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Chapitre I : Revue Bibliographique

3. La fermentation sombre des déchets ménagers et assimilés

3.3. Voies métaboliques liées à l’hydrogène

Voies productrices d’hydrogène

Plusieurs voies métaboliques sont productrices d’hydrogène ; ce sont notamment les voies coproductrices d’acétate, de butyrate et de formate (Figure 10).

Figure 10 : Voies métaboliques pour la production d'hydrogène par fermentation sombre[45]

D’après cette figure, lors de la dégradation du glucose, le pyruvate est tout d’abord produit via la voie d’Embden-Meyerhoff-Parnas (ou glycolyse). Lors de cette transformation des éléments tels que l’adénosine triphosphate (ATP) et la forme réduite de la nicotinamide adénine nucléotide (NADH) sont produits. Ensuite, une réaction intermédiaire produisant de

53 l’Acétyl-coenzyme A (Acétyl-CoA) à partir de pyruvate peut être réalisée. Lors de cette réaction, deux voies principales sont capables de catalyser la production d’hydrogène:

La voie formate :

La réaction du pyruvate pour former de l’Acétyl-CoA produit également du formate grâce à

l’enzyme pyruvate formate lyase. Le formate peut ensuite être converti en hydrogène et en

CO2 par le complexe enzymatique formate hydrogenlyase que possède notamment les

bactéries de type Escherichia coli (Equation 3).

+ ( = − . . ) (Equation 3)

La voie liée à la réoxydation des éléments réducteurs de la cellule (ferrédoxine et

NADH) :

D’une manière plus générale, le pyruvate peut être transformé en acétyl-CoA en réduisant la ferrédoxine (Equation 4).

+ + é (Equation 4)

L’enzyme hydrogénase réoxyde alors l’excès de ferrédoxine réduite tout en produisant de l’hydrogène (Equation 5).

+ (Equation 5)

Les deux co-produits majeurs associés à la production d’hydrogène sont alors l’acétate et le butyrate. Ces deux voies métaboliques sont réalisées par de nombreuses espèces de

Clostridium. sp ou d’Enterobacteriacae [45]. La voie acétate entraine un rendement de 4 moles d’hydrogène par mole d’hexose (Equation 6) et la voie butyrate conduit à un rendement en hydrogène de 2 moles par mole d’hexose (Equation 7)[58].

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+ é + + ( = − . ) (Equation 6)

+ + ( = − . ) (Equation 7)

Une autre voie permettant la production d’hydrogène à partir du glucose via la production d’acétate et d’éthanol est également possible mais reste sujette à discussion car elle a été peu observée. Cette voie permet de produire deux moles d’hydrogène par mole de glucose selon l’équation 8 [59].

+ + é + + (∆ = − . )(Equation

8)

Enfin, lors de l’étape d’acétogenèse, certaines voies de production d’acétate sont obligatoirement productrices d’hydrogène, notamment lors la dégradation du lactate, de l’éthanol, du butyrate et du propionate (Tableau 4). Cependant ces réactions sont thermodynamiquement défavorables ou peu favorables et requièrent une consommation immédiates des sous-produits de réactions, dont l’hydrogène.

Tableau 4 : Réactions réalisables lors de l'étape d'acétogénèse

Réaction ΔG0’ (kJ/mol)

+ 2 é + 2 + + -3,9

+ é + 2 + +9,6

+ 2 → 2 é + 2 + +48,1

+ 2 é + 3 + +76,1

Cependant, en utilisant des cultures mixtes (mélange d’espèces bactériennes), le rendement en hydrogène peut facilement diminuer à cause de la présence de microorganismes consommateurs d’hydrogène, présents dans de nombreux milieux anaérobies [60]. En effet, les études portant sur la production d’hydrogène par fermentation sombre utilisent des inoculas variés tels que des digestats de boues provenant du traitement des eaux usées [61], des effluents de méthaniseurs [62], des composts de déchets d’élevage ou municipaux [63] ou encore des lixiviats de décharge [64]. Ces sources microbiennes présentent une grande diversité et, contrairement aux cultures pures, sont peu coûteuses et plus faciles d’utilisation

55 mais présentent des voies alternatives de fermentation, telles que décrites ci-dessous [65,66].

