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7. L ES GRANDS DÉFIS : L A SITUATION DES JEUNES (D ÉFI 3)

7.2 Le point de vue des jeunes

Rapport au quartier

Les jeunes avec qui nous avons échangé considèrent presque unanimement que le Nord-Est est un bon quartier et qu'on s'y sent à l'aise. Ces jeunes expriment un fort lien d’appartenance au quartier. Une minorité d'entre eux n'habite plus le quartier, mais ils y ont grandi et c'est pourquoi ils disent y revenir presque quotidiennement.

Plusieurs parmi ceux qui sont nés dans le quartier, s'y sentent bien et ne voient pas de quelle façon on pourrait y apporter des changements ou l’améliorer. D’autres jeunes adultes issus de l’immigration n’ont pas grandi dans le secteur, mais l’ont choisi comme milieu de résidence. Ils considèrent que c'est un bel endroit pour s'établir et vivre. Par exemple, une jeune adulte originaire d’Haïti valorise en ces termes le caractère multiethnique du quartier :

« C'est une belle place à vivre, parce qu'il n’y a pas juste des Haïtiens ici, il y a plein d'autres

races d'immigrants. Je me considère quand même chanceuse d'être une immigrante au Québec, d'appartenir à cette petite partie de Montréal-Nord. »

Sous l’angle de la question de la sécurité, beaucoup de jeunes ne perçoivent pas leur quartier comme étant dangereux ou trop violent. Ils disent y circuler comme ils veulent, en toute aise. Au moment de leur arrivée dans le quartier, certaines personnes se sentaient en insécurité, mais leurs appréhensions se sont dissipées au fil du temps. Plusieurs jeunes femmes rencontrées partagent d’ailleurs ce sentiment de sécurité. Une personne a indiqué qu'il suffit de se mêler de ses affaires, une des stratégies d'adaptation des résidents du quartier (voir chapitre 5). D’après les propos recueillis, la sécurité ne figure pas parmi les préoccupations des jeunes qui vivent dans le secteur. Ce sont les jeunes de secteurs limitrophes qui semblent plus insécurisés par le Nord-Est.

Un autre aspect positif que les jeunes soulignent est le climat de sociabilité et d’entraide entre les habitants du quartier. Il fait bon vivre au Nord-Est, considèrent-ils. Ainsi plusieurs habitants connaissent leurs voisins, socialisent dans les lieux publics et avec les personnes « qui se tiennent dans la rue ». À ce propos, une jeune femme a dit ceci lorsque nous lui avons demandé ce qu'elle préférait du quartier : « J'aime l'accueil des personnes, les personnes s'entraident entre eux. » Dans le même sens, une autre jeune a dit, en parlant de ses amis et des gens du quartier : « On est

toujours ensemble, on est comme des frères, des sœurs. »

Cependant, cette appréciation positive du quartier est pondérée par des préoccupations quant au décrochage scolaire et à la vente de drogue. En effet, beaucoup de jeunes quittent l'école et optent pour le travail. Dans la perception de plusieurs jeunes, ce qu’il y aurait à changer dans le quartier, ce serait justement la présence de gangs de rue et la vente de drogues, car ce sont ces activités qui dérangent. D’autres nous disent que les jeunes ne mettent pas en valeur leurs

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talents, comme en témoignent les mots de ce jeune homme rencontré dans la rue : « Plusieurs

d’entre nous ont beaucoup de talents, mais ne font rien de leur journée »28.

Soutien, espaces et activités

Les jeunes se disent satisfaits de certains services et espaces du quartier qui leur sont spécifiquement destinés. Plusieurs nous ont affirmé que la Maison culturelle et communautaire (MCC) et le parc Henri-Bourassa sont leurs lieux favoris. Une pizzéria sur la rue Pascal est aussi appréciée par plusieurs d'entre eux. Quelques jeunes aiment également les activités organisées dans le quartier, comme la Fête des voisins et les matchs de soccer et trouvent qu'il y en a suffisamment.

Par contre, presque le même nombre de jeunes se plaint de l’insuffisance des espaces et activités qui leur sont consacrés. Des jeunes adultes considèrent qu'il n'y a pas assez de projets et d’activités pour les enfants entre 9 et 12 ans et pour eux-mêmes. Ils disent être souvent obligés de se déplacer à l’extérieur du quartier pour accéder aux activités désirées.

Ils trouvent trop strict l'encadrement dans les lieux destinés aux adolescents et jeunes adultes. La maison de jeunes la plus proche se trouve à l'extérieur du secteur. Idéalement, ils aimeraient avoir une maison de jeunes qui soit située sur les rues Pascal ou Lapierre, tout près de là où ils habitent. Cette proximité leur permettrait de s’y retrouver, d’organiser des activités, de jouer aux dés ou faire du sport. Par ailleurs, quelques jeunes nous ont confié, lors d'une activité extérieure avec eux, que « les jeunes se sentent chassés du parc Tardif, depuis qu'il y a les jardins

communautaires » (voir aussi la section 4.1). Auparavant, c'était un parc où ils aimaient se

retrouver, mais ils ne s'y sentent plus les bienvenus à présent.

En résumé, les perceptions des jeunes en ce qui a trait aux ressources et activités pour jeunes dans le quartier sont partagées : d’une part, ils apprécient les activités et certains espaces qui leur sont destinés; d’autre part, ils aimeraient en avoir davantage et souhaitent que ceux-ci correspondent mieux à leurs attentes.

Un dernier aspect négatif évoqué par les jeunes consiste en le manque de soutien et de modèles positifs. Les problèmes de pauvreté que vivent plusieurs d'entre eux auraient un impact sur leur situation familiale et, parfois, les parents sont absents ou incapables d'offrir le soutien aux enfants. Un jeune déplore le fait que les parents ne motivent pas leurs jeunes et qu'eux-mêmes ne sont pas de bons modèles pour les enfants. Un jeune homme qui a grandi dans le quartier nous a aussi dit que, lorsqu'il était enfant et adolescent, son grand frère lui parlait beaucoup, et que cette

voix est restée dans sa tête, lui évitant de faire des bêtises. Selon lui, la plupart des jeunes du coin n'ont pas ça, donc ils ne pensent qu'à l'argent, donc font des mauvais choix, et personne n'est là pour les guider.

28 Traduction libre du créole au français. Citation originale : «Anpil nan nou gen talan, men. E yo rete la yo pap fè anyen

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La plupart des propos des jeunes qui se plaignent du manque de soutien n’expriment pas de quelle façon ils aimeraient combler ce manque.