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1 2 En zone sub-arctique Projet CLIMIRESIB / ERA.Net RUS Cadre du projet

National Tourbières

III. 1 2 En zone sub-arctique Projet CLIMIRESIB / ERA.Net RUS Cadre du projet

Ces recherches sont prévues pour être menées dans le cadre d’une collaboration que nous mettons en place avec des collègues russes de l’Université de Tomsk et de Yugra en Sibérie occidentale. Elle a pris forme lors des Journées franco-russes des formations supérieures, de la recherche et de l'innovation "Environnement et Développement Durable” organisées à Tomsk en octobre 2009 dans le cadre d’un programme de coopération entre la France (CNRS-INSU) et la Russie (Tomsk, Sibérie).

Un symposium19, prévu en Sibérie en fin juin – début juillet 2011 et dont je suis membre du Comité de Programme, permettra d’asseoir la collaboration via les échanges que nous aurons avec les collaborateurs russes et la visite de ‘Mukhrino Field Station’ dans laquelle nous comptons mener le projet CLIMIRESIB.

CLIMIRESIB ‘Functioning of Siberian mire ecosystems and their responses to climate changes’ est actuellement en cours de rédaction pour être soumis à l’Appel d’offre multilatéral ERA.Net RUS, dans le champs thématique ‘climate change in the artic and subartic regions’. Le projet débuterait en janvier 2012 et s’acheverait en décembre 2013 et regroupe 4 partenaires européens : ISTO (coordinateur) ; ECOS, laboratoire des Systèmes écologiques, EPFL, Lausanne ; University of Poznan (Department of Biogeography and Palaeoecology), Pologne ; Institut fédéral de recherches, WSL, Lausanne et Yugra State University, Khanty-Mansiysk (Sibérie, Russie).

En fait, le projet que nous déposons à cet Appel est un préambule à un futur projet, plus ambitieux et regroupant un consortium plus large, que nous soumettrons à de futurs appels à projets de type ANR, Programme ‘Changement Environnemental Planétaire’ ou Projet EU FP7- ENV ou à d’autres opportunités.

Compte tenu de ses objectifs, CLIMIRESIB s’intègre tout à fait dans les thématiques du GDRI CARWETSIB20 (Coord. B. Dupré, OMP-UMS831, Toulouse et S. Kirpotin, Univ. d’Etat de

Tomsk) qui structure déjà certaines recherches menées entre la Russie et la France sur les questions des changements globaux en Sibérie et en Arctique.

Contexte scientifique et objectifs

Comme annoncé plus haut, les tourbières à sphaignes se trouvent majoritairement dans les zones boréales à sub-boréales de l’hémisphère Nord (90%) et la Russie, à elle seule, en abrite 14% de la surface mondiale. Compte tenu de la forte capacité de ces systèmes à accumuler du C dans leur sol, l’essentiel des stocks se trouve ainsi à ces latitudes. Depuis la dernière période glaciaire, environ 450 Pg de C se seraient en effet accumulés dans ces systèmes (Gorham, 1991) et correspondraient à une masse de tourbe de 5 à 6000 Gt (Lappalainen, 1996).

En raison du bouleversement climatique attendu, particulièrement dans ces zones, il paraît évident que les tourbières sont celles pour lesquelles les contraintes actuelles de décomposition de la MO sont susceptibles de changer, exposant ainsi potentiellement ces vastes stocks de C à une décomposition plus accrue au cours des décennies à venir (Oechel et al., 1995). En effet, la libération du C organique suite au dégel du permafrost induit par le réchauffement climatique attendu constitue un des principaux changements que vont subir les tourbières à ces latitudes. En cela, cet axe de recherche constitue pour nous un enjeu scientifique et environnemental majeur.