Les voies consommatrices d’hydrogène

En cultures mixtes, certains microorganismes possèdent des voies métaboliques qui peuvent consommer directement l’hydrogène ou entrer en compétition pour le substrat avec les bactéries productrices d’hydrogène (Figure 10). L’hydrogène est non seulement une forme de stockage énergétique pour les bactéries mais aussi un très bon vecteur énergétique pour le transfert d’énergie entre espèces. De plus, les voies consommatrices d’hydrogène sont en règle générale thermodynamiquement très favorables, ce qui rend propice sa reconsommation. Notamment, certaines bactéries appartenant à la famille des

Clostridiaceae (Clostridium aceticum ou Clostridium thermoceticum) produisent de l’acétate à partir d’hydrogène par homoacétogénèse selon l’équation suivante (Equation 9):

+ é + ( = − . ) (Equation 9)

Par ailleurs, la méthanogénèse peut consommer directement l’hydrogène pour produire du

méthane (Equation 10). La méthanogénèse est effectuée par les Archaebactéries

hydrogénotrophes qui est thermodynamiquement très favorable:

+ + ( = − . ) (Equation 10)

D’autres voies métaboliques consommatrices d’hydrogène ont été décrites, comme la voie formatrice de propionate (Equation 11) ou de caproate à partir de butyrate et d’acétate (Equation 12 et 13)

+ + ( = − . ) (Equation 11)

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+ + + ( = − . ) (Equation 13)

Au-delà de la consommation directe d’hydrogène, un autre phénomène peut réduire de manière indirecte la production d’hydrogène, du fait de la consommation du substrat par des voies non productrices d’hydrogène. En effet, la production de certains métabolites passe par l’utilisation de la nicotinamide adénine dinucléotide sous sa forme réduite (NADH). Cet élément réducteur est soit réoxydé via les hydrogénases (ou le bilan de production d’hydrogène est positif), soit réoxydé par des voies annexes (succinate, valérate, caproate, 2,3-butanediol, 1,3-propanediol) où le bilan de production d’hydrogène est nul [67]. Ces différentes voies ont ainsi pour conséquence de concurrencer la production d’hydrogène à partir d’un même substrat.

Le lactate est également un métabolite intermédiaire dont les voies réactionnelles utilisées pour sa production ne sont pas productrices d’hydrogène : la production de lactate est cependant régulièrement observée lors de la fermentation sombre [68]. Ce métabolite est essentiellement produit par les lactobacilles regroupant les membres des genres

Lactobacillus, Leuconostoc ou encore Lactococcus. En plus du fait que le lactate utilise une voie de production concurrente à la production d’hydrogène, les espèces telles que

Lactobacillus ont tendance à sécréter des bactériocines dans le milieu qui peuvent être stressantes pour les clostridies et engendrer une modification des voies réactionnelles avec une diminution de la production d’hydrogène [69]. Ce phénomène est étroitement lié au phénomène de solvantogenèse qui est caractérisée par une forte production d’Acétone, Butanol et Ethanol (fermentation ABE), suite à une accumulation des sous-produits de fermentation (acétate, butyrate à 60 mM) ou une sécrétion de bactériocines [68,73]. Néanmoins, les bactéries lactiques sont non-sporulantes, mais pour certaines thermo-résistantes, et peuvent être globalement éliminées en réalisant un traitement thermique de l’inoculum [69].

L’objectif principal lors de l’optimisation d’un procédé de fermentation sombre est donc de favoriser le développement des microorganismes producteurs d’hydrogène tout en limitant

57 l’impact négatif de certains paramètres sur le rendement final en hydrogène (inhibiteurs, reconsommation…).