissent entre eux. Brun situe les origines du parlementarisme québécois avec l’Acte constitutionnel de 1791, au moment où la province du Bas-Canada est dotée d’organes étatiques vraiment représentatifs. Lorsqu’il traite de l’Acte de Québec, il considère néanmoins que Londres, dans « une infime mesure » et « selon un mode primitif », avait déjà admis la souveraineté de la collectivité coloniale par la création d’un Conseil législatif qui, « par sa nature et sa composition, offrait quand même quelques garanties d’indépendance vis-à-vis du représentant de la métropole26 ». Il parle alors de « similireprésentativité » d’un conseil désigné. En substance, selon Brun, pour qu’il y ait parlementarisme, il est impératif que la volonté populaire ait voix au chapitre de la législation : représentativité, élections et parlementarisme étant présentés comme des concepts indissociables.

Brun montre aussi que, dans un système bicaméral, des moyens de contact et de confrontation entre les députés et les conseillers législatifs sont les matrices de la modernisation de la pratique parlementaire du Bas-Canada27. Le développement du parlementarisme bas-canadien s’accélère aussi au XIXe siècle du fait des affrontements entre les pouvoirs législatif et exécutif. Il faut comprendre que la discorde est l’un des moteurs de l’évolution de la pratique parlementaire. « Discordances et discordes sont

24 Henri BRUN, La formation des institutions parlementaires québécoises, 1791-1838, Québec, Presses de

l’Université Laval, 1970, 281 p.

25

Henri BRUN, Guy TREMBLAY et Eugénie BROUILLET, Droit constitutionnel, 6e édition, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2014, 1611 p.

26 Ibid., p. 75.

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10

génératrices de formes, de règles et d’interprétations », affirme également Denis Baranger à propos de l’évolution de la procédure parlementaire à Westminster28.

L’ancien greffier du Sénat canadien, Gary O’Brien, s’intéresse quant à lui à l’évolution des pratiques parlementaires avant la Confédération de 1867. Sa thèse de doctorat en science politique, Pre-Confederation Parliamentary Procedure: The Evolution of

Legislative Practice in the Lower Houses of Central Canada, 1792-1866, porte sur la

procédure parlementaire ancienne29. Pour ce faire, il a analysé les Règlements et les journaux des assemblées législatives des provinces du Bas-Canada, du Haut-Canada et du Canada sous l’Union.

En introduction, O’Brien allie trois approches pour expliquer l’évolution de la procédure30. Il y a l’approche constitutionnelle inspirée de John Hatsell et d’Erskine May. Il y a l’approche objectivée (Goal Orientation Approach) qui découle des réflexions de Jeremy Bentham. Il y a l’approche du contexte social et politique (Environmental Factors) qui fait suite aux travaux de Josef Redlich.

Selon l’approche constitutionnelle d’Hatsell et de May, le droit, la coutume et les précédents constituent, d’une part, la base de la procédure parlementaire; d’autre part, le cadre constitutionnel définit et oriente la direction et le but de la procédure. John Hatsell est greffier de la Chambre des communes de 1768 à 1797. En 1776, il publie A Collection

of Cases of Privilege of Parliament, from the Earliest Records to 1628. Son maître-livre

est cependant Precedents of Proceedings in the House of Commons, Under Separate

Titles; with Observations, publié en 1781 et réédité en 1785, en 1796 et en 1818.

Au XIXe siècle, Erskine May, greffier de la Chambre des communes britannique de 1871 à 1886, est considéré comme la plus grande autorité en matière de procédure parlementaire. Son livre Treatise on the Law. Privileges, Proceedings and Usage of

28

Denis BARANGER, Écrire la constitution non-écrite. Une introduction au droit politique britannique, Paris, Presses universitaires de France, 2008, p. 32.

29 G. O’BRIEN, Pre-Confederation Parliamentary Procedure…, 474 p. 30 Ibid., p. 2-12.

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11

Parliament, publié une première fois en 1844, a été réédité pour la 25e fois en 201931. Contrairement à Hatsell, le portrait que May dresse de la pratique parlementaire est celui d’un État libéral moderne32

. Bref, l’approche constitutionnelle qui découle des publications d’Hatsell et de May est axée sur la pratique. Et pour cause, ces recueils de droit parlementaire sont initialement destinés aux praticiens : les parlementaires britanniques.