19 Third International Field Symposium West Siberian Peatlands and Carbon Cycle: Past and Present

20 L'INSU du CNRS et le MESR, en collaboration avec des partenaires universitaires français et avec des partenaires

équivalents en Russie, ont récemment crée la Maison Franco-Russe à TOMSK (MFRT) pour la recherche, la formation et la diffusion des connaissances sur la Sibérie et l'Arctique. CARWETSIB est un des projets en cours des Centres Franco-Russes de Recherche de la MFRT.

A l’heure actuelle, de grandes incertitudes existent quant à l’estimation des effets combinés de la température, de l’humidité et d’un changement de biodiversité sur les processus biogéochimiques du cycle du C et des nutriments. Un changement pourrait à la fois augmenter ou réduire les émissions de GES (Martikainen, 1996). En effet, si une hausse des précipitations associées à celle des températures devraient être à l’origine d’une augmentation de la fixation du C par l’activité photosynthétique, le maintien, voire l’accentuation, des conditions anoxiques dans le sol devrait être aussi favorable à une production accrue de CH4 (Augustin et al., 1996).

Cela paraît d’autant plus important que (i) les tourbières, même en fonctionnement « naturel », sont des sources importantes de CH4, représentant près de 35% des quantités émises par les

zones humides et (ii) les concentrations de CH4 (GES à fort pouvoir radiatif) dans l’atmosphère

ont plus que doubler au cours des 200 dernières années (Cicerone, Oremland, 1988).

Contrairement aux tourbières tempérées soumises à de fortes pressions anthropiques, celles situées en zones boréales et sub-boréales sont encore pour la plupart non (ou peu) perturbées et sont en cela d’excellents candidats pour conduire une étude de référence sur un système ‘vierge’.

Un axe de recherche prioritaire devrait donc être de connaître précisément dans ces écosystèmes peu impactés par les activités humaines quels processus contrôlant les flux de C et les nutriments sont sensibles aux forçages climatiques, i.e. la température et l’humidité. Pour ce faire, nous nous proposons de simuler ces forçages par l’installation sur le terrain de dispositifs expérimentaux appropriés permettant (i) de rehausser la température de l’air et du sol et (ii) de manipuler le niveau de la nappe d’eau. Cette démarche qui va de l’expérimentation sur le terrain à la modélisation quantitative des processus, devra nous permettre de comprendre les mécanismes qui régissent les cycles biogéochimiques du C et des nutriments et de prédire de manière quantitative les flux de ces éléments sous forçages contrôlés.

Notre action de recherche s’inscrit dans une approche résolument pluridisciplinaire, centrée sur l’étude des modifications des communautés végétales, de la structure et diversité microbienne, des flux de C gazeux (CO2, CH4) et de la dynamique de la MO labile et

récalcitrante, sous l’effet des forçages climatiques ainsi simulés.

CLIMIRESIB se propose d’analyser le type de rétroactions engendrées par les scénarios climatiques simulés sur le fonctionnement (en source ou en puits de C) des tourbières en Sibérie occidentale ; un des objectifs étant de comprendre les effets du dégel du permafrost sur le relargage du CH4 (et le piégeage éventuel du CO2).

A l’instar des recherches menées actuellement dans la tourbière de Frasne (ANR PEATWARM), nous développerons et testerons des protocoles expérimentaux en matière de simulation de facteurs forçants, notamment la température et l’humidité. Parallèlement, un travail de standardisation de ces protocoles sera étroitement mené en collaboration avec les réseaux européens et internationaux concernés (APEX, Alaska ; CLIMANNI, EU ; CEH Carbon Catchments, UK et RéNaTo, France ; Poland-Swiss Research Program). A terme, nous visons de mettre en place un nouveau Système d’Observation des flux de C dans les tourbières de Sibérie occidentale.

La station « Mukhrino Field Station », située dans la Taïga centrale de la Sibérie occidentale, a été choisie pour site d’étude. C’est une chaire labellisée par l’UNESCO « Environmental Dynamics and Climate Change » de l’Université de Yugra (Coord. E. Lapshina et W. Bleuten). La station est déjà équipée de nombreux dispositifs pour le suivi hydrologique et la mesure de GES. Dans le cadre de CLIMIRESIB, nous visons à compléter l’instrumentation notamment par l’installation de dispositifs expérimentaux de forçages climatiques (température et humidité du sol).

