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1.3 Méthode d’élaboration des CMT 15

1.3.2 La voie liquide

1.3.2.1 Description de la méthode

La voie liquide se révèle être une méthode très simple et peu coûteuse pour élaborer des matériaux composites puisqu'elle se rapproche des techniques de la fonderie. Elle autorise notamment une grande liberté pour la fabrication de pièces complexes à condition que le renfort puisse être facilement tissé pour fabriquer une préforme dans laquelle il ne reste plus

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qu'à faire couler la matrice à l'état liquide. Cependant, cette méthode est confrontée à deux problèmes majeurs, la mouillabilité médiocre de la plupart des renforts céramiques par de nombreux métaux à l'état liquide, qui peut être atténuée par l’application d’une pression extérieure lors de la coulée (squeeze casting), et la très forte réactivité des métaux liquides qui entraîne une dégradation catastrophique du renfort. Bien que cette méthode soit réservée à des matrices à bas point de fusion telles que l'aluminium, quelques études portent sur les CMT. Leur principe est de limiter au maximum le temps de contact entre le titane liquide et le renfort en disposant d’un système de chauffage très puissant tels que les chauffages à Infra Rouge ou à induction beaucoup plus rapides que le chauffage résistif (figure 1.9) [34].

FIG. 1.9 - Représentation des cycles thermiques en fonction du système de chauffage a- chauffage Infra Rouge b- chauffage par induction c- chauffage résistif

Au milieu des années 80, Toloui [35] a essayé d’élaborer un matériau composite à matrice Ti-Cu renforcée par des fibres de carbone en utilisant la voie liquide. La diminution des temps d’élaboration grâce à l’utilisation d’un chauffage par IR et l’ajout de cuivre conduisant à des températures de fusion de 1097°C pour un alliage Ti35Cu et 1277°C pour Ti25Cu (c’est-à-dire des températures très inférieures à celle du titane) permettaient d’espérer une limitation des interactions entre les différents constituants. Toutefois, malgré des temps de maintien de ces alliages à l’état liquide relativement courts (de 2 à 12 minutes), Toloui a observé, à l’interface fibre/matrice, des zones réactionnelles inacceptables de plusieurs micromètres, à l’origine d’une diminution catastrophique des propriétés mécaniques du matériau.

Cet échec a entraîné un abandon de la voie liquide associée au titane pendant plusieurs années jusqu’à ce que Warrier et Lin [36][37][34][38][39][40] s’y intéressent de nouveau en 1992.

Tem p ératu re (°C ) Temps (seconde) 1600 1200 800 400 6000 12000 18000 a c 0 b 0

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Leurs études portaient sur les deux couples Ti/Cf et Ti/SiCf. Leur raisonnement a été identique à celui de Toloui : pour limiter les interactions entre le renfort et la matrice, ils ont réussi à réduire le temps d’élaboration du matériau à une durée inférieure à 2 minutes grâce à un procédé utilisant le chauffage infrarouge capable d’atteindre des vitesses de chauffage de 200°C/s (figure 1.10).

FIG. 1.10 - Représentation du procédé de fabrication de matériau composite grâce au chauffage IR

Ainsi, les fibres ne restent en contact avec le titane liquide que pendant quelques secondes, ce qui se traduit par des zones réactionnelles relativement limitées de l’ordre de 0.5 à 1 µm pour les composites Ti/Cf et de l’ordre de 1-2 µm pour les composites Ti/SiCf. Les zones de réaction peuvent être considérées de faible épaisseur compte tenu des difficultés de refroidissement du composite dès que sa température s’abaisse en dessous de la solidification du titane liquide. Il n’en reste pas moins qu’une épaisseur de 0.5 à 1 µm de zone interfaciale fragile de carbure de titane est inacceptable pour des fibres de carbone de 7 µm de diamètre. L’effet d’entaille associé à la rupture prématurée d’une gaine de carbure de 1 µm d’épaisseur est, en effet, pour des fibres de 7 µm de diamètre, 20 fois plus important que pour des filaments de 140 µm de diamètre.

Constatant que la mise au point d’un procédé rapide de couplage n’induisait pour des renforts filamentaires que des zones interfaciales fragiles d’épaisseur acceptable, le laboratoire EPM (Elaboration par Procédés Magnétiques) de Grenoble propose en 1997 de coupler des filaments de SiC à des matrices base titane par Enduction à Grande Vitesse (EGV), c’est-à-dire par défilement des filaments dans l’alliage liquide [41]. Après consolidation, les matériaux composites obtenus présentent des propriétés proches de celles des composites

matrice

préforme fibreuse

composite

creuset Infra Rougefour

matrice préforme fibreuse matrice préforme fibreuse

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1.3.2.2 Discussion

Les procédés d’élaboration de matériaux composites par voie liquide sont des procédés très performants à condition de pouvoir limiter les réactions entre la matrice et le renfort au moment de l’imprégnation de la préforme fibreuse par le métal liquide, surtout s’il s’agit du titane. Les deux moyens de chauffage qui ont été testés pour l’élaboration de matériaux composites Ti/SiC et Ti/C sont de mise en œuvre simple, rapide et économique, ils ne nécessitent pas de travailler sous des vides d’excellente qualité, ni d’appliquer une pression extérieure. En revanche, même si les deux méthodes qui ont été testées sont plus rapides que les dispositifs à chauffage résistif, elles ne permettent pas d’élaborer des CMT exempts de zones réactionnelles fibre/matrice d’épaisseur inacceptable pour des fibres de faible diamètre. De plus, il sera difficile d’améliorer ces méthodes et de diminuer les zones réactionnelles, notamment entre le titane et les fibres de carbone, car ces voies d’élaboration sont toujours confrontées aux vitesses de refroidissement de la matrice, c’est-à-dire à la conductivité thermique qui est particulièrement faible dans le cas du titane par rapport aux autres métaux.

Par conséquent, et même si le procédé EGV est incontestablement prometteur, il n’en reste pas moins que la voie liquide est inadaptée à l’incorporation de fibres de petit diamètre dans un alliage base titane.