L’approche objectivée découle des travaux de Jeremy Bentham. À la fin du XVIIIe siècle, le philosophe et avocat britannique aborde la question du parlementarisme et de la législation sous l’angle du principe moral. En 1776, il publie A Fragment on Government qui justifie l’existence de l’État par son utilité seulement33

. Au début de la Révolution française en 1789, Bentham rédige un manuscrit, sous forme de questions et de réponses, à l’attention des membres des États Généraux afin de les aider à trouver les « meilleures règles à suivre dans une délibération34 ». Une traduction anglaise d’une partie de cet ouvrage, Essay on Political Tactics, est publiée à Londres en 179135. Les notes manuscrites de Bentham sont ensuite rassemblées et éditées, en 1816, par Étienne Dumont, membre du Conseil représentatif du Canton de Genève36. Tactique des

Assemblées Législatives plaide pour le maintien de l’ordre social dans les assemblées

délibérantes. Bentham est le premier à théoriser la pratique parlementaire : « Le Règlement interne d’une Assemblée politique est une branche de la législation, et même une branche essentielle. Jusqu’à présent, aucun écrivain politique ne s’en est

31 Erskine MAY, Parliamentary Practice. The law, Privileges, Proceeding and Usage of Parliament,

Londres, LexisNexis, 2019, 1281 p.; https://erskinemay.parliament.uk/.

32 Aussi, en 1861, May s’est penché sur l’histoire parlementaire de la Grande-Bretagne. Son livre sera

réédité plusieurs fois jusqu’en 1912. Une histoire par le haut, certes, mais qui cerne les éléments constitutifs de l’évolution du parlementarisme à une époque charnière. Erskine MAY, The Constitutional History of

England Since the Accession of George the Third, 1760-1860, London, Longmans, Green, 1871, 3 vol.

33 Peter J. ASCHENBRENNER, British and American Foundings of Parliamentary Science, 1774-1801,

Londres, Routledge, 2018, p. 121-142.

34 Jeremy BENTHAM [par Étienne DUMONT], Tactique des Assemblées Législatives, suivi d’un Traité

des Sophismes politiques; Ouvrage extrait des Manuscrits de M. Jérémie Bentham, Jurisconsule Anglois,

Genève, J. J. Paschoud, 1816, p. 5

35 Jeremy BENTHAM, Essay on Political Tactics containing six of the Principal Rules proper to be

observed by a Political Assembly In the process of a Forming a Decision: with the Reasons on Which They Are Grounded; and a comparative application of them to British and French Practice: Being a Fragment of a larger Work, a sketch of which is subjoined, London, T. Payne, 1791, 64 p.

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12

expressément occupé. Ainsi, ce sujet est tout à-la-fois ancien et nouveau; très-ancien pour la pratique, très-nouveau pour la théorie37. »

Contrairement à Hatsell et May, Bentham ne croit pas que la coutume ou les précédents doivent constituer le fondement de la pratique législative38. Ce sont plutôt les meilleures pratiques et les meilleures règles de procédure qui doivent être recherchées39: « La Tactique des Assemblées délibérantes, ainsi que toute autre branche de la science du Gouvernement, doit se rapporter au plus grand bien de la société : voilà le but général40. » À terme, la pratique parlementaire est orientée par les objectifs fixés par les législateurs : « Ordre suppose but. La tactique des assemblées politiques est donc la science qui enseigne à les conduire vers le but de leur institution, au moyen de l’ordre à observer dans leurs démarches41. »

Par exemple, le fait de lire un projet de loi trois fois est une procédure « raisonnable » parce qu’elle favorise la maturité du débat, donne au public l’occasion de se faire entendre et donne aux membres absents la possibilité de participer plus tard au débat. La notion d’utilitarisme, accolée à celle de la législation, est une doctrine éthique qui invite à maximiser le bien-être du plus grand nombre42 :

Principle of utility : THE PUBLIC GOOD ought to be the object of the legislator; GENERAL UTILITY ought to be the foundation of his reasonings. To know the true good of the community is what constitutes the science of legislation; the art consists in finding the means to realize that good. […] Utility is an abstract term. It expresses the property or tendency of a thing to prevent some evil or to procure some good. Evil is pain, or the cause of pain. Good is pleasure, or the cause of pleasure43.