III.3. Biodiversité des zones humides et valorisation de ses principes actifs. Projet PRINCIPASOL

III.3.1. Cadre et contexte

Le projet PRINCIPASOL « Principes actifs de la biomasse des zones humides locales » dont j’assure la coordination est un projet collaboratif R&D, labellisé par le pôle de compétitivité DREAM Eau & Milieux. Regroupant des acteurs locaux d’horizons divers, ce projet permet de mutualiser des compétences régionales très complémentaires. En plus de l’ISTO21, le

consortium est constitué d’une équipe de recherche en Sciences Humaines (CEDETE, Université d’Orléans), de deux associations de protection de la nature (LNE et SNE), du Conservatoire du Patrimoine naturel en région Centre, d’un bureau d’études (Géo-Hyd) et de deux industriels du monde de la cosmétique et de la pharmacie (LVMH Recherche, Orléans et Aromatechnologies, Romorantin). Financé par le FEDER et le Conseil général du Loiret, le projet a débuté en janvier 2011 et se clôturera en décembre 2012.

PRINCIPASOL porte sur l’utilisation potentielle et raisonnée de la biodiversité locale des zones humides (ZH) permettant d’avoir accès à des principes actifs innovants dans les domaines de la Cosmétique, de la Pharmacie, voire de l’Agro-alimentaire. Localement, peu d’offres de matières premières dans ces filières sont disponibles alors que notre territoire recèle de richesses floristiques non négligeables, notamment dans les ZH (étangs et tourbières de Sologne, milieux humides associés à la Loire et au Loiret) qui bénéficient à ce titre d’une reconnaissance nationale et européenne e.g. NATURA 2000. En outre, l’adaptation des comportements liée aux changements climatiques incite fortement les industriels inscrits dans une démarche de développement durable à réduire leur impact de C. Aussi, utiliser le potentiel de la biodiversité locale relève t-il de cette adaptation. In fine, PRINCIPASOL valorisera la biodiversité du territoire tout en contribuant à sa protection dans le cadre d'une gestion durable des espaces naturels, et intègre ainsi dans sa démarche les trois éléments du triptyque « Protection – Innovation – Valorisation ».

III.3.2. Objectifs

Les objectifs de PRINCIPASOL résident dans la recherche et l’identification de substances actives nouvelles dans les plantes, mais aussi dans les produits de leurs transformations après incorporation dans les milieux naturels (sols, tourbes, sédiments). L’ISTO qui possède l’expertise dans ce domaine de recherche a déjà mis en évidence dans de nombreux milieux naturels des substances diagénétiques dont la structure moléculaire est inédite. Au sein de PRINCIPASOL, il s’agit de compléter cette diagnose par la mise en évidence d’activités potentielles de ces substances.

PRINCIPASOL permettra in fine de mettre en lumière des plantes et des molécules issues de ZH locales d’intérêt pour des applications industrielles tout en étant conforme aux exigences du développement durable (dimensions environnementale, sociétale et économique). En cas de succès, PRINCIPASOL sera poursuivi à travers un projet à dimension « industrielle » qui devra intégrer un transfert de technologie à mettre localement en place en termes de valorisation industrielle pour la Cosmétique mais aussi pour les autres domaines d’activités (Pharmacie, Agro-alimentaire, Eco-construction), en gardant la même démarche ethnobotanique.

III.3.3. Adéquation de mes thématiques de recherche avec la problématique de PRINCIPASOL

Outre les aspects de valorisation des substances actives, ma motivation pour PRINCIPASOL réside, pour les aspects fondamentaux, dans l’étude détaillée des processus de formation du

21 Personnel ISTO impliqué : J. Jacob (CR, CNRS), C. Le-Milbeau (IR, Université), N. Lottier (T, CNRS), R. Boscardin

sphagnane, un polysaccharide de type pectine, dérivant des sphaignes, connu pour générer des litières difficilement décomposables (cf. § Avant propos).

