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1.6 Le système des peptides natriurétiques

1.6.1 Les voies de signalisation des récepteurs des peptides natriurétiques

Depuis la découverte du NP auriculaire (ANP) en 1981 (82), l’étude des voies de signalisation associées aux récepteurs des NP (NPR) est devenue l’intérêt majeur de nombreux groupes de recherche (83-101). À la suite à une injection intraveineuse d’un homogénat d’oreillettes de rats, il a été démontré que le composé actif contenu dans les oreillettes est un peptide qui abaisse rapidement la TA et promeut les excrétions d’eau et de sodium par un mécanisme dépendant du cGMP (92). La famille des NP des mammifères compte deux autres membres importants, soit les NP de type B (BNP) et de type C (CNP), tous deux identifiés dans le cerveau du porc (96;97). D’autres NP ont par la suite été identifiés. L’urodilatine est une hormone natriurétique produite par les tubules distaux du rein. Elle agit localement et

correspond à une forme tronquée de la pro-hormone ANP (102). La guanyline et l’uroguanyline sont exprimées par l’épithélium intestinal en réponse aux repas salés. Ces deux peptides sont impliqués dans l’absorption d’eau par l’intestin et l’excrétion des électrolytes par les reins (103;104). Un peptide possédant les caractéristiques des NP a été isolé dans les muscles et les os (105;106). L’ostéocrine, ou musculine, est exprimée par le ostéoblastes durant le développement néonatal et le remodelage des os (107). Les connaissances sur ce peptide sont encore fragmentaires. Nous examinerons plus profondément les particularités de l’ANP, du BNP et du CNP. Ces trois peptides partagent une structure similaire constituée d’un anneau de 17 acides aminés formé par un pont disulfure. Chez l’humain, la forme active de l’ANP est un peptide composé de 28 acides aminés alors que le BNP et le CNP comptent respectivement 32 et 22 acides aminés. L’ANP est surtout produit dans les oreillettes et s’accumule dans des granules sous la forme de pro-ANP, un peptide de 126 acides aminés. La sécrétion du pro-ANP est stimulée par l’étirement de l’oreillette causé par un surplus de volume sanguin auriculaire (88). Plusieurs hormones telles que l’endothéline, l’ANG II, l’AVP et l’ocytocine stimulent également la sécrétion de pro-ANP (108-111). La corin, une protéase sérine transmembranaire agissant à titre d’enzyme de conversion, clive le pro-ANP afin de relâcher l’ANP sous sa forme active (88;101). L’ANP circulant agit subséquemment sur le cœur, les reins, les poumons, le muscle lisse vasculaire ainsi que le tissu adipeux. Le BNP est un peptide long de 134 acides aminés qui agit sur les mêmes organes que l’ANP et est également produit par le cœur sous la forme pré-pro-BNP. Il est secrété lors de l’étirement des parois ventriculaires et le facteur de transcription GATA-4 en régule la production. (91;99). En comparaison à l’ANP et au BNP, le CNP agit de manière

autocrine/paracrine. Le CNP est sécrété par l’endothélium vasculaire afin de contrôler le tonus vasculaire ainsi que la croissance des cellules endothéliales (87). Chez l’humain, les gènes de l’anp et du bnp sont situés sur le chromosome 1 au même locus 1p36.3 alors que le gène du cnp est sur le chromosome 2 entre 2q24 et la fin du segment 2q. Chez la souris, les gènes de l’anp et du bnp sont sur le chromosome 4 (4E2) et le gène du cnp est situé sur le chromosome 1 au locus 1D. Les gènes anp, bnp et cnp du rat sont respectivement sur les chromosomes 5q35, 5q36 et 9q35. La structure similaire des NP suggère l’existence d’un gène commun ancestral. Il a été proposé que le gène du cnp aurait engendré les gènes de l’anp et du bnp par duplication (98).

La famille des NPR comprend trois membres, le NPR1 ou NPRA, NPR2 ou NPRB et NPR3 ou NPRC. NPR1 et NPR2 possèdent l’activité enzymatique nécessaire pour transmettre le signal provenant des NP. Aussi nommés guanylates cyclases A et B (GCA et GCB), ces récepteurs sont structurellement très semblables et s’assemblent en homodimère indépendamment de la liaison de l’hormone (112). Chaque monomère est composé d’un large domaine extracellulaire liant le NP, un domaine transmembranaire unique, un domaine d’homologie kinase (KHD) phosphorylé, un domaine de dimérisation de type « coil-coil » et un domaine catalytique GC à l’extrémité intracellulaire carboxy-terminale (89;90;95;100). La désignation KHD se rapporte à l’homologie avec un domaine kinase et non pas à la possibilité que cette section du NPR ait l’activité. Une étude récente a montré que la phosphorylation de 6 résidus sérines et thréonines du KHD est essentielle à l’activation du récepteur (113). Cependant, aucune étude n’a identifié la protéine kinase impliquée dans la

phosphorylation du KHD (113). Le domaine catalytique des GC membranaires est homologue en séquence et en structure aux sGC tel que décrit dans la section 1.4 (114). Bien que NPR1/GCA puisse lier tous les NP, il possède une affinité supérieure pour l’ANP et le BNP. NPR2/GCB est toutefois activé préférentiellement par le CNP (86). NPRC est un récepteur sans activité GC et contient un très court domaine intracellulaire de 37 acides aminés (94). Originalement décrit comme étant un récepteur de clairance des NP, d’autres études ont démontré son association au système de signalisation adénylyl cyclase/cAMP par une protéine G inhibitrice (83;84;93). La figure 1.3 schématise la structure des NPR et les NP reconnus.

Les récepteurs des peptides natriurétiques

Figure 1.3 Les récepteurs NPR1/GCA et NPR2/GCB ont la même topologie. Ils sont composés d’un domaine extracellulaire liant les NP, un domaine transmembranaire, un domaine d’homologie kinase, un domaine de dimérisation et un domaine catalytique guanylyl cyclase. NPR1/GCA lie préférentiellement l’ANP et le BNP tandis que NPR2/GCB est activé par le CNP. Le récepteur NPRC lie les trois NP et ne possède pas de domaine d’activité catalytique mais une courte section intracellulaire.

Les activités de NPR1/GCA et de NPR2/GCB sont hautement contrôlées. À l’état basal, la conversion de GTP en GMP par le domaine GC est faible. La liaison d’un NP au domaine extracellulaire d’un récepteur homodimérisé provoque son activation en induisant un changement conformationnel du récepteur permettant à l’ATP de lier le KHD et d’activer le domaine catalytique GC. La GC active est composée des deux domaines du récepteur homodimérisé provoquant la production de cGMP. Ce second messager transmet ultimement le signal du NP en ciblant plusieurs protéines dont la protéine kinase G (PKG), les canaux ioniques ainsi que les phosphodiestérases (PDE) (85). Les cibles du cGMP seront discutées ultérieurement.