37 Ibid., tome 1, p. 8.

38 Gary O’BRIEN, Pre-Confederation Parliamentary Procedure: The Evolution of Legislative Practice in

the Lower Houses of Central Canada, 1792-1866, thèse de doctorat, Carleton University, 1988, p. 2-12.

39 P. J. ASCHENBRENNER, British and American Foundings of Parliamentary…, p. 5, 121-142. Il cite

Bentham : « The tactics of deliberative assemblies, as well as every other branch of the science of government, ought to have reference to the greatest happiness of society: this is the general end. »

40

J. BENTHAM [par É. DUMONT], Tactique des Assemblées Législatives…, tome 1, p. 61.

41 P. J. ASCHENBRENNER, British and American Foundings of Parliamentary…, p. 121; J. BENTHAM

[par É. DUMONT], Tactique des Assemblées Législatives…, tome 1, p. 3.

42

Michel MORIN, « Portalis c. Bentham? Les objectifs assignés à la codification du droit civil et du droit pénal en France, en Angleterre et au Canada », dans La législation en question. Mémoires du concours

Perspectives juridiques 1999, Ottawa, Commission du droit du Canada, 2000, p. 157.

(27)

13

Enfin, il y a l’approche du contexte social et politique du juriste et historien autrichien Josef Redlich. Avec The Procedure of the House of Commons, a Study of its History and

Present Form (publié en allemand en 1905 et traduit en anglais en 1908), Redlich tisse

des liens étroits entre le parlementarisme britannique et les facteurs environnementaux dans laquelle la pratique évolue44 :

Many features of English parliamentary procedure which have come to be regarded as of the essence of parliamentary government, that is to say, of the system of conducting public affairs by free discussion among representatives of the nation, are in reality accidents due to the course of its history45.

Dans le chapitre IV, qui a pour objet « The Order of Business and the Development of the System of Party Government (1688-1832) », Redlich note que la période allant de la Révolution glorieuse au Reform Act est celle où le Règlement des Communes se fixe dans sa pratique. Le XVIIe siècle lui apparaît comme étant celui de la « procedure of an opposition »; il note que les luttes séculaires entre les prérogatives de la Couronne et les privilèges du Parlement se reflètent encore dans la procédure du XVIIIe siècle (et dans l’esprit du Lex Parliamentaria faut-il ajouter). « The adherence to the historic order of business » : voilà comment Redlich dépeint le caractère fondamental de la procédure parlementaire d’Ancien régime.

L’auteur propose l’année 1806 comme point de bascule de la pratique46

. À ce moment, le Parlement adopte la coutume d’accorder préséance, une ou deux journées par semaine, à l’ordre du jour du gouvernement. On voit poindre le fonctionnement du parlementarisme sous l’État libéral moderne dans lequel la séparation souple des pouvoirs législatif et exécutif a pour effet de laisser le contrôle des affaires législatives à l’initiative de l’exécutif. Le jumelage du principe du gouvernement responsable à l’esprit de parti explique ensuite comment, au XIXe siècle, l’exécutif en vient à domestiquer le pouvoir législatif.

44 Josef REDLICH, The Procedure of the House of Commons, a Study of its History and Present Form,

London, Constable, 1908, 3 vol.

45 Ibid., p. 49.

46 P. JUPP, The Governing of Britain, 1688-1848…, p. 214. Jupp propose plutôt l’année 1811 avec

(28)

14

Au surplus, Redlich fait remarquer que les travaux législatifs de Westminster sont d’une ampleur relativement modeste jusqu’au tournant du XIXe

siècle47. De sorte qu’avant le Reform Act de 1832, les usages, les traditions et la pratique suffisent au déroulement des travaux parlementaires48.