Les sphaignes sont capables en effet de créer et de maintenir des conditions favorables à leur propre survie en acidifiant le milieu et en séquestrant les éléments nutritifs nécessaires aux autres plantes et aux microorganismes. Ces propriétés sont assurées principalement par le sphagnane (Painter, 1995) dont le groupement carboxylique du 5 keto-mannuronic acid, ou 5KMA (cf. Figure ci-dessous) est à l’origine de la grande Capacité d’Echange Cationique (CEC) de ce polymère. L’échange d’ions produit la libération d’ions H+, renforçant ainsi l’acidification du milieu, la raréfaction d’oligo-éléments (Zn ou Cu) et l’inactivation des exo-enzymes. En milieu acide, le groupement carbonyl de ce sucre est capable de réagir avec le groupement amine des acides aminés ou avec l’ammoniaque. Les divers produits de cette réaction polymérisent ensuite pour produire des substances humiques difficilement dégradables (réaction de Maillard). L’azote, indispensable pour les plantes et les microorganismes se trouve ainsi séquestré de manière pérenne.

Figure 1. Les deux formes du 5 kéto mannuronic acid ou 5KMA (Painter, 1998)

Dans le cas de molécules azotées d’origine animale, la réaction de ces molécules avec le sphagnane et ses produits de dégradation entraîne le tannage et assure ainsi la conservation des corps et des aliments (Børsheim et al, 2001). De plus, les capacités d’absorption des sphaignes et bactériostatiques du sphagnane ont également conduit avec succès à l’utilisation des sphaignes comme pansement en pharmacologie (Painter, 2003).

Les propriétés du sphagnane, sont fortement liées aux conditions environnementales dans lesquels il est produit (Stalheim et al., 2009). L’originalité de notre approche dans le cadre de Principasol sera d’identifier les facteurs biotiques et abiotiques favorables à la production du sphagnane et qui contrôlent ses principes actifs bien avérés.

Ainsi, l'étude des interactions sphaignes-milieu-sphagnane étudiées dans le cadre de Principassol revêt pour moi un intérêt à la fois fondamental et appliqué.

III.3.4. Démarche et sites

Le plan de travail que nous nous proposons d’adopter dans PRINCIPASOL se base sur 3 phases majeurs. La 1ère phase concerne la connaissance des plantes et des écosystèmes

associés : (i) inventaire des plantes des ZH aboutissant à une cartographie sous SIG des habitats et espèces floristiques, (ii) données sociales et territoriales sur l’évolution récente des paysages et des pratiques, (iii) instrumentation de certains sites pour y suivre les paramètres climatiques et environnementaux. La 2ème phase est focalisée sur (i) la caractérisation

moléculaire des bio-géo-ressources (plantes, sols, sédiments) sélectionnés dont le but est de produire des échantillons de référence qui serviront au screening biologique de la phase 3 et (ii) la recherche de nouveaux principes actifs dans les végétaux et sols/sédiments. La 3ème phase

comporte quant à elle les opérations de screening biologique dans le but de déterminer le potentiel d’activité biologique des échantillons sélectionnés avant la phase de développement et de valorisation industrielle.

Les 7 sites retenus pour le projet sont emblématiques des zones humides en région Centre. Ce sont des étangs, des tourbières (dont la tourbière de la Guette), des landes et prairies humides en Sologne ou associés à la Loire et au Loiret. Choisis selon leur intérêt botanique et leur degré de vulnérabilité, ces sites abritent des espèces rares et menacées, des habitats d’intérêt patrimonial, mais aussi, pour certains sites, des espèces envahissantes mettant en péril la pérennité du milieu.