Les travaux de Sheila Lambert, qui s’intéresse au Parlement de Westminster au XVIIIe

siècle, s’inscrivent en continuité avec ceux de Redlich. En 1971, avec Bills and Acts :

Legislative Procedure in Eighteenth-Century England, Lambert montre que les

modifications fonctionnelles de l’environnement organisationnel, comme la charge de travail, comptent parmi les principaux moteurs de la transformation de la pratique parlementaire49. Pour elle, l’augmentation du nombre de projets de loi privés étudiés au Parlement de Londres est ce qui participe à modifier la procédure parlementaire à la fin du XVIIIe siècle. Lambert montre clairement qu’avant le Reform Act de 1832, les usages, les traditions et la pratique de même que les auteurs (la doctrine) suffisent à assurer le bon déroulement des travaux parlementaires. L’historienne britannique démontre, de manière convaincante, qu’en Grande-Bretagne, la fixation de la procédure moderne appartient au XIXe siècle.

Aux États-Unis, d’autres cadres théoriques ont été proposés par Peverill Squire pour comprendre la source de l’évolution de la pratique parlementaire dans les assemblées coloniales britanniques nord-américaines50. En 2012, il publie The Evolution of American

Legislatures Colonies, Territories, and States, 1619-200951. Le politologue s’appuie d’abord sur la conclusion du premier chapitre de la thèse de Sanford William Peterson

47 Ibid., p. 66.

48 H. T. DICKINSON, « GEORGE III and Parliament », Parliamentary History, vol. 30, 2011, p. 396.

Dickinson note que les travaux du Parlement triplent de 1760 à 1801.

49

Sheila LAMBERT, Bills and Acts : Legislative Procedure in Eighteenth-Century England, Cambridge, University Press, 1971, 246 p.

50 Peverill SQUIRE, « The Evolution of American Colonial Assemblies as Legislative Organizations »,

Congress & the Presidency, vol. 32, 2005, p. 110.

51

Peverill SQUIRE, The Evolution of American Legislatures Colonies, Territories, and States, 1619-2009, Ann Arbor, University of Michigan Press, 2012, 440 p.; Peverill SQUIRE, « Quorum Exploitation in the American Legislative Experience », Studies in American Political Development, vol. 27, 2013, p. 142-164; Peverill SQUIRE, « The Evolution of American Colonial Assemblies as Legislative Organizations »,

Congress & the Presidency, vol. 32, 2005, p. 109-131; Peverill SQUIRE, The Rise of the Representative: Lawmakers and Constituents in Colonial America, Ann Arbor, University of Michigan Press, 2017, 326.

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15

intitulée The Genesis and Development of Parliamentary Procedure in Colonial America,

1609-180152. Peterson, comme Redlich, remarque que les règles des législatures coloniales ont évolué au même titre que les règles de procédure du Parlement de Westminster, c’est-à-dire pour répondre à des situations et des événements parlementaires spécifiques53. Squire se trouve aussi à poursuivre les recherches d’Alison G. Olson dans son article « Eighteenth-Century Colonial Legistures and Their Constituents »54. Celle-ci fait ce premier constat: « The loose organization, informal procedure, and lax approach to law making that had characterized legislatures at the beginning of the [eighteenth] century gradually gave way to tighter organization, [and] better managed debates55. »

L’influence du contexte social et politique est ce qui ressort des recherches de Squire. Comme le soutiennent Redlich et Lambert, Squire tend à prouver que les modifications de l’environnement organisationnel, telles que la charge de travail, sont à l’origine de l’évolution de la pratique parlementaire56. L’organisation législative des colonies royales s’explique aussi par une approche constitutionnelle : Squire relate que la structure des législatures coloniales a d’abord été modelée sur celle du Parlement de Westminster et qu’elles ont par la suite développé leurs propres coutumes parlementaires57.

52 Sanford William PETERSON, The Genesis and Development of Parliamentary Procedure in Colonial

America, 1609-1801, Thèse (Ph. D.), Indiana University, 1983, 367 p. Dans sa conclusion, cet auteur refuse

de considérer que les traditions parlementaires britanniques aient pu être transposées dans les premières colonies nord-américaines, ce qui ne transparaît pas toujours cependant dans sa propre démonstration. « Parliamentary practices did not come to the colonies by some vague osmosis from England, nor were they transplanted directly by England. The development of the rules of order in colonial legislative assemblies was much more complicated than a simple fiat from the monarch or Parliament indicating that the colonies should subscribe to and follow certain rules of order or parliamentary theory. This complexity, I believe, gave America’s colonial legislatures their ordinariness. I believe that the various colonial legislatures were inhabited by very ordinary people who reacted to circumstances and their environment. »

53

Ibid., p. 29.

54 Alison G. OLSON, « Eighteenth-Century Colonial Legistures and Their Constituents », The Journal of

American History, vol. 79, no 2 (1992), p. 543-567.

55 Olson, cité par Squire. P. SQUIRE, « The Evolution of American Colonial Assemblies as Legislative

Organizations… », p. 117.

56 P. SQUIRE, The Evolution of American Legislatures…, p. 6; P. SQUIRE, « The Evolution of American

Colonial Assemblies as Legislative Organizations… », p. 110 et 121.

57

« Custom results from, and is based on, the institutional memory of the actors involved, and is usually preserved through rituals that encode the behavior implied by the customary rules. Invariably a political institution is defined by a combination of written rules and unwritten customs. » Donald S. LUTZ, « The Colonial and Early State Legislative Process » dans Kenneth R BOWLING and Donald R KENNON (dir.),

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16

Squire propose deux autres concepts afin d’expliquer le développement d’une procédure parlementaire plus sophistiquée. Premièrement, il y a le concept du « membership size » où la présence d’un plus grand nombre de législateurs dans une enceinte peut expliquer la complexité organisationnelle et l’élaboration de règles plus élaborées pour faciliter la gestion d’assemblées plus grandes58.

Deuxièmement, Squire emploie la notion de « membership stability » pour décrire les possibles liens de causalité entre la longueur des mandats des députés des colonies royales américaines et la modernisation de la procédure parlementaire59. Car la longévité des effectifs compte parmi les hypothèses expliquant que ces assemblées aient pu se transformer pour devenir des organisations plus complexes.

Les divers cadres théoriques d’Hatsell, de May, de Bentham, de Redlich, de Brun, de Lambert et de Squire ont été mis à l’épreuve durant l’analyse des procès-verbaux du Conseil de Québec et du Conseil législatif de la Province de Québec. Comme O’Brien, je soutiens que l’évolution de la pratique parlementaire, avant 1791, s’abreuve tout à la fois de l’approche constitutionnelle, de l’approche objectivée et de l’approche du

contexte social et politique60. Il faut inscrire résolument la pratique parlementaire du Conseil de Québec et du Conseil législatif de la Province de Québec dans ses carcans constitutionnels d’Ancien régime (Hatsell et May)61

, dans la volonté de ses acteurs politiques d’améliorer leur pratique parlementaire (Bentham) et prendre en compte le contexte socio-politique en mouvement (Redlich). Chacune de ces orientations théoriques est employée, selon les différentes perspectives d’analyse annoncées dans cette thèse.

Or, ce qui transcende cette thèse, c’est « cette quête scientifique de la vérité » présentée par Martin Pâquet dans son article « Histoire sociale et histoire politique au Québec:

In Inventing Congress: Origins and Establishment of the First Federal Congress, Athens, Ohio University

Press, 1999, p. 50.

58 P. SQUIRE, The Evolution of American Legislatures…, p. 69. 59 Ibid., p. 70.

60

Peter J. Aschenbrenner montre aussi que des liens peuvent être faits entre les théories de Redlich et de Bentham. P. J. ASCHENBRENNER, British and American Foundings of Parliamentary…, p. 136-140.

61 Donc, les parlements d’Ancien régime et les parlements propres à un État libéral moderne ont, pour

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17

esquisse d’une anthropologie du savoir historien62 ». À la manière d’une enquête, la « rigueur de la preuve » sert de processus de validation de l’hypothèse initiale63. Car, avant de chercher à comprendre l’évolution des pratiques parlementaires, encore faut-il démontrer d’abord qu’il y eut parlementarisme avant l’Acte constitutionnel de 1791. Cette démarche à la fois descriptive (pour prouver l’existence du parlementarisme) et analytique (pour expliquer l’évolution de la pratique parlementaire) s’appuie sur l’interprétation des diverses traces laissées par les législateurs au Conseil de Québec et au Conseil législatif. Des sources qui, par un récit argumentatif, sont mises en relation avec leurs pareils au Parlement du Bas-Canada et au Parlement de Westminster64. C’est donc par la sémiologie du pouvoir législatif qu’il a été possible de remonter aux sources du parlementarisme dans la Province de Québec de 1764 à 179165.

Sources et méthodologie

La base de mon corpus est constituée des procès-verbaux du Conseil de Québec et de ceux du Conseil législatif. Ces archives sont conservées par Bibliothèque et Archives Canada, sous les noms de « Minute books of the Council (1764-1775) » et de « Journals of the Legislative Council (1775-1791) »66. Les originaux de ces documents ont été retracés à la fin des années 1910 « dans les bureaux du gouverneur général et transféré aux Archives publiques67 ». En 1920, un tapuscrit (qui comporte certaines erreurs de transcription) a été réalisé sous la supervision d’Arthur G. Doughty, par les archives

62

Martin PÂQUET, « Histoire sociale et histoire politique au Québec: esquisse d’une anthropologie du savoir historien », Bulletin d’histoire politique, vol. 15, no 3, 2007, p. 84.

63 « La rigueur renvoie alors à la qualité du raisonnement, à la validité du questionnement initial, à la

cohérence de l’argumentation et des preuves, à l’usage du style pour séduire et convaincre. » M. PÂQUET, « Histoire sociale et histoire politique au Québec… », p. 85.

64 Martin PÂQUET et Érick DUCHESNE, « De la complexité de l’événement en histoire. Note de

recherche », Histoire sociale/Social History, vol. 34, no 67, 2001, p. 196.

65 Martin PÂQUET, « Appréhender le problème historique de l’État sous l’approche de la culture politique.

Éléments de réflexion », Revista Anuario Colombiano de Historia Social y de la Cultura, t. 25, 1998, p. 312.

66 Procès-verbaux du Conseil de Québec, 1764-1775. Bibliothèque et archives nationales du Canada.

Councils of the Province of Quebec fonds, Book A, R10808-20-8-E; Book B, R10808-21-X-E, Book C, R10808-22-1-E; Procès-verbaux du Conseil législatif de la Province de Québec, 1775-1791. Bibliothèque et archives nationales du Canada. Journals of the Legislative Council. Journal D, R10808-24-5-E, Journal E, R10808-25-7-E, Journal F, R10808-26-9-E.

67

A. SHORTT et A. G. DOUGHTY (dir.), Documents relatifs à l’histoire constitutionnelle…, vol. 1, p. xii. Auparavant, les seules copies disponibles de ces procès-verbaux du conseil se trouvaient dans la série « Q » et elles étaient indiquées dans les procès-verbaux comme ayant été envoyées du Canada en Angleterre et préservées au Public Record Office.

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18

nationales canadiennes, mais celui-ci n’a jamais été publié. Les originaux ont également été microfilmés en 1951.

Les trois « Minute books » du Conseil de Québec (1764-1775) sont des documents manuscrits, rédigés en anglais, et comptant 1 183 pages. Même chose pour les trois cahiers du « Council Journals » du Conseil législatif (1775-1791) qui compte 1 178 pages.

Au Conseil de Québec, du 13 août 1764 au 23 mars 1775, durant 11 années donc, le « Conseil de Sa Majesté de Québec » orchestre la vie civile des habitants de la Province de Québec. Les affaires législatives et exécutives sont réunies dans les mêmes cahiers.

Au Conseil législatif de la Province de Qubec, du 17 août 1775 au 30 avril 1791, les conseillers législatifs s’affairent à l’étude et l’adoption des ordonnances de la colonie. Durant ces 15 années, les pouvoirs législatifs et exécutifs sont séparés, ce qui a pour effet de distinguer le contenu des procès-verbaux du Conseil législatif de ceux du Conseil de Québec.

Entre 1776 et 1791, les minutes du Conseil exécutif sont enregistrées dans d’autres registres. Ceux-ci ont été consultés en guise de comparaison, mais ils ne constituent pas l’objet central de cette thèse axée autour de la procédure parlementaire.

Les procès-verbaux des corps législatifs de la Province de Québec décrivent et résument les travaux à l’ordre du jour. Il s’agit de comptes rendus officiels dans lesquels, entre autres choses, sont enregistrés les résolutions, les ordres et les projets d’ordonnance adoptés durant les séances du Conseil de Québec et du Conseil législatif. Des copies étaient envoyées à Londres afin que les membres du Conseil du commerce (Board of Trade) et du Secrétariat d’État aux Colonies (Colonial Office) puissent superviser l’administration coloniale68.

68 En lisant sur le sujet, je remarque bien vite que la plupart des historiens n’ont que peu, mal ou pas

(33)

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Ces procès-verbaux été retranscrits par une équipe que j’ai dirigée à la Bibliothèque de l’Assemblée nationale du Québec69. Ces archives seront bientôt versées en ligne sur le site Documents politiques et parlementaires du Québec70. Pour mes analyses, une version préliminaire de cette édition des procès-verbaux du Conseil de Québec et du Conseil législatif de la Province de Québec m’a facilité la tâche. Par exemple, cette retranscription a rendu possible la recherche par mot-clé.

En lisant ces corpus dans leur intégralité, j’ai compilé – dans une grille d’analyse réalisée sur le logiciel Excel et transformée en tableaux sur Word – chacune des étapes liées à l’adoption des ordonnances. En ce qui a trait aux minutes du Conseil de Québec, il a fallu départager ce qui appartenait au pouvoir législatif d’une part et au pouvoir exécutif d’autre part. Pareille compilation a été réalisée avec les Journaux du Conseil législatif où, doit-on préciser, la matière enregistrée concerne presque exclusivement l’étude et l’adoption des ordonnances.

La réalisation de cette grille d’analyse impliquait, au préalable, une fine connaissance de la procédure parlementaire britannique. Certes, il faut tabler sur le fait que mes années passées à reconstituer les débats parlementaires de l’Assemblée législative du Québec ont été une formidable école en matière de procédure. Même chose avec ma participation à la rédaction de la 3e et de la 4e édition de La procédure parlementaire du Québec71. Quant à

législatif de la Province de Québec dans son livre L’esclavage au Canada français, je publie et retranscris un passage des procès-verbaux : Christian BLAIS, « Un document inédit sur l’esclavage au Québec »,

Bulletin de la Bibliothèque de l’Assemblée nationale du Québec, vol. 35, nos 3-4, 2006, p. 11-15. 69

Le microfilm de 1951 a d’abord été numérisé, puis retranscrit et comparé enfin avec le tapuscrit de Doughty.

70 https://www.bibliotheque.assnat.qc.ca/guides/fr/88-documents-politiques-et-parlementaires-du-quebec.

Ces archives n’ont pas été publiées, et ce, contrairement à bien d’autres sources d’histoire politique. On trouve par exemple les Jugements et délibérations du Conseil souverain de la Nouvelle-France de 1663 à 1716, publiés « sous les auspices de la Législature de Québec »; suivi de l’Inventaire des jugements et

délibérations du Conseil supérieur de la Nouvelle-France de 1717 à 1760 réalisé par Pierre-Georges Roy.

Nathalie Villeneuve de Bibliothèque et Archives Canada, en collaboration avec l’Université de Montréal, retranscrit ensuite le Journal de Murray qui couvre le Régime militaire de 1759 à 1764 https://calypso.bib.umontreal.ca/digital/collection/_murray. C’est dire que la période allant de 1663 à 1764 est accessible au plus grand nombre, alors qu’il n’en est rien pour celle située entre 1764 et 1791. Après cette date, tous les Journaux du Parlement du Bas-Canada, de l’Union, du Québec et du Canada sont publiés depuis 1792 jusqu’à nos jours.

71 [Christian BLAIS], « Histoire des institutions politiques et parlementaires du Québec », dans Siegfried

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